Full text of "Romania"
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ROMANIA
RECUEIL 1 RIMESTRIEL
Diib Langues et dus i.rntRATUREs romanes
PUBUi-: PAU
Paul MEYER et Gaston PARIS
Pur irnieiibrcf des iinccsAUfS
Le* dh f k*s iaiK e le;* anirs.
Tome XXXn
PARIS (r)
LIBRAUUH ÉMILH BOUiLLON, b'DITEUR
CONDITIONS D\4BONKï:MhX r A LA ROMANU
ï :.' font que pour T j nnéc tnif^rc et ^ p.irtîr Je i;m.îcî
L'jiiPix HOC toi* îcrwiTticc se vcrn2, pmc i Rtm»
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ROMANIA
RECUEIL TRIMESTRIEL
CONSACRÉ A l'Étude
DES LANGUES ET DES LITTÉRATURES ROMANES
PUBLIÉ PAR
Paul MEYER et Gaston PARIS
Pur remenbrer des ancessurs
Les diz e les faiz e les murs.
Wacb.
32e ANNÉE. — 1903
PARIS
LIBRAIRIE EMILE BOUILLON, ÉDITEUR
67, RUE DE RICHELIEU, 67, AU !«
TOUS DftOlTt Ilt»lliv6s
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Gaston Paris s'est éteint doucement le j mars, à Cannes,
où on Tavait conduit dans Tespoir que le changement et
un repos auquel il se fût difficilement résigné ù Paris
au raient 3 sur sa santé, gra%xment altérée en ces derniers
temps, une influence favorable. Toutefois sa mort n'a pas
surpris ceux qui, depuis plusieurs mois, assistaient au déclin
prc^ressif de ses forces et aux manifestations variées d'une
maladie (le diabète bientôt compliqué d'une affection du
cœur) qui, après avoir pour ainsi dire sommeillé pendant
de longues années, semblait s'être subitement réveillée.
Si les forces physiques avaient fléchi, la vigueur intel-
lectuelle était restée entière. Le 27 janvier, pouvant à
peine se soutenir, il vint à rÉcole des Chartes pour l'exa-
men des thèses, et prit part à la discussion* Le i" février,
il fit chez lui, comme il avait coutume, sa leçon de l'École
des Hautes Études, mais il dut aussitôt s*aliter et ne se
leva guère que dans les jours qui précédèrent son départ
pour Cannes (34 février). Tout travail exigeant un certain
déploiement d'activité lui était devenu impossible, mais il
pouvait encore lire, et jusqu'à son dernier jour il a relu
des épreuves de la Romania ou de la Société des anciens
textes. Il est mort comme it avait vécu, en travaillant.
Celui des deux fondateurs de la Rûmmia qui reste debout
fera effort pour continuer l'œuvre commune dans le même
esprit que par le passée sans se dissimuler que toute œuvre
k laquelle G. Paris a donné sa puissante coopération subira,
lui disparu, une inévitable diminution. Il essaiera, dans un
prochain fliscicule, de retracer la vie de l'homme éminent
et bon dont il fut, pendant quarante ans, ramî et le colla-
borateur, et qui, depuis la publication de la Fie ik saint
Alexis f était à juste titre considéré comme le maître de la
philologie française.
n-L^ 10
LA CHANSON DE LANDRI
Pierre le Chantre est l'auteur d'une curieuse satire, intitulée
Verbum abbreviatum (i 187-97) ^^ il censure amèrement les vices
de ses contemporains. Au chapitre qui traite delà simonie, notre
moraliste s'emporte contre les prêtres qui, lorsque l'offrande ne»
vient pas, recommencent la messe à deux, trois et jusqu'à
quatre reprises, et il emploie à ce propos la comparaison sui-
vante' :
Hi similes sunt canuntibus fabulas et gesta, qui, videntes cantilenam de
Landrico non placere auditoribus, statim incipiunt de Narciso' cantare; quod
si nec placuerit cantant de alio.
Qu'est-ce que cette composition sur Landri?
L'abbé Lebeuf', les auteurs de VArt de vérifier les dates ^^ au
siècle dernier, de nos jours MM. Pfister^ et HûckeH, ont cru
reconnaître dans ce passage une allusion à un rythmus sati-
ricus anonyme, dans lequel un grand seigneur bourguignon.
1. Verbutn abbreviatum, c. 27 : « Quid turpius quam, si ad primam faciem
et primum introitum non offeratur, aliam assumere faciem, imo tertiam et
quartam ut offeratur? Hi similes sunt, etc. » (Migne, Pairoî, Jat., t. CCV,
col. ICI. Voy. sur Pierre le Chantre V Histoire littéraire de la France, XV,
2S9 sq.
2. Sic, Giraud de Barr>', reproduisant ce passage au début du xui* siècle
dans sa Gemma eulesiastica, donne la variante « Wacherio » (éd. Brewer, II,
290). M. G. Paris pense à Warocher, le rustique héros de la Reine Sébile.
3. Hist.d'Auxerre, éd. Challe, III, $7.
4. A l'article des comtes de Nevers, éd. in-8, XI, 207 .
5. Études sur le règne de Robert le P/>mx (Paris, 188$, in-8), 51.
6. Les poèmes satiriques d\4dalbéron dans Bibl. de la Faculté des lettre de Paris,
XIII, 1901, 79-80. Ce travail d'un très jeune étudiant est à signaler comme
excellent, bien que nous n'adoptions point sa chronologie et certaines de ses
interpréutlons.
Rûwumidy XXXII I
2 F. LOT
le comte de Nevers, Landri, est violemment pris à partie.
L'auteur de cette composition est certainement le trop fameux
évoque de Laon, Adalberon, plus connu sous le nom d'Asselin^
On peut établir que ce rythmas a été composé en Tannée 996*.
Selon ces érudits, cette composition aurait joui d'une grande
célébrité, puisqu'on la répétait encore cent cinquante ans plus
tard, du temps de Pierre le Chantre.
Cette opinion ne me paraît pas soutenable. Le rythmus, dont
le texte ne nous est connu que par un seul manuscrit, aujour-
d'hui disparu, n'a eu aucune portée. Il suffit de lire ce poème
bizarre, d'un style entortillé, rempli de comparaisons saugre-
•nues, d'allusions impénétrables à tous autres qu'à des contem-
porains au courant des intrigues de la cour de Hugues Capet,
pour se convaincre qu'il n'a jamaispu exercer la moindre action.
Vingt ans après sa composition, il était totalement incompré-
hensible. Au reste, Pierre le Chantre fait allusion, visiblement,
non à un poème latin qu'on lisait ou récitait dans un milieu de
clercs, mais à une chanson de geste (cantilenatn, gestd), débitée
devant un auditoire peu patient par des jongleurs Çcatitantibus
fabulas et gesta,.. auditoribus). Ce rapprochement est donc à
écarter.
Je crois que la phrase de Pierre le Chantre nous autorise seu-
lement à admettre qu'il a existé une chanson de geste, malheu-
reusement perdue, sur Landri, comte de Nevers.
Ce personnage a joué un rôle très important à la fin du
X* siècle et au début du xi* siècle. D'origine assez médiocre, il
se distingua comme vaillant chevalier ^ Il devint le gendre*
d'Otlie-Guillaume, qui gouvernait en réalité ^ la Bourgogne
sous le nom de son beau-père, le duc Henri I", et reçut le
1. Hûckcl, loc. cit., 69-70.
2. M.Hùckel croit pouvoir fixer la date entre 1019 et 1023. II se trompe à
coup sûr. Dans un travail sur le règne de Hugues Capet actuellement sous
presse (octobre 1902), nous «établissons que ce rylhmus a été composé entre
mars et novembre 996, dans l'été.
}. Dans un acte de Té véque de Xcvers, Roclen, d'avril 986, souscrit par
Othe Guillaume, sa mère Gerborge et Landri. ce dernier est dit <» gloriosus
miles •. Voy. Gallia Christiana^ XII, col. ^20-521.
4. Voy. Raoul le Glabre, éd. Prou, p. 57.
5. Pfister. op. cit., 2y\sq.
LA CHANSON DE LANDRI 3
comté de Nevers entre 986 et 990 '. Il défendit aussitôt ce pays
contre le sire de Bourbon, Archambaud ^ (990). Trois ans plus
tard', nous le trouvons auprès de Hugues Capet et de son fils
Robert IL L'alarme est grande à la cour. On vient de découvrir
un complot tramé contre les Capétiens par le comte de
Chartres, Eudes I", et par Asselin. Ils voulaient, dit-on,
livrer le royaume au jeune roi de Germanie, Otton III. Eudes
aurait eu pour prix de ses services le titre de duc des Francs,
Asselin rarchevêché de Reims. Un vassal de l'évêque de Laon
s'offrit à soutenir par le combat singulier l'innocence de son
seigneur. Landri conseilla au champion épiscopal de s'entre-
tenir avec son suzerain de la véracité de l'accusation avant
d'engager la lutte *. Au dire de Richer, l'évêque aurait avoué
et défendu à son vassal de combattre >. C'est alors que les
rois l'auraient fait arrêter. Le rôle important joué par Landri en
cette affaire explique fort bien la rancune d'Asselin et les
invectives contre Landri du rythmus satiricus où il raille les
déconvenues du « Bourguignon ». La faveur de Landri avait
grandi en effet. Il fut comte du palais ou sénéchal^. Il semble
bien que ce soit lui qui, à la mort d'Eudes P% au printemps de
996 7, se soit entremis pour l'union de sa veuve, Berthe, avec
1. Qualifié simplement chevalier (miles) en 986 (voy. page 2, note 3).
Landri est dit comte en 990 (voy. note suivante).
2. Annales Nivernenses : « 991 {sic) : hoc anno fuit magnum bellum intcr
Landricum comitem et Archinbaldum II idus augusti diem martis. » (Moti.
Germ., Script. XIII, 89.) Le 12 août tombant un mardi en 990, c'est évidem-
ment en celte année, et non en 991 qu'eut lieu la bataille. C'est d'ailleurs la
date que donnent les Annales Veieliacenses : « 990. Bellum inter Ligerim et
Elaverim fluvios, inter Landricum, comitem Nivernensem, et Archembaldum
principem. » {Histor. de France, X, 317)
3. Nous établirons dans It; travail annoncé plus haut (p. 2, note 2) qvie la
date de ce complot est de 993 et non de 995.
4. Richer, //«/., 1. IV, c. 96-98.
5. Nous ne connaissons ces événements que par le seul Richer. Il reste
donc un doute sur la culpabilité d'Asselin. Interdire à son vassal le combat
judiciaire peut très bien être le fait d'un esprit éclairé, mais l'acte fut inter-
prété par les laïques comme un aveu de culpabilité. Richer est l'écho de ce
bruit.
6. Voy. Hûckel, loc. cit., 76 note 143.
7. Et non en 994 ou 995. Ct. notre travail annoncé plus haut.
4 F. LOT
le jeuae roi Robert II ^ Il espériit que Berthe, régeace des
comrés Je Cfurtres et Blois et des possessions champenoises
de son mari pendant la minorité de ses fils Eudes H et Thi-
baut-, lui livrerai: Provins pour prix de ses services ^ Il fut
déçu. 1 la grande joie d'Asselin.
A b mort du duc Henri (1002) Tattitade de Landri se
modifia vis-à-vis du Capétien. Il se :rouvj iprcs 0:he-Guillaume
le plus puissant personnage de li Bourgogne. Le roi Robert II
n'eut point d'adrersaire plus décide quand il entreprit la con-
quête de ce pays. Landri dctendir victorieusement contre lui la
ville d'Auxerre, de du d'jché (rooj) *. Le roi. pour s^assarer
son alliance, dut Tinves^r de cette vilie et du comte d'Auxerre
et, en outre, donner en maria^je à son fils Renaud sa propre
soeur Adèle *. L'ancien -t chevilier ■• devint ainii Taliie de la
Éimille royale'. Landri mourut en 1028, nuitre ie l'Auxerrois
et in Nivernais *.
La valeur et la tbrtune de cc oerioanaje mcritaien: d'ardrer
:. Avazt 4ÎIC rasscn±=cr.: i- '.-ieu-\ rzi Hvizues eût pu être zctan-^
Kz'c^zz prir ceraireme::: 3crL-.e r«:ur rzjfrrissc IjLzdr. : jr l'crirrinietriur. De
là les vtfrs rxlleurs i'.\s5<£i:z ïrr. ii : « Dcr^n'-r.z rcr in lecru!c- Liroinci rcn-
àiido. » Hicisi tnJuir. i-r-i; peu ic pcrsçiciztvi i n:cc iria p. 7*^ et àj :
« Li rzi Rjcer: 1 icrzi ûcut se-l i Sien lu ^.icmir-!
iScz. :=—? . p. ic-i:.
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ie Trêves. V:- i.ir.5 lit --ftr-i4' i^ **£;;. j--. :io:. r. 277.
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Drc- ::2a . 'I: Ptîsîcr. _"j:..: :-i ;:2
7. -i.-rÀ :»T.ier. XL iC". r ^îj.-. lat. 3 1.
LA CHANSON DE LANDRI 5
l'attention de ses compatriotes bourguignons. Il a été certaine-
ment l'objet de récits légendaires qui se transmettaient encore
près de deux siècles après sa mort.
Hugues de Poitiers, moine de Vézelay, entreprit vers 1160
d'écrire Thisioire de son abbaye ^ Il rédigea comme introduc-
tion une courte histoire de l'origine des comtes de Nevers*,
qui est légendaire, exception faite des dernières lignes. Sur les
ancêtres de Landri, voici ce qu'il nous apprend. Son grand-
père, appelé également Landri, se distingua aux côtés de son
oncle, le Poitevin Audegier {Hildegarius), évêque d'Autun ',
au siège du château de Maers en Nivernais-». Ce château était
un repaire de brigands qui rançonnaient ou tuaient les voyageurs.
Le duc de Bourgogne, Richard, vint en faire le siège « avec les
grands et les évêques de toute la Gaule ». C'est grâce à la
présence d'esprit du jeune écuyer Landri (qui prœerat cursariis)
que le chef des brigands put être arrêté dans sa fuite et pendu.
Son château fut donné à Landri. Celui-ci eut d'une Angevine un
fils appelé Boon (Bodonem), lequel tenait son nom d'un certain
Bodo de Montibus, dont on ne nous apprend rien si ce n'est
l'anecdote suivante. Quand son filleul eut grandi, il lui
demanda ce qu'il désirait :
« Quid, filiole, libi vis dari? » At ille : a Volo, inquit, ut tantum terrae
mihî concédas, quantum contigui montis umbra die perlustraverit. » Quocon-
cesso, surrexit juvenis summo mane in diebus aestivi temporis et coepit pro-
1. Voy. l'étude et l'édition d'Aimé Chérest dans le Bulletin de la société
des sciences naturelles et historiques de VYonne^ XVI, 1862, p. 209-52$.
2. Celte Origo et hi$toria brevis Nivernensium comitum a été publiée par
Labbe, Noi*aBibl. mss., I, 399, dont l'édition des Histor. de France (X, 2$8)
n*est qu'une reproduction. L'édition de Labbe étant incomplète et fautive
nous publions à nouveau ce texte en appendice d'après le manuscrit même
qui a servi au P. Labbe.
3. Labbe a omis dans son édition un passage scabreux concernant Tévêque.
Dans le fonds de l'historiette concernant Audegier, on reconnaît, bien que
très altéré, le thème de la légende d^Eginhard et Emma. Voy. sur celle-ci
Heinrich May, Die Behandlung der Sage von Eginhard und Emma. Berlin,
1900, in-8 (fasc. 17 des Forschungen ^ur neueren Litteraturgeschiste hgg. von
Franz Muncker).
4. Mars-sur- Al lier, Nièvre, canton de Saint-Pierre-le-Moutier.
I
v
6 F. LOT
prios limites circum circa ponere, sicut sole vergente umbra divertcbat, et
aedificavit ibi castellum quod dictum est Moncellis », et dilatavit terminos
patris sui, genuitque filium nomine Landricum.
Nous sommes évidemment en présence d'un conte populaire
dont on connaît beaucoup de variantes. II s'est localisé en
Nivernais, sans doute sous l'influence d'une préoccupation éty-
mologique : expliquer le surnom de le Comte donné à Mon-
ceaux.
Ce Boon (Bodo) n'est pas, du reste, un personnage imagi-
naire. Le ryihmus satiricus appelle Landri Bodonis filius*. Un
des fils de Landri II porta ce nom, qu'il devait évidemment à
son grand-père K
Hugues de Poitiers vante la générosité de Landri et en fait
le héros d'une historiette qu'on pourrait intituler : « Les offres
des trois comtes » ^.
Landri était un homme « large ». Il accueillait volontiers les
pèlerins se rendant à Rome, quelle que fut leur condition.
Lui-même entreprit un jour le saint voyage, et en noble société,
car il avait pour compagnons les comtes de Poitou, d'Anjou et
* de Bourgogne. Les mêmes personnages se retrouvèrent de com-
\ pagnie sur le chemin du retour. ABiterna 5, ils s'arrêtèrent trois
jours pour se reposer et aussi célébrer le saint jour de Pâques.
Le lendemain de la fête, Landri, fils de Boon, traita ses compa-
gnons de route. Au sortir de table, le comte de Poitiers inviu
son hôte à regagner le Poitou, patrie de ses aïeux, où il serait
comblé de fiefe. « Viens plutôt avec moi, dit le comte d'Anjou.
Ta lignée maternelle t'y incite. » Le comte de Bourgogne prit
alors la parole : « Pourquoi quitter le sol paternel pour courir
çà et là, quand je puis et je veux t'y enrichir grandement?
1. Monceaux-le-Comte, Nièvre, canton de Tannay. Il est mentionne dans
des titres de 1126, 1244, etc. Voy. G. de Soultraii, EHciionnaire tofx^rapkiqtu
de la Nihre (Paris, 1865, in-4).
2. Str. 16, éd. Hûckel, loc.cit., p. 84.
5. Dans une chane de Tévêque Roclen donnée à Nevers en Tan looi, je
vois les souscriptions suivantes : « S. Landrici comitis, S. Bodonis fîlii ejus
(Bibl. nat., ms. lat. 9207, fol. 16 verso et Colleaion Baluze, t. 74, fol. 550). •
4. Deux sont des ducs, mais on sait que jusqu'au xii<^ct même au xiii« siècle
le titre de duc, peu usité, éuit dans la pratique remplacé par celui de comte.
5. On verra dans les notes suivantes comment il faut interpréter ce nom.
LA CHANSON DE LANDRI 7
— C'est vrai, dit Landri; tu peux beaucoup. Je te demande
donc de daigner me concéder cette petite île * du castrum * de
Nevers. En y ajoutant le titre de comte, tu te feras honneur à
toi-même, et je n'en tiendrai que plus sûrement mon héritage
qui est contigu K » Ainsi fut fait. Landri reçut du comte de
Bourgogne le comté de Nevers pour lui et ses successeurs, mais
à charge d'hommage ^.
L'anecdote est certainement aussi controuvée que la pré-
cédente. A l'époque où Landri obtint Nevers (987-990),
aucun duc d'Aquitaine ou de Bourgogne, aucun comte d'An-
jou, n'a fait de voyage à Rome. La fin paraît, d'ailleurs, tendan-
cieuse 5. La mention de Biterva ou BiternUy où se passe la scène,
est des plus curieuses. Il faut certainement y reconnaître ViterbOy
à vingt lieues au nord de Rome, et d'autre part la forme Biterna
ne peut guère être séparée du Biterne des chansons de geste ^.
1. Nevers situé sur un promontoire entre deux rivières, au confluent de
la Loire et de la Nièvre, peut être considéré comme une presqu'île. L'épithète
« parvulam » se comprend : la ville, demeurée dans les mêmes limites depuis
Tépoque romaine, n'avait pas plus de i .400 mètres de circonférence. La nou-
velle enceinte entreprise par le comte Pierre de Courtenay en 1 194 la porta à
3.400. Voy. Née de la Rochelle, Mémoires pour servir à Vhistoire.., de la
Nièvre (Bourges, 1827, 3 vol. in-8), II, 1 59-161. Aussi Hugues de Poitiers,
écrivant vers 1 160, dit de Nevers au début de VOrigo : « castrum antiquissi-
mum quidem sed instar viculi exigu um. »
2. Le castrum y c'est la cité gallo-romaine dans les textes du haut moyen
âge. On ne peut traduire ni par a château », ce qui en fausserait le sens ni
par « ville ». La a ville » c'est en effet partout la réunion de la cité (le cas^
trum romain) et du bourg, le hurgus médiéval.
3. C'est-à-dire Monceaux-le-Comte (cf. p. 6, note i). Monceaux est
en réalité éloigné de Nevers d'une vingtaine de lieues.
4. Voy. l'Appendice.
5. Il est douteux en effet que les comtes de Nevers aient été aux xi* et
xn« siècles vassaux des ducs de Bourgogne. Depuis la campagne de Robert II
les comtes d'Auxerre et Nevers paraissent relever directement du roi. Mais
les ducs, en guerre perpétuelle avec les puissants princes qui tenaient les trois
comtés de Nevers, Auxerre et Tonnerre prétendaient que ceux-ci étaient
leurs vassaux. Vézelay eut beaucoup à souffrir, on le sait, des comtes de
Nevers.
6. D'après le v. 2991 du Roland les boucliers de Biterne étaient renommés.
La Prise de Cordres, v. 1235, vante les « pailes » de Biterne et les chapes de
8 F. LOT
Landri qui tint Nevers joue un certain rôle dans Girart de
Raiissillan^épopécioncièTcmcnt bourguignonne, malgré la forme
limousine sous laquelle elle nous est par\'enue '. C'est un des
conseillers du héros et l'un des meilleurs ^. Il est tué par un
certain Auberi *.
Dans Aymeri de Karbonne^ il apparaît une seule (ois ^ avec
le surnom bien remarquable de Landri de Mâcon. Xotre Landri
n'a certainement pas possédé Mâcon, mais il a dû avoir des biens
en Maçonnais. Nous avons en effet une charte de son père,
Boon, de novembre 950, par laquelle il fait don à Cluny de
manses en Maçonnais acquis de son parent, Renaud >. La chane
porte les souscriptions suivantes qui sont à relever : « S. Bodoni,
S. Gisoni, S. Attoni, S. Landrici^. » Ce dernier pourrait
être le futur comte de Nevers. J'en doute néanmoins. Landri
ayant vécu jusqu'en 1028, il n'est guère admissible qu'en 950
il fut en âge de souscrire un acte de donation. Je verrais plutôt
dans ce Landri un frère de Boon, donc un oncle de Landri de
Nevers; ou encore le père de Boon, puisqu'il portait ce nom
de Landri, au témoignage de Hugues de Poitiers.
Il apparaît que les comtes de Nevers étaient plutôt d'origine
mâconnaise que poitevine, et que le renseignement de Huguesde
Paleme (Païenne;; de même lîlie de Saint-GilUs. Les Sarhonnais eti font une
ville sarrasine d'Espagne. Mais un passage du l>it Jt riyrUrie de Rutcbeuf
(éd. Kressner, p. 115) montre que Biteme est bien en Italie. C'est évidem-
ment Viicrbo, comme le conjecture Kressner (p. }oi;.
1. Voy. Tintroduciion de M. Paul Meyer à sa traduction de ce poème
(Paris, 1884, in-8;. Disons, puisque l'occasion s'en présente, que la popula-
rité de ce poème en Poitou et la localisation d'épisodes importante en celte
région semblent avoir pour origine une confusion entre Girart de Roussillon
et le comte Gérart Cgendre de Pépin dWquitaine;, tige des ducs d'Aquitaine.
Le dernier duc, Guillaume X, partageait cette erreur, si son testament est
authentique (voy. sur cet acte Luchaire, Louis VI, n«> 579).
2. Girart de Rouisillon, p. 47, 75, 98, 100, 13 $-136, 153.
}. Ibid., p. 191.
4. Au V. 1546. L'éditeur, M. Demaison, a bien recoimu le comte de
Nevers (II, 269).
5. Le nom de ce parent se retrouve dans celui du fils aîné du comte
Landri, son successeur aux comtés de Nevers et Auxerre.
6. Chartes de Cluny, éd. Bernard et Bruel, n» 783, I, 737.
LA CHANSON DE LANDRI 9
Poitiers est erroné. Au reste, le Poitevin Audegier (^Hildegarius),
oncle prétendu de Landri (I"), ayant gouverné le diocèse d'Au-
tun de 875 à 893% n'a pu se joindre au duc Richard pour
assiéger un château du Nivernais, pour la bonne raison que
cette contrée n'était pas encore rattachée au duché ou marquisat
de Bourgogne que Richard commença à constituer vers 895.
Elle était sous l'autorité des comtes d'Auvergne, ducs d'Aqui-
taine et marquis de Gothie \ L'prigine angevine de la femme
de Boon I est certainenjent le résultat d'une méprise. C'est
Boon II, fils de Landri et pttit-fils de Boon I qui épousa une
Angevine '.
Il ressort avec évidence de ces remarques que, les renseigne-
ments de VOrigo comiitim Niveniensium étant sans fondement
historique sérieux, la famille des comtes de Nevers a été l'objet
de récits légendaires, récits traditionnels dans le Nivernais
et contrées avoisinantes, dont un écho s'est transmis jusqu'à
Hugues de Poitiers (1160). Nous ne serions pas autorisés à
dire que certaines de ces légendes se sont transmises sous une
forme épique, si une ligne d'un contemporain + de Hugues de
Poitiers, Pierre le Chantre, sur la cantilena de Landri, ne nous y
autorisait, du moins à mon avis.
II
Pierre le Chantre n'est point le seul qui, à la fin du xii* siècle,
ait eu connaissance d'un poème dont un Landri était le héros.
M. Paul Meyer, après FaurieP, a relevé les allusions suivantes
des troubadours dans l'introduction de son édition d'Aye d^Avi-
1. Gallia christ iana, IV, col. 366-569.
2. Je renvoie toujours à mon travail en préparation. Il en résulte égale-
ment que tout ce qui est dit du premier comte de Nevers, Rahier, soi-disant
vassal de Richard, est sans valeur.
3. Il épousa Alix, fille de Foulques Nerra. Voy. Pfister, op, cit., 243.
4. Ou à peu près. Pierre le Chantre a écrit la satire des vices de son
temps, connue sous le nom de Verbuw abhmnaluw, entre 1187 et 1197, date
de sa mort. Voy. Histoire littéraire delà France, XV, 288 et 293.
5. Histoire de la poésie provençale (Paris, 1846, 3 vol. in-8), III, 488-d89.
10 F. LOT
^nan^ et dans son compte rendu d'un travail de M. Birch-
Hirschfeld*.
1° Arnaud de Marueil (ou Pons de Capduelh) écrit :
Vostre hom sui, donna gaya,
E am vos mais que Landrics no fetz Aya.
2° Pierre Raymond de Toulouse :
Plus fis...
Que no fo Landrics a n'A va.
3** Paulet de Marseille :
Bella dompna plazens, ay
Dit soven quar ieu nous ai,
Quar vos am, que qu ieu n'aya
Mais qu'Enricx (sic) no fes n'Aya.
M. P. Meyer retrouve encore deux allusions dans des œuvres
françaises du Nord :
4° La Prise de Jérusalem :
Baron, ceste chançons n'est mie de folie,
D'Auchierne de Landri
5° Thibaut de Marly :
Ce que je vos vueil dire et ce qu'avez oï
Sachiez que ce n'est pas d'Auchier ne de Landri.
On le voit, ces allusions se réfèrent, non pas à une mais à
deux compositions, Tune intitulée Landri et Aye, l'autre Auchier
et Landri. De la première, qui n'a qu'un rapport de nom fortuit
avec le roman à'Aye d'Avignon ', nous savons seulement qu'elle
avait pour sujet l'amour violent de LanJri pour une certaine
Aye. La seconde avait un caractère soit de parodie, soit d'ex-
1. Dans la collection des Anciens poètes de la France, i86i, un vol. in- 12,
p. XX à xxn. Cf. Bull, de la Soc. des anciens textes, 1899, 49.
2. Romania, VII, 451 et M. Birch-Hirschfeld, Ueher die den provençal ischen
Troubadours des 12 und j). Jahrhunderts bekannten epischen Stoffe, Leipzig, 1878,
I vol. in* 8 de 92 pages.
3. Les rapports que tente d'établir M. Birch-Hirschfeld {pp. cit., 68-69)
entre ces deux compositions n'ont aucune vraisemblance ainsi que M. Paul
Meyer Ta déjà fait observer.
LA CHANSON DE LANDRI II
trême fantaisie, puisqu'on la cite comme chose invraisemblable,
mensongère.
Les rapports entre Landri, comte de Nevers, et une certaine
Ayt reposent-ils sur une réalité quelconque? C'est ce qu'il est
impossible d'établir avec certiiu ie. Je remarque seulement que
ce nom à! Ayt était extrêmement répandu dans le duché de Bour-
gogne au X* siècle, surtout en Maçonnais et Chaunois*.
Je relève, presque au hasard, dans les Chartes de Cluny :
1° en 963 une Aya souscrit, signum Aye, un acte comme
témoin % 2° en 969 une Aia uxorcondam Heyrici souscrite. Ayt ^ ;
3° en 980 une Agia (dont le nom est reproduit sous la forme
parlée Aie dans le cartulaire A du xi'' siècle) est femme de
Girari ^; 4° en 949 yin^Aya est femme de Narduin (vicomte de
Mâcon) 5; 50 en 953 Aia femme de Robert ^; 6° en 904 Agia
fille d'Adalbornis et de Foltrudis^, etc. Je trouve aussi la forme
Ai : ainsi 1° en 941, la femme d'un certain Ardouin est dite
Agi et Ai^'y 2° à la même époque Ai femme de Kaimbert^; 3°
en 954 Ai femme d'Obert *°,etc.
Je do s signaler à ce propos que le prédécesseur de Landri au
comté de Nevers, Geoffroi, a eu une femme dont le nom est écrit
Ava^ Avaney Eva ". On va s'écrier tout de suite que c'est un
nom différent. Sans doute. Mais il est certain que, au x* siècle,
Agia > Aie, Eva et Ava ont été confondus. Je vais en donner
la preuve :
1. Cette forme a été créée par M. Longnon pour désigner le comté dont
Chalon-sur-Saône était le chef-lieu. Elle s'autorise des formes pagus Cavlo-
nensiSy pagus Cahiensis que nous offrent des textes du xc siècle, au lieu de
Cahiîonemis.
2. Bernard et Bruel, Chartes de Cluny, n» 11 57.
3. No 1253.
4. No 1515.
5. No 746.
6. No 851.
7. No 85.
8. Nos 512 et 533.
9. No» 518 et 676.
10. N» 887.
11. Afa et Avaru dans une charte de juillet 940 en double rédaction
(Bruel no 511). £va dans un acte de 942-954 (no 554)
\
12 F. LOT
1° L'abbesse I:vo, sœur du célèbre fondateur de Tabbaye de
Cluny, Guillaume le Pieux, duc d'Aquitaine, comte d'Auvergne
et comte de Mdcon, est dite dans un même acte Avan abbatissa^
Aiam abbatissa, Aia abbatissa \
2" Un seigneur du Maçonnais, nommé Bernard, apparaît
dans un acte de février 929 avec sa femme Evana^, laquelle,
en 94Î, souscrit S. Avane uxore stia '. Peu après, celle-ci devint
veuve et donna à Cluny une charte. (942-954) qui débute ainsi :
Ava,.. pro aninia seniore meo Bernart^. Une vingtaine d'années
auparavant cette Evain ou Avain est ainsi désigné dans deux
chartes de juillet 928 : Bernart et ucsor sua Aia K
Il est donc bien certain, quoique la chose paraisse inadmis-
sible au premier abord, que les deux noms ont été confondus.
La confusion entre Aa < Avay et Aia^ est vraisemblable et nous
pouvons admettre que le comte de Nevers en question a eu une
femme dont le nom était écrit Ava ou Eva mais prononcé
Aye. Il y a plus : la chose est assurée. En effet, dans un acte
de 942-954, où cette comtesse de Nevers Eve figure avec son
mari et ses nombreux fils*", je relève parmi ceux-ci Guichard
(fVicardus). Cette constatation permet d'identifier deux per-
sonnages d'une charte de la même époque passée à Blanot en
Maçonnais (Saône-et-Loire, canton de Cluny). Nous lisons
parmi les témoins : 5. AgU et filii ejus Wichardi"*. Cette Agia^
mère de Guichard, c'est la comtesse de Nevers Eve.
Je laisse à la fantaisie du lecteur le soin de décider s'il y a
quelque chose i tirer de ce fait que la femme d'un prédécesseur
de Landri s*appelait Ayt.
Quant à la seconde composition, Aiuhier et Landri, il est
impossible de ne pas se rappeler, à propos du premier nom.
1, Brucl H'^* 74. On trouve à \i Bibl. \at.,coll. Moreau, I, 148. une copie
d'après l'on j:i roi v^bp-iruV
2. />:j., n« ;7c».
4 N'' >>>.
S. N"» ^N^ et ]:t>o. Dans toutes ces ciutions les textes Jcrivent des copies
faites d'après les ori^iînajx.
c Bruc^ R'-' co;.
-. *.Vj.. r.' >c^ d'après une copie faite sur roriginol.
LA CHANSON DE LANDRI I3
VAlicherius contre lequel le comte de Nevers, Rahier, soutint
un duel tragique ', resté fameux à Nevers \ Mais c'est tout ce
qu'on en peut dire.
Je hasarde en terminant Thypothèse que Landri a fourni son
nom, rien que son nom au roman en vers Doon de la Roche '.
Le héros de cette composition de pure fantaisie, dont l'action
est censée se passer sous le roi Pépin, est Landri, fils de Doon,
surnommé « de la Roche +». Ce Doon de la Roche ne
devrait-il pas son existence A Boon de Monceaux (^Bodo de Mon-
cellis)y père du comte de Nevers, Landri ? ^ Je suppose que Boon
a été changé en Doon sous l'influence de « Doon de Mayence ».
Si les rapprochements qui précèdent paraissaient acceptables,
si Ton admettait que les premiers comtes de Nevers, et en par-
ticulier Landri (988-1028), ont été l'objet de récits épiques,
nous devrions en conclure que la force de création épique s'est
prolongée plus tard en Bourgogne que dans le reste de la France
du nord. On sait en effet que Raoul de Cambrai offre le dernier
témoignage (à propos d'un événement de 943) d'une formation
épique vraiment populaire. A partir de la fin du x' siècle cette
force créatrice est épuisée à jamais. On entre dans une longue
période de rifacinunti, laquelle ne durera pas moins de quatre
et même (en tenant compte de l'Italie) de cinq siècles.
1. Voy. ci-après le début de YOrigo comitum Nivernensium.
2. Une île gardait le nom du vainqueur au temps de Hugues de Poitiers.
11 est bien probable que cette légende n*a été, au contraire, inventée que
pour s'expliquer le nom de l'île. Les îles étant les lieux de combats singuliers
favoris dans l'épopée, l'idée d'un duel s'est greffé là-dessus.
3. Il est contenu dans le ms. 4404 du fonds harléyen au British Muséum.
Je ne le connais que par l'analyse de Léon Gautier, Épopées françaises^ II,
252-260. Je m'aperçois que M. de la Lande de Calan a eu l'idée de ce rappro-
chement dans son livre bizarre Les personnages de V épopée ro/miw^ (Redon, 1901,
in-8), p. 172.
4. Il y a en Nivernais plusieurs localités de ce nom. La Roche est un
fief de la châtellenie de Monceaux-le-Comte (cf. plus haut, p. 6, note i). Par
contre, un château de Moniceaux était un fief mouvant de la Roche-Millay,
Tune des quatre baronnies du comté de Nevers (voy. Soultrait, op. cit., 160).
5. Dans l'édition d'une charte de l'évcquc Roclen, donnée par Mabillon
{Annales Beneti. y IV, 696), le fils de Landri est même appelé Doon {Pod6)\
mais c'est une faute de lecture pour Bodo (voy., p. 6, note 3).
M
F. LOT
APPENDICE
Origo et hisîoria hrevis Nivernensium cmnitum *
PAH HUGUES DE miTÎERS, MOIKB DE VÉÎ'.EUW (VfeHS I160).
Castrum Nîvedunum, quod nunc dicuur Nivemb, ûvùm est jiupra Ner-
vîum* flumtfn, m exiremis Bur^undie finibtis, cuî subterfluït Ligeris amnis
qui dïvidit Galliam cclucam et G;iiliam aquîtankarîi. [EraiJ igitur castruni
iUud antiquissimum quîdcm, sed instar viculï exigu um, Prefuit ei comcs
Katerius, qui, jurchomiiùi, de dominio comitis Burgundie dlud tcnebat. h
forte accusatus ab AUcherio milite quad thorum dominî suî violasseï, con-
fiicTum duellii œxx\ ipso accusamre iniit îufra insulam quue dçtom nomitie
hodieque appelbtur* Cuni ergo Raterius astam vibrasset^ percussit Alicheriuni
sub niaxilla et transfodit os ejus, dîxitqtie : u Os îpsum luet metidacîum quod
loquaciter protulit - — « Ncquaquatn, ait Alicherius, mendacîuni, sed tam
bnguiT! sîkmium iîdulterii tui os meumluit. wStatimque ferocî anlmo insur-
geas pcrcussit Ralorium. Qui, cadens devictus et convittus, post niodicum
expiravïT, Fuit autcm dicKis muhis castrum prttiomînatum in manu comitis
Burgundii; ad quem jure dotïituii pertiniibat* Tempore iHo rex Fraiii:orum
nioriens pueruluni filium reliquit* Hune proccres Francorum, <:ommunît:ato
lioiisilio, Lradideruiit Richardo Justiciârio in tutelarji^ t:onimilteBtL*s illi toiius
regni curam. K\ tlle pio afîectu pueruni eiiutrivit ei regîium juste disposuît.
Et erat castellum in territorio Nivemensi, nomine Maerjs, mutiitione et
situ !od valde fonîsMnvum bominumque frequentia ditîssiniuni. Hujus habî-
tatores pessiml latrcKÎniis vacabant et vlatore^ itineris coniigui spolbbant,
capiivabant, occidebant. duoruni nialicie fama cura in auribus Richardi JuSNti-
ciarii pcrcrebesceret» coadunato muko exerciiti castelluni obsedii, cui obsl-
dioni cutn aliîs optiniatibus et episcckpîs totius Gallie interfuit dtiam Hitd«ga^
rius, episcopus Educnsis.
Hic, génère Pîctavcnsis» diaconus régis Francorum extîterat, Qjjt cum forte
aliqtîando bunianîtus tcmptaretur^ accidit quod rex pertesus e stratu suo
nocte surgens et cuidani fenestre incumbens viderit Hiîdegarlum in quodam
diveniculo palacii ludentem cum quadam juvencuta. Super quo rcx valde
miratus (bunc quippc magne lionestatis sobrietas sibi commendaverat) rei
iîxïtum cauïïus expectavit, Erat autein ni\ multa super terram, Ei etce
redeuntts Hildegarii prosccuta jmencula cepît manu complanare vestîgia, ipsa
quoque rt*trorsum inccdcns suos cque dtlcbat cal les. Miratus ergo rex versu-
I . Kous devons la collation de ce texte» dont Tunique nis* t%l à la Biblio-
thèque de îa ville d*Auxerre (ms. 127* foL 1 8 recto, col. i à 19 verso, coL i)
à re^dréme obligeance de M. Ch. Porée, arcbivi^te de TYoniie. ^ Le titre
a été ajouté par une main du xvii« siècle >
a. Un nom écrit d*abord a été gratté.
LA CHANSON DE LANDRI I5
liam niulieris rursum lectulo se recepit. Et cum mane rex surrexisset et divi.
nisortlciis adsiaret vidissetque quod Hildegarius, qui tune forte ebdomadarius
evangelii pronunciandi erai, supposito vicario nequaquam ad al tare accederet,
voluit temptare utrum reverentia sacrorum necne Hildegarius abstineret.
Vocansque illum jussit ut sacris vestibus indueretur, debito functurus officio
sicut ebdomadarius. Hildegarius vero, conscius culpe sue, humiliter cepit dis-
simulare, cumque rex instaret, infirmum se esse respondit. Rex autem magis
ac magis Hildegario insistebat, et Hildegarius multo magis se excusabat. Et cum
rex nionitionibus jussiones, jussionibus minas Hildegario intenderet, divinum
humano Hildegarius timorem prefercns, preceptum simul et iram régis dissi-
mulaos, exiit ab ecclesia. Factis igitur missarum sollemniis, clerici Eduenses
proprio pontifice orbati,regi exeunti occurrerunt eique, juxta morem avitura,
insignia pontificalia, scilicet anulum et baculum, optulerunt, petentes ab eo
sibi pontificem dari. Tune assistentes palatini, non quç Dei sed quç carnis
sunt sapientes, singuli pro suis exorabant. Protinus rex, divinitus inspiratus,
Hildegarium vocari precepit. Et timuerunt aulici ne forte rex indignatus
eum de palatio pelleret (diligebatur enim ab omnibus). Cumque vocatus
tremens assisteret, dixit ei rex seorsum jocose : « Mulam candidam quam
- nocte equitasti libenter insellassem si a te premonitus fuissem. » Perterritus
Hildegarius timuit se delatum vel pervisum a rege, prociditque ad pedes
• régis et ait : v Pecçavi, et sicut homo lapsus sum. » Cui rex ait : « Amodo
tibimet caveto, et, sicut timori nostro Dei reverentiam preposuisti, ita quoque
timorem Dei voluptatibus tuis deinceps prepone, nedum ob transgressionem
juste sacra vereris, transgressionis pariter et negligentie debiti officii reatu
tenearis. » Et convocato clero Eduensi cunctisque optimatibus, tradidit ei
anulum et baculum, committens illi curam pontificatus ecclesie Eduensis.
Cum ergo eandem ecclesiam prudenti sollertia regeret, venit et ipse inter
alios ad predictam obsidionem, quendam secum habens nepotcm, nomine
Landricum, et applicuit exercitus ad castellum et expugnavit illud fortiter.
Ut autem vidit dominus oppidi quod sustinere non posset, grande convivium
civibus suis preparavit et, rccumbentibus omnibus, ipse simulato langore sur-
rexit et clam couscendens equum per médias acies effugit. Et ascendentes
velocissimi quique fugientem însecuti sunt, sed eum nullaienus apprehen-
dere potuerunt. Cui forte occurrens Landricus, nepos Hildegarii, qui praeerai
cursariis, percussum impulitab equo captumque duxit ad tentorium Hildegarii.
Et quoniam non est sacerdotis quemquam tradere morti, occultato milite,
misit equum illius duci exercitus. Quo requirente militera, responsum est ei
quod aviditâte retinendi equum militera miles neglexerit. Missi ergo appari-
tores scrutati sunt tentorium Hildegarii et inventum militera simul cum equo
suc suspenderunt in patibulo, captumque castellum dederunt possidendum
Hildegarii nepoti Landrico.
Qpi Landricus, accepta uxore stirpis Andegavorura, genuit ex ea 6lium,
nomine Bodonem, quem Bodo de Montibus suscepit de sacro fonte. Is cum
adolevisset, petiit a patrino suo aliquid sibi dari. Cui i lie respondit : » Quid,
\
lé F. LOT
ail, nliole, tibi vis dari ? » At i!Ie : •* Volo, inquit, ut untum terre michi con-
cédas quantum contigui montis umbra die una perlusrraverit. » Quo concesso.
surrcxit juvenis summo mane in diebus estivi temporis et cepi: proprios
limites drcum circa ponere sicud sole vergente umbra divenebat, et edihcavit
ibidem castellum quod dictum est Monorilis et dilatavit tenninos patris su
genuitque niium nomine Landricum.
Et ûctus est Landricus homo magne liberalitatis. et suscipii^at fere qootquot
erant trsnseuntes per \TJim, nobiles et médiocres personas, rroperantes ad
limina beaiorum apostolonim Pétri et Paa!i. Eo nempe tempore omnisgaili-
cana et bdun^iica natio cadem plurimum trequcnrabai îimir^. Contigi: autem
et ipsum Landricum eanJem aliqiunio cum mulrls aîiis princiribus j«r«gri-
nationem subire. Intcr quos ftienint cornes Picuvorum et cornes AaJcgavo-
rum necnon et cornes Burguridie. Qui pariter curaLandrico redeuntes, sanctum
dominice resurrectionis d:em apud Bitemam celebraverjn:. U: autem iîine-
ris laborem îevaren: fecerùnt ibidem triduum. Sequenti vero die Pasche fedt
omnibus convivium Laniriois, niius Bodonis, et cum a prandio sarrexissent,
congés Picuvomm in^-iiiba: Lmdricam quatinos avorum sujnim patriam
secjm repcteret, ub: ejm maxi-nis benenclis cumularet. Cui cum Lmiricus
grates rcferret : • Mccum poti-s. ai: cornes Andegavjrura, veaire debcs.quo
te matemum ger.js invitât. E: respondcns cornes Burgundie dixi: : « Oir
patemum solum bac vei illac f^eregrinatunis reiinques ^ cum ego ibidem sans '
adroodum possim velimque diure? ^. Ad hec Landricus res{»ndi: comiti
Burgundie : « Verum est. inqait. quoi plurimum possb. Peto ergo ut jurvu-
|am i'iLun insuîam castri Ni vernis concedere m: h: digr.eris quo m:hi. comitis
concessa dignitate. et tibi Ikxtor pro'.-eniat et ego contiguam hereiutem
tutius reticeam. » Respondi: cornes Burgundie : ? Corircio, ait, sicut \'i5, et
comiunim Nivemis. saivo;ure bominii, tibi et heredibustuls de:ncepstrib«o. §
Iste Lindricus, primu? h;r/js zcnerls cornes N:-.-err.:s tactus, cepit usq',:e-
quaque dilatais terminjs saos habuitque tîlijm, nomire Rcnalium. qui
CDHTunctJS matrimon-D S3r?ri rcg:^ Rjberrl, ~1:: Hj£:?::L> Cip::rr.:5. c:.xn:u-
tum Autisijdori con-uav:: ccm.iit-: Ni.emîs. C-v-is CD-n-.urus grada bc^o
cum duce Burgundi:: ccr.!::gcn>. ar-i Sa!if~ijj-n: -vcisus es:, tri^mphum
si mu! et hereditatem Sdng-:r.:5 G-ilelntû. T.'.:^ suo. reiir^uens.
G j:"el:r.,:s autcni ptr z^.'z^izir.ii :=rc ir.nc> cjm lanu ccr-.iiîrjn: tetiuit
:aJu-:r!i e: re;.?'--n t\z'z.i.D zz>i i-fra rr^-Niriptur:. spoci^rr. ne^c eciaz:
-r.--> -::-'.: s-T.Tiirr: c:..:zzTi r::-er.: -ji riccm :ta tcr.ucrit. nec miaori
:rir:-;.r.::i :=:r.r-"rt q-: sai^-lr.tt:; v^; liizn cirporis eu---:: le*. abat, quin-
c-i^inti -.:; ;:j-.: :a-r::':*ri coa:-^>^^J - T.=n5< sue u>u5 t-iri: E: tarr.in, >w-
5e5.>,jn rui m»'::? i.tJLt-^ ç-.-Ç— i* r.:i .t.îIiî >:l:i:r«.-r: i : :-.i>ijr." suj
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Lr^:--.-, ::~ t-LT-r. TrTr.jo:rt-:>:-~ irrc-.ctiï :.-n:,.:it-: N:\iTr. > et
: 1. ^. . A ■ f reli=.c-ct.
LA CHAKSOK DE LANDRl 17
Ahisiodori, udum de inbus componens. Genuitque filbs dyos, Guilelmum
et Rcnaldum. E quibus Guilelnius cura m Tomodorî opfmuit, Renaldus
autem Malliacum et Huben', duo nobîlia oppida, possedit, Uterque ïanien
superstiîe patre vha excessît.
Sane Guiklmm Tomodorensis es propria uxore usmm filiam habuit. Que
conjunciacst in matrimonio Airnoni Borbonensi. Renaldus vero prlmam uko-
reni hiibuit filiam unicim comîtis Foratensis; de qua fîHam îuscepjt que con-
junctaest Mîloni de Curtiniaco. Qua defuncta» iterum Renaldus duxit u^orem
fîtiam Laocelini de Balgentiaco; ex qua filium getmît nomine Gtlileinium,
quem tnoncns pat ris tuteJe dimisit, Quo vii4 exempto, monarchiam Niver-
nefisis et Aumiodorensis aique Tornodo rendis provincfe optinuit. Hne^que
suoscîrca Ligerim et Akrium fluvios dilatavit. Qui jusiidelicet ctihor exîmius
cxiiieret. Vi^eliaci lanien monkisterium insoUtîs corisuett^dinibus sibi vendi-
care primus attemptavii. Hic genuit Guitelinum et Ren^ildum, quibus militia
provcciis, eu m uterque Iherosolimitanum iter cum Ludovico rege Franco*
mm et dnct Aquitanorum arripuissct, pater iUorum lerrena ceiestibus com-
mutant Cartu^ie cou versus facius est,
[Lt resté de ia page ett Matic.)
NOTE ADDITIONNELLE
faï tenté en parcourant les liistoîre.4 de Nevers et du Nivernais et en
consuîtani les plans anciens delà %'ille, de vérifier si le nom d' « Ile Auchier n
s'était conservé. Mais ces recherches sont demeurées infructueuses. M. H.
de Fîamarc, archiviste de là Nièvre, a bien voulu épuiser à notre intention
toutes les sources Je renseignements à sa disposition, mais il n'a rencontré
aucun nom pouvant provenir de la déformation du nom d*Alicherus ou
Auchier t Vlk-atix- Birufs, en aval du pont du chemin de fer, ne peut être
Te ihéitre du dueU ■ Elle est un peu loin de la vieille ville pour qu'on ait
•t pu, de ses murs, apercevoir distinctement les phases du combat* Je ne vois
-^ de possible que Tancienne lie traversi^e par ïc pont, où sYlcvait une chapelle
cf a Notre-Dame, dont remplacement actuel serait vers l'cxirémiié sud du
- po m, à main droite en venant de Ne vers, emplacement connu aujourd'hui
« sous le nom de Plateau de la Bonne Dame, bien en vue des murs de la
•c ville et domine par la hauteur où sont le château Ja cathédrale, etc. y.
(Leitrcsdes 27 août et 10 novembre 1902.)
Ferdinand Lot.
1. Mailly-le-Château O'otii^^* ^^' Auxerre, cant. Coulange-sur- Yonne);
Hubaiis Nièvre (château de U corn, de Grenoi^,cant, Brisson-ïes-Allcnjands)*
Remamim, XXXti 2
LES MANUSCRITS FRANÇAIS
DE CAMBRIDGE'
III. — TRINITY COLLEGE
Le collège de la Trinité fut fondé par Henri VIII sur rem-
placement occupé par plusieurs anciens hôtels destinés à rece-
voir les étudiants. Il ne paraît pas qu'aucun des livres que
devaient posséder ces établissements se soit conservé. Du
moins est-il certain que les manuscrits actuellement conservés
dans la bibliothèque du collège proviennent de donations
dont aucune n'est antérieure au xvu* siècle. Mais ces dona-
tions sont importantes par le nombre et par la valeur des
livres donnés ou légués, de sorte qu'actuellement la biblio-
thèque de Trinity Collège est, entre les nombreuses biblio-
thèques de Cambridge, Tune des plus riches en manuscrits pré-
cieux. C'est à peine si celles de l'Université et de Corpus
Christi Collège lui sont supérieures.
Des manuscrits de Trinity Collège, bon nombre sont en
français, le plus souvent en français d'Angleterre, ou du moins
renferment des parties françaises. Il s'y trouve plusieurs écrits
qui, jusqu'à présent, n'ont pas été signalés et qui appellent des
recherches variées. Il me serait impossible de rendre un compte
exact et suffisamment détaille de tous ces manuscrits sans donner
au présent mémoire une étendue excessive. Aussi n'ai-je pas
l'intention de les passer tous en revue. Je donne en note la
liste des manuscrits dont je ne traiterai pas, soit qu'ils aient
I. Premier article, Rom., VIII, 305 ; second article, XV, 236.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE I9
déjà été étudiés par moi-même ou par d'autres, soit que je me
réserve de les étudier eu une autre occasion ^
Les manuscrits de Trinity Collège sont répartis en trois
classes déterminées respectivement par les lettres B, R^ O, qui
désignent les cabinets où les livres de chacune de ces classes
sont renfermés. En principe B contient les manuscrits théolo*
giques, R les manuscrits historiques, littéraires, médicaux, etc.,
et les manuscrits orientaux ^; Orenferme la collection de Thomas
t. Les mss. qnç \t hisse de côté sont les suivants :
B- I. 45, foU 19. Traiié sur la conression^ dont je doîiiieraî quelques
extraits dans une notice générale sur les rraués de ce genre qui jwus sont
parvenus,
R. î, $3. Eéd^tion de h chansoti de Roland dont j'ai donné des extraits.
en 1877, dans mon Recmi! iTanciens iexies (p, 209 ei suiv,). Depuis» le tcîtte
complet .1 été pubUé par M- Fôrster. La version de la lettre du Prêtre Jean
qui occupe les ff* 107 à 1 18 est celle dont on a ïc plus grand nombre
d *e xem p laires {Roman ta , XV , 177)*
R* 5* 46, Vies en vers de saint Jean Taumônier et de saint Clément
(celle-ci est une traduction libre des HewgnHhncs augmentée de récits puisés
il d*autres sources). Ce manuscrit a été, de ma part» 1 objet d'une longue notice
dans les Noîkgi et extraits Ja manusctiis, XXX VUI, 295 et suiv- Cette notice
vient de paraUre en tirage à part (Paris, Klinclisieck).
R. 14. ^o. Recueil de traités de médecine et de recettes médicales en
latin et en provençal sur lesquels je me proposu de rédiger un mémoire parti-
culier.
R. t6. 2. Apocalypse en français, dont \*m traité dans une récente publica-
tion de la Société des anciens textes français {L' Apocalypst m fran%ah au
Xîîh iikk, I9QI , p, CGXLIX-CCLUI)'
R, 17* I. La version du Psautier publiée en 1875 parFr. Micbei, dans les
Dvcumtnis inédit i.
O- t- 5. La coutume de Normandie en français.
O, 1* at, Gautier de Bibbysworth. Voir mon Rfcueihrancif us kxks, p. 360*
O. 2. 29. Sermons français de Maurice de Suîly. Réservé pour une autre
occasion.
O. 4. 26* Ms, très tncomplct et médiocre (xv^ siècle) de THisioire
ancienne jusqti*à César, sur laquelle 'voir Umnania^ XIV, %6.
O, 9. î4, U AUxanâfê d*Easuchc de Kcni. Voir mon livre sur la légende
d'Aleximdre, II, 276,
a. Ce classement n*est pas rigoureux et ne pouvait Tétre. Beaucoup de
manuscrits offrent plus ou moins le caractère de mélanges et peuvent être
placés indifîéremment dans une catégorie ou dans une autre.
30
P. MEYER
Gale (f 1702), donnée au Coilège en 1738 par le fils de celui-
ci, Roger Gale (f 17^ a).
Lorsque je commençai l'étude. des manuscrits de Trinity,
en mai et juin 1871^ il n'en existait pas d'autre catalogue que
celui que Berïiard a inséré dans ses Catahgi Ubrorum manu-
scfipîarum AngHœ d Hibirmœ (Oxford, 1697, in-foL). Dans la
seconde partie du tome 1" (pp. 93-102)5 on trouve Tinventaire,
naturellement fort sommaire, des manuscrits que possédait alors
le collège. Plus loin^ t* II, pp. 185-195, est imprimé le cata-
logue des manuscrits Je Th. Gale, qui ne devaient entrer à
Trinity qu*une quarantaine d'années plus turd. Récemment^
M. Munta^ue Rhodes James, qui a entrepris Tœuvre méritoire
de rédiger les catalogues de toutes les bibliothèques collégiales
de Cambridge, a mis au jour les deux premiers volumes du
catalogue des manuscrits g re^, latins, anglais, romans, de Tri-
nity*. Ce catalogue est rédigé avec le soin et la compétence
dont M, James avait donné la preuve dans ses précédents
catalogues des manuscrits du Collège d*Eton, du Musée Fitz-
wîlliam, dont il est le directeur, de Peterhouse, etc. Si les
ouvrages n'y sont pas toujours identifiés, si par suite la biblio-
graphie laisse à désirer, les manuscrits sout décrits avec une
minutieuse exactitude; les indpiî, donnés lorsqu'il y a lieu,
permettent au lecteur compétent de déterminer les ouvrages.
Tout ce qui concerne soit Tornementation soit Thistoire des
livres est traité avec un soin particulier. Désireux de réservera
la publication des textes le plus d'espace possible, j'ai pu, en
bien des cas, abréger la description des manuscrits que j'étu-
diais, renvoyant le lecteur aux notices de M. James.
Bt 14. 39, 40- — Vie de saint Nicolas, par Wace, — ExTRArrs du
Miiom DE Ro&iiRT DE Gretham. — Femïka. — Extrait de Gautieh
DE lîJfiBYSWORTH. — DIALOGUES FRANÇAIS, ETC.
Ce manuscrit porte les deux numéros 39 et 40 parce qull
formait autrefois deux tomes, et^ en effets il se compose Je
deux parties originairement distinctes, et d'époques différentes.
I . Tht WtUmt mantiscHpis in th lihrary of Trinity Cdiege, Cûwknd^f. Cani-
bridge, Univcrsity Press, gr» m^°; î. 1, 1900; s. Il, 1901. Le lûmc Icomient
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CaMBRJDGE 21
qui ont été reliées en un volume*, Hickes te cite ù plusieurs
reprises dans son Thésaurus^ et même en a extrait un morceau
important, une vie de sainte Marguerite en vers anglais, qui a
été réimprimée en 1862 ^ En 1841, Thomas Wright publia,
d*après le même manuscrit, quelques pièces anglaises^; puis,
en 1844, il le cita à propos de la légende, en vers français, de
saint Furseus (c'est une partie du Miroir de Robert de
Gretham), et en imprima 21 vers ^ Mats, en 1S49, lorsque
N* Delius préparait son édition de la Fie de saini Nicolas^ par
Wace» le manuscrit manquait sur les rayons*, et depuis lors la
même constatation a été faite mainte fois 7.
En 18S6, décrivant ici même les manuscrits de rUniversité
de Cambridge, j'exprimais Tespoir que le précieux livre de
Trinity Collège se retrou%xrait quelque jour^ Cet espoir s*est
réalisé. Depuis 189e, il a repris sa place sur les rayons de la
Bibliothèque. 11 n'avait pas été volé, comme on lavait craint.
Il avait été empnmté irrégulièrement^ par un fellow de Tri-
ks niss, de la classe B, le tome II ceux de k classe H. Le troisième volume,
actuellement sous presse, est réservé à la classe O (mss. Gale).
1. La reliure actuelle paraît dater du corameticcment du xtKc sîècîe,
2. Lm^uarum vderttm sepUntrioitalium ifsesattrus i^rammatùo-cniicus H
ûrckmîi^iais, auctore Gcofgio Hkkesio, S. T. P. Oxonie, MDCCV. — Voir
pp. 146, 149, 1^4, des citations de la vie de Saint Nicolas; pp. 154, 155, du
iraité îniUulé Ffmîtia, et p. 224 ^ la vîc en vers anglais de sainte Marguerite.
De plus, Hickes donne U fac-sîtiiilé de quelques lignes sur la deuxième
des planches placées en regari de la p. 144,
|. Seinif Markrtk, Ihf timden ani mariyr, in old erg lis h, first eJited from
thc skin books, iti ï 862, by OswAld Cockayne, and now reissu ed* London,
iM6(Earh en^L Trxt Socifty% p. 34-4}^ Cette édition n'est autre que celle
de i86^> à laquelle on a mis un nouveau litre et ajoute un avertîsseîiient et
quelques notes.
4. RHujui^f antiqUi^^ 1, 48, 144, 170.
j. Saint Patrick* î Purgaim y {Lonàon^ 1S44)» p. it.
6, Maùtrt Waçés 5^ Nkhùhî (Bonn, iSso)^ p. xii.
7. Pir Cockayne» préambule de rédition de sa Stînit Mûrhertte {1862);
par A> Way, préface du t> IJl du Prompt uarium jmvuhmm (jSés)* par
M, Ed. Stengct, notice du ms. Digby 86, p. 66*7 Ci^ZO» *tc,
a. Rmmnm, XV, 296,
9. Du moins il n'existe aucune mention du prêt.
22 P. MEYER
nity, qui, étant allé occuper dans le nord de l'Angleterre une
prébende dépendant du collège, empona par mégarde dans
s;i nouvelle résidence le manuscrit en question, et quelques
autres documents appartenant à Trinity. Après sa mon, en
1S95, le paquet fut retrouvé, non ouvert, et le manuscrit, avec
les autres documents de même provenance, tiit renvoyé à
Trinity*. Comme je l'ai dit plus haut, le volume actuel for-
mait autrefois deux tomes ayant chacun sa pagination propre,
l-c second tome commentait à Tanicle Femifuiy dont il sera
traité plus loin. Etepuis peu, une nouvelle pagination, s'éten-
dani i tout le volume tel qu'il se présente actuellement, a été
faite. Ix manuscrit ayant été minutieusement décrit dans le
catalogue de M. James, je me bornerai à étudier et à faire
connaître par des extraits les panies françaises.
Au fol. î4 .^, entre des pièces très variées, les unes en latin,
les autres en anglais, se trouve le sermon bien connu, et souvent
attribué à Tarchevèque Etienne de Langton, qui a pour texte
la chanson /v-V AI:s '*ui:yf: se Ina. Il sufrira de signaler cène
pièce dont on a de nombreuses copies -. Présentement je passe
à Texamen de textes plus importants.
1. Pri^'-f j JfjuS'Crns:, — Cette prière, en sixains alter-
nativen^er.: :rar.ça:> e: anglais ' :"a:: suite à .a vie anglaise de
siir.te Marc^ientc. !r.^.rri:r.c^ rar Hickes, T'XjjwTiSy L 222-51,
e: rc:n:?r:*v.te ra- O. Cvvka\T:<;. Hickes en a reproduit (r/if-,
I.i4> '.e di>v.: t- tac->::v.:'.e. Er. voici '.es premières sn"ophes :
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
23
I Jhesuchrist le fiz Marie, (fol. 24)
Cil ke tut le munde fist,
De nus eit pi té e merci,
Si H plest,
Ke nos aimes ne seint dampnées
Par nul maufet.
II Loverd Christ thou » havest us
Thou madest al this word of
[nougJn,
We biddet thc wi//; word ant
[thought.
Conseil ant red,
77?at oure sole ne be
Furiore for no qued.
III Sire Deu, vus eistes tel,
Père de tere et de cel,
Plus douz ke mel
Kaunt il est chaud ;
A vus nus devum obliger.
Sire, an haut.
IV Loverd Crist, as thou art king,
Fader ant sone, of aile /Wng,
77k>u ^ef us aile god endeng
Ant ti love
r/7at we moden to thi blisse
Aile come.
V A un piler fu lié
E pur nus peccheurs turmenté.
Sire, merci par charité.
Par amur,
Ke nus ne seum acumbré
Nuyt ne jour.
VI Ibounden e was to a piler
Ant. al to-torn was is her;
Sire, merci par charité.
Fur Godes love,
Milde bete thi swete chères
Marie sone.
Vil Mort desour la crois suftVi,
Marie e seint Jon le vi,
E se ke penderent encouste de li
Le du laron ;
Le un li cria merci :
Il out perdun;
Li autre aval cheït
En pu parfum.
VIII Deet he /^lede up on the tre
Ant wuden hothen two ant thrc
To save tho than hise ben,
Ant luder ben comen.
Jhesu thi blisse us bi see
For /W swete moder love.
Amen.
2. Fie de saint Nicolas, par Wace. — On connaît de cette
légende cinq mss. : celui que noUs décrivons, deux à la
Bodléienne (Douce 270 et Digby 86), un à l'Arsenal (3516,
fol. 69) et un à la Bibl. nat. (fr. 902, fol. 117). Un seul, celui
de r Arsenal, a été exécuté en France; les quatre autres sont
d'origine anglaise. Le plus ancien et le meilleur est le ms. Douce,
qui est la base de l'édition donnée par Delius en 1850. Delius
a fait aussi usage du ms. Digby et regrettait, comme on Ta vu
I. Ms. y<m, mais, pour éviter toute confusion, et n'ayant pas à ma dispo-
sition le thorn anglais, j'écris th ici et ailleurs. De même, plus loin, j'emploie
y et ghy selon les cas, pour le yoJu,
24 P' MEYER
plus haut, de ne pouvoir consulter le ms* de Trinity, déjà
disparu. Le ms. de l'Arsenal a été reproduit par Monmcrqué»
en iSî4, pour la Société des Bibliophiles français, qui, à cette
époque, tirait ses publications à trente ou quarante exem-
plaires ^
Si Delius n'a pu utiliser le texte du ms. de Trinity, son édi-
tion n*y a pas beaucoup perdu , car la leçon qu'offre ce ms, est
incomplète^ et bien souvent fautive. On en jugera par le
spécimen qui suit. Pour iaciliter la comparaison, je joins, entre
( ), la concordance avec ledition. On verra que le prologue
manque à peu près complètement (les deux premiers vers .sont
l'œuvre d'un copiste) ^ et que beaucoup de rimes sont déna-
turées au point que, si on n*avait le secours des autres manu-
scrits, on pourrait croire que le poème a été composé par un
Anglais du xnr siècle.
De seînt Nkhoïas ai pensé, (f. 48)
Un seint de gratii au 10 rite.
En romauns dîmim un petit (40)
4 De ceo ke le latin nous dh,
Ke li lai le puyscnt a[njtendre
Ete Pâtre fu né, de une cité
8 Noble c riche de antiquité ;
Mes piiys est la chose empiré,
A bon pmf tui a menu se.
Père e mère out de grant hautessc,
12 Df parenté et de richesse, (51)
Asez urent or e argent
E moût vïvai[e]nt seintement,
E tel enfaunt vodreient a ver
16 Dount il puyscnt fere lour dr,
Nent souI de bur manauntise
Mes de tut lur conqucst en autre
[guise.
Tel fu cum il désiraient; (58)
20 Nîcholas par noun l'apçlaient.
Ne eurent enfaunt qut soûl cestui :
Taunt Turent plus cher aumbedui.
Petit fu a lettre mis, (68)
24 Par grant eii tente fu apris.
Encore petit en ber^ jesout,(62)
Desûul la mamelle vivout,
Si juno'Jt pur Dcu amour :
28 Ne leîtout que une fèx le jour,
Al megredi e al vendredi; (66)
Si lî OUI Dens de sa grâce emplL
Quant plus crusi, plus ami!nda,
J2 Ke plus servi, Deus plus Tama.
Lan'ercbachilers tut fourmez,(72)
De taunt de bountés aloses.
Sun père prist definemen
^6 E sa mère cnscmetit ;
De Nîcholas firent lour eir,
K Le volume de Monmerqué contient quelques autres textes relatifs à
saint Nicolas^ notamment une version en prose.
2 Elle omet notamment les vers 1550-1457,
î- Le vers omis est, dans le ms. Douce, Quimstvtiit îaim mt£ttdn^
LES MAKUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
23
De qu^iit kç il purraitrnt averj
E NichoUs tut Jepani»
40 Teres, mesouns, tut se feus veodî ;
Si dona tue a povre gent, (b)
Ne fist autre reposemem. (81)
Uns povres lioume iluc mandt
44 Ke rkhes jadis esté îiveit,
Mes en pôverté crt venuz ;
De ceuiavym plusours vvt
Ke de grant a ver kc il aveient
48 En po verte gràm descendeient.
Tcus i a ke de poverté
Sount venuK en grant plcmè* (89)
C^ povre hou tue out treîs pu celés,
52 Treis 50Uc[s] files ase^ bêles;
Entre eus katre ne urent ke
[prendre,
Ke a engager ne a despendre ;
De vivre conseil ne troveieni
56 Si 3 bordel* nen aleîent.
Sein Nichûlas pjt<î en prbt; (98)
Ore 01 ez eu m faitemcnt le fist.
Voici un autre morceau que je cite parce qu'il cotitîent une
série de vers qui lUiinqm^nt dans le nis. Douce, entre tes vers
Ï283 et 1284 dé Tédition de Delius * :
Grand dol a veit par la meson ; (f. 55*/)
Ki dolent se le père nun? (1175)
V Las! dolem i, fet il, « cheîiift
Ke me en chout si mes ne vif^
Quant si tost iii mun fiz perdu,
E Deusf si poy jel ai etî.
E Dcus ! taunt fu lé quand jel oy !
E Deus î pur quei tne dura si poy ?
Ma joie me a durrd' petit,
Orc ai grant dûl ; veîrs dist ki ce ibt :
Après grant ris graot plur; (1282)
Après grant joie grauat tristuri;
Après graunt gaine grant domage;
Après grant saune lé vent grant rage.
Uncore uy matin al jur
Kett avey ttial oe dolor;
Grant mal m'est avenu en poyd*oure
Deuï ! ke pecché m'est œru sure !
Nen avei unkes nul enfaum
For sul ccïî, si lî amai uunt.
Perdu ai mun fiz e mun her;
Ne qur jamès nul autre aver<
Beu ûxt beu cliers, taunt mir vus vi t
Mort, ke fet (iic) tu? ven.si me 05c i;
Mort, car me prens ; si rac rent
Celui dunt ai le que? dotent.
Beu fiz, de ceo sui angusus
Ke je ne puse mûrir pur vus.
Ey ! sein Kicholas, ke en fray
De mon enfauni kc perdu ay? »
li père e la mère ploreient, {^^M)
Pteinent sai, si paunicîent.
ï* Les autres m ss. donnent Se en galice (Douce), Si a gaîki (B* N. fr.
90a), Si d gaeîii (Digby). La bonne leçon Ta gmlht ne se trouve que dans
le ms. de l*Arsenal (donnée en variante par Mommerqué, p, 305); eïlc avait
été restitiiée pur M, Toh\€T {Rmnania, II, 259),
2, Ils se trouvent aussi dans les autres manuscrits, par ex. dans B. N. fr.
902» foL cxxv . et daîis Digby. Delius a eu tort de ies considérer comme
une addition postérieure,
3. Ce proverbe se rencontre fréquemment, avec des variantes : Le Roux
de Uncy, Lh^rt des prov., 2< éd.. Il, 240, 472.
^ âé p. MEYER ^^^^^^^^^^1
^^^^^M Voici h fin (foL $6 b)i
- ^^^^^^^M
^^^^^^H Ben dtii hum bon seinuramer (t J40)
Ke Suun apele^ esteh, ^^^^^H
^^^^^^H E servir e honorer.
Fu a sein Nicholas mené, ^^^|
^^^^^^^B Ki ben sert bon semur
Sur un cheval fu aporté ^^^H
^^^^^^^H Prou e honur.
Li seint hunje ou mcisicr esteJt : ^^^^H
^^^^^^H Bon sire sun sergaunt pa^ ne oublie
K aram e ert , si j une it . ^^^H
^^^^^^H Quant veit ke il ad me^tcr de aïe.
Cil ke le malade mena ^^^H
^^^^^^H Pur ceo ke it aveit amé
Sein Nicholas pur li pria ^^^H
^^^^^^H Sain Nkholas e honoré,
Kg Deu pnast e requîst (1480) ^^^H
^^^^^^^B Li mustra ke il li amout
Ke cel malade sein fe[î>t. ^^^|
^^^^^^H £ ke de li II remembrout. (i 349)
Savez ke sein Nicholas lîst ? ^^^H
^^^^^^H Oe/ ke nus trovum lisaunt : (i4sS)
Del oik de la laumpe prist, ^^^^|
^^^^^^H Ke li bers ert > en sud vivaunt,
Si en oignt le cors envtrun ^^^|
^^^^^^H Uns bu me en pèlerin us
E fîst a Deu un oreisun. ^^^|
^^^^^^H Tsunt en febles, taunt dolerus
De ke il out fet, cil saili sus ^^^H
^^^^^^H Ne poei! sur se& pc7 esterc
Tut sein, unkesne fu plus; ^^^H
^^^^^^H Ne %^z mains a sun chef trere \
Cil ke einz ne pout aler ^^^H
^^^^^^H Felenus {sic) est de tele nature
Ne sai aider ne mover ^^^H
^^^^^^H La ou se firent lungcment dure;
E ke aveit le pèlerin ^^^H
^^^^^^H Ja del menibre ta ou il lèvera
Tut sein ala sun chemin. (1491) ^^^H
^^^^^^H Aider ne purra
Deu prium nostre scinur (tj^o) ^H
^^^^^^V Si li fet les membres seccber
Ke pur ce seint e pur sa amur ^|
^^^^^^H Ke tl ne se put ren aider. (1469)
Nus doint de pecchez pardun ^|
^^^^^^H Un 11 urne ke out ces te ct\fçfmçKé
E vivre en confessiun, ^|
^^^^^^^H Ne poeit
Ke oud ti régner pusum (iS?4) ^|
^^^^^^H De une vile ou il mis aveli (c),
In secuk secuJùrum. Amen. ^|
^^^^^^^B Deui^ qui beat m» Nkijofamti poniîfi\
tem ttmm i mm maris d^cùrastt mtraatlù^ ^^
^^^^^^H iribm nobii grmmm ut, cjus meniis tî
predhui, a géhenne itimtdiis likrtmur^ ^M
^^^^V fir Do. M. /. CLf, t
^^1
^^^^^H 3. Traduction en vers du Fmi SanfteSpîriius. — L'ccnture ^|
^^^^^H de cette pièce est différente de
celte de la vie de saint Nicolas, ^|
^^^^^B Elle ne parait cependant pas sensiblement plus récente. H
^^^HV Ftni, Samti Spintus (t 5 6 c)
Seint Esperiï, vus venei ^^^Ê
^^^^^F EiemiiifuHtus
£ deï cetl nus amenez, ^^^|
^^^^^V Luds tut radium.
De ta ïumere nus relumei ; ^^^|
^^^^^M Vtni^pûtir pauperum.
De poveres père cheir, vcnei ; ^|
^^^^^1 Veni^ daîor munrrum.
Dons de grâces nus donet ^M
^^^^^■^ ymi, lumm c^rdium.
E nos (guéris alumc^. (f. $6 d) ^M
^^^^HH t. Con.fisL — 2. Voilà deux rimes bien corrompues; Douce istir-îwir, H
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
27
CmsùhÈôr opHmi^
Dukis IfOîpes uni nu ^
Duîct Ttjrigrrium^
Ih Inbore ttquks^
lu t$tu IfmperuSj
Jn fititi sokciim.
O hix hulissimUf
Etplt coniis iniima
Tuûru m fiddiu m .
Sim tiiû numint
Nil m in htmittf^
Nii est mnûxium.
Laxm quod est sordidumt
Riga quaâ est aridum,
Sûna quod til saucixim^
fléck qaod est tigîdum^
Fave (fuod est frigidum^
R0gi qtioit tst dftmm,
Da itiis fidtîihm
In ti coiifdmtibiis
Sacrum itfkmrium
Da virtittis meriittmf
Da iahdis txitmn^
Da ptrhemti gmtdium.
Tiî es trû^bon consileir,
Dub hoste de aime, salus a amer,
E ducK freîdurc;
Repos de Ira val tu es sur,
Refreidureen ardur.
En plure* es conforturc.
O lu mère très benuré,
De ta grâce le queor cmpJer,
Ke en tay ont cremor (corr, créance)»
Car^ sa ni ta deité^
Nu le rcyn ne est alumé
E sumus en Dusance.
Ceo que soyïé trovea lavez,
Ceo que secce est arroser,
E ke forvehe k adressez ;
Ce que red est le abesciz,
E si treid si nuHsei^
E nos pbies tretus sanez.
De grâce te seit dons donne/
A nus ke sumus feus claniez,
Sire, par ta franchise,
Ec! vïvere et morir,
Ke nus pussuns a ceîl venir
En ta grant église. Amen,
4. Les pronostics d'ÉiàhieL — Ce court texte a été écrit, sur
une p3^e restée en partie blanche, par une main plus récente
(xiv^ siècle) que ce qui précède et ce qui suit. La pièce tout
entière, composée d'environ 80 vers, a été publiée par Jubinal^
dans ses Jongleurs et Trouvères, p, 124, d'après le ms. BibL
nat. fn 837, puis par moi, d'après un nis, de Rouen, dans le
\ Bulletin delà Striéié des ûftciens textes^ année 1883, p. 89. J'ai
donné à cette occasion la liste des manuscrits qui la ren-
terment % et quelques renseignements sur les diverses rédac-
1. Ceiie liste, qui se compose de huit itianuscrits, pourrait être augmentée.
Le même poème se rencontre encore dans !cs mss. de Chartres 35-1, de
UUe I îo, dans un ms. ayant appartenu à M. de Vema (BibL de FÈcok dtî
^Chartest LVl, 68j), dans un ms, de Turin (Rn*, à*i L fom., 4* série, VIII,
}8X dans un ms. de Modéne, etc.
2$ P. MKYER
tlons qu'on pOfisèdc cL* ces pronostics. J'ai dit que les textes
latins a»mme les textes grecs ctaient généralement placés sous
le nom d'Esdras, ou, parfois, sous celui de saint Denis, et que
je ne les avais jamais vus attribués à Ezéchiel. J'ajoutats toute-
fois (p, 87 du Bulletin) que l'attribut ion à Ezéchiel devait
provenir de quelque rédaction latine de moi inconnue. Cette
conjecture était fondée : M, L. Delîsle a signalé un ms. latin
où ces pronostics sont en effet attribués à Exéchiel ',
là la pièce n est pas complète : on n'en a copié que les
ro premiers vers.
En terre de kbour et de promîs&iun (f. 57 a)
Esioyt nn prophète ja '. Ezt'chyel out nun.
Mu II iavyet dd seclc et de le by dyvytie,
Mult ama Deu et b sue doartne.
Py ys qe il ert enfaunt todis leva matia^
Ab a Tcicûlc pur aprendre latin.
Taunt se dôna as ars et a sen des amors»
Les signes des esicîles scrcha et les curs.
Taunt oyt et aprist de louis cscripturcs
K'il saveyt de le temps toie[s] le* aventures*
5. Morceaux tirés du Miroir de RoaiiKT de Gretham. — En
1886, dans mon mémoire sur les mss. français de Tuniversité
de Cambridge, fai donné de ce curieux poème une notice à
laquelle je ne puis que renvoyer le lecteur K Je rappelle seule-
ment que t^ouvrage^ dédié à une dame nommée Aline, est une
exposition des évangiles des dimanches et fôtes, où sont incor-
pores de nombreux récits de miracles et autres histoires édi-
fiantes. J'en connaissais alors deux exemplaires : celui de la
Bibliothèque de runiversîtéde Cambridge (Gg. i.i) et celui du
Musée britannique (Addit. 26775), Aucun des deux n'offre un
texte complet : le premier abrège le texte en certains endroits *
et de plus a perdu un teuilleî entre les ff. 252 et 253; le
second, par suite de mutilai ions du m&.j commence au troisième
1 . Méknj^is Je paUographiit p. 194.
2. La bonne le^on est : Oui jûiis un prodonu. Il me porsilt superllu de
donner des variantes à ce mauvais texte : on pourra le comparer avec les
deux éditions mentionnées plus hâut.
). kofmnia^ XV, 196 et suiv,
4. C'est du moins ce que j'âi cru remarquer en comparant ce ms. avec
\m autres. De plus, Il y a au commencement une répétition. La rubrique.
LES MANUSCRITS URANÇAIS DE CAMBRIDGE 29
dimanche de TAvent, et est aussi incomplei de la fin. En plus
de ces deux manuscrits, j'avais pu établir, grâce à quelques
ver!> cités par Th, Wright dans son livre sur le Purgatoire de
saint Patrice, que le même ouvrage se trouvait dans le ms. de
Trinity alors considéré comme perdu '♦ Mais je m*étaîs trompé
en supposant que ce manuscrit contenait tout le Miroir. En
réalité il n en contient que des extraits, dont je donnerai tout à
rheure l'indication précise. Cette information n'est pas la seule
que j*aie à ajoutera ma notice de î88é» Depuis lors, en effet,
j*ai eu connaissance de deux nouveaux manuscrits (ce ne sont
il est vrai que des fragments) du même poème. L*un appartient
à lu bibliothèque Ju Chapitre de la cathédrale d'York, l/autre
nVaété communique, il y a une quinzaine d'années, par un géné-
reux bibliophile, feu Eugène Piot ^. Le fragment d'York, coté
lé k, 14, se compose de six feuillets de parchemin à deux
colonnes par page et à 37 vers par colonne. Il contient donc
environ SHo vers. L'écriture est de la seconde moitié du
xur siècle. J'en ai préparé, en 1887, une notice suffisamment
détaillée, ainsi que d'autres manuscrits français de la même
bibliothèque. Le temps m'a manqué jusqu'ici pour publier ce
travail. Mais je profite de la présente occasion pour décrire le
fragment du Miroir, Lors même qu'il était entier, le ms. d*York
n*a jamais contenu le texte complet. C'est une série d'extraits
tout à fait analogues à ceux que renferme le ms. de Trinity
Collège. L exposition proprement dite de Tévangile dominical a
été supprimée, les exemples seuls ont été conservés. Le frag-
ment d'York commence ainsi (premier dimanche de TA vent) :
h ilk UmpQTt dixit Jesm titsdpuHs suis : Ertmt sigmi ht sok ei luna, tk.
[Luc. XXI, 19] r.
Uns cumllêrs prudumc estcîc Qiianquc il poeit t;sparnier,
Ke Deu ara ou t et Deu citrlheiL Fors sul sun cors a sustcnier
iiprès le prologue, est ainsi conçue : Dommka prima Aihtutus Domitti, mais
Je texte qm suit, Cnm aiipropitsquâssei Jésus Ifrôiolimis d vmisst't Bdh/agc
(Matth. XX I^ 1% est le comniciKemetït de î'i^vangile des Hameaux, et le
même sermon reparaît plws loin, A sa vraie place, fol t8o*
K ibU.^ p. 298.
2. Ce fragment, aisscjé endommagé* se co ni pose de deux feuïHets^ â deux
colonnes par pape et â quar.intc-deux vers par cuîonne, Je ne sais ce <|a*il est
devenu. J'en ai pris copie*
j* Se trouve dans le nis. de runivcrsité de Cambridge Gg* i . i , fol 141 f.
30 p. MEYER
£ ses miïh a achater^
A povres soit trcstut duner*
A une feîr S€ purpcma :
« Eissi\ w fet îl, V plusn*en ira.
Si jeo chai en langur
Qui me (m^ pur nient sujyr?
Si jeo devîenc vielz et defreti
Ki me dnrra pur nienç cunreiz ?
Mieuz me vak aukes retenir
Dunt jeo nie puisse susienir :
Que qu'en vienge [ne] que que nun,
Kt rien ne tient multest bricun.
Tut n'ai femme, n'ai enfaunz,
Mes aveirs me serra guaranz, »
Cnm out pensé si Tad fet :
Deners acoilt, dcners acreit ;
Tant en fait» si cum It p[l]ot,
K empli en ad un grant pot.
Ne demurro (iic) pas lungement
Ke Deti n'en pmt vengement :
Uns mais en l'autre pié est feruz \
Dunt niylt est raaz et esperduz.
Ne pot uvçrer, ne pot aler ;
A Tun pié pot a peine ester.
Mires en ad plusurs mandé ;
De sun aver niult ad dune.
Ke qu'il promet, que qu'il dunt,
Cum pur garir rien ne li funt.
En mires tant despent li soz
Que trestut est voist * li poz,
Ke cil que Deu ne volt aider
Pur nient se fera meciner...
Suivent les exemples du dlni anche de la Quinquagésime, du
jeudi après le premier dimanche de carême, du troisième et
du quatrième dimanche de carême, du dimanche de ta Passion,
du deuxième dimanche après Pâques, ce dernier incomplet
par suite de Tétat du manuscrit. Je transcris ici ce qui subsiste
de cet exemple. On pourra comparer ce nouveau texte avec le
morceau correspondant du ms. de T Univers! té de Cambridge
que j'ai publié dans la Romania^ XV, 305. Les variantes don-
nées à cet endroit montrent que le ms* dTork se rapproche
beaucoup du ms. de Londres :
Ego mm pasIûT hnus^ eU, [Jo. X, u) CfûL € c).
Dunt avint jadis a un prestre,
Qtjî de Cantcrbire ï esioit mestre.
Quant Itinges i ont cum versé
4 Si s*est çuntre lit chuché ;
El quant il quida dévier.
Devani lui vînt un bachcler;
La mein li tend), si li dit :
8 ff Vien tci ici ad meî »,ct il si fist,
U ne vobit u ne dcîgnast,
Cuvint lui qu'ove lui alast.
ï, Mîeui, dans le ms. de r Université, %i$i,
%, l\ fout corriger /ffd*
5. Cette leçon, évidemment mauvaise, se retrouve (voir plus loin p. ^aX
dans le m s, de Trînîty, Mieux dans le m$, de rUniversité ; Vn mam H ui 0/
4. MîeuKf ms. del'Univ.^î'wtd^^.
%. Le ms. de Trintty a b même faute {Cankrbury). La bonne leçon serait
Cfuirtshufi (Burgh Castle).
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
3>
E en plu surs litis ramena
12 E multes choses lui mustra.
D'enfer M mustra le parfunt
E les poiûes <ja1locs stint ;
E puis h mena vers le ciel
i6 U il vit e iruva tut eU
Mes, quant al ciel aprocercnt.
En Feir un feu muk grant truve-
E Tun sur Tautrc ad crorcs {sic)
[raoh ;
Od crorcs(if() ardanz, mèsferins '
[erent,
40 Les aimes sanz merci geterent :
Nu le n'esteit par sei several*
Mes chescune ert a attre ma) ;
Chescune ert a autre peîne ;
[rem, 44 Si crièrent a dure aleine,
Li icus ert a merveilles grant Dd cri, del plur, del guaiement
20 E mult horible, mult ardant.
Li guiurs est iorcs entrez
E li presteres s'est arestex.
Einz el feu li guiur entra,
24 Mes unques li feu nel tucha.
A tant reguarda il le p œstre ;
Si li dit ; ^ Vien avant.
lert li presires en grant turment,
duant il vint eî feu bien avant,
4 S Est vus un deble a fort curant.
Les oiU ardanz mult ruelout
E de sa bouche eschivout ^ ;
Un aime arda ni en stin crorc tient
danz 52 E versk prestre grant curs vient J,
mesire ; {d)
Jn de cest fey ne te en îe pis
2B Fars sul de tant cum tu as mespds :
Tant ardera^ einz en icest feu
Cum tu as pris et nient rendu. »
Muk a envy e mult pensis
p Li prestres eiuï d feu s'est mis;
Li feu de tûtes parz csteii.
Mes unques point ne [V] adeseit»
Tut cel feu vit îl repkni
|6 D'almes ardantes od grant cri;
E li debles les turmentolt
Et criei fort en sun esleis :
te Di va î treitre, fcl malvais,
Prenc celui que tu as tué. b
56 Si ad sur lui Talme rue.
L*aJme descendi sur le prestre,
E si li art Tespaule destre,
L'ar^un a feit mal li feseit,
60 Geo U est vis mûrir deveit ;
Qlje d'arsun que d'e^ipuntaîllc
La quida remeindre saui faille-
(Lt resU manque.)
Le fragment Piot, qui paraît écrit au commencement du
XIV* siècle, appanenait à un manuscrit de Touvrage complet.
Les morceaux qu'il renferme correspondent aux feuillets 198
c-199 € et 2ri è-liz i du nis. de TUniversité de Cambridge*
Je ne juge point utile d'en citer aucun extrait.
Revenons maintenant a notre manuscrit de Trinity Collège.
Il nous offre à peu près les mêmes extraits que le fragment
d'York et commence de même. Seulement le texte est fort cor-
rompu. Je donnerai en entier le premier morceau et les pre-
miers vers des suivants.
I. Cest bien/i*rm^et non fàsferms ; ms. de Londres dé Jtr, —2. îl y a
plutôt nchinout. ^ |. tltaut Unt-vint; même faute dans le ms. de Londres^
24 P- MEYER
plus haut, de ne pouvoir consulter te ms. de Trinîty, déjà
disparu. Le ms. de TArsenal a été reproduit par Monmerqué,
en 1834, pour la Société des Bibliophiles français, qui, à cette
époque, tirait ses publications h trente ou quarante exem-
plaires ' .
Si Delius n'a pu utiliser le texte du ms, de Trinity, son édi-
tion n'y a pas beaucoup perdu, car la leçon qu'offre ce ms. est
incomplète^ et bien souvent fautive. On en jugera par le
spécimen qui suit. Pour faciliter la comparaison, je joins, entre
( ), la concordance avec Fédition. On verra que le prologue
manque à peu prés complètement (les deux premiers vers sont
l'œuvre d'un copiste), et que beaucoup de rimes sont déna-
turées au point que, si un n'avaîr le secours des autres manu-
scrits, on pourrait croire que le poème a été composé par un
Anglais do xiii* siècle.
De seint Nicholas ai pensé, (f. 48)
Un 5«im de grant autorité.
En romauns dïrrum un périt (40)
4 De ceo ke le latîn nous dit,
Ke lî lai le puysent a[n]tefidrc
, . . , , ^ I
De Pâtre fti né, de une ctté
B Noble e riche de antiquité ;
Mes puys est la chose empiré,
A bon pnjf tut amenusé.
Père e mère out de grant hautesse,
12 De parenté et de richesse. (|i)
Asez urent or ç argent
E moût vjvai[e]nt seintemeot^
E tel enfaunt vodreient aver
16 Dount il puyient fere lour eir,
Kent soûl de bur manauntise
Mes de tut lur conquest en autre
[guïse.
Tel fu cum U desiraient; (sB)
20 Nkholas par noun l*a pelaient*
Ne eurent enfaunt quesoul cestuî :
Taunt Furent plus cher aumbeduî.
Petit fu a leure mis, (68)
34 Par grant entente fu aprb.
Encore petit en berz jesout, (62)
De soûl la mamelle vivout.
Si junout pur Deu amour :
28 Ne leitout que une fèz le jour.
Al niegredi e al vendredi; (6é)
Si U out De us de sa grâce enipR.
Quant plus criist, plus amenda,
p Ke plus servi, Deus plus Tama.
Lan'ertbachilers tut t'ourmez,(72)
De taunt de bonntés aloses.
Sun père prist definemen
56 E sa mère en se ment ■
De Nichoïas firent lour eîr,
I. Le volume de Monmerqué contient quelques autres icKtcs relatifs à
saint Nicolas, notamment une v<:rsion en prose*
2 Elle omet notam ment les v ers 1 j s o- 1 4 j 7 ,
|. Levers omis est» dans le ms. Douce, Qui m ^fvtttt klin miittdn.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
25
De ^uam kë il purraiÉnt aver;
E NichoUs tui départi,
40 TereSp mesouns, tm se feus vendi ;
Si dona tut a povre gent, (h)
Ne fisi autre reposetnent. (Si)
Uns povrcs hôume iluc maneii
44 Kc rkhes jadis esté aveil,
Mes en poverré en venuz ;
De ceus avunî plusours vuï
Ke de graut a ver ke li avdent
48 En povené grant deâc^ndeient.
Teus i a ke de po verte
Sount venuz en gram pkntê* (89)
Ce povre hou me out trcb pu celés,
52 Treis soue[s] files aseï btlcs;
Entre eus katre oc tirent kc
[prendre,
Ne a engager ne a despcndre ;
De vivre conseil ne trovdent
^6 Si a bordel' nen aleicni*
Sein Nichplas pité en prist; {98)
Ore oicz cum faitemeni le fist.
Voici un autre morceau que je cite parce qu'il contient une
série de %'ers qui manquent dans le ms* Douce, entre les vers
1283 et 1284 de Tédition de Delius * ;
Grand dol avett parla meson ; (f, 55 4)
Kj dolem se le perc nun? (i^JS)
« LasI dolent ->, fet il, « cheitîfî
Ne me en chou! si mus ne vif,
Quant si tost ai ni un fia perdu.
H Dell s! si poy je! ai eu.
E Deust tau lit fu lé quand jel oyi
E Deusî pur que» me dura si poy ?
Ma joie me a durrc petit.
Ore ai grant dol ; veirs dist ki ce iist :
Après grant nsgraot plur; (1282)
Après grant joie graunt tristuri ;
Après graunt gaine grant do mage;
Après grant sauncté vent grant rage.
Uocore uy matin al jur
Nen avey mal ne dolor;
Grant mal m*est avenu en poy d'oure
Deus î ke pecché m*est coru sure I
Nen avei unkes nul enfaunt
For sul celi, sî H amai taunt.
Perdu ai mun ût e mun herj
Ne (jul jamès nul autre aver.
Beiï ûz, beu chers, launi mar vus vi I
Mon, ke fet (sic) tu ? ven, si me oscî;
Mort, car me prcns; si me rent
Celui dunt ai le quer dolent.
Beu ÛE, de ceo sut angusus
Ke je ne pu se mtirir pur vus,
Ey ! sein Kicholas, kc en fray
De mon enfaunt ke perdu ay? n
Li père e h mère ploreient, U3S4)
Pletnent sai, si paumeicot. . , , . .
I* Les autres mss. donnent 5*f m galke (Douce), Si a galkt (B, N. fr.
902), Se qI gii^liz (Digby). La bonne leçoû S'a gaelise ne se trouve que dans
le ms. de T Arsenal (donnée en variante par Mommerqué, p. Î05); elle avaii
été restituée par M. Tobler (/î^w/uiua, II, 239),
2, Ils se trouvent aussi daas les autres manuscrits, par ex. dans B. N* fr,
902, foK cxxx t. et dans Digby. Delius a eu tort de les considérer comme
une addition postérieure.
l. Ce proverbe se rencontre fréquemment, avec des variantes : Le Roux
de Lincy, Livrr da prcv.^ 2* éd., 0^ 240, 472.
ïtte.
P, MBYER
plus haut^ de ne pouvoir consulter le ms. de Trinî
disparu. Le ms. de î'Arsenal a été reproduit par Monmerqu
en 1S34, pour la Société des Bihliophîles français j qui, à cette
époque, tirait ses publications à trente ou quarante exe
plaires ^
Si Delius n a pu utiliser le texte du ms, de Trînîty, son édi-
tion n*y a pas beaucoup perdu, car la leçon qu'offre ce ms. est
incomplète' et bien souvent fautive. On en jugera par le
spécimen qui suit. Pour faciliter la comparaison, je joins, entre
( ), la concordance avec Tédition, On verra que le prologue
manque à peu près complètement (les deux premiers vers sont
l'œuvre d*un copiste), et que beaucoup de rimes sont déna^
turées au point que, si on n'avait le secours des autres manu-
scrits, on pourrait croire que le poème a été composé par ui
Anglais du xni* siècle.
De selnt Nicholas ai pensé » (f. 48)
Un seint de grant autorité*
En romauns dirrum un petit (40)
4 De cco ke le latin nous dit,
Ke 11 Iti le puysent afnJiendrÊ
,..___.___ j
De Pâtre fu né, de une cité
8 Noble e riche de antiquité ;
Mes pays est h chose empiré,
A bon pruf tut amenusé*
Père e mère ont de grani hautesse,
12 De paremè et de richesse. (Sïj
Ase^ urent or e argent
E moût vivai[e}nt sein terne ni,
E tel enfaaut vodreient a ver
16 Dount il pu y sent fere lour eîr,
Nent soûl de tour manauntise
Mes de tut lur conquest en aotre
[guise.
Tel fu cum il desiraient; (58)
20 Nicholas par no un Ta pelaient.
Ne curent etiraunt que soûl çestui ;
Tauni Turent plus chtr aumbedu^^
Petit fu a lettre mis, (68)
24 Par grant entente fu apris*
Encore petit i^n bér/ jesout,(6l)
De soûl la mamelle vivout.
Sî junûut pur Deu amour:
28 Ne leitaut que une fèz le jour»
Al megredi e al vendredi; (66)
Si H out Deu s de sa grâce empli.
Quant pluscrust, plus amenda,
32 Ke plus servie Deus plus Tama,
Lan'enbachikrs tut fourmeï,(72)
De lautit de bountés aloses.
Sun père prist definemen
|6 E sa. mcre ensement ;
De Nicholas firent ïour cïr.
I, Le volume de Monmerqué cooticni quelques autres textes relaiiis
saint Nicolas» notamment une version en prose>
2 Elle omet notam men t ïes vers 1350-1457,
5, Le vers omis est, dans le ms. Douce, Qui nestvfnt iaiin mUndri.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
2S
De quam ke il purraîcni a ver;
E Nicholâs lui départi,
40 TercSj mcsouns» tut sa feus vendi ■
Si doua lUt a pûvre gent, (h)
No fisc autre reposera cm. (81)
Uns povres ho urne iluc maneU
44 Ke fiches jadis esté aveit.
Mes en poverté ert venuit ;
De ccus avum plusours vnz
Ke de gram aver ke il aveiem
48 En povenê graut dcsceodeiept.
Tcus i a ke de poverté
Sount venuz en grant pknté. (89)
Ce povre houme oui trcis puceïes,
52 Treis soue{s] files ascz bêles;
Entre eus katre uc urent ke
[prendre»
Ne a engager ne a despendre ;
De vivre conseil ne croveient
56 Si a bordel» nen aleient.
Sein Niehoïas pilé en prist; (98)
Ore ùkt curafaiteraent le fist.
Voici un autre morctrau que je cite parce qu'il contient une
série de vers qui manquent dans le ms. Douce, entre les vers
1283 et 1284 de Tédition de Delius ^ :
Grand dol aveit par la meson ; (f* $ s tQ
Ki dolem se le père nun ? (127S)
«I Lasî dolent -% fet il, a cheitifl
Ne me en chout si mes ne vif^
Quant si lost ai niun ûz perdu.
E Deus I si poy jel ai eu»
E Deusl taunt fu \é quand jel oyl
E Deus 1 pur quci me dura si poy ?
Ma joie me a durrè petit,
Ore ai grant dol ; veîrs dist ki ce iisi :
Après grani risgranc plur; (1381)
Après grant joie i^raunt tristur ï ;
Après gratint gaine grant domage;
Apres grant saune té vent grant rage.
Uncore uy matin al jur
Ken avey mal ne dolor;
Grant mal m*e5t avenwen poy d'oiire
Deus ! ke pecché m* est coru sure I
Nen avei unkes nul enfaunt
For sul celi, si li amaî taunt*
Perdu ai mun f^r, e miin hcr;
Ne qui jamès nul autre a ver.
Beu fii, beu chers, taum mar vus vi \
Mort, ke fet (jïV) tu? ven.si me oscî;
Mon, car me prens; si me rent
Celui dunt ai le quer dolent.
Beu liz, de ceo sui angusus
Ke je ne pu se mûrir pur vus.
Ey î sein Nichai as, ke en fray
De mon enfaunt ke perdu ay? *>
Li père e la mère ploreient, (1284)
Pleincnt sai, si paumeient. . . , . -
I . Les autres mss, donnent Se en gaïice (Douce), Si a galm (B, N. fr,
90a), 51f aigndii (Digby). La bonne leçon S'a goilise ne se trouve que dans
le ms. de T Arsenal (donnée en variante par Mommerqué, p. 305) ; elle avait
été restituée par M. Tohkr (Rotna nia ^ II, 239).
1, Ils se trouvent aussi dans les autres manuscrits, par c;^. dans B> N. fr.
902, fol. cxxv, et dans Digby. Delius a eu ton de les considérer comme
une addition postérieure.
3. Ce proverbe $e rencontre fréquemment^ avec des variantes : Le Roux
de Lincy, Livre dei pwv.^ 2^ éd., U, 140» 472.
34 1' MEYER
plus haut, de ne pouvoir consulter le ms. de Trinity, déjà
disparu. Le ms, de TArsenal a été reproduit par Morimerqué,
en 1834, pour la Société des Bibliophiles français, qui, à cette
époque, tirait ses publications à trente ou quarante exem-
plaires ^
Si Delius n*a pu utiliser le texte du ms. de Trinîty, son édi-
tion n'y a pas beaucoup perdu, car la leçon qu offre ce ms. est
incomplète' et bien souvent fautive, On en jugera par le
spécimen qui suit. Pour faciliter la comparaison, je joins, entre
( )j la concordance avec l'édition* On verra que le prologue
manque à peu près complètement (les deux premiers vers sont
Tœuvre d*un copiste), et que beaucoup de rimes sont déna-
turées au point que, si on n'avait le secours des autres manu-
scrits, on pourrait croire que le poème a été composé par ue
Anglais du xuï^ siècle.
De seînt Nichotas ai pensè^ (f. 48)
Un s^^int de grant autorité.
En romaups dirrum un petit (40)
4 De ceo ke le latin nous dit,
Ke li lai le puysent afnjtendre
De Pâtre fu né, de une cité
5 Noble e riche de antiquité ;
Mes puvs est la chose empiré,
A bon pruf tut amcnusé.
Père e mère out de gnuit hautesse»
12 De paremé ei de ricliesse. (51)
Ase2 urent or e argent
E moût vivai[e]nt setntement,
E tel eafaunl vodrcicnt aver
ié Doum il puysent fere lour eir,
Nem soûl de lour manauntise
Mes de tut fur conqucsi en autre
[guise.
Tel fu cum il desiraient; (ç8)
20 NJcholas par noun rapelaient*
Ne eurent enfauni que soûl cestuî :
Tauni Turem plus cheraumbedu^
Petit fu a lettre mis, (68)
34 Par grant entente fu apris.
Encore petit en hkrr. jesout, (62)
De soûl la mamelle vivout.
Si juno'Jt pur Dcu amour:
28 Ne leîtout qiâ^ une fèi le jour,
Al megredi e al vendredi; (66)
Si lï out Deus de sa grâce empli.
Quant plus crus!, plus amenda,
j2 Ke plus servi, Deus plus i*ama.
La nVrt bachikrs tut lburmez,(7i
De tau ni Je bountés aloses.
Sun père prist definemen
36 E sa mère ensement ;
De Nicbolas firent iour eir.
I, Le volume de Monroerqué contient quelques autres textes relatifs
saint Nicolas, nota m ment une version en prose,
2 Elle omet notamment les vers 1^50-1457,
|. Le vers omis est, dans le ms. Doixc&t Qui m ^fvfftl klin mkftdn^
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
2Î
De quant W il purraîeni avcr;
E Nicholas tut ileparti,
40 Tcres, mesouns.lui se feus vendi;
Si doua tut a povre gent, (h)
Ne fist autre reposenitnt. (81)
Uns povres houme îIuc mancil
44 Ke rkbes jadis esté aveît,
Mes en po verte en venii^ ;
De ceus avum plusours vuz
Kc de grant aver ke il aveient
45 En po verte grant ^escendeient.
Teus î a ke de poverté
Sou ni \ enuz en grant plenté. (89)
Ce povre houme out treis pucdes,
52 Treis soue[s] Ttles iiscz bêles;
Kntre eus katre ne urent ke
[prendre,
Ne a engager ne a despendre ;
De vivre conseil ne troveient
56 Si a bordel* nen aleîent*
Sein Nicholas pitéen pnst; {98)
Ore oie/ eu m faitemem le (îst.
Voici un autre morceau que je cite parce qu'il contient une
série de %ens qui manquent dans le ms* Douce, entre les vers
1283 et 1284 de Tédition de Delius * :
Grand dol aveit pr la meson ; (f. S 5 ^^0
Ki doleni se le père nun ? (1275)
m l^sl dolent M, fet U» " cheitif!
Kc me en chout si mes ne vif,
Qjuant si tost ai mun ûz perdu.
£ Deusl si poy jel ai eu.
E Deus! tauiu fu lé quand jel oyi
E Dcusï pur quel me dura si poy ?
Ma Joie me a durré petit.
Ore ai grant dol ; veirs dist ki ce Jîst :
Après gr^nt risgraDt plur; (1282)
Après grant joie graunt tristur i ;
Après graunt gaine grant domage ;
Après grani sauncté vent grant rage,
Uncote uy matin al jur
Nen avey mal ne dolor;
Grant m aï m'est avetiu en poy d'oure
Deus I ke pecché m'est coru sure 1
Nen avei unkes nul enfaum
For sut celi, si lî amai taunl.
Perdu ai mun fiz e mun her;
Ne qui jamès nul autre aver.
Bel) ûZf beii chers, taunt roar vus vî I
Mon, ke fet (sk) tu? ven.si me oscî;
Mon, car me prens; si me rent
Celui dunt ai le quer dolent.
fieu ûz, de ceo sui angusus
Ke je ne puse mûrir pur vus.
Ey ! sein Ntchoiis, ke et^ fray
De mon enfaunt ke perdu ay? «
Li père e la mère ploreient, (1184)
Pleiaeni sai, si paumeient
t , Les autres mss. donnent Se m galicé (Douce), Si a galice (B, N. fr.
902), Se al giuîii (Digby). La bonne leçon S'a ^attise ne se trouve que dans
le ms. de l'Arsenal (donnée en variante par Mommerquê, p. 505) ; elle avait
été restituée par M. Tobler {Rôntania^ 11^ 339).
3» Ils se trouvent aussi dans les autres manuscrits, par ex. dans B. N, fr,
902, foL cxxv f et dans Dighy. Delius a eu tort de les consid(ïrer comme
UDe addition postérieure,
5. Ce proverbe se rencontre fréquemment, avec des variantes : Le Roux
de Lincy, Livre du pfov,, 2« éd.^ II, 240, 472,
38 P.
3 Ke ben ne fet, tôt se repent ;
E si frews ensement ;
Si vus ne apemet ard u engin,
Vus en averet maie fin.
4 Ky ke iveresce e glotonie
Usit e suit par tute sa vie,
A la fin ert tard a dire :
U est li mire, u est li sire?
5 Lesset tute[s] ribaudies
E pecchés e vilaynies.
Car la joye poi dura,
Mes li peine grant sera.
6 Ment un franc dewent vilain
De dis, de fès et de reclaim,
Ne mie pur defaute de nature,
Mè[s] pur defaute de nurture.
7 Lesset orgul sur tute ren,
Car ele hunit vertue e ben ;
Le sage hume vus gerpera
E maluré vus tendera.
8 Lescés voster avant er
E noveleries cunter,
Ne ne aymit losenger
Ne hume ke est enginer.
MEYER
9 Ment hum ki est de grant gainz
Ki a ver est e vilain,
E quid estre un sage hum,
Si est estapé bricun.
10 Ne seet lechur ne glutun (fr).
Ne avantur ne felun,
Kar Jhesu Crist omnipotent
Het péchés e maie gent.
11 Ki ke est avers, par ma fey,
Si cum ens nos liveris vey,
For si isci ne se repent,
Sera dampné verament.
12 Ky ke vuit sut (sic) de clergie.
Il dut lescer sa folie,
Mè[s] ke entre si e Paris
N'i ust acun si sutils.
13 Ami, ne sehet pas pereceos
Ne trichur ne irus,
Car checun de sest pecchés
Avérât maie destinée.
14 Si vus peccatis, fay penance,
Ke vus puchés san dutance
Mûrir quant Deu plera.
Saches ke ceo vus sauvera.
7. Poème sur la Passion. — On connaît plusieurs poèmes
qui ont pour sujet la passion du Christ, mais celui-ci n'a pas
encore été signalé. Il est médiocre, et la copie est fort mauvaise.
Aussi me bornerai-je à en transcrire deux courts extraits : le
commencement et la fin ' .
Seignurs, plaist vus [a] cscuter (f. 74)
Cum Deus wint en terre pur nus
[sauver?
Cet devum ducement oïr
4 Si nus a lu volum venir.
Cet munde esteit tuz perduz.
Que * Deu n'i esteit ci venuz ;
Ainz laumes tut adessé )
I . J'avais d'abord supposé que ce récit était un dernier extrait du Miroir qui
aurait été déplacé, mais j'ai vérifié, à l'aide du ms. de l'Université de Cam-
bridge, que, dans le Miroir, le récit de la Passion est tout autrement rédigé.
2. Que, corr. Se}
3. SiCy corr. A, la fumes /. adossé}
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 39
8 Déguerpi et deshonoré, Par aumoines e orisuns
Quant li pius Deus nus visita, De aime, de cors afflicciuns.
Pur sa duçur, qui nos cria. Unques ne fit un sul pecché :
En tere vint pur nostre amur; 28 Pur Ie[s] noz fud crucifié.
12 Mut devum amer tel seignur. Sil le requit humblement»,
Char prist de la Vergine pucele; Uncore le fei\ il ensement.
Sa mère en fit ; ele ert ancele. Cil qui sun essample siuverunt
Veez cum grant humilité, 32 E tent sa vie ja n'i faudrunt*.
16 Quel duçur e quel pité!
Qjje Deus hume pur nus dewint, Ore escutet cum Deus vint en
En après mort en sustint; [Jérusalem,
Ne se poet plus en * humilier ; Ceo est la cité de Bethléem $ ;
20 Tant le devum amer' plus cher. La cité vit, si la gardât,
Trente deus annz e un poi plus 36 Dous disciples i enveat : (b)
Pu en cet cecle Crit Jésus « Alet », dist il, « en cel chastel,
Pur ensample e pur doctriner Un anne e un asniel
24 Cum nus devum a lui aler Qpe vus trov[er]ez m'amenet...
Voici la fin, où l'on reconnaît le récit de saint Matthieu,
XXVII, 62 et suiv. :
Li felun s'asemblerent, (f. 80 c) Ignele pas si dormeient.
Vindrent a Pilate, si li demanderunt Al ters jur si leva sus
Que le sépulcre gardast, Nostre Sire rei Jhesus,
Que houme Jhesu nen emblast, A ses apostles s'aparut,
Kar dune, dient, serreit le errur Quarante jurs od eus fu ;
Hastivement, mut peiur * : Si lur mustrat la novele lei,
a Jeo vus comand quel gardez Puis les baisât checun parsei. •
Autresi ben cum vus savez. » Issi nus puss'il sauver
El cil qui veiler i deveient E [a] sa glorie amener ! Amen.
8. Maximes de Marie-Madeleine. — Les douze vers qui
occupent une partie de la dernière colonne du feuillet 80 ne
1. Suppr. en.
2. Corr. aver.
3. Ce vers se rattache mal avec ce qui précède; peut-être le copiste a-t-il
omis une paire de vers, ou davantage.
4. Sic; on pourrait supprimer tent.
5. Ces deux vers sont inadmissibles, non seulement parce que le premier
est beaucoup trop long, mais parce qu'il est invraisemblable que Fauteur ait
identifié Jérusalem et Bethléem.
6. « Et erit novissimus error pejor priore ». Matth. xxvii, 64.
40 p. MEYF-R
tormenr sans Joute pas un poème complet. Je suppose qulls
sont extnits de quelque poème moral ou plutôt ^nomiqwSj
comme on dirait s'il s'agissait d'une œuvre antique. Je n'ai
point souvenir de les avoir lus ailleurs, et j'ignore pour quelle
raisf:)n la rubrique est placée sous le nom de Marie-Madeleine.
En tout cas, -e ne crois pas qu'ils soient tirés d'aucun des cinq
poèmes français que nous possédons sur cette sainte.
Hic iiwipiun: p^.r^^r'-ij: Marie M^J^Um (z, do /;.
Sachet q-c soven: mustre le vicrc Mes mcuj vaat apertc totie
SI ii bome est fol ou Jebonerc. 8 Ke trop coverte teionie.
Fol serabunt suv^enf indire Trop tost et trop urt se decoice
4 Li :blie que in quer tiibite. Ke le otil ceile de qce le muzere '.
E sovent se repce: ceier Fol sembun: ter toi reduter
Pirrair.riembLir.: = de i?eaovcrcr: 12 E bel semblant pnxiocme amer.
9. Effets des sept péchés capitaux 'k — Ce morceau est un de
ces résumés en forme de ubleau s^-noptique que Ton rencontre
souvent dans les manuscrits des derniers siècles du moyen âge.
Seulement ces résumés sont en latin, et celui-ci est en Érançais.
Les sept ^îces sont rangés dans cet ordre : or^ueily ertiie, ire^
a^\'idU, Jiaria^ lichsrU^ glotcnU *. Je me borne à transcrire ce
qui concerne les deux premiers.
FûI. ^i) Oruilfe: rvme :
Avincer sei de ber.es ki il n'a: rai en sci.
Feindre se: a^tre qje il se sei:,
Q:n:rcver novcieries,
Esrriver sanz busuir..
InoSedicT.: a De:: c a «un pronse.
Pervers t csntri l^îus,
Tcr.ser sanz enir.cs-ns.
: ':" A' . •-;. :rlf i-.::*' fr^ "ïi/;-;? Mais '.a ziznt avec J^cccrre
'-=. ..'■*.:•■. c*: ma-- il Se. :1 fa-irai: -^1*^ • i£ ^u£ .*r; :«:■:■'/ ?'t
V 't r.r ^,-: i= ctrrcsalin irjtl tmen: en usa^e. Autrefois on disait
r -S .'1 -i -L-::r-.: 1*; se?: ^z'r.a sa:r:e!s : voy. par ex. le Tr^u:us J/^
........ . . , ... ..,^^ ;:n:-ntnjc le -r.5. Di^by. Se . ?. i de la
zz: zt iz y. >:=-.j=. t: li S. ■:•« .'.' R:i. .Mais en dîsaî: aussi quelquefois
« v.T.i :ir -.i i . :: .i r-:te ci-arrcs.
i- C-rt . :-rc :-.nia;r=. Tyj:c:'::ls -i • g'.oiDr.:t t es: rarîcià placée avant
la « lechcrit >.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 4I
Envie fft hume :
Fere traïsun a sun pronie,
A ver joye de autri mal.
Haïr les bens de autri,
Grucer pur autri avancement,
Estre homicide,
De amer curage.
Dépraver autri bens.
De même pour irCy accidie^ avarice, lecherie, glotonie '.
10. Sermon en vers. — Ce sermon pourrait être la suite
de celui qui est transcrit ci-dessus sous le n° 6. Il est de
même en quatrains et est précédé de la même rubrique Sermo
communis. De plus, Técriture est la même.
Sermo communis pis m' (fol. 82 vo)*.
T Deu vus dura grant honur Mes de une cose vus gardet :
E grant joye e grant vigur, Kc trop avers ne sehet.
Nejadeceontfaudcret. 4 Qj.ant vus averet jolivé
Tant cum de pecché vus garderet. g^ ^^^ ,^ ^^.^ ^^,^^
2 Bon[s] amis en averet Pus de Deu recorderet
Tant cum leus3 estere wolet, E a 11 reverteret.
E si avérez sovent joye; ç,^ ^ anseynement
Jhesu Cnst le vus otro.ye ! ^us 5 apernet e afeiteraent.
3 Sen e saver e bon deliz Car une nature pot estre en tay
Avérez aset e de duz -♦ ; [mise '
1. Le ms. de Trinity n*est pas le seul qui renferme ce petit morceau. On
en trouve une autre copie dans le ms. I. 4. 4 d'Emmanuel Collège (Cam-
bridge) qui paraît être delà fin du xiii^ siècle, et ne contient d'ailleurs que des
écrits latins. Dans ce manuscrit, qui n*est pas paginé, notre morceau prend
place à la suite d'un traité « de viciis capitalibus ». Les variantes, par rap-
port au texte de Trinity sont peu importantes : ainsi, dans le premier para-
graphe, encheisun au lieu de busuin, et dans le second Fere detractiun de son
proeme an lieu de Fere traisun a.
2. Je ne me rends pas compte des lettres pis m' qui suivent la rubrique.
3. Loyal.
4. Il faudrait un mot de deux syllabcb. se terminant en -i:(.
5 . Vus pourrait être supprimé.
6. On pourrait supprimer les deux premiers mots. Je soupçonne que Tau-
^^^^^^4^^^^
^^^^^^^^^^^^^^^B
^^^^^^H De cetî ke tute ren justice
Quanke nus de nut u jur ^ ^^^^^^H
^^^^^^H 6 Hehet Maoc a ^rnie,
Servi a Nostre Seinnur. ^^^H
^^^^^^H Dcus vus dura lonke vie
13 Lonke vie vus du[n]ra Deus, ^^^H
^^^^^^H Hek est cutifort a peccheurs
Tant vîvere ke tu seras veus, ^^^H
^^^^^^H £ funteine de tus bon murs.
Si vus seit plen de mors ^^^H
^^^^^^H 7 Tut le monde vos amarftt {sic),
Et de bonté e des honors. ^^^H
^^^^^^H ^ Ki ke D€U emplay^rat;
t ^ Cil Deus ke nus ad formé ^^^H
^^^^^^H Sur tu lis humîs serra loué
Nus dont bone volumpté ^^^H
^^^^^^H Kj kt 3Îm dreU|e] leuté.
A estre franc e debonere ^H
^^^^^^H S Par tat s^ vus' amé,
Par la vertuc de ta (sa ?} mère. ^U
^^^^^^H Cuveyté e désiré
14 Le buntés ke su m en nus ^^^H
^^^^^^H Pur vQ^tre grùnî curtasie;
Acumer ne puruns, ^^^^|
^^^^^^H E)eu vus durât lonke vie.
Or fort est a cunter ^^^^H
^^^^^^H 9 Ky ke est de bone afere,
Ceo ke Deii nus post doner. ^^^H
^^^^^^H Leii$ e sage, de heté chere^
I ^ Mut seun fort e hardis ^^^H
^^^^^^1 Deît amer saîncte Marie
E sucurable a nos amts, ^^^H
^^^^^^H Ke aJ juge pur vos prie* (d)
Car aumône est e cuncysie ^^^H
^^^^^^1 10 Asdt de àm e de wiande ^^^^
H charité ç cumpanie. ^^^H
^^^^H E de quanke sun quor demande ^g Sehet tujur^ perraanem, ^^H
^^^^^^H Aveint le bon chresEîan,
He vus avcret la joye grant ^H
^^^^^^H Si eu m aveit sein Jau.
Ke nul hume ne pet pencer ^|
^^^^^^H 1 Après le jurs de ccste
£n le cel ke tant est cler. ^H
^^^^^^H Tut scrat parempHe
■
^^^^^H A k suite se Ht, au bas de la colonne, ce quatrain qui n'a ^|
^^^^^H guère de rapport avec la pièce
précédente, bien que de k même ^H
^^^^^H
j
^^^^^^^H vus seiz messeger, ^^^^M
^^^^^^H Cuncte, e ^^^|
^^^^^^H MessuQges
ne ^^^H
^^^^^^H
vus tenet. ^H
^^^^^^ teur veut opposer natun^ c'est-à-dire les qualités innées, à nûrrtturf ou nur- ^|
^^^^K^ lUTf, les qualités acquises, mais H est
possible qu*il y ait une tacune au mïliee ^H
^^^^^H du quatrain, car le sens se suii mal.
^^^^1
^^^^HL t. Om-jusiisi.
^^^H
^^^^^^^k 3. Corr. Sfrri pu$ ?
^^^H
^^^^^^^^ |, Après ce mot le texte porte avec ou m?ti, ce qui ne parait pas avoir de ^|
^^^^^^V sens 14:1. Il budrait peut-être corngtr
le vers ainsi : Quankt mfr^ dt... ^H
il
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRrnGH
43
Nous abordons présentement le second des deux manuscrits
êunis actuellement sous la même couverture* L'écriture parait
^etre de la première moitié ou du milieu du xV^ siècle, et les
opuscules qui y sont réunis sont de la même époque. Cela
est sûr pour l'un d'eux (celui qui sera publié ci-après sous le
n" 12) qui a du être composé en 141";, et probable pour les
autres. Tous, à Texception du dernier, sont des écrits didac-
tiques destinés à l'enseignement du français en Angleterre*
11. Femina, — Tel est le titre du premier des opuscules que
nous allons passer en revue, La rubrique initiale nous donne
l'explication de ce titre : « Ce livre est appelé femme (Jemina)
parce que, de mime que ta femme enseigne à Tenfant a parier
la langue maternelle, de même ce livre apprend aux jeunes gens
à parler correctement (rethorice) le français. »>
Ce traité, qui est anonyme, est en vers de huit syllabes.
Après chaque paire de vers est placée la traduction en anglais.
Nous sommes au commencement du xv= siècle : le français
n'est plus aussi généralement compris que cent ans plus tôt.
L'objet de Fauteur L\st d'enseigner le français de France, qui est
soigneusement distingué du français d'Angleterre. G est proba-
blement là ce qui est indiqué par l'expression de la rubrique
<f rethrice loqui galHcum »* Voici comment l'auteur s'y prend
puur distinguer ces deux sortes de français. Dans ses vers — qui
naturellement n'ont rien de poétique — il écrit les mots selon
l'usage de France', puis il indique en note la prononciation
usitée en Angleterre. Ainsi il écrit au premier vers Bian enfant
(ce qui n'est pas absolument correct, car il laudrait J3^/), et en
note il nous avertit qu'il faut lire, c'est-à-dire prononcer, ku
infûunî. Il marque les appels de note par tes lettres de Fal-
phabet. Il s'agit donc d'enseigner le français littéraire tout en
conservant la prononciation du français d'Angleterre. Cette dis-
tinction entre U frtnch after ihi school of Siratfordatte Bcue et le
french ûf Paris ^ comme disait Chaucer, est très marquée au
ï. Bien entendu il peut arriver que de temps â autre le copiste ait trahi les
inteotions de Tautcur.
44 P- MEYHI
XIV* siècle dans la littérature française d*Aïigle[erre : à côté de
poésies écrites en un français trè^ corrompu, on en rencontre
(celles de Gower par exemple) qui sont d'une langue presque
correcte.
Le traité est interpolé. Du fol, 93 au fol. 129, le ms* de Tri»
nîty contient le texte presque entier de Vaprise de françeis de
Gautier de Bibbysworth^, et un peu plus loin sont cités des
vers latins. Je suppose que ces interpolations sont du fait de
Tauteur de Ftmina^ parce que les vers de Gautier de Bibbys-
worth sont accompagnés (après chaque paire de vers) d'une
traduction anglaise.
M. Aldis Wright, de Trinity Collège, ayant Tintention de
publier Femina pour le Roxburghe Club, je me borne à en
donner de courts extraits.
(Fol. 88) Lihet hk %*ocahtr T^iAmh, quUu mut feminu docfi mfankm Icqui
maUrnam^ sic doctt bit ît^r pn^frm rttJjotkr loqni gallicum^ prout infrapatebît,
CapiîuJum primnm docd rethorice lo^ui de asstmiliiudit$f hesHûrum,
Beau^ enfant ''^ pur apprendre
Ou Irancds ^ devez bien ^ entendre
Fayrt çhyîdt^ for to knte
în frtnsh ye * idntt wft understatide.
CoiDment vous parlerez bealmeni '
Et devant lez sagez nattiralmenr.
Hoîtr yt' scfxii sptke Jayre
And ajort ihy^t Mty^t mm kyttddy.
Voici le début du morceau tiré de Gautier de Bibbysworth ^
(Fol. 95) Hoc capiiulvm docH dt propndaiibu$ în/anHum.
Quauni enfaunt csï primez ncei *,
CovicQt qll soit inallocci {&u%
Puis en soun biers ly cochez
E be[r]oere lui purvdcz.
I. Bihkm'orih dans la plupart des manuscrits (Sitheswty dans le ms.
Gg.Uî de rUnivcrsilé de Cambridge, R&mania,XV, jia). Cesi Bibbysworth,
paroisse de Kimpton, comté de Heriford, comme Ta montré M. Aldis Wright,
Notei and Quartes, 4* série, Vllï, 64 '1877).
a. J'écris ye avec j^; il y a dans le ms. un jioke, signe que je n'ai pas à ma
disposition; voy. p, 25, note.
j. Editions : Th, Wright, A ti^ume qJ vGc^hrm (18^7), p. 14I ; nion
Bfcmiîi lamitm textes, partie française* n» 57*
4. A partir d'ici je ne donne plus la version anglaise.
a beau drkt kg* beu* — b enfaunt. — r fraunceys. — d bcin* — r bck-
ment.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 45
Quaunt enfaunt comence a chatoner, Pur ses draps saver de baveure
E einz qu'il sache as pies aler, Ditez donque a sa bercere
E il bave de sa nature, Q'ele face un bon bavere...
Le traité de Gautier se termine au fol. 129 comme suit (cf.
Romaniûy XIII, 503) :
Et quaunt la table fuist ousté, E ore Bnie icy ma resoun.
Grant poudre ove bon draggé And ofolher nobley was fusoiiy
E d'autre nobleye fuist fusoun, And now y eude hère my resoun.
Mais l'ouvrage reprend aussitôt comme suit, avec un extrait
de l'enseignement de courtoisie connu sous le nom d'Urbain
le courtois que nous retrouverons plus loin en décrivant le ms.
O. I. 17 :
De moribus infantis.
Ore nurture jeo voile aprendre Cornent jeo voile que soiez norrys.
A totez que sount d*age tendre ; Jeo voile tout al primour (vo)
Now nurture y wyl teche Qpe soiez humble et plein de doulçor.
To al that hen of âge tendre \ Soiez ensi franke e [de]bonere ,
E pur vérité je vous di : Sanz mesditz et sanz meffayre,
Hony est il que n'est norry. E de beale porture entre le gent,
Ore escotez, monn chier fitz, Ne trop hault, mes mesnement...
L'auteur de cette rédaction cite des autorités latines, par
exemple le Pseudo-Caton (fol. 134) :
Dandum etenim est aliquid cum tempus postulat aut res',
ou encore les vers célèbres :
Si tibi copia seu sapiencia formaque detur, (fol. 135)
Sola superbia destruit omnia si comitetur*.
Voici la fin du traité proprement dit (fol. 138 v°) :
Si vous disirez grant honour Qpy luy mesmez sciet justicier.
Et dignitez d'emperour. Ore priez Dieu issint puissetz finer
Eniperour en droit [est J] nomez Qe a soun joye purrez vener.
1. Livre II, dist. S-
2. Voir, sur ces deux vers, qui sont du xii* siècle, les Contes de Bo^on (Soc.
des anc. textes français), p. 18. J'en ai cité à cet enJroit de nombreuses copies.
J'ajoute qu'on les retrouve dans le ms. B. 2. J2 deTrinity, au fol. 8.
j. Je restitue d'après l'anglais ^^j w^wW.
4^ P^ MEYER
Les ff. 139-146 sont ocoipfe par une sone de glossaire
alphabétique disposé sur trois colonnes qui sont intitulées res-
pectivement : I'' Régula scripiioniSj l"" Régula lacmioms, 3*^ Régula
constructionis. Dans la première, lauteur écrit les mots seloQ
IWhographc qui lui a paru la plus correcte (c'est en somme
l'orthographe du français de France), dans la seconde est figu-
rée la prononciation; la troisième contient la traduction
anglaise. Voici du reste Texplicacion donnée au début tant en
français qu'en anglais \ mais je transcris le français seul :
{FoL îjS v^) La rule qu'est en suant e[n]seigîie ensemetit cornent vous
scrivcrcît vostrc fraunceySj et ce est en h primere rule^ la ou il dit Hfguh
scripcionis. , , En le îj« lieu prochein ensevant a pan senestre, la ou il dit
Régula ïôcumnk^ si com est escript en nresme la rulc, en tieï mmerc lirrex
vostre fraunceysj et issint une rule enseigne a scriverc et l*autre a Ucre (fol%
159); et en le tierce lieu, q'est devisé !a ou il dit Rtgnîa cominu-tioms^ ceste
rule enseigne le cnglysh deï voz paroles de fraunceys* Et en tiel manere la
primere rule enseigne pur scrivere, la seconde pur lire, la tkrcc pur entendre
et ensement enseigne plusours differencez du ffraunceys.
Il me paraît certain que ce glossaire n'est pas un ouvrage à
part, mais est réellement la dernière partie du traité Fanina.
C'est toujours le même système, très régulièrement suivi, qui
consiste à distinguer le français littéraire, envisagé spécialement
au point de vue de la graphie, du français parlé en Angleterre.
De plus les mots enregistrés dans ce glossaire sont ceux qui
sont employés dans la partie précédente. Je vais en donner
quelques extraits,
n
m
avintt
autre fetTîtise»
almei vel aimes,
aidant,
acier ^
avaunt, cum u kgelur,
aultrc fcmmt%
lutics vd itme,
aidaunt, cum u,
acer.
To fore,,,
anothcr woman***
soulys or souk,
hdp)^ige,,*
steeL
a^f^vesque,
bien,
beau,
chicn^ itc. Piàartiium,
ar^'vc*^ue,
beti,
weL
fayrc..,
an hounde.
chiâOi ^, PariHum, )
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
47
m
chiet, sec.
PikardiatHy
\ cheet vel chaat,
an kat.
chiat, sec.
Parisium ',
1
chiere,
chère,
diere.
chief,
cheef,
ahevede...
vient,
veint,
he cometh (f. i66).
vint,
eod. modoj
twenty.
vault.
vaut.
the worthe.
vostre,
votre.
youre.
veout, vel veult,
veut.
wyle.
viande,
viaunde, cum «,
mete.
viUe,
vile.
atoun...
Les ff. 147-8 contiennent les noms de nombre cardinaux et
ordinaux, les noms des jours, enfin quelques observations sur
les pronoms et la conjugaison de quelques verbes.
12. Dialogues français composés en 1415, — Ces dialogues
sont des modèles ou exercices de conversation analogues à la
Manière de langage que j*ai publiée en 1873 et dont j'ai, depuis,
signalé diverses copies*. Ils sont plus courts et offrent moins
d'intérêt pour la lexicographie, parce qu'ils sont moins riches
en listes de poissons, de comestibles divers, d'objets d'habille-
ment ou d'ameublement. Enfin ils sont moins anciens, le texte
de la Manière de langage que j'ai publié d'après le ms. Harleien
3988 étant daté de 1396, tandis que les dialogues du ms. de
Cambridge sont évidemment de la fin de l'année 1415, puisqu'il
y est fait allusion à la bataille d'Azincourt (25 octobre) comme
à un événement tout récent. L'intérêt en est cependant très
réel, d'abord parce qu'ils sont exactement datés, ensuite
parce que la scène est placée en Angleterre ', ce qui prouve
qu'au commencement du xv* siècle, en Angleterre, même dans
la classe bourgeoise, — les personnages mis en scène sont de
1. Je crois bien qu'ici le copiste a mal copié son original : la différence
entre la forme picarde et la forme française n'est point du tout celle qui est
ici indiquée.
2. Romania, XV, 262-5.
3. Les interlocuteurs de la Manière de langage sont supposés voyager en
France.
48 p. MEYER
condition plutôt inférieure, — on avait à cœur de savoir lire et
parler !e français. Enfin, on y pourra puiser, comme dans la
Manière de langage^ d'utiles notions sur la vie privée à la fin du
moyen âge. La lexicographie française, et même anglaise, tirera
quelque profit de certaines parties de cet opuscule, notamment
de ta liste d'étoffes que contient le § VIH.
Ces dialogues, pour être inédits, ne sont pourtant pas incon-
nus. Il en existe deux autres copies^ Tune dans lems- Dd. 12.23
de la Bibliothèque de rUnïversité de Cambridge (foL 7- 13),
l'autre dans le ms Add, 177 16 (foL roi-lo6) du Musée Bri-
tanique \ Je me suis servi de ces deux copies pour rectifier ça
et là les leçons fautives du ms. de Trinity-
I. Signalés l*uti et l'autre par M. Stûtiîmgcr, Orthographia galUca, p. xiv,
{ÂUfraniàmdx Biblwihtk^ t. VtU)* — Le tns. de Trinity est k mdlleor des
trois. Les deujt autres supprinieiit ou modifient les traits loeaui ; !e ms. de
rUniversité noiammcnt substitue Londres â Oxford ($ III), ce qui est par-
ticulièrement absurde. Voici, comme échantilîot), le commeoccmeni des deux
textes :
Cambridge, Univ. DD 12. i|.
(FûL 7 t'*) Sire bon joQf. — iiire, boa
jour 1 vous, ou bon joar a «9u& d oigne
Diciî î — Sire, Dieii fûb* savc 1 — B vou»
auij. ^ Sire, Dieu vous dolgnc bon vie et
longue ! Sire, Dxtn voos garde. — E
voua aoïï. Et après mangvr, vous dirr^
ainsi : Sire, bon vcprci ou bott SOCK î —
Sirt;, bon ^orc a vous. — Si ré, bon noct.
— SirCi bon doet a vous doignc et bon
repos î — Sire, repOKz bien. — Sire, vous
estes bien venu. — Sire, Dieas. voo»
diraunce ! — Sire^ vostre lucfciÊ. — Sire^
Bien vou& esploit. — Sire, Dieu soit ove
vous.— Si re» voiles vous miingcr ovc nous ?
— Notiy^ dre ; certes j'ay mangé. — Sire,
bcvci, — Sire, commencei. — Sîrép pcme^
îc hatiap. — Sire, non pas davant voti*,
M Toû* plest* — Par Dieu ! si fre». —
Sire, grand mericye, — Sire, prons ¥ou8
Uct^ on si grande prous te von» facel —
Ore, »irc, de» qucui parties veocx voui?
-^ Sire, |e vcignc des partiez de France..^
Musée brit., add. 17716
{Fd. io^ t") Sire, boâ jour. ^ Sire,
bon ioTtr a vouzi ou bon jour vous doigne
Di€iaï t — Sire, bofi matin a vou3; ! Sire,
Dieui vous savel Sire, Dieua vous benei-
guey ï Sire,* Dicut loîcïl Sire, Dieux vous
doign« bon jour et longe II Sire, Dicuivous
doignc bon joie et (/. 103 ; bon lïtnïté.
Sîre^ Dtcn^ vous guard ! — Sire, et vous
ansi. — Sire bon socr.^ Sire, bon socr a
vciuz,Sire, vous este* bien en^ountre?. Sire,
esiex vous bien vcnuf. Sire, Dieuï von«
etploite! Sire^ Dieux vmis avaunce^. Sire,
prout vous (ace» — Sire, grani œercte. —
Sire, vuilcï vous manger ove notis? -^ Non,
Sire; ccrtèE ]'xy maungê. — Sire, bevct*
— Sire, comcncei. — Sire, pemez le
hAfuip. — Sire uoa pas devaunt voua, si
VOUA pkst. — Par Dieux si frei* — Ore,
STI% i Uicuii sotei. — Or, Sire, a Dieun,
bon notn. — Sire, bon nœt a vour doigne
DkaE et bon repos. — Sire, vous estez
bien encountrea. — Sire, von* cite* bien
venuiu — Sire, cornent ovc vouz e»l ii ^
— Sire Je me h pur voui grjudt mercie. Or,
Sipe, des «jtieux punies veignca nousT^..
LES MA^JUSGK!TS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 49
(Fa/* 149) I. Sire, le bon * jour. Sire, boû jour a vous ; ou : bon jour vous
doyne Dku 1 Sire, bon maiyn. Sire, bon matyn a vous. Sire^ Dieu vous
savel Sire, Dieu vous betioy! Sire» a Dîeu ,soiez î Sire, Dieu vousdoyne boû
vie et longe l Sire, â Dieu vous comande. Sire, Dieu vous doyne bon san%té
et bon joyel Sire Dieu vous gurde! —Sire, et vous auxci. — Sire» bon soer*
Sire, bon soer a vous, — Sire, vous estez bien encountrez. Sire, vous estez
bien venu* Sire, Dîeu vous esploite ! Sire, Deu vous avaunce ! Sire, prou vous
face 1 — Sire, gram mercy. — Sire, voulez vous manger ove nous? — Non^
syrc. Cenys, j*ay m ange ré ($k). — Sire, beve^;, — Sire, corne ncez. — Sîre»
pernejt le hanap, — Sire, non pas devant vous. -- Si vous pi est, par Dcu !
— Sire, ferez ore- — Sire, a Dieu, boiî noet, — Sire^ bon noct vous doyne
Diau et bon repos I — Sire, comem ove vous esi? — Sire, le meuix, pur vous
graunt mercier. — Sire» des queux parties veigne^ vous ? — Stre, je veigne
dez partiez de Ffraunce* — Sîrc, tjuelez novclx de par de la ? — Sire, le roy
est en bon point, loiez soit Dieu I ovesque toute sa compaignie en lez parties
de Normandie, et il est en sanitee luy niesmes, mes pîusoursde sez gL-nizsouot
maladez et beaucope d*eaux sounî mortz. Et en oultrelc roy arryva illocques»
joust la ville de Harfleu, et avoit mys un graunç siège sur la dite ville ovesque
le nombre de LX * m. persones, et, parmy la grâce tle Deu, il ad conquys la dicte
ville ', et est rcmeué de h dicte seege, et -^oy purpose pur aler versCalays, par
my la terre de Fraunce. Et puis j'ay oye dyre qu*ore tarde les seignours de
Ffraunce> ovesque la nombre de l ou lx™ persones armez, ount cncontrer
le roy par le (y^) chymyn, et le roy, ovesque le numbre de x^i persones, ad
corn bat U2 ovesque eaux a un lieu apellê Agincourt, a quel bataille i sount
pris et tuez xj^o personis dez Ffraunceys, et*^ sount tuez fors que ,kvj. per-
sones dez Engiès % dount ïe duc d'Ever^^■yk cstoii un î et le counte de Sufif. un
autre; et k roy avoit le champ et k victorie, loiex soit Dieu ï et mist tout^
les autrcz Fraunceys au fewe^ ; et issiat le roy tient son chemyn vers Calays
et soy purpose de retourner en Engleterre, par la grâce de Dieu.
IL En ûustre, sire, vous dy pur certeyn que les Ffraunceys que furent pris
al dît bataylîe Agincort» c'est assâver le duc de OrUaunce, le duc de Bur-
bayue*, et plusours auîrez countes, chîvalers, et esquîers vaillaunu, si bien
d'autre* estraungez terrez corne de Ffrau nce, serount anmesmez ■* le jeody pn>
1* Le 33 septembre 141 j (Monstrelet, M* Dou^t d'Arcq, lll, 8s).
2, 600, sebn Monstrelet (III, llo)» ce qui est moins invraisemblable,
î. Le duc dTorkj onde du roi d'Angleterre (Monstrelet, III, 110 et 119).
4. Brabant.
L «û. On peut îire ^wm, hoftê, peut-être bûun. — h. xl dans les deux autres
mss,, ce qui est plus probable. — C. SuppL [fte] ? manque dans les trois mss.
Ui ai Ou anmesnU^ ? Mus, br, atneinei^ Univ, amrttq*
Jt^M«itid, XXKII 4
%0 p. MEYER
chein après le festê (de seiot Marn^n ^ envers Loundres ; eî ils soutu arriveï a
Dovere, et touiz lei gemz de Keni et d'Essexe suffisaunt furrount ^ ttious-
trés en lour meilour array par le haut chyniyn entre Canierbery et LoadrtfS,
et lez gentes de Loundres bîen'^ <;n armez et arrayez eust naoïastrerent*^ sur le
Blakebeth * pur encoumrer ici ditz Fraunceys, afyn q'Us purrount veyer quel
poepîesount lessez derere le roy en Engleterre pur la saufgarde de mesmc le
rayme.
in. Syre, ou pcnse^î vous chîvachcr aiioet ? — Sire, a la prochenc vîîîci si
Dieu pleat. — Sire, quel apt'Uez la prochenc ville? — Sire» ^ape^lent0^one* ^
verement, — Sine, de celle vï\h(JoL 150) j'ay oïe parler graund bien de moult
genK. Sire* corne t>ien longe de cy est ycdle ville, je vous prî? — Sire^
nous avons bien x lewes ïllocques unqore, — Ore, sire, lessoums chîvacher'
ensemble» je vous pri. quar je pense Akr ou chîvacher a mesme la ville, mes
je ne coni pas ben le chymin, et, si me voiliez renseigner, j'estoîse grande-
ment tenu^ a vous. — Par ma foy» sire, volunters, et je suy très lés de vostre
compaignye^ mes je me doute que je ne puisse mye vous suer, quar je siiy en
panye malade, et non pas toute gari?, unquore, et mon chîvalx est laas et
doyé* devauni et derere; soun doos auxi da la seel est blessé, et Tun oïl est
oustèj mes unquore il n'est pas vougîe ; et quaunt il vient a un fossé par-
founde, moy covyent !uy porter, quar» certis, il ne poet mye se^ jambes hors
de le lay lever* — Dunques, sire, aloums e[n]sembîe, en noun de Dieu, et
nous y vendrouns en beu temps par le haut sobyl, si Dieu pïest. — Ore, sire,
ou serroums loggez, quaunt nous voîgnoums la ? — Syre, a le molyn sur le
hôpî, en le rewe de No rt h gâte*» [que*] est ie meilïour hostell d'i celle ville»
1. Le 14 novembre.
2. Black-Heath» sur la r, g, de b Tamise, au sud-est de Londres,
3 C-à-d, a chevauchons j*^ lit 10 rûh On rencontrera plus lo m d'autres
exemples de cette sorte d'impérai if composé*
4. Enclouè, blessé par undou, Godefroy ar^dpfren ce sens (au Coinplé-
meni), mais non ps&cloer. AogL to f/oy(Murray» Nne engL tlkt.}.
>. tf A renseigne du moulin n. H&op (voir Ntu* otgî. tîkL) désigne le
disque de métal sur lequel était représenté le moulin.
6. Li rue de Nortbgate correspond A^sti bien à la grande rue d*Oïford
appelée actuellem^it Cornmarkct, La porte du nord (Northgaïc) était tout
près de l'église Saini-MîcheK Le moulin mentionné dans le texte se trouvait
juste en dehors de Northgate ; voy* A* Wood» Surivy of t^ Anliquiîk^ of the
cHy ûf Oxford, edîied by Andrew Clark» I, ^407 (Oxford Hhtùrkai Sûcitty},
^. Ou turmufit : lire serrount, ou ferouni momtrts, — * f . Trin, fry, corrigé
d^âpfès les autres m». — d. Corr. mmatraQuni,
HK a. Mus. br 'ÙMuford^ Univ. Loundri^. — k Qtu' est restitué d'après
Mus. br. Ce ms rcmpbce Northgate par deux signes semblables â i; Univ.
supprime tout simplement Nortligate.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 5I
coni je suppose, qar nous y averommes boun chier et vitailie assez pur homez
et chivachx, et bon marché.
IV. Hosteller, hosieller ! — Sire, sire, je su cy. — Purroums nous bien
estre loggez cy eyns ? — Certes, mes maistres, vous estez très bien venuz
tantostz. Combien estez vous en nombre? — Mon amy, nous ne sumus icy
a présent fors que vj compaignons et iij garçons, ovesque noef chivalx, et mes
y sount plusurs de nous conpaignons derere. — Sire, vous serrez loggez icy
bien assez tout si vous eussez .c. chivalx. Sire, ont (i*) vous chivalx beu?
— Non pas unquore, quar il sount trop chaudez pur boire, pur ce que nous
avouns chivaché fors de Tettysworde » tant que en cea. En auxci nous estoions
pursuez ove larons icy a Shottore * * ; et ce nous chivach n'eussent esté le meil-
lours et la grâce de Dieu [ne] nous eust eidé, nous n'eussomes mye escapé
saunz robber, mes, loiez soit Dieu que nous ore sumus icy en savetté, quar
nous y aviouns grant pour. Et pur ce lessez nous garçons amesner ' nous chi-
valx suys et juys, en le rvve, en tanque ils soient enfreydez, et puiz les eawer
et laver bien parfunde, issint que lez estrwez et senglez soient nectez, savant
lez celiez ove hernoisez secchez ; et puis regardez que nous eions un bon
estabile chaud et bon literez tanque a la ventre de le chivalle, quar le temps
est froyde ; et auxci mettes waddes J de paile sek desouth lour senglez, et
frotez bien lour jambys issint qu'ils ne soient mye crachez <* , et puis lour donez
chascun chivalx ij botelsde feyn et j derr. de pain.
V. Hosteler ! — Sire ? — Coment vendez vous del aveigne ? — Sire, pur
iiiî d. le bussell. — Verement, c'est bon merché. Ore, ou est la dame de
cyens? — Syre, ila (lis. ele) viendra tantost : ele est ovesque une commère,
et ne denoorra guerres. — Dame, bon soer. — Sire, vous estez très bien
venuz. — Sire, coment a vous est, et coment avez vous valu depuis que
vous fustez derreinement ycy? — Dame, bien, grant mercy, et le meulx que
vous vaillez bien. Coment vaille vostre maryf et tout vostre mesnage?
— Sire, bien, loiez soit Dieu et le meulx pur vous. Sire, (/. 151) vuillez
vous approcher a la sale, ou vuillez mounter a la chamber? — Neny,
dame, nous voilons prender nostre chamber par temps, et voilez vous
nous faire a nou[s] un bon fu en le chemené pur nous rechaufer, et
1. Tetsworth, Oxfordshire, près de Thame.
2. Shotover, petit monticule situé à peu de distance d'Oxford, vers l'Est.
}. L'anglais ivadde^ des bouchons ou coussinets de paille, pour empêcher
le frottement des sangles.
IV. b. La leçon est changée d'une manière absurde dans Univ. : fors de Rou-
chester tant que en cea.,. ove larons yci sur le Bhchethe. — c. Trin. a mtsnUy
corrigé d'après les deux autres rass. — d, Univ. drache^.
V. a. Trin. moryt.
S2 P. MEYER
baillez a nous de vosrre pam et un hannap de st^rvobe pur nom reliaî-
tier^^ quar nous stimus nlOLlIe^ et ïaas, et nous avons chevache^ a [our
de huy %l lewes et pltis^ par niay foy. — Site, c'est grant travaill pur votis
qu'estez veille et malades, et je vous promette que vous avrez le meillour ser-
voise cy eins qu*eî*i eD ceste vîUe^ tt vous bevrez de ni es me le pot que nostre
sire bcvroit c'il fust a Tosiell, quar je le meltray a broche* pur l'amour de
vous. Et $\ vous vuitle3£ l>oire de vyn, je [c]nnvoieray a une taverne f jousi
le quatrefu[r]kes S lou * une pipfe] de bon vin vermaill est novelment a
broche, c a la corne sur le^ hôp* vous avérés de bon malve^ey ï% romeny *
bastarde^, Osey*^ Tyj*. vyn crei*, vernage^*', ypocras et vyn blaoc.
VI. Ore» bcde dame, qu^avrens a soper? — Sire, vous avérez a soper
viande assez. ; méï dite? a moy sî vous vuiUejs avoir vostre viande a p parai lé
cyens ou a le kewes ' ' ? ^ Nonîî, dame, en vostre cusyne demesnc, ou autre-
ment en le chemeney devant nous. ^ Syre, quel maner de viande ayme
vousmeulx? — Dame, fay te nous avoir àcz nieilloursvitaîlkz que vous ave£|
ni que vous purrez trover a vendre, - Sire, j'ay cy cins bons pulcytis^ cha-
1. En perce, angl, on hroach ou a ifreack (maintenait <£n un mot, abrmch)^
2, Aciudlenient Carfax,
?. Là où.
4. C'est une enseigne: cf. p. 50, note 5-
5. Malvoisie.
6. Vin de îîomenie, c.-à-d. d'Asie Mineure^ ou, plus généralement, de
l'empire de Byzance; voir le glossaire delà ManUn de îangâg^^ "^onskumnêy,
7. Le vin bi\tard est associé au vin de Romenic dans deux exemples de la
première moitié du xvi* siècle cités par Godefroy, sous Romehie. Vinum hai-
tarJum est entendu par Carpcntier (Da Cange, vinum) au "sens de * vinum
mîxtum V. Une définition plus précise est fourtiie par un ex. de 15^ cité
dans !e ^^' eugî. dkt. : « Bastard wine, that Is wine sod wîih ocw wine,
called must, «
8. Le vin d*Oseî, qui doit être un vin d'Alsace (Ausstti)j était (ftn connu
en Angleterre ; voir le gloss. de la Mttnu'rtr de iariga^f.
9. HalUwdl, Dkl, &f tirckik and promue iaî wordî^ cite un ex, de crtH€^
signifiant une sorte de vin doux. Le ms. de TUnivcrsité porte aussi crték.
Carpentier (dans Du Cange, visUM) cite un passage de la Ciavh satmiwnis
de Simon de Gènes ou innam cr^tkum est ainsi défini i ^ fit ex vinis (uvîs?)
tn vite pâssatis, poscea expressis, et est dukc. »
to. Ganache % voir Mm. éi long.
1 1* ir Céans (dans rhotellçrie) ou [au dettoi^} cher le cuisinier ».
t. Ou rttmiUf \ la fin du mot est abrégée- — c, Trin. lam'cr^ corrigé
d'après les deux autres mss. — d. Trin. iirt la, corrigé d'après les dtun
aitlrei tnss. — #« Tnn. mûlmis iu.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 53
pons, gelyns, pygeons, owes, porrelles » joefnes et gras, perdrys, plovcrs et
autrez oyseux petitz et grantz, heyrons, fesans et cockes du boys ou vide-
cockes, becaces « , allowcs, esturneux h ; dez gruez (v^) auxci et de gryvas et
d'autre volatyl savage je ne fayle ryens, signes, malardes, columbes et
pigeons; de poires et pomes<^ j'ay plentee ; formage et noes vous ne faillerez
point, et puis dez oues, bon candelle, et a vostre lyt une damoy[se]le beal *.
— Dame, grant mercy de vostre soper, mes de nostre lyt lessom «^ parler, et
de nostre dyner ' demayn a matyn, et pus nous irrouns nostre chymin. — Syre,
vostre lyt sera fayt bien tost et bealment pour vous coucher/ et dormer en
ycelle saunz songer if torment, dez* oraillers dez plumes et lynceux blancz,
materassez, coverlitz et blanket, curtyns, testez et syllour » vous y avérez tout
entour. — Ore, dame, grant mercy de vostre beal cheir. Pernez le hanap et
bevez le vyn cleir, quar, a vostre congee, voillon dormer. Appeliez [1*] hos-
teler pur nous counter combien paieroum pur nous chevalx et nostre soper.
VII. Hostiller! — Syre? — Sount nous chivalx appareillez « pur toute la
noet? — Sire, non pas unquor, mes lessez vostre garçon venir et dire* quei de
provendir ils avrount. — Johan ! — Mastyr, quevuillez vous? — As tu sopé?
— Oyl, syre. — Tien le hanap et bevez une foiz, mes ne bevez myetrop haut
pur doubte que vous soiez ivrez ; et puis va a Testable et oustez les sellez de
lez chivalx, et eaux correiex et frotez bien ; et auxci ccrchez lour pees e le[sj
stoppez de coyne, et pernez de grece et de bon servoise et les boillez
ensemble, et lavez ove ycelle toutz lour jambes, et auxci pernez de ceef et de
lyne+et le fryez ensamble en une paille veille de ferre ou d*aresme, et stoppez
le pee del chival gris (/. 7/2) qu'esteit cloié, et puis lour donez de provendre
1. Faut-il lire porceîUs ? Dans IdL'Mamtre de langage (p. 386), les « porceus
et porceletes » sont mentionnés, comme ici, entre les oies et divers oiseaux
sauvages.
2. Sur ce complément habituel de l'hospitalité telle qu'on l'entendait
anciennement, voir la préface de la Mau. de hng. (p. 376).
5. Le tester est le fond du lit, la partie qui s'élève derrière la tête; le syllour
est le ciel du lit. Voy. ma note sur ces doux mots dans la Man, de long,,
p. 384, n. 2, et sur le second, le \eu' efiglisb dictionnary, cfxure.
4. Du suif et du lin ?
VI. a. Tri n. betayes. — h. Trin. est ne veux. Mus. br. esturveux, Univ.
eslurneaux, — c. Trin. répète /\;irw. —d. Trin. kssam. — e. Mus. br. D,gr.
m. de iH)stre /i7^, w^;^ de nostre dysner lesson^ parler. — /. Trin. toucfxr. —
g. Trin. songer et corrigé d'après Univ. ; Mus. br. et dormer en icelV sauger ou
— h. Univ. ajoute piloue^ (l'angl. pillows) ou,
VII. a. Trin, apparculle^. — b. Trin. dur.
S4 ^^^mr p^ MHYER
as^ez, c*est a sa ver a chascun chival une pek' d*aveyne et plus de pain, sî
vous veiez que l>osoîgtic soit ; cl demayn levez bien matyn, et appçlkî! un
Jîerrour^ le meillour qui purna estrc trovcîî a la ville, et lesse/. lui ferrer ^
le chivâlï blanc, le chival noire, le chival sor^ et lex autrez hakeneys
enveyroun. Et» Jakcs, je loy promette veremem, si ceste chose ne soit
myc fait corne je vous ay dit, ou si je trovc ascun defaute en ta personc,
je loy fray coruser issîat que lu comparre^ grevousement.
VIU. Hostilkrl — Syre ? — Baillez cea de jettoursS et lessoms compter
combien nous avons a la chambre kx combien a resiable. ^ Sir» j'ay compté
ovesque vostre vadlel Guillam en la présence de sire Hughe» vostre chapeleyn.
— Bien» de cella je suy content. Tien ta mayn et pernez TargenL Combien
amounte, trestout compte? — Sir^ il amounte a v s., j d. meyns, — Ore
appeïleE la dame et cmple le hanap et bayllcit ■* nous a boire, Ffaïtez nous
avoir ]«£ poumes roste^ et mette? de payn tosiê a le fés, que fra nostre beve-
rachc plus fresk ^ . Dame, beve?., m^ commencejî ; dame pernez vostre hanap.
^ Par Diee, sii-i non pas devaui;t vous, si vous plaist. — Dame, qoei avrons
demain a jiostre dvner? — Sire, vous avrez viande asseJîj coyïez, rostez et
pestez; mes ditez moi vostre volnntê, quei vous aymerez meulz. — Dame,
faitez nous avoir braQn du sengler oveke mustarde, bons joutes ovesque
boef, moiun et porc boillez, (i-*) etceosulïiceiapvir hommes travaillauntz. —
Dame, ou est vostre maistrc* ?— - Par Dke.sire, il est aie a le feire d*une ville
qu*estdys kwes de cy, appelle Wodestukc'' ï. — Dame, quclc mcrchaundye
voei il vendre ou achatet illoeques? — Sir, il ad la a vendre boefs, vaches,
boveix, vecles, tores, eysnes et joefnes porcjt, senglcrs» iroyes, chival»^
jumeotz, polayns, berbys% motouns et berbys du mere^ toups/*» agnelx,
keduxi, cheverelx.asnes, mulcsetautrez bestcs. Il aauxcilapur vendre .xse»
1. Mesure d'avoine, picotin ; « pnk^ picottn, la quatrîesme partie d*un
boisseau «, Sher^ood, â tiicL rttgL athi frensh (imprimé à la suite de Col*
grave). L'ex, cité dans Godcfroy est tire d*un texte écrit en Angleterre,
2. Des jetons, pour faire les comptes; God*, cirroiR.
}. Woodstodc» Ûxfordshire, â il HK au N. O* d'Oxford.
4. Là leçon nVstpas douteuse, 6tani cdo^rmée par le ms.du Musée; mais
le sens de fti^rt est obscur. Quant à tonp^ c'est Tanc. anglais ittp, cncoa* usité
dins le nord de l'Angleterre et en Ecosse pour désigner un béïier. 11 y a dans
Gautier de Btbbysworth (mon Hecutil, p. 362) un vers où loup est employé
en ce ^ns : A M fuU dtrtni^ imp, glosé pr tvyn the mm atît wresilyr^.
5. Dérivé 1 forme française de kid^ chevreau? P.-é, fa ut- il supprimer la
virgule entre ce mot et le suivant ?
c, Trin. fffCfT. — 4. Trin. fw^ ou fmr, Mus. br. Si^rrt, Univ. soir,
VIIL rf. Trm. (MÎyîf^* — h, Trin. /rtnk. — f. Univ. tnaril. — d. Univ,
ÏVimhfiitr^ — r. Ce mot manque dans Univ. et est retn placé d^ns Mus. br,
par fwir** — /, Univ. motum t mtrtbtrbei^ tot^.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 55
sackes, .iij.toddes, .iiîj. percs et .v. clowes * delayne, deux centz peaux lanuz,
.xiiij.draps longez et dys doszeyns démêliez d'Oxenford, .xx.kerseys d*Abyn-
done' .X. blanketzde WytteneyJ, .vj. rougez de Castelcombe ♦, .iiij. russetde
ColchesterJ, scarletz, bloyesou pers selestiens, plunketz* sanguyns et violetz
en greyn rayés, motlez ^ de Sarisbury, et autrez divers colours de plusours
sortz pur faire lyverées si bien as seignours abbees, et priours corne as autrez
gentils du pays. Il a auxci de lynge, toille, canvas ou cambre, cordes, savon,
oyie, fere, peverez, jugebre et autrez espicerie et mercerye a taunt come lui
coste .c. H.
IX. Syre, je vous pri, ou pansez vous chivacher ore de cy? — Dame,
droit a Loundres, si Dieu plaist. — Sir, d*une chose je vous prieroy, si
j*osasse ou fuisse si hardy. — Dame, pur Tamour de vostre maistreet de vous,
je fray ce que je purray, savant moun estât, a vostre pleser. — Sir, j*ay icy
1 . SaCy tody perCy clot'e sont des mesures de poids. Le sac valait 28 stones
(en fr. pierres , 14 livres), voir Du Cange saccus 2 ; \e tod valait 2 stones; le
clove un dcim-stone (Murray. New engL dici,, clove). Sur perc]e ne suis pas
renseigné. On vendait la laine au poids : a Les laines vend on par sacs et par
pois, par pierres et par claus et par livres ■ {Le livre des mestiers, dialogtus
français-flamands composés au XIV'^ siècle par un nuiitre d'école de Bru^es^ p.
p. H. Michelant; Paris, Tross, 1875 ; feuillet B 5 vo).Cf. aussi les Dia-
logues français-anglais de Caxton, chap. v.
2. Abingdon, Berkshire, à peu de distance d'Oxford. — Kersey est pure-
ment anglais ; c'est une grosse étoffe de laine.
3. Witney, Oxfordshire. Le blanket est une étoffe de laine blanche (fr. hlan-
chel); p.-ê. avons-nous ici le sens, qui s'est développé en Angleterre, de cou-
verture. Witney est renommé depuis longtemps pour ses fabriques de blan-
kets:
4. Castlecombe, Wilts. L'industrie de la laine était florissante à Castle-
combe au xv* siècle. Elle n'a disparu que dans la première moitié du
xviiie siècle. Voir History of the Manor and ancieni barony of Castlecombe in
thecountyof IVilts, ..hy G. PoulettScROPE, p. 3. [London] 1852. (Printed for
private circulation). Le rouget était vraisemblablement une étoffe teinte avec
la garance (Du Cange, rogia, roja). Je ne trouve ce mot en aucun diction-
naire avec le sens qu'il a ici.
5 . Colchester, Essex. Le rousset est bien connu ; voir Du Cange, russetus.
6. Plunket, « a coarse woollen cloth », est enregistré par Halliwell. Ce
mot est sans doute le fr. plonquiéy désignant une étoffe de couleur de plomb
(Godefroy); cf. Du Cange, plonquatus.
7. Motlevy mottdey, nom d'une étoffe mentionnée par Chaucer (Prol. des
Cant. Taies, v. 273), est rattaché par M. Skeat (Etym. dict.)â un mot français
mattelé enregistré par Cotgrave, mais d'ailleurs inconnu.
j6 p. MEYER
un fiz del âge die ,3iij, ans, et, sol une vostn; av^ys, il est la {J. î$j) vol ti nié de
mauû maîftre et de moi pur Lui estowcr a un bon home de mesiîer en
Loundres, la ou il purroil bien cstrc cn5eïgn<î et governt! en l*^ man^re d'ap-
prentjrs illoequtis. — Dame* appeliez i'cnfaunt et lesse?. moi lui veicr.
Mouu fil, avex vous esté a Tescok ? — Oy, sire, par vostre congé. — A quel
lieu ? — Syr, 4 l'ostelle de WilL Kyngesiuylle Esc'uen •* . — Beau fyz, com-
ben de temps avez vous demurezovesque luy? — Sîre» fors que un quart de
an, ^ — Cella n'est que un poi temps; mes qu'avez votis jpriz la en ycel terme?
— Syr. mon maistre m'ad enseigné purescnre, cnditer, acompteret Eraunceys
parler. — El que savez vous en fraunceys dire r — Sir, je say moun noun et
mû un corps bien descrîere. — Ditez moy qu'avez a noun? — J'ai a noun
Johan, bon enfant, beat et sage et bien parlant engleys, Lraunceys et bon
normand. Beoeyt soit la verge que chasi[î]c l'cnfaum et le bon niaisire qui me
prist* uunt! Je pH a Dieu tout puissant nous graunte le joyc tous di*
durante
X. A u ici \ sire, j'esioy ayr a le feste ovesque mon chief^ove mon tï*ste,
mezcbivculjt reccrdlez, le frount devaiint, le col* dcrcr, Uî ordïei, les oillcz
ove le vcwe clcre, les papiers et le pumelîe, lez surcilea, le nées, Icï narrei et
te tendron, la bouche, ove te palet a mou m lez deniz, la lange, les gyii>
gyves, ïef Èiuk, le jowes et le mentoun, \^ K^^res desus et desuiz qu'en*
closent lez denii envyroun^ le hanapel ove lez terapïez et le cervel, le fo6selei >,
la gorge devaunt, la gargalette (t^Q) la ou mon aleyne est passant En my le
teste est le grève, le cakcnole * Jercrc» la visage devaunt de tout le teste; je
n'ay cure d*i la reraanant. Jay auïi le pys ou le pcitrync*, les espaulea,
I, Il semble que la réponse de fctifant soit une formule riméc apprise par
cœur.
2- On a dressé, au moyen ige, des diverses parties é\à corps certaines listes
qu'on peut rapprocher de celle-cî : par exemple dans îe Dkiiùnarim de Jean
de Garlande (Th. Wright, A iH.ûumt ef vocâbularm, p. m), dans Gautier
de Bibbvsworth (i/*/^., p. 144-^) ; dans la Manière de langa^^ (p. 582). La
plupart des fjominaiia commencent par une cnumL^ration de ce genre*
j. Au Cûoi trovrré^ iû fasset^ Gautïcr de Bibbysworih, éd. Wright, p. 146,
glosé par ir daik in i& nekki. C'est ïe petit creux qui se trouve derrière la tète,
au-dessous de la protubérance occipiule.
4. Qikrmfk, le derrière de la lètc, n'est pas relevé dans !e diaionnairc de
Godefroy. Cependant oe mot se trouve encore dans le traité de G. de Bib-
bysworth, dant un pass^^e du reste obscur :
E[n] checuti orayl si 2À mulet hoîe
Par cakertoîi c ccrvé net.
IX. a. Univ. Guiltûim Scrivgiur^, Mus. br. IT, ir,,.ii(isî abnégé, et le troî-
siè-ne cnot manque. — k II ùiut eniendr^ a^riU^ mais les trois mss. ont
prùL
X, tf* Trin, cor. — fr.Trin* pHîtym.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 57
blason * et l'eschyne, ventre, os, dos, mamels, costees, coustees, unibyl* et la
peel dehors que covere le vyt, lez coyllons, le cuyl, la chaar et tout le corps
En my lyeu, derer mez braas, j'ay lez coubtez sur queux je décline quant je
su laas; par entre le coubte et la cowe de ma mayn, j'appelle un cubyt en
longuer certein. Sur mez mayns j'ay les deyes, ou lez ungles d'eaux crcssantz, et
le poynque clost la mayn, quant j'ay scié unpoignon de bleededeins la paum.
XI. Dedeins le ventre j'ay le coer ou qui je pause de mon seen d'ap-
prendre et fayre bien, boweles en qels foy, esplen et renoun», estomak,
veyns et pulmon, reyns et punyl dehors, feel dedeins et vescye. J'ay auxi
lez jambes ou la ssure, quysseux et lez genules, nages et la forcheure, lez
pîés ove les kevyls, les urtiles, le plaunte et le talon dount le ffraunceys
est comun. Auxi, sir, j'ay de draps qu'apparteignent a mon corps de
lynges et de laynes sengles, furrez et doublez dedeins et dehors, chausez,
solers, botes ou hoseux et boteaux, chausemblez *, esporons, chemyse,
brays et brael, cote, purpoint et kertcl ?, surkot, mantel, tabarde et cloke*,
hopelonde, chaperoun, pilion et chapelet et autre garnement, ove man-
chez longez, largez (/. iS4) et bien taillez, • et, si mestier y soit, j'ay une
coiffe, peigne et un keverchief de soy, de fyle et de cotoun ; mes je ne vuille
mye oblier ma burse ne moun aguler ; et quant ma femme serrât enseyntée,
ele sera seintée de bon seinture : s'il ne soit de soy il serra de quyr ; mon dage
et mon cutell bien trenchant, la gaigne beal, et espeye et bokeler d'acer fynou
beal forure et lemel novel; mes je ne vuille mye tyrer mon espeye hors de la
foruresaunzgraunt eye7 ou cause resonable, quar l'em dit en seinte Escrip-
ture : « Cyl qui coveyte ferer ovesque l'espeye, par espeye il sera feruz* ».
E pur tut certefier la parole
Conoustre covent la cakenole.
(Wright, A voU of. vocah,, p. 146.)
Dans ce texte cakenole est glosé par l'anglais lyerespon (probablement faute,
pour hernes pan, actuellement barn-pan, crâne ; voy Ntiu engl. dict , harn).
Est-ce le même mot que caquerole (Godefroy et Cotgrave), coquille de limaçon?
1 . Blason se trouve, au sens d'omoplate, dans Gautier de Bibbysworth et
dans la Man. de hinar. (p. 383, n. i); voir Godefroy.
2. Cf. la Man. de lan^.y p. 383 : « la poitrin, lesmanieles, les coustees, les
costes,les flans, le dos, les os, l'eschine, le ventre, l'ombril ».
3. Rognon.
4. Le même que clmuncemele, chaussure, dans le Promptuarium pàrx'ulornm,
I, 71, (Camden Society).
5. L'angl. kirtle (voy. Murray, New engl, dict.)y sorte de tunique.
6 Cloche 2, Godefroy, vêtement de dessus qui couvre toute la personne,
l'angl. cloah.
7. Expression elliptique : « sans grant [besoing d') aïe ».
8. Matth. XXV, $2.
5 8 p. MEYER
XIL Auxd, beal fyz, je toy *» enseigne de coraunc langage et d'autre manere
de parhnce, et de^ divers choses, bestez et de gaynerie, issim «|uç de parkr
droit \*ous ne faïUerc:! niye* Si vous ireiex a bone compaîgnîe et gmrp€£
ks maveys et lour folyç ; mes d*iin homme ui d*une femtne ut de lour
enfaunt il nebosoigne pas purp^irler taum ^ de lour fij£, file ou filetie, garson,
pusele ou garsetie, valets lowys, servaiimz ne lour apprentys, veysyns,
tiiaistres, soveragnez scignours, subgitz, Jour amys e( bien voiilantz, austî dez
emperours, roys, dukts^ countes, barons, cbivalers ci esquier^. Les^om parler
del pape auxî et dez erce\^esques, evesques, archedekenes, denes, officiais^
prtïtres, derkes, abbees, moîgnes et priours, frères et chanons, noneignies et
autres religiouse^ ; de îa roigne atixi et de la duchesse, d'autrez damejt et de
U countesse, delà (t«) soer et sorceresse» de les veiller, vewes et virgines, de
le;5 ribaudes ou paillardcz puuignes, putevileï et villayns krofis, félons et
t rai tours. Autre fraunceys j'ay aprys pour un chate, un rate et un sorys,
Jyvre, livre, ïevere et leverer a estables et brichetz^ sieilespur la sale, docers,
blankers ou quarreuK, cheyres, auudyres, fourches de fere pur le feu,
basyns, ewcrs et chausours, poz et paillez d*aresme^ coupes d'or, pièces ou
tassez d'argent en dorrejî banaps de fiTraxmes ovc les covercle/ peyntez,
launces de verte, hacher de guerre, coynes pour couper bastons de keyne ri
coignes ' pur lez busches fendre^ et brgent coignée prendre ^ ; et autre armure,
c'est assaver baysinct, ou lombrere et la vcn taille, plates, pesynes'et haber-
geons, vambras, rerebras», quisseux et gauntz de plate, arkes, setes* et
cordes pur les arkes, vessclle auxj d'argent et d*esteyne, c*est assavoir deux
doszeinsdez cuillers d'argent merchezove le teste d*un libani «, JÎj. douszcvns
plateaux,. iij. doszeins esquiles ^ et .iij. dos. saucers.
1. Des coignéu pour couper, et des coins pour fendre le bois,
2. Manque dans les dictionnaires (pemm^ vase -iï huile, dans Godefroy,
ne saumit convenir). Mais le mot s est conservé en ancien anglais :« Fesanft
a gorget of mail or plate attached to the helmet n (Halîiwell)*
3. Avant-bras et arrière-bras, pièces d'armure. Le premier de ces deux
mots est dans le Complément de Godefroy.
4. SiiikSf flèches.
5. Lihm-df ancïetme forme anglaise de leopttnL On marquait autrefois Tar-
gemcrie eti Angleterre avec une tétc de léopard ou de lion (on sait que ces
deux animaux ont été confondus eti blason). iMaîntenant encore la marque
anglaise est un liati passant.
6. Êcuelles.
Xn. tf. Mus. br. /W%, qui semblerait préférable (à condition de lire
rmei^ni) puisque le jeune homrnc réeitc ce qull sait et nVnseîgne pas. Mab
btî fil ne s'accommode pas de cette leçon. U vaut mieux supposer que ce
passage est emprunté k un traité où un maUrc s'adressait à son élève. - h>
Corr. pur tant partir} -* ^, 5ir dans les iroln mis,
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 59
13. Traité d'orthographe dont le début est :
(Fol. 155) Primo sciendum est quod Htterarum alie sunt vocales, alie
consonantes. Vocales quinque scil. a e i 0 11, et dicuiitur vocales qui a per se
plenam vocem habent
Ce traité se retrouve encore dans le ms. Addit. 17716,
fol. 88, et dans le ms. 182, fol. 340, du collège d'Ail Soûls
(cf. Stùrzinger, Orthographia gallica, p. m). Il y a dans ces deux
mss. un préambule qui manque ici.
14. (Fol. 159) formules d'adresses de lettres selon la qualité
des personnes, et modèles de lettres en latin avec traduction
française.
15. Le mari cocu, battu et content. — Le manuscrit contient
en ses derniers feuillets (ff. 179 v° et suiv.) une rédaction de
ce conte qui est, à quelques variantes près, identique au récit
de Boccace (septième journée, nouvelle septième). La princi-
pale différence est que l'action se passe en Bourgogne et non à
Bologne. En outre, tandis que l'écrivain français nous introduit
tout de suite in tnedias res^ Boccace imagine un prologue roma-
nesque où il feint que le héros du conte soit devenu amoureux
de la dame avant de l'avoir vue, comme Guillaume de Nevers
dans Flatnenca\ Du reste les deux récits sont à peu près sem-
blables, sans que l'on puisse affirmer que l'un soit imité de
l'autre. Ils ont plutôt une source commune.
Le conte français n'est pas inédit : il est publié depuis 18 14,
mais le livre où il a été inséré est tellement rare, au moins sur le
continent, qu'il peut passer pour inédit. Ce livre est intitulé
Shahespeares jest Book, Chiswick, from the press of C. Whittin-
gham,MDCCCXiv, in- 12. L'avertissement de la deuxième partie est
signé S. W. S. (Singer). Dans cet avertissement (p. ix), Singer
nous dit avoir trouvé le récit en question dans un curieux traité
manuscrit sur Tart de parler français, composé du temps de
Henri VI. Il cite en note le début de ce traité *, ce qui nous
I. Voici ce début tel que Singer le transcrit (partie II, p. x) : « Ici comence
un tretis de douls franccis qu'anformera aussi ban (lire bUn) les petiz comme
les granz a parler bien et parfaitement beau franceis selon Tusage et la man-
niere de Paris et Aurilians ».
SO p. MFYER
permet d'idenufieric manuscrit dont il s'est servi. Ce manuscrit
est un petit livre fort analogue par le contenu aux mss. add«
17716 du Musée britinniqutf et Dd. 12,23 ^^ Cambridge, qui
ont été mentionnes plus haut ', Je lai étudié jadis k Chelten*
ham, où il portait le n° 8r88 de la Bibliothèque Phillipps. Il a
été vendu en 1896, et jHgnore où il se trouve actuellement. Je
sais seulement qu*il n*a pas été acquis par le Musée britannique*
Sir Th. Phillipps Tavaitacheté à la vente de la collection de Sir
Richard Heber (Bihlsoîkra Hektiana, n'* 77 r)^ et c'est peut-être
chez Heber que Singer l'avait vu.
Dans le ms* Phillipps, comme dans les deux mss. précités du
Musée britannique et de Cimbridge, le conte est inséré assez
maladroitement d:ins la Manière Je langage ^ où il ne semble pas
qu'il soit à sa place. Dans le ms. d après lequel j'ai publié la
Manière de langage (HarU 3988) et dans celui d'Oxford (Al! Soûls
i82),iiy a tout autre chose à cet endroit. Dans le ms. deTriuicy,
le conte forme comme un opuscule à part, à la suite des formules
de lettres : je ne saurais dire si le copiste Ta trouvé en cette
condition ou sll Va extrait d'un exemplaire de la Manière de
langage. Quoi qu'il en soit, voici ce morceau (fol. 179 v**) :
M*amlc, je vous etn pri qu'il ne vous displest point dt hi compte que je vous
compicriy inamtenant, quar verameïUje nti votisdirmy point de mefiilMingê.
Vra[i]tneîït, m'amie, il est le pïus meillear compte que j'oy unques mais [our
de ma vie. De par Dieux, donquet je le vous dirray. Jadys y avoit en Burgoyne
une dame bien gcntyl et sage que passoît toutz lei autres dames de cel païs
la aussi bien de bcut^^ corne de bountt^. £t celé d^nie avoit un baron qe fusi
rnuh bon chivaler et vaillant, aux» il avoit un csquier demurant en lour hos-
lelle que fust Hen [oHet an coer% z astoit aussi home de muU bon h^Qn et
beus* c sibcn e gefuilmem emâsUé du corps que ce fust merveilles. Et st avicn!
un jour que dl esquicr, si corne il regardoit sur la dame deï hostelîe, que le
corps z le *:ocr luy furent trcsiout cnriYotez pur la gr^m bracîer d'amour
qu'il en out devers la dame, en taunl ne savoii que dire ne que taire. Si
endura de Jour en autre très grandez palnez et dolours. Puis il pansa bien que
soîi amour ne poett estre aperceu. z suffri tant de tristesse z dotour ou cocr
que mîvt » ne jour ne pouoît mye dormir. Si fust il naflre^ trop pitousemeni
t. Cette idctîtrfication a déjà ùlé faite dansb Romania, XXÎV, 485, â pro-
pos de b dissertation de M* W. H. Schoficld sur la nouvelle de Boccacc,
a Ms. mrr. — ^ Ms* ne) ni.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 6l
de la launce d'amour bien près a la mort. Si aviental darreinsqueTescuier s*en
ala parler a la dame tout en secret, ainsi lui disant : « Ma très gentile, très
amiable z très sovepayne dame, fist il, je vous em pri très entirement de coer
q'il ne vous desplece de ce que je vous dirray maintenant. — De par Dieu,
fist ele, me ditez vous tout quanque vous vuillez, z je n'en parlera[i] ja jour de
ma vie, ne vous sourciez. — Ore, dame, fist il, mèz que vous ne desplese,
je fu si dolourousement nauftrè ou coer del ardant amour que pieça j'ay eu
z enquore ay divers vous, que je ne puisse pas longement endurer ne vivere
saunz consolacion de vostre très gracious persone, pour quoi, ma très douce
dame, fist il, eiez pitee de ma dolour, ou autrement vous serés cause de ma
mort. — Donqucs, dist la dame, est ce voire que vous en (v») avez tant
d'amour envers moy corii vous ditez? — Par mon serement ■, fit il, beal
très douce dame, si est. — Ore, fist ile, je vous ouitroie m'amours,
mais pour aconipler vostre désir plus privement, je vous dirray coment
vous frez. Vous savez bien que mon s^ se purpose de chivachcr hors
de la ville demain après manger, et pur ce alez demander maintenant congé
de luy, pur aler a vous amys que dennirent en le païs icy, pur certeine[s]
bosoynes que vous en avez a faire; z quant vous rav[r]ez fait, pur luy
deceiver * plus sotilment, je vous conseille que vous en alez sur vostre che-
myn, mais demayn anyut, quant il sera grant oscurtce, retournez si prive-
ment come vous purrez, et venez a ma chambre parle huse de ^ardyn»
un poy devant my nuyt, pur cocher ovesque moy. » Lors dist [l'Jescuier :
« Ma très gentyl dame, je vous remercie soveraignement de coer de vostre
amour z curtaisie. >> Et puis après, quant l'escuicr avoit congee de son
seignour pur aler a sez amys, si s'en ala bien matyn a la jour, et après manger
le sr commanda sez varlets de seller lez chivalx pur chivacher hors de la ville.
Donques vient la dame del hostelle a son sr et lui dist * ainsi : « Mon s^,
fist ele, vous ne chivacherez hors de ciens mais huy, si vous plest, quar il est
déjà bien près de nuyt, z pur ce vous conseille d'esierJ ceste journée, et alez
vous demain, — Dame, il fist, je le vuille bien «. Si avcnoit, après que le s'
et la dame avoient soupe, ils s'en alerent coucher ensemble. Lor vient
l'escuier a mynuyt tout privement a lour chambre, si coni la dame luy avoit'
enseingné, z ne quidoit mye que le s^ estoit couchée ovesque la dame. Et
quant il fust venuz a coustee du lit lou" la dame coucha, la dame luy prisi par
la main, ainsi luy disant en son oraille : « Ne souez vous mot, fist ele, pur
nulle chose de mounde, mais escotez vous bien a ce que je vous dirray. »
Donques la dame (Jol. i8o) se loma devers son s^ pour luy éveiller, z quant il
^ust éveillé, la dame luy dist ainsi : « Mon s»^, fist ele, il y a un esquier
demurant en vostre court, cil qui demanda congee de vous en soir *, qui
I Ms. sourement. — 2 Ms. deteitier. — ^ Vour j a rdyn. — 4 Ms. dttist. —
S Ms. daisUr, — 6 Ms. avoir. — 7 Pour la ou. — 8 Corr. ersoir.
6a
P, MÈYKK
m'a parte z requys d'araour pur coucher ovesque nioy. Se vous ne crei^ myc»
levez su* lost z vesiez vous en ma robe, z app[a]failïe?. vous en ruant rc
z guyse de moy» z aîez vous au' verger r Tat tendes isu poy» t vous vqttvz
mctntenant comeut il viendra demenravoier *. » Donques le s^ se conietiç-i
pur esire marry, t dist : « Que dea, est ce voir que tudijîr — Vraiment, mon
s»", fist de» cy est, n Lot k s' se leva losc bien vigorousemeiK, corne un hotnme
forsenne^ z 5oy vestoit corne k dame lui a volt apris. Ei puis s'en aU très
fort courrant devers k verger de pros*er ce que la dame lui avojt dit. Donques
dist la dame a i'escuîer tout ain^i : »^ Mon amy, fist eie* n'ave;^ vous point
de taîent pur esbatre ovesque moi? — Par mon seretnctu*, ma très douce
danie, fîst il, je su si dîsconfiz t paoureux ♦ ou coer que je n'ay plus
d'apetil ne voluntec pur esbatre ovesque vous que un peiît eiyfnnt qui n entent
point de nul, ^ Oic, fit ele, faitez vous un chose que [c vous Jirray, et vous
en avrez m*araour as toutz jours maïs devaunt toutz auirez du monde, saunz
faire changement. — Par Nostrc Danie de Bol oigne, fist il, je le ferai très
volunters sî je purrai — Maintenant, lit ele* preïmés un hon baston z alez vous
au verger, z ta vous troverez mon s^ arrayê en manere z guyse de moy, z
batef lui bien, z doncz lui dex bons horions sur le dos, ainsi lui disant : « Va
V t'en a ton lit, mavaisc putaigne que tu es, va t'en de par deable et de pur sa
m mère, ove tout, ou autrement je toy rumperay le col devant que tii te bou-
• géras jie cy *> ; quar vra[ijment, fi si eîe, *ie vous le faitst ainsi, il n'avra
unquL's mais après mal suspcçun de nous, et en (1*^) tiel manere nous purroms
faire tout nost re désir en temps a venir bien et prîvement, sauni escient de îuî
ou d'ascun autre. ^ Si Dieu m'aide, ma très gracioiis dame, fîsi il, je m*en
îrrày volumiers pur vostre comandement acompler. r> Kt quant il fust venu au
verger, il regardoii le s^ corne le graunt deable, ïuy donaunt des horriojis
tré's bien assis stcoiti ta dame luiavoit coniandee, ainsi lui parlant com il fust
apris par devant ; t lost après le %^ se coitra bien igiielment a sa chanabre,
et puis dist le sr a h dame ainsi : «c Dame, fîst il, cil cKuter de quoi vous
m*efi parbste^ m'a très malement batu, quar il quidoit que vous y fustei,
par quoy je say bien cju*il est bien loialx a vous et a moi, et pur ce je vous
feray très bien acorder, ^uar ce qu'il a faii il ne fist que soulemcni pur vous
a tempter. — Ore, mon sf je le fcray a vostre comandement. n Et puis apnb
b dame et Tcscuier avoient tout dix lotir voluntees d'esbatement et desduyt,
saunï escient de nully, et en tiel manere le s" fust deceu par coyntise d'une
famé, quar pur le greinur partie toutes les famés du mounde sount plains de
mavelstee z treso^* Et pur ce le sage Salenion dit ou livre de Sapience qu'il
n'y a malice eo toute le monde que surmonte la malice d'une maveisefemme s,
Dount je prî a Dieu qu'il vous vuUk bdn garder de euat. Amen.
l Ms. 4, — 2 Sk. COTT, «rfr mn tmwF (ravir)? — } Ms, sctirtmtnt. —
4 Ms fationux, — s EccLi, XXV, lê.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 63
R.3.20. — Ballades françaises.
Ce livre, en papier et écrit vers le milieu du xv« siècle, est
un recueil de poésies anglaises et françaises dont le détail est
donné par M. James dans le t. II de son catalogue. Je me borne-
rai à relever ici les pièces en français, pour l'identification des-
quelles notre collaborateur M. Arthur Piaget, si versé dans la
littérature du xv^ siècle, a bien voulu me fournir des rensei-
gnements très précis.
Les pages ' 25 à 37 renferment des rondeaux et une ballade
en français composés par le comte de Suffolk * du temps qu'il
était prisonnier en France, whylest he was prysonnier in France^
dit une des rubriques, ou à sa sortie de prison. — Pages 82-3,
la Desputacion entre Salomon ly saage et Marcoulf le fook. Premiers
vers :
Salomon dit : Marcoulf respont :
Mortalité et guerre De putayne sourd maulx
Sount exil de terre Et guerres mortaulx
Et dcstruizement. Et périls des gens.
C'est une pièce bien connue se rattachant à un sujet sur
lequel on a beaucoup écrit.. Le texte du ms. de Trinity a été
publié parKemble, Anglo-saxon dialogues of Salotnon and Saturn
(^jElfric Society), p. 78. On a d'assez nombreuses copies des
mêmes couplets '. Voici maintenant la liste des ballades fran-
çaises, accompagnée de notes que m'a fournies M. Piaget :
(P. 49) Ran Je (lis Rens to/). — A quoy ? — Tu le savras.
Rejr. Car jo ne ne soy meillour trover.
(Eust. Deschamps, X, xxvi).
1 . Les pages, et non les feuillets, sont numérotées.
2. William de la Pôle, comte de Suffolk en 141 5, créé marquis en 1444,
décapité en 1451. Voir Dugdale, Barona^e of England, II, 186-9; I^^^t, of
national htograpbyy XL VI. 50 (PoLE, William de la), etc. On sait que le
comte de Suffolk fut fait prisonnier par Jeanne d'Arc (12 juin 1429). Mais il
fut bientôt remis en liberté, après avoir payé une forte rançon. Il fut pour
un temps (1433) ^^ gardien de Charles d'Orléans.
3. Voir Kemble, ouvr, cité, p. 77; cf. Hist, litt. de. la Fr,, XXIII, 688-9,
Le Roux de Lincy, Livre des pi av., II, 548; Ihill. de la Soc. des anc. textes,
1876, p. 82; 1877, p. 91, etc.
i
\
64 p. MEYER
(P. 49) Icy comence un balade flPrançoys fait par le plus grand poetical
clerk du Paris.
Le monde va en amendant.
(Cette ballade, qui a pour refrain Ainsi que Vescrevisse va, se trouve dans le
ms. B. N. fr. 2206, fol. 103, sous le titre de « Ballade pour les Mondains >; dans
Berne 205, fol. 206 v*; dans le ms. du cardinal de Rohan, fol. 20 ' ; dans le
Jardin de Plaisance, éd. de Vérard, fol. ex.)
(P. 89) Tant de perilz sont a suïr la court.
fifff' D'avoir en court un pié hors et Tautre ens.
(Eust. Deschamps, II, p. 30; anonyme, d'après un ancien imprimé, dans
Montaiglon, Rec. de Poésies fr., IV, 32 ; se trouve en divers mss. : Turin, L.
IV, 3, fol. 116; Berne, 473, fol. 93 ; Vienne (Autriche) 2602, fol. 42).
(P. 90) Qui ses besoigncs veult bien faire.
Refr, Mon seigneur dit bien ; il a droit.
(Eust. Deschamps, X. p. xxi ; mais cette ballade n'est pas de Deschamps :
voir Bull, de la Soc. des auc. textes, 1901, p. 66.)
(P. 91) Les biens mondains et toulx les accessoires.
Refr, Avisons nous : il nous convient mourir.
(P. 92) Puis que je suy fumeux, plain du fumée.
Refr. Quant on fume sans fere autruy dommage.
(Eust. Deschamps, X, p. xiv.)
(P. 93) Amours est bien par son noun appeliez.
Refr. Con lui respont : Encor n'est il pas temps.
(Eust. Deschamps, X. p. v.)
(P. 9j) Ma doulc-j amour et dame souveraine.
Refr. Et loyauliés tenir ou que je soye.
(Le premier vers est semblable à celui de la pièce publiée dans les Œttvtes
d'Eust. Deschamps, X, p. Li.)
(P. 95) Vous me priez si amoureusement.
Refr. Je vous respons que je m'aviseray.
(C'est, comme l'indique la rubrique, la réponse à la ballade précédente.)
(P. 96) Je me merveil du désir qui m'esprent.
Refr. Je la regarde et n'ose dire rien.
I. Sur ce ms , dont on n'a plus qu'une analyse accompagnée d'extraits,
voir Rotnanidy XXI, 428.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE éj
(P. 97) Puis que désir me fait estre amoreux.
Ktfr, Dieu la parfîst pour abellir le mond.
(P. 98) A vous, dame, humblement me complaine.
Ktjr, Vray corps geniilz, pour vostre amour mourray.
(B.N. fr. 2264, fol. 41 vo.)
(P. 99) Vous qui fuistes en jeunesse moult cointe.
Ktfr. D'amer aultruy ne d*aultruy estre amée.
(Ms. de Westminster Abbey, fol. 28, voir Bull, de la Soc, des anc. textes ^
1875, p. 32.)
(P. 99) J'ay fréquenté maint compagnon galant.
Refr. Alez a Dieux, car gales sont failliez.
(P. 100) J'ai veu et hanté longement.
Refr. Nul n'est prisié s'il n'ait chevanche.
(P. ici) On par[o]le de maladie.
Refr, Il n'est rage que d'avoir fain.
(P. 102) Je Fortune, de ce mounde emperier[e].
Rejr. Car tôt ou tarde, compter fauh qui reçoit.
(P. 103) Qpe vaut trésor qui n'a joye ne leesse?
Refr, Qui plus avra plus dolent mourra.
(P. 103) Je voy les estas amender.
Refr. Par S. Mor ! c'est tout a rebours.
(P. 104) Que fais tu, derk, que veux tu que je die ?
Refr, Me dis tu voir? Oïl, sainte Marie.
(Musée brit., Lansdowne 380, fol. 219; fardin de Plaisanu, éd. Vérard
fol. Ixij vo; Campaux, François Villon^ p. 363.)
R.3.56. — Petit traité de conjugaison française.
Pour la description de ce curieux petit manuscrit, composé de
parties originairement distinctes (xiii* et xv* siècle), et réunies
sous une même couverture, je renvoie à la description donnée
dans le t. II du catalogue de M. James. J'appelle l'attention en
passant, sur une satire, souvent spirituelle, parfois un peu
lourde et même grossière, de la cour de Rome et des mœurs
du haut clergé vers la fin du xii* siècle, qui occupe les ff. 35 à
42 du volume. C'est le récit des moyens par lesquels un très
fabuleux archevêque de Tolède, appelé Grimoald, obtint du
Ann«»i«. xxxu c
66 p. MEYER
pape Urbain (probablement Urbain III), le titre et l'office de
légat d'Aquitaine. Ce petit roman est en latin : il ne serait
pas à sa place dans un mémoire consacré à la littérature fran-
çaise. Je me borne à en donner le commencement en
note '.
n est plus à propos de mentionner un court traité de la con-
jugaison française envisagée au point de vue syntaaique, qui
occupe les fol. 47 verso et 48 recto. C'est un morceau assez
intéressant par sa date — l'écriture n'est pas postérieure au
milieu du xiu' siècle — et par la conception qu'il révèle. C'est
l'œuvre d'un véritable grammairien, qui s'attache à bien établir
le rapport des temps en latin et en français. Je ne connais pas
d'autre exemplaire de ce petit traité, ce qui ne veut pas dire
I. Quo tempore Urbanus, Romane ecclesie avidissimus pontifex, beatissi-
morum corpora martyrura, Albani \idelicet et RufRoi, Romam transferrei,
Galliarum collecta ecclcsiis, dumque ea raanibus propriis, utpote Wr religio.
sus, marsupiîs deauratis gloriosissime sepelirct, Grimoaldus, Toleune ecclesie
archiepiscopus, quasdam predictorum martyrum reliquias forte inveniens, in
gazofilatium sancte Cupiditatis transferre eas diligenter accuravii. Intelli-
gens vero eas placere Romano pontifici (noverat enim viri compunctionem),
easdem secum tollens Romam profectus est. Suspirfabjat autem idem Tole-
tanus pontifex ad habendam Equitanie legationem, quam ex bcati Gregorii
ordinatione, antiquis attestantibus privilegiis, Toletana metropolis obtinuerat.
U:îde ignavie, immo pudoris, Wdebatur si unte graviuiis persona, um pin-
guis, rani rotunJa. un dclectabiîis suorum privaretnr dignitate predeccsso-
runi. GrTcrum. licct plenis arrideret calicibus. ([erat] enim fortis adbibendum
vinuiîi), iicc: Jics e: noctcs sterterei (vigilare enim non poierat), licet vcn-
trem haberet poniiticis ( rurgebat enim venter extentus non modicum utpote
ubi sa"mo totus uno prandio ^epcliri consueverat >, licet innocentera proscri-
berc, justum pcr^cqui. paupcrem incscare, suis orph-num patrimoniis violen-
ter emungere, religioni asjriberct ; li>:e: in omnibus iatJi;cret, si quid modo
forte veriuîis attîgisseî, verecu::Jari; licet inquam prennitispollerct \-irtutî-
bus cetcrisquc quibus hac tcmpestate pinguissimi promoveniur pontifices,
minime umen Romane ecclesie haberetur Icgaïus. nisi preciofas supradicto-
nim martyrum reliquias representaret Romano pontitici. Hiis igitur munitus,
proui videbatur necessarium, Romanam ingressus est civitaiem...
On sait que dans le mi'-nde des joyeux clercs du moyen âge. les reliques de
samt Kjrtirî et de «u'n: \\'^::\ dciij:ia:e:it :oj: si.î^p'cmcr.t i'or et Targent.
Voir \ci :e\:c> ^-w j'-i; :cj::i> .; Ce propjs dans une n^ie de V Histoire de
GuilUunu le Maréchal, IIL i>i.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 67
que le manuscrit de Cambridge soit unique : un texte aussi
court échappe facilement aux recherches*.
Modus indicativus uno modo construitur. Preteritum perfectum modi
indicativi verbi activi duobus modis construitur, verbi gracia : Amavi, jo
atnai et fo ai amé. NuUum aliud teropus ejusdem modi et verbi ejusdem
variis modis construitur. Nullum tempus imperativi modi varias recipit cons-
tructiones. Presens et preteritum impertectum tempus optativi modi uno modo
construitur. Preteritum perfectum et plus quam perfectum optativi modi tri-
bus modis construitur, verbi gracia : Utinâm amavissem, la meie volunté jo
aveieaméj ctjo eusse amé y et jo avérai amé. Futurum tempus uno modo semper
construitur. Presens conjunctivi uno modo construitur ; preteritum imper-
fecti, duobus : Cum amarem, ctitn jo avoe amé, et cum jo atnasse. Preteritum
perfecti tribus : Cum amaverim, cum jo amai et cum jo ai atné. et cum jo eie
amé. Et notaquod quando construitur cum jo aie amé, tune optative pônitur....
A la suite des observations sur les temps viennent, au feuillet
suivant, des gloses sur un texte qui n'est pas déterminé. Les
premiers mots glosés sont immunis, nubere, facerCy merere^ crepare,
discrimen. Il y a quelques mots français dans cette glose : ainsi :
Crepare idem est quod sonare, et inde iiec crepida, bote a muine cre-
pare, crever (Fol. 49) cogère, cunstreitidre^ et cogère asemhler Fisiula,
cunduit.,. gutefestre et fresiel (Fol. $0 vo ) cratis, ^r«i//, gall. et cleie
celare, celer et entailer (Fol. 55 v©) Hoc idioma, Ifinguage. Burnellus :
Mox idioma suum vertens Galienus et orans,
Subridensque parum, sic benedixit ei.
Hic poples, poplitis, garei. Unde Burnellus :
Poplite deflexo vertice pronus humi.
BurnelluSy ailleurs BrunelluSy est le nom du personnage prin-
cipal (un âne) d'un poème en distiques composé en Angleterre,
vers la fin du xii* siècle, par Nigellus Wireker, préchantre de
l'église de Cantorbéry, et plusieurs fois publié de la fin du
XV* siècle au xvII*^ Il a été imprimé en dernier lieu par
Th. Wright, The anglo-latin satyrical pœfs, t. I (1872). Voir,
sur Tauteur, le même, Biographia Britannica litteraria, II, 353.
1. On soit qu'il existe des traités de la conjugaison française composés
en Angleterre â la fin du xiv* siècle ou au commencement du xv»; mais ils
n*ont aucun rapport avec celui dont on va lire le début.
2. Sous le titre de Spéculum stuUorum : voir Brunet Manuel du libraire ,
5* éd., V, I2I5,SOUS ViGELLUS.
68
p. MEY£R
Cl. 17^ — Urbain le Courtois, — Lk plainte d* amour-
Ce manuscrit, qui a le format d'an petit în-4*' (hauteur 0,195,
largeur o,i3î)i ^ compose de 288 feuillers de diverses écri-
tures, donc les 264 premiers sont écrits en Lniti. On trouvera,
dans le t. 10 (sous presse) du catalogue de M, James, l'indi-
cation précise des ouvrages quMl renferme. Je me borne ù une
rapide et sommaire énutnération :
FoL i> les R^ûgmihttfi.Qu Pdn itintfarium, attribue au pape Clément L
FôL loj, un pfûvinçmlt,
FoL no, VHhtoria Brittottum de Gaufroi de Monmouih.
Fol, 185, les MéditiUions de saint Bernard,
FoL 200 vu, Hisioïre d'Aleiciindre le Grand (c'est Tabrégé de Julius Vâlt-
rius).
Fol. 212, rHîstoire des ducs de Hormandie, de Guillaume de Jumiêges,
Fûh 2St, rÉvangîle de f*Enfance.
FôU 265 Cl suiv., les ouvrages fran^^alsdùiit le deuil est donne d-après.
Au bas du foL 267 on lit : Likr mon. de Wlmïky, Tabbaye
cistercienne de Whalley, comté de Lancastre, fondée en 1296
par Henri de Lad, comte de Lincoln, dont les ruines existent
encore,
1 . Urbain k Courtois. — C'est, comme on disait au moyen âge,
un « enseignement m, ou, plus spécialement* pour employer
un terme plus moderne, un traité de civilité puérile et honnête.
J'en ai signalé jadis cinq manuscrits (y compris celui de Trinity)
dans manotîcedu ms. Douce 210', publiant en même temps,
d'après ce dernier manuscrit» les premiers et les derniers vers du
potme'p Les mêmes vers sont de nouveau imprimés d'après le
ras. Gg i*ï de rUniversité de Cambridge, dans la Romania,
XV, ^84. Enfin la leçon de ce dernier manuscrit a été publiée en
entier, dans un per ru^^^ par M. L. Biadene', k qui j'en avais
tbumî la copie. Comme cette édition est naturellement fort peu
répandue, je crois utile de transcrire ici le texte du ms. de
t, Bulkiin de la îo(. dis anc. Itxies, 18S0, p. 7î.
2. Il faut maintciianï ajouier à celte liste la copie rcntermèe dans le ms,
B. 14. 40, décrit plus haiâf» p- 45-
j. No££cCrivdluci-Brumt. Pîsa/febbra.b 1895,
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DK CAMBRIDGE 69
Trînityj d'autant plus qu'il diffère beaucoup du ms. de TUniver-
sUé.
Urbain le Canrkvs est un titre qui n a été conservé que
par une de nos copies, celle de TUniversité. Je crois cependant
que les deux vers où ce nom figure sont authentiques, et
qu'ils ont été simplement omis par les autres copies* Le nom
d'Urbain a été, selon toute apparence, emprunté à quelqu^un
de ces poènfîes kcins qui contenaient des préceptes sur la
manière de se comporter dans le monde, ou, si l'on veut, des
règles de courtoisie. Nous connaissons au moins deux poèmes
qui ont reçu le tilre à'Urbanus, Je vais dire quelques mots de
Tun et de Tautre* John Baie ' nous apprend qu'un certain
Daniel Churchc, sive Ecclestensis^ homme de noble origine, ayant
vécu pendant une trentaine d*années à la cour du roi Henri 11,
avait composé un poème latin jntitnlé Urbanus. Ce poème,
Baie ne la pas vu : il tire ses informations d*une chronique
qu'il désigne d'une façon assez vague (quoddam chroniam nu pet
tondini rcpertum), et qui nous est inconnue comme beaucoup
des manuscrits vus parBale; elle doit avoir disparu vers le milieu
du xvr siècle, alors qu*une rage de destruction sévit sur les
bibliothèques anglaises, Fabricius ^ ajoute aux données fournies
par Baie cette notion nouvelle que le poème était en hexa-
mètres et qu'il commençait par Cum nUnl utilius. Il signale en
même temps un manuscrit de ce poème à Trinity Collège,
Dublin. Il est de toute évidence queTidentification proposée par
Fabricius est purement conjecturale. Nous connaissons bien ie
poème didactique commençant par Cum nihil fitilius. Il en existe
de nombreux manuscrits, outre celui de Dublin, et il a été
imprimé dès la fin du xv^ siècle dans le recueil intitulé Juciares
€*r/cj continentes libres^ viddmt Caîbomm^ Factîum^ Thtodolum.,. '
iCest le Fûceîus qui a été mis, bien à tort, sous le nom de
1. Scriptitritm iUmtrium maprii Briîanniœ Caîdlcfus. Sasile^ [MSJ]*
in-fol., p. 221, Le recueil alphabétique iJe notes de Baie qu'on a récemment
pu Nié à Oxford (Arucdota OxQm/n$k M^dixt'aidmi modtrtt serks, fmri. IX)
15*1 joute rien, sur le poim qui nous intéresse, a ce <|ue renferme Touvragc
inipnnié, et est même nioins complet.
2. BïMhiiK£a ktina mtdim d infimat Liliniiaîis^ sous Cherche*
j. Hain, n«î" 1915-191 g, Copinger, n"* 717-743.
70 A|lA,S|fEYËR
Jean de Garlande^ Rien^né^permet de supposer qu'il ak été
composé eu Angleterre par un contemporain de Henri H. Mais,
ce qui nous iniéressej c'est qu'il a été désigné , eu certains
manuscrits j sous le titre de Liber Urbani^ d'oùj assurément
ridentificatiori donnée comme certaine par Fabricius. L'un des
manuscrit?; où le livre est ainsi appelé se trouve à Cambridge,
Saint John's Collège^ F lo. Dans cette copie on lit à la 6n
ces mots qui paraissent bien être une addition due â un cppiste.
. , Liber explicit hicque Facelm.
Scribitur Vrhanm, sit Mriptor a cri mi ne sanus.
ExpUdt Hher Urhantl
Arrivons à l'autre poème, qui paraît avoir porté d'une façon
plu5î spéciale le titre â'Urbanm. Celui-là semble devoir être
identifié avec le poème composé, selon le Chmnicon que men-
tionne Baie, par un personnage de la cour de Henri IL II n'en
subsiste, ï ma connaissance, que deux extraits transcrits dans un
manuscrit du xnr siècle, Bibl> nat. lat. 3718', fol. 80 et suiv.
I. Voir Hauréau, N^ice sur Us mtwta authentiquis m supposées et Jmn tk
Garïanâi, dans les Nôikes tî exi rails, i, XX Vil, 2* panie, pp. 16, 17-20. —
Nôloos ea passant qui! existe de ce poème latin une ancienne traduction
CD vers îmnçàh qui nomme atissi Je.in de Garlande :
Qjiî de transiater s'entremet.
Se il la matière n'y met,
EnsimMe toute b substance,
Chacun doh savoir qui fait en ce ;
Kon pourtant (lis. pourquant) st ne
[doibi on mye
St forment mettre s'estudie
A dire moi a mot ta lettre,
Aiûs y doibi on oster et meure
Et iransUter cl transposer
Ht de jolis mos ajouster
Pour plaire mielx a l*escoutcr.
Et pour \ù chose mklx entendre
A ceulx qui h veuUent apreodre.
Pour ce vous ai ce devarU dit
Que un livre [qu'Ja faire entendit
En latin Jehak de Gu£LLakde*
De qui I ame a Dieu recommande,
Vous vueil en IVançois resiter.
(B, N\ lat. 1492 K fol, ti|.)
n y en À une autre version» du %v^ siècle, dans le ms, B, N* &. 1 2478, M.
Ce haciiui est en hexamètres accouplés par la rime. H ne faut pas le con-
fondre avec un autre Fauim^ ctïmAà en vers i^l6giaquc&, que M. Mord Fatio
a puèlté id méme^ XV, 224,
2. Ccst Tun d^ nombretis manuscrits volés vers TS40 â la Bibliothèque
nationale (alors royaïc) qui emrtrrent Jans la collection Birrois et qui furent
rachetés de Lord Ashbumham en iSÔS. Voir Deïtsle, Qn^l(}^ue deji m^s. des
fonds Ubri ti Bar rois ^ p, 193-}.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE Jî
A la suite du premier extrait, qui est visiblement la fin du poème,
on lit ces vers, reproduits, par M. Delisle dans la description du
volume.
Rex vêtus Henricus primo dédit hec docfumenu
Illepidis libro nova que scribuntur in isto.
Curvamen celi demittat, gaudia celi
Qui geminavit Heli merito tribuat Danibu.
Qui dédit alpha et to sit laus et gloria Christo.
Explicit iste liber qui vocatur Urbanus.
Ainsi le poème a pour titre Urbanus; il a été inspiré par le
roi Henri II (il ne peut s'agir d'un autre) et l'auteur s^appelait
Daniel. C'est donc avec raison que M. Delisle l'a place sous le
nom de Daniel Churche que nous connaissons par Baie.
Il ne paraît pas, du reste, qu'aucun des deux poèmes latins
qui ont porté le nom d'Urbanus ait servi de modèle à notre
Urbain français. Rien ne prouve, en réalité, que ce dernier soit
une traduction du latin. Le titre peut avoir été emprunté à la
littérature latine du temps : l'ouvrage lui-même est un recueil
de préceptes dont aucun ne peut passer pour bien original,
mais dont la rédaction et l'arrangement peuvent constituer
une oeuvre personnelle. Voici le texte du ms. de Trinity :
Uns sages home de grand valur, Premer, tut a devise,
Ki lung temps vesquist en honur, Amez Deu et sente Eglise;
De suen enfaunt se purpensa Père et mère honurez,
4 Et de suen bien lui moustra, i6 Bone grâce en avérez,
Et dit : Beau filz, me escuhez ; Bone sancté et lunge vie ;
Si jeo di bien si l'entendez. De cestes choses ne faudrez mie.
Nurreture vus voil aprendre Li bon enfant deit ester
8 Tant cum tu es de âge tendre, 20 Devant son seigneur a manger;
CsLVy por voirs a vous le di, Il ne se doit point apouuer,
Honyz est ki ne est norri. Ne nul membre doit grater,
Ore escuhez, mon chier filz. Et nul hom doit eschuer,
12 Coment voil ke seiez norriz. 24 Ne nuly ne doit moker.
2 Le ms. de TUniversité a de plus ici ces deux vers qui ont été omis
par tous les autres manuscrits : Urhane estait il appelé ^ Ki en sun tensfust amé,
— 4 Mieux ailleurs Et de son bon sens. — 11-12 manquent dans Univ. —
22 Ailleurs Nese xnve char grater^ ce qui rappelle les vers du Stanspuer ad mm-
sam : « Nec nares fodias carnem p^ropriam neque scalpes Nec carnem
propriam verres digito neque scalpes » (Furnivall, TJje Babees Booh, 1868,
2« partie, p. 30, 32).
■
72 p. MEYEH ^^^1
^^^^H^
De service dcit aprendre>
60 Ke nule ke Sûiten livre lettriÉ(srV), ^^^H
^^^^^^1
Si il voille ben entendre,
Car sovcnt sunt decevables ^^^|
^^^^^1
Et de language erse ment
Et relement sun! establ^ ; ^^^H
^^^^^^
a8 Cura il a nurture apenî.
Mes pernez une que soit sage, ^^^^|
^^^^^^H
Si hom vous doigne petit u grant,
64 Ke vous ns^ i poise sa mariage. ^^^H
^^^^^^H
Tant cum vous estes JDcsnc
Ta femme demeinc amercic ^^^H
^^^^^^H
[eofant,
El nu le autre désirer devez. ^^^H
^^^^^H
Fuez putaine et hasardrie ^^^H
^^^^^^H
J2 Et doucement lui tnercîez;
68 Et la taverne ne ha un te z mie ; ^H
^^^^^H
Et si vous aïet en cheminant
Od bone gent sovent alcz ^^^^M
^^^^^^1
Et encountreî petyt u graot.
Et les mauveis fuîr devez. ^^^H
^^^^^^P
Voiuntiers lui saluez
Si povres home devenez, ^^^H
^^^^^H
î6 Et beieraent a lui parki.
72 Trop esmaer vous ne deve^;. ^^^H
^^^^^H
Si vous ale«, cutn surd, avant
Car Jesu Crist omnipotent ^^^H
^^^^^^H
Et ne dmt tant ne quant,
Fait suceurs a tute gent : ^^^H
^^^^^^1
Om dira delez vous
Ke en lui bien se jfBe, ^^^H
^^^^^H
40 Ke vous estes desdçignous.
76 Suceurs fait et bone ayc. ^^^H
^^^^^^H
Si les escoles volez hauntcr
Si VOUS une ami avez, ^^^H
^^^^^H
Vostfc meistre devez duter ;
De une chose vous porpensez ^^^H
^^^^^^B
Et si vous savez voster lesçoun
Ke ja, por vostre fol délit, ^^^^^
^^^^^H
44 Avant ke tun compaïgnouu.
So A ]m ne lacez nul dcspit : ^^^H
^^^^^^H
Voluntîers lui apcrnez
El si enemi en nvtz, ^^^H
^^^^^^1
Et bêlement a Jui parlez,
Bien avisîé sciez : ^^^^^
^^^^^H
El ceo votis doint nurrcture»
Se il Icnce vers vous^ ^^^^|
^^^^^H
4S Curtcisîe et mesure.
S4 Ceo vous prt par amours ^^^H
^^^^^^H
Ne sciez pas mesJisani
A lui ne devez rcspouns doner, ^H
^^^^^^1
A honnc, a femme ne a cnfaot*
Mes la place devez fuer : ^^^H
^^^^^^L
Si riches home devenez.
Si vous responez le jugelour ^^^H
^^^^^^^^
1 52 De une chose vous porpenseï :
88 Le pys avérez a chief de tour. ^H
^^^^^^H
L Ne vous porter ja trop haut
De lui ne pernez ja vengance ^^^^Ê
^^^^^^^H
■ Ne trop simples ne trop haut,
De espeie ne de launce, ^^^H
^^^^^^^^
Mes vous porteï ou vêlement
Car autre folz poez conquerre ^^^H
^^^^^^H
56 Cum a nurrcturc apcni.
92 Vostre dreîi par lai de terre. ^^^H
^^^^^H
Si femme volc^ csposer,
Si sages home devenez, ^^M
^^^^^^H
Pcnseï de m, mon filz diier,
Chier Bh^ de ceo pense/. : ^H
^H.
Pernez nule por sa beauté
Si nul conseil devez doner ^|
iB II manque ici, par comparaison au ms.de l'Univ-, 24 vers ; cette lacune ^|
^^^^^^^
est causée par un bourdon. En effet le vers Cum il a nurUtrf apmi reparaît ^^k
^^^^■b
deux fois, dAns le ms, de l'Univ., au^i vers 28 et 54. — 41 A partir dici le ^|
^^^^^H
im, de rUniv. diffi-re beaucoup du
nu. de Trinîty et le ms. BoJley 9 ^M
^^^^^^v
encore plus. — 60 Cette dclknce â 1
'égard des femmes lettrées n'est point ^H
^^^^^^1
exprimée dans les autres mss. ; eïle est toutefois assez générale au moyen ^|
1
IgC* — 87 On prc^férerait jan^IruF,
1
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 73
96 A celui ke de vous ad mcstier, Ne vous medlez od foie genz
Lui conseillez sulunt la lai Ke vendent terres et tenemenz
Et lui diez la droite fai : Et roflent les damoiseles
Ne lui blandiez, jeo vous defent, 124 Ke sunt en chambre si bêles.
100 Ja por or ne por argent.
Lui diez la droite vérité,
Ke autre foiz vous sache gré.
El si pleidour devenez,
104 Bien avisé vous soiez.
Si Tem counte vers tei
Responez beal par bon lei.
Piez ne mains devez mover
108 Tant cum devez as genz parler;
Sans manaz u serement
Devez counter devant la gent.
De ceo ke ai a vous counté
112 Vous turnera a grant bounté,
Si vous le voiliez retcner.
Sachez por voir, mon filz cher,
De une chose vous dirrai ;
116 Uncore entendez a moi :
Des biens ke vous avez avant
[conquis
Porpensez vous en tun avis
Les despendre en dreiture,
120 Jeo vous prie, et en mesure.
Il achatent riches viandes,
Figes, rys et alemandes,
Bone servoise et bon vins,
1 28 Riches oisels et grâces gelins,
Et al drein mokent le despendur
Ki lur ad fet tant honur.
Quant il ae puit plus durer
1 32 Ne despender a lur voler.
Si lui ira tost un despit :
Un autre vendra en son lit.
Tant cum la burse puet durer
156 Amour de femme poez aver.
Et quant la burse soit enclose
De femme ne avérez autre chose.
Por ceo garnez vos compaignons
140 Ke vous avez e nunduns (?);
Ke il poent le melz faire
Et de lur folies retraire;
Et issi menez vostre vie
1 44 Ke vous amez le filz Marie.
Plus ne dirrai maintenant :
Chier filz, a Deux vous cornant.
2. La plainte d'Amour, — J'ai déjà parlé ici-même, à
plusieurs reprises, de ce remarquable poème (XII, 507; XV, 292;
XXIX, 4). Je me bornerai à en citer les trois premiers cou-
plets. Le premier ne se trouve que dans le ms. de Trinity.
Volez escuier un déduit (Fol. 266)
Ke jeooy cestre (jic) autre nuit,
Tut en cochaunt,
123 Rojfler n*est pas relevé dans les dictionnaires. Est-ce l'angl. ruffity au
sens de « troubler, mettre en désordre » ? Le ms. de l'Univ. porte robent ;
Bodlcy9 roehent. — 126 Univ. resyns, — 127-8 Mieux dans Univ. Bon vin
t oractî cfweSf Et puis après funl lur mowes. Même leçon, ou à peu près, dans
Bodley 9. — 13 1-4 manquent dans Univ. et Bodley 9. Il semble que ces
vers devraient prendre place après le v. 138. — 1 38 Ici s'arrête le ms. de
rUniversité. — 139 Gartie;;^, avertissez. — 140 La fin de ce vers est corrom-
pue.
74 p. MEYER
Entre très duz fin' Amur
Et un prodome de grant valur
Issi disant :
Amor, amor, u estes vous?
— Certes, sire, en poi de leus,
Gir jeo ne os.
— Pur quei nen osez estre veu,
Vous ki estes si bien conu
Et de bon los ?
Jeo parlasse od vous a leiser,
Si il vous venist a pleiser,
Tut privement,
Por saver mon la vérité
Pur quei vous estes si rebotés
De tute gont.
3. La légende du bois de la sainte Croix, — , J'ai déjà
signalé cette rédaction dans le ms. Gg. i.i de l'Université de
Camhndgc(^Roniania, XV, 326). Il y en a une autre copie dans
lems. B 282 de la Bibliothèque royale de Belgique, qui a appar-
tenu jadis à E. De Coussemaker \ Ces deux manuscrits ont été,
comme le nôtre, exécutés en Angleterre ^ Ce ne sont proba-
blement pas les seuls. Il suffira de citer les premières et les der-
nières lignes du ms. de Trinity :
(Fol. 273) Ki voudra saver et oyr de la verraye croiz, dont ele vint et de
quel fust (Fol. 279) En ccsto manere corne jeo vus ai counté voleit Dieu
ke nostre redempcion venit a lui de mesme le liu e de meisme le arbre dont
nostre perdicion surdist premièrement ; et de mesme le frut et de mesme le
bûche crust nostre sauvacion. E issint corne nus sûmes por feme descordez,
issint par femme sûmes a Dieu reconciliez
4. Suit, fol. 279, la version française du Spéculum de saint
Edmond de Pontigni, archevêque de Cantorbéry, dont on a
beaucoup d\iutres copies, voir Roniania, XXIX, 53.
1 . L\4tH.\\jlypse en framais^ au XII h surh' (Soc. des anc. textes fr.),
p. ccxxvi, note i.
2. Deux mss. d'origine française contiennent a pju près la mOme rédac-
tion : Hihl. de Sainte-Gencvicve. iiv)4 (xv* siècle), et Rouen, 942 (Çata^
h^uf^ctu'fiil lies vuinuaciitSy I, 238).
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 75
0.1.20. — Traités de médecine.
Volume assez gros (o m. 198 sur o m. 155), 328 ff. en
parchemin, composé de quatre manuscrits, tous écrits au
XIII'' siècle, mais par des mains différentes. Le premier com-
prend les ff. I i 237, le second les ff. 238 à 297, le troisième
les ff. 298 à 322, le quatrième les ff. 323 à 328. Le poème par
lequel commence ce recueil est à deux colonnes; de même
aussi la Chirurgie de Roger de Salerne, qui occupe le troisième
manuscrit. Le reste est écrit à longues lignes.
1. Poème médical contenant près de 2000 vers et com-
posé d'après un original latin (voy. v. 83) que je ne suis pas
en état d'indiquer. Cet original n'était probablement rien de
plus qu'un recueil anonyme de recettes médicales, comme on
en a tant fait au moyen âge. Le traducteur était anglais,
comme le copiste. On ne s'étonnera pas de rencontrer dans le
spécimen qui suit beaucoup. de vers trop longs ou trop courts.
J'ai proposé diverses corrections, mais toutes ne sont peut-
être pas légitimes. Il faudrait avoir étudié le poème en son
entier pour arriver à faire le départ entre les fautes du copiste
et les irrégularités imputables à l'auteur.
Qui ctst livre vodra entendre Ke il ne poent estre estable :
Bêle raison il porreit aprendre ; Le fu si degaste z confunt,
Plusors choses il porreit oïr 16 Ce sevent ceuski veù Font.
\ Ke mult font bien a retenir. De l'ewe vous dirai le voir :
Ce vous di jo por cors humain En travail est [z] jor z soir ;
Ki longes ne poent estre sain, Le vent est en travail sovent,
Ne dure gueres en saunté 20 Et la tere, si com jo entent,
8 Kar itele est sa qualité. En travail sunt en tel endroit, (b)
Le fais de quatre helemens, Chaut sunt, secche, moiste z froit;
De fu, de ewe, de terre, z vens ; Entr'eus a grant divefsetés ;
Ceus quatre que ci vous acont 24 E s'i covient adversetés,
12 De tele manere ensemble sont Divers maus z enfermetés
Ke il sont entre eus si muable Dont mainte gent sont engrotés.
2. 3 Suppr. il. — 6 Corr. puet. — 9 Corr. Fais est? 12 — Corr. t€Î.
^^^^^^^H Vous entendes bien qui; ce suhâit.
Ne le meins ne sont ven[u]eus^f^^^^H
^^^^^^H 28 Mes Deus encontre ce nus fait
Profila blés ne precîûses. {d) ^H
^^^^^^^H Muh gratit solaz t î^rant confort,
Cil ki [bien] conust lor m an ères ^H
^^^^^^^H Kc il giiri^c maint home d^ mon
68 Les tient a bones z a chieres ; ^^k
^^^^^^V par herbes, bieo est c^ncù,
Mes cil qui la vertu ne siet ^^k
^^^^^^H p Ou Deus *1 mb granc vertu,
Ne poct chaloir si il les aime ou ^^k
^^^^^^H Chaudes £ ti)oîstês, douces, anieres
[hiet ■
Si n est nul home, al mien viaire» ^^k
^^^^^^H Ki bien U force conustmii,
72 Ki n ait de medidne a fdire ^H
^^^^^^H ^6 A maini home vâler porroit.
Ou por son ami ou por soî« ^H
^^^^^^H Herbes ont molt très gr^int vertus
Ou por aucun autre, come jo croi. ^H
^^^^^^^H De bois, Je pr6 z de p^lu.
Mult vault a proiser lor savoyr ^H
^^^^^^H Semence^ flors, fuile, r^cmc
76 Ke vous poet a bosoine valoyr, ^H
^^^^^^H 40 MiJlt par valent a medicine;
Scn z savoir z riche fais, ^^^H
^^^^^^H Maintes herbes poez voir
Kar grant bien avieneni après. ^^^H
^^^^^^^H Ke muhes maus poent garîr;
Ore vous voil par tant mostrer ^^^^|
^^^^^^H Les herbes con u st re poez ,
80 Kc aî enpensê a translater : ^^^H
^^^^^^H 44 Mes les vertus fss ne savci^.
Ceseroit cslit z scient ^^^B
^^^^^^^H Voir poue^ des herbes plu sors
Cbii mult vaudrojt a plusor gcni. ^^H
^^^^^^H FoiUes, semences , [ f r u i s ?] et flo rs ;
En romauns dirai le !atin, ^^^H
^^^^^^H Vous ne save^ lors qualités;
84 Puis rescrivTai en parchemin, ^^^H
^^^^^^H 48 Ke tor vcnuz ne lor bontez.
Ke plusors îc puissent aprendre ^H
^^^^^^^ Et vous por quel les priscroiesî
Q^e ne se^^ent latin entendre. ^^^H
^H Kant vous soî lor nous couusez ?
Et si aucun home a envie ^^^H
r A vis vous est n*om nul po[oJ»r
S8 Qui il por ce de mai meisdie (f. a) ^H
Il $2 Kant chcscun home les pocs avoir;
Ke en romauns Taî translaté, ^H
VK Qjjant [elej est plus chier achatée,
Jo U dirai la vente : ^H
^^m Tani est de vous plus désirée.
Monsendemostrerniultmêsl bon» ^H
^^^^ Eles crescent en bois t en prés,
92 E si ii plaist ce est bien saison ; ^|
^^^^^ S 6 En voies, en sentes z en bl^ ;
Si envie a i t! me biet ^H
^^^^H Par ces fosses t par c^ haies
Moi ne chaut gueres» Deus le iiet, ^H
^^^^^ Les troveras, poor n^en aies.
Kar en tele chose me délit ^H
^^^^^^H II i a homes plus de mil
96 Ke tornera a graum profit. ^|
^^^^^^H 60 Que por tor plenté les tenenl vil.
Por veriin, ^^^H
^^^^^^H Ke mult cncrescent z rauns sont ;
Por te vertin pemez la rue ^^^H
^^^^^^^H Les grans plentès plus viles ont.
0 Tcre en terre creûe; ^^^H
^^^^^H Mes, por ce qui tauntes,
Triblejî le bien, pressez le jus ^^^H
^^^^^^F 64 Nesont eles mie meinsvaillauntes.
100 Tant que ne poc^ traire plus î ^^^H
^^^^^^^ ;o îl faut prononcer it*i7, ici et ailleurs. — 41 Corr* vtir, — 4^ Corr Viir ^H
^^^^^^H p. d*f ^ |3 Corr. pott. —6) Corr. quU m ta. * 6^, 70 Lire sait -huit; de ^|
^^^^^^B m^me vv. 9^-4, — 70 Vers trop long
; Si 4haut} — 7a On préférerait KiL H
^^^^^^H — 74 Suppr, aucun. — 75 vatdl, corr.
, fuU^ — 7e Corr. bomn. ^H
1
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 77
Pemez miel z aubon de oef Ki de plusors est mult loée ;
Et un drap linge viel ou noef ; DaunsGaliens le nous tesmoigne :
Bien Templastrez, ne vous soit grief, 108 En le mois de mai peraez ve-
104 Si le metez sor vostre chief. [toigne,
Autre Triblcz le, si li donez le jus (b)
Autre medicine ai ci trovée Plaine coupe ou auques plus...
Voici les derniers vers :
(¥o\.2i)Porfeme ke large d'enfaunUr. (iiaunt feme porte malle,
Si femme targe d*enfaunter La face est plus vermaille,
For tost mort ou vif fors geter. Et si n*esi pas de haille ' ;
Lci de femme od oile bevra Si est la mamele destre
Tost après le délivra (sic). Plus graunt ke la senestre ;
Espeirement de enfaunt : Nuques vaut viaires
c,. t , En plaisaunt ses aferes.
Si vous volez saver en ame ' '^
2. Suivent des recettes en prose. La première a la forme d'une
légende. Elle se retrouve ailleurs sous des formes variables : en
latin dans quelques livres d'heures, par ex. dans le n** i de la
Bibliothèque de Saint-Brieuc (xv« siècle) : « Très boni fratres
ibant per unam viam et obviavit eis Dominus noster J. C. et
dixit eis : Boni fratres, quo itis?... » En anglais, mais sous une
forme assez différente, dans les Reliquix antiquœ de Wright et
Halliwell, I, 126.
Espnmenl aphtes.
Trcis bons frères estoieni ke aloient al montd'Olivetporcoillir herbes bones
a plaie z a garison. Et ancontrerent nostre Seignor Jesu Crist, z nostre Sei-
gnor lor demanda : « Treis bons frères, ou alez vous ? » r il responderent :
« Al mont d'Olivet por coiller herbes de plaie z de garison. » Et Nostre Sire
dit a eus : « Venez o mai, z me graniez {c) en bone tei ke vous nel diez a
nul home ne a femme ne aprcndrez : Pemez oile d'olive z leine ke unkes ne
fust lavec, z metez sor la plaie». Q.uaunt Longins l'ebreu aficha la launce
en le costé nostre seignor Jesu Crist. celé plaie ne seigna, cle n*emfla
point ; ele ne puoit mie, ele ne doloit mie, ele ne rancla mie, ele n*es-
1 . Je pense qu'il faut entendre en esme. Pour rendre au vers suiv. sa rime
et sa forme régulière, on pourrait \\r*iQnaunt enfant malle porte femme.
2. Corr. faille ?
78 p. MEYER
châufa mie. Ausi ceste plaie ne seine mes, n'emfle point, ne pue mie, ne
doile mie, ne rancle point, n'eschaufe mie. En le nun del Pierc, el nom del
Fi/., el nun del seint Espirit. Pater nosler treis fois.
Por malade avciller.
Pernez le castor z ardez le ; z quaunt il est ars, affuniez le malade de celé
fumée ki trop dort, z il aveillera maintenaunt.
Voici les deux dernières recettes :
(Fol. 24 h) Por cfitonncweiU J\v'eille.
Por entounement d'oreille, sain d'anguille soit boilli (c) en la poielle, el
puis refreidi, et puis i metez jus de jubarbe et la pudre de nois muscade triblée,
et oile de lorier; tôt ce scit quit ensemble et mis en ncit veire, et de cestc
oigncment oignez l'oraile la ou ele doui, par laquel oignement oïe est reco-
vré, et le nerf retrait en oint aloins.
Autre. Pernez aloine et vif argent estaint et aubun del oef et viel oint, et
triblez lot ensemble ; et por le sowcf flairer si vous volez, si i metez encens.
3. Traduction en prose de la Chirurgie de Roger de
Parme. — On sait quel a été le succès de la Praclica chirur-
gie de Roger de Parme ou de Salerne. Non seulement on en
possède de nombreux manuscrits, mais encore elle a été tra-
duite au moyen âge en diverses langues. M. Ant. Thomas a
cité plusieurs de ces traductions ici-mème * dans le mémoire
qu'il a consacré à la paraphrase en vers provençaux de Raimon
d'Avignon, et entre autres une traduction française* qui est
sensiblement plus récente que celle dont je vais donner un
extrait. Nous trouverons plus loin, dans une autre partie de
notre manuscrit, une troisième version de hxPractica chirurgiey
différente des deux précédentes.
Avant de transcrire les premiers paragraphes de la traduction
qui occupe les ff. 24 à 45 du ms. de Trinity Collège, je crois
utile de reproduire ici le début du texte latin d'après l'édition
de 1546 î :
1. Romattia, X, 63 et su iv. ; cf. //'/(i., ^156.
2. HiH. nat., fr. 1288.
5. Ar. chiruri^nca GuiJonis CauUaci... his acccsserunt Rogerii ac Guiïielmi
Saliceti chirur^ix.,. Vcnetis, apud Juntas, .mdxlvi. La chirurgie de Roger
de Parme termine le volume, fol. 362 et suiv. - Le même texte, avec beau-
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 79
I. De vulneribus quae fiunt in capite.
Caput vulnerari diversis modis contigii : vulneratur enim aliquando cum
fractura cranei, aliquando sine fractura ejusdem. Fractura vero cum vulnere
aliquoties est magna et manifesta, aliquoties est parva. Sed, tam magna quam
parva, alia est cum magno et amplo vulnere, alia cum parvoet stricto.
Qpaecumque vero fractura cranei sit, de laesione panniculorum cerebri sem-
per est dubitandum ; nam aliquando pia mater, aliquando dura mater Ixdi-
tur. Cum vero dura mater laeditur, per haec signa cognoscitur : patienti dolor
adcst in capite, rubor in facie, oculorum incensio, alienatio, linguae nigredo.
Piae matris laesio per haec signa cognoscitur : defectus virtutis adest, ablatio
vocis, piJStulae quoque soient in facie supervcnire, sanguis et sanies a nasibus
effluere et constipatio ventris adest, et rigor ter et quater in die solet patienti
contingere, quod est certum signum mortis. Et omnibus vel pluribus de
supradictis signis supervenientibus usque ad centum dies ad plus morssequi-
tur vel expectari potesi. Et maxime, 'si aliqua menyngarum cerebri Isesa sit,
raorietur aeger in primo plenilunio adveniente, ut in pluribus hoc contingit.
Quia ergo de fractura cranei sequitur maximum periculum, qualiter fracturée
cranei nos subvenire possimus, per ordinem prosequamur.
II. De fractura cranei magna et manifesta cum largo et amplo vulnere.
Cum fractura cranei magna et manifesta cum amplo et largo vulnere
fuerit, ut si fiât ense vel aliquo simili, ita quidem ut os vel aliquid aliud debeat
abstrahi, nisi sanguis multum fiuat vel aliud impediat, os, sive aliud quod,
removeri débet, illico abstrahatur, et subtilissimus pannus de lino inter
craneum et duram matrem, velut ex obliquo, cum penna caute mittatur ;
in ore vero fractura: cranei pannus de lino vel de serico, quod longe est
melius, ita quoi extremitates panni undique sub craneo provide immittan-
tur, ne putreJo ab exterioribus fluens ad duram matrem decurrat et majorem
laîsionem ccrebro inférât. De spongia vero marina diligenter Iota et exsiccata
idem fieri consucvit; hitc enim putredinem ab exterioribus derivatam,
velut bibula, recipit ; vulnus autem extrinsecus toium, undique peciis lineis
in albumine ovi infusis et aliquaniulum expressis diligentissime repleatur ;
plumaceolus desuper ponatur, et, pro varictate partis capitis, caute ligetur.
Bis in hieme et ter in acstate mutetur ; et paiiens supra dolentem partem ad
jacendum locetur. Cum hac cura est insistendum usque ad plenam cranei
restaurationem.
III. De superflua carne si super duram matrem excnverit.
Si vero ante cranei reparationem aliqua superflua caro supra duram
matrem excreverit, spongia marina bene Iota et exsiccata ponatur ibi, quous-
que caro superflua corrodatur. Caiterum, si, post reparationem cranei, caro
coup de fautes d'impression en plus, se trouve dans la Collectio Salernitana de
Salvatorede Rcnzi, II, 458 et suiv. Le début est imprinvj, d'après un nis. de
Florence, par Puccinotti, Storia ddla medicina, II, 2*: partie (1870), p. 387.
8o p. MEVER
su^>er ipsum rtparamentum superflua creverit, pulvcrem de hermodactylis
sccure ponere consuevimus, Vulnus autcm cxtnnsecus cum panno solum et
carpta usque ad fînem perfectc curamus...
Voici maintenant le début de la version française, que je sup-
pose avoir été faite en Angleterre comme les autres écrits médi-
eaux du même volume; mais comme il s'agit d'un texte en
prose, on comprend qu'il serait téméraire de l'affirmer absolu-
ment,
[I] i> tok [s] mankrei de fromtûrt& (fol. 24 c).
Il avient ke II chlef est naufrez en <iiverSÊ[s] manières, kar tl est a b fiez
natifrez ovec h depcsceûre del tes, a h fie?, sauns depeceùre del tes, La dépe-
cé ûre ovcc la plaie est a la fiez grant {d) z aperte, a la fois petite % repuse ^
Mais quaunt k depeceûre del tes ke oiu V^ petite est a la fiez ovec large plaie
z grande, a la fiez avec petite plaie t estreite*. En qtielcunque manière la
depeceûre del lès seit, il est a doter de la bJeceûre des peaucellettes lesqueles
envolupcm le cervel, kar a la ficiî la dure mère est blecee, a la fiez la picue
mereï. Quant la dure mère est blecîc^ ces suni les signes : li naufrés ad
dolor cl chîef, rojor en la fjcc,enbrasemcm eseur, il est lot devejt*, la langue
est Eote noire. Mes quaunt la pîcue mcre esî depecie, ces suni les sîj^nes : ij
n'a point de vertu ne vois, boceies sue lent lever en sa face tôt au comence-
ment, sanc z nierde sont décore de ses oreilles % de ses narines ; il est lot
serrés ; (f. 25) il a freic /lij. fois ou .îii}, le jor, z ce est certainement signe de
mort, keus signes sorvenans ïe naufrês ne poet vivre au plus de cent [ours s,
[ÎI] Por depf£tfir<i.
Quant la depeceûre del tes est graunt z aperte, si com ele seit faîte d*espée
ou de hache, si os ou autre chose deit estre estrait^ tost seit estrait. Si U plaie
seine trop, donkes un deliè drapci de lin seit mis entre la dure mère z le tés
1, fi rtpmt (cachée) semble une addition du traducteur, si on stm tient au
texte latin imprimé. Toutefois un mot s^opposant à aptrte (lat. mani/isla) mi
bien Ici a sa place.
2. Le texte pourrait sv comprendre si on mettait ici une virgule au Heu
d'un point» inais le sens serait bien mal rendu. Je pen'îc tju'il faut terminer k
phrase après est ni U^ comme dans le latin ^ et supposer qu'il y a une faute oti
plusieurs dans ce qui précède. On pourrait proposer : Mah^ quauni [ht mt] h
é€Spf€iûri del tét ht ûm a \frande ou] ptiiit^ £ï^..
5. Le traducteur avait sous les yeux un teKte comme celui de Florence
(Puccinoni, il, ît, 587), ohpiamaier est en second.
4. Pour âtnffi : hu alknaiio.
5* On voit qu'ici le traducteur omet un paragraphe.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 8l
en bouunt d'une penne en escient * ; drapeus de lin ou de seie, ki meilor est,
seit mis en la depeceûre del tes, si ke les chiefs des drapelès seient de totes
pars sor le tes, ke ordure n'i pust venir a la dure mère, t ke le cervel ne seit
plus blessé. Om poet faire iceste chose d'esponge de mer (Jb) bien lavée z
essuée, kar ele beit la porriture. La plaie dehors se[i]t emplée de drapelès de
lin moilez en aubun de oef, z un poi après un orilier seit mis desus, z bien
seit lié; .ij. fois en yver z .iij. fiez en esté seit remué la plaie. Li malade
gise sor sa plaie ; z si seit gardez' de si ke li tés seit garis. [III] Si morte char
crest desur la dure mère devaunt ce ke li tés seit garis, esponge marine ne
mie 3 bien lavée z faite sèche seit mise de si ace ke la morte char seit ostée. Si
la niorte char crest desur le repareillement del tes, poudre de ermodacles^
metés sure. La plaie dehors seit garieJ de linge drap z de colon. Come la
plaie seit garie, apostolicum cirurgicum i seit mis. [IV] Si la depeceûre del tes
est graunt z la la plaie petite, si ke om ne puisse saver si la depeceûre
estgrant ou petite, botes i le dei z tastés amont z aval, kar nous ne sentoms
en nule manere si bien come del dei ke a ongle. Puis ke vous saverez de
la depeceûre del tes si la plaie est estroite, fendez le en crois, z deseverez les
quartiers del tes d*un estrument ke on apele erùgo^. Et si sanc ou autre chose
nedcstorbe, si os ou autre chose deit estre trait, ostez le tost avec pissicalloris ?,
c'est un estrument. Si la plaie seigne mult ou autre chose destorbe, n'i faites
nient. Metés .j. drap entre la dure mère z le tes, z faites totes les choses ke
sont (J) dites devant. Metés les quartiers ensemble; emplez tote la plaie de
drapelès moitiés en aubun de oef. Metés .j. oreillier de drapel desure z liés
le ; laissez le issi del matin treskeau vespre, ou del vespre treske au matin.
Li malades gise sor la plaie. Quant vous revendrez al malade, si vous trovez
les quartiers enflés z aoites *, icest est bon signe ; si vous les trovez retraiés
1. En escient traduit « ex obliquo » ; le sens propre serait plutôt « à gauche »;
«f/f«^t^ signifiant « gauche » (voir Godefroy) ; c'est l'anc. ail. i/mc (Fôrster,
Zeitschr, f. rom. PInL, I, 561). Mais la locution tn esclani n'est pas relevé
dans Godefroy, et je ne l'ai jamais rencontrée ailleurs qu'ici et dans la seconde
traduction (en esclengy ci-aprés, p. 92).
2. Il Êiudrait ^ari/, au neutre.
3 . Suppr. ne mie^ ou corr. neuve ?
4. « Hermodacle, bulbe de colchique. » D"" Bos, au glossaire de la Chirur-
gie de MondevilJe.
5. Garie^ ici et à la ligne suivante, est ^m garnie.
6. Rugine,anc. fr. roisne; voir Littré, rugine, et legloss. de Mondeville,
ROISNE.
7. Pinces, piscarides dans la traduction de Henri de Mondeville (éd. Bos,
SS 749» 1018).
8. Aoite (lat. adauc ta) n'est enregistré dans God. que comme subst. fém.
x««M«M, xxxii 6
82 p. MEYER
z iimeniiisés, mauveîsse signe est. Fiiitos ice^tc cure dvsl trcskc li tas seit
garis. Amenuisée Joiikc les dfîipdC^s z mcivs ks quariers en Jor propre lyi.
Gari5€E ' k plaie puis de drape us t de colon. Nous metoms tant soiilcmetit
drap en la plaie dont le tes Citt depedejc ; nous laissoms det lot en loi
ointes choses ; apostolîcom (Jù\^ 26) cirurgicum seit mis sor une corcie, z U
coreie seit mise sor la plaie sânèe.
I^ version se potirsuit assex réguliërcmctvt jusqu'au ch^xvii
du latin ; de là nous pit^sons au ch. xxt, donc voici la traduc-
tion :
(Fol. 29 f) Qiiani home chiei M foH tnu!. Trenchîez le quir el somechon'del
chief en crois, et faîtes pertub en le tes, ke la niatere s'en vos st. Liez ferme-
ment le derve'. Garisei la pbie co nie devant. -- Afain: quxtuu. Faites une
quiture en la fontenclle del coî derîere.
Suit le chap. kxix du L m {Si înîesiinum ptr aliqtiôd vulnus
foras exkrit ci ptr largum pd ex oblique S) :
(Fol, 29 d) Siksh0fU[s]h$fttt. Si les boucles isscnt par aucune plaîc, et les
boueus sdent trenchiés, mes ke Ka graindre partie retnaine saine, aide£ le isst :
si les boueus sont endurcis par froit^ trenchc;: aucune vive beste parmi, et
metés sor les boweus de si a ce que il seyent rechatifés*.*
Mais à ce chapitre s'arrête la traduction de la Chirurgie de
Roger. La recette pour Vapostoliavn cirurgicmn (sic) et Vaposio-
Ikôtn bdstarî (fol. 30) ne sont pas de Roger , non plus que
diverses recettes qui suivent. A partir du fol. 35 le copiste écrit
à longues lignes, et non plus à deux colonnes. La première
recette de cette partie du manuscrit commence ainsi : (FoL jj)
M Pmtdrt par la pitrt. Foudre por piere, recet semence de persil,
de fenoil, de ache. de lo vache, les semences de chascon une
once... » Ce recueil de recettes se termme comme suit :
(FoL 4î v») Encùntrt mnc itcorani de n^s. Encontre sanc ke decort (/<?/. 44}
denf^s, faites li c*^ic signe sor le front : XK. Si pcrncï ^iprês .j- '^stu a .(j.nous
c coupci les nous, z pxh escrivea cest signe en son front de son sanc.
A ce meimc : pcrnez argille ïrès fon t le destemprc^ de vin egrc , i de ce
au sens d'accroissement, avantage ; id c'est un adj. à peu prés synominc
dVfi/^i qui prC'Ctfde.
2. lïy A dans le latin : et patlens autem in vînculîs teneatur. >
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 83
faites .j. escrictoire de sus le front, z de celetere meimes z et de cel vin faites
une emplastre z metez sor le flanc.
A ce meime : faites poudre de vers de tere o solsecle z peivre, z ice des-
temprez z bcvez en vin par .iij. lunisons. Derechief quisez le quer de .j.
cicoigne z Tewe bevez, z escrivez les nons des .iij. reis, Jaspar, Melchior,
Baptizar, en .j. brevet, z les portez sor vous.
Encontre sanc, Pemez bendes de linges cordeles, z temprez en vin egre, z
liez les jointes totes.
Encontre le maille et le teie del oil novele, pemez le sanc de arundes
secke, z faites poudre, z metez en l'oil au malade un petit ensemble. Encontre
le maille del oil, pemez pel de colovre z quisez en grasse de coc ou de oisel
ke vit de ravine, z puis colez parmi .j. drap, z si le estuez (x^) en .j. vaissel
de areime, z metez en Toil au malade.
A ce meime : pemez basme une partie, z de fiel de oisel z metez en Toil.
Qpisez le rouge lumaisson en ewe z coillez la grasse, z puis le colez z en
oignez les euz ' .
Collire as eu:(. As euz faitez tel coUirie : pemez cire virge z tuttie z vert de
Grèce, saugeme; poudrez tôt z destemprcz de bon vin.
Encontre festre, sanz trencher, faites tel emplastre de ces herbes : favee .iiij.
poignes, des autres de chescune une : primerole, bugle, la racine de cucuel,
mirfoil, gantelée *, sanemonde», herbe Robert ♦, pinpre, z bâtez en .j. morter,
z pemez siu de moton z fondez z pemez le jus des herbes z miel z farine de
orge, suffisantement, z de ce faites emplastre z l'eschaufez z le metez si chaut
com il porra suffrir ; mes primes metez une tente en la plaie, z après metez
Templastre desus.
4. Court traité de médecine, qui n'est qu'une série de
recettes. — Les trois premières lignes, dont la première est la
rubrique, ont été grattées presque totalement.
(Fol. 45) a doner medicine,
T •
quant vodrés doner medicine
a malades, se regardé[s] laquele humor li abunde el cors, z quele maladie il ad.
Se ce est fleume, vous le devès atraire par oximel donier, z quant la matere
est apparill[i]e, que vus le conustrés par Tespeceté ou par la color del urine
se li dictes $ ainz que vus li donés medicine par troi jors de bones viandes z
1 . Cet emploi du limaçon contre une affection des yeux est recommandé
ailleurs ; voir les recettes publiées d*après un ms. de Cambrai par M. Salmon,
art. 54 (Études rom. dédias à G. Paris, p. 259).
2. Campanule gantelée, Joret, Flore popul. de la Normandie, p. 125.
3. Benoite, D' Bos, Chirurgie de Mondeville, au glossaire.
4. Géranium Rohertianum, Joret, Flore pop., p. 49; ci.Romania, XII, 10 1.
5. Corr. si le dictés}
84 P- MHYER
solubîes» r si mangut porées qu« soit fait de mauves z de mercuriale, z se i
rmiùs clmr de porc. 5c vus n'avea: porée, si pregne;c oigtiions z metés ovec la
char de porc, e se ce est en tens que on ne doit mie manger char, se
mangut tcles viandes : c'est a savoir menuise, perches, lu/, roches, poissons
a grosse[s] escardes ' de mer z de duce cwe...
Ce traité se termine (fol. 52) par un chapitre intitulé Encontre
fause flmtm^ scabie^ rûigne, dcrtre^ manjia^ z îesche t aulrc{s\
cimes. Les deux dernières recettes sont les suivantes :
(Fol. 51 v^) Autre. Perncii teudroDs de runcc t lovasche z quise^ en
gressc de capon, puis metez en .j, boiste en cire.
Oimmtnt a gouk rose. Pemez demie marc peisant de bknc de Puillc z demi
marc pesant de bknc plum z deniî marc pesant de blanc alun z: demi marc
pesant de franc encens z .]. m;irc pesani d'oile d*olive z .j. marc pissant de vif
. argcm z ,]. livre de vieux oint,
5* Traité (apocryphe) d'Hippocrate envoyé à Tempereur
César, — Ce traité, qui commence par la théorie des quatre
humeurs, et n est autre chose qu'une collection de recettes
médicales, a été^ comme ou sait, extrêmement répandu au
moyen âge. Les manuscrits latins en sont fort nombreux, et il
en a été fait, au xni* siècle, plusieurs traductions françaises.
Celle que nous avons ici se rencontre en divers manuscrits,
par exemple Digby 86, foL 8 v^ (Bodleienne)S HarL 15 ï8,
fol, 17s (Musée britannique). Dans ces deux mss., Touvrage
est précédé d'une rubrique qui manque ici K J*ai déjà signalé
une autre version du même apocryphe dans un ms, de l'Univer-
site de Cambridge, et à ce propos j'ai cité d'autres versions^.
(FoL 5jJ Cliascun veraimeni, z home z best^ Eoisel,qui cuer ïi en soi»
a .liij. humors, meismement cors d'orne, et quelcs sont les humors? Ce est
a savoir î*une est chaude» Tauirc est scche» la tierce est moiste, ta quarte csi
1, Écailles.
2, Voir la notice de M. Stengel* p* 4.
3, Dans le ms. Digby : « Ici comence le livre Ypoçras ke il envead a César
Tempereur. » HarL : *i Ceo est la livre ky jco Vpocras enveye a Sesar* »
4, Rûntania, XV, 274. Ajouter au?i manuscrits cités a cet endroit les
n<a 1361 et Î124 de b Bibl. Sainte -Geneviève, Je note en passant qu1l existe
une version en provenijal du même traîtC*. Fr. Michel en cite les premi^rçs
lignes diaprés un ms. qui îuî appartenait en 18^6, dans son édirïon du poème
de la guem: de Navarre, p* 7S2- Il a dû le vendre, mais je ne sais à qui.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 85
froide. Par la chalor sont soustenues totes iceles choses par lesqueles nos
vivons. Nostre os sont'sec qui force nos donent a soffrir travail. Froides sont
les entrailles dont nous espirons, z li sans est moistes qui norrist la vie. Par
les os z par les entrailles corent les veines, lesqueles govement le sanc ; li
sans la vie; la vie le cors sostient...
6. A la suite viennent des recettes empruntées à Touvrage
de Platearius qui sera indiqué plus loin. En voici une contre la
fistule ou « goûte festre ».
(Fol. 191) Fistula si est une maladie que orne apele goûte festre; si est une
plaie parfont estroit par desus en la superficie ; si vient acostomement de veus
plaies sorsanées, corne la bouche desouz est teint de venim, dont tote la nor-
reture qui i vient tome a corrupcion, dont la superfice depece, et cort fors
une porreture. Et corne ele est une fiez resoudée ou .ij. foiz, si depece
de rechief, et environ la plaie si naissent plu sors bouches ; z si vient a la fiez
de cause reumatique sans plaie que Ton a eu devant...
Suivent diverses « cures ». Voici la dernière :
(Fol. 191 vo) Autre. Faites poudre en tele manere de cantaridis : pregne
Ten cantarides vives z les mete om en vin (f. 192) egre z en sel, z au tierç
jor les mete om secchier au soleil, z en face Ten poudre, z mete l'en en goûte
festre ovesques une tente, z face Ten une quiture en la fonteine del col.
— Poudre precius a tuer cancre. Pregne l'en le jus des racines affodillorum
.vj. ounces, z chius .vj. onces % .x., de orpiment .j. once,r lesconfise l'en en
teu manere : les boille l'en en ewe z i mete om .j. once de orpiment z les
lesse l'en boillir .j. poi,2: les confise om, z les mete om au solein {sic) secchir,
z en face om trocisques, z les estue l'en tant que on ait a 1ère por mètre sor
cancre.
Explicit Amicum induit.
Atnicum induit qui justis amicorum petitionibus condescendit est
le début de la Practica brevis de Platearius, dont les manuscrits
ne sont pas rares % et qui a été imprimée dans l'ouvrage inti-
tulé, Practica Jo. Serapionis^ dicta Breviarium (Venise, 1497,
1 . Un mot doit avoir été omis.
2. Bruges, 470 (Laude, Catal. des mss. de Bruges, p. 405). Gimbridge,
Trin. Coll. R. 14. 40 (James, Catal. y II, 325); Peterhouse, 0.5.1, fol. 119
(James, A descriptive Catal . oj the mss. in Peterhouse Library, p. 73). Florence,
Bibl. Laurentienne, Gadd. 201 (Bandini, Bihl.Leop -Laur., II, 198). Oxford,
Bodléienne, Ashm. 1428; Magd. Coll., 173. Paris, Bibl. nat. lat. 8160,
fol. 9, etc.
86 p. ME VER
in-foK; Hain, n*" 14695), fol, 169 et suiv. Le paragraphe sur
la fismie et la recette pour la poudre de cantharides se lisent en
latin, à la fin de la Pra^ticaj'oL 185 v" de rédidon citée.
Suit, de la même écriture, nuis un peu moins grosse :
Pemez unepoine de cikoré une de cereliunge' z la terce de cou père, z une
des racines de persil^ t une des racines de fenoil, z une de menu ache, z une
de bchim, z une de la semence de anij?, z une poine del escorche de
saumbu ^ z demi poine de escroclie (sic) de frêne z deus poines de pollipode.
7. Traduction d*un autre traité apocryphe d'Hippocrate. —
La rubrique attribue ce traité à Hippocrate, et il est certain
qu'on y trouve beaucoup de choses prises à cet auteur. Mais eii
réalité 1 original est Toeuvre d'un médecin anonyme de l'École
. de Salerne. Cet original a été imprimé pour la première fois,
par Henschel, d'après un manuscrit de Breslau. Il est réimprime
(avec les notes de Henschel) dans la Colle^th Sakrnilanu de
Salvatore de Renzi, II, 74 L Seulement notre traducteur a dû
avoir sous les yeux un texte pourvu d'un prologue qui manque
dans le ms. de Breslau, et dont il sVst borné adonner un résumé
en forme indirecte, La traduction est du reste fort libre et
renferme bien des passages que je n'ai pas trouvés dans le latin,
(Fol. 194) hîi cmfmtci k $otiî éfimgtument Ypoeras a ers dùdpks quf muH U
mmitfit rtquis comfttt t! dfftsênt risîlfr H ftiaîmi^s^
Li iluctor disi au començcmcnt de cest livre z parole a ses disciples qui
l'a voient requis de ccst livre faire, z dbt qu'il a grant joie r grant leessc
loies les foi JE que il pense à lor peticîou pur le preu que lor est a venir de sa
doctrine s'il volent retenir t c dîst qu'il ne lor dira se choses e?ipruvécs non t
conçues, El si lor djst qulî n aveient pas sa doctrine pur vil, por ce qti*il ont
assés livres de ftsiquc, que om csuiicKe bien ^vent la soif d'un roisseî, coni
Ten ne poet venir a la funtaine. Ore vos dirons dunques un poi de bons
comandcmcns que serront autnesî coni introductions de praciique, car a la ûez
si vaut mut l'art ovc b niain; c'est a dire que le practique vaut mut ovc la
théorique, Ore v-us doig donqucs un novel cotnandement que vus faces tresto«
autrcsî come jo faz et que vo[s] overj^^ si com jo vus enseigneray.
l. Langue de cerf, scolopendre (Dorvauft, VAntiéoiaîre Nicolas^ p. sj).
a. Sureau.
j. De plus îly en a une rédaction en hexamètres dans le t JV Je U même
coUectioo, p. 14$ et suiv.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 87
(To) Otu mires, corn hom terequer[r]a que tu viengies veoir aucun malade,
le nun de Xostre Segnur te puisse aider, z li angeles Deu ke fist compaignie
a Thobie, cum il ala en Ninive, z le guiout z menout, puisse guier z conduire
vostre cors z vostre aime en totes vos ovres ! Ore vus amonesie donques que
vus enquerez z encercliez par chemin, tôt com vos irrés pur veoir le malade,
dou messager, com longement li malades avéra geû, z en quele manere la
maladie li avint, que vus puissez estre certefiez de la maladie par les signes
que li messager vus dirra, si que vus ne seez pas esbaîs cum vus vendrez
devant le malade...
A la suite de ce traité, du fol. 211 v** au fol. 213 v<», où finit
le cahier, une main diflférente, mais de très peu postérieure, a
écrit diverses notes de matière médicale. La première paraît
abrégée de l'article Olibanum du livre De simplici medicinay ou
« Circa instans » de Platearius ; voir la Practica Serapionis citée
plus haut, fol. 205 v**. Pour les deux autres, voir le même
ouvrage, fol. 205 v** et 207 r**.
Olibanum, ceo est ensens. Il est chaud e sèche el secunde degrei. Il ad
vertu de cunforter et de confermer, de traire ensemble e de restreindre ; il
est bon encuntre les lermes des oylz e la dolur de denz e encontre le huuel
e encuntre la grossesce et la roinssor des nariles, e encontre (/o/. 212)
indigestiun e ameres éructations, e pur les mameles engred[l]er » sunpodre
confit od eysil e enplastre sor un drap e mis sur le mameles. — Poine est
chaude z sèche el secunde degrei ; ele a vertu a défaire e a degaster.
Plum est freid e moiste el secund degré. Pernez un morter de plum et un
pestel e metez la einz eve z oile oviole * e movez le deques il seit espés ; après
sil metez sechier quinze jors au solail,e pus si metez oile rosat e movez le
mut e suvent. Icest uniment mult vaut encuntre arsure de feu u de ewe
chaude e encuntre chaudes apostemes e encuntre escorceùres de chalure
encuntre roigne qu'en apele en englois les changles...
8. Traité en vers sur les maladies des femtnes, — L auteur
indique, en termes généraux, dès les premiers vers, les sources
auxquelles il a puisé. Entre ^es auteurs, il nomme une dame
appelée Cléopatras. Cette Cléopatra (sans s) était une femme
médecin de l'antiquité, sur laquelle on a divers témoignages
anciens, mais de qui il ne subsiste aucune œuvre authentique '.
Ce nom a été pris par notre auteur dans un traité fort répandu
1. « Ad mamillas gracillandas ».
2. a Oleum rosaceum vel violaceum ».
3. A la suite de Trotula, on trouve dans le ms. B. N. lat. 7056 (fol. 86 v»)
un traité qui commence ainsi : « Incîpit genecea Cleopatue ad Deodaiam,
Desideranti tibi filia, karissima, et habere volenti commentarium curationis
88 p. MEYER
appartenant à Técole de Salerne et connu sous le nom de
Trotula; c'est ce traîté qui est sa source principale. Mais je dois
faire remarquer que les éditions de Trotuîa (j*en connais trois,
de iS44j 15475 1566) présentent un texte remanié d'où le nom
de Cleopatra a disparu. C'est donc d'aprà un manuscrit que je
rapporterai ici un morceau du texte latio que Ton pourra com-
parer au début du poème français ;
, . . .Earum (_ mulicrum) igitur rniseranda cakmîUs^ et maxime cujusdam
mulieris gratîa animum tneuni soUicttans, tmpuljt ui contra e^itudinescarum
evîdefîdus provtderem sanitati, ex libris Ypo. et G[alieni] ei Cleopatre pociora
decerptre desudavi, m causas egritudinum et signa cum ciîris cxponerem et
dîcerem^ Quoniam in muiieribus non tan tus habundat cal or ut pravos
hutîiores sufHciat desîccare qui in eis sunt» nec tantum laborcni vakat dcbiiitas
earum tolerar»; ut per sudores vale^vt eos ad cxteriora exp^Uere natura, sicut
in viriSj propter lioc ad caïoris récupéra tionem , eîs quandam purgationem
natura precipue assignavit per nieiistrua que vulgus flores appel Ut; quia, iicyt
arbores non ferunt fructus sine floribus, ita muUeres sine floribus ofRcio sue
conceptioms fraudamur. Hujus autem purgatio contingit mulicribus, sicut
vtris de tiocte poUuib accidit^ vi nature. SempL-renim natura gravaiaa quibus*
dnm humoribus in vins sive in niulieribus, juxta genus suuni nititur lionus
siîum deponere et bborem nimucre* Contlrgit mulieribus iiec purgatio circa
quartum dedmutn annum, vel paulo ciiius, veî pauîo tardius {B. N, ht,
7056, /<^* 77, corrige ^à et /à, à raiàt d'un mdrt ms.)
Proiogt (fol, 214).
Bien sachîéf} femmes, de ce ti'aiés douunce,
Ci est cscrit por voir de lor science,
D'cnÉini avoir r de lor enfanter,
4 De br secrùs tôt i est devisé.
Trover pots toccs les aventures;
Cerchies sunt les mdllors escriptures
De Costendn t del bon Catien ;
8 Diacoridcs ceï i mist de son sen ;
Sa part i mist li sages Ypocras
mulicrona.., » L'ouvrage est donné, diaprés le prologue, comme traduit du
grec, Clwpaita est probablement ici un nom imaginaire, car !e même ouvrage
se trouve ailleurs (par ex. Ttinit>' ColL R. 14.^0, fol. îci) sous un tout
autre nom. En tout cas ce n'est pas Toriginal de notre poème français.
1, On Ut dans les éditions {par ex, Medidmiiqui omms, Venise, 1547. f*>î,
71)-
Qli«pro|itcT ego misenndâ ilUrum c*kmitii!c* prtfenfm cuJDidBn^ mutrani: |
iiiitig*tioBc comptiîîa* începi dîîigcntiu* contempUri Je *grïtu*iinibtJS «|uîbtt& femî»
nlotis icxui »%pî»ïîme motetUtar.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 89
Et une dame que out non Cleopatras.
Certeinement eles i troverent
12 Dont li max vient z cornent en garront.
Por ce que femmes nen ont tant de chalor
Que eles puissent degaster lor humors,
Por ce rcmainent les humors en lor cors ;
16 Pur la froidure nel poent geter hoi^.
Li home suent z tra[va]illent fortment,
Por ce s'espurgent, n'ont enfermeté tant.
Par nature vont homes a femmes conseiller,
20 Espurgement lor donent por aider :
Doné lor a un grant espurgement, (v©)
Dames Tapellent fleur par engendrement.
Ne pœnt conceivre par nul engignement
24 Femme nesune sans fleur apparisant.
Arbres ne porte c' il ne florist avant :
Primes florist, a tous est çonoissant,
Herbe ne porte ne grein ne semence
28 Se ains ne floris[t], de ce n'est pas dotance.
Sclunc nature arbres ne porte fruit
S'il ne florist ; ice conoissent tuit.
Por ce ai jo amené ces semblances
32 Ke femmes ont en fleurs grant conoissances.
A femme vient teu purgations
Si come a home vienent pollutions.
Pollutions avienent z tex flors
36 QjLiant habondance i a grant des humors;
Naturelement vient itel purgemens
Quant la femme a ou treise ou quatorsc anz,
A la fiez, ou plus tart ou ançois,
40 Estre ne poent pas totes d'une lois :
L'une est froide, l'autre est plus chaude, (f. 215)
Geste tst humble, celé est plus baude...
L'auteur cite Galien, mais d'après Trotnla, ainsi dans ces
vers :
En un suen livre reconte Galiens (f. 216 v»)
Que jadis fist as escolers grant biens,
II Corr. troveront, — 21. Le sujet de dont doit ère nature; mais alors les
deux vers précédents, dont le premier est trop long, doivent être corrompus.
— 22 Engendrement Tiz pas de sens ici. Il y a peut-ctre lieu d'intervertir ce
mot avec engignement du vers suivant.
90 p. MEYER
De une que out perdu ses flors
Par quatre mois, estre poet par plusors,
Mult devint niagre z f>crdoit le manger
De nule rien n'avoit el desirrier. (f. 217)
Par quatre jor[sJ la comande a seignier...
Il cite Dioscoride (fol. 225), Oribase (ibid.), Hippocrate
(f. 236), Constantin (f. 231). Tout cela est pris de Troiula^
comme aussi le passage suivant où il est fait mention, peut-
être par suite d'une erreur de texte, d'une reine de France.
Uns mires de Lions fact un autre mecine (f. 220 v»)
A cele que de France estoit clamée roïne ' :
Preng gingebre z savine z foilles de lorier,
Titruiles * tôt ensemble en un morter,
Sor les carbones mist ceste medicine
Sor la sele patie J fist s[e]oir la roïne
Ensi qu'en la nassance la fumée venist.
Bien fu de dras coverte, niuli longement i sit.
Dame que tel mecine vodra fere sovent
Doit oindre sa nassance de oie rose devant...
On a remarque que Tauteur associe en rime en et atiy ce qui
serait bien insolite de la part d'un écrivain anglais. J'incline à
croire que le poème a été composé en France.
9. Le poème qui vient ensuite n'a que 172 vers. Ce sont
encore des recettes pour les femmes. Toutefois, comme les
vers sont de 8 syllabes et non plus de 10, je ne crois pas que
ce soit, à proprement parler, la continuation du poème précé-
dent.
Por tecc1)fs eu le vis (fol. 234).
Liquele que soir, dame ou pucele, Femme ne sai en nul paîs,
Ki désire avoir la face bêle, 4 Porqueiqueeleait techesenson vis,
1. On lit en effet dans un texte de Trot ula (Tnn. Coll. R 14. 30) : Qui-
dam mcdicus fecit regine Francie : accipe folia laurc, savinamtere simul... »
(fol. 189 v^'). Mais il va dans le ms. lat. 7056 ffol. 78 a) : « Quidam medicus
fecit h(K in regiont' l'rancie... »
2. Corr. triith'^ ou trihJr^.
3. Sic. corr. fH-rcù.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 9I
Que forment ne li mesaviene, Laver le deit z fere net
Por quele cnose ki avigne. Et quire en .j. bel possonet
Si tecches a ki al vis apiere, Kisoit degastedel jor grant masse,
8 Si face prendre gome d'eere 20 Tant que celé ewe soit grasse ;
Et fiel de tor triblé ensemble ; De celé grasse soit doldée (sic)
Leleudoitfroter,com il me semble, Et del plus clier abevrée.
Totes les tecches doit froter
12 Et tôt le vis mult bien laver; Por faire clier vis (v«)
Et en après, par dreiture En le mois de mai, el tens novel.
Doit avoir autre laveùre : 24 Prenez le pain del cucuel ;
Foïr doit on a une besche Lavez le bien et fêtes net,
16 La racine de la lovasche; Si le parez a un coutelet...
Ce petit poème se termine ainsi :
Por jaun€[s] clinvus avoir ' (f. 237).
Un bon conseil dirai a ceus Garder le pocz si vous plaist,
Ki désirent avoir jaune[s] cheveus : L*an outre en outre tôt plenier,
Les trous de choies facent prendre Ki bonemeni le veut seccher
Secchir z arder puis en cendre ; En la leissive le quisez ;
De ce face om bone leissive, Eins que vostre chief moillez
Et de ewe de fontaine vive, Laver le poés par raison
Prendre la flor de la genest ; O mult très petit de savon.
10. Traduction en prose de la Chirurgie de Roger de Parme.
— Cette traduction est fort différente de celle que nous avons
rencontrée plus haut (art. r). Elle me paraît inférieure, et de
plus le texte en est assez souvent altéré. Elle est accompagnée
de nombreux dessins, fort élégamment exécutés, qui repré-
sentent les diverses opérations décrites. Ces illustrations occupent
la marge inférieure des pages.
De tote matière de plaies ke avenent al chefÇÎ. 2} 8).
A feiz avent que li chef est plaie en plusurs maneirs. Auchune feiz od
la despesceùr[e| del test, auchune feiz sanz despesceùrfe] del test. Od la
despesceûife] del test est quant la plaie est achune tie grande et aperte ',
X. On possède beaucoup de recettes pour blondir les cheveux: j*en ai
publié une toute différente dans mes RapfnyrtSy p. 107, d'après un ms.
d'Edimbourg. 11 y en a plusieurs dans Trotula, MeJici antiqui (Venise, i$47,
fol. 79 vo).
2. Le traducteur n'a pas bien compris le texte (ci-dessus, p. 79).
92 P, MEYÊR
achune fdsî petite. Mcis quant* la plnie petite u grande, Tune est od graundc
il large plaîc, c Tauirc ost od petite estroitè plaie. ï^ dcspeceûre del tesc,
quaunt eîe aveint od la blcsceûre des toks del cervel, est tut dis a criendrc,
kar aichune feiz e:st blescé la toie que defent le cervel est * del test, que
est a pelé la dure nieire, auchune feiz la toie que oiî sur k cervel, que est
apelé la pie mère. S\ h dure mère est blesce, ceo est h raie que defent le
cervel dcl test, par ces signes le deve» saver : h teste del plaie H doit dukr,
la face H doit roger» la veine des oh li deit reesver, e h langue II doit nercir.
En après, t^uaunt la pie mère est blescé, ceo est la toie que est sur k cervel,
par ces signes le deve;; cunustre : H iiafTré ruvera, e sa voÎï (v"") li esgrevera,
que a peines parler pura ; blorbetes * li snrvt'ndrunt en la face. E al commen-
cement ii doit core hors des orreales e des narrilies sanc e pureture, e si dcîc
estre costïvé ; e pus en fui M, cea que pis est, que la plaie doit ?rembïer iroi
feiz u qifane (sic) k jor. Car ceo est certein signe de mort. En après de
trestUT; îcels desquels œs signes que dît aviam avendrunt, u sî des autres
si|ç(ws plus i avenunt, deveîlla mort de cels attendre al plusjesque acent jors »*
E pur ceo que de h deï»peceûr[e] del test auchune feiz en avcim la mort,
duTum a\'ïui! par ordre cornent honi pœet aîdeir a ta despesceûre del test.
De ht tkffseeùrtdd tes.
Quant la despesc[e]ûre del test est grande e aperte, si cum d'espee u de
achune arme» issî que os u autre chose i deve estre fors tteit^ sî mult sanc
nel dei^turbe, u os u altre chose que deit estre trait hors, Uit meintenant le
traiz hors, e un drap de lin mult délié entre le test e la dure mère cointe-
ment en escleng metcz deden^, e dedenz le pertuz de k depesceûre del test
metez un drap de lin u de ^W u de aichune que muît mels vaut*, issi que
le ches del drap (fol. 239) de tôt es pars desu^ le test seint mis proveablement,
que la poreture que decurt des parties dehors ne decurge a la tek que dure
meîre est apelé, c ensi blescé le cer\'el plus que ainz blescé ne fud. Del
espunge de b meir ben kvé e sechié poot hom meimes ceo faire, car ele, al
com la cose que mut beit, reccit la pureture que cheit de parties dehors.
Por l'mpkir la plaie.
Tote la plaie seit emplie de pekes linges u d'estupes que seint mis en
albun d'oef, e de une plume seiiit sur mis. E j>or la diverseté de la partie del
chef cotntement seît mis desure, E en iver soit la plaie dous fei;; remuée e en
este troiz foiz, char en esté naisî plus tost puanure en la plaie que en iver.
I * Il ta ut probablement suppléer ici [que wii] . — 2, at doit ôtre supprimé.
— 5, « Pustulae », — 4, Sic, corr. suiL — 5 ^Traduction detcsuHc* —
6. Il y a simplement, dans les textes imprimés : « pannus de lino vd
de serico, quod longe est melius. »
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 9}
Loex^ le naffré.
Si devez loer al naffré que il gise de celé part dunt se doit, que les
homurs (sic) que decurrent a latei[e] que dure mère est apelé ne la blescent.
E ceste cure deit home faire jesque al plener reparraiilement del test.
Por morte cl)ar.
Si il avient que devant le reparrailement del test auchune malcveise (sic)
chare mort surcresse la teieque dure mère est apellé, l'esponge delà mer mie
ben (y*) lavée, mes ben sechié metez desure, que par sa sause mangusce la
morte [charj. E tant metez la desure que tote la maufaisse ' char seit amortie.
Por morte char.
Après, si aveint que après le parraillement del test malvaise char surcresse
le teste reparrallié, si metez seurement la pudre des hermodacles. Si devetz
garir la plaie dehors od sul drap linge u od cotun queres(?) u drap linge,
que est apelé charpie .
Cette traduction est beaucoup plus complète que la précé-
dente, mais elle présente une interversion singulière, qui peut
être attribuée au copiste, mais qui peut aussi avoir été causée
par le texte latin que le traducteur avait sous les yeux. Au fol.
251 v° nous trouvons le prologue du second livre (« Nul ne me
doit blâmer de parole lunge quant mutes paroles brevement
dites plus tornent a nunsaver que a profit.... * ») Puis vient le
premier chapitre du second livre. Mais le deuxième cha-
pitre est bizarrement mêlé au ch. xxui du premier livre.
(Fol. 252 z/o) De plaie en le atherel. Si la plaie vient al haterel d*espéé u de
auchune tele arme semblable, que la veine soit taillie que en apele organale,
issi la devez aidier : cosez tute la veine od une aguille, issi que la veine ne
soit percie, e del autre part metez Taguille od un fîl, que le fil s'aerde a la
veine, e od cel fil bien la saceze strainiez que sanc n'en issie. Si n'emplez pas
pas la plaie de drap; e si ceo est en (Jol. 253) iver, si metez embroche sur
issi faire. (Ce qui suit appartient au ch, XXlll du livre /.) E si mult char i ad, liez
les paupires desure, qu'il seunt desure prient K E s'il n'i ad mult char, esrachiez
les peilez e frotez les paupiers des devant dites foilles, tant qu'il seignent, et
alez avant en la cure si eu m devant dit est. A cel mêmes pernez les jus de
1. Cet emploi d'/ pour v n'est pas sans exemple dans les manuscrits fran-
çais exécutés en Angleterre ; voir VHist, de Guillaume le Maréchal, p. cxxxix.
2. Ce qui précède est bien la fin (ch. xliv) du premier livre.
3. « palpebra vero ita semper lieetur ut superius comprimatur »,
94 P- AIEYHR
chk[v}rtl"oil et ks cimes dt-l bui^sum c dd aloîsne e medlex od jubun d'ocf
et ûd evc tosat, e faites cotne emplastre» Kt mctex dépure [C//, .VXH'J. Si lï
oil Icrnicnt e rogisseni ks peiU estre nature n'i soient pas [t;sj paupîers,
iaJUii?ï les veines qui su m el frum e es temples
La suite du chap. n du livre II se retrouve pluii loin, après
la traaspositîon que je viens de signaler, au fol* 264, Le troi-
sième livre commence, sans le prologue, au foL 273 \^; le
quatrième au tbL 291. La version se termine ainsi, a%'ec le
dernier chapitre du livre IV (De spasmo) :
(FoL 296 v*^)Ptw iftjnfpt kî air ut. A crdppe (^iV)qui aveint t;n ïa pi^te pu et
um saner eu ctrste maneire. Umic^ de çcl ûîgueiiîcnt ^ue si doit csire fait :
pcme/ ûîle tïiuiccîîn une unce, pet ter oi le (pc trahi} utice une e demi, d'oile
decomun e de bure de maî, uelemeivt, dragmes .liij (/t>/. 197). kesi
oiiigneTneni vault niult e[u] checuue gute crampe qui vient de repkciou.
Mais nous trouvons ensuite deux petits paragraphes fort cor*
rompus qui manquent dans les textes latins iniprimés(foL 298):
Pui la tmladtf que al aptif^maimn mmiumn \
Ceice maiadîe maltim mortuum est a pelé comiiiunement, si il vknt de
malancolie» e n,iist iis dereîneî* parties del cors ; dunt ce ssunt les s'gnes : î)
a lec cruste e dure e santé moiMure e od grature, e cco doit estre la curt: :
q^s] purgicr{?) la ma lire quinze jurs d'oximel^ e %\\ porgit;/ puis od beneilc
medîu od yeralogûdion * a^sie de dkbrentire c le tetr^ jor AftH estuiet le^
janîbcs od herbes boiîUes en vin fort; e puis oigne^c le maJade dt ncir oigne-
nient e de oigne ment qui soit a sause rtegme » tnedlé en&etnble e aguisscï de
kbre (?) e par sis jors checum jor dous Ibîï.
Del Uma^un
PemaE limajun, tnbîeis en fort vin u quisez en bscîvc, et pemeï la grcsâe
qui soit noce e oignez les jambes; pemcz le test de grand nois e metez en
pudre od fulugine e od crotc de clicifre * e destemprez od saim dois î ; pemez
I . Mûlum itmrtuum est interprété par les Bénédictins , continuateurs de
Du Can^\ de la fa(;on suivante: « Morbî genus peduni et tibiaruni; galL
mauxmfyfx »» ce qui est bien vague. En réalité c*est la gangrène; cf, ce pas-
sage de la Mattierf de iati^^age (p, 401 de mon édition) : « Ore regarder
« comment ma jambe en est tout enflée. J'en ai grant cremeur quMJ devendra
« un niormal, Ciir il puyt vilaynement qtie un fumers potirrii; tout plain de
(f fîefts, caroingc et nocrde et de tous autres ordures et choses puans n.
Cf.GodciVoy et le gloss. de b Chirmg'w de Mondeville, mortmaL,
1 * Con f ection in ventée par Logadi us ( Do r\*a ul î, L' J n Hêoktm Nk^s^ P- 3 S )•
l^ Voir le glo$s. de Mondevillc, flëugme sausse,
4, Pour tfjnre; cf* p, 9?, note k
$. Sk^ }>0iur dmts.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 95
la terce suriz e le sel bruilH e destemprez odle jus de (yo) la parele,epuis tri-
blant e en pestelant mêliez od mel oint de porc, e faites enplastre e esjliaufez
sur une teule al fu, emetez sur le mal al plus chaut que li malade le poce
suffrir.
Le reste de la page est blanc. Au fol. suivant commence le
texte latin de la chirurgie de Roger : Post mundi fahricam, La
copie s'arrête au ch. xviii du 1. IIL
11. Traité de la confession. — Ce traité est-il traduit du
latin ou a-t-il été composé originairement en français, je ne
saurais le dire : toujours est-il que j'en connais deux copies,
comme celle-ci exécutées en Angleterre : Oxford, S. John's
Coll. 75 fol. 86 r. Paris, Bibl. nat.fr. 19325, fol. 82 v*>.
Il n'est guère douteux qu'il en existe beaucoup d'autres.
(Fo/. 323) Qui vodra bel e beaus vestu apparer devant la face Jhesu, il
covent qu'il ait une robe qui a non confession. Q.ui bien ceste robe use, ja
n'avéra garde del félon. Au comencement deit Ten prendre garde qu'ele seit
bien taillée, que ren n'eie que reprendre Ore dune issi devom comencer.
Quanque remort la concience devom regeïr umblement purement e leaument.
Umblement par doçur de quor, purement par confession de bûche, leaument
par satisfaction de overaine...
L'ordre suivi pour l'examen de conscience est le suivant : les
dix commandements, puis les sept péchés capitaux. Suivent des
préceptes sur la manière de se confesser. Ce traité, qui occupe
six feuillets, est incomplet de la fin. En voici les dernières lignes :
{Fol. 328 z«) Issi est li pecheor mut joyus ç hetié c loe son creator nuit e
jor. Ici pert il tote icele malveise savur qu'il avant aveit del ord délit de son
pecché ; si entre en grant duçor que vient de la miséricorde e de la grâce Deu,
dunt dit li prophète : « Guster e veez com suef e duz est li Sire. Cil est
benuré qui met sa espérance en li' ». Pur ceo vus, qu'estes de pecché seinz
devenuz, dutet Deu, quar il n'averont ja defaute de bien que ' li aiment et
dutent : ceo sunt le deus gardeins que Deu ad mis pur garder ses
{Le reste manque).
O 2.5. TRAITÉ DE GÉOMANCIE. — TRAITÉS MÉDICAUX.
Ce recueil d'ouvrages variés est écrit tout entier en cursive
anglaise du xiv« siècle. Au fol. 42 v° il y a une table des
I . Ps. XXXIII, 8.
^6 p. MEYER
éclipses de 1330 à 1386. Le manuscrit a sûrement été écrit
entre ces deux dates. Je n'oserais Tattribuer à Tannée 1330 :
récriture ne me paraît pas si ancienne.
Je n'énumérerai par les divers traités latins, concernant le
corn put, Tastronomie, la théologie, que renferme ce volume :
on en trouvera rindication détaillée dans le troisii^me tome
du catalogue de i\L James. Je m'en tiendrai aux écrits fran-
çais* Je suis, dans les citations, l'ancienne pagination, qui e^t
par pages, non par feuillets.
1. Traité de géomancie. — Ce traité, intitulé w L*arc de cal-
culacione >> est très probablement traduit du latin. Il y a
quelques années, en taisant connaître un poème provençal,
jusque là inconnu, relatif à la géomancie, je signalai un assers
grand nombre d'ouvrages relatifs à cet art \ De ces ouvrages,
plusieurs, à la vérité, ne m'étaient connus que par d'anciens
catalogues. Depuis la publication du mémoire précité, j*ai eu
occasion de prendre note de quelques traites de géomande,
en latm et en français % mais je n'ai rencontré ni un second
exemplaire ni Toriginal de Topuscule dont je vais transcrire le
début, n ne faut pas désespérer. L'étude des divers arts de
divination n*a rien de bien attrayant et Ton ne s'étonne pas
que le sujet ait été jusqu'ici peu exploré,
fart df cakulmione.
(P. 65) Cçs! an esi ippelc iiijof fabrica \ et en autre manere la file 4c
jsironomic *, et en autre mantre science de garvel *, solom ceo que jco
vous dirniy- Pour ce que le graiiu mestres que cest arl fierunt, de la pro-
funde astronomie irahierunt quant que volcynt cstrc certcfié des choses que
fuit *, dount que jettereyns' lur questions en ncUe gravel, solom cco que
jeo vous dirray après. Ore vous voyi nionstre[r] brevemcat comcni vous devet
1 . Rmnaniat XXVl» 24e et suiv.
2. Ibid., 478.
3. Plutôt fabrke. Cette dénomination doit venir des quatre figures for*
mies avec les lignes de points jetés au hasard ; voy. le début du traité
d*Hugo Satiïiensis, Rmnania, XXVI, 248 et la note de la p, 267.
4* La géomancie est toujours cousidi^rée comme Tondée sur Tastronomie.
Voir le poème provençal, v. 7,8 {Rûm.^W\% 366).
S, CiQXt. gravii.
6* Corr. iunl.
7. Corr. Donquu jttttrmt }
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 97
deinaunder. A comencemeni vous devct prier Dcu tousi pusani que il vous
certefie de choses que vous voylés saver, que la temps seyt clerc ei que la
lune seyi en bone signe de firmament, et noun pace* de malveyns*, et
nomyment ou Scorpion, kar cest signe est figure o signe de faustè. et que
vous dcmaundet choses avenauns que sunt a demaunder et dount vo*. s est
en doute, et le queor est anginee ' ; et si avérés vostre pourpos. Pus pernez
nette sablun et perpiierez ♦ syr un table playne, et J pernez p;irchemyn et
enke et jeitez 4 ordnres* dez poyntz par lui, cum si vous verrez, et ser-
runt 16 linez e... et que checun de 4 ordnres content 4 linez; pus joynés
ij poyntz tut joynez o un chif de le Unes, quar, si seyt par 7 , vous lierez
ij poyntz d- sieute, et si noun par un poynie, e si avérez 4 figures que sunt
appeleez mcre, cum vous veyez issi.
Suivent des figures que je ne juge pas utile de reproduire.
L'ouvrage se termine ainsi, p. 80 :
En questione de amur ou de héritage est mené. Celi que est en prisone tost
issera, malades serra tost garra. L*an serra secche, vent sena grant et defautc
de fruit et de semence. Nequedent que avéra plus de un fruyte que de un
aultre, d*estature de cors que il sera longe. Le col e[r]t blaunche, grosse teste,
larges espaulez rounde face, petit
(Le reste de la page est blanc.)
2. Recettes médicales en vers. — Ce recueil se compose d*en-
viron vingt-quatre recettes. Le versificateur était Anglais et
savait mal le français. Il emploie oier, à Tinfinitif, pour oïr,
v. 27 ; il fait rimer atigoile (anguille) avec serfoile (cerfeuil),
v. 29. Le texte est d'ailleurs fort corrompu, et, en maint cas,
je serais incapable de le corriger. Les traités de ce genre ne
peuvent être utilement étudiés que par des personnes ayant
sur l'histoire de la thérapeutique du moyen âge des connais-
sances spéciales qui me manquent. Ces textes abondent en
termes botaniques que Godefroy n'a pas relevés ou qu'il a
traduits avec la plus grande légèreté. Il est d'autant plus
nécessaire de les signaler à l'attention des personnes compé-
tentes. Mon ambition ne va pas au delà.
1. Pour^. — 2. Corr. en malveys. — 3. Faut-il corriger anguissié\' —
4. Précipiterez? — 5. Corr. ou ? Les figures pouvaient ôtre tracées avec le doigt
sur du sable fin ou à la plume, sur une feuille de parchemin. — 6. C.-à-d.
ordres. - 7. Nombre pair.
Rtumania, XXXII n
98
Checun sage e saine ' (p
Se dut garder de maladie
Atende voluntiers a mei,
4 E bone saunté li aseygnerei.
Les queus herbes e cspecerie
Sount bones de norer ' la vie
De eins la cors e par dehors.
8 Atendez a moy, jeo dirra î lors.
Contra [doîorem] capitis.
Sy tun chef est trop doylaunt,
Penez a tut meintenaunt
Puliol quit en eisil
12 E metez Tcmplastre a vertil ;
Aloyne e foi le de lorer
Metez auci, jeo vous requerre,
En tens vient quidé(?)
i6 Vus sentcrez vus mesmes amendé;
Mè[s] egrcmoine ne oble mie,
A la teste fest grant aye.
P. MEYER
172)
Contra doîorem ocuîorum.
Si vos eus sunt grevez,
20 Cerfolie meintenant metez,
Al aubun des oufs medclez bien,
E ceo vus vaudra sur tute rien.
E si vos oes lermunt trop,
24 Metez a eus legustrop ;
Sentorie ne obliez pas,
Kar a eus fet grant solas.
Contra anditum.
Si vus ne poez pas bien oier
28 Pernez la grece de un sengler,
Medlct la grece de gros angoile ♦,
E ne oblet pas la serfoile ;
Pimpernele est mult fin,
32 A surdis tut jurs est enclin.
Voici la dernière de ces recettes (p. 174) :
Contra podagtam.
Si la podagre auci avct«
Grece de baleyne medlet
A la herbe que ad noun herbive,
Kar celé tue la gute vive.
Grece de bausan e de gopil
Medlet auci su de cheveril,
Camamille e morele ;
Auci pernet la pare le.
Chaunfe (?),sareie e enrinencin(?)
A cuer potagre sunt enclin.
Medlet les avant nomez ensemble,
A la potagre toudront la tremble.
3. Des pronostics de la mort, — Traité attribué à Hippocrate.
Le prologue nous apprend que ce livre aurait été trouvé dans
le tombeau d'Hippocrate. Je suppose que c'est la traduction
d'un opuscule ainsi intitulé dans un ms. de Balliol Collège *, à
I. Lire eu sa vif, pour rimer avec maladie. — 2. norer pour tiorrir? mais
le sens? — 5. Corrompu. — 4. Nous avons vu plus haut (p. 78), la graisse
d'anguille cniplovée pour la surdité.
I. N" 28) du Catalogue de Coxe.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 99
Oxford : Liber prescientie Hippocratis qui inventus est in sepulchro
ejus in piccide eburnea. Autres copies, avec un titre différent
{Sécréta Ypocratis) dans le ms. Ashmole 1471, fol. 184
(Bodléienne), et à Trinity, O. 2,21, fol. 138.
(P. 196) Ypocras le tresauge mire, z que sour tutez altres sout la nature
de humeyne corps, z cum il vist que il deust morer, comanda que Ten
prist cest livre ou estoit escrit la nature de lut le cors et secretz, z que Ten le
mist a son chif en sépulcre ou il gist. Un jour passa Augustus César par
devant la sépulcre, quida que la gist grant tresour, si commanda que l'en
Toverist ; z trova longues {corr. Ten ?) ceste livere a son chef, z fu aporté a
Temperour. Li emperour comandast son mire que il gardast dedeynz ; list ly
mire, si trova au comensement : Si li malade ad dolur ou emflure en la face,
z s*il ... * soure son neez, a le xx î tressime jour morra...
Ce traité, que je n'ai examiné que superficiellement, n'ayant
pas à portée les éléments de comparaison nécessaires, se ter-
mine ainsi :
(P. 218) Pur enmegrer ceus que sunt trout crasse. Pemezfenoil, si bevez en
ewe longement, z çoe fet les hommes z femmes enmegrer. Autre. Fetz pain
de pure sigle ; si le fêtez lever par ix jours, z a dissinie jour fetz le quire al
forn, z quant vous trerrez hors, depecchez menucment en un pot de pur vyn
plein ; si coverez au meuz que porrez en tere par ix jours ensinez (?), z pus,
cum vus volez doner a acun, pernez une poy de nugage (?) z donez luy a bei-
vere quant devra dormer, sil ' devendra megre asset, etc,
ExpîicU liber Ypocratis philosophi et medici sapientissimi de diversis medicinis
maxime corporihus Immanis proficientibus .
4. Recettes en vers. — De la page 220 à la page 246 est écrit un
poème d'environ 1800 vers, qui m'a paru n'être autre chose
qu'une collection de recettes médicales. Le même poème se
retrouve dans le ms. Bodley 761 de la Bodléienne à Oxford
(fol. 21-27). Mais les différences entre les deux textes sont
considérables. D'abord le texte de la Bodléienne ne contient
guère que 780 vers; puis, pour les parties qui existent dans
les deux manuscrits, les variantes m'ont paru nombreuses. J'ai
copié les 32 premiers vers et les huit derniers vers du ms. de
Trinity. Mais, dans les extraits que je possède du ms. de la
1. Ms. sg^ avec un signe d'abréviation sur 1*5. — 2. Corr. si ou cil.
lOO P* MËYER
Bodléieane, je n'ai retrouvé que les vingt premiers. J'en donne
les variantes. La leçon du ins. Budley eu précédée de cette
rubrique : kl comence la mvele cimrgmt m frana-is par rime. Et
de même, à la fin, on lit ; Expîkit nma cirurgia in galliœ.
Cependant il ne m'a pas paru que Touvrage, simple recueil de
recettes, ait trait à la chirurgie.
(P, 220) Pur dolur de k kstt. Un oigncment en devejt fer*;;
^ , * I ,.. De tut trds ensemble joint
Quant le corps est en Ungur, ^ ^ ^ ' .
duant le chi[ejt susprertt dolur, ^
Pur vcir donk fra que sage
4 Ky se garde de *:esic rage.
La morele et la chineïié,
^ gloteniere que foi le ad lé,
Lo vache et aune en se ment
5 Boillé seîni communément
En siu de moton ou en bure ;
Pur vcir bone est ceste cure.
Q^ant sérum qui t [si] serruni curt :
11 Par my un drup espés et forr
Te m pi us et from en oyndnis;
Pur vcir saches que garras.
Atiirf medaine hom,
La oyle prendras de la rose,
Autn mtdicine tnbont*
Kant la teste doiidera
La mente ïavèe triblera;
Les t en j pies en oindra[s] de le jus
24 Duu[s] ^c\u ou trois od quatre ou
[plus.
Pur ver Un de le çhif.
En Éîsike trovom escrit
Qpe puliol en cistl quit
Hn la fumée pus receue
aii Par le narlls, quant ert issue
Del vesseï ou fu quit,
Pur vertin est bone élit.
Pus celé puliûl prendeiî.
ï6 Car mut est durmeni boue chose, \i Entour la teste un piastre ferest-
Eisîl ei le jus de ère ;
Ce recueil de recettes se termine auBÏ, a la page 246 :
Pur veruii remtk'r,
VcruË$ assises al cors de home
Auire curt.
Soufre e peb ensemble boilez
E semence de eble bien trîblcz,
Tm ensemble aûnex,
Epusk' V crues en oignes,
Auîft cure
La cgremoyne seit bien batue,
Pus lié sur le char nue;
Cet remue verament
Le vcrues hastivement.
5 Bodl. Pertic^ marouil et dîeniUe. La themlre (manque d^ns Godcfro) j, du
hu caniculata, est la jusquiatne; voir P. Dorvauït, LAntidolain Nkûîas^
p* )UV, — 6 BodL gkiomrt. C'est fa barda ne cotonneuse, ghtitû^nkr en
Normandie (Joret» Fîùrt pop.^ p, 114). — - 7 BodL I. d camùmiUe. —
u Mieux EodL îort, — 1^20 hoàl. De trtUui mmnbk àûit rmini \ Btitt k$
Umpîfi ti kjrutU.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 10 1
5. Sur Us maladies des femmes. — Le reste du feuillet et une
grande partie du feuillet suivant sont occupés par un poème
d'environ 170 vers sur les maladies des femmes qui paraît dis-
tinct de ce qui précède. En voici le début, qui est fort corrompu :
Si com Arisiotele nous dit
En Alisaundre en son escrit,
N'est pas reison ne afaitement
Qpe sues sount a tote gent
Le[s] maladies que aveinunt
En langor le cors teinunt ' .
A homme icel[es] n'ont overe
Ke femme cele, tant est covere
Ke envis unkes a nul home
Le voil mustrer, çoe [est] la sume.
Pur ceo aprenne médecine
E a dame z a meschinc
Par quei puse privement
Sei eider sanz afient.
DfS flotirs de femmes.
Escrit est que par atele reson
Com vint al mal polucion,
Tôt est (lire en ?) même la manere
Avent icest mal a la mulicr.
Çoe vint par habundance des huijiours ;
Si l'apele feme cez flours...
Ces derniers vers rappellent évidemment le traité de Trotula
dont nous avons rencontré plus haut une version rimée.
6. Pronostics tirés du mois de la naissance. — Ce court mor-
ceau se termine par un explicit ainsi conçu : Explicit distinctio
humane originis jacta per menses et per dies. J'en ai signalé jadis
(Romania, XV, 331) un autre texte dans le ms. Gg i.i de la
Bibliothèque de l'Université de Cambridge.
Issi poyt home veyr saunz douiancc (p. 426)
Le[s] proprietez de home par sa neysaunce».
Vous que lirrez lez chosez saunz », ne emmerveylez mye cum il fussent
inpossibles, kar si il ne seyt pas partout si cum il enseigunt *, ceo est pur la
diverseté de conplexion et non pas pur la defaute de art.
Jenver. Enfant né en le moyns 5 de jenver amiable, coveytos, voluntrifs z
irrous z de maie creaunce serra...
1. Il semble que Fauteur se réfère au Secrettnn secretorum, qu'on attribuait
à Aristote. Je n'ai pas trouvé le passage auquel il est fait allusion.
2. Nous avons ici une rubrique en vers, selon un usage fréquent dans les
ouvrages français composés en Angleterre. Mais le second vers est trop long.
3. Céans.
4. Mieux, dans le ms. de TUniv., Vart enseigne,
5. Oumopis. Il faut lire //M>y5.
102
P. MEYHR
0.2.14* — La passion, en VEiis, — Le Roman des romans — Sikmons
FRANÇAIS. " La DÈma\CE DES ÉGLISES.
Ms, en parchemin^ ayaat à peu près; le format d*un ancien
in-4** (0,220 sur 0,155); 1^9 *^' I-^ premier cahier j écrit au
XV* siècle, contient une copie incomplète du Stcretum Secreto*
mm. Le reste paraît dater du commencement, ou pour ne pas
trop préciser» dt* la première moitié du xiu'= siècle- L*écritureesc
celle qu on appelle en Angleterre « normande m, par opposition
à récriture cursivc proprement anglaise (amrt hand). Mais il n'y
a pas de doute que Técrivain était Anglais. Les pages sont k
deux colonnes et à trente-trois lignes par colonne.
J*aî transcrit cetre partie du manuscrit presqu'en entier en
1871 et 1S74, G. Paris, qui se trouvait avec moi à Cambridge
en 1874^ m'a aidé dans cette tâche. Mais je m*exagérais peut-
être alors l*imponance des copies que nous avons transcrites* Il
suffira d'en donner quelques brefs extraits,
1. La Passion. — Je ne puis mHmaginer par suite de quel
accident le copiste a écrit en tète Sermotm Maurihi pariskmis
episcopi. L'ouvrage par lequel commence le manuscrit' est un
poème sur la passion du Christ dont j'aî énuméré jadis' de
nombreuses copies, et dont j'ai publié en diverses occasions
plusieurs extraits d'après des manuscrits différents K J'ai
montré que les %^arianres étaient considérables et qu'en beau-
coup de manuscrits un poème sur la" descente aux enfers était
joint au récit de ta Passion. Il n'en est pas de même ici. La
descente aux enfers et les apparitions de Jésus à ses disciples,
jusqu^à l'Ascension n'occupent que quelques vers. Entre les
rédactions que j'ai fait connaître en mes précédentes notices,
1 . Je ne tiens pas compte Ju premier cahier qui n'a nen de commun avec
\t ms. français relié à b suite,
2, Hommiit, XVI, 47.
\, Rottmma. XVl, 4g (ms. de T Arsenal jioi); ihd. 227 (ms< de Grenoble);
ikûl. 344 (Musée brit. Add. 15606); XXV, 551 (Ms. du FitiwiUiam Muscum,
à Cambridge)*
LES MANXSOUTS FRANÇAIS DE C\MBRIDGE IO3
celle qui se rapproche le plus de la nôtre est celle de TArsenal
{Ramania^ X\î, 48). C'est, à mon avis, la réJaciion primitî\*e.
Je me borne i transcrire ici les premiers vers, sans donner de
variantes, ni proposer de correaions. On trouvera facilement
le moyen de remédier aux incorrections du texte en se reportant
aux extraits publiés d'après d'autres manuscrits.
Sfrmotus Mattritii ftarisùnsis efnsct^i (f. i %),
Or escutez mult ducement.
Gardez qu'il n*ait parlement.
La passion Deu entendez,
4 Cument il fu pur nus pencz.
Ne la poet oîr créature
Qp^il n*ait piti^, ja tant n'iert dure
Pur ceo qu'il ait puint d*entende-
[ment
8 Al rei del ciel omnipotent.
La lettrure vus oîstes
Que recunterent les ewangelistes,
Meis ne seûstes que amunta.
12 Si bien eu m ci orrez ja.
La Teste as Juels aprismout,
Ceo dit li livres mot a mot,
Ke Pasche esteit appelez,
16 Sor tote rien esteit gardez.
Meis H prince de celé lei
Ki nen ourent cure de bon rei,
E li proveire e li meistre
20 Quereient a destre e a seneStrc
Cument Jesum pcûssent prendre
E par boisdie en la croiz pendre.
Chés Caîphas sont assemblé,
24 Evesques fu de la cité.
Iluec unt lor conseil tenu ;
La parole fu de Jhesu
Cum faitement le traieraient,
28 Sanz la gent qu'il mult doteient ;
Ê dient tôt privéement :
« Laissom aler tote la gent
a Qpi sunt venu a ceste feste,
32 « Que trop grant nbise n*i sait
[Ictc ».
Siz jors ains que Pasche fu
En Bethanie esteit Jehesu«
La ou par grant pieté plura
^6 Quant Lazarum resu5cita«
En Tostel Simun Ieprus«
Iceo sachez nVst pas suis :
Des disciples i out asez ;
40 Judas n*i fu pas ubliez.
1512
Si cum li treis jurz sont venuz
(f. a4«
Quant Deu plout, s*cn est issuz ;
Mes pur nient se pcnerent issi.
Kar, quant Deu volcit, s*en issi.
Issuz s'en est si cum il voleit :
15 16 En enfcrn alat tôt drcit.
De enfcrn brisa les sercOrc[s]
E rumpi tuies les closturcs ;
Fors en gctta la compaignic
1 5 20 Que dcl diable esteit ravie.
Il la conduist a son chier pierc(0
En sa gloire la ou il ère.
A ses apostres s'aparut;
1524 Quarante jorz iluecques fut.
Mustra lur la novelc lei,
Puis. les beissa chascun par sei.
Issi nus puisset il salver
1528 E noz aimes de peines délivrer
Cum il pur nus suffri la mort
E fist a nus grant confort.
Amen.
104 P- MEYER
2. Le Roman des rotnans. — Je me proposais d'étudier ce
beau poème à propos du ms. de Trinity. L'étendue déjà consi-
dérable du présent mémoire m'oblige de remettre à plus tard
cette étude. Je me bornerai à en énumérer les copies. Nous
possédons, du Roman des romans, outre le ms.de Trinity, quatre
manuscrits dont l'un est un simple fragment.
Londres, Musée brit., Old. royal 20. B. xiv, fol. 96.
Oxford, Bodléienne, fonds Douce, 210, fol. 33 ».
Paris, Bibl. nat. fr. 19523, fol. 145 '.
— — 25407, fol. 139.
Voici les premiers et les derniers quatrains, qui sont, dans le
ms. de Trinity, au nombre de 257:
1 Ici comencc H Romanz des romanz; (f. 24 c)
Mult deit boens estre, kar li nons est granz,
E profitables e forment delitanz
E as oreilles c as quers des oianz.
2 Jeo nel comcnce par nule presumpcie,
Ne pur fiance de ma bone clergie,
Car petit sai e sui de foie vie,
E li men sens a ceo ne suflfit mie.
3 Mes jeo sai ben ke nel puis unques doter,
Ke cil |ki] fist les langages muer
E fist Tasncsse a Balaam parler
Poet foie lange a ben dire a tu mer.
4 Sainz Esperiz sa grâce mi enveit
Ki mon dur quer a bien dire apareit,
E teles paroles pronuncier mi ottreit
Ke li romanz de son non digne seit !
Fin (fol. 32). Les cinq derniers quatrains sont d'une écriture
plus fine que ce qui précède, mais, sinon de la même main, du
moins à peu près du même temps. Ils manquent dans les autres
copies.
2)1 Judas vendi Jhesu Crist vairement.
Repenti sai, mes nel fist sagement ;
Par rcpentance renJi il cel argent.
Mes desespeir lui loli sauvement.
1. Fragment, consistant en 17 quatrains, dont j*ai donné le texte entier
dans le Bulletin de la Société Ja anciens textes ^ 1880, p. 69-71.
2. Les trois premiers quatrains et les deux derniers sont rapportés dans la
préface (p. vi-vii) du Besanlde Dieu, édité par E. Martin (Halle, 1869).
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE I05
252 Car c'il eùst a Dieu merci crié,
Od bone fei e od simplicilé,
Deus est si plains de grani pieté
Q.ue il lui eûst sun pecchié pardoné.
253 Ore le prium dune ententivement,
Qui descendi pur nostre salvement
Et de la Virginc volt nestre charnclment,
« Si peut il ben cume rais omnipotent.
254 Qpant il nasqui, une estaille aparut
Desuz la berche, la u li emfes jut.
Es vus li angeles as pasturs descendu (f. 32 t)
Qui lur nuncia la joie que la fu.
255 Icele joie tut le munde repleni;
Si serrums nus par la grâce de li,
Si verraiment cum il descendi
fur pécheurs salver par sa merci.
256 De noz péchez nus face vair pardun.
Devant la mort vaire confession.
Issi finist le rumanz al bon nun,
Mais de ma part le cries * d*une oraisun
257 Feit' en rumanz e en altretel guise,
Car cil frautKS home pur qui joe ra[i] mise
Chevaler est e aime sainte Eglise.
Deus li otreit finir en son servise I
Suivent ces deux vers :
Si plus i a, joe n'en puis niés,
A çeste parole je me tés.
3. Le Bestiaire de Guillaume le Normand. — J'ai énu-
méré 19 copies de ce poème dans mes Notices sur quelques
manuscrits français de la Bibliothèque Phillipps (Notices et extraits y
XXXrV, première partie, p. 235). Mais cette liste n'est pas
complète. J'avais négligé de mentionner le ms. Arsenal 2691
I. Pour creis; le sens est : « Le roman.... finit ici, mais, jeTaccrois d'une
oraison ». Le poème s'arrêtait donc au quatrain 152, et l'oraison ajoutée est
probablement Toeuvre d'un simple scribe.
I06 p. ME VER
(fol. 62), qui n'est que du xv* siècle, et le ms. de Trinity, dont
je possédais depuis bien des années la description *.
En toutes overaîgnes en deit
Estrc loei, qui que il seît.
Lïwe de bone corne iiçâtlk
Ki avra boue delînaiîie
E bon dit c bone matîre
Veit GuUbmes en rotnanz cscrîre
De bon latin ou il îe trove....
(f- 12)
4, Sermon en prose. — Ce sermon, peut-être traduit du latin,
se trou ve encore dans les niss. Douce 282, foL i (Bodléienne),
et B, N. fr. 19525, foL I53< U paraît se diviser en plusieurs
parties dont la première est la plus longue.
(Fol. 68) Danavît iUi nomm quotl tst super mtme nomm [Philifp. ÎI, 29]- .
Scint Pol li apostles pirole de Nostre Satvur e dit que » Deu père celestre^
dunat a lui un nun ki est sur tuï altres nuns. Seint Jcronime dit que ceo est
icesi nur> Jhesu* En la révérence de cest tiun. ceo dit li apostres, si flcchîst e
plie chescun genoil de celestiens, de terrestriens e des enfernals, li un volen^
tiers, eu m me (lU e dtiers amis, li ahre envius, cum serf u felun entrepris ; ceo
est a dire en la révérence de cest nun sunt !e5 mainies de la mansiun de trois
csiâges j Deu cncïinez. Li rois céleste ad un mansiun de trois estages : Uj
suverçin est li ciels, ki est soliers.estelé e chambre u clarté est e joie panna-
nable; la m:i5ne est cest siècle k'v est cume sale u ad travail e luitc e jur e
nuit entrechanjat^Ie. L*es!age plus bas est enfer, kî est gaole e chartre u peines
sunt e puurs e oscurté esta Me,,*
(Fol. 85 rf) DixU Dmmnus ad Jeutm fiVmm Navt mhmtrum Moysi^ [JosuH
I, i]*, Deu dist a Jhesu li fila Nave, quicrt ministre Moyse : Moyses, raun scr-
gant est dévié. Ore tcî esdrecc c passe cest flum Jordan, tu e cist poeple, en
la terre que jeo vus dîrnii.,.
(Fol. 90) MUil Deus exphratort.s in ahscmtdih et dtxit ei$ [JosUE, II, l],..
Aléz sercherla terre t le bureh de Jéricho. Ildunt alerente entrèrent de nuit..
1. Ajoutons que le ms. mentionné comme étant à Berlin (coiiectîon
H am il ton) est le m s, du Fitjtwiiliam Muséum (Cambridge) que j'ai décrit id
même (KXV, SSj)- — Le ms. Birrois 1 1 est le no 518 de la vente de 1901,
Je ne sais oii il est aaucllement.
2 Les deux premiers vers manquent : L'initiale seule a été faite : Q^ki
tmt çofturuibkn defim \ Ont wrtià îfut H pn^].
j. Ms. qu0.
4, Ce texte et le suivant ne sont pas dtés exactiementi
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE I07
(Fol. 97) Cum autem esset Jhesus in agro urbis Jeridjo {JosuE^ v, 13]. Ceo
nus cunte reîtorie de la lei...
(Fol. ICI c) Tulit autem unus ex filiis Israël aliquid de anathemate [JosuE,
VII, i]. Ceo dit Testorie que uns home de la maign[i]e Israël
5. Sermon sur la dédicace des églises. — Ce sermon, qui
n'a pas de rapport avec le chap. CLxxxii {De dedicatione eccksie)
de Jacques de Varazze, offre cette particularité qu'il commence
par un prologue en vers. Il est incomplet de la fin et je n'en
connais pas d'autre copie. Voici ce qui en reste dans le ms. de
Trinity.
Ki volt oïr e volt aprendre (f. 109^) 16 A qui Deus dona la sue amur
E de curage ben entendre En («)rr Est) cest traité fors excepté;
Le sacrement de seint Eglise, E sul par lui sui ordené,
4 Cum Tescripture le devise, K*il s'en délite el oïr
Ceo est des mustiers dediement, 20 E preu i ait del retenir,
Issi le diîrt Tem vulgarement, E tut li altre ensement
Ces dous mcz, « sacrer e dedîer » De ceo reteg[n]ent esperement
8 En cest lui servent d'un mestier. De bien oïr e de bien faire
Dunée est la poesté 24 £ lur ben fait a bon chef traire.
Sul as eveskes, de par Dé, Le rimer dès ore larrum.
Les églises [de] dedîer, Kar pleinement parler voldrum
12 A els apent icest mestier Pur bien espundre la escripture
E nient a altre; c'est Tasise 28 E bien mustrer la sanz cuverture.
De li qui fundat seinte Eglise. Ore dune entende qui voldra,
Par un prodom de grant valur Del bien entendre pru avérât.
Pur ce que del dediement des églises avons entrepris a parler, premerement
fait a oïr que sune (c) cest mot église.
Eglise sune tant cum convocaliOy l'asemble de cels qui sunt el règne Deu, e
en cço est la différence entre Sinagoge et seinte Yglise, ke sinagogedit tant
cunie congregatio, asemble. Assembler poet l'om ensemble rainables créatures
e nun reidnables créatures. Issi furent en la sinagoge gent que reisun enten-
dirent. Li patriarche e li prophète ki entendirent par les escriptures le adve-
nement Jhesu Crist (et la salvatiun Jhesu Christ *) et la salvatiun del munt,
et asez i out de tels qui ren de ceo ne sourent,mès quiderent entre salve par le
sacreBze de la lei. Ceste église espiritelei {sic) est sacrée del saint Espirit et
dédié a Deu par la sue grâce e par sun sanc, del quel dediement est figuré
et mustrancée la materiale, e veûm cument. Li evesques, quant il deit dédier
église materiale, primers beneist l'ewe que defors estât, dunt il deit l'église
aruser, e siel giet en cel ewe cum en altre ewe beneite. Après avirunent le
I. Les mots que j'ai mis entre ( ) doivent être supprimés.
T08 ?, METER
église trcis fci^ dehors e gcttet adès Têwe bsnuite sur les mesieres e sur c
popîe, t II clerc et lî poeple le siwem. H curn il fait celés triiSs processîuns,
SI deivent ardeîr par di^derx duc^i (d) ctfges u du?!e chaudeiles^ e a chescun
turn kc ilevesques fdl» si vend rat al ntaistre us de l'église c hurterat al bus
del église de sa croce e dirrat : éiUdîiU portas principes vestrm^ ik introibii
r<?A gkrif [Ps. xxiii» 9]. Et H dîakenes qui dedetu ert enclos lui respundrat :
Quh eît îste nx giorie ? E li evesques rcspundrat ■ Ihfninm virtutum^ ipse
est rixgloriê} [Ps, XXiiI, ïo] A la tierce fie overat li diakeiie Tus, clie\^esques
entrera!, e li clerc e li fai après lui. î^ dirrat li evesquc, quant ilenirerat : Paz
hik âpmui. H cum il ert cntrej:, si se mettrai en ordsons od les ciers, e prierai
pur la satïsfactiun de ia maisun ki est a dédier. Après leverat et amottes-
tera les atres a orer, sans dire Dommus vohiscum. Quant ceo ertfet, si escri-
vera del pié de sa croce un a fr ^ e! sablun qui ert gettc en seinte église ; si
cumencera j la senestre angle devers Orient ; si escriverat dcsque al destre
angle devers Occident ; e derechef de h destre angle devers Orient desque
al angle seneâirc devers Occident Après ceo irrat devant le hait ahel c dirra:
Dius in afijutûrium meaitt, où Gloria Patrie %ûnt alMuîa. E puis frat un c^^^e
beneii e si metra eiiz fieL*.
(Lt rtsti manqutj)
0^ 2-45^ — CH.\RMEfï, POfi-SïES m VERSES, PROVEUBES, CtC.
Manuscrit ayant le format d'un în-8^ allongé (o,22t> sur
0,035) ^<^i"ïï d'une belle écriture normande en Angleterre vers
le milieu du xni*' siècle". Il appartint jadis, et fut peut-être
même écrit, à Tabbaye de Cerne, en Dorset, Cest un recueil
d'opuscules variés, en latin et en français, où Thistoire litté-
raire peut puiser d'utiles éléments. Malheureusement le manu*
scritj tel que le possède la Bibliothèque de Trinity, n'est
plus complet. Une cinquantaine de feuillets en ont été détachés
il y a un peu plus de soixante ans, et ont été vendus au
Musée britannique où ils forment Tarticle coté Egerton 843 '.
Ce fragment renferme divers écrits relatifs aux sciences mathé-
t. Voir cependant d-dessous, p. 109, note li
a» Le Musée ;icqtiit ces feuillets le il lAOdi iS;40 du librjiire Rodd, en
m^me temps que quelques 4Utrei manuscrits ou fr^gmerus, de même pro-
venance. Tous ces livres p^îrient» îx la première page^ U signature d'iin èrudii
bien connu parles travaui^ sur b Uucr^ture anglaise, Jâme5 C)rcU;ird Hatlt-
wcll (t 1889). Celui-d fui accusé da vol; ïes apparences étaient contrit loi.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE IO9
matiques et notamment le traité de la sphère de Johannes de
Sacrobosco. Il ne s'y trouve aucun écrit français'. Tout au
contraire, le morceau, plus considérable, qui est demeuré sur
les rayons de la Bibliothèque de Trinity contient quelques
breÉs textes qui méritent d'être signalés.
1. Je transcris une page du commencement, où il est
question de l'usage qu'on faisait de certains psaumes comme
charmes ou talismans.
(P. 4 ') Si aucun voderat Deusupplicr, vers li deit od gémissement devant
la croiz .vij. feiz ces saumes dire : Usquequo, Domine [XII]; Ad te, Domitie,
levavi [XXIV]. — En besoign si vus chaez, dites ceste saurae ententivement;
si serrez délivre : /// te. Domine^ speravi [LXX]. — Quant aucun vc[n]rat la
ou il creindrat, die treis feiz ceste saume od bon queor, e voist seur al conduit
Deu : Judica tne, Deus [XLII]. — Qp^nt vus lèverez del lit, dites treis feiz :
Dominus in iwmitic luo [LUI] et .iij. pater noster; si passerez le jur senz encum-
brer. — Si vus en adversité estes e vulez par Deu cstre délivre, dites cinc
feiz a genuilluns et od lermes : Exaudi Detis ; Miserere met, Deus, quoniam
[LV] ; si serrez délivre. — Si aucun deit pleider a plus haut de sei, die :
Miserere mei, Deus, miserere [LVI], e agenuille set feiz, e prie Deu humble-
ment. - Ki bataille deit fere, die neof feiz, ou aucun pur lui : Eripe vie
Domitu [CXXXIX] ; Exaudi Deus deprecationem [LX] ; Exaudi, Deus, oratio-
nem [LXIII]; pus si avérât Taide Deu. — Ki est en volenté de peccher, die :
Deus miserealur [LXVI], et prie ententivement ; si ert délivre.
Après sunges dites treis feîz dévotement :
Loverd Jhesu Crist, ich the bidde for tÏK vif wunde and //je diet //rat //;u
///oledest in //jare holie rode //>at thu turnc mine swevenes to blisse and to
gode. Amen, amen, so mote hit beofor //?are swete holie rode. Pater noster iij...
car on savait qu'il avait fréquenté assidûment la bibliothèque de Trinity. Il
se défendit en disant qu'il avait acheté chez un libraire de Londres les manu-
scrits revendus par lui à Rodd, et qu'il en avait ignoré la provenance. Ce
point n'a jamais été bien éclairci, et Halliwell a toujours eu, depuis ce temps,
une mauvaise réputation à Cambridge. Quoi qu'il en soit, le Musée britan-
nique se considéra comme légitime possesseur des manuscrits volés et
repoussa les réclamations de Trinity. Voir sur celte querelle l'article Halli-
well du Dictionary 0] national Biography, t. XXIV.
1. Il y a, dans l'Egerion 843 (fol. 33 vo et suiv.), une table, des années
1273 à 1396 avec des colonnes pour l'indiction, l'épacte, le concurrent, etc.,
d'où Ton pourrait conclure que le ms. n'aurait été fait qu'en 1273. Toutefois
l'écriture m'avait paru antérieure à cette date.
2. Le ms. tsx pagine, non foliote.
IIO p. MEYER
Il semble bien que la pièce anglaise qui précède soit en vers;
toutefois je ne réussis pas h. trouver les rimes du commence-
ment. A k suite vient cette courte picce française :
Sîre Jhcsu Crbt, rei pussant, (p* S )
A vostre seint cors me comand ;
E vostre seint sanc me suit salu
Ki pur nus eu h set me croh fu e5>paiidu.
Amen, amen, is^i scit pur U grant venu.
2. Formule de confession, qui se retrouve ailleurs» par
ex. dans le ms. Gg. r* i de la Bliblioihèque de TUniversité
de Cambridge {Romania^ XV, 340). Premières lignes :
(P. 6) Ui comtmt la tmm'tt dt c^njmfr. Benedîcite Dominus. In no mine
Patris et Filiiet SpîritussatKlu Jeo me tend cupablc a aostre Seigneur Jhesu
Crist et n nostre dame sainte Marie et a tux 1^ sciiu Deu e seirites de mz
les pecchezke jeo ai fet pus ke jeo fu né deske ore. Jeo m mull pecché en
orguîl^ en fierté, en baudur de queor^ en surquiderîe,*.
3. Saints à Jésus Christ d à la Vierge. — Ces pièces ^ni
écrites à longues lignes comme prose. La première (pour la
seconde il y a doute) est en couplets de six vers monorimes*
Ce qu'il y a de particulier, c*est que les vers ont seize syllabes
(du moins en principe), avec un repos après la huitième.
Nous possédons de ce genre de vers quelques rares exemples
dans des pièces composées en Angleterre'. La seconde pièce a
un refrain de deux vers.
(P. 7) Dita imt a Dtu da'Oifftnent :
Ave Jhesu^ reis omnipotent» ki home pecchewr custes si chicr,
Pur ki suffristes vostre cors si très vile[ne[ment treiter.
Vos seïfites meîns c vos du2 pxci en croij: estendre e cloufichîcr.
E vostrv cors prccius de une kncc agûc percier,
E les cinc plaies de salu pur iîus pecchcurs feîstes seigtier,
6 Défendez nus, sire Jhesu Crist, de pecché e d'cncoïiibrier.
i* Rùmankj XV, J09, 331. — Il faut mettre à part le vers de 16 syllabes,
avec une syllabe féminine non comptée dans la mesure, à rhémîstîche,
forme qui se rencontre en France vers h fin du moyen âge, J*en ai cité an
exemple^ Komanm, XV^ 310. Un autre est fourni par la pièce des quinze
signes de la un du monde dont le début a été publié par M. Tobicr dans le
JahrbuchJ. rmfan. u. engi. Likrâtur, Vil, 405»
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE III
Ave Jhesu, lii vos duz braz pur mei voliez estendre
En celé gloriose croiz e pur mei cheitif pendre,
E suffrir si dure mort ice ne sui fors pudre e cendre.
Sire, donez mei grâce ke jeo le sace entendre,
E en vostre seint servisse issi mun tens despendre
12 Ke mun espirit pusse a ma fin en vos meins rendre.
Amen.
Dites a nostre Dame seinte Marie mut dévotement : Ave Maria gracia plena ;
Dominus tecum, etc.
Duce dame seinte Marie, eez de- nus pité,
Ke ja de pecché mortel ne seium encumbré,
Ne ja pur nule folie a dure mort livré.
Amen, amen, duce puccle, pur ta seinte virginité.
Duce dame sainte Marie, preez vostre enfant
K*il nus salve de tuz mais, si cum il est pussant.
Duce dame seinte Marie, priez Jhesu trist
K'il nus tuz salve si com de vus char prist.
Amen, duce dame, mère Jhesu Crist,
Beneit seit le hure ice il en tei se mist.
Ileit merci de nus ke tele te fist.
Duce dame seinte Marie, preez vostre enfant
K'il nus doint sa aïe e nus seit garant
Encontre tuz nos enemis ke nus haient tant.
Duce Marie, preez vostre enfant
K'il nus salve de tuz mais, si cum il est pussant...
De la p. lo à la p. 324 le manuscrit contient un assez
curieux mélange de morceaux latins, en vers et en prose, dont
on trouvera Ténumération détaillée dans le troisième tome du
catalv)gue de M. James. Je me borne à citer en passant :
P. II, deux vers sur l'étymologie de Philippus, à joindre
aux textes cités par Darmesteter, Romaniay I, 360 :
Phiy nota fetoris, lippus gravis omnibus horis ;
Shpfn, sit lippus y semper procul ergo Philippus.
P. 19, traité d'arithmétique, en forme de dialogue : « Quia
te, venerande preceptor, sepius audivi... » — P. 20, traité
d'algorisme : « Omnia que a primeva origine rerum processe-
runt... » Cf. Romaniay XXVI, 232. — P. 23, l'algorisme ver-
sifié d'Alexandre de Villedieu : « Hec algorismus ars presens
dicitur esse... » Cf. Rotnania, L c. — P. 82, un calendrier, etc.
ri2
p. MEYER
— Les pages 309-322 î^ont occupées par diverses pièces goliar-
diqueSj à commencer par VApocalypsis Gtflicy à propos de
laquelle Th« Wright * cite notre manuscrit.
Pur chAsticrk foie gent (p, 324 t)
Kc plus eîment or et argent
K'il ne fuîit Dcu et sainte Glîsc,
Ai yn poi m 'entente mise
A rimer et â conter
Ceo ke jeo ai oî recomer
Mestre Robert de Cursun »
5. La am/ession de r usurier*
Plcsi vus oîrunemer\"aille(p.527)
A kî nu le ïie se apaniille 1 ?
Bien la devez tur escuter.
E[n] vos quers tiietre et e^uter.
Dire voil la conkssiou
L'autre jur a sun scrraun,
Cuni feitcment li usurier
Vet a muster pur Deu prier.
Li userers est par matin levez,
Tuz SCS us ad defermcz
Pur ve€r si aukun venîsi
Ke deniers empnjmpier vousist,..
Al u^ercr e k pardon
Kc îî out quant il dusi morir.
Diable le sout bien nierir
Le servi se ke fet aveit,
Car unkes en sa vie n^aveit
K Latin potmi amtnonîy (ttirihUtd to W. Afa^* (Camdeti Socieiy), p, 1.
2. FtfWrVïi/.vJV, 99.
\. Rctmtftû, L 2aj8*9. Voici les premiers vers de b Ic^on du ms. Harléicn : ^
A rnaisire Robert de Dijon»
A Paris» enz en pïcïn sermon,
Cum faitement li userier
Vient au niostier por Dieu proier,..
Pur chaioier les riges (sk) eçni
Ki mie^t 4inmc[nt] For et l argent
Ai ce .j. pou m'ememe mise
A nmoier c a conter
ke que j^oii reconter
4. Hohrt de ChûnoH, dans îems. 8j7(Mèon). — Robert de Courson, chin*
ccïicr de rUnivcrsiîé de Paris^ légat du pape, mourut en M 18 au tiiege de
Damictte (HiU. îiU. dth Fr^, XVIL î9ï-6). Nous n*avons pas sessemnons.
Mais Hauréau a prouvé qu'il était T auteur d'une Summû de Sùcrâtft^Hth^ attïn-
buée À tort i Simon de Tournai, dans laquelle il s'élève avec une extrême vio-
lence contre le^ usuriers parmi lesquels il englobe à pi:u près tous ceux qui
vivent du négoce (Hauréau, Notices ri txtrûiH de c/f ♦ mss. htins de k BiH. nat,^
L 167 ctsuiv.).
$. Fomiuïe fréqucnie; voir Rmtmniû^ VI, 23* Le ùbï«ui jt du prestrc qui
disit la passion « commence à peu près de même.
LES xMANUSCRlTS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE 113
Un jur esté sanz usure. Mes la joie de paradis (p. 330)
Mes la mort, ki rien ne asure, Nus otrie cil ki nus fist nestre,
De sa verge le tucha. E nus mette tuz en sa destre,
En la joie pardurable
Od le père esperitable. Amen.
6. La Riote du monde. — On sait qu'il existe de cette amu-
sante trufe diverses rédactions, Tune en vers, les autres en
prose. Elles ont été toutes publiées, dans h Zeiischrift f, rom.
Philologie, Vm (1884), 275-289, XXIV (1900), 112-129, par
M. J. Ulrich. Le texte du ms. de Trinity a pris place dans cette
collection, VIII, 279. Premiers mots :
Jeo chevachoie l'autrier de Amiens a Corbie. Si encontrai li reis e sa mes-
née. « Beaus amis », dist le rei, « dunt viens tu? — Sire, jeo vient de ça —
Ou vas tu ? Jeo vois la. . . . »
7. Recettes variées, analogues aux « quentyses bones et
esprovées » que j'ai publiées jadis d'après un manuscrit d'Edim-
bourg ^
(P. 349). Peniez drasche de oylle z arnement z vitreole, c destemprez
ensemble e metez en un crusil ou en une lampe, een oignez la mèche de ceo,
e alumez, e tuz en le ostel resemblerunt mors.
Pernez la gresse de la verte lesarde avec le cowe e vif argent, destemprez
ensemble e metez en une lampe ou en une chandeille, e alumez, e la chambre
resemblera argent.
Pernez archal .j. wyr' e enoignez le de suffre vif destempré un poi od
oille, e estendez le archal en lung la meysun, e fichez autant de chandoilles
cum vus unkes voldrez en lung del archal, e alumez une chandele al un but
del archal ke la flamble atuche le archal, e tuz les autres par fei alumerunt.
Destemprez coperose od fiel de sengler, issi k'il seit cum oigne ment. Sil
gardez en boistes e oignez, e les pcilz cherrunt. Meimes ceo vus fra arsenik e
coperose destempré od vin egre.
8. Proverbes vulgaires traduits en hexamètres. On sait que
les clercs du moyen âge ont pris plaisir à mettre en vers latins
des proverbes vulgaires. Le ms. Digby 53 (Bodléienne) qui
remonte au commencement du xni' siècle, contient un cer-
tain nombre de ces traductions, accompagnées du pro-
1. Doc. mss. de Pane. litt. de la France, (1871), p. 107.
2. L'anglais wire, fil.
Ranumia XXXIl Q
114 ~ *'* MHYEK
verbe orîgiriiiL J*ai décrk jadis ce manuscrit ^ Je publierai
pruchainement une émde sur d*autres recueils du même genre.
Icij le proverbe original est ordinairement donné sous la forme
anglaise ; ainsi ;
(P. Î5 1) ÎFd wùthufÉ mi vjha^ berd hc Hcht,
Munlegu^ bcne scu eu jus barbam îamberc suet'it.
C'est le proverbe français bien connu : Bien uî li chas cm barbe
il îecbe ^ Mais le vers latin est transcrit ici inconectement. Il faut
eut aii lieu de cujus K Une fois sculemcDC la forme française
est donnée :
(P. J52) Ki ne dune aQ IsU aime ne prent ^eo k'il désire.
Qui non dat quod amat non accipil omnc quod optât *,
Dans la suite, ce recueil de proverbes, qui s*arréte au bas de
la p. 556s omet les proverbes originaux et donne seulement
les vers latins.
Notre manuscrit contient un feuillet de garde dont il con-
vient de dire quelques mots. Ce feuillet de garde, formé d'une
bande de parchemin assez étroite, est une colonne détachée d'une
bible française écrite à deux colonnes par pages. On y lit k fin
du premier livre des Macchabées. L'écriture (tin do xnr siècle
ou commencemem du xtv*) est anglaise, mais la traduction est
bien française d'origine, car c*esc ta version qu'on rencontre
dans ce que Samuel Berger appelle, à tort ou à raison, la Bible
du xni^ siècle, d'où elle a passé dans la Bible historiale de
Guyart Desmoulins*- Je donne les premières lignes de notre
1. Docutnrnh nmttuscHh p, 170,
2. Le Roux de Lincy, Livre dts prm.K, 3f éd., L ijé, H, 474, 487. Cf.
Remania, III, 11} ; XXXJ, 477.
j. CL le ras. Roy, î^.A, IV, fol. 85 (Musée britannî^ue).
4, Ce vers latin est cit^ par Nicolas de Byard (Bibl, MaKârine, lo^Oi
foL 70 tt). Quant au prov. français il se rencontre, avec trois traductions
ktines dilîèrcn^i, dans le ni5, Digby 5 j (voir mes Dùcumenh fnûmmrih, p,
174)-
î* S* Ikfïîer nnentionne cette \*ersion dans son chapitre sur Guyart Des-
inoulbs (£^ BiifU frân{ahf^ p. 170-t)» mjîs il n'a pas remarqué qu*elle est
iimèricun? à Gu\'art Desmoulins, puisqu^elïe se trouve dans la « Bible du
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DK CAMBRIDGE 115
tiragmein en rétablissant le début de la première phrase à Taide
du ms. fr. 398, fol. 208**, qui est de la fin du xiir siècle. Je
mets en italiques les mots restitués.
(I, XVI, 1 5) Lijili Ahboby les reçut en une petite forleresce qui est apellcz Doth
par tricherie, et lur fist un grant nicngier, et repoust homes en la meson ;
(16) et quant Symeon et ses fiuz furent enyvrez, Tholonicr et sa gent se
levèrent et pristrent lur armes et entrèrent ou il mangoient et occistrent
Symeon et ses .ij. fiuz et aucuns de ses serganz. (17) Ainsi déçut Tholomer
le pueple Israël et lur rendi mal por bien. (18) Lor cscrist Tholomer lettres et
l[es| envoia au roi qu'il envoiast gent en aide ; et il li bailleroii la région et lez
citez et les treûs
0.5. 32. — GÉOMANCIE, Géométrie, Lunaire de Salomon, etc.
Ce manuscrit, du commencement du xv*' siècle, est un
recueil d'opuscules variés, en latin et en français, concernant
la divination, la géométrie, la médecine. J'en donne quelques
extraits qui acquerront un certain intérêt si on trouve d'autres
manuscrits renfermant les mêmes textes.
Au commencement il y a divers tableaux servant à la divi-
nation. Il s'y trouve des sphères ou roues, analogues à celles
que j'ai signalées dans la Romania, XXVI, 238. On y voit
figurer « le roy des Tourcs, le roy d'Espagne, le roy de
Ynde », etc., avec des réponses aux questions posées.
1. Le livre Herniis le philosophe, — Traduction plus ou moins
libre d'un traité astrologique mis sous le nom du fabuleux
Hermès Trismégiste : Liber H er métis de i^ siellis et tôt lapidi-
bus et de /j herbis et de ij imaginihus. C'est ainsi qu'il est
intitulé dans le ms. B. N. lat. 7440, fol. 13 v°. Le même titre,
ou à peu près, estfournipar le ms. Ashmole 1471, fol. 50, de
la Bodléienne. Du reste cet opuscule est rare en manuscrit, et
il ne paraît pas qu'il ait été imprimé. La version de notre
manuscrit commence ainsi :
{Fol, II) Cy comence le livre Hermès le philosofre parlaunt des .iij.
esteilles greyndres fixes et 15 pieres précieuses, 15 herbes vertueuses et
des is figures miraculouses. Adounques, entre moutz des autres choses que
les aunciens sages moustreront en lour escritz, cestui Hermès, très auncien
Il6 p. MEYER
piere des phylosofres et com des benoîts dieux, tist cest livre et le départi en
quatre parties pur ceo que principalment quatre vertues des choses sount en
ycele contenuz... »
2. Traité de géométrie. — Il faut entendre ici « géométrie »
en son sens propre, Tart de mesurer la terre. Cest un traité
d'arpentage. Le prologue fait honneur aux Égyptiens de Tin-
vention de cet art. La même idée est exprimée dans les traités
de géométrie de Boèce et de Gerbert, qui toutefois sont fort
différents de notre traité français. Ce traité est-il traduit du
latin ? Je n'oserais l'affirmer, bien que cette hypothèse me
paraisse a priori assez probable. On peut du moins admettre
que, sans avoir traduit proprement un texte déterminé, l'écri-
vain a emprunté sa matière à des écrits latins.
(F(j/. if) Un sage autour de géométrie disi qu'ele fust prymes trovê en
Egipte, que auncienneraent fust la terre ou diverses sciences furont useez et
apryses. Qar des Caldeus et Egipciens vindront eles a Grt^eys, et puis des
Gregeys as Arabiens et Latins. Et solonc ceo que le dit autour counte, la
manière et la cause pur quey ele fust prymes trovée illeok fust ceste. Nous
savons bien que la terre d'Egipte est graunt partie, en certeyn seysoun del
an, coverte del Bom de Nil, estre les plus haustz lieus et les citeez, et pur
celé cause sont clesassysle plus haut que les pays enviroun, issi que, quant
Tewe fust retrete, les gentz du pays ne porroient conustre les boundes de
lour champs, quar les boundes furont ostée par Tewe, dount grant estryf
sovent sourdy entre eux, qar la terre do Egipte est si bone et plenturouse
que damage lour semble a perdre un pié de terre...
3. Le lunaire de Salomon. — C'est une rédaction en vers
toute différente de celle que Méon a publiée et dont j'ai indi-
qué diverses copies dans une précédente notice (Romaniûy
XXIX, 77). Le texte que nous avons ici, et dont je ne con-
nais pas d'autre exemplaire, se rapproche assez d'un texte en
prose dont j'ai cité quelques lignes dans mes Notices sur quelqtus
1 . Voici le latin : « Inter mulia alia bona que antiqui patres sapientissimi
narravcrunt philosophi, Hermès Abydymon, patcr philosophorum antiquissi-
mus, sapiens et quasi unus benedictus a Deo, philosophis librum hune
edidit divisiique eum in 4 partibus, eo quod principaliter sunt 4 rerum vir-
tutes, videlicet stellarum, lapidum, herbarum atque ferarum que in eis
continentur... » (B. N. lat. 7440, fol. 15 c; xive siècle).
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DK CAMBRIDGE II5
fragment en rétablissant le début de la première phrase à Taide
du ms. fr. 398, fol. 208**, qui est de la fin du xiir siècle. Je
mets en italiques les mots restitués.
(I, XVI, 1 5) Lijili Abhoby les reçut en une petite forleresce qui est apellez Doth
par tricherie, et lur fist un grani mengier, et repoust homes en la meson ;
(16) et quant Symeon et ses fiuz furent enyvrez, Tholonier et sa gent se
levèrent et pristrent lur armes et entrèrent ou il mangoient et occistrent
Symeon et ses .ij. fiuz et aucuns de ses serganz. (17) Ainsi det;ut Tholomer
le pueple Israël et lur rendi mal por bien. (18) Lor escrist Tholomer lettres et
l[es| envoia au roi qu'il envoiast gent en aide ; et il H bailleroii la région et lez
citez et les treûs
0.5.32. — GÉOMANCIE, Géométrie, Lunaire de Salomon, etc.
Ce manuscrit, du commencement du xV siècle, est un
recueil d*opuscules variés, en latin et en français, concernant
la divination, la géométrie, la médecine. J'en donne quelques
extraits qui acquerront un certain intérêt si on trouve d'autres
manuscrits renfermant les mêmes textes.
Au commencement il y a divers tableaux servant à la divi-
nation. Il s'y trouve des sphères ou roues, analogues à celles
que j'ai signalées dans la Rotnania, XXVI, 238. On y voit
figurer « le roy des Tourcs, le roy d'Espagne, le roy de
Ynde », etc., avec des réponses aux questions posées.
1. L€ livre Hernies le philosophe. — Traduction plus ou moins
libre d*un traité astrologique mis sous le nom du fabuleux
Hermès Trismégiste : Liber Hernietis de ij siellis ci tôt lapidi-
bus el de ij herbis et de ij imaginibus. Cest ainsi qu'il est
intitulé dans le ms. B. N. lat. 7440, fol. 13 v°. Le même titre,
ou à peu près, est fourni par le ms. Ashmole 1471, fol. 50, de
la Bodléienne. Du reste cet opuscule est rare en manuscrit, et
il ne paraît pas qu'il ait été imprimé. La version de notre
manuscrit commence ainsi :
(^FoL II) Cy comence le livre Hermès le philosofre parlaunt des .iij.
esteilles greyndres fixes et 15 pieres preciouses, 15 herbes vertueuses et
des is figures miraculouses. Adounques, entre moutz des autres choses que
les aunciens sages moustreront en lour escritz, cestui Hermès, très auncien
Il8 p. MKYKR
Dame, si verroyment corne ceo est verroy •»
J^ycz en garde le corps et Talme de nioy ^
Et après ditc> Pater *Vo.7.7' et cink Ave Maria. Icest orisoun envoia
Nostre Dame seinie Marie a seint Morice, Tevesque de Paris î, et qi chescun
jour le dirra cynk foitz en Tonuraunce des cynk joies que Nostre Dame
a voit de son cher tîtz, et Paier noster et v. Ave Maria, ja en cest Siècle
hountage n'avéra ne mes aventure ne lui a vendra ne en court de terrien
seignour vcncu ne serra; tonere ne foudre ne lui damagera, viseyn qy ♦ ne
lui noiera s, ne femme enceynte de son enfant ne périra.
Suit une table des jours égyptiaques, et, d'une écriture du
xvi'^ siècle, un recueil de recettes médicales, les unes en latin,
les autres en français.
T.ABl.K Di:S MSS. DÉCRITS
B. 14. 39 20 O. i. 20 75
B. 14. 40 n 0.2. 5. 95
K. 3. :o 65 O. 2. 14 102
R. 3. 56 6s C). 2. is 108
O. I. 17 68 O. >. 32 115
1. Bodl. /). Kumc co est irirs e jo hnt le crei, Harl. /). si ctttti ceo ert vtirs et
eo le erei.
2. Harl. Vahth- et le cors île met.
^. I/êvcqiic .Maurice de Sully (j- 1 196) n'a jamais été canonisé. Toutefois
ce n'est pas ici seulement qu'il est appelé saint. Le ms. Digby 86 (voir la
notice de .M. Sienj^el. p. 6) renferme une pièce en prose, analogue, mais
non identique .1 celle-ci, qui est précédée de cette indication : « Nostre Dame
seinie .M.irie envea cest oreisun a seint .Morice, eveske de Paris. »
\. lacune.
\. 1) faut entendre »i////v.
LES MANUSCRITS FRANÇAIS DE CAMBRIDGE
119
TABLE DES AUTEURS ET DES OUVRAGES
Amiaim induit, voir Platearius.
Ballades françaises (R. 3. 20). . 63
Bêle Aîis matyn se leva, chanson
(B. 14. 39) 22
Bibbysworthy Gautier de —
Charmes, psaumes employés
comme — (O. 2. 45) 109
Chirurgie, la nouvelle — en vers
(O.2.5) 99
Cinq joies Notre Dame, les —
(O- 5. 32) 117
Confession, formule de — (O.
2. 45) iio
— traité de la — (O. i. 20).. 95
Confession de V Usurier, la — ,
poème (O. 2. 45) 112
Conjugaison française, traité en
latin delà — (R. 3. 56)..... 66
Croix, légende du bois de la
sainte — (O. i . 17) 74
Daniel Churche, voir Urbain
le Courtois.
Dialogues français composés en
1415(8. 14. 40) 47
Edmond de Pontigni (saint)
traduction au Spéculum Ecclesic
(p. I. 17) 74
Ezechiel, voir Pronostics d* —
Femina, traité pour apprendre
le français (B. 14. 40) 43
Formulaire de lettres(B. 14.40) 59
Gautier de Bibbysworth ,
Aprise de franceii (B. 14. 40) . 44
Géomancie, traité de — (O.
2. S) 96
Géométrie, traité de— (0.5. 3 2) 116
Guillaume le Normand, Bes-
tiaire (O. 2. 14) 105
Hermès, le liv e — (O. 5.32).. 11$
Hippocrate, traité apocryphe
adressé à Tempereur César
(0. 1.20) 84
Hippocrate, traité attribué à —
sur la manière de visiter les
malades (O. i . 20) 86
— , traité attribué à —
sur les pronostics de la mort
(O. 2. 5)... 98
Lunaire de Salomon,le — (O. 5'.
J2) >i6
Maccljqfxes, traduaion des — ,
fragment (O. 2. 4s) 114
Maladies des femmes, traité en
vers sur les — (O. 2. 5) loi
— , voir Trotula.
Mari (le) cocu, battu et content,
— récit en prose (B. 14. 40) 59
Médecine, traité de — en prose
(O. I. 20) 83
— , voir Poème médical,
Recettes médicales , Tro •
TULA.
Miroir, le, voir Robert de Gre-
THAM, orthographe, traitéd' —
(B. 14.40) 59
Passion, poème sur la — (O.
2. 14) 102 ^
Passion, poème sur la — B. 14.
39) 38'
Patenotrede V Usurier, la — ,(0.
2. 45) 112
Péchés capitaux, sur les — (B.
14. 39) 40
Plainte d'amour, la — , poème
(O. I. 17) 73
P L ATE A R I u S , Practica hrevis ,
commençant par Amicum in-
duit, extraits traduits en fran-
çais (O. I. 20) 8s
Poème médical (O. i. 20). ... 75
I20 P
Prière à J. C. en vers français
rt anglais (B. 14. 59)
Pronostics d'Ézéchicl. fragment
en vers (B. 1 4. 39J
Pronostics de la mort, voir
HïPPOCBATE.
Pronostics tirés du mois de ia
naissance (O. 2. 5;
Proverbes vulgaires traduits en
vers latins (O. 2. 45J
Proverhia Marie MagJ alêne (B.
M. 39;
Recettes médicales en vers, pour
les femmes fO. i . 20;
Recettes médicales en vers (O.
2. s; 97,
— en prose (O. i. 20;
Recettes variées (O. 2. 4$)
Rinte du monJt\ la — CO. 2.45).
Robert de Gretham, extraits
du Miroir (B. 14. 39;
Roger de Parme, la Chirurgie ^
trad. en français (O. 1. 20;. 78
Roman des rotnans, le — (O
. MEYER
(2. 14) 104
22 Saloinon et Marcoulf (K 3.20;.. 63
Saluts en vers à J. C. et à la
27 Vierge (O. 2. 45; 110
Satire en latin sur la cour de
Rome CR. 5. 56; 66
Sermon en vers (B. 14. 39). 37. 41
ICI — sur la dédicace des ^lises
(O. 2. 14) 107
113 — sur Josué fO. 2. 14; 106
SuFFOLK, le comte de —, bal-
40 lades et rondeaux TR. 3. 20).. 63
Trotula, traité sur les maladies
90 des femmes, traduit en vers
(O. I. 20; 87
99 Urbain le Courtois, poème fB.
77 14.40) 45
113 — rO. I. 17) 68
1 1 3 Usurier^ voir Confession et Pale-
notre.
28 Vent ^ancte Sfnritus, traduit en
vers français fB. 14. 39).... 26
,91 Wace, vie de saint Nicolas (B.
M. 39) 5«
P. Mf.ykr.
p. H6rart. 7). II semble qu'Arnaut de Villeneuve se si)ii inspiré de ce traité
ap'H-Tvphe d'Hippocnte dans ses CauteUr wcdicoruni ; voir ///>/. ////. de la
Fi., XXVIII, 69.
P. )S, 1. I, pfrca est sûrement une mauvaise lecture pour pères (l'anglais
stoue).
A propos du charme commençant par ' Treis bon s" frères... »> (p. 77),
j'aurais dû renvoyer à un mémoire de R. Kôhlcr rù sont rapportées des
rédactions en latin, en itali-n et en allcm-ind de la même formule CR. Kohler.
Kh'inere Schriflen... hgg. von J. IV»]te, III, s 52-8).
MÉLANGES
LES NOMS DES ROUMAINS DE L'ISTRIE
Dans le langage philologique nous avons Thabitude de nom-
mer les Roumains de Tlstrie hiro-Roumains, par analogie avec
IcsMacédo- Roumain s tx.\tsDaco-Rouma'nis. Ce procédé est simple
et clair. Mais ces noms ne sont pas ceux qu'ils se donnent à
eux-mêmes * ou qu'ils reçoivent de leurs voisins.
Les Roumains de l'Istrie s'appellent eux-mêmes seulement
Vlah, Vlasi et sont nommés par les Slaves, quelquefois aussi
par les Italiens, Cici et Ciribiri. Les Cici sont les Roumains de
la montagne de Cars ; hs Ciribiri^ leurs frères, habitent au pied
du Montemaggiore (en croate Ucka).
Ces noms si curieux et si intéressants datent d'une époque
historique. Romîn — malgré quelques dénominations provin-
ciales sans importance — est le nom universel du peuple. Les
écrivains des siècles passés ont employé quelquefois aussi Rumin,
forme justifiée par les lois phoniques. .
Quand on soulève un peu le voile qui couvre l'existence des
Roumains de Tlstrie dans les plus anciens temps, on peut trou-
ver quelques noms qui concordent avec leur existence historique.
A. Covach, qui a fait connaître les Istro-Ronmains au commen-
I. Les Roumains du sud du Danube s'appellent Armin'i, nom qui n'çst
que le mot Roniini avec la prothèse de j, très usitée dans ce dialecte. M. Wei-
gand les nomme en allemand Aroniuneny forme qui ne me semble pas logique :
on appelle les Roumains en allemand : Rumàneti ; en partant de là, si nous
procédons logiquement, Arminl sera en allemand : AnimCvicu^ et non Aromu-
nen. Aromnnen ressemble beaucoup au Rntuuneu de Miklosich, nom mal fait,
qui n*est que la tran»icription allemande de Rumun-i, nom Slovène des Rou-
mains.
T22 .VftLANGES
cernent du xix' siècle, les appelle : Rimglîani * . Ce nom es
pour moi une preuve éclatante de Tancienneté de leur séjour"'
dans ristrie. Dans le nom Rimgliam nous avons en effet, à
mon avis, le nom Ronim traduit en slave. Rome était
nommée en vieux slave Rymi.; révolution historique de ce
mot nous donne pour le domaine slave méridional Rim.
Quand on unit ce dernier mot a%'ec la finale -janinu % qui
en slave sert à caractériser les différences ethniques et sociales,
en observant la loi phonétique d'après laquelle entre les
labiales et les palatales s*intercale toujours une / euphonique
ou épenthétique^ on obtient pour le pluriel la forme très
logique : RimPûm ou Rimljane^ qui^ dans Torthographe ita-
Henné, devient Rimgliani.
A côté de RimgUani on a aussi Rumeri^ forme qui se trouve
chez Ireneo délia Croce *. Rumeri serait la forme rhotacisée
Rumàriî pour Rumànit transcrite en italien. Était-elle très
usitée ?C*est ce qu'il est difficile de savoir, parce que nous nian*
quons de données historiques. Ce nom, en tout as, est aujour-
d'hui entièrement perdu.
Les Slaves méridionaux, quand ils ne veulent pas plaisanter,
nomment les Roumains : Flah^ pi. Flasi. Ce nom fut, plus tard,
adopté par les Istro- Roumains eux-mêmes, ce qui n a rien
d'étonnant. Les Roumains, par suite des circonstances géogra-
phiques, ont toujours été en communication plus fréquente
avec les Slaves qu*avec leurs confrères italiens, et ont été ainsi
comme forcés de s'approprier le nom de Flah, l^lûsi, qui ensuite
s'est généralisé.
Les choses ne semblent pas aussi claires si Ton se place à un
autre point de vue. C'est un fait psychologique connu que les
hommes de langue différente qui se trouvent en contaa sont les
uns pour les autres un sujet de railleries, parfois très naïves et
sans malice. C'est ce qui est arrivé icL Les Slaves de TLstrie,
Croates et Slovènes, et les Roumains, ayant entre eux des
I, Cf. Burada, O ùHàiorit irt iatdf nfminqtûtîn hlria, ïaçi, 1R96, p. 4.
1. Lc&kîco» Hamllmch iîtr atlhilgiiri^fmt Spracht K p. 64.
5. îbtd,, p. 46.
4. Hûtotia antiùif r modfrtta, niera e ff^j'&na idkt citUi di Trirstr^ Venetia
1698; ï\b. l\\ cap. vil» p, }%4,
LES NOMS DES ROUMAINS DE l'iSTRIE I23
relations quotidiennes et se- comprenant peu, se sont donné les
uns aux autres des noms plaisants, et dans cette lutte les
Roumains, moins nombreux que les Slaves, ont eu le dessous :
les IstrO'Rotimains ont gardé les surnoms Cici et Ciribiri,
Je vois dans ces mots un simple procédé populaire, qui n'est
pas rare dans le langage : de ce, cire et bire^ les Slaves ont tiré
les deux noms Cici et Ciribiri, qui ont été étendus à tout le
peuple roumain de Tlstrie.
Dans Cici je vois une répétition du mot ce, entendu ci
par les Slaves. Ce fait peut servûr indirectement à la fixation de
lieu d'origine des Roumains distrie. Nous remarquons en effet
que IV était fermé : les Roumains venaient donc d*une région
où on prononçait e fermé.
Ciribiri nous présente une combinaison de cire -\-bire : ùre-
bire a donné Ciribiri par assimilation. Cette étymologie popu-
laire me semble plus probable que l'analyse savante de
M. Byhan sur Cici et Ciribiri^.
Mais aujourd'hui, les Cici ne sont pas seulement, comme je
Tai dit, les Roumains de la montagne de Cars : on appelle de
même les Slaves qui habitent le « Tschitschenboden » des
cartes de Tétat-major autrichien ; les Ciribiri sont seulement les
Roumains du Montemaggiore. Nos rares données historiques
suffisent à montrer que cette différence existait déjà* dans les
temps anciens. A considérer la forme en elle-même, nous
pouvons supposer que Cici est plus ancien que Ciribiri, Cici est
attesté depuis le temps d'Ireneo délia Croce sous la forme Chichi,
Son contemporain, le baron J. W. Valvasor, mentionne aussi
plusieurs fois les TschitiiK II a quelques indications d'après les-
quelles les Roumains seraient venus de la Turquie. J'ai moi-
même entendu cette tradition dans le village de Zeiànu dans
le nord.
Sur le mot Tschitii, Valvasor nous donne l'explication sui-
vante : « Es sey aber gleich der Nam Tscintii von den angekom-
menen Walachen allererst eingefùhrt, oder von Ihnen daselbst
angenommen worden; so scheinet mir ganz vernunftmâssig,
1. d^ =- quoi, cire = qui, bire z=l bien.
2. Jahresbericht d. Insi. f. rum. Spiache;^H Uip^io^ VI, pp. 368, 370.
3. D/V Ehre des Er^ogthums Craiii, 1689, Cf. lib. 1, t. I, p. 7.
124 '^ MfaAKGHS
er rCihrc her von deii alten Siyhh\ als derer Nam aucli vomi-
als ûberaus weit gereîcht. n
De cette c'tymologie tout à fait fantaisiste, il passe (lib* IL, 1. 1,
p. 256) à une autre plus curieusej dont je citerai une partie :
ii Das driite Geschlcclu dcr Einvvohner neiinei man die Tschi-
tsclmt (uiuern gemeinen Hauffen aber Ziich). Dièse hausen
^wischen Meuhaus (Castelnuuvo) und S, Si-rff (S. Scrvolo)
konimen îîwar in der Tracht deu jetzt beschriebenen Karstuern
gar nahe; bleiben aber in der Sprachc weît von Ihnen und
reden ihre besondcre, aïs die rechte lapydts oder Nachkommen
der alten lapydum^ welche von den alien I^and- und Gesehîcht-
sverfassern beschricbcn worden. »
ùce est la forme coUective slave de ac,cia (p* ex. listje -
des feuilles, kamenje ~ des pierres, etc.) et ira rien de commun
avec les lapydes. C'est un fait constaté qu'au xvîf siècle il y a
eu des Roumains entre Casteliuiovo et S. Servolo; ils si* sont
perdus dans la masse des Slaves.
L'ancienne forme Rimgîianî, « roumanisée » par Urechiâ (cL
Burada, 102) en Râmknt^ superposce à G'n, nous a donné un
nom nouveau, Ciciliam^ qui,, un peu plus tard, par dtssiniilation,
s'est développé en CiHriani. Ce sont d'ailleurs des formes rares.
Je ne les ai jamais moi-même observées.
Après Tanalyse précédente nous pouvons conclure que les
Roumain.^ de Tlstrie ont emprunte' leur nom Vlah aux
Slaves. D*autrc part il est visible que les Slaves, d'après
les mots roumains très usités te^Hre^ hîre ont créé les noms
Cîci Cl Cirihiri ^ lesquels sont aujourd'hui connus dans toute
ristrie.
Joseph Pnpo\'Tci.
DISETTE = DECFFTÂ.
On sait que le verbe latin decipcre est souvent synonyme
de fa 11 ère : Pline l'Ancien dit par ex., L XVHL >é : « Sun:
qui properem atque ita pranuntient,fcstinatam sementem saepe
decipcre, serotinam scmpcr. » On sait qu'il signifie aussi desti-
tuerez sens fréquent surtout dans les inscriptions tumulaires
où la fin d'hexamètre decepta marito' équivaut à viduata
t, Carmbiû latina /ptgraphtca cmkgfl Ff. Bunhiler^ 1, 627. 4.
TANT MIEUX, TANT PIS, TANT PLUS, TANT MOINS I25
marito. Rien ne s'opposera par conséquent à ce qu'on
regarde disette ou disete^ anc. fr. dial. disiete, comme le déve-
loppement de decepta. On s'attendrait, il est vrai, à *deisete
^doisete qu'on ne rencontre pas, mais les voyelles atones sont
souvent capricieuses*. Quant au sens, le substantif de forme
participiale disette decepta est à faute faite fallita comme
decipere est à fallere. Ces substantifs signifient « manque,
privation » et peuvent encore à l'occasion se dire Tuii pour
l'autre. Mais, dira-t-on peut-être, décevoir s'accorde mal avec
disette, La parenté de decepta avec decipere ayant cessé
d'être sentie, le substantif participial se dérobait à l'influence
du verbe. Il s'ensuit que decipere et aussi recipere, et
recepta, où le c est irrégulier, ont été entravés dans leur
développement par concipere percipere *appercipere.
J. Cornu.
TANT MIEUX, TANT PIS, TANT PLUS, TANT MOINS
Tant mieux, tant pis appartiennent à l'usage courant. Jadis
on disait aussi tant plus, tant moins : « Tant plus y estudions,
tant moins y entendons », écrit Rabelais. Pant, H, X. Les dic-
tionnaires enregistrent tant mieux et tant pis sans analyser ces
expressions. Ce tant est un ablatif qui répond au latin tan;to
dans tanto melius, t. peius, t. plus, t. minus. Cet abla-
tif appartient à tout le domaine roman : voir Diez, Gramm. III,
y éd. p. 395. D'après Mistral, le .prov. a tant miéus ou tant
meiou, tant pis et tant mai; le port, a tant mellm, /. peôr, t.
niaior, t. mais, /. mems, Tesp. tanto mejor, t. peor, /. mayor, /.
inàs, /. menos. Mais nulle part cet ablatif ne s'est mieux conservé
qu'en italien où il est encore en plein us;ige. Il suffît de
renvoyer à Vockeradt, Lehrbuch der ital. Sprache I, § 434,
Anm. 4. L'italien, l'espagnol et le portugais se servent cou-
ramment aussi de l'abl. quanto.
J. Cornu.
I. [Toute séduisante qu'elle soit, je ne puis dire que cette étymologie me
convainque : Vi au lieu dV/, oi me semble insuffisamment expliqué par
Ile
MRLâî^GES
POCHh » CUILLER A POT »
Outre les sens bien connus de ce mot, qui semble avoir pour
base Tanglo-saxon poccj, Littré mentionne aussi celui de w cuil-
ler avec b()yelle on sert le potage^ ainsi dite de Sii forme || cuil-
ler de fer avec lin long manche, dont les fondeurs se servent
pour puiser le mé^l en fusion \\ cuiller dont se sert le raffineur
de sucre", et rattache expressément ce dernier aux premiers.
L'Académie (1878) ne connaît pas pock, « cuiller », ou ne veut
pas le connaître, car, à Paris, la grande cuiller a long manche avec
laquelle on sert le potage, se dit huche et non poche. Le même
mot est aussi dans le compost' pcKhe-cuiller^ qui est le nom
vulgaire de la spatule, dite en allemand « Lôffelreiher »>. Le
mot poche au sens de cuiller semble être inconnu aux dialectes
de ia région française, car iimanqueaux dictionnairesdes patois
que j'ai pu consulter. Cependant on le trouvedans un texte de Tan
145 î cité par Du Cange, sou^ pachia i « Jehan F^speron, cuisinier,
frappa le suppliant d'une cuiller, autrement dit poche de boisn,
et La Monnaye dans le Glossaire des Xikî Btmrgniî^tmi traduit
poc!j€ par a cuiller a put >», ce qu'il n'aurait pas fait s'il avait cru
le mot intelligible à ses lecteurs français. Diinsla Suisse romande
/vr/jret le diminutif /joc/io/î ' appartiennent ;ï Tusage journalier.
Ce sont des mots empruntes au patois qui francisent poisJ et
pot son'', et par lesquels on désigne les cuillers i pot,
Piiche^ en tant qtHl signifie cuiller, n'est pas le même mot
que poche dzn% poche de îmk et a pour base le latin popia
w cuiller en bois n qu*on rencontre dans le Testamenium pwcelll :
Eî me mmifmmh coco le^aio dimitto popia m et pisliltnnu ^f^T
tnecum aUukram^ ]. Cornu.
un w caprice «, tt révolution sémantique ne me paraît pas claire, fc songe
deptii» longtemps d une luinc cîtp ticiit ion Je ^i5c//^, — G. P.]
i> Voir k' G/iK5iî/ri' fmrtwff^Gcnève» Paris 1817, ut L. Grangkr, GiùSMiri
frihoiir^tdii^ Fribûurg, i864-lHl>8.
2 Voir Bridd, Gh^siaift du ffMoiuh la Stfuîi rmnatidi^. ^ Poli^ ci âérWéy
>ont particuliers, ^emble-t-iJ, -lu franco -provcnçiil. Ils sont i'n us;igç dans r^rron-
disvcmciJt de Pontarîtcr^ dans k Fore^» en Savoie, a ne sont pas étrangers
au\ patois du Jura bernois, ainsi t^ue me Tapprend le Df Dupasquîcr, quoique ires
derniers ne iiîiem plus franco-proveriçaux, mais bourguignons* A Lyon on dit
courammcm /î^iît'kwi pour u louche ». Le provençal a pùucîjotttî au sens de
gruide cuiller de bots (Mistral)» mais n*a rien qui corresponde à potii.
COMPTES RENDUS
£tymolOffiSChes, von A. Tobler. Berlin, 1902, gr. in-80, 12 p.
(ExtTzït dits Sit:(un^sberichte der kon. preuss. Akademie^ 1902, VII).
M. Tobler nous donne ici trois nouvelles études d'étymologie française,
toutes trois fort intéressantes, pleines de science et d'ingéniosité.
Maquereauy « Kuppler ». L'auteur signale les difficultés qui s'opposent à ce
qu'on reconnaisse simplement dans ce mot, avec Diez, le néerl. makelaar,
« courtier », et suppose que d'un verbe maquUr^ « arranger », i< néerl.
maken), dont il cite au moins un exemple ', on a tiré maquerel, soit par l'in-
termédiaire d'un *wj^/<«?r *wa^M<'wr', soit directement d'après l'analogie de
couples comme sauter satilerel etc. C'est très séduisant. — Passant ensuite à
maquereau^ nom vulgaire du scombre, M. T. montre qu'il ne peut venir ni
de macula, ni d'un primitif supposé *maca; il est porté à y voir, avec
Mahn, un emploi figuré du premier mot : les pécheurs prétendent, paraît-il,
que le scombre pousse les aloses femelles du côté des mâles, et à cause de
cela ils lui auraient donné son nom actuels 11 ne me paraît pas impossible
1. L'autre exemple, tiré des Dits artésiens (VIII, 77), est douteux (voy.
Rom,, XXVII, 493).
2. Parmi les dérivés analogues de mots en -eor, -eur, M. T. cite couperet :
je crois plutôt que couperet est originairement un adjectif et qu'il est pour
coupere^y c'est-à-dire qu il appartient au groupe des adjectifs en -^rt^ que l'au-
teur lui-même a le premier étudiés.
3. Il est singulier que le nom français de ce poisson ait pénétré en anglais,
hollandais, allemand, danois, suédois et norvégien ; c'est généralement l'in-
verse qui a lieu. L'emprunt est très ancien, au moins en anglais, comme le
montre la forme mackareJ. Dans les langues romanes, au contraire, le mot est
à peine connu. Rolland cite seulement le galicien macreUy qui paraît emprunté.
Le prov. tmicareu, d'après Mistral, ne signifie « scombre »- qu'à Avignon (où
le sens peut être emprunté au français) ; partout ailleurs macareu n'a que le sens
d'« entremetteur ». L'expression /air^ Ion macareu, « attachera la pouj>e d'un
bateau un poisson femelle qui en attire d'autres qu'on prend avec le trident »,
est curieuse, mais, bien que s'appliquant à la pèche, elle dérive évidemment
du sens d' « entremetteur »> et non de celui de « scombre ». — Ce qui est encore
notable dans le mot provençal, c'est son a, qui empêche de le croire dérivé
du français (cf. plus loin).
128 COMÎ*TES RHKDUS
ijuc k mat^nermu w mviiciiicikur d'amour w d(.>ivc, au coiiiriitrc, wjti nom
au poisson, soit a caust: dt- k croyance dont celui-ci ùxm Tobjct, soit parce
qu'on attribuait pt-utctre ii la chair de ce poisson, qui fiiît son apparition au
printemps, des vertus aphrodisiaques *. M. T. remari|uc hti-mcme que mûca-^
tdltis (cf* iingl. mackarti ^ prov * m<frari*«), nmchtrel comme nom de
poisson apparaît dès k xti*^ siècle, tandis que maqutrd^ « entrenïetteur «, n*est
signalé qu^; pour la st;conde moitié du XiW. SI on regardait la conjecture cî-
dessus comme fondée *, il resterait i^i chercher réiynioîogie du ne m du poisson ».
Frâyit\jtQfT^ffûh. Les remarques sur7>jj>T(m a. fr. Jrdirjroier <; fr-
care) ne sont qu'îuirod actives. Le principal intérêt de Tarticle est d^ins ce qui
concerne l'a. fr, ymV, « briser ji,et le UJrais. Pour le premier, lauteur peiise
quHÏ représente fratjdare, en supposant que le sens intransirif, * se brisa- 1»,
est le sens primitiL et en comparant le sens analogue qu'ont en anc. iV, /ttUtîr,
nutttir\ dnmffUir et JamSiT (qui est de même transi rif et inlransitif). Cette
étymolo^ie est fort belle, et peut bien être vraie : j*ai toutefois quelques
doutas : le passage du sens iniransiiif au transitif (wm/i>,_/4ii7/ïr» ne lont pas
fait*) est plus difficile que l'inverse (conirne dansy^iiMi^r), et d'autre pan fr^
beaucoup plus employé transiti\X'ment qulntransitivemcnt. a dans son sens
quelque chose à la fois de précis et de violent ^ qui ne parait pas ti^s bico
1 . Le nutquereau était aussi appelé pulsion ifûvriK et ee notn a passé Jk
i*ent remet leur ; mais ce peut être un simple jeu de mots fondé sur les deux
sens qu*avaît le mol maquerfan^ d*autant mieux que cet emploi de potHôfi
if avril n apparaît pas, que je sache ^ avant k xv^ siècle. Aujourd'hui pôîn&f%
tout seul est svnonynïc de nmittimm au sens spécial de v souteneur >»
que CK mot a pris, et en argot tfas ifrt ou même simplemenï rfo5 a le même
îSfens. On peut se demander aussi quel rapport il y a entre le potsntn d'tnnl.
nom du maquereau, el \q piHHon d'uvril désignant une farce laite le i^f avril
2. Ce qui peut paraître Tappuyer, c'est la restriction du sens de maqutrmit,
appliqué a un honniic, en françiiis : s*il dérive de matfuîtr, « arranger (une
affaire) m, pourquoi se présente-t-îï uniquement^ dés s<in apparition^ avec le
sens déshonnéte qu'on sait? — Le uom ù'aif^^fin donné v^ a un officier dln-
fanterie, 2^ i un aventurier peu ^TUpulcux, provient il du nom du poisson?
Il faudrait trouver une analogie. Rabelais emploie le mot at^refin pour dési-
gner une certaine monnaie turque : d où vient ce mot» qui pourrait être ie
point de départ û^s sens figurés d\iii,'njiii ?
j. M, T. ne parle pas du mot maqhfrtati, t- t^che aux jambes causée par le
voisinage du feu n (de même prov. macattu) : je ne sais comment ce sens
OomK' en désuêtuiic) se rattache auK deux autres.
i. M* T. cite toutefois pour fa tlitr un exemple dk- 7rùk (8807) i TrfH€iMn;
fufijûf^ lii%put^, Lauhen' éiToni d htnîk el jalt et M. L. Constans a bien
voulu m'tnfomier que cette le^on est bien celle qui devra figurer dans le teîite
critique. Dftmrfiîir est pris transi tivemeîit au sens de • céder m sous Tb-
fluence de aon emploi transitif au sens propre,
y Ffwt signifie " briser violemment, mettre en miettes »^ tandis que
Jitâhr, tnaUtr^dnmfniit\Jainu'r ne s'appliquent qu'aux mailles de haubert, de
Il broigne ici. ropposition avec fraindn dans M&ins mns frais ^ mainte i^rûignt
A. TOBLER, Eiymologisches 129
s'accorder avec l'origine proposée *. — Je ne puis au contraire que me rallier
à l'explication à^ frais, originairement /rai/, non point par l'ail, frïd, mais par
le lat. frac tu m, qu'avait déjà proposé Littré* : payer le/ra//, c'est propre-
ment payer le bris, le dégât; le mot étant surtout employé au pluriel, lesfraii^
plus tard les frais, on a cru, par une erreur dont il y a plus d'un exemple,
que le singulier était/rai (M. T. relève certe forme déjà dans un texte antérieur
au xiiic s.), et on en a tiré les verbes frayer et dif rayer. Ce qui prouve qu'il
ne s'agit pas ici de frïd, c'est d'abord que la forme la plus ancienne et la plus
régulière du sing. est frait (d'où l'anc. fr. fraiiier) et ensuite que « jamais et
à aucune époque en anc. fr. le mot ne se présente avec ei ou 0/, qui aurait
dû, tout au moins à l'origine, sortir d'un / bref, mais a toujours ai ou l'^
qui en est venu ». L'auteur termine par cette intéressante suggestion,
qu'il faut espérer qu'il développera : « Si le néerl. vracbt (ail. Fracht) n'est
pas aussi égal à frac tu m et si par conséquent le fr. fret n'est pas simple-
ment le sing. dcfraiSy c'est ce que je ne veux pas examiner ici; je dirai seule-
ment que je ne vois pas ce qui s'opposerait à cette hypothèse. »
Narguer. L'étymologie proposée pour ce mot, ou plutôt pour nargue, d'où
serait sorti le verbe, est très inattendue : nargue serait composé de la négation
ne et de argue y subjonctif du verbe ardre ou ardoir^ « brûler », employé
impersonnellement. On aurait dit n'argue comme ne chaiîîe : « que cela (ce qui
a été dit, fait, pour effrayer, humilier, blesser) ne brûle pas», ce qui équivaut à
dire : a que cela soit comme n'étant pas, qu'on s'en moque. » « Puis nargue,
peut-être après avoir été quelque temps senti comme interjection (ce qui
explique Vs de nargues dans Rabelais, IV, 53), a pris la forme d'un
substantif, si bien qu'on a dit faire nargue à, dire nargue de, locutions qui ne
signifient pas la même chose qutifaire fi de, mais qui grammaticalement ont
la même valeur, et ce substantif est devenu le point de départ pour le verbe
narguer ^ qui est à nargue ce que pester est à l'exclamation peste, et qui a pris la
construction dérailler et (anciennement) de wo^w<t, c'est-à-dire la construction
transitive. Que je ne sois pas en état de citer en ancien français nargue
• n'importe », cela me peine, mais ne me trouble pas. L'ancienne littérature
française, que d'ailleurs, naturellement, nous sommes bien loin de connaître
dans toute son étendue, ne contient certainement pas toute la langue de l'an-
cienne France. La tournure dont j'ai essayé de rendre vraisemblable l'existence
à un moment donné peut très bien n'avoir été usitée que dans des limites
faussée) et veulent dire proprement non qu'elles sont brisées, mais qu'elles
sont mises hors de service, qu'elles se distendent ou se disloquent et laissent
passer l'épée ou la lance.
1 . En note, M. T. se montre disposé à abandonner son étvmologie de estuei,
est opus, pour stupet, étant à peu près convaincu par 1 explication séman-
tique de M. Walberg(cf. Rom. XXXI, 175).
2. Aussi pourrait-on penser à frac tu s, « bris », plutôt qu'au part, frac-
tum.
Romani a, XXXII O
1^0 COMPTES RENDUS
restreintes et aimin avoir pa?^ pénétré dstn^ la littérature jusqu'au jour, peut-être
au XVI « siècle, où un écrivam de talent Vy aura introduite. D^iilleurs, si au-
jourd'hui je ne la connais pas, qui me dit que demain elle ne sera pa^ signa-
lée par nn autre? a On pourrait à la rigueur admettre a: raisonnement si
e'éuic seuîement la locution ti'argnê (ou tCargtr n'ardt, ou encore tCart) t^ui fit
délaul dans ce que nous conn.iissonî» de la vieille langtie française (qui sans
être complet, est cependant considérable); mais ce qui est bien plus grave,
c'est quon n'y rcncontr*^ pas non plus un seul exemple û'ardrc È:mplo\'c
au sens de chahîr : on ne trouve jamais il art, il m' art, cui art? comme
tl dntttt, il me chaut, cui chaut ? non plus que fi*art ou nar^f comme m clmtd
ou ne àmlh. Dès lors lu construction si ingénieuse de M* T. n'est -elle pas
tout à fait en l'air? » — Ajoutons qu'elle n'est pas moins hasardeuse du côté
de la forme que du côté du stns. Les verbes en nire, dit M* T,, ont des
formes en g, où nous sommes portés à attribuer an g la valeur de t» n^ais
où il peut très bien avoir la valeur de g, comme l'indique la graphie parf i^
devante, o{argani^ argùit) et surtout la graphie tff/wi^u^^ aitesièe une fois pour i
le subj, fïispardrt. Mais remploi du g devant a^ & dans les textes picards ne
prouve nullement (et M. T. le reconnaît lui- même) la valeur d'espiosive de la
consonne* et quAni k cspargue, il répond au latinspargat et n*est pas compa-
rable à un ar^tte < ardeat. Bien qu'on cite quelques exemples de iaagt z^
iangt(f, remploi de g pour gu devant ty i est beaucoup plus rare que celui de
g pour/ devant a, o, et si on avait prononcé affui^ il serait très surprenant
qu'on ne le trouvât jamais ainsi écrit. Je ne crois pas, pour ma part, que
g < d| appuyé ait pu dt: venir f, et ni Tît. irn^o, ni le prov. arga, perga ne
me semblent îe prouver ni pour ces langues elles-mêmes (où il s^agit à mon
avis de faits d'amiogie et non de phonétique) ni surtout pour le français'.
— L'étymologie d'un mot qui n'apparaît qu'au xvic siècle est toujours très
liasardeuse; je suis toutefois porté a croire que nargur ou narguer se rattache,
comme on Ta supposé depuis longtemps, soit X nares^ soit plutôt a nasus
par un dérivé nasîcare» qui a donné en anc, fr, naquifr {voy\ Godcfroy, s. v,
naquir, ci Rom., XXII, 6S; norm. «^^rtfr), d*où rttnasqimr, tt. mod. renâcler^.
I, Cet emploi d'ardere ne mï préseme non plus dans aucune autre langue
romane ; il n'a jamais que le sens de « brlikr » et l'emploi personnel* tandis
que ca 1ère en italien, provençal et français n'a que remploi impersonnel ei
le sens lïgJJré*
3. M. T. suppose aussi que de morgûni ~- mordant « un chemin pourrait
conduire, par le verbe (attesté) morgtur^ tiré par erreur de ce participe, au
fr. mod. ttwtgm »* Je ne connais marguif (xvi^ s.) qu'au sens moderne ei ne
sois pas comment le rattacher pour le sens ii mùrdre.
j. M. Tobler montre que Littré a commis sur le sens d'un namusâtè par
Carpentier une méprise qui a été reproduite par d'autres, et sur laquelle il a
construit son étymologie.
4- LcDiCi j^/ra., qui de rmdcUr renvoie à la forme antérieure rmdqmr, rgnéS-
^ufft dit cependant : m Origine inconnue». Elle ne me parait guère douteuse.
ANDRAUD, Raimon de Miraval 131
La forme narguer, avec changement bien connu d'5 en r devant sonore et son
sens particulier, appartiendrait à un dialecte, d'où le mot aurait passé dans la
langue générale '.
G. P.
P. Andraud. La vie et Fœuvre du troubadour Raimon de
Miraval. Étude sur la littérature et la société méridio-
nales à la veille delà guerre des Albigeois (thèse présen-
tée à la Faculté des Lettres de TUniversité de Paris). Paris, Bouillon, 1900,
in-8ode V11-270 p. ^
Écrire tout un livre sur un troubadour dont l'œuvre est uniquement com-
posée de chansons amoureuses dans lesquelles deux vers, sans plus, renfer-
ment une vague allusion à l'histoire politique, cela parait une gageure bien
imprudente. Cette gageure, M. A. l'a tenue, et il l'a gagnée. De ces 270 pages
pas une n'est de trop : s'il s'y trouve quelques longueurs, il \\y a pas de
hors-d'œuvre proprement dits, et pas un instant notre attention n'est lassée;
la majeure partie du livre, au contraire, se lit avec un vif plaisir et un intérêt sou-
tenu. Cela tient d'abord à l'heureuse et logique disposition des matières, et aussi
à un réel talent d'exposition : certaines analyses psychologiques ou littéraires,
notamment, ont inspiré à M. Andraud des pages à la fois précises et délicates
qui n'étaient nullement faciles à écrire. Les traductions sont aussi en général
fort réussies, M. A. ayant très heureusement « interprété » les expressions
techniques, à la fois si nettes dans le fond et si vagues dans la forme, de la
langue des troubadours. J'avoue pourtant que je préférerais parfois un peu
moins d'élégance et un peu plus de littéralité.
J'ai loué le plan de M. Andraud. Il est d'une grande simplicité : après une
introduction (p. i-ioj assez peu originale, mais bien informée et agréablement
écrite, sur « le Languedoc et le nord-est de l'Espagne à la fin du xii^ siècle »,
ou plus exactement sur le milieu où vécut Raimon de Miraval et les
cours qu'il fréquenta, M. A. étudie successivement la vie du poète (p. 1 3-163),
et son oeuvre (p. 167-21 1); divers appendices nous donnent le texte de l'an-
cienne biographie et des ra^os, ainsi que des extraits des biographies modernes,
l'analyse ou le texte de documents d'archives concernant la famille de
Miraval, et une analyse métrique des chansons du troubadour. Toutes ces
parties étaient nécessaires, et elles sont à leur place ; mais j'avoue que j'en
aurais autrement compris l'importance respective et autrement réglé les
1 . Le fait qu'on a -guer et non -f iVr, -gne et non -ge, ferait penser à une
provenance méridionale ; mais le prov. nargo, iiarga est-il ancien ?
2. Le volume n'a paru qu'en juin dernier, la soutenance ayant été retar-
dée jusqu a cette date.
132 COMPTKS RKNDUS
dimensions. M. A. me paraît surtout avoir trop insisté sur la biographie et
trop peu sur l'étude littéraire : dans la première partie il se trouvait, par la
force des choses, plongé dans le domaine des ombres ; la seconde, au con-
traire, lui otFrait un terrain solide, où Ton s'étonne qu'il n'ait pas pris plaisir à
s'installer plus délibérément.
Tout d'abord la date de la vie du poète a posé à M. A. un angoissant pro-
blème : toutes les œuvres de Mira val qui sont susceptibles de datation se
placent entre 1 190 environ et 121 3 : d'autre part M. A. croit avoir retrouve
son nom mentionné dans des documents d'archives qui conduiraient à placer
sa naissance vers 1 1 5 5 . Or, toutes ses chansons ne sont pas des chansons
d'amour ordinaire, œuvres banales où le cœur n'a aucune part et qui pou-
vaient même être composées pour un tiers : quelques-unes nous montrent un
Miraval vraiment amoureux, torturé de désirs et de jalousie. L'une des
femmes qu'il a chantées, celle qu'il appelle Mais d*aniic\ n'est nullement la
maîtresse banale figée dans une olympienne impassibilité : c'est une fieffée
coquette, dont les manèges apparaissent clairement à travers quelques strophes
d'un aspect singulièrement passionné ; bien qu'il la servt depuis trois ans '
{S'adng Jos), il n'a rien obtenu « que l'espoir », et il l'implore en vain,
comme Alceste, de se déclarer nettement :
Ops es que vas me s'oscl.iirc
0 Jcl tôt me dcsman.
{Knqiwr non a, dans Malin, Ged., n" 1118.)
}i!lle le bannit de sa présence {ScJh que de chantar) et fait à ses rivaux le
meilleur accueil ; les torts de celte c ipricicuse amante lui sont clairs comme
le jour : mais dès qu'elle ouvre la bouche, les rôles sont retournés et c'est lui
qui implore son pardon :
Quels sieus tort/ sembla vertat/.
(lolssieus bels Jigz...
[Pufis vn^an^ dans Mahn, GctI., n" 1109, cuupl. 5.)
Les plus légères avances le rengagent et lui arrachent des cris de joie : il avoue
qu'il a eu tort d'être si pressant et promet de ne plus ess;iyer de tout com-
prendre dans la conduite de sa dame (Ihtt hii). \l\\ vain d'obligeants amis
e^>aient-ils de l'éclairer sur son nuilheur :
Alsbim \etion tup d■e>i.li^
Dire ni.i ^rcu nuNabens».i ^
(Al a m \igta ofn . cou pi . } . )
1. V()\e/ p. 112, n. 2, la li>te des pièces où est nommée Mais d'amie.
2. Aille'.ir> de[Hiis Jeux ans cinq mois {liuqutr non a i^'ain).
V C'/est-â-dire : .' ils me disent ce qu'il m'est pénible d'entendre ; ils me
font sur nî.i J.ame de mauvai-. rapports. » M. A. comprend diMic à rebours
quand il p.irlc •■. des !v\:iî^ q Je les médisants fi)nt courir sur son compte »
(il lui Miraval;. Des .seniinienis analogues sont e.xprimés dans 5elh que de
d\intar. ,
AKDRAUD, Ratmon de Miraval 133
Il refuse de les écouter, les accuse de perfidie, et se jette dans la mêlée
pour défendre sa dame, ridicule paladin d'une cause à laquelle personne ne
croit {lyamors es tot:;;^: — Tôt quant fa^ de ht). Il y a d ailleurs çà et là des
allusions à des événements réels : le poète maudit une traîtresse qui a mis
le trouble entre lui et celle qu'il aime (D'anior es totO ; il parle à deux reprises,
en termes du reste fort obscurs (Selh que de chantaVy S'ieu en chantan)^ d'un
anneau qui parait avoir joué un grand rôle dans l'histoire de ses amours. Se
figure-t-on toutes ces pièces écrites par un homme de 55 à 75 ans? Que Ton
puisse, à cet âge, ressentir tous ces sentiments, soit ; mais qui se résignerait
à les exprimer tout haut, dans des pièces destinées à la plus large publicité?
Il y avait un moyen bien simple d'écarter cette grosse difficulté, et j'avoue
que j'y aurais recouru sans hésitation : c'était de ne pas identifier le trouba-
dour avec leRaimon de Miraval nommé comme témoin dans un acte de 11 57
(Appendice I, no 7)'. Je ne veux pas m'engager dans une recherche généalo-
gique qui paraît sans issue; je remarque seulement que l'on trouve, dans
l'acte de 1157 ^^ "" autre un peu postérieur (n© 10), trois frères nom-
més Raimon, Raimon-Ugo, Bemart, plus une soeur, Vidiana; et dans un
autre de 121 3 (n« 18), deux frères, Raimon, Guilhem, plus Raimon-Ugo leur
ne\x*u, et Alfansa leur sœur. N'y a-t-ilpas là vraisemblablement les représen-
tants de deux générations, et le Raimon de 121 3 ne peut-il pas être le fils de
celui qili avait l'âge d'homme en 11 57? L'habitude, si fréquente alors, de se
transmettre les prénoms de père en fils autorise parfaitement cette hypo-
thèse.
Les allusions à des personnages contemporains sont fréquentes chez Miraval ;
ceux-ci sont malheureusement désignés le plus souvent par des pseudonymes ;
c'est une tâche pénible et décevante que d'essayer d'en pénétrer le secret, et
M. A. a perdu là bien des pages. Qu'Audiart soit Raimon VI, le biographe le
dit, et nous voulons bien croire qu'il le savait; mais que Pastoret soit, comme
le pense M. A., Raimon-Roger de Béziers, rien de moins certain : celui-ci,
en effet, avait quinze ans « à la date qui marque à peu près le centre des
aventures » auxquelles M. A. veut le mêler. Au reste je proteste moins
contre cette identification er. particulier que contre une regrettable obsti-
nation à agiter longuement des problèmes insolubles.
Les chapitres relatifs aux « aventures galantes » de Raimon de Miraval
sont évidemment parmi les plus soignés du livre; ils sont aussi parmi les
plus intéressants. J'avoue néanmoins qu'eux aussi je les aurais bâtis un peu
différemment. M. A. se résigne en général — - quoiqu'il lui en coûte visible-
ment — à s'abstenir de toute hypothèse sur les personnalités dissimulées sous
tel ou tel senhdl; mais il veut à toute force retrouver l'ordre chronologique
I. Rien dans cet acte ne nous amène nécessairement à l'identification
admise par M. A. : Miraval, selon sa biographie, avait trois frères, et ici
deux seulement sont nommés.
^
TÎ4 COMPTES RENDUS
des pièces. Voilà encore une tetiutîve chimérique * : la nature des sentîmenîs
exprimés n*es! éviJemment pas id un point d'Appui suffîsam, et 1j rupture U
plus caractérisct' a. pu t-ire suivie d*unc rùcoiidliation et d'un renouvtratj de
passion Retrou ver» d'aprcii k ton des envois, qudles fenimt^ Mira val a sim-
plement prétendu louer, lesquelles il a aimées, et, d'après les pièces mûmes,
de quelle sorte d*amour, voil;'^ évidemment tout ce que permettait Tètude
directe des ch^iniions.
Les auteurs dera^pj prétendent en savoir bien davanta^eT et M. A, ne pou-
vait pas ne pas discuter leur témoignage il la fait en génOnil avec une cri-
tique avisée» mais trop timide, trop peu décisive en ses conclusions* Ce qui
ôtc encore à la netteté de celles ci. c est que cette discussion est méïéc aux
chapitres dont je viens de parler, U valait la peine, ce me semble, d^éludîer
en elles-mêmes ces ni^oj, de îes étendre, si je puis dire, sur la table de dissec-
tion, et de montrer comment elles avaient été fabriquées : on fût arrivé, je croîs,
à cette conclusion que tous les éléments en ont été puisés dans les chansons ,
ou mal comprises, ou interprétées avec une incroyable fantaisie.
Nous pouvons écart jr d'abord les trois dernières, La troisième n'çsi, comme
le remarque M. Chahaneau, qu'une variante du début de îa quatrième, et la
cinquième prête ,^ Miravaî un rôle poliîique dont rimpi>nance n'a pu être
prise au sérieux par persontie (ce serait lui qui. dans ! 'espoir de recouvrer son
château, aurait décidé Pierre d'Aragon à joindre ses troupes à celles de
Raimon VI). Quant a la quatrième, où il est raconté comment M ira val repu*
dia sa temme pour obtenir la main d'Ermengardc de Castres, qu'OH^'ier de
Saissac aurait ensuite épousée à sa b^rbe. M. A, en a tait bonne justice et
montré que c'était un pur roman ^ M. A, ayant lui-même mis hors de doute
rifianïté des renseignements contenus dans trois rtiioi sur cinq, il est étrange
qu'il ait cru pouvoir emprunter quelque chose aux deux autres. Examinons^
les brièvement a notre tour.
La première raconte comment la Loba de Pucnautier, après avoir lait à Mira*
val des avances intéressées, lui préféra le comte de Foix, comment le trouba-
dour« avec Fa rri ère-pensée de la ïromper, prit ardemment sa détense, et com
ment, après en avoir été récompensé, U l'abandonna pour la marquise de
Miner\^e, M. A. a-niarque bien {p. 104) que « la concordance entre la r^i^o et
le texte » des chansons n'est pas absolument complète ; néanmoins il ne signale
nulle pan h caractère rottunesque de la première» et il lui emprunte même un
t , Sauf pour deuil ou trois pièces qui portent en elles-mêmes des indici-
tions chron*)logiques et pour celles où sont nommés des personnai^es histo-
riques comme Audiart ou le roi d'Aragon; mais on voit combien étendues
sont ïcj limites où ces indications permettent de se mouvoir.
1, Sa démonstration est excellente, mais un ptu longue; U lui suffisait de
rappeler que, dans un des slrveoté^ sur lesquels s'est appuyé fauteur de la
ra^o, Mataplana engage Mtr;îval a reprendre *ta femme ( vers '^i, î7*K> : îl n*y
av4ii donc eu ni divorce ni répudiation.
haà
ANDRAUD, Raitmn de Miravnl ijj
rensei^ement précis, k îuvoir que la Loba serait la femme chiintcc par le pcïtrte
sous le nom de Mah damk \ C'est tC*moîgner trop de confiance à \a miô.
Remarquons d'abord qull n'y a pas dans ce r^cit la memiou d'tjti seul person-
oage qui ne soit emprunté aux chansons de M ira val ou à la biographie de
Peîre Vidal ; la liste des pr^Hendus adorateurs de la Loba provient en grande
partie du sirventés A Dita me cmmm^ Bayona ', Ce r^cit est du rcîitc, dans son
ensemble, fort invraisemblable : M ira val» qui est censé ne louer la Loba que
dans Tintent ion de la bafouer ensuite^ commence par entretenir avec elle de
longues relations {ac dtlith tôt so qui aluiplac hnga Sit^ù), et il ne l'abandonne
que quand une occasion favorabk se présente k lui. Mais cette invraisemblance
n*est rien k càié du contresens sur lequel repose tout Je récit : il est en elîct
en contradiction absolue avec la pièce qu'il prétend expliquer. Il fallait vrai-
ment que son auteur, qui avait du reste un joli talent narratif ï^ eût mie bien
médiocre idée du sens critique de ses auditeurs* lî affirme que Miraval aban-
donna la Loba pour la ntarqulsc de Minerve *. Qr» que dit la chanson a
laquelle ce récit sert d'introduction (5* /Vu en cantar sot^ett) ? Exactement le
contraire, Miraval y dit très nettement que s'il n'a rien obtenu de celle qu'il
aime (Maii d'amie), il a fmî par s'y résigner, et qull est résolu, puisqu'elle
se bisse cotirtiscr par d'autres adorateurs, â lui rendre h pareille et à courir
lui-même d'autres aventures, sans que, du reste, tl renonce pour cela à son
service : fi des reproches, des injures malséantes, et vive pour chacun une
honnête lïbené ! Voilà la pensée qui donne à la pièce tout son sel et tout son
t. Cette identification n'est pas donnée en propres termes, mais elle
risuhe de ce fait que les chansons alléguées sont celles adressées à Mah
2, A ce slrventés est empruntée la mention de Bertrand et d'Olivier de
Saissac, d'Aîmeric (de Montréal est une addition de la ra^oj^ de Peire ttogier
(qualifié ici u de Mirepoijs # et substitué à son homonyme <* de Carcas-
sonne •»); la ra{o ajiiute le comte de Foix et Peire Vidal d'après la biographie
de ce dernier. Le nom de Gfnt Esqmu, attribué dans deux manuscrits à la
marquise de Minerve» doit aus^ii provenir du sirventés (v, ^4), La première
jurtie tout entière da récit est empruntée à ta même biographie . l'auteur de
la ra^û — qui paraît être aussi celui de ladite biographie — aura trouvé tout
naturel défaire |ouer a la Lfiba, vis-â-vis de Miraval, te rolequ'il luiavait vu (ou
fait) jouer ailleurs vîs-à*vi s de Peire VidaL — Voici encore un exempte asstv
curieux des emprunts du nouvelliste aux chansons. Miraval avait dit (Bt-'n mai
ç&rtfî mfsutt^hn, str. 5) ; Hu^imtii rtmitnlml faUnmfm — Ah seîba qtte. falh t^n
j'm*r^ fM, A. imprime, p, m^ noie, ah iW'Vi qut fathan^aud) : c est de là
évidemment que provient la phrase énigmatique qui a embarrassé tant de
commentateurs t Qm lai tmian prr mùritÈ iota donna qttr fr^fi smi driU tfaut
h^ro, ce qui, rapproché du conteste, est fort clair i faîhir désigne la faute de
ta fenmie qui préfère à un amant pauvre un « haut baron * ; et nucir $i signifie
se perdre, se u tuer i» de réputation.
^. Voye^ b très juste appréciation de M. A. (p* 102)»
4. Par une singulière inadvenancc, cette marquise est dite, dans une copie
de la r^io (celle du ms P) femme du * comte » de Mmerve*
13 6 COMPTES RENDUS
sens. L*aùteur de la ra^ù a donc pris pour une signiftcatioti de rupture ce qulJ
n'éuu que rtmoncé d'un pacte, d*un marché, selon le mot du pocte lur-môn
(efo plus nârtgîo mtrcati — que dt îm dm partis iraii). Et celul-cî répète dans
l'en^'oi que, « où qu'il aille i> (c'est-à-dire en quelque endroit qu'il îKirte ses
hommages). Mais (Tamk reste k « dernier terme de ses cliants u et maîtresse
de Miraval *. Qpant A la marquise de Mînen^e, ce ii^est pas une maîtresse
tiouvelïe, niais simplement une protectrice, dont il einend faire Télogie,
D*abord il serait inouï qu*un troubadour nommât en toutes lettres Tobjet de
sa passion » ; puis les expressions ici employées sont de pure courtoisie, desti-
nées â soïlJcîlcr faveur et protection; le poète ajoute même que cette pro-
tection ne s*est pas encore manifestée (f pois tk Um no m'rscai ^fitf^) ♦. H fallait
donc traiter cette raio coninn; elle le mérite, c'est-iî-dire comme un simple
roman, et ne pas lui emprunter mCmc rideniification de la Loba avec Mais
d*amk (p. léB) : en dehors de b raio, rien absolument n'appuie cette idcniifi-
cation, et c*est en vain que Ton chercherait chez M. A. l'ombre m^me d*un
argument*.
La seconde ra^o se présente exactement dans les mêmes conditions que la
première. M. A. ne s'en est pas non plus assez délie, et, quoîquUl en ait
montré lui-même Tin vraisemblance (p. ité), il en accepte les indications
presque sans réserve* Sdon ce récit, Ajsalaîs de Boîsscîton, femme d*iin scî-
t * On objectera peut-être <jue Mais ifitmic est ici , iion h lemmc a
laquelle il est fait allusion dans toute îa pièce» mais une des consol.urices
cherchées par le poète* Non, car cette comolairice* il ne l'a pas encore trou-
vée (E Diem nu don i'aufrt an — Trûbar domna ^rj^îa*/...); et les envoi?*
adressés dans une autre piéceM^wari meftûàmntar) A Mmi d\imic déj^ci^ncnt
CTsactement la même situation :
Bom domnÀ, on qu'^iâ domiKjflt.
Vûlh qac t^ngixxt Mi m val domcniAt
3 E rna$ c^nsos en cap d'iutrAi •mias.
Si tût n(i*avc(z* Maïs d'jimîCt cor irat,
A vostrc ops al Nfi rival «i gardât
6 Qjtie voi 1 avctï e it^u n'iiî coiniigfLs,
Le rapprochement des vers 2 el ç prouve que c'est bien la même personne
que Miraval désigne par les siîrnoms de Bond domm et de Mais d*mmc.
2. Qu*on se souvienne que Miraval lui-même n'a jamais nommé cette
Mati d'amie qu1l paraît avoir aimée d*un amour si passionné, il proteste
d'ailleurs qu'if ne commettra jamaî^i ceiïe indiscrétion i
Domtta^ *olb que Mîrj^val vo» aon.
Mît» nun voik ik quais €tt ni don.
(Âr lîh îa fùriii,)
%. De toute* les femmes qu'a chantées Miraval, Mai^ ifamk seule fdont le
srnfm} est du reste transparent) est qualifiée amia (D'amot son, dans Mahn,
mr ht, il, 119),
4. Inutile XMvû de chercher (p. 107) Tonginc du * surnom * de l-oKi t
c*est un simple prénom, formf féminine de hi^p*
ANDRAUD, Rainton de Miraval 137
gncur de Lombers, comprenant que Miraval « était plus capable que quiconque
de lui donner du prix, lui fit tous les plus beaux semblants que dame peut faire
à chevalier ». Les éloges du poète attirent à Lombers le vicomte de Béziers, le
comte de Toulouse et le roi d'Aragon ; Miraval prie ce dernier d'intercéder
en sa faveur auprès de la dame, mais celui-ci préfère plaider sa propre cause
et la gagne aisément ; c'est alors que le poète « fort marri » aurait composé
la chanson Entre dos volets. Or il est aisé de retrouver toutes les sources de
ce récit. Son auteur trouvait dans une seule chanson (Cel cm jois tanh) la
mention des trois seigneurs qu'il a mis en scène. Le poète disait en effet :
Domna, Bezcrs ni Aragon
Ad ops de prctz nous valria
Tan cum Miraval faria...
et dans la strophe suivante il louait en termes assez vagues « son Audiart »
c.-à-d. le comte de Toulouse. Notre nouvelliste aura vu dans les quelques
vers qui viennent d'être cités la trace d'une rivalité (bien invraisemblable)
entre le troubadour et les deux princes». Il se sera souvenu d'autre pan
de certaines pièces qui paraissent vraiment faites pour exalter la beauté
d'Azalais et lui attirer des adorateurs (Baiotia, per sinrntes ; Ar ab laforsa).
Dans celle-ci, Miraval semble vraiment inviter le roi [d'Aragon] à venir
vérifier de visu le bien fondé de ses éloges. Rapprochant de toutes ces indica-
tions la phrase de la biographie où il est dit que toutes les femmes courtisées
par Miraval le trompèrent, l'auteur de la ra:(o aura sans aucune peine mis sur
pieds le petit roman que nous avons résumé. Or ce roman n'est pas moins
absurde que le précédent : en effet, la chanson où Miraval est censé « se
plaindre de la trahison d'Azalais » se termine précisément par un envoi où
Azalais est louée sans réserves. Il est bien question dans cette pièce d'une
traîtresse et d'une autre femme dont le poète attend des consolations : la
première n'est évidemment pas Azalais (mais bien probablement Mais (famic);
la seconde sans doute n'est pas elle non plus, puisqu'il est entendu que le
poète ne nomme pas l'objet de sa passion. Du reste Miraval prétend ne la
courtiser qu'en tout bien tout honneur (mas 110 de re que sos prel:^ hais, v. 18),
ce qui suflfirait à faire écarter cette hypothèse.
Or, ce roman, M. A. l'a accepté, au moins en partie : il croit qu'il y a eu
entre Miraval et Azalais une « intrigue » ; il croit i\ la visite qu'auraient
faite a Lombers le roi d'Aragon et le comte de Béziers, à la part que le poète
aurait eue dans cette démarche, à la rivalité qui l'aurait mis aux prises avec
I. Il est évident qu'il s'agit ici, non des personnages désignés par ces
noms, mais des fiefs eux-mêmes : on sait que Miraval avait l'habitude (raillée
par le Moine de Montaudon) d'offrir constamment son château à sa dame.
Le sens est en somme : « Vous obtiendrez plus de gloire si vous possédez
mon château (c'est-à-dire si vous acceptez mes hommages) que si vous pos-
sédiez (réellement) le royaume d'.Aragcn ou la vicomte de Béziers. »
I3S COMPTES RENDUS
ces deux illustres per^nnages (p. isa-i)- Aussi est- il fort embarrassé d*e3t-
cuscr ie rôle de son Ir^ros, duquel on peut se demander s'il fut plus vil ou
pltis ridicule* Mais si Ton réublll la vérité des diose^i ce rôle n\i plus rien,
étant données les mœurs du lenips, que de très naturel. Sans doute M ira val
se fait le preneur de îa beauté J'Ajtalais, mais ce n'est pas à des rivattis qu'il
s'adresse; il n'y a h qu'une flatterie un peu lourde par bquelle il enrendaii
rémunérer sans doutu î'buspitalîté qu'il avait re^ue au diiteau de LonibL-rs.
M. A> a cru ïe voir s^eïTaçant — miracle d'abné^iitio:! ! — devint un aurr^
rival, le comte de Toulouse. Voici le texte sur lequel il s'appuîe :
Quar €s soi prctz tan cars e bos»
Ab N^Axâbis vuclh paria.
H Kérsti ïîcfui tyta via
Apres scllis* qwe no vol qii^om en gap*
w Car son mérite [d'Audiart j est si précieux et si rare que je veux le voir
admis auprès de ma dame Aîfabjs, et c'est a lui que j'appartiendrai toute ma
vie, après celle dont je ne veux pas qu'on se moque, ii Ainsi traduit M* A.
Maïs te sens est tout différent ; il s'agit dans le premier ver^^ non du comte
de Toulouse, mais d'A;!alais; c'est d'elle que Miraval souhaite la société, c*e$t
à elle qu*il veut appartenir « toutefois « {et non toute sa vie), c'est-à-dire aprûs
celle qu'il aime vraiment (et que par conséquent il se garde de nommer) d
qui ne veut pas que l'on rie d'elle. M. A. n'a pas vu que le possessif so^ du
premier vers se rapportait par anticipation au nom propre exprimé dans le
second ',
D'un envoi inédit qu'il a découven (cité p. 119, n. i), M. A, croit aussi
pouvoir conclure à k passion de Mirava! pour A/.abïs ; après quelques vers
où il l'a célébrée, M ira val ajoute ;
No ver aïnor» mi somi*
QliHd scrva d'dtal razo...
Mais le pronom / se rapporte ^ T objet de ce « nouvel amour » et non à
Avalais elle-même.
J'ai si longuement Insisté sur la première partie du livre de M. A* qu'il ne
me reste plus la place nécessaire pour examiner la seconde comme elle Tcût
mérité. M. A, aurait dû, ce me ^mble f je lai déjà dît), étudier de plus prés
b langue, le style et la versification de son auteur. J avoue du reste qu'un
travail de ce genre n'est jamais définitif que quand il est fait d'après une édition
! . Il y avait pounant dans son poète même d'autrÈ:s ejtemples de la même
tûurnurc, étudiée, on le sait* par M. Tobler (Frrrti. Bdintj^t, II, 78-Ho) :
M»* dtf mif doux « t4 v^lor^ lên grans^..
Ht: cm qucit vol bAiïsc sti^ briu»*..
{Entrg dfis t 'ottrs , v* 54,)
ANDRAUD, Rai mon de Miraval 139
critique. Cette édition, M. A. nous la promet : ce sera alors le moment de
combler la lacune que je viens d'indiquer * .
L'appendice II ( est consacré à. une analyse métrique des pièces de Miraval.
C'eût été le cas de rechercher les imitations qui en ont été faites : c'est là,
comme on sait, un critérium commode et sur de la popularité d'un poète.
Sans avoir fait à ce sujet de recherches paniculières, je puis au moins indi-
quer quelques-unes de ces imitations. Le n© 1 1 (de la liste de Bartsch) est
sur le même rythme et les mêmes rimes que le n» 392,8 (de Rambaut de
Vaqueiras); peut être y aurait -il moyen de retrouver de quel côté est l'imita-
tion. Le sirventés de Peire del Vilar (365, i), que j'ai récemment publié
{Mélanges Léonce Couture, p. 115), est certainement imité du n» 20, dont il
reproduit exactement le rythme et les rimes. Le fameux sirventés de Bernard
de Rovenac (66,3) est sur le modèle du n« 22. Le no 34 a servi de modèle à
un sirventés de G. Figueira récemment retrouvé (Studj di filologia roman:{a,
VIII, 460; cf. Schultz Gora, Ein Sirventés von G. Figueira, p. 18). Enfin le
n" 12 a fourni son rythme et ses rimes à un célèbre sirventés de P. Cardinal,
comme M. P. Mever l'a déjà montré {Chanson de la Croisade, II, p. xxxviii).
J'ai dit que les traductions de M. A. étaient parfois insuffisantes. Voici
quelques inexactitudes que je n'ai pas eu l'occasion de relever dans les pages
qui précèdent :
Elam fetz tornar en so.in
Tal don siii pecairc.
(Enqii/r non a gaire, coupl. 2.)
« Elle m'a fait mépriser de telle autre dame envers qui je suis coupable »
(p. 90). Traduisez : « Elle m'a fait dédaigner telle autre dame... »
Mas aram ditz riscn gaban
Qji'ops es que vas me s'esclairc
O que del tôt me desman.
(Jbid., coupl. 3.)
« Elle me dit en riant qu'il faut qu'elle s'explique avec moi ou qu'elle
m'éjonjuise pouf toujours. » Je corrigerais aram en aral et traduirais : « Je
/mi dis... », ou considérerais m commj datif explétif, et le sens serait le même
( « je dis »).
L'envoi de Tug silh queni van demandan :
Ni mais ni mens noi cove per razo,
n'est nullement obscur (p. 94) : « Il y a [dans ce manteau] tout ce qui doit
s'y trouver, ni plus ni moins ».
I. Dans le tableau des chansons avec renvois aux manuscrits (dressé
p. 170 ss.), il y a un assez grand noMibre d'erreurs, généralement empruntées
à Bartsch : les sigles C et R, Cet I notamment, sont assez souvent mis Tun
pour l'autre.
140 COMPTES RKNDVr
Les deux sirventés écliangés entre Miraval et Mataplana sont particulièrement
difikiles, et M. A. est fort excusable de ne pas les avoir entièrement compris
(p. 137-42). La netteté de son commentaire s'en ressent naturellement.
Au V. 22 du sir\entés de Mataplana,
Bc'ii par qu'cl cossclh es sirvcns,
je comprendrais : « On voit bien qu'il se laisse conseiller par des goujats »,
ce qui expliquerait la riposte de Miraval (v. 12-1^) :
Ni mollier non longici de mi
Pcr cossclli de nicnudas gens.
La traduction des vers 24-8 du premier sir\'entés ne me paraît pas si diffi-
cile : je corrigerais Veuansa en s'cinuisn et donnerais à prendre le sens, attesté
en provençal et en français', de « recevoir des coups » (ici « être maltraité
par l'opinion, ridiculisé v), et supposerais la phrase interrogative. Le sens
serait : « Le chevalier le plus courtois a le droit d'abandonner une épouse
qu'il a prise à la légère {per tnfausa): si sa dame elle-même se compromet au
point de nuire i\ sa réputation, doit-il se considérer comme lié par son hom-
mage (je ne comprends pas ccrtan) au point de ne pas changer de conduite
(envers elle)? •>
P. 145, 1. 7 : « Miraval, en cherchant à se réconcilier avec Gaudairenca,
avouait par là même ses torts à |son endroit » (cf. v. 32-3). H n'y a rien de
cela dans le texte : c'est au contraire Mataplana qui conseille à Miraval de se
montrer bon prince (/>«>/ wf est au subjonctil).
P. 148 :
Qu'adoncs ciii.iva qu'us empicrs
Nom tendues tua donin.i en dcfcs.
{Ben aial ir.rssatgûrs, v. 21-2.)
Non pas : o 11 ne me semblait pas que ma dame pût être en sûreté même dans
un empire », mais plutôt : «- Je ne croyais pas qu'un empire pût m'enlever
ma dame >», c'est-.\-dire «' qu'elle m'abandonn;\t pour un empire » (cf.
V. n-i I).
A. Jkanrov.
1. D.in^ un proverbe souvent cité, par exemple : « Le repruche dist hum
suveni Q.ue û'N ne crienulesi k'il prent » (Marie de I-rance, Fables^ no9i,
V. ^3-4, éd. Warnke). *« On dit que fol ne doubte jusqu'il prent u
(I^. I)esch.inip>, HalLule 3S2. refrain). - « Que fol no tem tro que pren »
(Ikrii. de Veiit.Kl»)ur, l.o tcnh i.ii r ivu, \\ 21). Cf. la note de M. Ulrich
dans Xt'itsi'hrifl Ji'ir fiiin:. Spnhlv. XXIII, p. i, n^ 123.
M.-v. YOUNG, Les Enseignements de Robert de Ho 141
Les Enseignements de Robârc de Ho, dits Enseignements
Trebor. Publiés pour la première fois, d'après les manuscrits de Paris et
de Cheltenham, par Mary-Vance Young. Paris, Picard, 1901, in-8, 176 p.
On avait' depuis longtemps signalé, dans un manuscrit de Paris % le poème
moral dont Tauteur s*est caché à demi sous le nom de Trebor, où on avait
sans peine deviné le nom de Robert renversé; mais on n*en savait pas plus
long jusqu'au jour où P. Meyer fit connaître un second manuscrit, conservé
à Cheltenham, et qui contient une fin absente de celui de Paris : dans cette
fin, l'auteur, renonçant au vague de son anagramme, fournit à celui qui
Trebor couoistre voldra le moyen de le faire, à l'aide d'un acrostiche qui
donne Robert île Ho. P. Meyer a reconnu dans ce Ho un des trois villages
anglais dont le nom actuel, Hoo, s'écrivait anciennement Ho y et plus
probablement « celui du comté de Kent, sur la rive gauche, de la
Medway. » Ce Robert de Ho, qui écrivait sans doute à la fin du
xii»' siècle*, était un laïque (non seulement il adresse son poème à son
fils, mais sa morale, tout en ayant, naturellement, un élément pieux, est
essentiellement laïque) frotté de lettres. Il s'est proposé de donner un traité
de morale pratique, pour lequel il assure avoir puisé dans Caton, Salomon,
Stace, Horace, Homère, Virgile et Ovide; « mais », dit miss Young, « il
attribue à Caton et à Salomon bien des choses qui ne sont pas d'eux Il a
adapté plusieurs sentences d'Horace, mais je n'ai pu rien identifier de Stace,
ni de Virgile, ni d'Ovide qu'il prétend citer. Il ne pouvait naturellement pas
connaître Homère et il n'y a pas trace de Darès le Phrygien ». » Dans la der-
1. Ce manuscrit (B. N. fr. 25408) est le même d'après lequel j'ai publié
{Rom. VIII, 167 ss.)une Vie de saint Alexis en vers octosyllabiques. J'ai dit
qu'il me paraissait avoir été écrit dans l'ouest de la France. D'autre part, P.
Meyer {Bull. lU la Soc. des auc. texes, 1883, p. 102) pense qu'il a été exé-
cuté en Angleterre. Quoi qu'il en soit, des formes comme pre •=. pri, lèse = lise,
sou/est = soujist, etc., ne sont pas anglo-normandes, et Miss Young aurait
mieux fait de ne pas les conserver dans son texte, où elles contredisent sou-
vent la rime.
2. Les arguments tirés de la langue par Miss Y. me paraissent, au moins en
partie (la ionnu ^^rafule ne prouve rien; Miss Y. a oublié la F^ pers. desit^
au V. 2051, etc.) très plausibles; mais je ne puis admettre son interprétation
des vers 174 1-2, où elle voit une exhortation à la croisade Dans ce passage
d'ailleurs peu clair, le leu ancieu que nous devons restorer, et qui est otrié à saint
Paul, n'est pas la Terre Sainte, mais le paradis, où la place laissée vacante
par les anges rebelles doit, d'après une ancienne croyance, être occupée de
nouveau par les hommes.
3. Ce n'est pas dans Darès qu'il eût fallu chercher des rapprochements,
mais dans VHomerus latinus (Italiens), si répandu au moyen âge. Toutefois
il est probable que le nom d'Orner a été pris au hasard par le poète au pro-
logue de TVoïV, comme celui d'Estace au roman de T/k'beSy comme ceux
d'Ovide et de Virgile à d'autres sources en langue vulgaire.
14^
COMPTES RENDUS
nicrc partie, qui semble ;i voir été njcutêe par Robert à ia premicrc œuvic
(terminée avtc Amen au \\ 2611 '), or> lii une cinquantaine de vers qui se
retrouvent a peu près tels quels ^ d^ns la traduction de Caton par Éltc K U est
probable, en dehors de ce cas spécial, qu'il a largement puisé Uans la littéra-
ture latine et vulgaire de son tempii*. lî a emprunté a Avianus le conte du
Citfivoikux tt de PBmieux > (y. 622 ss,) et la fable de ïa Crabr et son fih
(y. 1569 ss.)*. Mais ù ces éléments étrangers il en a joint de per^nnels: E
parik m a cùntram^ E q k$ auirts ajmff^. Ceux-là sont naturellement les plus
iniénessanis : on notera surtout ïe passage (v. i toj ss.) où sont énumérés
tous les lalçnts dont la réunion cmistîtue La Lurti'ùU (bien combattre, bien
monter X cUt^val, s'entendre à la vénerie de chiens et d'oiseaux, parler avec
niesure, être f^tabh, et, ce qui est bien caractéristique pour le temps, vtrstfitr
avec art) et celui (v 2527-IÎ6Î) où Tauteur donne à son fils, $11 veut conifs
conttr Ou dtansôm de gesk chutUtr^ Tavii^ de ne pas ennuyer ses auditeurs en
leur demandant une attention trop prolongée et hn enseigne une quoifitisf
pour savoir ce qui m est réçllemeni.
Malgré ces passages et qt^clques autres, le poème de Hobert de Ho, écril
1. Le ms. P ne s*arrète que dou^.c vers plus loin et contient ainsi le
commencement de la seconde partie» qui figurait donc dans l'original de P
incomplet par la pêne d*nn cahtcr.
2, Les variantes sont intéressantes, et leur comparaison peut pemicttncdc
rt-stituer le texte commun. Les deux vers suivants soni ftin&i conçus dans le
ms. de Rohen et dans celui d*Élie :
Robert
Creitiv ton mtîire ç s«ur s^x^'y
\in vérité vif tutci rcia
tlrtin n\m uiaisifc swcf iwiei»
En ncitïte vîf turc veîs
Il faut probablement restituer (autrenicnt que ne Tout fait rcsj>eciivciULnï
M. Stengel et Miss Voung) :
Crîem ton mes-trv* e suff \v\^%
Ko ncieê vif totcs wica.
l^ leçon /i^ir/ (ou M^W/),au lieu de lYtité^ pour Robert ^ est prouvée par les
deux vers qui suivent, qui ne î-ont pas dans Élie : Kar ai qui onfettuHt tnvta
l. Mi Si Young. avec une prudence peut-être wcessive, dii qull en résulte
" que l'auteur connaif^sait îa traduciîon d^Étie ou tout au moins quelque autre
également connue d'Élie » En tout cà\ il faut remarquer que Hobert a des
vert en plus, dont le pendant ne se retfonve pas dan^^ Caton, ce qui prouve
bien Qull a eu pour base une tntduaîon de Caton, et cette traduainn ^>cut
fort bien *nç celle même d'Kïic, <m% est certainement ajitérîeure a Robert.
4. Le passage sur Brut et Argal vst sans doute, comme le dit Miss Y.» pris
ddtis Wace. i>lutût qde dan?» Gaulrei de Monniouth.
j. Il est â noter que Robert en ofl^re une moraiisation chrétienne,
é. Miss Y, a rémn pour chacun de ces deux récits de nombreux parallèles ;
leur provenance directe d*Avianus est prouvée pour le premier par le fait que
c*est Jupiter qui intervient, pour le second par le fait qu*tl s*agit d^une mère
crabe et de son fils (v. 1^75) et non de sa ^le.
M*-v, YOUNG, Les Enstignrmtiïîs de Robert de Ho 145
ikiis un styk sec et souvcut csbitur, l^î w^b^t lubuiam; tn outre le texte,
conservé dans deux manuscrits qui paraissent rcmoiîier k un archétype déjà
tamîf, est difficile à restituer et à comprendre. Miss Younga rempli avec beau-
coup de consctence la tâche dithcile qu*cll^ s'était d55igi.ée- Elle a entouré
Touvragcde Robert d'un précieux commeniaire^ tant d.tns rintroductîon, où
elle étudie la bngue ^ et ia veniiftcation ', que dans les nombreuses notes
où elle rapproche de soti texte des passages parallèles» latins, français ou
provençaiist ; ces notes prouvent une lecture étendue et attentive et servi-
ront i l'étude de la poésie gnomique du moyen âge '» D'autres notes,
rejetéts à \a fin, M)ni consacrées à rinterprératinn des passages les plus dilïi-
I elles et montrent que Miss Young sest efforcée de les comprendre et y a
souvent réussi.
Sédition est essentiellement une reproduction de P ^ avec les variantes de
j. Cette partie du travail est un peu confuse, et pourrait être plus appro-
fondie Je ne comprends pas conmiLiit fétymoïogie de conide est douteuse
(p* t7; au reste !a forme kèî, If^'k est commune en anfilo-normand) ; je
n'hériterais pjsi corriger {v. 1256) en jm^mifr Vfmàii^fiit'r des mss., qui four-
nit le senï exemple ife r : u* (ie fait qu'on a successHemem ici trois couplets
en /, //, If montre bien quts le poète les distinguait); rien n*>nvite à croire
{p* iH) que l'i devant une sourde était amuïe ; il est bien mutile d'essayer
(p. 1 1 ) de remplacer fûrgr au masc, qui est la forme ile tous les tentes depuis
les plus anciens, par ian, dont on a à peine un exemple peu ancien; p. 22
l'auteur cite r/, pronom pers, neutre, et renvoie à mon article sur cette forme
{Rom.^ XXÎll, 161), mais dans les trois exemples qu'elle cite son texte (et
sans doute le ms.) porte //; que veut dire cette phrase (p. 24) : u L'impé^
ratif $c trouve pour le subjouctif : cm 194 (toutes deux formes de llnfinitif),
$t'ti 22?2 ^? le subjfmctif se trouverait pour l'impératif dans man, v. lajo,
(mais dans le texte Miss Y,, avec raison, a adopté la ïe<îoti de C, rejrtin) et
dans dfspis lé^j (mais fifspis est l'impératif) : quant àgarJ pouï garde ^ on sait
qu'il est ancien et répandu.
2. Robert de Ho, qui met si haut le talent de versefifr^ s'est plu à montrer
son habileté en variaiii la longueur et la disposition de ses vers: P&r ft-n
enttnJrt qurje sai Mts vers tût auiiemcut hnifr^ Dés ûtu' je nw vomirai ptntr,
fên pim iùTi ùfi islùngiiief. Ou, se jt voiî^ ettîrekdff. Il insère donc dans son
texte en couplets octosyl la biques des morceaux en alexandrins» en vers de
quinze et aussi de six syllabes; ces changements de rythme ont embarrassé
les copistes ; Miss Y , oui s'était trompée sur la formi; d'un morceau en vers
de quinze syllabes qu'elle avait essayé de réduire en alexandrins, a reconnu
ensuite son erreur et Ta corrigée eu appendice; ailleurs elle a bien ré^iabli le
rytîune, ce qui n'était pas touiours facile. Ses remarques sur la versification
{qui est correcte) sont généralement bonnes, bien que certains détails prêtent
*i la critique (/m/ : consel 157-8 n'offre une rime înexacie que pour la gra-
phie; sur les vv, 641-2, voy. plus loin).
3. La dii; position adoptée par Miss Y. pour ces notes n'est pas bien com-
mode : elles sont confondues, au bas des pages, avec les variantes, et variantes
et notes ont la mêtne série de chiiîresd appel, ce qui fait qu'on a un peu de
peine i s'y retrouver.
4. La grapliie (pour les 26a? premiers vers) est celle de P; je crois que
réditrîce aurait pu sans témérité essayer de la régulariser (cL ci -dessus,
p. 141, n. î) ,
144 COMPTES RENDUS
C(saul naiurclleniciit pjL:r la lin qui ncht qiijJans C) , mais l'éditeur a essayé
partout de rendre le texte lisible et correct. « Bien que P, dit-elle, fût en
gros meilleur que C, j'ai pa souvent corriger sa leçon au moyen de celui-
ci, et, sansC, une édition du poème, même de la partie précédant le v. 2624,
serait à peine possible, tant les vers sont peu compiéhensibles et les lacunes
fréquentes. » Le texte qu'elle a ainsi constitué est vraiment très digne d*éloge
et montre partout chez elle du soin, du savoir et de l'intelligence. Je présente
ici quelques remarques sur des passages qui me paraissent susceptibles d'amé-
lioration.
V. 12 Virgillt' ijui plus sont Je autres dis mile, 1. plutôt avec^C k[e] autre, —
30 je préfjrerais la leçon de C, (c*) fin un iotnpein[cr] Jere roir, à celle de P,
Sa comptiignie est a fuir, qui a bien l'air d'être due à un copiste qui ne com-
prenait pas son original. — 57-8 le poète dit que le sage est chez lui en tous
pays : P Cum a peisun qui veut nocr errer Ou quil out vienge en la nier
Cest >2 demeine re^^iun\ C Cum al peisson ki volt errer Quil vietige en la mer; je
lirais, en ponctuant autrement que ne le fait Miss Y. : Cume al peissun qui veut
nocr, Ouquil aut [m] vienne en la m:r, C\'t sa demeint: regiun *. — 64-5 P Fi^ di^
ne tables naie{ cure Kar ices gieus sunt ^ans mesure: C F/^ ne des tables naie^
cure Car itel ju est san;^ mesure , c'est la leçon de C qui est la bonne (on peut
changer itel ju cnitels jus) : P a voulu, comme ailleurs, améliorer son texte en
introduisant le jeu de dés (Caton, l'original, n'a qu'un mot, aléa, qu'Everard
de Kirkham traduit par tables); mais 'i'j/>^ cure ne peut gouverner directement
Taccuvatif-. — 86 mal[e]fanie. — 118 ponct. Mes si cum te ferai entendre. —
158 Conu\ impr. Ço me. - 171 I. Et se tul(e) les y il lerra ta. — 208 1. K(/)
0 hom[e] genglour ne tene^. — 219 1. avec C E encore ice je te di. — 249 n«f,
impr. nen. — 250 quoique, \m\tx.quoi que. — 252 ; au lieu de.^ - 259 qu^iU
impr. quil{cî. le parallèle cité en note). — 261 SouJ'retè, impr. Soujrete. —
- 263 impr. t^i/<7/« 'aequalinum plutôt quVi'r/i;/. — 544 E Jet si cvirir
sun curai^^e, 1. set. — 372 qu nuist plutôt que quonnist. — 375 1. Se en fiirece
mesjeras. — 401 1. Ker la vie de [tôt] cljascun. — 45^ : après sei. — 460 en
I. A propos de la leçon de P, Miss V. remarque (p. 2 et p. 161) que dans
plusieurs cas " P offre deux mots synon\mes dont l'un est évidemment la
^lose ou une correction de l'autre, et que dans les deux cas C préfère
régulièrement la mauvaisj leçon, c'est-à-dire la glose ou la faute. » Cela
semblerait indiquer que dans la pensée de lédirrice C est copié sur P, ce qui
ne saurait être \rai, car il a trop de kçons préférables: il laut supposer que
P cl C derivciU tous deux d'un nis. qui p ^rtait Jéjà ces variantes. Sauf cela,
la reîuarqi.e Je .Miss Y. parait en ;;cnè:al justifiée, et l'a autorisée souvent à
reitter «• u:;e ieç in qui se trouve Jans les deux manuscrits, en faveur d'une
qui :^e ^e : '<-)'.. vc que dans C. » Le fait est curieux, et il aurait été bon d'en
léi.nir et d'en tNr'.iqi;».r tous les exemples.
1. La n.ite de Mis> Y. sur ce pa-^sajc est un peu hésitante. Au v. 71, —
( u .-. :, j.>:nnie e! e îe dit avec raison, i'^dique pl::lôî un «itui jeu, — il faut
ii:e Jaiî^ P Oui p.n i«^*i'/,.;.-^'/;[. J ':\i uuip)ii: \ .:uain^ ne peut être la 5»-* pers.
du prés, dj verbe.
M,*v. YOUNG, /-rJ Bnm^nemenis de Robert dt Hù 145
^ pemei^ impr, ml^rnf^. — 467 LV» uf pitd mie a tek i^rni Gmrrt Unir ou tle-
ment\ 58 r Kar ne puent ^u tudurtrl mtoui; un Ju on eUmtnt : Miss Y. enre-
gistre au Gtossaîre tltmeni^ t querelle, guerre, force «, et remarque qu'il n'y
a *ï d'autre exemple de ce mot que celui de Saintr Eulaïk& \ mais il faut daas
nos deux vers lire mtdemtnt^ « également >k — 491. L Ker ki [ujij autrt ht a
tort. — 499 P 5*' tm tuami, C Si vo-i âve^ m A. ami, P Eagiiràf^ a primes par qui ^
C Esgardei prinu^ pir quel qntri^ P Entre l'OJ i sardr diiCûnit^ C Entre vos iorde
la dHCôidi. Miss W remarque que le v. 499 « est incompréhensible; d.ms les
deux mss. ^^ et elle adopie la leçon de C, en chatigeant un en xd : avoir en
ïiaine, in oJio. Ce serait un bel exemple de ut < odium \m\é\ malheu-
reusement notre passage n'autorise pas cet enrichissement du vocabulaire : il
faut hre, je pense {les deux mss. remo niant â un original corrompu) i Se x*ôi
a\xi nn cnemi, E^^gmrdex a prinm par qui Entre vas mrdi la discorde ^ ce qui
convient parfaite ttient au sens, — 509 h 5*? vasttg vrisiti l'on s a non (C fjonore,
Fithùre)^ Matin ou seir ou a nuie hore Que it tos vtit (leçon de P abandonnée à
tort ipo^t ffit^ ift â^ C), — 562 r« cft pluiôt que en /«r/» — 5S9P La Utrce si
iit MOU » apei^e, éd. i(0 ist; je lirjis plutôt îa /, rfst, — 60} h Vmheiun de cet
[îuh] /pf^/jiV; Miss Y. pmpose (à peu près) cette leçon en note, maïs elle se
demande si aclnsun ne pourrait pas compter pour quatre svlbbes (cf.
|p. Il): c'est i m possible* — 642 )^ Sdgmurs irei vos vrrs Cùlo^nr^ C trri
Ekhalmu i la nm^ avce anîûne dôît faire préférer cette leçon, en supprimant
WJ. — 671 K âinx Paresme Ve^tvins : cVst le £omitui qui parle, — 685
impr. ra dit et suppr, radire an Glossaire. — 752 a^rUname^ 1. apercevunct^
* circonspection, sage^e w. — 754 Suppr, la virgule. — ^780 gtnt{f), —
880 L Kd{e)i chiftnt. — 909 suppr. la virg. après bien. — 918 je lirais heï
m pufi avHr pour ke fen, ce qui modifie le sctis (cf, la note). — 921 I. peut-
être Kûr £iomeH(mi qni eH bofn. — 968 parmi les treize fous qu'il carjictérisc,
Tauteurcite E qui m tr t*ent conmUiir Nt ti'itutns m' se tvnt dkiritr\ Mii. Y.
conserve cette Ivçon Je P, tn renvoyant a siiu Gîfssjirc, où elle traduit se
ckfirier par ii se laisser conduiri: u; mjb» ou ire que ce sens est peu adm^^sible,
charter aurait troi^ s/lUbes ; Q donne E daiUfi net tf / cerchrr, ce qui ptut
fournir la leçon Ne d'autres ne h (= le conseil, compris dan!» conseiHkr}
veut (pu mieux Nta autres net t'eut) crrchier . — 98a K // ne rfst(e) mie wui
fifhur. — 989 L Des plies te dei^ ^uardfr. — 1046 et JO74 suppr la eirgule.
— fogi L ta avec C pour tt. — ro97 te Hovel, 1. de noiei — itij Ktrdi
teus gudrde tié vos darjei : Miss Y. suppr n»', mais il est indis^'ensable; il faut
supprimer Ker^ ou peut-être admettre nos == tti-tt'j. — 117c Tauteur tnijagc
son fils a se mener de Tcau dormante et de l'homme « simp!« » enappartncci
car Tune brise souvent son écluse, et Si fet s impie home entre int Quant meins
cuiàe^fel ^r*ind iorfet\ Miss Y. traduit : *i L'envie entre dans un tel homme
simple; au moment où vous vous y attendes le moins, il fait qutîque grand
f&rfait* 1* Elle comprend donc M comme hi^ « haine 1» (et non « envie w)i
finis quand mkmt ce mot aurait conservé le t fînal, ce qui est Inadn^is-
«N xxxn ïo
Ué COMPTES RENDUS
sible, son e fermé ne pourrait rimer avec IV ouvert de fet. C donne : Si Jet li
simple hom cntreshait Quant ne quide\ grant jorjaity et il faut lire : Si Jet le
simple home entresait, Quant meins cuide:;;, [moût] grant sorfait (plutôt que
forfait). — I2IO Tauteur invite son fils à ne pas quitter le vieux chemin
(v. 1208 I. Kar ase^ tost ferei[e]i pis) pour sente qui vait traversant : Kar tost
çruèneras itant Que tu en seras destorhé E de ta jornee arriéré \ que veut dire le
mot gûener} yi\ss Y. ne fait là-dessus aucune remarque et ne l'enregistre pas
au Glossaire ; j*avoue ne le connaître ni ne le comprendre : c'est sans doute une
faute pour geûneras (ou p.-ê. 1. i peneras). — Le v. 1214 n offre pas de difficulté
si on met une virgule après saches. — 1327 1. Fii;^, contien teien [tel] manière. —
1 309 deveer, 1. deneer( : desresner). — i 3 50I. hom[é]. — 1 372 remès, impr. remés.
— 1392 1. Idoncen dei^ [tu] honte aveir. — 1407 1. Nient plus que [ne]puet chaut
sofrir. — 1427 Donc refet tost que (mss éd. quant) nul n'agrée. — 1466 1. avec
C Donc les ester le nunacier; lessies(sic) ne peut compter pour trois syllabes. —
1478 suppr. la virg. après aperceveirtt en mettre une après sens. — 15 19 Mes
que il dit vérité, 1. die. — 1545 je lirais (à peu près avec C) La desreine tient
la première, c'est-à-dire : « La seconde nature (l'habitude) domine la pre-
mière » (rexplication donnée en note est peu plausible). — 1 596 D'ele, impr.
De lé. — 1636 Epar le louier qui englue A sei le cors rame si tue, C Le quor del
home s'aime tue : quor (iz: cuer) vaut mieux que cors\ je lirais : A sei le cuer
ame si tue, C Le quor del homesalme tue : quor (^rzcuer) vaut mieux que cors;']C
lirais : A sei le cuer Y ame se tue — 1686 l. ICil Cai[t]. — 1711-12 l. (d'après
C) Contenez vos solon les (PC lors) murs Ke vos a cei fere verreix Entur qui vos
conversereix. — 7783 entornera, impr. en tornera. — 1828 requist et non
requi(j)t : cf. i86>. — 1830 inutile de changer en ai le oi des deux manu-
scrits. — 2049 l. Que li hom puet bien a son aive, Veire, e oncore a son tresaive
Bien resembler ». — 1888 l. Cum[e] veraie amie. — 2060 impr. Mal mont tost a
[u]lui repère. - 2135 1. Kil vuillent seulement ve[e]ir. — 2195 /iff «/// hom nen
porreit descrivre ' La disme partie fie dire : les deux mss. ont nel qui n'est pas
« évidemment faux », si on met La disme partie entre deux virgules. — Les
vv. 2091 ss. sont altérés, et l'explication donnée en note ne satisfait pas. —
2199 /a^/f^V, impr. jamès^ ou mïtu\ ja mes. — 2325 1. Quant qu'au mauvais
avras(C) perdu. — 2257 le(i) et non /rf/]. — 2368 Ne tropafii{s] a ton savoir :
Vs ajoutée à afie fausse le vers, et n'est pas nécessaire : l'auteur passe du sub-
jonciil à l'impératif. — 2380 De so^, impr. Deso^. — 2503 point et virgule
après voleir. — 2526 P £ gentille hérite, C E gentillesce e richesse-. Miss Y.
imprime : E moût gentille hérité-, rnsLis gentille (qu'elle ne signale pas dans son
étude sur la langue) est inconnu au moyen âge; 1. E genlillecee richeté, ce qui
est d'ailleurs postulé par le sens. — 2453 impr. Ictlui. — 2537 Car le* uns
1. Cette théorie de l'atavisme est à noter, et aussi l'opposition que fait
l'auteur a la doctrine de l'hérédité si générale aient acceptée au moyen âge.
2. Pour descrire : Miss Y. n'a pas noté cette rime.
M*-v. ydu>;g. Lis Enseignements de R(éeit de Mo 147
par iHvie Htmdmt commt JA : Miss Y., iu Glossaire, traduit umHire (sîv) par
« niïgUgcr, dvtruirv *^; mais comment tnund-clIv/W? die y voit sans tlt^iitc
fthfi (en ce cas elle aurait dû noter la rime de e < ê ivec c < a), ce qm tou-
tefois tie donne guère de sens; ntnetre sigtiîfW ici» commtr très souvent,
*t fondre »^ et ri faut lire ui au lieu de Jd. — 2549-50 deux points apris
manamlty virg. après siuk, — Je ne vois pas le moyen de restituer le v.
2$65 (^ui n'est que dans C); en loutcas nijert^ ïnfernum, miiïgré les
rJ ppruc hem enis allégués par Miss Y , n'est guère possible — 25?" Guai ne
peut avoir dtujt sv Ikbes : I , G mi [ii\^'rH. — 260 ^ P Tmlo^ drvumknr anir For
€Sin in cd dfpotl^ C Tmsloi dnwn iû tt^rr; Miss Y. imprime Trest&i dn'itn noi
ifovaiUier, qui convient comme sens, mais s'éloigne du Uiit\ kitr des niss.
(aussi bien C|ue les mots qu'elle propose en note); il faut sans doute ititUlktr.
I — 2606 \.Dfm ms{\\fQ££ fshmdtr. — 2626 m s. (à partir de 2624 on n'a plus
l^ue Cj Bî nohil^i mie iiHatil tu viitras t la comparaison avec le texte d*Èlie de
Winchester, que Robert copie ici, pi^mtet de restituer : Bt u^oblie^, quant Uu
verrm. — 26^1 Z: rtpaiUm rdmoU ; Miss X. imprime n\t]}mfni^ mais au
Glossaire elle enregistre rdrmmt « réellement ? régulièrement } » Les variantes
du texte d' Elle» ^<'mwrM^ rdnftetit {rdmmi, rtdlmfttt) Aux ont cependant indiqué
la vraie forme et la vraie valeur du mot, rdrmtttt, (qui revtetit au v 2784),
pomrtfrttmti,-- Il rarement 1» ^ —2672 Har muinï Imn^f) jalt iust prm\fyir.
A fc> tfuU t^mdf h<in iavrir, L Kur tuant ^mue Jaif^ toi pur vtir. —
— 26H1 I, Ke la maî\r]di td jVm (di}pari. — 2725 Di Uu en Uu e fîij rùulie :
l'addition de ^/ est inutile; roiihr ^: rooîrr, — 3751 Ton l'îd ami m dfh
biaitnfT^ S'tJ fit djan^ir, tiuih rtmimhfir IM atuor cy*u? pritti^r{t\mtnt Entre im fu
ntislt^t\mtHt ; je ne *>ais comment rédîtnce comprend le dernier vers; il faut
impûmuT tfti'siremi'itt, ** mutuellement «, — 2771 ms* a mdrrtes hn^ éd, n
mtismt^n^ L plutôt fn w Twif. — 2776 mettre la virgule avant beaî (cf, Élié
de Winchester),— L'auteur engage son fils à ne pas muitiplierses visites dans
une maison : pour un qui vitiU rarement, dit-î), on fera écorcher des mou-
lons; mais â celui q\^ vient trop souvent on n'offrira que des œufs, et dii-
chement; £ tant iovent i putt ivnir Hr as (ms^éd, dfî)oes pitdiî hieu/ajUirixé.
f&ihlir); Nds In 'brtses m {i7) quit strrmt En H sauf uf vodmunt. Miss
Y. imprime ce dernier vers (2791) : En H « sahr »> ne i-ahront, et traduit :
« Pas mêmv ïes braises sur lesqii elles on aura fait cuire ks œufs ne lui
dirof-t « salve »*, ne lui femnt la bienvenue, n CVst trop ingénieux» et cela
n*eîipliqiie pas m H. Il faut imprimer i En ![\i]i iam-ti nt l'odrwnl^ » îb (les
gens de la maison) n*appelleront pas bien employées en lui (comme don pour
lui) même les braises ». — 2794 Fi^f k ton dnpcndrr dnrm Sdm tço que tu
verras Feîiimt[iils€ amdone Edcum k tùn te /0h{syi}nf , Mi^s Y. n'a pas admis
fehme dans son Glossaire ; en note elle dît a qu'on s'aiicndrait â Fdau^t st con~
I. Pour expl^uc^ cette forme il ne faudrait pas dire que « tiotre poème
présente souvent e pour a ji : r^r est la forme régulière de rarutn.
T48 COMPTES REKDCS
dmtr », ou qu'an pouffjii lire ; IQn^'] tdatiu y c^mlmt, ce cjol prouve qu*tll€
aîîâche un sens à ce mm, mai<i lequel ? Je pense ^u'îl faut lire : Sdon i(o ^ut
îu verras K/ Vanee U le ayndom. — 2809 Quani in n[trt] as dt rm ttiesfati : je
préfcrerais n[fj. — Les vv. 2^2 ^ N. sont très difficiles et Texplication qu'en
donne Miss Y, n'est pas claire. Je proposerais : Ki îùh pru ksse «ndormir^ Ti?si
iî pofra f^rânî fftalt^ttir; Ki enki (= €timi, « aujourd'hui *) fixai irairt n fin
E a ttrmi desqu^at rnatiti, Bm iô^l, par tUi pûrhîgnter^ Li avifni puh îiî âittor^
hirr Kf ja »ws tn tûitia vie La hosùigm nuvrafink, ^ ^f^l^lAi ai>rne %flt (m s,
cn^ éd. œks) hontei (ou mîeux honti^ et au v, suiv. vfrilé). — 2K72 hat^t).
J ai Jqa eu dans cène révision du texte Toci^asgon de faire q uniques obser»
vations sur les noies qui le suivent. J'en relC*ve encore quelques- unes. Celle
qui concerne le v, èo, avec la proposition de substituer/wi/ àfuni, qui va tort
bien, m*est incompréhensible, ^ La difficuïté sîjçnalécsur le v. 1 120, estcntr^
s*accordant avec tvs désignant une seule personne, nVsitstc pas i cet accord
est plus ancien que Tusage contraire. — Au v, tt 5 1 Li mi t7 a signifie plutôt
m là où il y il (quelque chose) 9- — ]*at déjà indique que rexplication de* vv.
1744 ss* était peu acceptable ; en tout cas il s'agit id de saint Paul et ooti de
saint Pierre. — V. 2572*3 Si H sagts set dmtfichitr Li iv^f*^ stt bim rfplekr
(suppr. bien^ car i^f^rir a toujours trois syîbbes); Miss» Y,» qui dans son Glas*
sairc rend chujkfmr par « (ÎKer av^^c un clou 1, traduit ici : (^ Si le sage sait
rester terme^ le ruse sait bien se replier »* ce qui ne se justice guère. J'ira-
prl nierais plutôt cîou fitbier^ et je comprendrais : « Si le sage sait bien planter
un dou^ le rusé sait le replier » (opération fréquente quand on plante un
dou).
Dans le Glossaire, Miss Young n'a voulu admettre que les mots « rares,
douteux ou remarquables pour n'importe quelle mi^n. ■ 11 y a naturelle-
ment dans tout choix de ce genre une part d arbitraire. J'ai déjà signalé plus
d*un mot qui aurait dû être enn^gistré; je noterai encore ^^iiaVr 3276,
arrurtr t2i2, tupet 76 (au sens de toupie, sabot), intéressants par kur
ancienneté, îoiii 1584, soriineûr 330, qui ne sont pas des mots fréquente. Le
mot hei 1427, qui semble signiiVer v humeur, disposition >», m*cst inconnu ,
ainsi qu'à Godefroy, et n'aurait pas dû être omis* — En revanche, sans parler
des mots qui ne semblaient pas valoir la peine d'être enregistrés, îc Glos-
saire en contient plu?* d'un qui doit disparaître : ahi^er ^Qg;(voy, ci-drssui)»
iiprrttnaiut 752 (id-), aifser 2288 (t- dunsCi* /r^rr, cfmriet , voy. ci-des$usX
chiifichirr{ié), tkmeni 468, S%4 (id,), tmperdre 69 (le texte porte correcte-
ment tn péri), emui<lier 28^ (le texte a encore la bonne coupure #»f cuide% fin
11^8 (l'Errati corrige avec raison dans le texte di fin en 4i fi)^ radin 6B5
(voy. d-dessu$). Les traductions sont généralement bannes; quelques-unes
sont erronées ou douteuses* Le mot hùitoui 137 {hoitomefnent i^'^)^n%\Ati
bien signifier er bruyant i», et Mîss Y, le rattache avec grande vrais^nibUnccI
au moy. angt hùhtmi (angL nvid. hûiikrom)\ mais je ne crois pas qu*il Caili
le reconnaître dans le bùittmc de Gjillaume Guiart cité par GoJefray, — 1
Demandtr^ au v. 1297^ est traduit par h être prié u, ce qui ne peut être : iff#i^
M.-v. YOUNG, Les Enseignements de Robert de Ho 149
demander veut dire « sans qu'on lui demande ». — Je ne comprends pas ce qui
peut engager à traduire w^iwn/Vr 356 (et non 357) par « arranger » : le sens
du quatrain est : « Fils, ne soyez pas trop affligé si vous êtes jugé injuste-
ment ; car il est rare que ceux qui ont trompé les autres s'en réjouissent Ion-
temps. » — Bien empiéter 229 1,« réaliser m^esaier 1287, « décrier », ne sont
pas des traductions absolument exactes; mais il ne s'agit que de nuances. —
Fret 1794, " mot douteux qui semble signifier y>r/io« ». Cest Jésus, au jour
du Jugement, qui reproche aux pécheurs de ne pas Tavoir accueilli dans la
personne des pauvres : Et quant je jui en fret. Malade, dont de met Veer n'eùstes
cure. Le passage de l'Évangile dont celui-ci est inspiré est : Infirmus et in
carcere, et non visitastis me ; c'est ce qui a suggéré a Miss Y. son interprétation
de frei, qui est plausible en soi ; mais on ne voit pas ce que peut être ce mot :
serait-ce Tall. fréd, d'où le b.-lat. fredum au sens d' « amende »? —
Hel (qu'il aurait mieux valu ranger à el) signifie non « autre », mais a autre
chose ». — Lor 2334 est leur et non lors. — Norrir ne peut signifier
<r croître, grandir »; au v. 154 font norrir veut dire « font entretenir ». —
Parissable 2858, « productif, fécond ». Il s'agit de la loyauté, source et con-
dition de toutes les vertus, qui est utile à tous les âges et à toutes les condi-
tions, et qui, notamment. Al hacheler est parissable. Le sens précis du mot, qui
n'est peut-être pas très assuré (le passage n'est que dans C), m'échappe; je ne
vois pas comment Miss Y. est arrivée à sa traduction. — Pleines (= plaines)
paroles 129 n'a pas besoin d'être changé en planies. — Pleniere 612 ne veut
pas dire « absolution plénière », mais est adjectif et se rapporte à charche,
«pénitence». — L'art, poiy divisé en « adjectif», « pronom » et
« adverbe» donnerait lieu à une discussion qui m'entraînerait trop loin;
en fait, poi dans notre texte est invariable et toujours adverbe. — Première
1538 ne signifie pas « la principale chose », ni 1545 « commencement » :
c'est, comme je l'ai indiqué plus haut, la « première nature », opposée à la
« seconde*-, l'habitude. — Sur relement, remetre, repleier, 107, voy. ci-dessus.
— Repouoir 966 « pouvoir », aj. « aussi, de son côté ». — Resort 261 1, « res-
triction ». Ice seit sani resort signifie plutôt : « Que cela soit sans appel, sans
retour ». — Sordre 501 (où il faut lire sordi et non sorde^ voy. ci-dessus)
signifie comme toujours « surgir, s'élever », et non « élever ». — Sorfet
1175, « injure, forfait, crime»; plutôt «excès». — Tressaillir 2386,
« sauter, aller vite » : Qui a honor veut tressaillir Contre ese Festud efforcir,
c'est plutôt a parvenir, monter (à travers les obstacles) ». — Vuitters 2096,
que Miss Y. traduit par « méprisable » et rapproche de luitart, est un mot
bien douteux (C donne motiers) ; il rime avec avers, où Miss Y. voit aver,
9 avare », mais qui est peut-être une faute pour laniers.
Le nombre de ces remarques critiques, — qui prouve simplement l'intérêt
que j'ai pris à la publication de Miss Young, — ne doit pas donner le change
sur le mérite et la valeur de cette publication, qui sont très réels. La jeune roma-
niste américaine a choisi pour son début un travail devant lequel aurait reculé
plus d'un philologue ayant de l'ancien français une pratique plus ancienne, et
IjO COMPTES REKDUS
Ta exécuté d'une façon qui tui fait honneur *. Elle a !>ten voulu, en souvenir
de nos confère 'icçi Je T Eco le des Hiutes Études^ inscnre mon nom à la
premièfif page J.: ^n livre, çt, pour me fjire pîu^ de plahir, elle \\i ai^soci^ a
celui de mon ami H. Morf, aux ki^ons duquel elle s'esi formée. Elle ajoute
que V fouvrage n'est pas digne d'être offert à ces deuK maîtres i* • c*c5t pous*
ser trop loin là modcsue; M. Morf ne me désavouera pas, je lésais, si je d\4
que n nus regiirdans notre enseignement cotnme très bien employé quand il'
produit un travail aussi utile et aussi digne dVloges que celui -ci.
G. R
ilîier ûie Vengeance d'Alexandre van Jean le Venetais,
Jnauguraldissertation.,, von K;irl Sackkow. H^Uc 1902, 74 p»
Die Vengeance AUxandre von Ji^han le Nevelan picrausg.
vonj ScHULTZ-GofiA [ikilin 1902. Tirce à jo ex.], toi p.
Malgré la différence des noms donnés à Tauieur, il s*agit du même |
dans les deux publications dont les titres se lisent en tète de cet article.|
M. Sachrow, s'appuyam sur la majorité des mss. et sur la classification quMeit
a établie, adopte le nom que M, Wilmotte avait le premier assigné au poète,
tandis que M. Schultz-Gora sùiX pour le nom, lenis. qu'il n^produit Sur les
autres problèmes que soulève ce texte, les deux philologues arrivent aussi à
des conclusions différentes ; M, Sachrow adopte l'opinion diaprés laquelle le
poème serait dédié au comtL.- Henri le Large, de Champagne, mort en uili ;
selon lui, Tauteur était originaire de la région comprise emreSoissons, Ltonet
Reims, et son nom serait peut-être à rapprocher de celui du village VûuUlay
(dép. de la Marne, cant, de Fismcs). M, Schuîtz*Gora, sans apporter de m*
sons nouvelles, se range à Tavi'i de M, P. Meyer, qui, dans son Aifxnndfi It
Grami dun^ lu Ht t. Jr, du moyrn d^e, II, 265 ei suiv., propose de voir, dans le
w comte Henri n auquel le pone fait aîiusior., Henri V, comte de LtisLcmbourg
depuis l a 88 Cl proclamé roi des Romains en i îo8 '.
Il est en e€et exirèmemeni difficile de fixer la date de la compotiitlon de
ce texte, ar on ny trouve aucune allusior. historique qui puisse nous y
aidera et Tanjlysc de U langue ne donne pas df résultats bien préds.
Quoique les traits dialectaux que nou^ fournit Tétude des rimes ne soient
pas très caraatnstiqui.^, ils rendent pourtant probable que la patrie de l'au-
teur est à chefclier dans le nord de la Champagne, ce qui est en faveur de
r identité du protecteur de notre poète avec Henri I" de Champagne, tl est
1 . Je remarquerai en passant qae le livre de Miss Y est écrit en très bon
a, fC'c>t Topinion ^ui me paraît encore la pluspnïbaHe. *- P, M J
]« De b mention, au v. ttçé, SAr^bU, nom de Iku figurant dans
SACHROW, Die Fengeance d'Alexandre 151
vrai qu*un certain nombre de fautes de déclinaison et de formes verbales
analogiques semblent parler contre un âge aussi reculé, mais d*autre part le
texte offre aussi des traits archaïques. Je reviendrai plus loin sur ce sujet.
Examinons maintenant d'une manière un peu plus détaillée la thèse de
M. Sachrow. Voici d*abord le tableau de classement qu^il a dressé des sept
mss. de la Vengeanu^:
\
N X
A i
M. Schultz-Gora est d'un autre avis au sujet de la filiation des mss., bien
que, comme il le dit lui-même, cette partie de son travail ne soit guère
qu'une esquisse. D'après lui KOX -f- Q forment un groupe, M constitue à lui
seul une autre famille, et PS^ ayant puisé k la fois dans la source de M et
dans celle de NOXQy occupent une place intermédiaire.
Aucun de ces classements n*est exact, à mon avis. Il est vrai que les mss.
.V et X sont apparentés ; ils le sont même à un point que M. Sachrow ne
soupçonnait pas, ne connaissant de X qu'un petit nombre de vers. Il est
exact encore que 5 et P sont intimement liés ensemble ; mais M. S. et
M. Sch.-G. se trompent tous deux en supposant pour ce groupe deux sources
différentes dont Tune serait apparentée à Af , l'autre à Q {NOXQ) : il n'en a cer-
tainement eu qu'une. Par contre c'est le ms. jQ qui dérive de deux sources, dont
Tune appartient à la famille de NXy l'autre au groupe MPS; le copiste a géné-
ralement puisé à la première en écrivant les 450 premiers vers, à l'autre en
écrivant le reste du poème. Je regrette que l'espace nie manque pour citer ici
les passages qui prouvent l'exactitude de celte assertion. Je dois me bornera
dire que c'est là le résultat du classement que j'ai fait en vue d'une édition
critique de la Vengeance y édition projetée déjà avant l'apparition de la thèse de
Fouœti de Candie (voy. Schuliz-Gora, p. 6), il n'y a pas grand* chose à
conclure, la date de ce poème n'étant pas encore fixée. M. G. Paris le place
vers 1170, M. Suchier vers 1195. Il en est de même des vers cités par
.M. Sachrow, p. 52, dans lesquels sont mentionnés les noms de Fronionty
Foiicon et Thielniui ; d'ailleurs je doute fort de l'authenticité de ce passage.
I. .V -- Bibl. \at. f. fr. 791 ; O . B. N. fr. 1375 ; X =z Mus. Britt. 19
D. 1. Ai = B. \. fr. 24565 ; Q. - B. N. Ir. 790; = P - Oxford, Bodlev
264; S = B. N. fr. 1590.
I>2 COMPTES RENDUS
M, SachrcwS et qut je donnerai peut-^trt un jour ou!'auirc, malgré loui.Li.
fait qui* le ms. Af se rattache au groupe (0P5 e-M aîtesté par les deux passages
relevés par M* S,, p. ^o, —âom au moins k premier pjraîi absolumtni pro-
bant, — ei auxquels on pourrait en ajouter une dcmi^doiizaine d*auires.
D'après M. Sachrow, N serait, matgrt* bien des bièvues imputables auit
deux copistes qui l'ont c)((3cuté (cL p, 14 et 54)^ le meilleur, pour le Jbnd,
de 10 us ki mss, du poème et aurait dans beaucoup de cas seul consent là
ItÇOn originale. Mûh dans a peu près tous les cis qu'il ciie, — sauf ceuic
auxquels je viens dt faire allusion, — la leçon de N est au coturair« fautive.
M. Schulu-Gora en a âcp indiqué deux, dans les notes des vv, 560 et 6}2*i
il en est de niémc du v 70^1, où selon M. S., p. so, *V offrirait seul la bonne
Icçôii : Moîii rfitmbk bun pvina rî bon de bardrmtni (X, inconnu à M. S.^ à
pïain ili grant 6.), tandis que le v. préc*, Lks purru de son hmutttf tr^hut U
chû'itp rfipLnt, indique bitn plutôt que UQSP ont la leçon originale ; Mcui
nsûmhle tien loi por le ihttr ^^tinttmnit. Au v, 862 b leçon de h\ Car kifn$
fiiirl ja liomijiH) pur fmtii ajattte ^ straiï la boimc (p. 40) Voici ce que
pi*rtent les autr^ m^s. : X (inci nnu i\ M. S.) C /. wV. /a fîomttir par nul ai
û., MQPS Ja hmt€ n'erl L di%{ram% (QPS àfitnit^) ne a. Ni ta leçon de X 01
encore moins eelle de *V ne sont admissibles ; la conjonction car n'a rien à
fjire à cet endroit, D*autre p*irt î'acc, Imut paraît trop choquani; je suppose
qu*it faut lire/ti funti tt[fti]^.(ou Ja [ttui] iMwt.Jti [m ii>J h ). J'ajouterai encore
quelques mot<i pour montrer jusqu'à quel point M* Sachrow suit aveuglé-
ment le ms. ^, P. îSj en parlant de fa niélnque du pnéme^ M. S* nous dît
que trois fois Tiiy leur admet à la rime le môme mot dan^ deuat %*ers consé-
cutifs : V. itoet ni uttrr^ v. ^$1 et S831 Hongrie^ 1119 et 1150 fdm. Or,
que irouve-t'On dans ks mss. ? Dans k premier cas il y a sturr : tftnvouenrt^
dans NKQP, S fait défaut, M écrit dtmôiitun ; dans k deuxième, où selon
M. S. il faudrait lire datrurs df Hon^rk : ffmgrk^ ce ne sont que NX qui
portent d. dû Hottgrie^ — ci ils omettent le second vers, qui est indispensable
pour le sens, — M a df NuHe, QPS df Saîk ; dans k troîsii^me ^V et X
omettent de nouveau un versauthenti-|ue et indispensable. Voici le passage :
Et ont trouvé Tcsior mcrveillcus et fclon,
Et djtni Clins Icssc cortc, vct jousier â Tcison ;
Niex fu Antipiiter dti ligDiige «u khn*
Le second vers manque dans NX, ce qui rend cet lignes incompréhen-
sible* dans ces mss ». Ixms. N est en effet médiocre, et laplupandeses fautes
1, Voy* Rom. XXXI, 1 66. M, Frcymond m'ayanl averti qu'il n*avalt pas
renonce à publi^-r la Ven^mnCf de Gui de Cambrai* projet annoncé ici
mcmc \\ y a dou?.e ans, je lui ai écrit immédiatement que j'abandonnais mon
plan de publier ks deux textes ensemble.
2. Pour ta numérotation des vers je suis toujotirs rédliion de M. Schulu*
Gota.
I r. 59 M. S. cite, comme doublet de ^rim, grfjûU(\\ qui n*est natun:11e-
mcni qu un lapsus du seul ms. N ^ut^tjm.
SACHROW, Die Vtngtanct AUxandrc 1 5 j
se retrouvent dans X, — même .xL pour Casmârant^ au v* 1562, que
M. Sadirow cite comme uri exemple frappant de la négligence du second
scribe (p. ^4). M. Schuhz-Gora n très bien fait de prendre pour base de son
édition Af, q\i\ est, de beaucoup, îe meilleur manuscrit.
L'étude des rimes» qui â vrai dire n^oflfrait pas de bien grandes difficultés^
est en somme assez satisfaîsame. Je relèverai cependant quelques erreurs un
peu fortes. P. 4}, S 3 nm^^ pour ttusél^ ne remonte pas à nasiUum mais â
nisalem* — !bïd. M. Sacbrow voit un exemple de la désinence Lit* a rem dans
le mot merkr, w im „ c*est toui bonnement un infinitif « mi seul are), — ►
P. 44, S i' ^^ subst, compUe ne vient pas du lat* c om p leta mAis éa fr. compHr^
— D'après M. S., ffrR, fis serait le produit de fi li us au v, 285, que voici :
/fr femmfrai qikne, ^f lui stti je /nw^/f (I). — L*asscrîion de M, S. que Tau-
leur de notre poëm':? ferait rimer ci et fi < ti est due i une faute de lecture :
au V. 67, laissa en -oi {voi, m, etc.), Icsmss. portent non pas andot mais au
dûi, — Il est exact que an et ai rîmcm ensemble, cf. les bisses 54, 46, 65,
71 ; mait il est à remarquer que la tirade S n*a sans doute contenu que des
mots en -int dans rorîginal, et que dans les mss, MX la tirade 77 est divisée
cndeuxï la première en -ant, la seconde, qui commence avec îe v. 1903, en
-rnt, — IL est exagéré de dire que i s'est changé en s dans la Vengeance i il y
a au contraire une tendance très marquée à tenir scpar^ ces deux sons. Ainsi
les laisses lo» 30, 4^\ >0, 60, en <if, sont toutes pures, sî ce n'est que le
rég. faifitis (< -ici u m) se trouve i la rîme au v. 203^ et /jî^, remplacé par vh
dans les mss. AfP, au v. 992; de môme la laisse 57, en -ii (remarquez
massif 127 4)» tandis tfoe dans la l. 14, en -t^^ figurent les mots pais, amis
(deuît fois), Mottcfttli ^ Les laisses en -w^ et en -m^ ^^^^ pures; par contre on
trouve la forme irf( < Irabes aux w. 950 et î 592. A cet égard notre auteur
n'est donc guère plus avancé que Chrétien de Troyes, voy* Fdrster» Oig/s
f grande éd ), p. Lxxiti.
J*ai dit plus haut que le texte offre quelques fliutes contre les règles de la
déclÎTiaison. Les cas où l'ace, a été mis pour le nom. ne sont pas nombreux;
il yen aune dizaine au plus^ Mais ce qui est plus grave» c^est qu1l semble
bien que lauteursesoit quelquefois permis d'employer» pour les besoins de
La rime, le nom, dans la fonction de Face. M S^chrow veut éliminer ces cas
en y supposant des assonances» mais cette explication se heurte contre le
fait que, — malgré ce^u'en dit M. Schult^-Gora dans ktiote du v, aS^, —
il Oy a' pas assonances dans le poéme^ si ce n'est -é \ m mi^r) pH ; drUriHr)
j4î mMJ) 1085, et CCS formes sont bien connues d*a il leurs. Plusieurs de
K Cette laisse est corrompue dans le ms. imprimé par M. Schu!tiE-Gûra,
2. Au moins un det^ six cas allégués par M. S. est h rayer ; Fihk au
V* 974 est régime, non pas sujet. De plus il est â remarquer que dans un de
€cs Ois le ms. .Vf n'enfreint pas la rc^k, et que troi^ autres concenient le
mot 4'r///. Par coiitrc, il faut ajouter quelques c;ts nouveausi.
I>4 CDMPTKS RENDUS
CCS incorrections peuvent êtra facilement écartées, mais tl reste toujours
les cas suivants: v. 7CX3* Et ni^ntons (corr* ironf}) ai^c ttoui .^Hx P^ruîHl*^
\\ 1600. Et diîHsCtini/it mofdr^ ffi Pm/isranl crrttui (corr, A jerrmH qurtt c. ?),
Après n vùH% on trouve le cas sujet : v. \ 5495 Atani a vmts k roy AUor ât-^-
hiiichiei^ et peut-être au v, 1 569 : Guumts H nît^ U roy f^ tints kut$ mmie^
NX (les autres mss. fit eii L m.). Les w. io$6-S me paraissent oor-
rompus ; je propose de lire Altor h fiett st Iqfté] p^ce ui eicui^\ Bt i'jubm
de Sun dos \fsl] ifamhfs pars rompu; \ Et Pûrçam àf h sHk par dtirkn fm-
dui ; vO)^ ïes variantes dans Sachrow, p, 49* l\ est vrai que perdnr est géné-
ralement actifs mais il semble bien être neutre dans notre texte, v, 1170,
Rien d'étonnant : les verbes atïaiogues, tels que dêptckr, dtsmfntir, /ttusser,
j'rawdrf.Jft^r, p^çùkr, rompu etc. sont tour à tour actifs et neutres. ^- Pour k
V. 861 cL plus haut.
Il est vrai que les verbes de la i^e conj. ont» au moins deux fois sur trob,
pris un t analogique â la i^^ pers. sîng, du prés, subj , vv, :j57 (Uste) et
466 {mtint)^ Piïr coi>ire U y^ pers, n'ulTre jamais JV; les deux exemples
allégués par M. Sachrow, p. 58, sont errronés. Dans le premier, v. 690» k
verbe est il l'irTilcatif, dans le stîconJ, v, 45^, il faut lire avec MPS{Q) pawlt^
non pas chanit (NX). — D'autres traits relativement rC-cenis sont cmt mil
V. 628 ; cotârfû; à côté ûiâ cmrui: ét^ux ou trois participes neutres traités
comme masc. (Sachr., p. 53^ ^^ P-^- ^'- i2%ù)i la rimed/ ; oi (dAak : -ôîf
1927)» fréquente au milieu du xut« siécle{^i^jA Rustebuei) mais qui se ren-
contre sensiblement plus tôt^ p* ex, Nitthmnnis (vers 13 10) 66$1 dehl i -<w,
Rom d'Alix 594, 27, moi^ *ai * .
D'autre patt le te\ie oiïre aussi des traits archaïques : les adjeaifs de h
Y tJccl îat. n'ont jamais dV au le m,, la i"^ pers. du prés, înd. ne prend
jamais dV ni d*j non étymologiques ; le prétérit de dtsctndff est ét$muHi 5 14,
les verbes lels que mtrdtr, crier etc. riment toujours en *fr**^ \ï n'y a p^%
d' « éliiion interne 0 sauf dans Timpér t'.x, pas de rimes -ai \ / (fréquentes nu
XUK s.);enftn le style paraît être de la bonne époque. L*ensemblc des traits
linguistiques que je viens de relever conviendrait le mieux â un poéniede la
première moitir du xttl« siècle, ntj semble-t-il; mais n'ayant à choisir
qu'entre Henri le Large (ttîl^l 181) et Henri de Luxembourg (iië9-i;oH),
— car il n'y a pas d'autre « comte Henri « possible, que je sache, — je
penche, bien qu'avec hésitation, pour îc premier, à qui s'appîique d*aillcurs
K On trouve b timt paîrt i Jmré dans les Fables de Marie de France,
79' K mai^ réditeur, M. Wamke, doute de l'authenticité de cette rime; voir
redit ion. p, LxxxiiK
2. En revanche il y a quelques rimes de k' : /, ainsi -ir^ : loufi 45, 1417
(< tmtJfi*tti; le nn' M écrit iotr^, ^>"^^0* """* » iffornf ^tq. où M. Sch/ G.
corrige ttdattiî\ ei -ié : tutunt ttef ^in^nnr \lb „ \o\ . les variantes d^tts
SAchr., p« Ji. On pourrait conjcciurer maint [béti] tttj\y¥*fté\.
SCHULTZ-GORA, Dîc Vengeatiu Alixandre 155
admirablement ce que dit notre poète de son noble protecteur, dans les
vv. 46 ss. Le fait qu'aucun des mss. qui contiennent notre texte ne
remonte au delà de la première moitié du xive siècle est étonnant, mais
n*a pas une granJe Jorce probante Evidemment le poème a pu se trouver,
séparément ou joint au Rom. d'Alix., dans des mss. plus anciens qui ne
nous sont pas parvenus. Les plus anciens des mss. que nous ont transmis
la Vitigcanct de Gui de Cambrai, écrite avant 1191, sont du milieu ou du
troisième quart du xiiic siècle '.
• On a beaucoup discuté sur le vrai nom de Fauteur de notre poème. G)mme
je l'ai dit au commencement de cet article, M. Saclirow s'est décidé pour
Jehan le Venelais. Mais on a vu plus haut que je repousse le classement des
mss. établi par M. S. et que, à mon avis, les quatre mss. qui présentent la
forme mentionnée ne font, pour cette partie du poème, — Tauteur se
nomme au v. 59, — qu'un seul groupe. M. Schultz-Gora défend la forme
offerte par le ms. M, // NevAons. Nevelon est connu en Champagne et ailleurs;
pour l'emploi comme surnom M. Sch.-G. compare /^a/i H Mikieus relevé
dans le Cartnlaire de Flines (éd. Hautcœur). En fait, la leçon de PS remonte
sans doute aussi à li Neirlous; je suppose du moins que le copiste de la
source de ces deux mss. a XuJcImiïsH uoueloirs, erreur facile à comprendre au
point de vue paléographique, et « corrigé » /. li twuiaus lx>irs. De même
je présume que /. Nevelaux, Nevelaus (sans article), comme écrit Wauquelin,
provient de Nn'elous pour Nn'elons. Aussi avais-je, déjà avant de connaître
l'édition de M. Sch.-G., aJopté comme le plus probaole le surnom de le Neve-
lon. La supptîsiiion qu'il laudrait lire le Nei'elois n'est même pas appuyée
par la langue du texte. D'un autre côté le surnom le Venelais est tout à fait
obscur, et l'idée de le rapprocher du nom de lieu Vantelay, Ventelay, est
bien extraordinaire. Selon M. Sachrow, p. 67, ce nom serait une faute pour
le Ventelais, de Ventelai -\- 5, formation à l'appui de laquelle il cite (Estienes)
li Viennes, tiré du Rôle des Vassaux des ducs de Champagne, ne voyant pas
que c'est là une simple graphie pour Viennes, Vennais (Viennois).
L'édition de M Schultz-G jra est précédée d'une courte préface où l'éditeur
traite de la date du poème et du nom de l'auteur ; il y discute aussi la valeur
- des mss. et expose le principe qui l'a guidé dans l'établissement du texte.
Puisque, comme nous l'avons vu, dans la classification de M. Sch.-G., le
ms. M vaut à peu près autant que tous les autres ensemble, l'éditeur se
borne à reproduire ce ms., s'en écartant seulement là où le texte est trop
visiblement corrompu *. Je ne relèverai naturellement pas tous les passages
I. Vov. l'étude de M. P. Meyer sur les mss. du Ronum d' Alixandre
Rom., Xl, 215SS.
3. Partout où M. Sch.-G. s'éloigne du nis. M il en indique la leçon au bas
de la page; par contre il ne donne les variantes des autres mss. que dans
certains cas spéciaux mentionnés dans les notes.
10 COMPTES R£KDCS
de moindre importjucç où, sdan moi, t*accord d^ fnss, prou^ qoll aurait
fallu adopter une autre leçofi. mais ) indiquerai ï*.-* endroits où j'ai lu autre
chit^ qiie M- Se h. -G, dans le ms ; je ^ignakrii aussi quelques otnissionâ oa
lapsus de ^ part, ainsi que d'autres cas J'une certaine importance,
V, 14 lïijîw, mi. m ). (de m^ie Wilmottc), ^ W 51 qui bon fuit ^fiwf/r<^,
lis* /il, avec tous les autres mss. — V. lî, note : is n'est pas nccessaireroenf
un nom- k mon avis; cC Face, dJw attesté à côté de oUf, et /ij» /iî- -^ V. 58
Fwf^, ms. J'ôr^ (de même Wilmortc)* — V. 54, note. D*apres cette note,
Fihii^ au V, 974, serait sujet i iî résulte pourtimt de h miducûon parfaitec-
ment exacte que donne F éditeur dans la note du vers en question que fiîùii
est régime. — V, 62 Qiit Xkhlas occhî ; KX Rqî N, vaut beaucoup mieux
(PS Quef. ^ V. 7î» note. I/cdîteur ne s explique pas k mot Paklrm
otTert p^f tous les nrss., et ^ demande si c'est le nom de la bni dé la reine
Candacc ou s*il faut restituer ^hmt, désignant la rdne cl le- même. Rien
n'est pourtant pfus clair; c'est le duc de Pûïaiîm qui avait ravi La hru de la
reine, voy, k Rom. d'AUx. jyi, 7 (var.), 574, „ (var), îi» 17Îi *S. 17^.4-
— V. So, note. Selon M. Sch.-G. le Rom, iTAtix. ne mentionnerait I Inti-
mité d'Alexandre et de Caiîdace qu'à la p. 497, au cours du rccît d'un autre
épisode; cîle est cependant indiquée déjà pp, 580 et 182. — - V. 108. Je ne
sab pas trop pourquoi M. Sch. G. ne conserve pas, ici et ailleurs^ la graphie
ftdi < filius Elle est intéressante par la métathése et tout à fait régulière
dans te m%, (elle se trouve en réalité déj aux vv. f 1^ 41, 84^ bien quHt n'en
soit pas fait metitionj. L'éditeur itriprîme bien tuk' < iiui (ikuf) 65 1^ 78^,
794. — V. T2a fis^ mit. Jui^, — ^ V, 199 ura imikurutevé^ 1. lermit (XS). —
V, aoa k pttus tt k gfUiihf L qui est p. et g. (NXQ.)> — V. 244 granJ^ ms*
grant (faute d'impr.). — V, 180 ss. et note. Ce passage est altéré dans M ; sans
parler de df Anlio^he, ce ms. est le seul qui écrive Aniigi^nm pour AntuKus.
Le fait relevé par M. Se h, -G* qu'au v, 1189 tous les mss. f>orteru A*di^mut^
ne prouve rien, pas plus que la prétendue confusion dans le Rom. d'Alix.
M. Sch.-G. aurait dû remarquer qu\'f///i;;,'t>wMi qui reçoit la Syrie p. 514 et
Antiocm qui possède Antioche p. 514 (cf. notre poème) ne sont pas une
même personne, et que parmi les dou^c pairs d'Alexandre, énumérés
p. 1 4 s^i. €1 1 7 figure aussi bien Aniiocus qu' Antîgonus. Liseï, avee NXQ :
i%me, d*Afitiocui m*Ht mmtt ^rani pie dti ; | La die d'Atitlothi tkut^ si in
fît satih etc. — V. ^2b trtj de Nubie ( : f/), 1. trtj ^irmné^ d. ci^dc^us* —
V. \\i akml leur ctjeiHittchie ( i f/), 1, el ont tant c tiemmchk' (NXQP). ^ V. 481
Baucfftt, ms, But4cant. ^ V. jot ss, lire // tvnt par kur jmtfuetj et mi tant
chnmuchi/ \ Qtia Faug renie viennent $i smt iôimtt et lié (KX); JOJ L jont fies-
cendu^ J04 mtmient, 505 Aliùr vùit Famani (NX); voy. Sachrow. p. jo, —
V* 507 Apfo la première moitié de ce vers Téditeur a omis deux hémî*
I. Je ne cite jamais O, mauvais ms. du xv* siècle et qu'on peut regarder
conime un descendant direct de iV.
scHULTZ-GORA, Die yenreance Alixandre 157
âtiches; le ms, porte Puis li a demauJc \ [^^ Comment as esploitié} \ Que me
manie Urois }]Avrade moi pitié} « — V. ^cm) </<',!. le (faute J'impr.) — V. 539
Mettre ici le guillemet et les deux points placés devant le v. 542. — V. 540
Et H hliaut forre a miinieres deuvie (NX), 1. plutôt avec QPS d\rmine bien
deiigiè\ M écrit et d^ennine enroulé. Pour le genre masc. du mot cf. R. de
Cambrai, 17 18, Si^j , ermitte deïgié. — V. 553 antii, 1. orgueil (KX) ; le mot
flwiii, qui figure au v. précédent, est inadmissible ici. — V. 569 Lis. Tel com-
fmigtte ne fu veuene oie (NX); voy. Sachrow, p. 30. — V. 575 AriUes s'acorda^
1. Aristé a., avec S (P Aristes a., i] Ariste:^ a.\ NX font défaut); avec la
leçon de M les vv. 577 sqq. donnent un contresens. — V. 629 ouques ne fu
tneillor, 1. aine hom ne vit m. (ainsi NX; QPS nus fx>ns ne v. m.). — V. 663
Juire, 1. /M/r(NXQPS). — V. 6^Candaleon, ms. Candeolon. — V. 739 tretuit
communément y 1. // Irahitour puant (N; Xpaiant ?). — V. 774 est haute d*une
loee donne une syllabe de trop ; le ms. porte e. /;. utu /. — V. 798 Lire
pesu (faute d*impr.). — V. 810 Irestoute, ms. tretoute. — V. 814 œuvre^ ms.
oevre, — V. 839 «n a ja près s'eisine, ms. pris seisine. Gjntrairement à ce
qu'en dit M. Sch.-G. dans la note, tous les mss. écrivent pris^ abrégé Ou en
toutes lettres. Il est vrai qu'en réalité Alior ne s'est pas encore emparé d'An,
tipater, mais cette anticipation n'est pas plus frappante que celle de Florent au
V. 1485, par exemple. — P. 853 sont li molin fennec, 1. ont les molinsf. (NX).
— V. 862 Voy. plus haut. —V. 895 croissie, 1. trenchie (NXQPS). — V. 907
catdaus de tir, 1. de Tir; de môme 1627, 1654 (cf. piiiles de Tir Narb. 3973)s
Ce nom ne figure pas à la table des noms propres. — Vv. 1015 et 1042 II ne
me parait nullement certain que le v. 1042, Seigneur le roi d'Ongrie, qu'il en a
grant mestier, contienne une faute commune à tous les mss., comme le veut
M. Sachr., p. 27, ni que l'auteur ait confondu aux vv. 1017, 1023 et 1042
le roi de Bougrieax t amiral de Hongrie, comme le suppose M. Sch.-G. dans
la note du v. 882. D'abord, il n'y avait pas de roi de Hongrie dans l'original,
à mon avis. Je crois, comme M. Sachrow, que cette épithéte a été intro-
duite par M, ou plutôt par la source de ce ms., peut-être à cause du v. 883
Lts Hongres et les Bougres ot en sa compaignie ; les ms. PS écrivent deux ou
trois fois roi de Bougie, par conséquent cette expression remonte à la source
commune de MQPS, En effet ce n'est pas, comme le dit M. Sch.-G. dans
la note citée, seulement au v. 1042 que M porte, -- ainsi que tous les autres
mss., — le roy d*Ongrie, mais encore au v. 1541 : Fiert le roy de Hongrie
elc, ; par contre il écni amiral de Bougrie 131 3. Il y a donc s;ms doute eu
dans l'original un roi et un amiral de Hongrie (ou d\)ngrie). Au v. 1042 (cf.
ci-dessus) on s'attendrait, selon MM. S. et Sch.-G., à voir figurer l'amiral,
car c'est lui qui se trouve dans le danger le plus imminent et qui, plus tard,
est fait prisonnier par les Grieus. Seulement, une trentaine de lignes plus
liaut, v. 1015 ss., il a été parlé aussi bien du roi que de Vamiral, et celui-là
étant le personnage le plus important des deux, il n'est que naturel que ce
soit pour lui qu'Antipater appelle le secours de Florent. C'est qu'après le
V. loi 5 il manque dans M (et dans N) cinq vers que l'éditeur n'a pas cru
1)8 COMin'ES RKNDUS
ilc\'oîr intfOtiuia% mais leur authenticité est assurée par Taccord de XQFS,
et, Lomruiremcnt â ce quu dit M. Sch.-(j., ïb îioiK absolument indispensables
pour le 5cn!i. Voici k passagts :
1015 II (le frère ^ AUùr) fesst* corre a eut lantcum chevil il rent,
A'ÇPS Sus Tcscu J*^ son col va ferir MnlploiaïU f A' Maupriant),
Le cuer au 'il ot ou ven:re en deus moitiés li feni :
Si ion rabat 1 tîiort qu'a la terre Testent (Q s'e. ),
Quant ce voit Tamiraut s*èn a le cuer doïent ;
Il let corrc vers ek crnircval un pendant,
Onque!^ \a genr Pilote ne st mut Uni ne qujnt,
Et li rois Je Hongrie i viem csperonn;»nt*
Lors rennembira Pilote de cel coma rudement etc^
Kt tuit li .Tsxît* de leur tomoiement.
Remarquer Te x pression kiir Ummitmetn qui vient il Tapptii de ttioti «pi^
nion que le roi eï-l'aniiral sont du même pays. L*absence, dans M et ^V à k
fois» des vers rnis etitre crochets^ s'explique par la ressemblance entre le
V. 101$ et le dernier des vers omis. — Pour les vv* io>6-S voy. plus haut* —
\K 1066 hf$ a tfet h l^rum hw^, I. Ion fu (NXQ). — V* 11^7 vùtdt^ ms.
liiWf (qu^oil peut niiturellement interpréter vuiêe) i de même 1469 TX \eii
IS\1. — V. 1201 Apréi. ce vers îediieur d omis une ligne qui se trouve
dans le ms> ; [Tlx .Ix. h^mespi apffi lui aîrr]. ^ V, 1296 iv^ emmjmtt'mftti^
l, m« i\ (NXPS; lacune dans Q.)* - V, 156a /r^, ms. tti. — V*, 1^65 t^n-
gement, ms. vitigemem. — V. i\h^ Jdre^ txii,fete, — V. i^o dhl À!hr, l.
« disi Phihti fXK). Le roi qu\ répottd, au v suivant, tie peut guère ùttv
qu*Alîor. Cf. aus^i le v. 1^77- — V. 1410 puhf, ms* puiisc. — W 1425 ti
sont si aprûchif{^ ], u tfi ont a., ivec NX^ ou ses ont si a , avec PS. ^ W 1427
çéiimi'^. M. Sch 'G. observe dans b note de ce veiï que Godcfroy qui
sépare loi^nifr cl migmrr na qu'un ex., du XV"-^ siècle, de cette dernière
forme. A vré dire je ne sais pas pourquoi Téditeur a introduit cette graphie.
qui ne ic trouve dans aucun des mss, : Ai porte, à ne pas à\v mèprenda',
cuirif^, — donc une leçon différente, — Û P écrivent i'<îjV""\» ^ mtsgme^:
NX chang^t. - V. t447t ttotc (cf. aussi lu note des w. f^i-^sf) M. Sch.-
G. s'étotmc de voir ici Lkuttor et Fihtr appelés frères, €t incline â croire
qu'après 1446 il manque un vers dans Icquul 11 aurait été parlé de Candeelui
et âi'htri, les frères dWlior. Il n'en est rien. Ce qui est plus étonnant c'est
que le savant éditeur n'ait p^s remarqué lespssages suivantsdu Rom. d'Alto,:
Frerf eitn^ ft iiwi [Licanor et Filotc] ri d'uni compiitgHie >iî,ii, Frrrr /u
Lkmw [FlloteJ i/wi tant oi vas f loge M^^a* Les deux y sont trfo souvent
nommés en>embïe, p. ex. 1$. j, i7itr» 65,11, ctc, La ponctuation de
M. Sch. -G, c^l mauvaise : effacer le point après 1446 ^i mettre le v. 1447
enta* parenthèses, — V. 14 çB U*rs qI mti Rc^kjîifr mairie brcgne tarti^
donne un contresens; c'est une faute du seuJ ms. M pour iaiue. — W 1570
Lire .m. hùmn t&^ (ou bkn) arm^; c(. h note du v. ai. — V. 106 U gûn
scHULTZ-GORA, Dic Vengeatice Alixandre 159
taiion levé {: f^), 1. coin fatuon mpenne^ (ainsi QPS; N comme hère aire^i X
c. bofH il.). — V. 1 592 u SON Iref, I. a se<:;;^trei^ (avec Q.S; N 5<':^ wt*^, X son Ire,
P 5<^« 1res). — V. 1629 et note. Le ms. P a en effet la bonne leçon que il
ttt{l]pot soffrir. La coïncidence entre M et N doit être fortuite. — Après le
V. 1693 Téditeur omet de nouveau deux lignes qui se trouvent dans M
comme dans tous les autres niss'. : [Et cens de Rochejîor fet en poudre venter. La
moitié de ses tentes a il fet destraver]; lis. plutôt, avec NX, La moitié des esjors
(Nestours) a il fet desarmer (X destorner). — V. 1726 ()/// // // fet etc., 1. Li
ont il f. (\FS). — V. 1729 Mont feist bien entreuSj \. seist (NXPS) ; avec
Jeist il Caudrait un le que la mesure n'admet pas. — V. 1760 Lire, ou
bien avec S(P) : Car cil qiies d^struira leur estait trop proclmin, ou plutôt
avec N : Car cil les destruuont qui leur sont t. p. — V. 1802 cil les aperçoit :,
1. s'en a. (NX); le plur. ne se comprend pas. — V. 18 14 O vaure:^ vo
déserte^ 1. Ou avrci. D'ailleurs le vers est interpolé. — La fin du poème
est très altérée dans le ms. M, notamment on y trouve, surtout dans
les laisses 75-77, un grand nombre de vers interpolés. Je n'en relèverai
ici qu'un, 1857 : Tant i ol de traîtres que le nombre n'en se, dans une
laisse en -ê; cf. plus haut et Sachrow, p. 45. — V. 1855 et note. L'accord
de XXQPS prouve que Divinu<pater est original (ou du moins qu'il s'est
trouvé dans la source commune de nos mss.) et que la leçon de M est le
résultat de la correction d'un copiste étonné de rencontrer ici tout à coup ce
nom, qui n'avait pas été mentionné auparavant dans notre poème. Remar-
quez que la capture d'Antipater a été racontée déjà dans la laisse 74. D'autre
part je reconnais que le début de la laisse 76, tel qu'il se lit dans les mss.
cités, est assez curieux. Le voici (v. 1853) : Quant cil de Rochejîor furent pris
et maté QPS — Florent e<toit moût preus si avoit grant biaulé (Q.PS bonté) —
Et Divinuspater, qui avoit mal pensé, Li Grieu se vont arm.r etc. Pourquoi
Divinuspater n'est-il pas « de Rocheflor » ? ou y a-t-il eu FI. qu*estoit dans
l'original ? Pour les qualités de Florent cf. les vv. 1707 sqq. Le ms. Q., qui
prend souvent de grandes libertés avec le texte, se rapproche de M en écri-
vant : Et Divinuspater qui le mal ot pensé | De quoi rois Alixandre fu mors et
dévié, I (A'ttipater i fu au conseil apele) \ Les grieus etc. Quant au rôle de
Divinuspater dans le complot contre Alexandre, il est à observer que d'après
le Rom. d'Alix., p. 370, c'est en effet lui qui propose le premier d'empoison-
ner le roi. P. 504 où le récit de la trahison est repris depuis le commence-
ment, le texte de Michelant paraît un peu embrouillé, mais c'est bien
Divinuspater qui dit, v. 22, Boin conseil ai trouvé, se il vous atalente : | Nous
li donrons venin si que la mort en sente. Il semble que l'auteur de la Ven^
geance, qui jusqu'ici n'avait mentionné qu'Antipater et Cassadrant, suivant,
en cela le récit de Justin », se soit ici rappelé le rôle que Divinuspater avait
I. Voy. Sachrow, p. 70 s. Cassadrant est inconnu au Rom. d'Alix., comme
Divinuspater l'est à Justin.
l60 COMPTES RENDUS
joué dans le Roman, et en lait il continue à parler, par la suite, des w sers •.,
des « cuverts ^ (au plur.; qui avaient empoisonné leur seigneur et qui atten-
daient encore leur punition, bien que C^ssadrant soit mort depuis longtemps.
On remarquera spécialement les vv. 1881 sqq. et 1894: de ce dernier il
résulte que les « félons » étaient deux *. — V. 1882 trai'rent, ms. traitrent.
Comme on aura pu s'en rendre compte par les remarques précédentes, un
texte critique établi d'après le schéma que j'ai exposé au début de cet
article différerait sensiblement de celui de M. Schultz-Gora et aurait un
aspect bien plus archaïque. Ce qui n'empêche pas celui-ci d'être déjà assez
satisfaisant. On ne saurait nier que la présente édition ne porte des marques
d'une certaine précipitation, nuis ce fait s'explique sans doute en grande
partie par le caractère même de cette publication ».
E. Walberg.
1. Le ms. .Vf seul appelle, dans des vers interpolés, 1841 et 1857, traitrst
tous les hommes d Antipater. (iiant à Florent il était le fils d'Antipater,
mais innoce.. t du meurtre d'Alexandre.
2. Le livre porte cette dédicace : Ftau RittergiUshtsit^er Schidli-Gora ^um
2 if Sepiemhir it^oi.
PÉRIODIQUES
Archivio glottologico italiano, t. XV, puntata quarta, Turin, 190t.
— P. 411, suite du travail de M. Giacomino sur la lingua delV Aîione.
— P. 449, Lt hasi al nu s, al ne us, ne^ dialetti italiani t ladini di C.
Salvîoni. Excellent travail de géographie lexicale dont nous ne pouvons
résumer que les conclusions : alnus, alneus-a sont représentés, soit
directement soit par des dérivés dont on peut déterminer Taire d'extension,
en Rétie et dans presque toute Tltalie. Les formes avec -///- (p. ex. émil.
umdan) sont dues à l'analogie de olmo ; les formes avec (>, là où q ne peut pas
provenir de a + 1, sont dues à l'analogie de olmo ou de orno. — P. 456,
C. Salvioni, anc. esp. yengo^ ^ngar^ engtudad. Addition à l'article de M™* C.
Michaelis de Vasconcellos sur ces mots dans la Miscellanea Ascoli, p. 521-537
(cf. Romaniûy XXX, 576). M. S. fait aussi remonter ces motsé ingenuus,
mais sans recourir à la métathése admise par M^c de Vasconcellos. La série
des formes serait ingenuus > *genuus (cf. fante<i infantem) ^ yenguo
(cl. yema < gemma et menguar < minuare) > yengo. L'a port, engeo
devrait àès lors être considéré comme une forme savante incomplètement
assimilée. — Anc. esp. brecuelo. Rattaché àvehiculum > *beklo > *bleko -h
'Ueh, — P. 457, La vocal tonica altèrata dal contatto d'utta consonante labiale di
Silvio Pieri; p. 476, G. L Ascoli, Osservaiioni al précédente lavoro. M. Pieri
s'est proposé de montrer qu'une consonne labiale précédente ou suivante peut
abréger ou même faire monter d'un degré la voyelle tonique, c.-à-d. changer
ê ï en è, ô û en ô, î en i(ç), û en û(q). Il accompagne sa proposition de trois
listes d'exemples, les uns se trouvent à la fois ou séparément sur des points
différents de la Romania, d'autres paraissent limités à l'Italie; d'autres
enfin, surtout italiens ou ladins, tendraient à assurer l'influence supposée
même dans le cas où la consonne labiale est séparée de la tonique par une
liquide. M. P. pense, ce groupement le prouve, que cette influence s'est
produite à des moments très divers de l'évolution romane et même dés
l'époque latine ; parfois l'influence a pu se faire sentir à deux degrés : î > ï
>> ê. Dès lors il est assez étonnant que les exemples de cette influence,
qu'attesterait l'ensemble ou une fraction importante des langues romanes,
soient si rares dans les listes de M. Pieri. M. Ascoli, dans ses Osserva^ioni^ a
soulevé cette difficulté, et, tout en remettant un jugement définitif après com-
plément du travail de M. Pieri, il a présenté, avec des objections ou correc-
R^mênia, XXXU 1 1
l62 pèRIODiaUES
lions de deuil, quelijues rumarqucs préliminaires mlt^ â résumer : pour pou-
voir auribuer les phénomènes consiaiés â Tinfluence des labblcs, inHutncv
dont oti ne saurait d'ailleurs donner d*expIicatioii physiologique, U faudrait
dresser une statistique comparative des cas où ces pbénomènes se produiseny
en présence Je labiales ou d'autres consonnes, ovu < ôvuni et it. dqglîo
doHum, en tenant compte Ju nombre des labiales dans Talphabet cl de
h fréquence relative des cotisonnes des divers ordres auprès de la tonique ;
y Taudrâtt encore faire le dépan entre les mots paroxytons où la tonique
est en syllabe ouverte et les mots proparox)'tons ou paroxytons avec
tonique entravée, Tabrè^jerneni de la tonique pouvant dans ce second groupe
j-étre dû à la position. Ce départ fait, il ne reste de la pri;miére liste de M. P.
qu'un sixième environ (zt mots sur 125 exemples) pour lesquels en général
la modilication de la tonique n 'apparaît que sur un point de la Romanla et
peut s'expliquer souvent en dehors de toute influence des labiales voisines. —
P. 48 1, Posliik kssiciili sardf dî C, Nigra, Nous ne pouvons que signaler
cette précieuse contribution àTétude du lexique sarde, qui intéresse une ccfi-J
taine de mots* — P. 494, !^ok HiuwlogktM t ksikali di C Nigra, quînt«l
série* 1. Ital. armetîitw. abricotier, forme dissimilée de *afmfiiifm de Arme-
nia. — 2. Mil. hottûm^ dé bris ^ < nid. hott^ morceau, -J- suff. coUeciif -u$n£.
— i, Bell un. buHsÊjffiîtisŒ, De ytiviliisca. — 4, ItaL ^artfr,fr. hoamr^ prov*
hùurra, etc. Ge verbe se rencontre en France, Provence, et dans la Haute-
Italie. Il présente des formes en -are, -ire, C-re, la fonne en *are éLini
vraisemblablement primitive, Toutes ces formes auraient leur commune ori*
ginc, malgré les différences de sens, dans "burra, si Ton admet le passage ,
de « rembourrer n à w fouler », puis à m poursuivre ». — J, liât. çaççhûmÊA
larve < cmchiù (de cal ulus + nine). — 6. Amora fil, « mrpGm & (cf. Arch,
Glûtt., KV, 28 ï). M. N. n'admet pas Tétymologie de M. Pieri (Miîcdlmtiû
AiCùlu 498» cf. Rotftania, XXX, 573) et maintient carponi < germ, krampf;
de plus, le rapprochement du fr, crapaud et d*exprcssions de la Hautc-IuUe
équivalentes à carpmty mais formées avec des mots désignant le crapaud, per-
mettrait de préciser le sens de cmpom « à quatre patteSi avec l'allure du cra-
paud »» — 7. It. ctîio. M. X. défend contre M, Pieri ï'étymoloigie ùtîia
<secessunî, attestée en particulier par l'existence de stcesso au même sens, \
— 8. Ancone mmbott^ ckmmuoîiOj crapaud^ < lampa, — 9. Fr. occi4. esveik^ \
alevin d*anguille. Diminutif de d^^ féminin de au < caecum; cf. it. de-
cditfûi m. sign. — 10, Tosc> dîal, fùfacci% *^(^ sartie pava^ia; mécathèst; réci-
proque âç/Lxmm. ^ u. h. Umitart^ bruiiKr. Du lat. lima. Mais le rappro-
chement du travail lent de ki lime et de la chute lente de la bruine parait Hca
forcé, — î2. Rifhm nH>htmi M ma tari», javelot. M. N. cjtplique piir
*matlâris plus un suffixe augmentatif les fomïes françaises et provençales ,
wmUrus, etc., trait d'arbalète* Un rapprochement entre la pointe triangulaire
du trait et la tétc de certains reptiles fit appliquer à ceu\'Ci le nom du trait
(exemplei italiens et frioalans pour mata ris, exemples italiens et français
pour des mat* arulogues)* Un autre rapproche nient entre ta forme du reptile
PÉRIODIQUES 163
et k col fin des mat ras de verrue serait l'origine du notti de ceux-ci en it,,
maîracch^^l en français. -- 15. Un anîka mdakst « Mkouf-Ci motte ». lï s'agit
de Mycon, ail ailé dans sa prisoi:i par sa fille. Son nom est attesté par Hygin
{fab. 154) et par la Jégt;ndc d'une peinture de Pompéi, mais Valère-Masime
(V, 4) rappelle Cimon. Est-ce une îaute de scribe? La k^^ende étant populaire,
ce pourrait être le résultat d'une métathèse qui impliquerait le maintien de c
comme palatale pure devant i encore au i^^ siècle* — 14, It, nâvûla, esp. nrM\
pTQs\ nubk\ prov, ntbk^ nimni^ ven. ttibia, etc. La première série postule
*nubùla| diminutif de nubes ou résultat du croisement nebûla + riuhUa,
avec des différences de déclinaison; la seconde, à laquelle appartient le ttihUs
deBoècc(cf, pour nibks < *nub il is Thomas, Romanm^ XX JX, 585), s'ex-
plique îur nubila^ avec métathése des voyelles. — 15. Rijkîsi di « oblaia,
ôblatnm n. Formes germaniques prises par ces mots avec !c sens ecclésiastique
et le sens profane* Obi a ta serait revenu du moyen haat-allemand au français
et k ritalien du nord, avec sens profane plus ou moUis étendu. -^ 16* Bcîlun.
étmgûy nausée pour Vûmtga{çt okr <i vo 1ère) de voraîca, — 17. Cônu
orahbiy pour rùahhi par métathése < *ro ta bu lu m, spatule, — iS. Ven. bel-
Itin. ar-Ufo, orvti>o, friouL ûn.'h\ bord de la trame restant à découvert^ de orlo-
viv0^ et sarde %foraîHva et it. t'ii'ùfiw expliqué par M, Pieri (d. Roman ta, XXX,
616)* — 19* Pîcm. ptsst et formes voisines, « engourdi i>. De pïcem(cL fr.
empesa).— 2^. It. rospo fil. nord rosi{o% lad. rmsc. M* N* abandonne le rappro-
chement avec le germ./rDsè et ramène les formes italiennes à 'broscus, (cf.
bruscus, rubeta, dans Papias); rospo serait pour yrospa, par métaihése de
*btoxai. 'Broscus est appuyé par le roum. bioascà. — 26. BeUun. sgarba^
mamelle pi due, <germ. *skarpa; exemples de transformations sémantiques
analogues. — 27. Gén . stralahU, r ad oter de a s t r o 1 a b 1 u m * par su i te d 'u ne
assimilation populaire facile à comprendre, — 2S* Val Brozjto turdôi, orgelet,
de *triliceolu m . Le d anonnal peut être dii à Fanalogie de l'équivalent arJoi
< h o r d e o 1 u m . — 29 . Va 1 B r . uieUa , h î rond el le * Fé m . de usiU r= uccello ;
h changement de sens et de genre est remarquable. — jo. Dérivés et com*
posés de ultra dans le franco-provençal et V'n. du nord, — P. jU, indki
di C. Salvioni,
Ce fascicule contient avec les titres et table du tome XV une noie AgU amici
ddf Archlvio où M. Ascoli annonce, en termes émus, qu'il remet la direction
de ÏArchivio à M. C. Salvioni.
T« XVI. punt. prima, Turin, 190I- — P. 1, Salvioni, Dr dun^r wxiutlla
poesia popokr^scû aliù Haliana. Cette forme n'apparaît que dans Tltalie du
Nord, seulement dans U poésie et plus particulièrement dans la poésie narra-
tive; elle n'appanicnt pas à b langue parlée. M. S, Tcxpliquc ingénieu-
sement comme une extension analogique de la préposition légitime dans
la formule initiale canUir me plas d*ufju cançon ou analogues; la langue
de la poésie populaire n'aurait plus compris la différence entre cmlar,^ ifiina
et una mn^cn, — P. 7, Engad. sèh^a^ valteU. sobîga\ de subllca. avec
sufiâxe accentuèj dans la seconde forme, sous Tinfluence de Tacccnt nation
j64 pèftioDiaoEs
floctaïuc des déverbaux en ica. — P. 9^ V. dt; Bartholomads, Cmtrihuii
alla cùTtosan^^a liéi dkkiti tieW îtaVm maidiottaîe n/ itcoH ankriofi a! Xf//* —
II, Spog^tw fkl CQiies dipîomatkus cajeunus- Les chanes Jaunes étudiées ici
vont du vuK au %m^ sièdt.% et appaniciinent au duché de Gaëte. Dépouilîe-
ment phonéiique^ morphologique et lexical, celui-ci très intéressant. ^
P, 28» V, de Bartïioloîiiads, Un antka vetsiotte dtl « IJbro di Sydra€ »
in vûlgate dt Terra d'Otranio. Cette version appartient à la région de Btin*
djsi. Le manuscrit qui nous en a conservé dts fragments étendus est du
XV* siècle* C'est en dire riraportance pour Tétude d*un dialecte très pauvre
en textes anciens. M. de B. public une petite partie du texte et l'accom-
pagne d'une étude linguistique de Tensenibîe, — P, 69, Bgloga pdstoraît e
Sùttttli in tUaktto htîiuntse naiico dd itc. Xiîî, eâiti a cura di G. Salviooî. Le
manuscrit qui a conservé ces ie:xtes (1112 vers) attribue Féglogue à Messer
Paoîo da Castetlo; Tattribuiion des sonnets reste douteuse, L'enscrablc
appartient à la première moitié du xvi« siècle. M, S* ne publie ici que le
texte. — P. 104, lomb. vtrii^ èire nécessaire; M. S. propose la série opor-
icre > *mmrti > * oi^irti par dissîmilation- — P. los^ E. G. Parodi,
Siudi (ignri , $ }i II diakUù di Goiava dai ie£^>h X^l ai nosiri giûrm. Pre-
mitrre partie : vocalisme, — P. 161 » S^lvioni, Etinwhgie : mirmn^ia pour
imnantiû est une ex^teosion de b prononciation scolaire du groupe latin
-t tiv au groupe -li^; surselv. stpkM, se blottir, de'placicare < pU-
care ; vén. bamik^ lucarne, M. S. y voit un dérivé du radical baj-(bad-)j
• iHijoral > knorai (cf. Ktii. JaJirak, JV^ i6K)> haardl ou Imrcdî; crémon*
gr^ot de -rûtuiUj comme l'italien aoccMOj mais avec maintien de la post-
tonique. *- P- i^lt S. Picri, La sibilantt ira vocaU ndV Udiam^ a p* 17 j,
Âseoli, Àncora délia sibilante ira vocdli nd îmcam. Meycr-Lûbkc a posé la
règle: lat. s entrt* voyelles > It* % (sourde) après Tacccnt, i (sonore) avam
rajçccnt* M. P. réunit un grand nombre d exemples et propose une formule
toute nouvelle : la t. s entre voyelles > it. s, les mots qui ont i ne sont
pas héréditaires. 11 faudrait alors admettre un emprunt pour des mots comme
va$Q (viRp). M, A. ne le pense pas. Il propose une solution d'un grand inté-
rêt pour b phonétique latine : 5 et :( sont réguliers en italien, mais corres*
pondent à des sons latins différents, i < {n)%yrimase, mtit < rema(n)sit^
mcn(s)c, etc., ^ <C s vraiment intervocaliquep «5ir, visii{ii\o^ vi^o) < tisa,
visUi etc. Il y a des exceptionSp que M, A. explique par des influctîces
analogiques. La démonstration est admirablement claire et parait convaln*
cante. — P, 174, Salvioni, Etimukgiâ : Haute ïtaL cr^, lifrck, îifrÔH, —
P* 192, Salvioni, Cronaca i hlktino bibliiTgrafiLO : Miicdlnv^a Audi y Raca^iu
di studii criiid didiùata ad. A.d'Âtuana, Scriui vari di filologiû.,.y o^eris k
£, Monaci ; livres divers.
MAttïo Uoat;is.
PÉRlODiaUES 165
Studi glottologicï ïTALiANi, dîrettî da Giacomo de Gregorio, t. IL
— Ce volume contient huit études dlmponance diverse etsiir des sujets
plus divers encore. Nous ne signalerons que celles qui intéressent ïcs roma-
nistes* P* 96, dans des Racimolature ^httoh^kht^ M, R, Sabbadini cite
deux passages d*Andrea Brenta et d'^Eneas Silvius Piccolominî qui attestent
ù\tz les humanistes du xvi= siècle le sentimem de rafTinîté du [aim cl dti
roumain. — P. 101-115. Manipoh ai etimoh^it ml diahttù sûrdo mit ko t
*Mi)(/4'f«o di Tito Zanardelli. — W [15*128. H consondtiihrtto deî {iiaktiù ^aUo*
iiafico di Nicmia in Siciîîa âï M, La Via. Une ^nude du même auteur sur le
vocajîsme de ce dialecte avait paru au t. I des Studi; nous trouvons ici une
(collection de formes classées d\iprés les consonnes des orîginauic latins
qu'elles représentent, mais sans aucun essai d^explîcation des destinées
parfois très diverses d'une même cof^sonne. — P, 225-258. Su^Ji fkmmti
ûmht ntJ dialHîoe ntUa iopùtwmasiîca drîTitùladi Panttlhrla di G, de Gregorio
c C» F, Seybold. Le dialecte de Pantelleria tCù. été jusqu'ici Tobjer d'aucune
étude. L1le a été occupée par les Arabes dès la fin du Vïic siècle, l'arabe y
était encore parlé au xvitie ; mais la population, réduite en 1798 â 600 Imes,
a été portée dans le cours du xixt siècle à près de 10 000 pir des émigrations
siciliennes. Aussi le dialecte actuel est-il sicilien et conserve* t-îl très peu de
termes arabes. Le trait phonétique le plus important est Texistence d'une
gutturale analogue au j espagnol* Mais h toponomastique présente de
nombreuses traces de Tinlluence arabe, ^ P* 239-245. M* Niedermann,
Daî Vtnchrtiîitn, Collection de fautes relevées dans des dictées à IMcole
secondaire de jeunes filles de La CbauH-de-Fonds. Le texte dicté était
français. Les fautes, soigneusement classées d'après la nature et la cause
probable de l'erreur, sont pour la plupart bien connues des professeurs
(prùpToiê\ cairMdrtiU, etc.)- Elles peuvent toutefois servir d'illustrations à
quelques remarques de M, G ra m mont dans son livre sur la âissimihtwn con-
smanîiqm {2^ partie). — P. 248-^01. Ânccra per il principio délia varidd dt
ûrigitîe dd diakUi gallo-italin dt Ski lia di G, de Gregorio. Nouvel épisode de
la discussion entre l'auteur et M. Salvionr sur l'unité ou la variété originelle
des dialectes de San Fratello, Pia^^a Armerina, Nicosia, etc. (cf. Rottumia,
XXVI 11^ p. 70 et 409 et un exposé très sommaire de la question par
M. Schneegans dans Zeibâh f. Hotn, phiL, XXVI, 375). M, de G. réfute peu
des arguments de M. Salvionï, mais son étude est importante par la nouvelle
collection de mots qu'elle contient, et qui distingue entre les formes de
San Fraielîo, de Pîazza et de Nicosia. A ces formes sont jointes les formes
siciliennes coircspondantes. Le travail est complété par 11 m pression d*une
assez br)gue poésie de Nicosia, avec, en regard, la traduction dans le dialecte
de San Fratello.
Mario Roques
i6é
PÊRJODiaUES
ArCHIV FÛft DAS StVDWU DE» KEUEREK SfRACKEN UND LiTTBKA-
TUREN, CÎI (nouvelle série II)* — P. 109, A. Tobler, Ziit Lt^màt von hdîigtn
Julkmus (Suite et fin ; contient le texte de w la Vie de saint Julien *> en vet^,
d'ipros Iem5.de TArsenal» avec notes explicatives. — P, 179, A/Pillet, Dk
aïtprairniailscht LîiiM)ûndschriJi N • (suite et fin). — Comptes rendus. —
P. 114, Suchier, Aucassin und NicQkk {Schu\m). — P. 229, Oebtier, Dunti
in Franhrmh hh inm Enât dis i S JahrhttinirrU (Wîese; éïogcs). — P, 441, C*
Kîôpper, Franiô^ischâs Rmlkxihn (Risop). — P, 446, Ludwig, Z/i/v dt Vegat
Dramm ans dnn KaroUnghchs Sagathrêist (Farinelli; c. r* très détaillt* cï
éîogieux). — P. 464, hidz-x lu dm v^humchaftUcyn ArheUtn Wemhfikys
(Kolsen), ^ P, 466, Clédat, Chansons de geste. TraiituHrn (Tobler; dés-
approuve le procédé).
cm (nouv. série III) . — P. j^s, G. Dobschall, Zv Fttrarms Smmi « Bra
iî gwrtio cfiat sot si scoloraro m, — Comptes rendus. — P. 208, Thomas,
Essais de phihlogie ftaftçaist (Cohn ; c. r. impottant). — P. 40^, Fricd^A-agner,
hferaugis mn Ptfr//«^ttq (Ebelîng : d, Zdticlmfi f. wùrn, PhiîùLy XXIV^ 508;
XXVI, 4va, SS2- — P- 4P^ Heuckenkamp, « Le Cmiali», par Alaim
CJMtrtifr (Kraose; éloges). — P* 434i Molenaer, U Ihrfs du jfwrt^-
wm^nt di's rm »^ a X///'* ctntury Jrench version 0/ llgiiîù Coî<mndi
Irmiisr a dt regimim- prinâpum » (Tobler). — P, 4^9, Rydberg, Zur Gtschkhu
dis/rani^ 3 (Meycr-Lûbke ; éloges). ^P. 441, Weslholm, Èhtdt bhU>tîqui sur
la cmuttmtmi du type w /i Jï/^ h rn » e^t français (Tobler). — P. 451, Hi^*
iùifi'^e la hngui ft dt k Vméûîurt frmmiîe dn origints à 1^0^ publiée sous
la direction de L. Petit de Jullevillc (Tobler). — P, 459^ Schneegans, Gesia
Kiirûiî Magni ad Carcdssonafn et Nathmum (Vûlcl). — P. 467, Torrcs, Grmna-
tÎŒ hisl0rh4H:omparadu di la Itngm m<teUana (de Mugica; réserves).
CIV (no u V, série IV). — P. 331, G. Stcflfens, i>i< altfran^ô^isclje Urd^rîxind'
ichri/l der Badhiana in Oxford, Douc^ }o8 (fin),— P. 129, Ebeling.^M < F#r-
mmhtt Bdtràge m, III, 14. — Comptes rendus. P. 219, Marchot, î^ r0mm
hrtion m France att moyen dgf; Wechsstcr, Die Sage l'om hiilig€H Gral (Frcy-
mond)* ^ F. 2ïi, Bruckner, Charakteristik der gtrmanisctm^ Elemmte im lia*
litmUihfn (Mackel). — P* 2^0, Levy» Prm^enialisclMs SuppkmerU'H'ârterbucK U
(Appel). —P. ^i, G. Paris» Lu littérature normande avant ranntxum (913-
120^) (Tobler), — P. 14s, R* Tobler, £>ï> aliprmvn^aîisehe Venion der « Dir-
tkljts Catotus M (Suchier), — P. 426^ U'ilmotte, Us Passions alî^mandes du
Rhin dans leur mppot t avec Ftwiien iffèdlre français (Cloêrta), — P. 428, Jc;in-
roy et Guy, Chamonset dits artt'siensdu uu'S* (Cloêtu). — P. 468» Sabersky,
Ueb^r iinigeNamen vùn B^en^ 'IMlern^ ik\ in der Vmgeimng inm Madanna di
CamplfVw (Gartner),
CV (Kouvcîle série V). — Comîïtes tmàm, P- içf. A, G Ott, Étudf%
mr Iti mulemî en xnftLx jranaus (Tobler; éloges et correct ions). — P. 194^
E* Walbcrg, Le Bt-^tiaire dt Philippe de Tljam (Tobler : éloges). — P. 197^
Sdmon, Les Coutumes de Beau vai sis de Philippe dt Beumnanùir (Tobl^;
éloges). « P. 203, G, Lenér Us uéstantift p&slverhaux dam h langue frmi^
PÈRIODiaUES 1 67
çaise (Tobler : élogieux). — P. 429, G. Kôrting, Der Fortnenbau des franco'
sischen Nomtn in seinen geschichtlicheii Entwickelung dargestellt (EhQ]ing', réserves
et corrections). — P. 445, *0. Schultz-Gora, Zwei alifrau:(ôsische Dichiuttgen
(Risop). — P. 45i,Nyrop, Grammaire historique de la langue française IÇRisop;
très élogieux). — P. 454, E. Nonnenmacher ^ Praktisches Lehrhuch der altfran-
lôsischen Sprache (Risop). — P. 465, Rennert, MaciaSy 0 namorado, a gali-
cian Irobador (Tobler).
CVI (Nouvelle série VI). —P. 113, F. Liebermann, Ueber die « Leis JVil-
clme » (Sur les mss. fr. et lat., la langue et la date des Lois de Guillaume
(1100-1120). — P. 294, R. Tobler, Die Prosafassung der Légende vom heiligen
Julian (cette première partie contient Tintroduction d'une édition de la ver-
sion en prose de la légende de saint Julien, composée dans la première moitié
du xiiie siècle ; Tauteur admet une rédaction intermédiaire entre l'original
latin et la rédaction qu'il publie). — P. 324, A. Schulze, Nette bihliographische
Mitteilungen, — Comptes rendus. P. 195, Kôrting, Der Formenhau des fran-
^ôsischm Nomens (EhçXm%\ fin). — P. 207, L. Wiese, Die SpracJje der Dialoge
des Papstes Gr^f or (Krause). — P. 221, F. WulfF, La rythmicité de Talexan-
drin français (Tobler). — P. 426, Wamke, Die Quellen des Esope der Marie de
France(Cohn ; compte rendu très détaillé). — P. 456, O. Zimmermann, Die
Totenklage in den altfran:(ôsischen Chansons de geste (Springer).
CVII(Nouvellesérie VII). — P. 79, R. Tobler, Die Prosafassung der Légende
vom heiligen fulian (fin; impression du texte). — P. 114, ^. Tobler, Zu der
Ausgàbe des Sone von Min^oy (nombreuses corrections au texte de Goldschmidt).
— P. 129, H. Weiske, Quellegeschichtliches ^u Aimeri de Narbonne.» —
P. 134, F. Liebermann, Zu den Leis Willelme (cf. Arch., CVI). — P. 338,
C. Appel, Wiederum lujaufre Rudel (cf. Romania, XXXI, 472). — Comptes
rendus. P. 203, P. Genelin, Germanisclie Bestandteile des ràtoromaniscUn
(Sursehischen) Wortschat^es (Mackel; réserves). — P. 219, Kohler, Dantes
Heilige Reise,freie Nacljdichtung der Divina Commedia (Arnheim). — P. 221,
Th. Koch, Catalogue of theDanU Collection presented by IVillard Fiske (Tobler).
— P. 444, O. Sôhring, Werke bildender Kunst in Altfran{ôsischen Epen I
(Freymond). — P. 447, G. Kôrting, Lateinisch-romanisclyes Wôrterbuch
2mc édition (Tobler; remarques et corrections). — P. 462, Studi glottologici
itàliani diretti da Giacomo de Gregorio (^îiedermann).
S. D. G.
CHRONiaUE
Nous avons appris trop t;ird h mon de M, A, Gastê pour pouvoir
l'annoncer dans notre demiùrc chronique, A. Gasté, né à Vire (Calvados),
en 18} 8, CSC décidé iCacn k- 26 mars dernier. Ancien élève de rÉeole nor-
anale supcrieujc, il arJit enseigne pendant une quin/-aine d^aiindes dans les
lycées, et était entré en 1878 dans renseignement supérieur comme maître
de conférences de littérature ancienne à la Faculté des lettres de Caen.
Devenu titulaire en 1881. il passa, en 18S4, à la chaire de liuérature française,
pour laquelle il se sentait plus d'aptitude. Il prit sa retraite en 1901 comme
professeur honoraire* Gasté avait un esprit cultivé et aimait la recherche.
Il a publié, dans ks mémoires de diverses sociétés normandes» sur h littéra-
ture du XV II* siècle j sur Thistoire et l*archéologie focales, un grand nonïbre
de travaux qui ne sont pas de notre ressort. Mais nous devons rappeler ses
études sur Olivier Basselin et sur les chansons normandes du XV^ siècle qui
ont complètement renouvelé une question jusque-là bien embrouillée (Eludés
sur Olkifr Bûsidin et les compagnons da Faux^e-Firf, Caen, 1866; Chansons
normand fJ du XV^ iikît pubL pour h prinmn fuis sur ks tnss. de Btîyeux it dé
Vire, Cacn, i86é ; cf. rarticle de G. Paris dans la RfVUi critique de î866» tl,
547 ; /*'J»« '^ Hotix d h Vaudnnre^ 1874; î^s VauxHié*Vir£ di Jmn k Houx
puM^dMpnh U tns. (mtû^rapfpe du pûék, Vnrh, 1875. M. Gasté a publié des
travaux j d*un caractère élémentaire, destinés à faciliter rintelîigcnce de la
Chanson de Roland et des serments de 841, Nous en avotis rendu compte
lorsqu'ils ont paru {Romaniû^ XYI^^i6, 519).
'- M* Joseph CovKAVK nu Pa«c, bibliothécaire â la Bibliothèque natio-
nale, est décédé le 17 décembre dernier. H était né à Vire le i J juin 1856. H
avait pré^*nté comme tliésc à l'Ecole dei chartes (1880) une édition de la
Morl Âym^ri d$ Narhonm, C'ei-t cette édition qu'il publia, en 1884, après
i*avoîr revue ei corrigée» pouf la Société des anciens textes français» Très
occupé par la publication du catalogue des Imprimés de la Bibliothèque naiio*
nale, dont il avait en ces dernières années b direction, il avait dû abandonner
les études dliistoinr littéraire pour lesquelles il montrait beaucoup de goûl*
Rappelons cependant qull publia dans les Étttdes romams dtdiiti à G. Parti ^
quelques chansons populaire* recueillies en Basst^Normandîe (cf* Eotnama,
ClHRONJQJCr£ î6$
XXlî, t}B), et daiis les Méan^es JuUm Htwet d'intéressantes recherches sur
Jflmi de Lansm (d. Romania, XXIV, 317),
— M, W, Zingarclli vkni d'être nommé professeur pour les ïitténiUircs
romiinesà T Université de Palentit\
— M* Salvioni, qui était professeur à TUniversitè de Pavie, a ùté nommée»
titulaire à VAc^ademk îcltutificoAifUrarm de Milati^ de la chaire de linguis-
tique occupée jusqu'ici par M. Ascoli qui a pris sa retraite» M* P. E. Guar-
ncria a trté chargé du cours laissé vacaiii à Pavie par M, Salvioni,
— La Sociéié des anciens testes h-at>çais vient de mettre en distribution
)*êdîtion â\t^Chamùns de Gûc€ BruUp^r M* G, Huet. Ce volume estk premier
de Tcxercice 1902. Deux autres volutnes suivrotit prochaitiement. Entre îes
ouwages sous presse il faut signaler, outre la nouvelle édition de Robert le
Diahk par M» Lôsetih, que nous avons déjà amioncéc (XXX, 1$^), et dont
Timpression sera bientôt terminéet les éditions du Tristan de Bérouï, par
M* Muret, du Trùian de Thomas, par M* Bédier, des Vi^rs de îa mort, par
M, Wulff, et un recueil de sotties (en trois volumes) par M. E, Picot, Ces
r volumes sont assez avancés pour qu*on puisse espérer les voir paraître au
cours de !*année 190; .
— A Foccasion du dixième congrès des Neuphthîogi'n allemand, le Vercin
akâdtmiich gthÛâHa tihe» der muer en SprmfHU în Brt^kn a publié des Bd-
tfâf£ xnr rtmaniichen und mgUichen Philologie (Breslau, Prcuss, 1902, in-ëo)i
dont trois articles rentrent dans le cadre de la RomiJttw. Le premier est une
très bonne édition, accompagnée de notes, par M* G* Appel, de h Dita^id getie-
raJ delà Muette (d'après le manuscrit de TEscorial); le second est l'étude de
de M* A. Pillet sur la pastoureîle, dont M. Jeanroy a rendu compte ici
(XXXI, 630), d*aprés le tirage à part; le troisième est une étude sur le
rapport des manuscrits de fkrahrm, par M- G. Reichel, dont M. Friedel
compte également rendre compte dans notre recueil.
— Dans le t. IX des Mémoires im'dih pour servir à P histoire de la Framîx~
Comte ', M. J, Gauthier, archiviste du Doubs, a publié une série de 48 chartes
en langue vulgaire comprises entre les années 1227 à tiSo (pp. $21-^74)* Ces
chartes sont empruntées not\ pas seulement aux archives du Douhs, mais
encore il celles de la llame-Saàne, du Jura, de U G6te-d*Or et du canton de
Keufchâteï. Elles présentent, en raison de la diversité de leur origine, des carac-
tères îitiguistiques assez variés. La variété, cependant, ne devait pas être en
réalité aussi grande qu*elîe paraît être : il faut tenir compte des habitudes de
chaque copiste et surtout de rinfluence variable cKercée par le français litté-
raire. Au cours de la lecture nous avons relevé quelques formes (dont plu-
I, Besancon, impr* P. Jacquin, igoo. La disposition typographique de ce
volunie est fort incommode : les divers mémoires qu*il renfermi; ne sont
point indiqués par des litres courams ; les noms même des auteurs et des édi-
teurs manquent, d leur place naturelle, et il faut les chercher dans une note
de la p. vti*
lyO CHRONIQUE
sieurs déjà connues) qui tie sont pas sans ïntérôï ; àevmre, n» pour « deve-
nir M ; cavônt^ JU^ pour « couvent * ; ia$^ iv, pour «des « ; r^J (ou foj) suj,
xxjtl, ï' ccs^ ^es w ; (/f /£>r» xxxvti, «f d*eux »\ comme en provençal ; mrsn^
XXXiV, xuv% ru(ïH^\ XXX vu, « raessire^ monsirc » (déjà dans Godefroy), sous
MESsmi: Jmf, XLiii. « lieu ». Les textes sont accompagnes de T identification
des noms de lieux et paraissent bien transcrits; il y a toutefois quelques
erreurs probablement tvpo^aphiques en qui, p. 516, au lieu d>«ij«i, adv.,
nwn ^i\ p, 567, au ïicu de momi, etc), et des formes qui, à première %'uç,
semblent douteuses et quil aurait fallu au moins confirmer par une note ; ainsi,
p* > 27 : B ne en aîjcune de cfalfOi ne de autres que la maison de Oerefon-
taygne Uamufûu soit venue. * dahs pour Cfks, et Uanrm'poyiT tir^m sont dfô
formes bien slîîguliéres. Dans la pièce xxi il y a successivement lai et ki pour
Part, féminin. Mais n'y aurait-Il pas aussi /a* dans le cas où Téditeur a lu la^}
Vi final est souvent fait comme une sorte de i- Pièce xxiiï, mas aznej n mon
aïeul M devrait sans doute se lire mas atves. Pièce XLVi « les requit (Hmi et
les lor/îïfOïV rendra » est certainement fautif ; il aurait fallu corriger rtquirtmt.
Pour certains mots il eût été bon d*a venir s*ils sont écrits dans les orlginauit
en toutes lettres ou abrégés. =- P. M.
— Un recueil d'un très grand intérêt pour Thistoire de la poésie et de la
versification françaises au xv* siècle va paraître prochainement dans la col-
lection des Documents inédits : c'est le recueil des Arti dé rhétorique édité par
notre collaborateur M, E. Lan gl ois, doyen de la Faculté des lettres de Lille.
— Le P. Poncelet, bolUmdiste, a publié dans It t. XXI des AnaÏHta Bdîan-
i^i4jiïtf (1902) un index fort commode des miracles de la Vierge qui ont été
écrits en btin. Les miracles sont classés dans l'ordre alphabétique des tncipit.
A chaque ineipii sont jointes de brèves indications bibliographiques, et
notamment des renvois aux Stitdif» de M. Mussafia, qui, on le sait, ne sont
point un recueil commode à consulter. A la fin est un index des principaux
miracles (ffurrâ/fon^^ ^afcifntaf).
— Dans le i, XVH, n» 4(oct, 1902) des PtéUcaHom of tbf modirtt îattpmge
Assûciatîon of Amerieû. M* John E, Matzke, professeur de philologie romane
;l Stanford Univcrsîty (Californie), bien connu par son édition des Loh de
GuilkumeU Ctympiff^nt (Rmn,,Wl\. IÎ3), commence la publication d*on
mémoînc très dèïjîllé sur les disperses rédactions grecques^ orientales, Intiiîeat,
françaises de la lé^nde de saint Georges. Ce tra\^l paraît conduit avec
beaucoup de soin et de critique ; Tauteyr connaît ^ fond toutes les sources de
son sujet, aussi bien les livres imprimés que les manuscrits. Cependant nous
aurions quelques tïbservatîons à présenter au sujet des rédactions trançai^s
en prose (M. Mat^kç ne traite pas encore des versions en vers français;.
Nous signalerons d'abord quelques erreurs matérielles. Le ms, B. N. fr
2^1 î2 (p. 49;) n'est pas de Tan laoo; il est postérieur de plus de ^o^iis*
L*crTeur qui Ta fait attrit^uer à Tan I300 a été mainte fois relevée. Il oV a
pas de BibL âvii. Carnol (p. s 1 î> : la BiMîOihtca ckiiahi Carndtmis n*est
autre, comme chacun sait, que la Bibliothèque de Chanr^« indiquée du
CHRONIQUE ryi
reste darrs la même page et à la page suivante '. Il y a inconvénient a cbsser
pêle-mêle dans iine même famille (la famille Y) des textes latins et des ver-
sions françaises (p* 492). A tout le moins faudrait-il distinguer clairement les
premiers des secondes. De plus les subdivisions proposées pour cette famille Y
sont fort contestables. M. M, y distingue on^e rédactions dont les trois pre*
mîèTes(ft, 3, i) sont en français et les autres eo latin. Il eût été évidemment
plus naturel de mettre en premier les rédactions latines, mais de plus je dois
faire observer que la rédaction « (Bibl Sie-Geneviève, s^^X publiée en appen-
dice^ est identique à l:i rédaction ^, caractérisée dans la liste de la p. 492 par
le légendier de Saint-Pétersbourg, maïs qiii en fait se trouve en un grand
nombre de mss. comme il est dit du reste à la page suivante. Les diffé-
rences qui se rencontrent entre ces divers mss. français sont sans importance,
P-M.
— livres annoncés sommairement :
The Troidmdours oj Dmiît^ hing sekctims jront thi wûrks ofthe provençal Poels
qmitd by Danti^ with introduction, notes, concise grammar and glossary,
by A. J, Cha^ton, Oxford, Clarendofi press, 1902. In-8û, xxxvi,
142 pages. --Comme le titre 1 indique ^ nous avons ici un choix de pièces
empruntées aux troubadouTS que Dante a cités. L'idée est peu heureuse et
ne petit s'expliquer que par le désir de mettre le nom de Dame sur le titre
afin d'attirer Tattenrion et la souscription des personnes qui collectionnent
les livres relatifs k Dante, Cir, si Ton se place au point de vue des études
dantesques Jl fallait indiquer avec précision quelles pièces Dante a connues.
Et il n'est pas douteux qu'il en a connu beaucoup auxquelles il ne fait
aucune allusion. On sait depuis longtemps à quelle famille appartenait le
manuscrit où il a puisé sa connaissance de la poésie des troubadours.
D'autre part, si on se place au poiiît de vue plus général de la littérature
provençale, il n y a aucune nison pour limiter le recueil aux troubadours
mentionnés par Dante. Or le présent choix, étant précédé de généralités sur
la poésie provençale et suivi d'une esquisse gratnmatîcate et d'un glossaire,
ne semble pas conçu spécialement au point de vue des études dantesques.
Il fout aussi remarquer que l'auteur y a fait entrer des pièces que Dante n'a
cen finement pas connues, par exemple le n^ L /*î reiYlaiio âf las pfnui deh
yfetm pubîiêe pour \i première fois par Bartsch iDfnkmiler^ p* 3 to), qui est
b traduction d'un apocryphe latin bien connu dont le texte a été imprimé
id même (XXIV» 36s) Ce morceau n'a rien à faire avec les troubadours.
îl est également bien douteux que Dante ait connu le Documintum Imtons
Les nô* 190 et 500 désignent un seul et même manuscrit. Le n*> 190
st Tanden n^^ et le n^ s 00 le nouveau. Cela est parfaitement indiqué dans
e catalogue imprimé. De même le ms. « Bibl. civ. Camot 193 a de la
p. 501 n'est pas différem du ms. sot de Chanres mentionné à la p. 511.
172 CHKONiaUE
de Sûrd^], qui occupe quarante pûges du volume. On ni: voit donc pis
bien ce que M, Cbayton a voulu faire. Quam â rexccuiîon du cravaîl, elle
est de valeur moyenne. « Ce ihrt n^ dit l'auteur en commentant, « est une
ceuvre de vulgarisation qui n'a pas de prétentions à rorigînalîté, « Devant
cette déclaration modeste, la critique se sent désarmée. L*auteur paraît
avoir bien copié les textes imprimés auxquels il a emprunté les pièces réu-
nies dans son recueil ; ses noces résument assez bien ce que d'autres ont dit,
mais ce qu'il y a de bon, comme ce qu'il y a de faible, dans son travail est
emprunté et par conséquent ne peut guère être discuté ici. Il serait injuste,
par exemple, de lui reprocher d'avoir dit qu'usor a disparu des langues
romanes (p. XX), cette erreur n'étant pas de lui ; mais on peut rengager à
consulter Raynouard (IV, 565) et Godefroy sous ûhsor. Mais peut-être faut*
il le retenir responsable de la iradoction de fiaayi (Édcsse) par Rodez, ce qui
serait gra%'e. Dans U glossaire^ qui est assez détailï<^» nous avons remarqué
certaines formes doutttises et beaucoup d* interprétai ions vagues ou con-
testables ; mais les articles de ce glossaire ne contenant pas de rélérences, le
contrôle est difikile. — P, M.
Lu tende et ki p^afa de Saint^GUUs au Xfh siècle ; textes en langue d'oc et en
latin» publiés par Ed* Bokdurand. Nîmes, igoa, in-8«, ^7 pages (Extrait
des mémoires de T Académie de Nîmesj, — Ces tarifs, concernent les péages
de Saint-Gilles, de Petaman^im, de la Fosse et de ^a. Les lieux de Pâh-
nmr^uis et de Ra n'existent plus. M, Bondurand en a déterminé aussi
exactement que possible l'emplacement» Ils étaient situés à une fjaible
distance de Saint-Gilles, sur le Petit Rhône. Tous les documents sont en
provençal : sauf une série de neuf articles latins, publiés en dernier lieu,
sous le litre de Ptdatgia Sancii B^idii. M, B. les attribue au xiî« sîéclc,
ce qui est hasardé. En tout cas ils sont antérieurs à ijii puisque les
Tcmpli^^rs sont mentionnés dans l'un d*cux* Le manuscrit qui est fort
endommagé n'est que du xiv^ siècle. Peut-être nVst-il pas exempt, de
fautes : il semble cependant qu'on aurait pu en tirer un meilleur ternie.
Le commentaire, qui est copieux dénote une connaissance insuffisante de
la langue; ainsi, p. 14, note 14, p. 25, n, 4. l'éditeur suppose que le
sujet est au pluriel et le verbe au singulier ; mais ivt^ ai^rs est au singulier
(sujet), et non pas au pluriel. Voici quelques autres rectifications ou conjçc-
tiïiTS t art. V, Bur^n (k côté d'Arras) est Bruges et non pas Bourges.
Amtri^otit art. xxv, mentionné A la suite de plusieurs étoffes prècieuses^i
pourrait bien appartenir à la même famille que le fr. osUrm, sur lequel
^ok Ji&tmnia, XXIX, 429. Art, xxviti, tiehcade /mit, traduit par« laque
d'Inde A, est bien douteuK \ ne fautai l pas entendre << de laque d* indigo » ?
iWi, pour indigo, se trouve en d autres tarifs du même ^tnTt^ par ot,
dans celui de Tanu^on publié par M. Bondurand (Romania, XX, îSa);
indi et îam iont dtés dans ]c tarif de Trinquetaille (art* 26, CatîuL de
S. Fktûr^ ï, %cv}f voir du reste Raynouard, Lex. rom.^ 111, 557 et IV^ $,
Art. XXX ttï, n^tni doit se lire ntgtKS et signîîie • de même ».
CHROKiaUE 173
Art. XXX.1X. « Toit ho m, d*oti que $m, que iratiapLWi^ per DurensA »^
lire «^ que traitei porte » ; travtSj pîur. de tran (poutre) su retrouve à
Tart. XLL An. xliii, « môser san Gili w, lire mosenfkr. Art. xlv, idr^i*wfl est
un bateau sur Ici^uel on peut voir Du Câugc, sagena 2. An. XLVilt, dotto-
fia est sans doute une faute d'impression pour donariû,
i primi infimiî M Dante, dti Pttmrca e dd Boccaccio suîk LeUiraiura spagmwla
con appendîd di docu menti inédite Sâggîo di Remando Sanvishntj, V,
Hoepli. Miîan, 1902, m-B*», XJV et 463 p, — Travail un peu rapide et insuf*
ftsam, mais agréable à lire. On s'étonne que dans le premier diapitrei
M, Sanvîsenti n*ait parlé ni d'Alfonso de Cartajena ni de Pîetro Candi do
Decêmbri, qui ont joué im rôle imponant dans Thistoire des relations
littéraires de ritalieet de l'Espagne, A prapos du marquis de Santillane,
Tauteur dit qu'il s'était procure « !c opère di Jean de Meung, d'Alain
Chartier, di Pierre Mie haut, d'Honoré Bosset (sic pour Bon et), d'Ottone
di Granson ^. Il y a longtemps que l'on a remarqué que k Midsaui de
la Lettre au connétable de Portugal désigne Madmd. Le chapitre sur Impc-
riali, contrairement à ce qu*Qti pouvait attendre, nous apporte bien peu de
nouveau, Juan de Mena devait être étudié à Taide des anciens commcnta-
tcursj surtout de Fernando de Guiman, qui est capital, L*appendice con-
ticni quelques textes intéressanis» entre autres une version des Emtigs de
Jordi, d*aprés un ms, de T Athénée de Barcelone, Le livre de M* Sanvî-
senti, couronne par TAcadémie scientitique-liitéraire de Miïan, est dédié à
notre éminent collaborateur» M. Novati, — A. M. F.
NoisM d la vtmfimcion dt }uau Mmuel par Federico Hanssen (Amks d^ la
UntwrsUad, t. CIX), Santiago de Chile^ 1901, in*8", 27 p^iges, — 11 s'agit
des distiques rimes qui se trouvent en tète des << enxiemplos » du Cmuie
Lmattor, M. Hanssen s'est servi de l'édition de Knust, qui ne suffit pas
pour un travail de ce genre ; en second lien, il est très douteux que ces
distiques nous représentent toujours des vers. M. Hanssen établit des
catégories qui semblent purement imaginaires et qu'il faudrait en tout cas
contrôler tout autrement qu'il ne Ta fait.
Lsm pkhoi Trtwr, Dictionnaire provenH^al-françaîs et français-provençal, piar
le K, P. X.VVIER deFourvif-rf^ chanoine prémontré, avec la coHaboration
de son confrère le R, P. Rupkrt. Avignon, Roumanillc* 1902, in-i6, xxiU
-774-264 p, — Ce volunie, d*une impression soignée^ lisible quoique com-
pacte, qui r^ii il honneur auK presM^ de la maison Aubanel, a été compo:^
avec amour pour lus Méridionaux qui ne peuvent avoir le Trésor de
Miiitrjt; les Frandnman^ s en serviront aussi avec avanuge. On aurait
voulu que fauteur cKphquAt» d;ins sa préface, plus clairement qu'il ne le
fait, ou, mieux encore, inJiquAt dan*» le livre p^r des signes quckotiques»
ce qui lui appartient d;uis son iiruvre et ce qui est simplement pris
au7( «i dictionnaires de Mistral, de Doujat, d*Avrîl, de Piat et du
Ntçard PcUegrini n. FI répondra sans doute qu'il a voulu Élire œuvre de
vulgarisation et non de science* et nous passerons condamnation» d'auiant
J
/
174 CHROKîaUE
que nous laissons en g^'nêraî hors de notre ciJre les parkrs modernes
qu^rid ils ne sont pas Tobjet d'études historiques* — Le v provençil *
donné comme base au lexique est celui des félîbres. Un système de « clefs i*
asseiî pratique, exposé dans la prèficc, pcmiet aux « Occ iraniens m dont k
parler diffère de celui-là de retrouver sous ïa forme classique les mots de
leurs idiomes respectifs. On trouve aussi dans cette préface un tableau des
verbes irréguliers.
VincetîJîo C^^EMLim, L*ipiiodiù dt Franctsm. Padova. Draghi^ 1902,8%!
ji p. ^ Cette (* lecture », qui inaugure une série, est tout à Mit char^l
mante. L'aiitenr, qui parlait pour une réunion de personnes du mondc^ [
a fait cependant pïus d'une remarque qui intéresse les savants^ noiiimmctit j
oelle-ci : en faisant rappeler par Francesca Tépisode du premier b^iisirr de^
Lanccïot et de Gueniévre, Dante Ta sensiblement modifié : d*un réch frdd,
tout conventionnel {et même choquant» pour nous, par TintervcTition et b
présence de Galehaut), ît & fatt une scène émouvante, pleine de gricc et
de vie; le dhiato rho baisé par Lancelot n'est pas dans le roman français, et
ce n'est pas même Lanccïot qui y donne le baiser : c*est Gueniévre qui,
voyant que Lancebt îî'osc pas, « le prend par le menton et le baise longue-
ment », Dame a-t-il eu un souvenir inexact ? Ou a-t-il change exprés ?
C'est vers la seconde explication que penche M, Crescini ; cependant il
senible bien que le poète fasse allusion â un récit connu de tous (1/ dismiû
n$o). On peut se demander (naais rien ne permet de le supposer en dehors
du passage même de Dante) s'il aurait existé de cette scène une rédaction
difîé rente de la seule que nous connaissions.
SiudkH lur EriMmigdiUeratur des MittdaUers^ von Anton SCMôHBACH. IV
Uiber CiMsarîtis l'on Hehkdmch, l. Wlen^ Gerold» 190a, 10*8,92 p. ^ Le
savant auteur se proposait surtout d'étudier les histoires que le prieur
de Heisterbach (f 1240) a racontées plus d'une fois^ afin de comparer
SCS récits entre eux et de tirer de leurs variantes des conclusions sur la façon
dont se transmettent les traditions orales. Il a été amené, ci.' dont nous devons \
nous féîiciter, à étudier toute l'œu^Te et la vie du pieux cistercien. Dans-
ée premier fascicule il passe en revue tous ses écrits» auxqueb il en ajoute
plus d'un qu*on ne connaissait pas, et imprime en appendice celles des
hisiorictces édifiantes contenues dans ses Homélies (dont l'édition unique
est peu accessible) qui ne se retrouvent pas dans le Dtalôgui miracuhrum.
Nous attendons avec un vif intérêt la suite de cet im ponant travail.
Lés Quinze joyes it mariagi. Texte de l'édition prince ps du îtv« siècle* Pre-
mière réimpression, par Ferdinand H eue KEN CAMP, Haïle, Niemeycf » 1901,
12^, 11-82 p. — On ne connaît de rèdicion princeps (xv<î s/) des Quinxt
jit'm du mraini^*^^ qu'un seul exempliiire, ctitiservé à la Bibliothèque Natio-
nale; M. Heuckenkamp Ta reproduit hdciementp sauf quelques fautes d'Im*
pression trop grossières qu'il a signalées dans un court avertissement. Il a
voulu par là faciliter l'étude critique et scientiâque du petit chef-d'ceuvrv
d'Antoine de la Sak ; l'éditeur a fait en outre de cette réimpression une
élé^nte plaquette que les amateurs auront plaisir i posséder.
CHRONiaOE Ï75
Dk Tr'mmpix Francesco Pflrûrcus m kfîtîschenn Texte herausgcgeben von
Cari Appel. Halle a. S, M. Nicmeyer, 1901, xuv et 476 pp. - A pre-
mière vue, cettf édition critique, produit d'un travail minutieux et consi-
dérable, semble ur* eftôrt dis pro port io une avec la valeur ri:cllc des Trlutifi,
la partie de Taruvre de PiÈtrar<5ue qui a le plus vieilli et qui, il faut bien le
reconnaître, o'imêrcsse plus que quelques èrudits. Mais les raisons que
donne le savant éditeur pour justifier son labeur sont à prendre en sérieuse
*:onsidê ration ; il a si bien montré ce que nous apprennent ces fasiidieuseti
compositions : quand on sait les lire» et^ d*autre part, Timportance que leur
donnent, par exemple, les œuvres d*art qu*elles ont inspirées» qu'on ne
peut que se montrer très reconnaissd.ni de la peine qu*il a prise d'en
établir un texte aussi authentique que possible* Uappréciaiion des pnn*
4:ipes qui Font guidé et de la méthode qu'il a suivie apparîien! aux spécia-
îbtes; mais on peut être sûr que cette édition sera longtemps celle dont on
devra se ser/ir : etîe tturque un progrès considérable sur les précédentes,
soulève, et résout souvent, des questions que les autres éditeurs avaient
â peine effleurées. — A. M. -F.
/ Trionfi dt FrmtceSi:0 Pttrarm. Tcsto critîco, per cura di Cari Appel.
Halle, Niemcyer, 1902^ la*', vt-l^l p* — De sa grande édition des Trionfi
M. Appel a extrait le texte critique qu1l publie dans cet élégant petit
volume, avec une courte préface et quelques noies écrites en italien. C'est
un grand service qu'il rend à ceux qui d^irent lire les poèmes de Pétrarque
dans un texte aussi bon que possible, sans entrer dans les longues et minu-
tieuses discussions qu'en comporte rétablisse m em.
Dktiofitimte éiymQÎHigiqm de la langue ^asavui^^ avec la racine celte ou grecque
de chaque mot giiscon, suivi du mot îatîn et frani^ais, par Alcéc DuRBiECX^
Auch, Impr, Foix. lîl^^et 1901, ivoL in-12^ îyï et 544, p, — M. Alcéc
Durrieux a découvert que le gascon n*êst nullement du latin» miîs du celte
mélangé de grec (il ne connaît d'ailleurs nullement le celte et connaît fort
nul le grec, a en juger par la façon dont il l'imprinn^V l) soutient cette thèse
datfe son premier volume et la démontre dans son second, en donnant
Tétymologic grecque (parfois v( celte ») des mots gascons, et en en rappro-
cluint ïcs synonymes latins, qui, riatureUenient, n*ont le plus souvent aucun
rapp<^m. et les mots français, qui ressemblent tantôt aux mots latins, tantôt
aux mots celto-gréco-gascotis. C'est bien de la place perdue ; mais faute
d'un meilleur dictionnaire gascon (l'auteur est du tiers), les philologues
pourront recueilUr quelques mots intéressants au nûlieu de tout ce balbsl ^
l*rof* Pietro Toldo. EUtJcs sur k iWin comiquf frmhai^ dn moyen dfc et sur
le râle de la nouvelle dai^s tes farces et dans les comédies. Turin, Loescher,
1
t, M. A. Durrieux, qui était extrêmement Igé quand U publia son livre,
iM mort peu après; cette note était rédigée depuis longtemps.
Ijé CHRONldUH
r90a, m-8, 189 p. (extrait des Studj di fihhgia ronitmia, vol, IX, fasc. 2).
— M* Toldo^ bien connu par ses travaux de litlèrature comparée franco-
italienne, s'est proposé ici de démontrer, contrai rcment à l'opinion
reçue, que « la farct du X v^ cl du wn^ siècle n'est^ dans h plupart des cas,
qu*un tabliau mis en action, n A notre avis, il n'y a pas réussi» ci U tâui
s*en tenir à ce qu'ont dit là-dessus MM- Petit de JuUeville, Picot, Bédier et
Des Granges. Un cas comme celui de h farce d'Eio^ et du Cmtutierf que
M* T, eiamine en premier, est tout à fait isole et s explique par le fait que
cette farce est Tœuvre d'un clerc (le mmmuînU du collège de Navarre), qui
a puise sans doute directement dans Pierre Alfonse (car ce que M, T,
appelle le fabliau Du iailkur du rûi d ai smi sergent est un chapitre de Tune
des traductions en vprs de la DmipUna clerkalisy. On ne lisaic plus les
fabîçaux à Tépoque où ont été compOi^Jes les farces qui nous sont parve-
nues ^ quand on trouve entre celles-ci et ceux-là des points de contact»
c'est que les auteurs de farces ont pris, comme ceux des fableaux^ leurs
motifs dans la tradition orale, toujours vivante. Ce n'est d'ailleurs qu^un fait
exceptionnel, le cadre habituel et Tallure de la farce étant tout autres que
ceux du conte. Bien que nous n'acceptions pas la thèse générale de M, T,,
nous recommandons son livre à ceux qui s'intéressent à Tancien thédtn^ et
à Thistoire des contes : ils y trouveront beaucoup de remarques justes et de
rapprochements intéressants. — Une partie du îivre concerne les comédien
de b Renaissance^ qui, elles» ont très largement puisé d^is la nouvelle,
ce que l'auteur montre par pîus d'un exemple qu'on n'avait pas caoon;
signalé.
Gutdo pBKSiCO. Cino âa Pisioia e il ptlmù wmHQ delîa Vita Nuova dt Datiie,
Fircn^e, 1902, in-S, 15 p* (extrait de la Rtmegna Na^iùnaU). — Contrai-
rement à M. ScherillOj l'auteur cherche à protiver, et, à et qu'il semble»
par de bonnes raisons, que le pdrmnie adressé à Dante sur le premier
sonnet de la f^ita Numm est bien de Cino da Pistoia, qui l'aurait envoyé
à Danie^ ainsi que sa cmsokiaria sur la mort de Béatrice» en 1292 environ,
quand Cino étudiait à Bologne, et que la ^ita Ntioin avait été publiée
en entter.
Prmmt^aiùehe ChnslomaihU, mit Abrlss der Fortnenlehre und Glossar. Von
Cari Appel Zweite vermehrte AuAage. Leipzig, Reisland, 1902, gr. ln«8«,
XUJ-Î44 p. — Cet ouvrage, dont on connaît le mérite et Tutilité, reparaît
ici aprt« une révision soigneuse qui fait^ dit Tauteur, qull ny a guère une
page qui «ou restée sans changements.
U Prù^kiairt-Gémni , V* E, BOUILLON.
UÂJGmt, moffàrt rftiKEs, tMpRtxiitjms
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^un^f) numéro ntsi \fndu téparéfHtn$.
SOMMAIRE DU PRÊSEOT KVMÉK
A» Thom.'^s. Le suffixe aricius tn frin^îs et en provoiçai. . , , , , 1 77
P. Raj.s'A. Le origini dclla novdla narrau dal a Frankdeyn * nd Otn-
tnbury Taki dcl Ch^uccr . . ,....*,.,.*♦ * 204
P. Meyew. RecèUes mC-dicaks en provençal d*aprÈs Icros, R. 1440 de
Tnotty Collège, Cambridge. 368
Ml* LANGES
G. L. KîTTîiEJKîi, The chanson du Comte Kemiquin
ÎIK)
COMPTES RENDUS
J. Pm-ios. Iw ian^iif dis mscr. ht, df ta GauU \ A, Cimoy, Ir /^/iVi
iTB^ptt^nf fTapr^t Ux ifisct. (M. Rov|ucs). ,,♦.♦..,-..,-......,....
CoLUjs. U-s sulïtxi'S loponyunijucs di*rï!î îc$ langues française et
provaiçalg (G. P ,;,.,...*.. . ..*,.,, , .#-*** , ,
R. ZuNKiiK- Dï> Lié(tir ^mts V0ti Auvffgm (A Jeânroy)* ,.*>..
J.'N. N,^*AU NotjrdcWiiCf. ^i/dnigt tùi di B*oùrMin^ v&H dm WiUt
haim (Minckwiu) * . ^ , , *
F. ( j D t LLON . /éw^ f ' r^ M '^ (ï^ ^ Lmgl 0 h)
A, Brn\s. Istrorûfu,. (J Popuviti)
n;
CHRONiaUH
U4
Les proctuîiis nnm^rofi coia tiendront
R. BASsia-. L- ' - .- . -1'
Sv. Bir^G. Lii
A. n
Ov-
A. U...
F.Lot.
pîon, -
A* PtAGfT- i
M, Scnwoîî.
H, s
n en Espagne de 778.
Yubmnn. — Ltitscrnc. — Boton d*Escar-
'le jtfrti rwnct et ses imiutîotw (suiii).
- Ici dunsoQs de Gt</fl<ittrnr d'Ùrmt^i. — La
P,T
in tfae Cmtnviù ind F/l^ 111101^ .
LE SUFFIXE "ARICIUS
EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL
La juxtaposition de deux ou même de plusieurs suffixes
est un Élit qui n'est ni rare ni difficile à expliquer. Du parti-
cipe natus le latin tire Tadjectif natal is, puis de l'adjectif
natalis, employé substantivement au sens de « jour anniver-
saire de la naissance », il tire un nouvel adjectif naialicius,
qui signifie « relatif au jour anniversaire de la naissance » :
le procédé est très simple. Mais la complication se produit
bientôt. L'esprit humain — pauvre boussole que le moindre
courant analogique suffit à affoler — saute d'un bond du mot
primitif au second dérivé et, ne s'arrêunt plus à considérer la
juxtaposition des suffixes dans l'ordre où elle s'est formée, il
ne &it pour ainsi dire qu'un bloc de la dérivation.
Voici un exemple frappant et qui date de loin.
Du substantif gens le latin a tiré l'adjectif gentilis, puis
de l'adjectif gentilis un nouvel adjectif gentilicius. Les
textes nous montrent que gentilicius s'emploie couramment
au sens de « propre à une famille, à une nation », c'est-à-dire
qu'il est purement et simplement synonyme de gentilis;
donc, il peut être considéré comme dérivé de gens avec un
suffixe -ilicius. Ce point de vue est artificiel, dira-t-on; sans
doute, mais de quoi vit le langage, sinon d'artifices? En fait, on
ne saurait douter de l'existence d'un suffixe composé -ilicius,
affranchi de toute subordination vis-à-vis de ilis et vis-à-vis de
-ici us, dès la fin du premier siècle après Jésus-Christ. Martial
qualifie les efféminés qui passent leur vie en litière (cathedra)
ILmumiaXXXU 12
178 A. THOMAS
de Tépithète pittoresque de cathedralîcius '; cathedra! î-
ci us a dû jaillir de son cerveau sans Taide de cathedralis,
qui est absolument inconnu an latin classique* Après tout,
cathedra] ici us est d'aussi bonne venue que legatorius,^
employé par Qcéron et pieusement recueilli par nos antiquaire
pour qualifier une provitice administrée par un légats
Les textes latins antérieurs au ^moyen âge ne présentent que
très rarement la combinaison de -aris ou -arius avec -îcius.
Je n'en ai relevé que trois exemples : capsaricius, fabari-
cius et sigillaricius. Le premier mot signifie a gardé par te
capsarius ou gardon de vestiaire », ce qui est tout naturel »;
le second n'est pas bon à grand* chose^ car i! ne se trouve que
dans Texpression fab[a|rieîi circenses d'un ancien, calen-
drier* et le sens n*est pas plus sur que la forme; le troisième
vaut à lui seul plus que les deux autres, Spartien dît dans
la vie de l'empereur Hadrien ; « Saturnalicia et Si gi Ma-
ri cia fréquenter amicis inopinantibus misit ^ )» Il faut sous-
entendre munera ; il s'agit de cadeaux faits i roccasîon des
fêtes dites Saturnales et Sigillaires. Il n'y a là rien de parti-
culierà remarquer : le rapport entre Sigillaricius et Sigil-
laria est exactement le même qu^entre Saiurualicîus et
Saturnalia, aussi simple pour le sens que pour la forme.
D'autre part, on lit dans la vie d'Au rélien par Vopiscus : <t Uxori
et filiae aonulum sigillaricium quasi priwatns instituit * , »
Ici, nous avons à faire à un sens très différent, si bien qu'on
pourrait dire qu^il s agit réellement d'un autre mot* Un annu-
lus sigillaricius est un anneau qui sert de cachet : sigilla-
ricius est donc tiré directement de sigillum, comme
1. Epigr, X, 13, 1.
2. L c g a t o r i u s est fa ît à t* imitâti on de sénat o r î u s. L' Acûâètme fran-
çaise j iccucillj \a locmion pr&vime iégatoirt ; coEûmc il ^c ficheux qu'on
tie dise pas aussi provint^r Unatmrt f 1
j. SdioL de Juvénal, S, \é%.
4. CWy. imcr, lai., I^ p. $44 et $4S ; cf- Olcoti, SMm in tht w^td/orum'
ihn 0/ ihf Lu, Inii^r,^ p. a 17. Ui litre textt dûnn^ fabarîci» que De Vit
oonsldère comme k nom* p!ur. d*un fa ba ri eus (d'ailleurs inconnit) mais
que M. Olcott ratuche à faba rictus.
5. Chap, 17.
6. Châp, îo.
LE SUFFIXE -AiHaUS EN l^RAKÇAIS HT EK PROVENÇAL 179
cathedralicius est tiré de cailiedfa. Le suffixe -aricLus esi
né.
Les textes du haut moyen âge nous permettent de suivre,
ou du moins d'entrevoir son développement. Un des manu-
scrits de la Loi Salique remplace caballum qui carrucam
trahit parcaballum carrucariciom, 38, i* Le plus ancien
recueil de formules que nous possédions, les Formulai Anâtra-
vmses (\'i^ siècle), parle de vigncii affermées k moitié fruits sous
le nom de vîneasad parciaricias (form. 30); Tévêque saint
Pirmin, fondateur de Reichenau, mort vers 758, tire de
mimus le substantif mima rit lae ; une charte lombarde de
765 appelle tectoras pallearîcîas des toits couverts en
paille i une autre, du roi Didier (mort en 774), mentionne
simultanément massaricias, hovokaricias^ aldiaricias.
Dans la Lex Alammmorum^ le chien à chasser le porc sauvage est
appelé canis porcaritius, le chien à chasser Tours, ursari-
tius; en outre, nous y voyons le suffixe, sous la forme femi-
nine, servir à désigner un Heu» un établissement : une vacherie
se dit vaccaritia, terme qui est également employé dans le
capitulaire Df Viîïis et dans le poliptyque de Tabbé Irminot>.
Dans ce dernier document, -aricius, substantivc sous la forme
féminine (très rarement, neutre) incline vers le sens abstrait :
le service, la corvée de Tost s'appelle hostiUricîum';la cor-
vée du bois, lignaricia*; la cor\^ée du vin, vinericia ^ Parla
suite, les mots de ce genre deviennent rares dans les textes
latins : pourtant, vinericia est encore au xwv siècle dans le
pouillé de Tévèchè de Ne vers, et, au xiv% le roi d'Angleterre
Edouard III appelle ses chiens à chasser le daim canes dama-
ricios*.
Nous n'avons pas de témoignage direct sur la quantité de IV"
dans le suffixe -aricius. Le Litin classique distingue -ici us,
t , Ce mot, où trois suffixes se sont agglu fines, ne se trouve qu'une fois ;
Je terme ordinaire est h o s t i 1 1 u u m.
3, Va fi in te lignericiâf où Von voit déjà un témoigiiage de rafFaiblis-
scmcm français de Va protonique en f.
\. Cette forme est constante; il est curieux que Ton tic trouve jamais
viniriciâ comme lignariciâ.
4, Tous les exemples se retrouvent facilement à Taidc de Du Gange; c'est
pourquoi je ne donûe pis de références particulièrt'5.
î8o
A, THOMAS
qui s'ajoute aux thèmes nominaux, de -icîos, qui s'ajoute aux
thèmes verbaux en prenant pour point d attache !e thème du
participe passé* : il dit caementicius, d'une part, et facticius,
de lautre ^ La forme la plus ancienne de notre suffixe est
probablement -a ri ci us ; mais comme, dans le latin populaire,
-îcius a beaucoup empiété sur -ici us, il n'est pas surprenant
que -ariciusse soit fait une place à côté de -aricius, La
péninsule ibérique ne semble connaître que*arîcius : portu-
gais cavallariço, pormriço ; espagnol asnm;p, cabreriio^ vaqu€ri^ô
ttvaqu^riia^ etc. ^ L'italien a les deuxformeSj selon les régions :
pagliericctOy seakrkcio^ Faccari^^o (ville de la Calabre), à côté de
mmperecm^ casercccio^ (ester fccio^ secchercccio, vaccareccia (Oudin),
etc. Le provençal a quelques traces de *aricius, que je. signa-
lerai plus loin chemin faisant; mais il donne la préférence à
-aricius* Cette dernière forme est la seule quî paraisse avoir
des représentants dans le domaine français ^
C'est i M. Horning que revient le mérite d'avoir signalé en
français, sinon comme sure, au moins comme probable, rexîs-
tence de représentants du suffixe laiin -ici us sous la forme
féminine allongée -créa*. M. Tobler a précisé, depuis, les don-
nées un peu vagues de M. Horning, en citant un certain
nombre de mots en -crc:^ aussi bien qu'en -ereceK M. Meyer-
Lùbke, se référant à ces deux auteurs, a écrit : « Le français
1 , N o V le i u s, de p o V « s, constitue une exccpt ioti isolce.
2. Les formes espagnoles sont influencées par ainerx^, cabnrù, eic* Le
portugais est plus fidèle âu type primitif.
5, Tottttkl brassfrkh dans un texte de 1456» que Godcfroy m die que de
seconde main, n'est pas asicz sûr pour qu'on table sur lu». Quant â ûvmeris
u champ d*avoine », que l'on pourr^iit être tenté d'e?cpli<]uer par 'ivcnt-
rlctus, c*est en réalité le pluriel de mrnfriî. C(. Godefroy avaixeriiub,
où est cité un passage de Motha ; j'ai cotlationné ce passagi: sur sii manu-
scrits qui ont tous la désinence uniforme en -til (Bibl nai. fr. 1297, i^ 87
v« : aurnntt; 1198, i* 84 i* : aufnfrti\ 1299, f<» î2l ro : attuenml; lioo»
fo 128 ro : aufnril; ijoi, fo gs v» : nu/ntHi; 1 jo2jfo 90 r<* : aurtttHl\ 12599^
fo 89 v? : aufftrri!; Ar$eRal 5079, fo 215 vo : auetfcriîi 5197 f^ jS ro : aum-
ril). Avfuri est encore vivant en Normandie cî en Blaîsoîs; le type latîn est
lùrement "avenarile.
4* UurMurhhU, année 1690» p. 105 ♦
f, A propos dn mot banmrM, àtn% Sitiun^slK tkr Aaiii. IVmrmih. |ii
Berlin t phîbs.-bist. Gasse, année 1S9J, p. î|'24 (19 janvier).
LE SUFRXH 'AHiCWS EN FRANÇAIS IT IK PROVENÇAL l8r
offre peu d'exemples ; le français moderne hnmret représente
rancienne forme hanfre:^; viennent ensuite, en ancien fran-
çais fenere:^ (juillet), pasqnerei (s^mum^ A^ Pâques), les adjec-
tifs chevakreiy jamhere^i et quelques autres', jj J'ai déjà
eu l'occasion de dire que le dévelopement de ce suffixe en
Gaule était beaucoup plus considérable qu'on ne se le figu-
rait jusqu'ici f. Je voudrais aujourd'hui passer en revue tous
le mots français et provençaux qui, à ma connaissance,
sont formés à Taide de ce sut fixe et fournir ainsi une con-
tribution à la lexicologie de la Gaule, sans distinct ion entre
la période ancienne et la période moderne, entre le français
proprement dit et les patois, entre la langue courante et la
toponymie. Mais avant de passer cette revue, il me faut exa-
miner trois questions préliminaires : t* de Texistence en Gaule
de représentants du suffixe -ici us; 2" de la confusion entre
le suffixe fém. -artcia et le sufHxe -issa; 3** de la confusoin
entre le suffixe masc. -a ri ci us et le suffixe -ittus.
ï" Du suffixe *icius, M. Tobler a montré que Texpression
fhemlitr bannerd se présentait toujours dans les anciens textes
sous la forme dxvaïitr bamre^ \ il en a conclu que baner^ était
dérivé de ktniere ù Taide du suffixe -e^ correspondant au latin
-îcius. Cette explication est logique, mais elle ne me paraît
pas conforme h la réalité des faits. Banerei n'est pas très ancien;
il se trouve pour la première fois dans les Coutumes de Beauvaisis
de Beau manoir, éd. Salmon, § 1242. Le français possédait-il
réellement au XIIP siècle un suffixe h:^^ issu du latin -icius ?
Cest difficile à croire ^ puisque nous ne voyons pas ce suffixe
s'ajoutera d'autres mots qu'a ceux qui contiennent déjà le suffixe
'ître et qui donnent naissance à des dérivés en -fff^, comme
faschere^^ de jaschtere, pendant exact de banerc^, A vrai dire, le
français possède seulement le suffixe ht f ^ ; mais quand ce suf-
fixe s'ajoute à des mots en 4er -iert, il se produit une sorte de
superposition syllabique, et Ton dît banerei^i bruere:;^^ jaschfre:^^
unert:^ au lieu ic*baneîere:;^y ^ bruera-ei^ * jaschererei^ ^vourera^.
1. GramnK ées kff^. roiiî., II, S 4^7*
2. Mi^angn lâyrn.frtinçat'st', p. aj, 29, 48, 49, ^8, 9S, 119, 136, 15b.
j. On a un cuncux exemple de Tadj. fém. ctmircsif^ dans Godefroy;
mais il faur y voir le latin cinertcitis et non un dêmè français de cendre.
l82
A- THOMAS
Quand h désinence re appartient au thème et non à un pre-
mier suffixe, le suffixe -rr^:^ conservera l'origine, sa forme inté-
grale : bien qm nous n'ayons pas d*exempli; de * gaufnre:;^, les
formes gaufcrais {i^}^) ^^t wanffrrrais {iiéo) témoignent clai-
rement que *^ûufrerei a existé, car elles ne peuvent s'expliquer
que par un phénomène de dissîmitation.
2^ Contusion entre -arïcia et -îssa. Dès le xn' siècle on
trouve en français des substantifs féminins en -trtsse qui
reposent sur des thèmes verbaux : bakresse^ ïechenssc^ iombertsst^
etc. Ils peuvent s'employer adjectivement : femme kcheressc
dans Marie de France, Fables^ i, 27 (édit. Warnke), Quelques
manuscrits ont la graphie -tresce, ce qui pourrait nous incliner
à croire que les mots de cette catégorie reposent sur des types
latins en -arîcia. Il n'en est rien cependant : ces mots sont,
en réalité, formés d'après les masculins correspondants {halere,
kchn^ etc.) àTaide du suffixe -es&e^ qui est le latin -issa, grec
et ils correspondent à un type, peut-être fiail, -ato-
\S^^f
rissa ', Les preuves de ce fait ne manquent pas. Au point de
vue phonétique, la graphie fréquente -erresse et ia rime t;n -esse
et non en -rrf, picard -erhe {kckrcsse : pmmesse^ Marie de
France, Fables^ l, 27 ; felunene : lenceressCy Marie de Fmnce,
Fables f \c\\ 3 ; asiesse : maisîresse : axJmmse : venderesse : espesse :
trekercsse^ Rendus de Moiliens, Caritê^ CLVi) sont des faits déci*
sife. Au point de vue sémantique, il y a une différence sensible
entre un adjectif féminin en 'ircce et un adjectif féminin en
-eressf : une flèche hrserece est une flèche dont on se sen pour
chasser {berser)^ tandis qu'une femme tmcercsse est une femme
qui ianci^ qui ainw à*iancer. M. Meyer*Lùbke rattache à -îssa
le lorrain hnirosse (écumoire) et le poitevin vmt'rase (pelle à
vanner '). Il n*est pas douteux pour nous que ces deux mots
contiennent le suffixe ^aricia : cf. l'expression picarde pairie
sûimertchc^ synonyme de pakk saifntoin, poêle à écumer. U
faut avouer cependant que lorsque la phonétique nous fait
I. ri n'est pis imposssible qii* -âtorTssâ ait rédkmmt exisÈÉ, âskm le
bTtn viilg;iîfc Je la G^ule septeatHorute, i côté de -airic^m^^ui était U
forme dj5si que, éuni donne le peu de viEaljt^ de-atricem dans te domaine
de U bngue d'oîl .
3, Gntftrot, en Imf, mm^^ H, S 567.
LE SUFFIXE 'ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL 183
défaut — et c'est toujours le cas lorsque nous quittons la
région normanno-picarde — nous sommes plus d'une fois inca-
pables de nous prononcer entre les deux formations concur-
rentes. Il en est ainsi notamment lorsqu'il s'agit d'animaux de
sexe ou de genre féminins. D'après l'expression oiseau chaceret,
et substantivement chaceret, qui désigne l'épervier dans l'Est,
et où il faut sûrement reconnaître un type *captiarïcius, on
peut croire que dans jasse bateressCy nom de la pie-grièche en
Poitou S nous avons affaire au type *battaricia; l'analogie de
freline couveoire^ geline couveresse, d'une part, de paiele sainieoire,
paiele sawurcchcy de l'autre, semble appuyer le type *cubarï-
cia, plutôt que *cubatorïssa. Cependant la sémantique ne
conseillerait-elle pas plutôt de faire appel à *battatorïssa,
*cubatorïssa pour rendre compte des mots bateresse, couveresse}
La question reste pour moi indécise, et c'est pourquoi je ne
fais pas figurer les mots de cette catégorie dans les listes qui
suivent.
3° Confusion de -arïcius et de -ittus. Le suffixe -ittus
ajouté à un mot en -zVr, -iere produit des diminutifs en -erety
'CretCy dans l'Est -trot y -eroiCy -erat, -erate. Un mercerot est un
^tm mercier et une banerete est une petite bannière; les types
étymologiques sont clairement *merciarittus, *bannaritta.
Mais que faut-il penser de chardonneret et de pâquerette ? Le nom
ds l'oiseau doit-il s'interpréter par le « petit chardonnier » (cf.
le wallon cherdonîy chardonneret), le nom de la fleur par « la
petite fleur de Pâques ? » Ou bien avons-nous affaire à des
formes altérées depuis une époque récente dont les types fran-
çais primitifs étaient * chardonere:;^, * pasquerece} Je ne suis pas en
état de me prononcer. J'hésite aussi pour l'explication de noms
d'instrument comme coulerette (couloire) àumerette (écumoire),
percerette (vrille); aussi ne les ai-je pas admis dans mes listes.
En revanche, j'ai admis quelques mots en -eret^ même quand ils
ont des féminins en -erette, lorsqu'il m'a paru que la séman-
tique appuyait solidement l'hypothèse de formes primitives en
-ere:;;^, par exemple dameret, dittienchret, filleret et quelques
autres. Des recherches ultérieures dissiperont sans doute les
ténèbres qui obscurcissent encore une partie du domaine où je
1. Rolland, Faun. pop., II, 147.
î84 A. THOMAS
me suis aveiuuré, ei permettront d*en mieux fixer les limites.
J'ai divisé les mots formés à l'aide du suffixe -aricius en
deux séries, selon qu'ils ont pour base un thème nominal ou un
thème verbaL Chaque série se subdivise en trois sections :
adjeaiis, substantifs masculins, substantifs féminîtis. Les for-
mations les plus anciennes sont celles qui reposent sur des
thèmes nominaux : certaines remontent à Tépoque impériale,
comme le prouve l'emploi de sigillaricius par Vopîscus» et
les textes mérovingiens et carolingiens ne semblent pas en con*
naître d*autres. Il est difficile de dire it quelle époque on a
commencé à employer le même procédé de dérivation en l'ap-
pliquant à des thèmes verbaux : le jour où le verbe sigillare,
que nous ne connaissons que par les glossaires, a été d'usage
courant, sigillaricius a dû faire l'effet d'un dérive de thème
verbaL La coexistence de sigillaricius et de sigillare con-
tenait en germe la dérivation de thèmes verbaux, qui est
l'extension du procédé primitif. Dans la période française elle'
même, il est parfois impossible de dire si tel adjectif en -err^
vient d'un substantif ou d'un verbe: latera,^ paîert:^^ nn^kre;^^
par exemple, appartiennent par indivis à JaUy pal^ îingh et à
lûter^ pitkr^ Ungkr,
h THÈMES NOMINAUX
K AdJECTÎFS
AKG0ILLEREZ, dcstîné à prendre» conserver les angttilles : haeq anuHUtrtch
( 1 5 9Î , dans Gôd. , AN wiLERKcM ) ; iac^Uf mmlhrtih (15^4, iUà. , ville» ec,
lu iac^Hfau vUUrfeh); its^que anXHÎÎfr/ (1619, ihtd,^ lu iacqumu villtrty,
ASKEREZ, reUtïf aux àries : râhim quon upfeiU aumtls {xvi* s. Du Pînet,
dam God.« ASNERET). CesHa Tmduction du latïn a&înusca vltis, Icxru-
lioti où le uins exact de iAsinu^ca est mcertairi. Œ ptuiï ba^ k subsuntif
A13VZV.ËI, propre  faire des aubes de roue de moulin : sef mù amvnchts
()|I4, dans God*, AevERECHE» saos définïticn).
aAKCHERE2, prûpre à travatiler sur un banc^ sur un établi (?) : mgut'f hanclut'
rem {1,1 \$^ dans God., bascmeresse, siin s définition précise)* Bîen quH
ioit qoestron 4:1 dvi^ous de a%nfr MitruH^ ce qui semble la même chose
au point de vue ojitiijnelt Tétymolr^ie nt. p«ut être la inèmc^
BAKEREZ, qui 4 Ic droit d ivoif unc bannJÈrc, aujourd'hui Imnnereî, Voir
LE SUFFIXE JRÏCIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL iSj
Toblcr dans Sd^tmgsb, àtr Akad, dtr SVissemch. ^u Berlin^ philos.- h istor.
Cbssc, 19 janvier 1895.
BASTAKEz, BASTEREZ, proprc 4 coudrc Iës bits : aguh hasiûfeuo iyihXTÛ, Trt-
iùr) ; aiiiilk hutfffu (SiiîtaCf dans GaJ.» yASTERECE).
'bataillerez.» garni de batailles (sorte de fortification) : partes haieiUtnjM
(God., batailleoh): taur hateUMresse (J. des Prcis» GesU de Lîègf, 1872),
Panni les exemples de God., batailleor et bataîllerft^ je me contente
d*en relever deux, qui accusent nettement Li présence du suffîîie -ari-
cius : nrf pnUlUrtchf ei ouvraige bataiîkrf^.
jHECHEREZj recourbé en forme de bec: cognû Ivcbe fesse (1^9, dans God.,
BECHERESSE, sans définition précise), Dans ce teîtte unique, Ja cognée
Mterfisf s'oppose à la cognée plate ; il s'agit vraisemblablement de Ter-
minette.
^BL AEREZ, propre .i moudre le blé : mouîim bîitrfi d foHÎére^ Cn*?» ^^^^ God.,
HLAiERET, oû On Ut aussl uu exemple ânglo-nor mand postérieur qui porte :
MoHn hlayerd et molyn Mafertiy
BQSEHEi, sait de bousc. Deuît ex. dans Godef*, bocseret; dans Tun on lit
bmtstrt't^ dans Tauire, hn^m^* Comparer îc nom de famille Bettsrq^, porté
par un imprimeur de Tours,
RRA1SERË2:, propre à moudre îc brais : maUitî braifrtch (145 1, dans God*j bmas-
SEîiECHj; mohn ht ma H (144*^* Corbie, dans Du Gange, v-^ molekdinl'm
brasakil'm). Il faut distinguer bruierech (qui vient de brais) de broîsertch
(qui vient de brasser}^ ce que ne fait pas Godefroy,
ftRUEREZ, qui vît dans les bruyères : ccfcq brutrect, kok bmertche (1517» dans
God,, bruerece), La forme masculine est refaite d'après le féminin.
BUCLiREz, fait d'une corne de l>uffle : cor htgUrtç (quatre exemples dans
God*, bugleret.)
CESSA ftEZ, payé à titre de cens : timtm sfxtarium frummii cessartti {ObU, ât
SûHgnac, dans Anh, htstor. tin Lmmt^in, Vî, 556; il y a cnsarH à la
chalmerez, qui se trouve dans les chaumes : (^ierrÉ chaumentie, cailbu que
Ton ramasse à la surface des chaumes 0aubert, Ghss. du Centre^ suppL,
p. jé).
CHEVALKHEZ. I . Faît pOur un cheval : sek cfxt'ûhrfs^i (Gratidfs Chron. de Frana^
dans God.) 2- Qui se porte à dos de cheval : bkrr chevakrtC4 (Chrétien de
Troyes, Brec, 4725).
chevrékez, qui nourrit des chèvres : Haie QuinTekch (noé)» aujourd'hui
Haîf Bqniverksse, hameau de la commune de Fonteneîle (Aisne).
GaiJ)llEKOf qui fréquente les coudres : wallon raine a^ece; champenois et
lorrain ritim càrûAse^ normand rat ne cmidretk etc., grenouille verte, rai-
nette (Roliand, Faune po^.^ lll, 74),
GOLEREZ, ^UA scrt ^1 CDU 1er ; patUe cdkmse (xv^ s,, dans God,, coULlERFiîSE).
cosTEREZ, qui est de côté. Sîgn.iîé par TobkT d ■après l'adverbe costerfctme^t,
employé par R. de Condè.
i8É a, THOMAS
CROCAR£^. muni d*un croc : arhakstas crùcarfssas {CarluL ih- Moniji^llier, diins
Rjyiio^ard, lit SI9).
DAMmai, propre aux dames. Le mot n'apparaît qu'à la fin du xv^siède, i£t il a
dési lors la ïormi: tiameri^t^ iiattii'r£ttt(0* de Saînt-Gelais d^is God*, cotnpi.).
On dannn d'abord le nom Je ckir âamtréî au carrosse suspendu (Littré).
DiMA>{CHEREï, habillé comme pour un dimanche. Mol ^ui ne se trouve ^ue
dans b locution varitt dbnaml^rtt, au xv<: siècle (God.)*
DOSSEREZi qui forme dos (?) : une tichhu dtK^ressi (i^Sû^ dans God., Dos-
SERESse), Il faut certainement lire mhlv(^ ^u Heu de esthtm ; c'^r un*
varknte de eichife^ non mentionnée par God., mai^ qui se trouve dans
Tfjèhes^ 4004*
DRAPA RliZ, propre à fouler le drap : tnolis drapar^i (xilf s,, CartuL de VArtigt^
charte n^^ 5Î* dans Bull, soc, anh. du Litmmin, XL VIII, 317).
ESCORCEHEZ, propre à broyer l'écorce, le tan ; moultn tscorceniiç (1257, Tour-
nai, dan^God., ËSCORCËRAïc).
ESPiNEREZ, formé par des épines : humon tspincrech (Froissan. dans God,).
HUCEK^f de la dimension d'une cheville {tuce) : tarere tuçhertç^ QUfcereç, htmf'
rti (Thomas, Esmis^ p. 293 et 295 ; Horning, dans Zeitîchr.jùrram. PhiL,
XXil, 56ÛCEXXV, 614)
EVEHiz^ mû par l'eau : moiyn tràtrfi (ijos, dans God.^ ewerei); uti§ 5o«
^iïtiuvr^'iJY (ijSs, Liège, dans God., um 2). J'ignore ce que c'est qu'un
fl Èùu eauwercsse ».
FEKEREÎ, propre à couper Hierbe pour feire du foîn : fax fainatct {DîaL
mini Grfgotrf. 22. 20^ cité par Homing, Tobîer et God*),
FES'EREî, FfiKî^EREs^, FL.\VEREZ, ELOEREZ (?). Ccs cjuatre adjcctifs se fTOUVeUt
seulement au féminin da us la locution anârt Jmntce^ etc., enregistrée pir
God. j'ignore de quoi il ^'agit; mais il n'est pas douteux que nouf
soyons en présence du sutîixe - a rie î us, et il est probable que ce sont
des thèmes oominauit auxquels nous avons affaire,
riKEHEï, qui marque les limites ifim). Ne se trouve que dans la locution
tJmnin fifterei^ particulière à la Bourgogne, sous la forme pnttoi^ fimrot
(God.* FINEROT).
roiKEREZ» qui donne la foire : vosgien htrhi fofrmw^ mercuriale (H aillant),
FROM ESTEREZ, mélangé de froment. Ce mot ne se trouve que dans b looj*
tioiî atmm frOfUiffUrtu^ particulière i la ncgion du Nord. Ot% dit par
extension coupe Jrnm fat freif, htihitl fromenhtti, coupe, boisseau d'a^'oinc
frOfHénUfikf (God,, r ROM ENTER ECE).
FRurrEREZ, qui sert a mettre des fruits : m-hhum Jruikns (î|t4. Tournai,
dans God. ^ richart).
FtjiuERE7. qui sert à charrier k fumier -, fûttfkt Juntifiche {^iJ^t^^ dim God.,
FUMERICHE),
GAUrREREZ, qui sert a faire les g;mfres r um fins ^auffrak (1534, Tournai,
, dans God., WAominr» où il y a six autres exemples, tous de la tn^me
région).
LE SUFFIXE -ARICWS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL iSy
COTEREZ, qui supporte la gouttière : mur goutterot (1462, Meuse, dans God.,
gouterot). Cf. ci-dessous l'article gotere^ substantif.
GRF^EREZ, qui Sert à tailler le grès : martel gressrrech (1335, Artois, dam
God., grf^serech).
JAMBEREZ, qu'on fixe à la jambe : escljocfs jamberesces (Renart, vu, 582, cit4
par Homing, Tobler, God.). S'emploie comme substantif masculin et
féminin.
LAMPREIEREZ, qui tient de la lamproie : anguille lampresse, locution de la
basse Loire (Rolland, Faune pop.^ III, 97 ; cf. mes Mélanges, p. 98).
LATEREZ, qui Sert à clouer les lattes : cleu lalerech, cUus laterés, cloi lalerat,
claux laitrés (xiv«-xvc s. Artois et Franche-Comté, dans God., lateret).
Ajoutez clam lallerés en 1319 (ibid,y paler).
LOGEREZ, qui est en forme de cuiller Qoc/) : tarrahrum quod vulgo dicitur
loccrety de quo factures rotarum perforant rotas suas (Du Cange, tarra-
brum; God., loceret). C'est la cuiller, tarière des sabotiers actuels, que
beaucoup de patois appellent encore louce (Labourasse), losse (Haillant),
cf. ci-dessous locere^ substantif.
.MALEREZ, qui fait office de malle : sas malere's (i 358, Nord, dans God., male-
ret); selle mallerecf (1393, Douai, ibid., malerece).
.meiteerez, affermé à moitié fruits : vigtu moiterasse (xiii* s. Metz, dans God.,
moiterece). Cf. le subst. fém. nieiteerece.
OBLiEREZ, qui sert à payer la redevance dite oublie : six pains oubliere:^^ de rente
(Cartul. de Chartres, dans God., oublieret).
PAROissEREZ, attaché à la paroisse : pre^tres paroissere^ (Guillaume Le Clerc,
Besanty dans God., paroisseret).
PASQUEREZ, qui se mange à P;\ques : clx>ulx pasquerés (Mènagier de Paris , II,
143; cité par Tobler). God. a un exemple de temps pasqueret; mais je
crains qu'il ne soit pas sûr et qu'il faille suppléer de entre les deux mots :
l'emploi de pasquere^ comme substantif masculin sera noté plus loin.
PEAGEREZ, grevé d'un péage : chmius peagere;^, paaigere^ (1330 et 1338, dans
God., peageret).
PLOMBEREZ, qui sert à clouer le plomb : cleu ploumerech (1304, Artois, dans
God., PLOMMERECH, OÙ il y a deux autres exemples auxquels il faut ajou-
ter en outre ceux qui se trouvent à l'article plommeret).
PORCHEREZ, destiné à contenir des porcs : fosse porcherece (1303, Fontevrault,
dans God., porcherece).
POTEREZ. I Qyx\ sert à faire des pots : terre poteresse (Roman de /. C^ar, dans
God., POTERF^SE ; l'adjectif est encore vivant, dans le môme sens, à Bou-
logne). 2 Qui sert à puiser dans le pot : louce poterece (Poésies du Xllh s,,
dans God., ibid,).
ROCHERRZ, qui vit dans les roches : colombe rocheraye (Cotgrave). Le féminin
rocheraye, dû à une méprise, a fini par s'imposer même au masculin.
C'est ainsi qu'on lit dans Mozin, Koui'. Dict. complet (1811-1812) î
î88 A* THOMAS
« Riximaie ou pigeon de roche, oisc;iu de passage de la grosseur du Inset 4
ROSERHZ (?) God, ne cite qu'un exemple : « Gdtklks nnerfcfi^s, 1551, compte,
LUlc, ap. l^ Fous, Gloss* ms., BibL Amiens* w II traduit imperturhablc-
meni par « de roseay *k D autre piirt, A Tarticlc gerûele, il voit dans
gitrMlf une sorte d'épke, ce qui ne cadre ^ère avec le sens attribué :
Tadjectif qualificatif roser^.
SALMOïJEttEZ, qui lient du ?iaumon : truite samtiûmierâssf (Taille^'enE, Viandkr^
êd, Pichon et Vicaire, p. 190, etc.). Manque dans God.
TAfltEREZ, qui sert à clouer les boiseries {iabks) : daux Uékrei^ hwlerés, muL.
(1597-1 5 5 î, Tournai ♦ dans God,, tableret), L'adj. s'eroploie comme
substanûf masculin.
TANERF^, propre à broyer Técorcc pour faire du tan : tmitlhi hmmrtx (1298,
dans God., tasnrret). On trouve dans Du Cange mohndmum hmnerfi
cl nmUmlhium tun^rei,
TAVERKEtiEZ, qui haiîte la taverne \jol H iavtniertî {EUtM. de mnf LotifSt dans
God., TAVERNERIT, OÙ l\ }' a troisaun-çs cnanples),
TRRCERKI, affermé au tiers des fruits : vtgttf i^ui- Sl^vinhn Manon Univet in-
cirasse (1 338, Metx> dans God., tierceresse). L^adjecdf s emploie substan-
tivement aux deux genres,
TERRAGERËZ, qui Sert A recueillir le droit de terra ge : paniie knQgtrti$t{C0ui,
de Montargis^ dans God., terrageor). L'expression a ét^: recueillie par
Cotgrave, Furetière et le Dktiommlre de Irê^^oux : ce dernier l'ail de
tfrnigfreue le féminin de ttrraget\
TERREREZ, quî Sert à charrier de la terre : hrowtte krtsse^ Htrrtfh^ itrtHλ
(1406-1442, Flandre et Anois, dans God. terrage, i),
TIKCLEREZ, quj scTt à cbuet les tringks {tingtts) : dmtx ttngkrà (1452,
Tournai, dans God., tînglerkt)- l^ variante iingmrà (lire iingufrésX
attestée eti 1341 et 1492, est difficile àeîtpliquer.
TOKBiREï, OÙ U y a de la tourbe ^ frssi:^ tmtrheréi (1304, Corbie, dans God,,
TOUMBERrr),
TRUAXDKRtï, de truand : mhacUs truandirf^ (Gautier de Coînci, d^ns God.,
trcandkret).
VACAREi, VACHEREZ, OÙ passcHt les vaches ; Porte Fackerece, nom d*une porte
de Douai, mentionnée dès 1155 sous cette forme (God., vagheresse);
f7n ViiCiirrsSG^ nom d'une route romaine qui se détachait de celle de
Nîmes àMontpellirret aboutissait à Aiguesniortes- (Germer- Durand, Dki.
du Gard ^ p. 57 ; Mistral). *
VEtERË^, <iui appartient à la volerie, à la juridiction du voyer : d^emifts
ftaux, tviérfi ii fkmi^tff^ ('îî^^ Cari, de Si-JosepJi en Vûi^ dans God,,
%*ounl-'T, OÙ il n*y a que cet exemple emprunté à Du Cange et où Tau-
leur îraduit par « frayé^ par lequel on a coutume de passer **).
VEK0KKGERE1&, qui scH à rccueiUtri i emmagasiner la vendange : fianitr ifii-
LE SUFFIXE -ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL 189
Jangeret (Rabelais, dans God., vendangeret) ; grancfje vetuiemaresse
(1397, ibid.y vendemaresse).
viGNEREZ, qui sert à tailler la vigne : serpe vigneresse (Cart. de St-Maur, dans
God., vigneresse). L'adjectif s'emploie substantivement au masculin;
voyez ci-dessous.
VINEREZ, qui sert à emmagasiner le vin : ulle vineresse {Sermons de saint Ber-
nard y p. 1 30, cité par Horning et Tobler). La graphie ss dans un texte aussi
ancien, qui ne confond pas 5 et f est surprenante, comme on Ta remar-
qué ; le scribe a dû penser à la désinence des noms féminins d'agents.
vooGEREZ, qui ressemble à un vouge : serpe vougeresse (1472, Anjou, dans
God., vougeresse). Carpentier a relevé dans des lettres de rémission du
Trésor des chartes, JJ, 189, no 120, année 1456, bailliage de Mâcon, le
substantif féminin vougesse, qui désigne un instrument identique à la serpe
vougeresse de l'Anjou *. Mon confrère M. Gerbaux, qui a vu le registre JJ
189, m'affirme que Carpentier a bien lu et que le texte donne à trois
reprises vougesse et non vougeresse : il est bien probable que l'original de
la requête présentée à la chancellerie royale portait vougeresse avec le sigle
abréviatif de er, et que les notaires ne l'ont pas remarqué.
2. Substantifs masculins
ABLEREZ, aujourd'hui ahUretj filet à prendre les ablettes : nous deffendons les
dblere's essener (corr. essever) a terre (13 17, dans God. Compl.). La forme
ung ahl ter e cités: par CarpHîntier dans Du Gange, ableia, d'après un inven-
taire.de 1 5 11 , est certainement fautive ; mais faut-il corriger utte ahliere^
itng ablier, ou ung àbleret} On ne connaît par ailleurs ni ablier ni abliere.
ASNEREZ, plante recherchée par les ânes : an^Oy sorte de gros chardon
(Roussey, Gloss. de Bournois).
Bezaretz, lieu où il y a des bouleaux (^be^) : Bessare's, commune de Saint-
Étienne-de-Maurs (Cantal).
bocarez : « boucaréSy houcharés, variété de raisin noir » (Mistral). L'étymo-
logie paraît être bouc : cf. bouchard, qui a le museau noir.
cabrarez, oiseau qui tète (ou qui passe pour téter) les chèvres : prov. mod.
cabrarety hulotte ou chat- huant.
CHAPEREZ, drap à faire des chapes : for^ chapere^ por faire chape <i <Mii (1243,
Châlons, dans Godef., texte republié récemment par M. Fagniez, Doc.
rel. à Findustriey I, 151).
CHALMEREZ, oiseau qui vit dans les chaumes : cJhiumerety espèce de bruant
(Littré). Cf. panière^.
CHASEREZ, éclisse, moule à faire les fromages : lx>ttereaulx, chasere^ (1467,
dans God.). Jean Thierry a introduit la forme picarde caseret dans le
I. God. a omis ce mot, il faut se rapporter à Du Gange, vougetus.
IÇO A. THOMAS
Dkitmtnuire JhittîOfS'Uuin â^ RobvTî Esticnn^' , d'où elle a p.is^c dans
Nicot, dans CoigTrisx* et d^ns Antointr Oudin^ qui donnent au^si chiisfret.
Rkhelct, Fureticrc et TAcadd^mie dédai^ncru ct^s rvrmcs ruraux. Trévoux
reprend cfhiifreî, qu'on €st A^ionnC* de ne pas trouver dans Linné, Ce der-
nier donne en revanche castrtl^ qui n'est probablement qu*un*;r ctïquîlJe
rv^graphique pour casent. Peut-être faut-il considérer notre mot, iJoni
la forme primitive est douteuse, comme un diminutif de chnkr^ ckisH'rei
cependant àkisier et chasit'n- diisignv'rn ordinairement un ustensile ditïc-
rentj la cage où Ton fait sécher les fromojîes sortis du ckufUl, ce qui me
fait croire à un type latin 'casearktnm.
DAMEREZ, aujourd'hui àûmertl^ homme dont b tenue, les manières rap-
pellent celles d'une dame. Ce mot n^ipparaît comme substantif qu'âtJ
XVJc siéde (1)64, J> Thierry), et tl a dés lors la forme actuelle damtrtt,
(VoytJ! ci-dessus rartide DAMhRKif, adiectîfj. - Un cépage porte en
Limousin le nom de thimfret (Ltttrét suppL).
D0SSBIIE2» tapisserie garnissant le dos d'une chaise^ d'un dai?-, etc. Quoique
Froissart emploie déjà thsse/d\ la forme picarde dosserech^ mentionnée au
xvr siècle par Du Tillet (God., oossKKET) ne laisse aucun doute
sur la présence du sufliAe, -arlcius. Les sens actucb du mot technique
Jossfret portent à le considérer comme un diminutif de dtu&itr ; cepen»
dant àùsierfcc^ dont il sera question plus loin, montre qu*iî n*e5t p^fô
impossible que dmîerti se soit substitué à dositre;^.
FAVERE7-. lieu où il y a des fcves : Fiftrrau, comnïune du territoire de
Bel fort, hiveroh en 1295, Vdvtytuh en i^oj, Fdjhds en 1594.
VESfeH£Zj le mois où Von ûh les fottts, juillet. Cité par Tobîef diaprés
Godefr., qui ne donne que deux exemples (Jentréchf /inerte) ^ de la Flandre
et de la Champagne".
FIGARE2, lieu où il y a des figuiers : Figarh, ferme» commune de Beile*
garde (Gard),
tiLLEKE^, homme dont la tenue, les maniéa^v rappellent celles d'une tUlc.
Le mot nVst employé que par G. Bouchet, cité par God,, sous la fornic
fiUinî i il semble fabriqué sur le modèle de damtrii.
OËN ESTEREZ, oiseau qui fréquente les genêts : ç' net rôt ^ fauvette, syhie des
jardins (Maillant, Essai sitr un pijtoiî %mgim^ Dkt., p. 289).
GonriRÊZ^ mur qui supporte la gouttière (cf. ci-dessus gotert^, adjecrif). Le
mot est encore vivant dans la Meuse (fotitteroi^ nmr sur lequel s*appuient
1 , A cauMr même de sa rareté dans les testes, Jhiet^ ne ngurc pas dans
le Ghisairf tiés liaifs du MaHU£Î de diplûmatiqm de Gir>' ; on n*y trouve
que son svTionyme ftiiat. D après Gîry, final désignerait « lin juin «
iutllet dans les Flandres, juillet et août dans les chartes lorraines » ; cette
distinction n'est pas fondée. Partout /emî veut dire « jumet » ; La J*îfiitl
PUrr$ final mtrant n'est pas» comme le croit Giry, le i^*^ aoiït, maïs le
29 juin.
LE SUFFIXE 'ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL I9I
les chevrons, les gouttières, Labourasse). Il y a un autre substantif
gotere:;^ tiré du verbe.
JAMBEREZ, instrument pour suspendre par les jambes : rouchi cambré, bâton
courbe auquel on attache les porcs, veaux, moutons pour les écorcher
ou enlever les entrailles (Hécart) ; meusien jambrot, traverse mobile
retenue par un crochet de fer au sommet de la potence et à chaque bout
de laquelle on attache, pour les suspendre, l'un des pieds de derrière
d'un porc tué pour fendre ce porc et en ôter les viscères (Labourasse).
Dans un autre sens, meusien jamhrot, croc-en- jambe (Labourasse).
JASCHEREZ, le mois où l'on laboure les jachères, juin (Flandre et pays val-
lons). Cité par Tobler qui ajoute un nouvel exemple à ceux de Gode-
froy. Ce dernier a relevé gasker dans une charte de 1366, mais il est
probable qu'il y avait un signe d'abréviation qu'il n'a pas remarqué.
LOBAREZ, lieu où il y a des loups : LoubaréSy quartier du territoire d'Arles et
montagne près de Saint-Jean du Gard (Mistral).
LOGEREZ, aujourd'hui laceret, lasseret, tarière en forme de cuiller. Voir
ci-dessous l'article logerez adjectif ; cf. Littré, lageret, lasseret.
OSSEREZ, aujourd'hui osseret, couteau de boucher qui sert à trancher les os.
Le mot n'a pas d'historique dans Littré ni dans Godefroy ; il apparaît en
1752 dans Trévoux (Hatzfeld-Darmesteter).
PAILLEREZ, oiseau qui se plaît dans la paille (des chaumes) : pailîeret, bruant
(Littré). Cf. GHAUMEREZ.
PASQUEREZ. I. La semaine de Pâques. Cité par Tobler. God. en donne de
nombreux exemples, pasqueret, mais on ne voit pas pourquoi il a
omis celui-ci, que CarpHîntier a inséré dans Du Cange, pasgha intrans :
« Pour sis vins deus livres dis sous tournois febles prestez a Mons'' en
Pasquerez entrant cccxliij ». Dans cet exemple il ne faut pas construire
entrant avec pasqufre^, comme le fait Carpentier, mais avec cccxliij. God.
admet en outre un substantif féminin pasqiierie, avec trois exemples pour
l'appuyer : « ung messagier envoyet a Paris en paskeries » (1320) » ; « le
vint cinquiesme jour d'avril en pusqueries o (1492); « le mardy en pasque
ries » (1539). Peut-être faut-il lire pasquerie's partout et fondre ces
exemples dans l'article pasqueret ; toutefois la diphtongue ie ne serait
pas régulière puisqu'elle correspondrait ici à un ï et non à un é latin.
2. Cadeaux, consistant sunout en œufs, faits à l'occasion de Pâques.
God. n'a pas d'exemples pour le moyen âge, mais il se réfère aux patois
actuels de la Beauce, du Perche et de la Normandie. On peut ajouter
le Bas-Maine : « Pakri\ œufs que les fermiers donnent à leurs proprié-
taires vers Pâques ; quête que font à domicile, vers Pâques, les bedeaux
et les sacristains » (Dottin).
PORGHEREZ, porchcrie : Porcherais-CsiSSOy hameau, c"c de Pont-Château,
Lx)ire-Inf.
TERCERBZ : « tiercercts, certaine crosse branches on the outside of a vault »
(Cotgrave, traduit dans Godefroy).
s 92 A. THOMAS
VA^AkKT/, VACHLRF.Z : /'ji^Vf i, cung Je la Onurguc, jiiiM nomme des troi
peaux Je vjches sauvages qui habitent sur ses rives (Mistral^; Vdciyerr
hameau, c-*- de Demigny, 5>aône-et-Loire. Cf. plus haut, v.\c\rez, ad
viONfcREz : « vigiurfty serpette d'une forme particulière dont se ser\'eDt k
vignerons pour tailler la vigne » (Jaubert, Gha. du Centre).
viNHAKEZ, \'ignoble, prov. vi^ndnSy gasc. Hpijn's, dauph. vigturet (Miî
tral;.
5. SUBSTAN'TIt'i ItMISINs
KKKOKKw:!., bergerie. Nom d'un domaine non identifié : La Bergcresse en Bn
Ci 42}, Ijongnon. Paris sous la doiuinatiou an^laisey p. 100).
HKZARk/A, lieu ou il y a des bouleaux : Hesseresse, nom de deux hamcau3s
commune de la Clourtine et de Saint-Priest-la-Plaine (Creuse).
boscARKZA, lieu où il y a du bois : Boucherfsse, hameau, anc. paroisse, coin
munc de Clairavaux CCreusej, Bostdhiresses en 1484."
Bos<^AKhZA, lieu où il y a du buis (}) : Bousseresse, hameau, commune d
Ij Souterraine COeuse;, Bossaressas en 1427.
BovâReza, chemin des bcvufs : via de la hounci : la hozjreci que tendit a
Vcm: itinere de la /H>;i/ri'ii/(Teirier du Temple de Vaulx de 1552, f*» 8
16, 46; communication de M. Tabbé Dcvauxj.
fk.>VhRhCK, bouverie : lU^uresse, hameau, c"*: de Lussac-le-Château (Vienne)
Boerecia en 904 ; Bouvresse (Oise); La Bouvrtsse (Oise, c^^ de BeauHeu-les
l'ontaincsj.
..MjKAKhZA, lieu où i! y a des chèvres : La Cabroulasse^ hameau, c"»: de la Sal
vetai rilêrault;, (lxibi\ue'i;d en 1157: Cabdresse (pour Cahraresse), hameau
c"t de Salazac CCiarJ;.
c.Ai.MAKEZA, lieu OU il v à des terrains incultes (dilni) : Chaufnaressefhnmcau
c'»«- de .Ma^siac ((Santal;.
^osiFKHJ.. I. (.L qui a des côtes : wallon coisterfsse, sorte de pommes i
cotes. 2. Ce qui a la forme d'une côte : anc. wallon coestresse. angk
saillant d'un toit, dit aujourd'hui côte. 3. (x qui garnit le côte : wallor
ioiiti'ft'^st'^ rampe â jour d'un escalier portatif (Grandgagnage, I, 120
II, 516 et 567;.
iK)SsKkK(.h, jambage de maçonnerie : jambes ^ piirpiiif^nes ou dosseresses (Çoui
Je MoHtjoit rAmtiur\\ dans Cod., i)c)sshRhssH). La variante dosserassi
des coutumes de Paris et de Dourdan est probablement due i une substi-
tution de suffixe récente.
iAG.NhKh(.K, oiseau qui vit dans les marais C^J;' m-; : \\allon//j^''M<'/«y^, litomi
(Kolland, Eut ne pop., II, 2^8;.
lAVfKK.L, lieu ou il y a des fèves : I-\ivreise. commune, et Faveresse 01
/■./i'/yy*i', hameau, c- de (irauves (Mamej. Je suis très surpris de voir qui
M. I.ongnon place /•"./: vi^u- dans la série des vocables géographique!
remontant â un nom de propriétaire pris adjectivement et cmplo\*é ai
LE SUFFIXE -AMiaVS EN FRANÇAIS ET EK PROVENÇAL IJJ
féminin et qull suppost; un type *Faberîtia'. Non seulement le nom
dlïomme *Faberîtius est invraisemblable', mais h persisuncc d*un f
devant IV jusqu'au xm^ siècle (Fitirresc^^s 1145, Kiîvmvj 1163, Fatt-
tf^es I3l3i Fiiwressfs Iî68, Ftivntsse^ t4>9) n^ontre clairement que k
type étymologique est * Fa b a ri c i a & .
FORTAREZA, FORTFRECKt français moâi:m€ forttrfss^, lieu forrifii-. M* Toblera
consacré une petite dissertation à l'ctymologie du mot foriermi ' : il y voit
une forme allongC'C de fortrta^ sorti de for tac par Tépenth^sc d'une r,
comme le normand jurdrin, de jardin. M. G. Paris accepte en gr-tnde
partie la manière de voir de M. Tobler * ; il se borne à rattacher la fonne
fùrklece, où M. Tobler voit une dissimilation de forlfrfa\ à un type
*fortancia existant déjà en latin vulgaire* Je crois qu*il fliut aller plus
loin et admettre en latin vulgaire Texistence de 'fortaricia à côte de
•fortalicia. Qjjoique le provençal dise ordinairement farfiileia, il con-
naît aussi fortarc^a^ qui figure datis une charte d*environ 117^ (GaiL
christ.^ ni, 1074) : fortùrfyii « heu fortifié ïj fait pendant, en provençal, à
irtAiir^j «lieu desséché ». La forme française /iV/r^r est cerîainenieîii
sortie de fm-knce^ par syncope, et non de Jtvit{f, par épen thèse.
FOtREiŒCEr herbe qui donne la foire : messin Joennsf^ mercuriale {Chan
HeurUtu chant i ).
t%'ERKARF:ZÀ I lieu OÙ ïliiver est rigoureux (?) : Hyvtnmmt , nom dW
hameau delà c"^ J^ G ion x (Creuse), au xv*^ siècle Ivtrmrt^sts'i, prononcO
aujourd'hui en patois huirmima.
JAMBERECE, wallon jambrfsm « planches mises k plat qui forment le bord
supérieur d'un bateau et qui débordent v«?rs Fin teneur ; on dit ausiii jm-
iirtsscs ïï (Grandgagne, II, 551)' Jotfdrtsse se rattache au verbe fûttJ^,
joindre (voy. ci -dessous). Quant à jamhrfjs^^ il vient ce naine ment de
Jamhf^ bien que le rapport exact, au point de vue sémantique, ne soit pas
très clair : compare/ Icmploi de gemm à côté de jamhttsse dans cette défi-
nition : « âéitê^ terme de râtelier, bois servant à revêtir les fnoE et à sou-
tenir hilamhresse ii (Grandgagnage^ 11^ 522),
f|A>lARE2A, lieu où \\ y a des loups : Umbarfise^ nom de deux communes
(Ardèche, Cantal) et d'un hameau (Cantal). M, Tabbé Devaux me signale
1. Dkt. top. de ht Mat Ht ^ introd., p* vui.
2. On a effectivement Faberius, tiré de laber; mais avec le suffixe
*îciu$, le latin dit FabricîuSi d^aprèsla déclinaison faber bri.
3. Sitiungk de r Académie de Berlin, 2} juillet 1896.
4. Hemam'iî, XXV, 621*
5. Mém, dt h jac. i^* tuit, ft arch, de là Crttisf, X, pS* — Ce village a
iloiiilè soti nom à une famille k laquelle se rattache Thelléniste Courtaud-
Divemèresse (1794-1879) dont le buste a été érigé en i88i sur une place de
iFdletin.
Him$mmt XXXtl 1 1
194 A' THOMAS
les mencions tr forcsti de k Lin*iir^£t\ serv^a de la Uwarici n dans un
docuiiiem dauphmois de 1 543 ; un mas du canion é^ Morestel (Isère) est
iim\ appelé Lovartcia en i ^48 ; il ne parait pas avoir sub&ist<£ av^ ce
nom. (UL Chevalier, CoîL des CûriuL dûuph.. Vil, 88 ei 89)-
MALEREct, selle faisani offiee de malle : smt sur twe malikuice (Perveforcstj
dans Vtoà,^ malerech).
MEiTEHKEGE, femic à moitié fruits : lorrain et romand moikrfssf, môitetaiS4,
etc. dâins Gûd. moite r esse, exemples dei23îâi49i.
PAKERtXE, aujourd'hui punnneîie, pierre, brique, etc., employée en parement,
c'csi-â-dire de façon à laisser voir son pan le plus large, Pitmteusse s'op-
pose A hufhie. Cf. ÏJttré^ Hat^fcld^Darmesleter, elc.
K>HCAKE^A, PORCHËRÊCE, porcherie. Godefroy a plusieurs exemples de pt^r-
chertctf comme nom commun dans des textes bourguignons. Noms de
lieux T Ftifàxresu (Charente, Charente-Inférieure^ c«*e de Genou i Hé ; Loi-
ret, cnc de Vilianiblain ; Luxembourg belge); Pottrcfkiresxas (Corrète,
c»s de Lcstars) ; Poufcfiaféssf (Ardéche , c"* de Dompnac ; Pmm-hirmei
(Lozère); Poun-hresnf, c^f de Vabrcs, Haute- Lo i re ; c"'^ de Celles, Puy-ile-
Dôme ; PottufxrtssfS, c»« de Pébrac, Haute- Loire.
RÔOAKEZA, lieu où l\ y a une fabrique de roues ; Rtuitrsus, hameau de b
CT« de Royére (Creuse), dont le nom est écgt Rintddrasiis dans tous les
anciens documents, et Roiaricias dans une charte de 626^ republiée
par Julien Havet * ei commentée au jxjint de vue topographique par
M, Zenon Toumieux^ 1^ forme actuelle reproduii approximativement la
contraction et k changement de ou en u usuels dans k patois de la
commune de Royère j on écrit aussi RotuiersaSy Red fr sas. Dans les com-
munes limitrophes, k moi se réduit souvent à Ders^,
sljLAMiiA, SECHERECE, français moderne sÀ-})erfssr, lieu desséché (en ainciext'
provençal)* état de ce qui est sec. A Bordeaux on dit sfqtierisso, ce qui sup-
pose un type siccarîcia. On sait que l'italien hésite entre sec€hert€£iù et
i^ï^Àf^iVcfV} comme adjectif ; comme substantif, avec sîgni6cation collective
(branches sèches) et abstraite (sécheresse), il n^emploie que stahtrkdo.
TERCERÈCE, ferme au tkrs des fruits : lorrain lercertsu, Urceram^ ctc*» daiis
God- TiERCERESSE, exemples de 1240 à 1588.
VACâKt^A, VACJtiRECE, vacheHe. Nous avom dà|à signalé vaccariita dans \m
textes du haut moyen âge* Le mot ne parait pas s*étre conservé dam
la langue commune), mais il est très fréquent dans la toponmle :
I, Mémoire paru dans la BihL dt fEwk des Cbari^St Ll, 41, rémiprimè
dam ŒwîTf-j d^ Jaikn HlIïW, 1, 152,
3. Mémoire paru à la fois dans les M/m. de U SêC. âii se* mi. el arch. 4^
la Cnntif, Vll^ 597 el dans le BalL dr k 5d<. itt(iî> fi ht st. du Limousim^
XXXfX, 4Î9-
l^ L'îtatien conïiaîi Tadj. iMU^jn^^to « de vache *, et le substantif m^^O'
Wfcié» « cluir de vathé » (A> Qudin); Te^pagnol a iMqtifn^ù comme adjectif
LE SUFFIXE 'ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL I95
Lavaqueresse (Aisne) ; Vacharesse, c»* de Berzème (Ardèche) ; Vacheresse
(Charente, cn« de Touzac ; Doubs, . c»* de Montandon ; Loire, c^c de
Saint-Hilaire-Cusson ; Haute-Loire, c»»cs de Les Estables, Félines, Saint-
Julien-d* Ance , Saint- Voy, Siaugues-Saint-Romain, Venteuges; Puy-de-
Dôme, cn«de Saint -Alyre; Haute-Saône, cnc de Fayraont ; Haute-Savoie ;
La Vacheresse (Creuse, c^c de Janaillat ; Nièvre, cne d'Azy-le-Vif ; Seine-et-
Oise ; Vosges) ; Vacheresse-les-Basses (Eure-et-Loir); Vacqueresse (Sommt,
cnc de Q.uevauvillers).
II. THÈMES VERBAUX
I. Adjectifs
APOIEREZ, qui sert à sappuyer : caiere appoiraiu (1427, Tournai, dans God.,
TABLETE ; le mot n*est pas relevé à son ordre alphabétique. Le sens n'est
pas douteux : cf. la locution synonyme caiere apoieoire (écrit qmyere
appoyoire)y dans God., apoioir.
BAIGNEREZ, qui Sert à se baigner» : cuve baignereche (1434, Valenciennes, dans
God. baignereche).
BAREREZ, qui Sert à bairer (les tonneaux): vrille harreresse (16 16, dans
Thibault, Gloss, du Blaisois),
BATELEREZ, adjectif de sens incertain , que Ton trouve appliqué aux villes
qui n'avaient pas de commune, dites viles hatelereus ou bateices (Beauma-
noir. Coût, de Beauvaisis, § 647, éd. Salmon, variantes) ; hatelere^ semble
tiré d'un verbe hateler, comme batei:;;^ de hatre.
BATEREZ, qui Sert à battre, à fouler le drap : molin hatere^. Bien que le mot
manque dans Godefroy, voici un exemple qui ne laisse aucun doute : in
moUndinis batere:^ de Brana (Matton, Dict. top, de VAistu, Batrez). Le
mot s'emploie aussi comme substantif masculin.
BERSEREZ, qui Sert à tirer, à chasser (berser). Voir God., berseret, et complé-
ter i l'aide des observations de Tobler. Le mot s'emploie aussi comme
substantif masculin.
BOTEREZ, qui sert à bouter, i. A bouter, à appuyer une construction : ars
boutere^, pilliers boutere^, 2. A bouter, à fouler le drap : molins boiitere^.
(God., bouterez). Le mot s'emploie aussi comme substantif masculin.
(de vache) et comme substantit masculin (vacher) et vaqtieriia (vacherie)
conune substantif féminin. Il semble que le gascon ait eu un substantif
analogue, à en juger par le nom d'un archidiacre d'Aire, Peregrinus de
Vacarissa (1^0^ y Limborch, Hist. Inquisit., 2c partie, p. 8).
I. Cf. le lieu dit Calmis Baniaritia, mentionné, dès le milieu du
vii« siècle, dans la vie de saint Colombau, I, 1 5 {Scripta rerum Merovingi-
carum, IV, 80). On est surpris de voir M. Holder relever ce mot comme
celtique dans son Altult, Sprachschati,
1^6 A, THOMAS
anASSEKE^:, qui sert à braisscf la bière : tmmd bras$crkh [coiT- hrass^ridf 7^
(14^6» d^ns God.« tHUSSERECH).
&OEtt£Z« 4|ili sert à fake b ïessive (Wr) : siïhuruu, saîhuruu^ mUmrmst
[c*cit-â-dtrc j^/f /m*'r^^4f], «f trépied syr lequel cm pUcc le cuvcau à lessive »j
dans N Meuse (Labourasse). Cf* Méhingtt Xéfy^n./ran^\^ p. 136.
CHACEftEZ, j. qui sert à chasser ichifns ckiceroi:^ (God.^cHACEUots). 2, Qm
diasse : ojtmt i^oti'm, nom de Tépervier dans le Doubs (Tissot, p. |is).
Le moi s*emplde comme substantif masoilin.
ciURGËJiËZ» qui sert à charger, à garnir le méfier à tisser : traistne ^artherisu
(God., CARcHiHESSE, sans définition)*
cHAKtEAC^t qui sert à charrier ; seîUî (dttfmhes {lire €arûri£ht$}, €armkiMg^
caritu^m (God., ganereche, caîu esche).
CHEVAUCHEREZ. J * Dooi 011 ^ SOI pour chevaticher : mmitUt cheiMUfhtrtt^
mppe dyeimtchertiu, 2. Par extension, qyî est porté par des chevaui ; liù-
tkn tfmMtiihâressr (God., chevaucheresse, cHEVArcHERET). Ajouter h
variante bkrt chemuchtria pour bitn clmaUrfc^t dans Chrétien de Troycs,
Erec 4715 .
DANSEREZ, où Ton va danser, k A Epinal, 'ûyahpUrre dans^rossf^ rocher sur
lequel on allait danser à la fête des Brandons » (Haillant, Dtet,^ covrosse,
ESPQSEREï, dont On se sert pour épouser : tinritl npmstrrch (God., ESPOSB-
RIT).
foERF.K, dont on se sert pour mesurer les terres fouies (?) : vint honkrs et §rt
virf^iî juertnn tn krn a le mrsurf tk Liq^e (1248, Rmmnia, XJX, 86),
FOI. ER kit» qui sert à fouler le drap : mot in pkre^. God. a plusieurs cxetnplcs,
Vii/mikniSj fmikfff. En voîci d*autres encore : k moitH fokrt^ dé Saini-
Boiifre (Arch, tiai, JJi* f" 13^ v») : ks nmlins Ji^krf:^ àt Qhirîrts {(hiâJ)\
tmkndinuifi Jûkre^ (Du Gange, GUROmill, î). Le mot s'emploie comme
substantif masculin dans le mime sens, — Terre f ou htrcht (1 2S1 , Si Omer.
dans God., fouleresse, sans définition : sur îVmîploi de terre grasse pour
fouler le drap, voir Tarticle f&uJm du DicL du cûmtfient de Savarj^ des
Brusbns).
FOftSERECE, adj. fem-, destinée à frayer (Jcfrsêr) : wallon carpi /ûusseressê
(Grandgagnaige, II, 526).
IMASEREÏ, qui sertflà fraser », ^cosser ou briser? : une piiiek fraieresche (1^1 5t
Anoîs, dans Bihi. de fEc. des Chartes^ Utl, 600* manque daos
Ood.).
WBJOÊQ^JEÊfM, qui donne un air fringani : cordem frinpitrà (Amant remim
ûotiêlm^ V* léai).
lUMRREz:, qui peut se fumer : bois fumer&t^ nom de h clématite dans 1c
Doubs (Rolland, Ehre pop.^ l, 6),
GtntÊREi, aujourd'hui j^uUkreL M. Tobler rattache guilkni à guUkr^
guikff tromper, L*hypoth<^sc est vraisemblable, bien que le rapport
sémantique oc îoiï pas très clair. GuUkrei^ sous k forme fém. gmUerttu^
LE SUFFIXE -ARICWS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL 197
se trouve pour la î^rtmière fois dans le Motiolû^iie ik rjuiouft^ux^ que
M» E, Picot croit être des environs de i46o{Romiima, XVI, 481),
joiKDEREZ, qui peut Se jmidrt, c'est-à-dire s'accoupler^ se mettre ati Joug :
\0^iiin Viiidie jédroîse^ jédrassf (HûïVàTii, Dkt., p. ^40).
MACHEREZ, qui sert k teindre : nn'e îtuuhensî^ , à Kanuir. Grandgagnage
n'enregîiitre pas le mot, mais il emploie Texpression, vo faubjte ; au supplé-
ment, il à : a mar^f ouvrier teinturier ». Je suppose un verbe mâcher
w teindre » sans en connaître rétymologic.
MALHAKEZ, quî Sert à fouler (malhar) le drap : molm tmilharei (1471, Fcïle-
liîî, dans M/rn, des se. naî. et arch. de ia Cratse, X, 361),
NAGERiz, sur lequel on peut naviguer, i . En parlant de feau : foss^ na^frd
(1340, Corbie, dans God.^ nageret)* 2, En parlant du bateau : rmi'/f
fkîj^irfsst (Gloss, lat. fr* dans God.^ ihid,). Le mot s'emploie aussi comme
substantif masculin.
fALEREz, qui scn à pakr (garnir de pievix) : chiux paltrei^ paieras (i3979
Picardie, dans God., fa LE s et, ï)*
riKDEEtEî, qui sert à pendre : gihfts mt arhrts pindereti, pfttdrets (CmL dt
barrai ne, âé Gor^e^ dans God,, pemdeïiet)-
FESCHEREZ. I* Opi Sert à pécher : kl kl, kiUlri, cîau peschtret ; hûrqm^ ré pés-
çhertce; îmffs ptschertces (God., pescheresse, pescheret). 2. Qjjî pèche :
cûrheau ptschrtt [cormoran] (God., ihîd,); crot pfs^herot [cormoran] » en
Bourgogne (Rolland, Fitune pop., IT, %%Z)i cran péch^oî, cro p^schtr&t^
ai^k /vjf^r^jK [balbuzard] (id. Hk^ II, 8); %'erî-copècheris [martin- pécheur]
(Libourasse, p. 545, v*^ fafhptxkîw) ; miiriin peiditrtt [martin-pccheur]
à Mompellier (Bibl. de VÉc. des chutts^ LV, 240) ; mtrU pkl>€ret [martin-
pécheur) en Limousin (Rolland, Fûum pùp.^ II, 72).
prrARiï, qui pète : rti pétard, rùi pèirret, troglodyte (roitelet) en Forei
(Rolland, Famifptf., II, 288) et en Lyonnais (N. de Puitspelu). En
Lyonnais, rd ptUint désigne et îe roitelet et le hanneton a corselet plus
soyeux, que les enfants considèrent comme le mâle. N, du Puitspelu se
refuse à voir dans petaret Tidée de « péteur * ; dans ses (rraUi, M retire
rétviuologie absurde qu'il avait donnée, et se rallie à une idée de
M, Homing (Zfte/^r, /. r. P/;., XIV, %i\) d après laquelle petarei se ratta-
cherait au radical de pdit. Mais rd^peUint veut incontestablement dire « roi-
péteur * : comparez le nom de vûco pihmso^ petonso donné au roitelet dans
le Midi de la France, — dme-petrmsi^ cane-péirosse, cune-pi^îroie, nom de
k mtepidht dans le Berry, la Beauce, TAnjou, etc. On sait que cet oiseau
fait entendre, dans la saison des amours, un crépitement guttural qui lui
a valu son nom (Rolland, Faunt /h^., II, ^45),
FiQUERtz, qui pique : daux piqmrh (1441^ Bé thune, dans God., piqueret),
PLEIERE2, qui se plie : té}k phyéresdx (iss^i Tournai dans God,, PLOiE-
resse). Se trouve aussi comme substantif masculin.
FOlTERl^, qui se porte : dmett porUrme (God., porteressë).
198 A, THOMAS
RICAKEREZ, rieur : doux yiux bkns et riquaneré (Amant rendu mrdeîier^
V. I6i8>
ROLLlREZ, roulant : {ititris: rmileresses, etc, (God-, ROLEftEssE 2, et rolèRET),
Le mot est particulièrement fréquent dans les inventaires angevins du roi
René ; chariii roukrei, sourlit rotêllrrr^^ comheik roulerfsse, cic. C'est I
tort que God. a cru y voir un substantif masculin : fvuUrei qualifie tou-
jours fÈûr//i qui vient d*être exprimé.
SAîMERll, qui sert à écrémer (â enlever le sain) i paydltJ saymfrfthiî^
(1434, Valencicnnes, dans God., smmereche). Il faut recoanaitre le
même mot, mal lu> dans /WiW/« mumitrtc^s {1^63, Valenciennes^ iiàn%
Gûd., SAUMIERECE, sans définition). Le mot s'empîoie aujourd'hui commt
substantif féminin,
SEiEREZ, qyi sert à scier : eoulîtl soirei {1459, Reims, dans God,, soiret),
soRDEREZ (?) : dirlUrts sôrdreresus, dtrlière iordrt$si {i%%%^ Namur^ datii
God*. sordreresse) ; derît sordtr esse {1-^2^^ Namur, dans God.^ deri^).
La dtrk est de la terre glaise ; faut- il rattacher Tadjectif sordere^ à souràrr^
souiller, où â iourdn^ ou tué me clierirber une autre étymologie ?
TAILLEREZ, qui seH â tailler : serpe idUeroHe (1614, Nevers, dans God.,
TAILLERDT),
TÈCERÊZ, qui tète encore : véh tos'ro (Rousscy, Closs. à€ Bourmis)* La Éonnej
•/ffjVr^ *kxîei\ est répandue dans l'Est : elle repose sur un iyçt •tittîare,'
tandis que le français propre ieîtr repose sur 'tittare.
TIREREZ, qui sert à traire {tirer) les vaches : ddh (tresa (1 î 13, Tournai^ dans
God., TIRESCE).
VENDEREZ, qui est à vendre : pain vendird (ij'^ï^ Laon, dans God., VEND£-
RiT). Cf, fital, vetderecm*
2, Substantifs MASOJLtNS
RATEREZ» ce quî sert à battre, i. Patois des Fourgs (Doubs) hctfrft^ batte ;
partie de b baratte (Tissot), 2. Moulin à battre, à fouler le drap (voy. ci-
dessus haîerci adj.) % tnoUndhmm de Battre^ {xiî« s,), aujourd*hui, par dian-
gement de suffi xei2> BUre^m^c^^ d'A%'cnay (Marne); Bairet, moulin,
CM dTvot-k'pTé (Cher). —
BERSEREZ, chien de chasse (voy, d-d^sus berserez. adj,). Le sens de * car-
quois », donné par God. et d'autres, et celui de « javelot «, admis par
M* P. Meyer (Gîrari de RonssiUmh ç^. 2 57), ne sont pas justifiés (voyez
à ce sujet G. Paris dans Hûmamii Xl\\ 602, et XXJ» 291).
BOCÊREZ, animal tjui pousse la terre ' : hausitroi, un des noms de la taupe
dans le Doubs {Rolland, Famfr pop,, I, ^)*
t. Boiicer, pour houier, forme des Vosges, du Doubs, etc., remonte soît au
haut -ail. boian, soit à un type verbal 'bot tiare, foirné en roman avec k
suffire -iate, appliqué au thème germanique primîrtf boit-» »
LE SUFFIXE 'ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL I99
BOTEREZ, moulin à foulon : Boutrais, hameau, a^ de Saint-Pierre-des Loges
(Orne).
CHACEREZ, oiseau chasseur : vosgien chaisserot, chassera, épervier (Maillant) ;
vosgien chasserot, autour (Rolland, Faune pop,, II, 38).
GRAVEREZ, outil pour creuscr (chaver) la terre : chavro, patois de Tannois,
près de Bar-le-Duc (Meuse), dans Zeitschr, f. rom. Phil., XVI, 475.
Labourasse écrit chavrot et définit : <' houe employée pour le provignage. »
coiLLEREZ, registre des redevances à percevoir, à cueillir. Ce substantif s'est
conservé jusqu'à la fin de l'ancien régime sous la forme cueiîleret, qui est
dans Trévoux, et qu'on s'étonne de ne trouver ni dans God., ni dans
Littré.
COPEREZ, aujourd'hui couperet, outil pour couper. Le mot ne paraît pas
attesté avant le xvie siècle.
FENDEREZ, outil pour fendre : fenderets, coupoirs (1391, Reims, dans God.,
FENDERET). Cf. refettderei.
FOEILLEREZ, aujourd'hui feuilleret, outil pour feuiller, faire des feuillures. Ni
Littré, ni le Dict. gén. ne distinguent, au point de vue de l'étymologie,
feuiller a faire des feuillures » ait feuiller « couvrir, se couvrir de feuilles » :
ce sont pourtant deux mots bien différents. Tandis que le second vient de
•foliare, le premier remonte à *fodiculare, c'est-à-dire qu'il est une
simple variante phonétique de fouiller.
FOLEREZ, moulin à foulon : Les Foulerets, moulin, c^c de Parigné-l'Évêque
(Sarthe); Foulleray, c^c de Montigny-le-Chartif (Eure-et-Loir), en 1477
Moulin-Foulleret ; Le Foulleray , moulin , c^c de Saint-Jean-sur-Mayenne
(Mayenne).
FORMEREZ, aujourd'hui formeret, terme d'architecture. La définition donnée
par le Dict. gén. est la suivante : « Arête saillante d'une voûte gothique ».
V. Gay dit plus largement : « Bandeau en saillie sur un mur ou au-dessus
d'une fenêtre, à la naissance d'une voûte d'arête dont il épouse la forme
ogivale (Gloss. archéol., p. 733). Il a un exemple de 1397, plus ancien
que ceux des autres lexicographes, où l'on lit : « fenestres fourmes
(corr. fourmees) d'estanficques, fourmoyrets et rem plages. » Le voisinage
du verbe fourmer précise l'étymologie; la graphie fourmoyrets semble
contaminée par *fournjoir, qui a pu se dire dans le même sens.
COTEREZ, avant-toit formant gouttière -. goutter et (1415, Meuse, dans God.,
goutteret); vosgien gottWot, même sens (Haillant). God. a plusieurs
exemples bourguignons de gocterot, etc., mot qu'il ne définit pas, et qui
s'applique à une partie d'un parement d'autel ou d'un dais : il s'agit
vraisemblablement de la partie antérieure, comparée à la gouttière d'un
toit.
graverez, oiseau qui grimpe (gravit), grimpereau : gravelet (forme dissimi-
lée), nom du grimpereau en Poitou et en Saintonge (Rolland, Faune pop.,
II, 78).
GRIMPEREZ, oiseau qui grimpe, grimpereau : grimperé, nom du grimpereau
200 A. THOMAS
en Picardie; ^rimp^Ui ((orm^ dissimulât), nom dy mémçoîstau en Nor-
mandie et en Savoie. Ik miîme qu'on a la forme verbale griper^ à côté
de grimp^r^ on trouve gripdd dans le Luxembourg et j^ripeîat à Meus
comme nom du mcme oiseau (Rolland, Faîme pop.^ Il, 78).
HUCHËîŒZ^ oiseau qt,i bûche, qui hue : uiâitrùh nom du chat-huaïît â
Mon tbel îard {R olland , Fmme pop.^ll, ^X ').
JETEREZ:, instrument qui sert à jeter : nieusien jitrût^ bîion fendu par un
boui cî que Ton tient par l'autre, au moyen duquel on lance une pierre
placée dans sa fente (Labourasse),
LAKCEIEZ, oiseau qui lance, quï poursuit les autres : lorrain lunarot^ raMt-
rat^ C'pcrvier (Rolland, Fmm^ pop, , II, ^4),
MUCERËi, oiseau qui se cache (qui se musst) : vosgîen mtimtrùl^ troglodke
(Labourasse).
NAGËRiz» bateau pour aller à k rame (pour n(^tr) 1 mgereî, petit bateau
pour chasser le gibier d'eau (Littrê),
KAJiiiU-ï, bateau où l'on risque de se noyer : lyonnais myrrH, petit bateau
fort dangereux dans lequel il ne peut tenir qu*une personne (N. du Puîts-
pelu).
PARTAREZ, FARTEREZ, instrunieni pour partager, couper : lyonn- /êr/iJrrf»
parierH^ hache de boucher (N, du Puitspelu, Littré , suppU) ; dans le*
Terres Froides du Dauphiné pûrdinii et parklè (communication de
M. l'abbC' Devaux) ; portraits marteau de paveur ser\'ani â ébarber et à
tailler (Littré) ; manceau parint^ patirei^ couperet (Moniesson) ; blaisois
palkiret^pûHrif^ polirait, couperet (Cotgt^ve, Thibault). Cf. mes MUm^ts^
p, 119.
PERCEHEï, outil qui sert à percer ; patois At& Fourgs passtrH^ vrille (Tlssoi).
PISSEREZ, vase pour pisser : patois des Fourgs pseunt^ baquet â urine, vase
de nuit (Tissot),
FLOIËRE7., ce qui sert à faire ployer, charni^:rc, penture : âtttx ploytréi emphyù
à peitdrt um ftmtdrt {lé^i^ Tournai, dans God., ploieret). On trouve
plus souvent dans te même sen^phkruil, d*un type *pl tcari olum .
RAJrtENEiiEï, ce qui sert a ramener : ramhifrfi^ trait au cordeau que îc char-
pentier fait pour prendre la longueur des arêtiers d*un toit (Littré)* Le
moi apparaît dans la première édition de Furetiùre, en 1690.
ERBATEiŒZ, outil pouf rebattTê ' ; nhatUret^ ouril pour façonner Tanloise
I . M. Rolland groupe avec raison ukîjfr&f (Montbêliard) et t 'ancien fran-
çais ÎUiheran (Cûigravx), auquel correspond aujourd'hui lutiéran^ lut^/rûn^
dans la Suiisc romande ; mais je ne puis croire avec lui qu'il s*agissc du
radical luc> briller. Je vois dans lucheran une forme agglutinée poyrj
3* Rétsttre doit être entendu dans le sens de « rabattre « et non de
« battre de nou^^u » ; le réûtUrH scn en dfet à équarrir ou i ammdîr
LE SUFFIXE -ARICIUS Eti FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL 201
(Littré). Le mot a été relevé pour la première fois dans VEncyd, méthod,^
Arts et métiers mécan.^ t. I (1782), p. 55, où il est écrit rebattret QAozin^
Souviron et d*autres conservent cette orthographe) et donné comme
usité dans les ardoisières de Rimogne (Ardennes).
REFENDEREZ, outil pour refendre : re/etideret, coin de fer à Tusage des ardoi-
siers (Littré). Même provenance que le précédent ; d*abord écrit refendret,
TRACEREZ, outil pour tracer : traceret (on dit aussi traceîet et traçoir\ poinçon
servant à tracer les divisions des instruments de mathématiques ; outil de
fer pointu dont les charpentiers se servent pour piquer et ligner le bois
(Littré).
VERSEREZ, saison propre à verser (labourer) les terres, le mois de juin : en
waim, en mars et en verserés (1322, Rethel, dans God., verseret). La
forme verserot dont God. fait un article à part n'est qu'une variante pho-
nétique. Ce terme correspond à jascherei dans la région plus septentrio-
nale ; il est omis par Giry dans le glossaire des dates de son Manuel de
diplomatique. Maillant, Dict,, p. 616, woeyé, indique des exemples
inconnus à God.
VOLEREZ, objet qui vole (en Tair) : berrichon volerety volant rustique Qau-
bert, Suppl.).
3. Substantifs féminin
AVALERECE, puits de mine que Ton creuse : avaleresse, bure que Ton avale,
c'est-à-dire que l'on est occupé à creuser (Grandgagnage ; cf. Littré,
suppl.).
BATERECB, action de battre ; battresse ou batteresse, action d'une pluie violente
et surtout de la grêle, qui battent le sol et les récoltes (Jônain ; cf. God.,
bateresse). — Nom de lieu : Batresse, étang, c^ de Mouline (Vienne) ;
Baptresse, hameau, ci-devant paroisse, c^c de Oiateau-Larcher (Vienne),
anciennement Batri^ia^ Batreiia, Bateret^ia, etc.'.
boterece, nom de lieu : La Bouteresse, c^ de Sainte- Agathe-la-Bouteresse
(Loire).
BRUiERECE, bruit : Tel tempeste et tel brueeresse » (Ovide moralisé, dans God.,
bruierresse).
CHAPLERECE, action de chapler, carnage. Voir les exemples de Troie cités par
Tobler.
I. Certains historiens, notamment l'abbé Le Beuf, interprétant le nom de
ce hameau au sens de « action de se battre », y ont vu une raison de placer
dans le voisinage la bataille livrée par Clovis à Alaric (Longnon, Géogr. de la
Gaule au r/« siècle, p. 579). Il est probable que Baterece désigne l'emplace-
ment d'un moulin à foulon.
202 A. THOMAS
CQULERËCEt ouïil pour coder : patois de Pont-Audemer cmkresst ou cûtde-
nlUn pa^oire (Kobin).
CRlMERECE, Outil pour écrémer, écumcr i meusîcn mimerméj vûsgien kAn-
TQUC (dissimiUition pour krf'mrossr) écumoire (Labourasse, chamatth;
Haiilant).
CRiNERECij outil pouf crettfr (entaiH^f) : wallon krtunress, scie à refcïulit
(Grândgagnage^ rïcranner). Cf, ci-dessous recrekerece*
CRIIOIECE, action de crier. Voir God., crierece» et ajouter uti exemple quî
se trouve sous BRLnF.RRESSE.
CROissERECE^ action de grincer. Voir Toblcr, et God., groisserece.
EscHA^rERECE, outtî pour exover : walion ^rni^tresse, écrit xhavresst en 1 %€^
(God.), pic à l'usage des houillcurs (Grandgagnage, maver 3).
ESCCMERECEj écutïioîre : wallon ItottmfHsît (Grandgagnagc).
Es^rEssrNERECE, TESSiKERECE, Cuiller pour arroser {eikssimr^ kssttm) le rôlî
(Grandgagnage).
^oautRECE. 1. Carde pour //o^«4f (briser) la laine (Duhamel du Monceau,
Âfi de la Draperie, 1765, p. 27.) 2. Pièce de fer employée pour arrêter
ou maintenir (ttoquer) d^autrcs pièces (Noutfeûu Larûussr). Un ledcographe
distrait a)'ant écrit cordf au lieu de carde ^ k sens i a été défiguré. On lit,
par exemple, dans Littré : «f Etoqurnisn^ terme de marine, cordes longues
de huit à neuf pouces » ei dans le Noùvettu Larausu : v Ekquirtsse
(Marine), nom donné à certaines petites côrdcs, » Uozm a correctemctit :
it EtoquiresUj f. Card. Espèce de cardes de 8 pouces et demi de long sur
5 de large. » Et dire que > pouces de large n*ont pu empêcher de con-
fondre une cardi avec une cordai
C0ÏN&EKECE, outil pour guinder : « guinâtresst : de ce nom est appelée attx
tiadres une poulie qui sen à guindcr la voile du mast où elle est amarrée »
(^îcot, 1606; cf. Litre, Dki. gét.^ etc., et Iltalicn ghinderficia, cité
^ifwartwj, XXXI, IJ5).
HACHERECE, Outil pour hacher, i. Wallon de Liège hochernu^ couperet.
2, Wallon de Namur haclxressi^ pbnthe épaisse sur laquelle on hache la
%natul€ (Grandgagnage, hacher).
jotNDERECE, cc quî joint, ce qui sen à joindre : wallon pndrfsse^ bordage,
dit aussi jamhruse (Gnmdgagnage, II, 531, janbrèsez); wallon ptiârtsit^
vadûpe (Grandgagnage» I, 257).
PASSiRECE, outil pour passer une manoeuvre : « passeress^, mo>T:n ou petit
cordage, pour bien serrer la voile contrv le miSl w (Villaumo» Dki, de
mantu),
pt.Aa^i^RE55i, carde ^qut ptaquer la laine (Duhamel du Monceau, Jri ii U
Draperie^ p. 27)* Souvetit altéra, par la suite, en phqmresst.
MCM^mâCE, outil pour recfper (scier tratisversalemcnt) : walloï^ rtùpertsu^
gnndê scie pour riûper (Grandgagnagc, rts^per),
RECREKEflECE, outil pûur ricrittfr (entailler en suivant une ligne courbe) :
LE SUFFIXE 'ARICIUS EN FRANÇAIS ET EN PROVENÇAL 203
wallon ricrantteresse, espèce de scie servant particulièrement à préparer les
bois de fusil (Grandgagnage, ricranner). Cf. ci-dessus crenerece.
rejetIrece, outil pour rejeter (gobeter, crépir) : wallon r'getlress, petite
truelle (Grandgagnage, ri jet, i).
REPARERECE, outil pour réparer (recrépir) : wallon ripareresse, réfareresse,
outil à Tusage des ripareù^ ou recrépisseurs. A Namur, répareresse^ par-
tie de la machine appelée hrâie, qui sert à élever les bois (Grandgagnage,
riparer).
REPASSERECE, carde pour repasser la laine (Duhamel du Monceau, Art de la
Draperie^ P- 27).
RETENTERECE, retentissement. Voir God. et Tobler.
SAiMERECE, outil pour saifiur (aiguiser) : wallon sémeresse^ pierre à aiguiser
(Grandgagnage, semer 2).
SOPERECE (?) : wallon sopresse^ partie d'un chariot, pièce de bois transversale
sur laquelle repose et pivote le hamai. — A Namur sopresse^ levain, proba-
blement (Grandgagnage, soprèse i et 2).
TRAiERECB, action de traire (tirer). Voir God. et Tobler.
VENTERECE, outil pour venter (vanner) : poitevin venfresse^ pelle à vanner.
A. Thomas.
LE ORIGINI DELLA NOVELLA
NAHRATA DAL « FKANKELEW d
NE! CANTERBURY TALHS DEL CHAUCER
I
H volume XVI dette Publications of îhe Modem Language Asso-
ciation of Anurica^ Baltimom, 1901, contiene nette pagine 405*
449 uno scritto, che^ sotto il titolo Chauce/s Franklin^s TaU^
lia per îniento di mostrare, donde questa novella sia tratta. Ne
è autore Witttam Henry Scliofieldj detla « Harvard University »,
uno studioso assai ricco d'ingegnoecoltura, col quale si ha caro
di consentire e dal quale non è tecîto dissentire senza inatura
riflessione, Perù a me, elle di quel probtema avevo toixaio
quando appunto lo scritto detlo Schofield ebbe a sopraggiun^
■ germi ', s impose it dovere di ripîglîare e approfondire maggior-
mente Tesame^ coït' animo pronto det pari a riconoscerc
erronée le idée che avevo manifestato, corne a raffermarmi in
esse. Questo esame fu condotto a termine ed esposto nella
forma in cuî, air infoori di semptici ritocchi, qui lo presento,
già da un intero anno. Che una recensione molto autore vole
sopravvenuta poi di Ferdinando Lot ' mi abbia preceduto nel
manifestare — in succinto — un giudiiîio per una pane piena-
mente conforme al mio, non è cosa di cui 10 deva essere tltro
che lieto*
LpO Schofietd sostiene che it racconto messo in bocca al
« Frankelyn », ossia al ^ Possidente », risale ad un lai di antica
î. Rtmmnia, XXXt, 41-4Î*
3. V. nella Rontania la nota 1 alla pagîoa 47.
3. Mùym Agi, marzo-aprtle t$03, p. 10^ 12.
ORIGINÏ DEL EiLiNKELEYNS TALE 20 5
iraJIzione celtiai, conasciuto nondimeno dal Chaucer in una
elaborazione francesc * del génère di quelle di Marie de France^
se pure non dovuta propriamente a leî *. In questa elihorazione,
piii probabilmente che nella fase anteriore % accadde che la
materia venîsse a combinarsi con elemenri secondari di deriva-
zione orientale; e da clà nasce Taffinità coi nurnerosi riscontri
' spettanti ail* Asia, e quel la colla novella boccaccesca ritenuta io
passato da molti, ai quali a me accadde di aggiungermi, Tori-
ginale del Chaucer.
Deile due pani in eut la tesi viene cost arisolversi, essenziale
è manifestaiiiente la prima; Taltra mira soltanto a rimuovere
obiraoni. E nella sostanza Tassunto è ben lontano dall' essere
nuovo. In fondo si tracta onicamente di ridar credîto ail' atfer-
mazione clie îl Chaucer mette in bocca at suo narratore nel
proemio al racconto. Egli ha nella memoria, e dira il meglio
chegli riesca, uno di quei lai, cheglî antichi Brettoni, prendendo
materia da svariate avventure^ solevano ri mare nella propria
lingua^ e cantar poî eon accompagnamento di st ru menti niusi-
calî» oppur leggere ^, Che aile parole rispondesse il vero, non
$i prese a dubitare se non dopo avvenita la molta conformità
col Boccaccio* Ma sebbene alquanto scossa, la fede perdur6 in
molti; sia facendo che il Chaucer attîngessesîmul tan ea mente al
BoccaccÎQ e ad un lai'\ sia attribuendo a comunans:a o affinità
dt fonti le convenienze tra il poeta inglese e il prosatore
italiano ^.
%* V, p, 437 e b 5tie lietla nota a p, 4|i.
4, V, 11021-27 seconde h numera^ione contîtxuau ed uiuale.
5* Cosi pensa, per csenipio, il Landau, DU Quelhn d€s IkkameroHj î» éd.
p. ja, 2* ed* p, 94. Nel Dunlop, Historyôf fiction, 2« éd., II ^ J42, traduzione
Lîcbrecht^ p, 251, il vedere die al TjTwhhi pareva proprio esser noto un M
dt contenutocorsimile, vkû conie a turbarc (quanto, non si capisce bene) la
cotivin7Jorte a cui Tamore em condotto per suo coiito, c cbc aveva esprcsso în
Ibrma aflTermatîva, délia deriviuione boccaccesca.
6. Taie è ropinione professât» dallo Skcat (Schofield» p. 456) neir ©di-
zîpne maggiore dclle Opère éé. Chaucer {The Compkte Wt^ki ofG^ffny
Cfjiiti€fr Bdittit Jr0m numerom Matutsaipts, Londra, Frowde, 1894-9 J^ sel
volumi), che ml spiace di non avère a dîsposidone mia. Ma anche il Wrîght,
The Omterbury TaUs^ Londra, Gritïîn, setiz' anno {neïk Univcrsul Uhan)^
20é P- RAJNA
Se non è nuovo l'ossunto, sono quasi in tutto nuovi i mezzi
COI quali lo Schofield si studia di darglt saldeieza» Ed egli pensa
di aver mesîso allô scoperto uno scoglio, su cui la coscruziune
poserebbe sicura.
Puô dnrsî che a qualche œnoscitore del Chaucer non fosse
sfu^ito che il nonie di uno dei protagonisti del Franktkyns
Talc occorre anche nell' Historia Britonum di Goffredo di
Monmouth, dove è chiamato a questo modo un principe fatto
regnaresui Britanni neir età di Claudio e di Neronej del quale
si sa dire parecchio e che si rappresenta con colori smaglianti :
« Nullus eo in bello ferocior tuii, nullus in pace mitior, nullus
jocosior, nullus in dandis muncribus profusior *. "Ma nessuno
doveva essere venuto neir idea, che dall* Historia resuiti nota
a Goffredoj e riferita appunto ad Arviragus^ la novella nostra.
Perché cio sia pensabile, è chiaro che abbiam bîsogno di una
moglie ; ela moglie di Arviragus occupa realmente nellanarra-
zione del cronbta un posto cospicuo, ancorchè non cospicuoa
quel segno che verrebbe fatto di pensare a chi, pago di ciô che
lo Schofield riferisce, non ricorresse al testo, La donna 6
figliuola deir imperatore Claudio. Il quale, trovandosi a
guerreg^iare contro quell' avversario terribile, colT offerta délie
noifize lo ammansa e lo induce a riconoscere la sovranità
romana : « Erat autem nomen puellae Genuissa, eratque tan ta
cius pulchrttudo, ut aspictentes in admirationcm duceret* Et
ut maritali lege copulata fuit, tanto fervore amoris succendit
regem, ita ut solam cunctis rébus praeferret. ^i E cosi qucsti.
p, 114, avcvA ftcritto : i The by, from which Cliauccr infomis us thit he
took thîs ulct appears lo be enttrely lost ; but Boccaccio who made up hls
Duàmeron itom Lhc popuUr fabliaux and talc3 ot' the time, bas prescrved a
version oi this siory m that work, Bay x, nura. 5, as wcU as m tbc fiftli
book of his Phihœpo. * Kù dîversa era stata ropinione del Sandras^ Êtmte
$ur G. Chauar mnsidrrf comme imitateur dfi Trouvera^ Parigi, 1^5 9, second©
m vedo sohanto attra verso alla recensioûe dell' Ebcn, Jahrb. Jûr roman, umi
engL Lîkr.^ IV^ 106. V* anche una délie note preziose (p. éjî), dl cul
W, Heruberg corrcdô la sue lodatissîma traduziûnc tedes^ {CanUrbuiy^
Gtscbkhtm) dei CanUrbury Tak$, înscrita nella Bihi, auslând^ Ctais.^ Hildbur]^
hduscn (ora Lipsîa e Vienna), «r Bibliogr. iListhut», 1866-67.
I. L, IV, c. 16, p. î7 neir edubne San- Marie, La prima mciuionc di
Arviragus s'c avuia nel c, !l.
ORiGitJI DEL FRANKELEYNS TJLE MJ
per eternare la memoria del matrimonio, suggerisce a Claudio
di fonda re nel luogo dove esso fu cdebrato una cittàj che « de
noraînc eius m è detta « KaergîoUj id est Gtoucestria ' «, Délia
donna sarâ pot fatto ancora un cenno. Aven do Arviragus scosso
di nuovo il gioga, Claudio manda contre di lui Vespasiano.
Una battaglia sanguînosa rimane di esîto incerto : « Mane
autem facto, mediaute Genuissa regiiia concordes tStciv sunt
Auœs ^ », ossia, corne si capiscc dal contesto^ Arviragus consente
un'altra volta a riconoscere l*aho dominio impériale.
In ciù che Goffrcdo dice di Arviragus e Genuissa loSchofield
vcde spiccatissimo Tîntento di rappresentarci una rara félicita
matrimoniale^ : « The historîan's chicf solicitude is to exalt the
happiness of this supposed niarriage '. » Confesso che io non
ce lo vedo punto. Che se nella versione inglese del Giles,
ri porta ta dallo Schofield in cambio del testo, Gloucester è
fatta edificare « for a monument to posterîty of so great and
happy a marriage », neir originale trovo invece « civitatem^
quae tantarum memoriam nuptiarum in futura tempora prae-
beret », Dell' affezione della moglie per il marito non una
parola ; e al più^ ripensando aile donne sabine, si potrà sperare
d'indovinarne qualcosa dalP ufficio di pacificatrice adempiuto
nella spedî/Jone dî Vespasiano* Ma îvi le cose son cosl
poco tnanifcste, che di quclla spedizione lo Schofield non fa
neppur cenno. Dal fantasioso cronista ci è bensi rappresentato
espressamente un marito tutto devoto alla moghe, stregato, si
potrebbe dire, dalla sua bellezza: il che è ben divcrtio, pare a
me, da un idéale di matrimonio, E da questo Arviragus cosl
înnamorato di Genuissa « ut ipsam solam cunctis rébus
praeferret », riesce abbastanza diverse quello del Chaucer, che,
dopo poco pîù di un anno di luna dî miele ■*, pianta la sua
Dorigen,
2. Cl 6,
4, L'espressionc, v, 11 118, « A yecr and more lasicd this blisfd lyf m, si
canvc:ne di accrescitiva in iimiuttva, sc^, ïiivece di rafFrontarh alla durata
tncdia di siŒine lune, la ragguagiîarao ad un corso di vita. Ccrto, se l*aono
oellfl mente dd pœta fosse suto varcato di molro, egli non si sarebhe es presse
a quel modo.
208 p. tAjVA
To sdce m arn»es woi^ip azid honour :
For al Jûs liist be sent in swicb bbour '
« For al hîs lusi he sctte in smich lahom » ! Corne avrebbe
potuto esprimera più esattametïte il poeta, se ivesse avuto il
proposito delîberato dî metterst in opposbione col cronîsta ?
lUc parok corrispondono i fâtti, poichè FArviragiis chauceriano^
rttnane în Inghilterra bcn due antii : « the book seiih thiîs ■
(vv Uï2î); «cosi portail libro ».
Non diciamo per ciô che qui da Anriragus la mc^Ue non su
pîù amata. Quando alla fine, ricco dî onore, egli ritoma, si
potrà parlare anche dell* amor suo vivissimo nell* apmirofar
come ineflabilmente fettce la donna :
O, bltsFu] artow oow, ihoii Dorigcn,
That hâst thy ]tiÂiy hiBboodc in ihyne
The frcsshc knight, thc wonh}^ min ofarmcs^
Thaï lovtih ihee, as hîs owenc henes lyf ï
(V* ii4oa-405.>
Manifeste tuttavia che nella rappresentarione del Chaucer,
al rovesdo di ciô che segue în quella di Goffredo, Pinnamora»
tissima è la mogUe. Qtiindt la lunga descrizione dello statc
doloroso in eut e^a é ridotta dalla panenza di Arviragus :
For bis absence wepeth she and syketh ;
Shemoomnh, waketh, wayleth, fisieth, plcvnaeih.
(V. nu^, iiïîi.)
E gli sîoni încessanti e molteplici che fanno glt amici suoi
pcr trarla da quello stato ottengono solo di rendeda nel dolor
suo pîù ragîonevole.
Gîà da ciô sî vede, quanto sia lontano dal vero to ScholieMl
quando sol principio egli afferma che « Un' analisî accurata del]
Franklin* s Talc manifesta che in fondo esso non è altro che lal
I* V, 11125-14. Mi aîtengo nel citare, solo pcrmeUcndomi qyalchc voltaj
di fîtoccan: rîïUerpufif îone^ al tcsto di un a deik cdmoni minori ddb Skcat îf
TTwf itwtattt Cmaucêb Brïwf û Cotuphte Editiûtt (*f his fVarks £ditid fit
nutticrmis MânmcripU; Oiiford, Clarendon Presi, 1897*
ORIGIKI DEL FRANKELEYNS TALE 20^
storîa dî un matrimonîo singolarmente felice tra îl gemiluomo
britanno Arveragus e la sua belltssinia nioglie Dorigen ' «. E
questo concetto ritornerà poi di continuo nel corso del lavoro.
« L'âBalisi accurata » è invece — mi duole assai il dirlo — un
franrendimento complète. Crederebbe mai lo Schofield di
potersi Ibndare su certi verst che troviamo presse la fine, âl
momemo di prender commiato dagli sposi ?
What sliolde I lenger ûf ihis cas etidyte ?
Arveragus and Dongene his wyt
In sovereyn b lisse kden fonh hir lyf,
Never eft ne was ther angrc hem bitwcnc ;
He cherisscth hir as though &hc wcrc a quenc,
And she was to hini trewe for evermore,
Of thïsc iwo folk ye gctc of me na-more.
(V. uBs4-6oO
Bisognercbbe non saper vedere altro che la superficie, anzi, la
superficie in un punto solo, per darimponanza aqueste parole,
le quali si riducono ad una formola di conclusione, comunis-
sima nelle novelle. Interroghiamoqualche tcstîmonioingenuo!
votgîamocî alla novellistica popolare, aprendo il primo libro
che capka sotto mano, La mmellaja fwrentina delT Imbriani*.
Nov, I ; « .... Divennero padronc di tutta quella ricchezza
e vissero e se la godettero e in pace sempre stettero- »
Nov. III : ti E cosi una cosa di celia, le riusci di divenire una
Regina. E visse bene.-. » Nov. IV : et Giovannafece levistedi
stare malata per qualche tempo e alla perfine fattala pace coUo
sposo, vissero alicgri e contenti, e credo ancora lo sieno, »
Nov. V : « E cosi loro^ gli sposi, senza più paura e cimore se
je vissero insieme in pace. » Nov* W : « Cosi se ne stiedero
mi uniti fino che camparono. E lei gli fece deglî altri figli;
rîmasero ricchi di tutta la ricchezza délie sorelle, che avevano
cose assai* » Si vuole che contînui ? Puo continuare il lettore
da se, posto che ne seiîta il bisogno '.
K P. 406*
2* Nclla rîstampa del 1877, Livomo> Vigo.
j, Sî vedano nello sciritto di Enrîco Fi i i pp înï, « Corne finlsconole nostre
fiabe ■, ArcL Mh Trad. popoL^ XX, 489*506, le pp. 495 sgg. Aile indïca-
Boni bibîiografiche délia p. 490 aggiungerô Petsch (Robert), FonmUmfte
hlûiu im Vf}lkiftmrd)tu \ Bi-rlin, Weidniannsche Buchhandlung, 1900.
#Mj XKXIL I j
2IO P. fUplil
Ben diverse, per poco che si osservi, è il contenuto de!
racconto. Ridotto ad un' cspressioïie più semplice, S4i non forsc
alh più scîTipIîœ in assoluto % esso ci présenta una mogUe^
che, sollecttata d'amorCj crede di sbarajsjsarsl del solJeciiatore
col menere alP amor suo una condizione, che crede di adem-
pîmento impossibile. AU' innamorato înveoe, con grande
sniarrimento délia donna^ riesce di effetmarla; ed allora il
marito concède e vuole che essa a sua volta adempia la proniessa^
Sennonchè Tinnamorato, preso di ammirazionc, riaunzia
conseguimento di cio che aveva ardentemente desideraU^J
Abbiamo insomma un atto di singolare leaJtà, che ne provoctl
uno di generosità singolare altrettanio ; e k designazione di
a generosità » pu6 usarsi în entrambi i casi, si da far apparire
più piena la corrispondenza. Che ai due generosise ne aggionga
un terzo nella persona di colui al quale si devc Tartnazione del*
r împossibile, è cosa secondaria'. Essenziali bensï i sentimentî
che vedîamo regnare fra i coniugi. Se la moglie non fosse leale e
devota^ cederebbe nella prima fase aile sollecitazioni insistenti, o
perlomeno si piegherebbe, in cambio di disperarsi^quando la sua
richiesta è siata, contro ogni presunzione, sodisfatta; se il marito
non volessc bene alla moglie, gran magnanimità la sua ne!
concederla per una volta a chî ha acquistato il diritto di averla !
Ma essenziali quanto si voglia, queste sono pur sempre cireo-
stanze, sulle quali non è neppur necessarîo d'insbtere, Facen-
dane addirittura la parte sostanziale^ lo Schofield mette uHi
uomo colla testa ail* ingiû, il capo in alto, e vuol poi persua-
derci, ed ê per suo conto persuaso, che quella sia la posizione
r. Ncl fare questa rîscrva — dubitativa — ho davantî alb mente î lisom-
1* Oltre che secondaria, parrà anche da giudicare di data rdativamcme
rccctïte. Qui cutiavia 6 da distinguerez Nella specificas^ione nostra h ooa
tnoJta aoîichîtâ par rcsuk^ç dalF esscrc ancora maalfc^u i segai di una sal-
datura. Checché sî fa ccia per csaJtare la con doua dclJ' Sncantatore c soîlev^k
it livello délie attre due; mal non accadrà che si riesca ; giacchè, cht è douto
di un potcre cosï meraviglioso, non dovrebbe curare di unn rîcompensa mate-
rialc^ m pure siragrande, Iroppo più di quanto dovrebbero aver bisogoo di
^ualchc miserabile Lira î pretesi dîstributori di terni e di quademe per U
giuoco del lotto. Va con&îderato tuttavîa che una rispondenxa questo termine
intermcdto La trova ancbe nei parallcli orientali ; V. più oitrc, p. 220.
ORIGINI DEL FRA^KELEltl^S TALE 21 1
vera* A me par dî vedere corne Tillusione si deva esser pro-
dotta, Lo Schofield (e fu cosa meritoria), inibnttutosi nel-
TArviragus di Gotfredoj corse colla mente al Cliaucer. Il rawi-
cînamento generô Pidea legittima di un possibile rappono.
Tirando poi a%^anti per qiiesta via^ %^enîie a concepîre il rapporto
corne intrînsecuj ossia taie da riguardareil contenuto narrativo ;
e siccome le narra^îoni poco o punto corrispondevano, la
fantasia supplt, metamorfosando Tuno dei termini, e pîti aocora
Faftro, skché alla fine i due riuscirono ben simili e tali da
potersi sovrapporre. Corne anche qui si vede, la Schofield è
dotato di una mente molto agile. Perché Tagilità di virtu
preziosissima non si con^'crta in vizîo, hisognerà ricorrere al
morsti e aile brigHe,
Mglaconvenienzadel nome« Amragus » ? — Poniam pureche
poco le tolga la sconvenîenza che ad essa si accompagna rispetto
alla moglie, « Genuissa» inCoffredo, « Dorigen w o « Dorigene»
nel Chaucer, in quanto i! « Genuissa », se coglie nel segno^
come rîtiene il Lot % la spiegazione etimolugica propostane dallo
Schofield % sarebbe ad ognî modo farina del solo sacco di
Jioffredo. Ci6 non importa. Per l'apputuo la convenienza si
ppone in modo energîco alT idea cui dette nascîmento* Ad
"un comparatore già cosi sperimentato doveva apparir subito
inconcepibiie che il nome si mantenes&e ta! quale nella supposta
tradirione celtica primitiva, nelT claborazione in lingua d*oïl,
nella novella inglese. Perfino le piètre niutan forma precipi-
tandogiij giù tra i massi, dentro ad un torrente. Si veda se, in
condi^ioni analoghe, si possa addurre un casosolodipersistenia,
E qui le cose sono aggravate oitremodo dalla forma prettamente
latinain cui il nome ci si offre, Altri, vedendo come Goffredo,
nel trattare di Arviragus^ si rtferisca espressamente a Giove-
nale ', e non trovando d'altronde nell' uso celiico dell' età sua
1. R no.
2. P, 414-16,
l. C, 16 ; ■ Famaigitur dus [per totam Europam divulgata, dilîgebatii
eum Roniâni ^i timebant, îta ut prae omnibus reglbus sermo de eo Romae
fieret. Unde juvenalis caecum quendam Neroni dixisse in libro suo comnie-
itiorilcurn de capio rhumbo loqucretur, inquiens :
Regcm aliquem ci pies, aut de temonc Britanno
Decidei Arviragùs. -
212 P. EAJKA
lîïilla che ben corrisponda ', pensera cbe da Gioveoale soluniû»
al <]uale Iq stesso Schoâeld aon puô a meoo di cofiœdier pixrec-
diio^, sia emaDato il personaggio V. Ma suppcmîaixi parc cfac
GioveDale sia int£r\'enuio solo per rifoggiare : o chi pocrà mai
capire che « Arviragiis » s avesse alla maniera ste^ nd M
francese, attraverso al qiiale la sorgenïe celdca de\e aver man-
dato l'aa|tia sua nella vasca del Chaucer ?
Siamo dunque sopra una strada ermnea* Coq mtto db il
ravvidnamerito tra il Chaucer e Goft-edo puô coodurre anche
ad una meta. Pareva che il poeta ingtese avesse preso il nome
« Arviragus » da Giovenale, Non sarebbe in%'ece che a
Giovenale ta deva solo mediatamente e che fonte diretta sia
VHistaria Briimum ? Possibite che al battesimo de^e una spinta
il discorrere che il cronisu laceva délia moglie Gentiissa; colb
quale ipotestf pur rimanendo dallo Scboâeld a distanza gran-
dissima^ si verrebbe ad âvvicinarsi a lui di quakhe passo. Ma
»ia di cio quel che si vuok, che il Chaucer ripeta da Goffredo
P* a Arviragus i»^ ml pare vetamente probabile^. Mi pare»
perche alla convenienza consideratà fin qui, una seconda dello
stesso génère, avvenita anch' essa dallo SchofîeId$» sebbene»
secondo me, frantesa^ viene ad aggiungersi. Ualtro protago-
nîsta del racconto, ossia 1' innamorato, si chiama « Aurelius » ;
ed « Aurclius » è nome ancor esso di un re bretione, che ha
un posto de' principali nell* Hûloria Britonum ; dell* eroe che
ritoglie la Gran Biettagna agi' invasori Sassani"^ del fraiello
e predecessore del re Uterpendragon, padre di Arturo. E si non
I* Ndk dcvt: tver trovito lo Schoficldi ridoito â Cure e liportar congetttm
itoma alb dcrivizicine del vocaboto, p. 431 (oon c^attil riavti). E cosi il
it avvcrte sollanto che Andragus sarebbe îq gallesc divcnuEO suppergiù
rgurmuf. Hou k> ^ ci sia da cavarc qualche panjto da uoa mon eu colîa
Àriv^ citau da! San-Mane» p, lût. Non sarà la stessa « SUbennûcize
derSantones » che alT AU^iUmher Spraïkickati del Holder, ], ai6, formsce
c Ark*&s ?
2. P. 4 EO*
|, V. anche t) Lot, p. i to*
4, E çQû pare al Lot, p. 1 1 1 .
|. P. 41».
6^ No» frantesdi invece dal Lot^ /. cii.
ORIGINI DEL FRANKELEYNS TALE 21 3
alîresi ch' egli è nominato per la prima volta — colP epiieto
di « Ambrosius n^ di cui gli era facile spoglîarsî e di cuî si
spoglia difatti anche în GoflFredo ' — poco dopo che s' è oarrato
di Arviragus e in maniera ed in sede cospicua^ Che di lui non
si discorra soltanto dair autore delT Historia^ poco o nulla
detrae ail* argomento. Solo nelT Hisiorta abbiamo ad un
tempo M Aurelius » ed ft Arviragus >ï^ E la conoscenza di
queir opéra per parte del Chaucer non è già costretta a rimanere
^semplice congettura, sia pur probabile quanto mai si vôgHa.
w English Gaufride », unico tra i concîttadînî, ottîene dal
poeta una^statuadentro alla Hûus of Famé, v. 1470^ con Stazio,
Vîrgilio, Lucane, ecc., e più speciaîmente coi narratori dei fatti
di Troia, « the gret Omeer », Darete e « Tytus » ossia Ditti^
i* Guido de Columpnis », ed un « Lollius », di cui s' avrà da
par lare avantî di giungere alla fine.
n
Mentre Tingegnoso Crltico fermô cosi fissamente la sguardo
sopra un punto affatto secondario, e, per un fenomeno che
ratienzione troppo prolungata ed intensa produce assai spesso,
fini per vederci quejlo che non c* era, egli ebbe U torto di
trascurare invece elementi di suprema importanza per il pra-
blema*. Non so dire quanro si sia occupato dei numerosî
1. Ndredizîoae Saa-Marte « Aurelius A m brosîus » occorrc, se ho contato
bencj diecî vohe; « Aurelius » ventidue, tut te nell* ottavo libm, ossia oelb
parte dov'egli sta propriamente siilla scena. In uu caso, VIII, 2, trovo
« Ambrosius a soltanto.
2. tf Eorum nomina et acius in libro reperiuntur ^juem Giïdas de Victoria
Auretii Ambrosii liiscnpiiit i ^uod aiiteni tam luddo tmcutu paraverst^
nullateous opus fuit ut inferiori stylo renovareiur. w E con queste parole si
chiudc il libro sesto,
}. Di un altro ravvîdnameneo, segnalato già esso pure dallo SchoBeld
nel lyogo indicaio e che contribuîsce alla pcrsuasione del Lot, p. iio-ii,
dbcorTtrè verso la fine.
4. Q.ue&to secondo torto è cornu ne al Lot, il quale senza dî cî6 sî sarebbe
guardato bene dal conchiudere (p. i n) che « Le conie de Franklin n'a ps de
sources à pnopreitient parler » .
214 P* lAjNA
paralleli che il Frankekyns Taie ha nelle région i oriental i ' ; ma
certo egli è sorvolato impaztentemente suUe variant! boccac-
cesche, di tanto più prossime al racconto inglese. Erro forse,
dubîtando forte che quella de! Filocolo, ricordata meramente
in una laconica nota^ non sîa neppur stata letta? Bisogna che
io suppltsca al difetto, e che nii faccia a istituire un confronte
accurato, da limitarsi per ora al contenuto. Anmutto è neces-
sario nondimeno che siano rilevate le somiglianze e divergenze
délie due redazioni italiane. E ragîon %^uole che si muova dalla
più anticaj dacchè, Tautore essendo il medesimo, s' ha in essa
proprio una forma antécédente.
In una città non designataci altrimenti che come luogo nativo
del narra tore, e che solo alla geografia del romanzo dove la
novella é inserita va débitrice dell* esser posta in Ispagna \ un
cavalière dl nobile schiatta e ricco assai prende in moglie una
concittadina nobile anch' essa e bellissima, da lui amata. Ne
innamora pazzamente un altro cavalière per nome Tarolfo, e in
moite manière le dà a conoscere il suo amore e cerca di ottenere
il ricambio. La donna sopporta in silenzio, sperandocoll* indif-
ferenza di indurlo a désistera; ma poichè Tarolfo continua,
ella, dopo aver voluto rivelare la cosa al marito ed essere stata
trattenuta dal timoré del maie che ne potrebbe nascere, pensa di
cavarsî dalT imbarazzo con un anificio* Fa dire a Tarolfo che
ci6 ch' egli desidera non potrà mai conseguire da lei, se non
donandole « del mese di gennaio în quella terra un bello
giardino e grande^ d*erbe, di fiori e d'alberî e di frutti copîosOj
eome se del mese di maggio fosse »>. Se la richiesta sarà adem-
piuta (deir impossibilità che sia, si tien plù che certa)^ giura
solennemente di sodisfarlo. Tarolfo vede bene alla sua volta che
gli è stato chiesto Timpossibile e perché gli si è chiesto; ma
2. A p. 4^s.
5* Cîù è detto cspressanfieme nelU disputa intomo alla pneiwinenzi di
generoshâ che tien dietm al racconto. Ivi, tra le ragîonî addotte m vantaggia
ddl* incantatore, c' è II suo essersî soctoposto al lungo e pericoloso viaggio
« di Tessaglia infino în Ispagna » (FihKoh\ éd. Moutier, lî, 65), Karratorc
é Menedtsn^ uno dd compagni cht- Fiorîo ha condotto seco dal regtio paternô
(I. 3 44), che* nonostante perturbajsîoni di cul <3ui non mi dcvo occuparç^ à la
Spagna pur sempre.
ORIGINl DEL fRANKELEYm TALE 21 S
pure risponde alla donna, « che giammai non poserebbe, ne in
preseaza dï lei cornerebbe, infino a tanto che raddimandato
dono non le desse ^* E messosi a girare il mondo» dopo aver
percorso invano moki paesî, èconsigliato di andarc inTessaglia;
dove una mattina, quando oramai dispera di irovar ciô che
cerca, slmbatte per la campagna in un vecchierello di povcra
apparenzaj che va raccogliendo crbe e radicL Prende a interro-
garlo, sente come si chiami Tebano, e corne quelle erbe raccolga
per farne medicamenti e cosi procacciarsi di che vivere; e alla
sua vol ta finisce per manifestargli rutto Tessere suo. « Che
doneresti », chiede Tebano, a a chi quello che tu vai cercando
ti recasse ad effet to ? » Tarolfo, pur pensando che sî vogtia solo
farsi beffe di lui, offre la meta dei suoi grandi averî, Tebano butta
via le erbe, prende i Hbri e gli al tri stru menti delT arte, e senza
indugio si mette in cammino coll' impaziente Tarolfo, Giunti
alla città innominata, vi si tengono celatî per il niomento. Ma
quando è entrato il gennaio, Tebano, di nottetempo, a luna
picna, esce scalzo di città ^ fa appropriate prcghiere, sppra un
carra tirato da draghi visita TAsia^ TAfrica^ TEuropa» e ritornato
prima che si compia il terzo giorno, manipola un liquido, che,
sparao sopra il tratto di tcrreno scelto per farne il giardino,
con verte il suolo in un prato fiorente, e in alberi s%'ariati coperti
di fruxti i basionî secchi che vî s' eran confitti. Conipiuta
Topera — nel dar conte délia quale si spende nientemeno che
un migliaio di parole — Tebano va ad avvenire Tarolfo.
E questî» tutto lie ta, si présenta alla donna e le annunzia
Tadempimento délia richiesta. Essa, stupita ed încredula,
assegna rindomanî per accertarsi ; eandata allora in compagnia
<ii molli, vede con loro e sperimenta in più modi la reaîtà del
miracolo. Costretta dunque a riconoscere I obbligo proprio^
domanda in grazia (per guadagnar tempo) ed ottiene che il
mantentmento sia rinviato a quando un' assensca del marito ne
dia Topportunità. Afflitta si ritrae alla sua caméra; cerca e non
tîova uscita; il dolore l'opprime; il marito se ne accorge, la
tringe, e finisce per cavarne una relazione pienîssima, Cono-
ciuto che l*intenztooe fu pura, trova che il patto vuoi essere
mantenuto e spinge egli medesimo la moglie rilunante» ammo-
nendola tuttavia a guardarsi in future da promesse cosiffatte.
E la donna va a Tarolfb e si dichiara pronta a corapiacerlo,
Taroifo sospetta nella venuta qualche mistero; e il mistero gli
2tè V, RAJNA
è manîfestato. Pieno allora di ammîrazioûe, rinunzia al-
l'esercizio delsuodirittoe commette per il marito rmgraziaraenti
e scuse. Rtngrazia lui ta donna e se ne torna felice. Il raggua-
glîo della doppia generosità stimola alP emutazione anche
Tebano, inducendolo a rifiutare qualsiasi ricompensa. E ne
résulta il problema^ quale fra i tre, marito, Innaixiorato^
iacantatore, abbia compiuto Tatro più magnanimo.
L* andamento del racconto è nel Dtmmcràn (X, j) il mede-
simo. Nèlle parole tuitavia 1* esposizione combina solo tratto
tratto e fugacissimamente ; e dove è più diffusa e particola-
reggîara la prima forma, dove la seconda ; e vengono poi anche
ad aversi differenze vere e proprie. Specifîcando per quel canto
che metta conto di farlo, la scena è posta dal Decanurkt nel
Friuli, ad Udine; e il marito e la moglie, innoniinati nel filacûlo^
sono chiamati Gilberto o Giliberto e Dianora, mentre perde il
nome suo ed è detto genericamente « nigromante a il Tebano
deir altra redazîone e Tarolfo si muta in Ansaldo, — Al levarsi
del sipario Gilberto e Dianora ci sono rappresentari marito e
moglie di già, in cambio di di venir tali sotto i nostri occhi* —
L'accenno a ft messaggieri n mandati da Tarolfo alla donna per
sollecitarla d*amore, si viene a determinare in una « lemmina »^
allaqualesentiamo parlare in forma diret ta Dianora. — Il giar-
dino è chiesto, non per un gennaio in génère, bensi per il
prossimo. — Ma le divergenze maggiori vengono poi. Ansaldo,
in cambio di andar per il mundo lui stesso, si limita a mandare;
e al posto délie peregrinazioni, dell' incontro con Tebano, del
ritorno in sua compagnia, che riempiono ire pagine nel
Filocôhj vengono a mettersi poche linee*. Similmente se ne
vanno le pagine, ricavate da Ovidio \ in cui ci si rappresenta-
vano le fattucchierie, e il giardino ci sorge dinanïsi subitanea-
mente proprio la manina del calen di gennaio. — Ritorniamo
1. «r... hi j»ù prii pt;r 1q inondo m^ndà cercandu, se in ciô akun il tro-
vasac che aiuto o consigUo gU desse : e vennegli uno aile ttiani, il quale»
âove ben s^iUnaio fosse, per arte nîgromantîca profercva di fado, Coî
quale messer Ansaido per gniidissima quamità di moneta con venu losl... j>
2i Nei irattarc qycsto pymo, Romanm^ XIVp 43 j sgg., lo ZiîigareUî non
dovtttc accorgersî^ corne non ci badai |»oi neppar io (Rom., XXXI, 40, n* 2),
che alla dcrivaiionc accen nasse gii il Landau : Qu/lîm des Dr k,^ i" cd. p, io§>
2» cd* p, J40.
ORlGmi DEL FRANKELEYNS TALE lïj
a differenze meno grâ%-L In cambio di andare, come Tarolfo,
alla donna, Ansaldo la fa invitare al giardino — già vbto da
molti — per m^zzo altrui, înviandole simultaneamente in
prova frutti e fiorî. — È de! solo Filocolo h demanda di un
indugio per resecnzione délia promessa. Per contro sokanto
nel Di'camerdn il manto, alT atto kale deir inviare la moglie,
accompagna la sollecîtazbne che essa tenti anzitutto di farsi
prosdoglîere. — E ancora accennero che è più ampiamente
descritta ne! Decmntrôn la sceoa tra V innamorato e la donna,
che vi si accenna ad un* amicizia « strettissima e leale » fra î
due gentiluomini a cui la rispettiva condotta dà luogo, e che
non vi rimane sottintesa la sparîzione del giardino — mante-
nuto per tre giorni — e la panenza del negromante.
Tutto sommato, per stretti che siano i rapport! , il Boccaccio
non ha seguito se stesso più di quello che ahri novellierî
abbiano in molli casi seguito lui senza incorrere tn reato di
plagie* Notevoie come in qualche luogo egli si sia fatto addirit-
tura, e saviamente, antagonlKta soo proprio. Dianora va al-
Tinnamorato « senza troppo ornarsi », mentre Taltra donna ci
andava w ornatasi e fattasi bella' ».
Se noi ora ci volgiamo al Chaucer, troviamo un racconto che
a prima vista par diverse assai, ma che, considerato da vicino, ci
vien rivelando convenîenze sempre maggiori. Rivestito d'altre
carni, abbîamo il mcdtrsimo schelet^o^ E în moka parte non
si iratta nemmeno di carni. Sono abiti e nulla più, di cui il
Chaucer ha rivestito, e parecchîo anche infiigottato la sua
creatura, Di copiose aggiunte bisogna che lo Schofield stesso si
a\*\Tgga5; e addita segnatamente^, « i^, la dîscussione sulla
I. Per il confronto estetîco cra le due forme, v. Rom., Xl\\ 440 (Zinga-
tdïï)t e qualche osservadone mia temperatrke^ XXXI, 40, n. 2 e j,
3. Talc, con mînori ri serve, é anche il giudîzio del Dunlop i II, ^42
Gelfedhîone inglcse^ p, 251, ixella versione del Liebrecht. Ne diverse appa-
riscon le cosc ad Alfons Kissncr neUa bella disscrtazione dottoraîe, Chiucrr
in $imtH Beiitimtti^fn \ur ihiHmi^cïîeH Liknjluf\ Marburg^ 1867, p. 74.
j, P* 444. Ma corne mai çglt, cosl corrivo per solito aile afTemiaiionî
assolute, qui dîvicn unto cauio, da limitarsi nel principio a rappresemare te
iggîunte come tali dit potersi attribuire al ChaucÊr a with some confidence » ?
Meno maie che, fatta renunierazione, soggiunge, * Thèse passages.** are
dearlv additions made by the English author «.
4» Traduco con qualche piccola libenà.
2l8 '^'^ '^^. RAJNA
causa del!' esistenza del maie nel mondo, a proposito degU
scogli pericolosi suUa cosia brettone » (v. 11177-202); « 2**, gli
abbondanti richiami ail' astrologia ** (v, 11093, 11369-370,
11441-446, 11466-467, irss7*s6i, 11S78, 11582-605);
« 3^j rinvocazione dî Aiirelius ad Apollo » (v. 11 343-391);
« e 4'', il lamento di Dorigen alla Formna, in cm ella cita
esempi di donne che si uccisero piuttosto che esser macchiate
— lunga ed inutile digressione di un centinaio di versi
(11667-768), presa dal tratt^to di S, Girokmo contre
Gioviniano »» Giâ questi passi, sommati, a costituiscono un
quarto ail* incirca dell' intera composiztone »; c lo Schofield
non in tende di a ver fatto che una scelta.
Ma cio clie spetta in proprio al poeta înglese non si riduce
davvero aile aggiunte vere e proprie. Le aggiunte valgono a
farci meglio penetrare nella maniera sua dî procedere; e ci
dissuadono risolutamente dal ripetere coUo Schofield ', che egli
« sembra in générale averseguito assai da vîcino il suo modello ».
Con ben altra verosimiglianza diremmo piuttosto che egli
tutto deve aver rimaneggiato, tutto rimpolpato. Quale ci si
îTiostra manifestamenie in molci casî^ taie suppergiù vien fatto
di supporlo anche quando il suo operare si sottrae ai nostri
^uardi. E in ver i ta io non so corne sia possibile non riconoscere
in tutta quanta Tesposizione un amore intenso dei fronzoli,
dei particolarij délie moite parole» insomma délia ridondanza.
Pero Toperazione dello spogliare e dello spolpare apparisce
doverosa* E quai sia il residuo, se essa è spinta air ultimo
segno, abbiamo visto di già (p. 210) : uno schéma che, parola
per parola, è applicabile giUa duplice novella boccaccesca. Ma
qui giova arrestarsi a uno stadio interraedio : togliere soltanto
gli abiti, rispettare le car ni.
Siamo neir Armorica. Un cavalière ama una bellissima
damigella, e^ dopo lunghi sforzi, riesce a toccarne il cuore e ad
ottenerne la mano. Per un an no e più i due vivono insieme
beati; ma poi il cavalière lascia la moglie per andarsene in
Inghilterra a guadagnar gloria nelT armi* La poveretta se ne
riniane sconsolata* Solo dopo lunghi sforzi riesce agli amîcî
suoi di scuoterla un poco. Essi la conducono a passeggiare lungo
1. /.. ciL
I
ORÏGINI DEL FRA.KKELEYm TAL^ 21 J
h Costa ; ed ecco che la vîsta délie iiavi, tra le quali nessuna
riporta il suo dîletto, quella degli scogli, cosi funesti ai navi-
gantij suscitano nella mente sua pensieri dolorosi. Gli amki
cercano atlora al tri svaghi : dan^e e giuochi. Un giornOj scgna-
tamente, si festeggia in ognî maniera dentro ad un ridentis-
simo giardino ; e, col dolore nelT anima^ deve la donna
rimanere présente. Ivi si trova fra gU altri un giovane scndiero,
dutato di ognî pregio, innamoratissimo di lei* Quel giorno
egli osa manifestarle la sua passioite. Ella, corne impietosita,
finisce per dirgli, che, se rimuoverà tutti gli scogli délia ces ta,
avrà Tamor suo. Povera consolazione per il giovane, che,
ritornato a casa, si dà ad invocare gli dei, rimanendu pur
senipre in uno stato da far pietà [ Lo sorprende un fratello,
uomo dotto, e partecipa simpaticamente alT affanno. A lui
sDvviene un giorno di un libro di arte magica^ che a%^eva visto
ad Orîeans nelle mani di un compagno, e di meravigliose
illusion! j che con queir arte sapeva bene potersi produrre. Di
qui spera salvezza péril fratello suo, cIV egli induce ad accom-
pagnarlo alla città de' swoi studi. Vicino ad essa incontrano un
gîovane studioso, che dà loro subito prova délia propria scienza,
mosirando corne gli sîa nota la cagîone délia %^enuta. E questi,
condottili a casa^ offre di quel la scienza saggi ben maggiori ; e
patteggia poi una ricom pensa di mille sterline per adempiere
dô che gli è chiesto. L'indomani tutti e tre si dirigono verso
la Brectagna; ed ivi il mago, aspettatoil puntoastrologicamente ,
opportuno, fa si che pîù non paiano esserci scogli* LietOj Tinna-
morato va alla donna — ora non più afflîtta, perche il marito è
con îei — e le annunzia radempimento délia condizione* Ella^
rimasta sola^ si dispera ed altro scampo non sa veder che la
morte. Ma sopraggiunge il marito, e saputa ogni cosa, le dice
di mantenere, celatamente, la promessa. La donna savvîa,
s*imbatte par Tappunto nelP innamorato, e, in mezsîo a lamenti,
gli dichîara corne venga per osservare il patto, mandata dal
marito suo stesso. L*innaniorato è compreso di pietà per Iei,
d'ammirazione per il marito, e con generose parole la proscio-
glie, lasciandola ritornare a casa felice ed a render felîce. Egli
invece, oltre al resto, si trova sulle spalle il grosso debito
vei^o il fattucchiero \ Sennonché questi, ragguagliaio dei fatti.
î. Qjjî il Chaucer ha deturpato grettamenie il personaggîo : Pyoïna
î» F. RAJKA
dichiam dî non vdere un ^IJo. E perô il narratore concbiud^
domandando : Chï fu il più generoso ?
Que^* ordimra è pcrfetiamente analoga a quella dd duplke
n£COnto bocciccesoo ; mentre non si pué già dire cosi, se ci si
volge alla cater%a det riscontri asiatici e delte loro direite
prop^g^ni K Ivi si mtta di una £uiciulla che ha promesso di
darc se stessa, prima che al tnanto, a un comle (talon a un
innamorato, talora a persona che ha solo appagaio un suo
€apricdo)> atlorchê si farà sposa. La sera délie nozze^ al
momento di coricarsi, si mostra turbata o tîmbanie; e lo spdso
ha da ki la confesstone del motivo. Bonario, le consente dî
mantenere Timpegno, Ella si mette in via; e per la strada
trova penœlosi intoppi : in cene veisionî un ladro soltanio,
tn altre succ^sivamente un lupo od un mostro» ed un ladro*
Sennonchè costofo, udito délia sua singolarissima andâta, altret-
tanto singolarmente la lasciano proseguir libéra. E colaî che
ne aveva riœvuto la promessa, ragguaglîato di ogni casa, vuol
gare^are cogli altri e la rimanda o riaccorapagna. Quindî il
solito problema, se il vanto délia generosità voglia concédera alj
marito, al non mariïo (per comprendere tutte le versioni, non
posso dire ramante), o a chî viene a intefporsi fia loro<
La somiglianza colle narrazioni che ci stanno a cuore è ben
manifesta ; ma non è meno manifesto che ci troviamo assaî piàj
discosti da esse che non siano esse fra loro. Corne si \ ede, nou
hanno qui pane alcuna gV incanti. Non già che l'incantatore
manchi di qualsivoglîa riscontro : al posto suo abbiamo il ladro,
oppure il ladro ed il lupo od il mostro, i quali comptono
ancor essi un atto stupefacente davvero; ma quanta diversîtâ
d*aflarif it riscodtore d\ gabelle facapolino. Aureltus è dîsperato; non sa a die
panitû appigliarsî; glî loorherà di veodere î suoi posscssî e di ridtirsî
mendtco. Tentera (etenti reàlmente) tin moâo di condlbre per quantosî pu6
ogni cosa^ chicdcndo di poter pagare a raie, m duc o tre annil — Ben
dîvcrso 4i lui ê Tarolfo* ben dîverso Messer Ansaldo, i quali^ senxa titubania
dî aîojm spedcaffrooo il compenso, e insîstono per Ut]o acœitane, almeno
in pane.
t . ïl mlo jnnoverare tra le propgginî direttc^ nonostante la proveniciu-^
tmmciJlau popûlare, anche tl raccomo del Campbell (V. Rc*m.^ XXXI, 42}^
avri, atéù^ facile assena datto Schofietd, a giudicare dal modo €ome a ^udb
vcoiooe egli accenni a p. 4)}.
ORIGÏNI DEL FRâNKELBYNS TALE
221
s*âccoppîa alla rispondenza! Poi, la promessa délia donna è un
fatto antécédente aile nozze; e costei promette di dansi la sera
stessa délie nozze, prima ancora che al marito; e il promettere
avviene con proposito di mantenere e non è sottomesso per
nnlla a condipîioni che si ritengano fermamence non avverabili*
Perè si casca dalle nubî quando si trova che lo Schofield^ in
cambio di porre in una classe Boccaccio c Chaucer, in un* altra
le redaxioni orientali, dichiara che il Frankdeyns Talc tt sta in un
gruppo da solo, separato affatto da tutti gli altri raccontt^ », e
rannoda invece alla famiglia orientale la novella boccaccesca*.
A lui pare di potersi facihnente render conto délie cose a
questa maniera *. Una redazione del raccooto orientale affine
a quella che il Boccaccio dovrebbe aver elaborato — an^i, ne! la
sostanza, riprodotto fedelmente, quale correva allora perl'Italia
— fu conosciuta e mes.*îa a profitto da chi dette forma francese
al îâi cekico S studiandosi di abbellirlo e di rifoggiarlo in modo
conforme al gusto del tempo suo ^ Di li pressochè di sicuro il
prohlema finale e lutto ciè che vi si connette^; di li probabil-
mente l'incantatore ^ Lasciamo pure che alla narrazione il pro-
blema sia toUo per surrogare in sua vece una conclusione
îmmaginariâ ^j ancorché, sottopasta a questa operazione, la
poveretta mi rassomigli ad un disgraziato a cui si strappassero
1, P. 43Î*
2. P, 4î6-7-
}, P. 456 : tt The vcry obvious agrcettient beiween tbcm n — Chaucer c
Boccacdo — n h easily explained », ecc.
4. 5« que&to hî fosse fondato sopra un tetna propriamente indigenoj
opptire itnportaio, lo Schofield, pur girando c rigirando datioroo alla quc^
stione (p. 435-j$), Don dlce in modo espHcito. Mi pare tuniivia ch'eglî deva
mdinane pîuuosto alla prima, che alla seconda idea. E allora, quelle analogie
<)ualstast che paiono pure da supporre tra il prête sa ki orlgtnario e il racconto
orientale, sarebbero da considéra re conae fortuite.
5. V. p. 415 e p. 41^.
6. P, 437 : !t It is therefore in the hîghest degree probable that in the
Ffcnch lay for the ^rst titne the débai-matw^j and ail ihat h emaitst was
connected wîth ihe Arviragus story, »
7. P, 44 j. Veramcnte non ci sarà un grande accordo tra ci6 che qui si
dke e quantû si è venuto esponendo nelle p. 4 [7-29.
S, SI crede di arrivare ad essa per via di pretese analogie nelle p. 4)7-4 J*
222
P. RAJHA
colle tenaglie le unghie, sovrapponcndfo poi aile orridc piaghe
un po' di cerotto. Ma, quanto alF incantatore, il maie si è che
di lui i paralleli orientali non sappiano proprio nullal Vkirvena^
la sparizione délie rocce, in oii si vuol ravvisare an tratto origi-
nario del prototipo indigène *, trova invece un riscontro ,
quanto mai appropria to nel giardino meraviglîoso delîe forme
îtalîane. E aguzzando gli sguardi, si vede il giardino maniie-
starcisi più genuino di ciô che presse il Chauccr oe tiene il
lu<^o. Rilevai nel mio primo lavoro* corne il domandare b
rimozione dcsideratissima degli scogli, cosi pericolosi pcf î
navîganii, venga ad essere per parte di Dorigen un mettere
« un altissimo prezm al suo amore », là dove cio che il conte*
nuto richiede è la pura e schietta domanda di cosa che si creda
tmpcssibile, e che — aggiungo ora — tanto poco si desidera,
da essemc l'avveramento causa di dolore intenso. Ma poniam
pure che qui si accorra al riparo^ dicendo che abbia solo torto il
Chaucer di rappresentare desiderosa délia cosa la donnai
oppure che quel desiderio non abbia fano se non suggcrire li
per II alla mente di lei la matena per specificaie Timpossibilitâ
che si aveva in antmo dî chiedere- Resta un guaio più serio. La
sparizione délie rocce é illusione e nulT altro, Ciô agîi occhî
dello Schofield costitubce — e puô ammeiiersi — un tratto
caratteristico cehico 5, sefabene, non proprio dei Ceki sokamo*;
ma noi dobbiam domandarcî, se il tratto sia qui opportuno.
Ora, mentre la condizione posta dalle donne del Boccaccio è
stata adenipiuta a pumino, Dorigen viene ad essere obbro-
briosamente truSata; e quando Aurelius dîcc* \\ ïi64>.
e, V. iiéso,
I hâve do so ils y^ cotiundcd me.
«,. wcl I woot tht rokkcs becn awcyc.
cgii è mentîtore. Ne pretendiamolo in quella vece ingannato
I. V. p. 40 e 417-20.
3. P. 41, n. 4*
î- P. 4i«-i9^
4, P. 42a. Per mlù crniw mî limîtefà a nitvki^ alîc inustrârîonî del
DWnoonâalk nov^lla XXJ del NtKflhnii : Roméniaf III, 169; StttJf di Criikm
# St0rid Uiifmrm^ Bologna, 1 SSo, p« 109.
ORIGINi DIÎL FRANKELBYNS TALE
225
lui pure non meno di Dongen; ingannato dd fratello, che fino
dal principîo non penso che a mère apparenze (v. 11450-76),
e dal negromante. Se anche mancano dichiarazioni esplkite délia
sua complîcità, le trauative furono condotte unitamente dal
fratellô e da lui (v, 11531-43); e apparenze, c nuIF altro,
vengooo a presagire e promettere i saggi che il mago dà
deîTane sua corne avviamento al contratto (v. 11501-20),
E del resto, anche ingannato, Aurelius rinunzierebbe a cosa alla
quale Qon avrebbe in realtâ akun diritto. Si è dunque lontani
ie mille miglia dal potersi sbarasf^care délie redaztoni boccac-
cesche, Certo esse pos&ono riuscire importune : a quel modo che
riesce importune a un debîtore che vorrebbe sottrarsi al paga-
mento il creditore che si présenta munito dei document! che
rendono chiaro U suo diritto e accompagnato dagli esecutori
délia legge*
Solo dunque per essersi fuorviato a rincorrer fantasmi lo
Schofield non ha visto le persone che in carne ed ossa gli stavan
davanti. Vano il fantasticare tpotesi intricatissime, e pur nondi-
meno inette a spiegar nulla, là dove i fatti parîano un lin-
guaggio semplice e aperto. Net la stirpe di cuï d si occupa il
Frankcleyns Taie e il duplice racconto itaUano sono legati da
una par en te la atfatto spéciale, La questione fondamentale si
présenta ancora nella forma in cui si affaccîava prima che fosse
pubblicato il nuovo lavoro'. Ancora siamo a domandarci, se
voglia ritenersij con taluni che il Chaucer e il Boccaccio abbiano
attinto a fonti consimîli, oppure con altri, ai quali venni ad
aggregarmi anch'io nello scrîtto suite Tredici Question! del
Filocôlo^ che il novelliere inglese seguisse il suo predecessorc
italiano. Meritorio bensi nello Schofield Taver addotco un certo
numéro di nuovi argomenti favorevoli aU'idea che a me parve
da respingere, e propriamente a quella sua spéciale determina-
zionej che, conformemente aile parole stesse del Chaucer,
interpretate corne raglon vuole che s'intcrpretino, gU assegna
quai fonte un lai m lingua d'oïl ^ sut tipu di quelli che in buon
numéro ci sono pervenuti, Quesu argomentt bisogna conside-
rare e pesare con scrupolo.
<i
I. V. p, 10^,
224
P, lÀJHA
in
In suffragîo ddia sua tesî lo Schoficld si richiama ad analogie
tra il contenuto narrativa del Franhkyns Taie e quello di
taluno fraquestî nostri lais. Qui verrebbe dunque a manifestarsl
un' aria di famiglia. Seiiaonchè ndla fami^lia sono entrati pcr
via di meraadozione, comt^ lo Schofield stesso mette in rilievo *,
non so quanti stranieri. Quindi Targomento non puo avère
efficacia se non in determinate condizioni ; e in primo luogo
sâremo tratu a ricliiedere che le analogie abbiano vera consî-
steniîa.
Ne ha poca quelia che si segnala ^ colla prima parte del Doctpi.
L'orgogliosa che per sottrarsi al giogo del matrimonio nieite
quai condîzione aï pretcndenti prove olrremodo ardue, che
nondimeno trovano clii le supera, spetta a ben altro teraa che
il nostro '. Ivi è cosa essengiale che si îratti di nozzt e che U
vinciïore del le prove (prove d*alt ronde ben diverse) venga dopo
un buon numéro di vittime*
Partecipano sostanzial mente a questi ciratteris e già per cî6
si trovano tenuii a distança dal FrankéJeyns Taie, i Dous Anmn^
di Marie de France*. Ho decto <« sostanzialmente » : perché
vi fosse piena rispondenza bisognerebbe che chi affronta il
cimento, che in questo caso consiste nel portare la donna
desiderata, senza mai riposarsi, sulla ci ma di un monte, ne
uscisse vittorioso. E u&cirne potrebbe, se bevesse dt un
certo liquore; ma, nell' e^saltazione delP imprcsa, eglî prima
dimentica, c poi rifiuta di bere, e cosi cade morto avanti
dî raggiunger la meta< Accanto a lui muore anche colei
ch'egli anclava a conquistare; poichè qui la donna riama il
giovane che ora per lei si cimenta; e l'ardua prova è imma^^i-
nata ed imposta dal padre, il quale, affezionato morbosamente
1. P,4>HS<
a. P. 416.
|. Si vcdâiiii le osservazioni prcmcsse dal P^ris al teito, Kom.^ VIII, 59-
E giova cit;ire aïtresi Gorra, Stmii di Critka UUerarm, Boîognit^ 1892,
p. 241-44*
4, P. 253 ndr cdiïione dd Roquefort i uj, ndU i* dd WarBkc, Halk^
ORIGINI DEL FRANKELEYWS TALE 225
alla figlia, vorrebbe evitare di staccarsene * . La fanciulla, simile
per un certo rispetto a Medea ed Arianna, ha invece suggerito
ella stessa Tespediente di quell' andata a Salerno, che procaccia
air amante il beveraggio meraviglioso che gli darebbe modo di
trionfare. E queir andata, per il riscontro che présenta col
viaggio di Aurelius ad Orléans, ha illuso lo Schofield^ Ma,
ohimè! si tratta di analogia in un punto affatto accessorio; e il
Critico americano è manifestamente in errore, quando si crede
in diritto di affermareche « i due lai incarnano terni congeneri ».
I temi sono per contro profondamente diversi.
Veniamo air Eliàtic, o, se si preferisce, corne preferisce
Tautrice — la stessa Marie, — al Guildeluec e Guilliadun^.
Stavolta il parallelismo ci si presenterebbe sotto la forma, certo
non meno significativa, di contrapposto : « In ambedue le
storie un leggiadro e valente cavalière di Brettagna è marito
felicissimo di una moglie bella e di alto lignaggio. Trascorso un
certo tempo egli va in Inghilterra a prender servizio e ac^
attendere a guerra. In ambedue i casi la fida moglie
Forment demeine grant dolur
al depanir de sun seignur ;
mes il Taseûra de sei
qu'il li portera bone fei.
(V. 8i sgg.)
Neir uno dei casi, durante la separazione, la moglie è tentata
da un avvenente cavalière, ma si serba fedele al marito — e
cosi i due trascorrono in una félicita ineffabile il resto délia vita
loro. Neir altro il marito è tentato da una bella donna, e cède
aile seduzioni, con questo effetto, che la félicita délia moglie è
annientata ed ella è ridotta a ritrarsi in una badia e a farsi
menaça. »
Cosa sia da pensare di cotesto modo di rendere Torditura
1 . Qui c 'è tanto o quanto di mezzo VApoUonio di Tira ; al quale siamo
rawicinati anche dalla circostanza d.ir csser vcdovo il padrc ed unica la 6glia.
Che se il re dei Dotis Aman;; non si macchia d'incesto corne Antioco, la sua
condotta dà pur sempre luogo a mormorazioni : « Plusur a mal li atur-
ncrent » (v. 33).
2. P. 417 e 425.
3 V. 22-23 : Roquefort, p. 400; Warnke, p. 186.
Remania XXXJl j c
i
226 P. RAJKA
del Frankekyns Talr^ sappiamo da un pezzo*; ma neppur
quella del lai t resa troppo meglio. Si rappresenta assai maie
la condoita di Eliduc diccndocheegli é tentato e cède : bisogna
considerare le condizionî specîficlie del fatto, che d'nltronde
rimane nella fase preparntona; e assai maie si raffigura,
ponendocela mnanzî corne una tentatrice, la povera Guilliadun,
non rea d*aliro che d'essersi innamorata di un cavalière ricco
di ogni pregio, cW ella ignora affatto vincolato da altri legami;
Guillijdun, che appena viene a cogniiîione délia realtaj cade in
unu stato che par essere mone, Bensi il tema fondamentale
puo essere concepiio in\1oppia manierai Lo chiederemo noi a
Guildeluec, la prima c legittimn moglie, la quale, amantissima
del marito, scopeno ch'egH ha posto ahrove il cuore, immola
eroicamcnte se medesima, dopo aver ridato ella stessa la vita
alla rivale^ ? Ne resuken'i effettivamente iina convenienï:a col
FrankeUyms Talf; e non importera nulla che sia di génère
contrario a quella immaginata dalto Schofield, appanenendo
essa al solito tipu délie analogie, anzichè ail' altro nien solito
degli antagonismi; ma si traitera di qualcosa di molto eva-
nescente; e, come indicano» senza che s'abbia neppure lo
scomodo di distrarre gli occhi, i riscontri che il FranMeynii
Talc ha in remote région i, dal golfo celtico ci troveremo trar'
sportati nelT aperto Oceano. Aile acqije celtiche saremo ripor-
tati bensi j date che nel lai si rîguardi come secondaria la
catjstrofe^ e come parte qiialitativamente, e non solo quantitatif
vamente precipua, quella specie di amore fatale, che attrae
Eliduc a Guilliadun, Il nostro pensiero corre allora a Tristano
ed Isolta la Bionda*. E ramore fatale non è già il solo tratto
comune. Si confronii quella parte del Trhtano dove sta m\h
2. Dovrei icncr coiiïo deïle pagine (97-107) m cuî Alphonse Bavot, î^
n^tmn de Gitimt lU Tia^tgtîifs.LQuyâln'pATÏs^ 190}, disciite I' m Origine de la
légende du chevalier bigame », se t1 librû non fosse *opravvcnu|o soîo
durante la stampa.
5 . In quci^f ordîne di idcc è tl Paris, « La légende du mari au» deux
femmçs n, neîla PiMé au Mînat é^e^ Dtuxumt s/rîf, Parigi, 1^9^» p. 137*
4, Si vcda Tclcganie e profondo scritto del Paris, Trhhm ri hntt, piibhli -
cato prima nclb Rét^tttdr Paris, 1894, c risumpato poî nel volume Pi^^mis tt
Ugfiitii-s Jn MvyefHïge^ Farigî» sensea indica^ione d*anno (1900); in questa
seconda fojnia, p, u^ sgg., e segnatamenie IJ7*4D.
ORIGÏNI DEL PJUi^KELEYKS TALE 227
scena laltra Isotta, Isocta tlalle Bianche Mani, Amhedue 1
termini ci offrono un dramma con tre personaggi princîpali :
un cavalière e due donne, en tram be tnnamorate di lui. Délie
due donne Tuna è del pari fanciulla innocente; e il modo
com'ella conosce îl cavalière ha trattî somigllantissimi : Eliduc
e Tristano passano il mcdesimo mare e vincono i nemici da cui
il padre délia fanciulla stava per essere sopraffatto e che lo
sîringono nella sua stessa residen^îa. Né Timpulso alla venuta
è différente; chè^ se i Tristam prosaici fanno chc il loro eroe
si conduca dalla Grande alla Piccola Brettagna per cercarvi
rimedio ad una fertta avvelenata r, la tradizione arcaica non
sa di cotale occasione', che ripete il « motivo )> delTandata in
Irlanda dopo il duelto col Morholc, e (se immediatamentej oppur
no, poco monta) ripurta Tandata aile accuse dei tniile%*ulij
causa del resto per cosi dire periodica di allontanamenti dalla
corte'- ossia alla ragione medcsîma per cuî, viceversa^ EHJuc
va dalla Brettagiia Piccola alla Grande*. E ancora pu6 aggiun-
gersi che Eliduc e Tnstano sono del pari mariti ad una délie
donne, e che il loro cuore è con quella, colla quale Icgittima-
menie non dovrebb* essere. Ma se per tal modo il Gmldelmr e
Cmlliadun si trova più che mai trascinaro dietro i! gran carro
celtico % il Frankeïeyns Tak non lo segue per nulla. Ha esso
I. Basd riiivîare al Lôseth, Le roman m prme dt Trhtan ecc» p. 44-4 S*
2^ Essa rîmantf cstranc^ affatto cosl al riflessa datoci da Eilîurt von Oberge,
comc al gruppo di reJa^ioni clie mette capo alToptra dî Thomas. La bscia
qyindi toulnieme in dispane anche il Bédier nclla sua mcritamentc fonunata
rickboraiiûiie, L' toïFHiu tL* Tthhtu d Iseut irajuit d restauré.
% . Oltrv a de che et c dam daîle esposbioni segulunl^nce bio grandie,
s'abbiaa même quello che dîcono i v, n-14, loo^îot de! Chînr^Joiî di Mari*!,
i quali âvrinno valorc generico o specîfico, a seconda délia disputabile collo-
cazJone cronologica deli' episodio, non ben chiara forse ktlla mente stessadel-
1' autrice, CtV* Sudre, in R^m., XV, 550-56-
4. V. 41 sgg,
5, Ed ecco sorgere il problema, quale dïllc due forme vogîU ntenersî
AUtcriore. A primai giunta si direbbe risoluiiimirnte qyella dd Tnsfduo; nel
Gmldthiec e GuiUiiuhm non veniam punro a sapere, e non sa lo stesso Eliduc
fv* 4î), in che consîstan le accuse che producono queiresilio dalla corte,
dondé ha nascîm^nto i*aziorve; nel Ttistatto lo sappLam troppo bcneï Ma poî
Altrc considerazbm suscitano Jtibbi; e anxiiutcoi nomi, schiettaniente celtici
fsei hti^ menire del Trhiarto ciô non si puô dire.
228 P. RAJMA
che vedere con tutto questo ordine di cose? Unico rapporte k
somiglianza net passaggio in Inghilterra di Eliduc ed Arviragus,
che, se é essenz^iale per il primo, riesce invece un punto afFatto
secondario per il secondo.
Ed io mi sarei guardato bene dal chiamare a raflronto, per
do elle spetta a siniazioni, VEqutian. Che il protagonîsta
înnamori di una donna niaritata, soffm per cagion sua *, le
apra lanimo e la supplichi di aver pietà di lui o egli morrà, è
una semplice riva, donde si pu6 salpare per cento direzionî.
E iiel caso présente ne prcndiamo una opposta addirittura
quclla del Frankelrym Tak. Tra Equitan e la donna si stabilbce
una tresca, la quale, appunto per macchinazione infernale di
lei, avrebbe termine col F assassin lo del marito, se Teffetto non
riuscisse precisamente il contrario dell'inten^ione, e f'infcdele
ed il drudo non trovassero essi la morte in que! medesimo
bagno di acqua bollente, che era stato preparato per raltro.
Ancora il Lanval^ e la rassegna potrà dirsi finita. Qui il
confronta rîguarda unicamente la scena délia dichîaraieione
amorosa, délia regina Ginevra a Lanva! nel lai, ài Aurelius a
Dorigen nel Frmtkdeyns Taie. Il fatto avviene del pari in un
giardinOj dove Lan val e Dorigen, condorti\T al modo stesso dal
l. Badîamo tuttaviache qui lo Schofidd [navvenitamentt; ira visa. P, 426:
V Stmile ad Aiirdîus, Equîun, die dimorava egli pure m Breitagna, » —
circostans^a di nessun p€sio — « soffriva pft;r lungo tempo in causa del le suc
ansîe amorose, avanti di m4tiire5tare alla Une il suo afTcttn alla moglic
deiramîco. j» E p. 428 : «( Cbscimo di loro * — Aurelius ed Equiuû —
« ...soffré acute angoscîe priniii <hc «si rivelare la sua passîooc. ^^ Ora, EquStan
si dichiara ed ottienc cîè cbe branu subito llndomani del giamo in cui
A more a Une saiete a vers lui traite. Qui mutt granl plaie li a faite »
(v. S9'^)< ^ ^ ^u^i pattmenti si riducono aJ una notie e p^Ko più. Cbe %e.
anche per faddicrro egli itvcva desiderata la donna, di cui luttl ccle^ravan le'
lodi, non poteva dawcro quello chiamarsi innamoramcnto, neppur stando aile
parole dcî t£Slo{v. 42-4S)* ^ovc a me par di scorgere contoreitnentî c contra-
ditîoiiL Ridotto nei suai veri tcrmini — ossia a nulla — il periodo delta
pasùone recondita, cessa anclie ogni ragione di dire« irr^lla cieden^a di srabf-
lîre un altro punio di comaito t v La donna è inconsda afîauo deir amore
che ha destaio » (p. 42S). Dura bensi rinconsapevole^/a del rriariïo, che lo
Scho5e!d associa con qucila délia tnoglie ; ma è tncoiisapcvolezjEa di y no stato
di côse diver^ssimo da qucHo del ftixnhttiym Tak.
ORTGINI DEL FRANKELBYSS TALE 229
volere degli amici, se ne stanno in disparte' senza prender
parte ai sol lazzi aitrui, perché hanno altrove il cuore, Somi-
glianza ce realmente. Ma che si tratti dî cose accessone, è reso
quanto mai manifesto dal vedersi chc non abhiam nulla di
corrispondefitCj da una parte nel Imï de Gratkni^ che svolge il
medt:simo tema del Latwal^ dalTaltra nella duplice novella dei
BtKcaccio, pur a noi tanto prossima.
Cosi è al di là di possibile che il rîscontro non sia fonuito *
e che nondîmeno non abbîa che vedere col modello da cui il
Chaucer ritrae%*a lo schéma del racconto, E il medesimo puo
pensarsi rispetto ad aîtri ravvicjnamenii di particolari che lo
Schofield vien facendo % le rare volte che sotto la somi^lian^a
sia suppoïiibile un vero e stretto leganie. Che il poetn prenda
da esempiari estranei affatto alTorditura, riconosce lo Schofield
iiiedesimo, il quale sa bene, per esempio, donde sia tratta la
gi;\ menzionata enuinerazione délie suicide per castità ^ Ed eglî,
pur pretendendos per via di qualche vaga analogia con un
luogo àtW Equiîan^ che il ragionamento al principio suUe
coîtdi;îioni necessarie perché Tamore persista non sia stato
introdotto senza un appigUo nell' originale^, deve consentire
ai predecessori suoi (ben difficile, per verità, disconoscerlo).
ï, Questo éa\ Chaucer {cit. tanvaî^ v. ass-s6, Roquefort, p. 233,
Warnke, p. 96) non è detto in modo esfiresso. Ma résulta bene dal contesïo,
e più poL dii CLo che abbîamo pi Ci ohre, dopo che, udita la sentenza, IHnna-
moratQ se n'è m, v, 11^4-26 :
Tbo conif; htr mhere freendcs nutiy ooti.
And ifi the akycs romcdcn up ^nd daun^
And no-tlii]:îg wîïte of thb coadusioun.
2. Q^a e là, deniru aile pagine 42;-; 1.
j, V. qm dktro p. 218*
4, P. 417*18* Un moiivo di toccarvi di uguaghania tra \ comugi potrebbe
OSTC2.TÛ nel fondo del raccoato, La persuasione che su Ha moglie non
ilcv'essere escrcitata sîgnoria, riuscirebbe opporiLina îspiratrice délia condotta
chc dai marito si ticne. Temo tuttavb chc auribuendo intendînienti siffatti
ali* au tore del presumo lai,%\\ û faccia un onore soverchio. Si noti corne da
quelle sue premesse, e&plicitamente almeno (cfr. Ten Brink, Geub. der mgl.
LitUr., II, 175-6), non deduca poî nuUa lo stesso Chaucer, e il inodo di
âgîrc dî Arviragus riportî solo at rispetto per la papola data. Ed è bene chc
cosi sia. La devoziorxe ossequiosa dei vv* 11051-64 toglierebbe molto alla
magnanimiti.
a 30 P* RAJNA
che s'aveva présente il Koman de la Rose \ Segnala d'altronde
lui stesso due convenienze con composizioni di Guillaume de
Machaut> e in una almeno délie due si mostra assai propenso
a ravvLsiire un* imiiaziontr diretia'. E se un fatto consimile
s'a%*esse anche cola dove ci sendam rinviare ad un lai conie a
vera e propria fonte ? Guardiamo le cose da vicino.
Fa dire il poeta al Frankeleyn al momento di principiare la
marrazione :
Thîse oMe gentil Britons Îq hïr daycs
Of diverse aveii turcs maden ïayes,
Eymeyed in hir firste Briton tonge;
Which layes with hir instniments they songe,
Or elles reddt'n hera for hir plesaunce;
And oon of hem hâve 1 in reraembrautice^
Which 1 shal seyn with good wil as 1 can.
(V. 11021-27.)
Un comînciamentû siffatto trova rîspondenza nei priml o
negli ultimi versi, ed anche negli uni e negli al tri, di quasi
tutti i lais in lingua d'oïL In générale nondimeno ogni singolo
esempîo ci dà meno assai che qui non s'abbîa. Conta già fra gli
esemplari più ricchi la chiusa del Gmgemar :
De cest cumequ'oî avex
Fu Guigeniar li lais trovez,
Qye hum dist en harpe e en rote;
Bone eu est a oïr U note ».
Ma c'è un caso, solo ed unico ch'io sappia, nel quale — e
proprio anche lî al principio — troviam qualcosa di molto
prossinio a noi. Voglio alludere alT Eqtntan^ su cui anche lo
Schofield ha fissato gli sguardi, tanto da rîponare il passo a
u V. An^lui, XIV, 2 S 0-9, nello scriito Chmcnuma dtl Koeppd. I vcrsi
ijct Roman tk ht Rose di cui quefli del Fnmkftcym TaU 11075-79 rendono
Tcco bcn chiarOp sono nelF cdi^ionc Michtl 9198-205 (Koeppel, 8457*42),
toiyç-Êo (9469-70), 10187-93 (9477-85), I.'csamc dei luogh» de rivât i nei
Canîffhury TdUi da! Rmnûn ât ia Roît va nello siudio de) Koeppcl da p. 2|8
a p. 26s !
2. P. 44S'46. Fu menio del SatiJras (V, p, 106^ in nou) Taver richiamato
c fcmiato raiteniione sugli obblighi che verso il Mai:hayt ha il Chaucer.
j* RogjL^EFÛRT. p. 112; WaRXKE, p, 4O*
ORIGINI DEL FRASKELEYSS TALE 23 I
fronte di quello del Chaucer. Sennonchè stavolta egli ha
atienuato il valore del rafFronto, col dire, assai inesattamente,
che « ogni lay ha un prologo di questa specie » ' :
Mult unt esté noble barun
Cil de Bretaigne, li Bretun.
Jadis suleient par pruêsce,
Par curteisie e par noblesce
Des aventures que oeient,
Ki a plusurs genz aveneient,
Faire les lais pur remembrance,
Qu*um nés meïst en ubliance.
Un en firent, ç'oï cunter,
Ki ne fet mie a ubliër,
D*Equitan, qui mult fu curteis.
Sire des Nans, justise e reis ^
Corne si vede, alla siessa maniera che presso di noi, dal fatto
singolo si risale al generico. Certo è possibile che il Chaucer
abbia fatto ciô di proprio impulso, avendo davanti una délie
formole consuete. Che del suo ce ne sia li dentro, dice Tindica-
zione espressa ed insolita del linguaggio originario dei lais, e
più apertamente poi raflfermazione, rispondente al présente e al
passato prossimo, erronea nell' applicazione al passato remoto,
che i lais fossero destinati anche alla lettura. Ed è da considerare
corne al Lai del FraisnCy che nell' originale principia laconica-
mente
Le lai del Fraisne vus dirai
Sulunc le cunte que ieo sai ),
e poco meno laconicamente finisce.
Quant l'aventure fu seùe,
Cornent ele esteit avenue,
Le lai del Fraisne en unt trové :
Pur la dame l'unt si numé ♦,
il traduttore inglese premetta un proemio di ben 28 versi, che
ha comune col nostro la caratteristica che ho segnalato :
1. P. 427.
2. R0Q.UEF0RT, p. 114; Warnke, p. 41.
3. Roquefort, p. 138; Warnke, p. 54.
4. Roquefort, p. 176; Warnke, p. 74.
232 P. RAJNA
We redeih oft and findeih ywrite
And this clerkes wele it wite,
Laycs that ben in harping
Ben yfounde of ferli thing.
Su m bethe of wer and sum of wo,
And sum of joie and mirthe also,
And bum of trecherie and of gile,
Of old aventours that fel while,
And sum of bourdes and ribaudy,
And mani ther beth of fairy ;
Of al ihinges that men seth
Mest o loN'e for sothe thai beth.
In Breieyne bi hold time
This laycs were wrought, so seith this rime.
When kinges might our yhere
Of ani mcrvailes that ther were,
Thai token an harp in gle and game,
And maked a lay and gaf it name.
Now of this aventours that weren yfalle
Y can tel sum, ac noiighi aile.
Ac herkneth, lordinges, sothe to sain,
Ichil you telle Lay le Frayn.
Bifcl a cas in Breteyne,
Whereof was made Lay le Frain,
In Ingliche for to tellen ywis,
Of an asche, for soihe it is
On ensaumple fair with aile,
That sum time was bifallc '.
Ma questo riscontro ha per effetto di mettere in maggior luce
le convenienze pcculiari del proemio nostro coll' Equitan : aile
quali accresce valore anche il fatto, rilevato dal Wolf, che
Taltro proemio inglcsc di contenuto analogo che noi si possiede,
quello del Sir Orpheo, corrisponde quasi alla lettera col « Lay le
Frayn » *, sicchè Fraisne inglese e Sir Orpheo da una parte,
Frankeleyns Talc ed Equitan daU'altra, costituiscono duecoppie.
Fcrô viene ad avvalorarsi il sospctto che proprio Y Equitan fosse
présente al pensiero del Chaucer.
1. Afii^h'j, IIL p. 415.
2. L\-ht-r il il' Liis ecc, p. 11. Ed ivi il proemio del Sir Orpheo si trova
riportaio.
ORtGlNl DEL FRANKELEYNS TALE 23Î
E che il Chaucer fosse conoscîtare di lats frnncesî, poirebbe
meno di ogni altro contestare lo Schofield, in forza délia tesi
sua propria. Vorrà egli immaginare che non conoscesse assolu-
tamente se non quel suo supposto originale' ? Ne a lui sfugge
corne le somîglianî^e die s'è studiato di mettere in mostra con
taiuni dei lais di Marie de France, corrano gran rtschio di non
provarcj se mai, altro che familiariià del Chaucer coU' attraente
scrittricej sebbene cotale idea sia indebitamente da loi formu-
lata solo in maniera, da essere a buon diritto respinta\
Orbene ; conoscitore di lais^ non poteva il pocta sentire il Jesi-
derio di vestire una voka alla foggia loro, ossia di un génère
di cûinposizione spettante ad una razza che era elemento cosïî-
tutîvo délia nazione, o al meno dello staïo inglese, un racconto
di tutt' altro tipo? Piii che naturate allora il prolngo; neces-
saria la irasposizione della scena nei paesi brettoni; ovvîo che
nonii brettoni, o creduti tali, s'imponessero ai personaggi,
Perô starebbe benissimo che il Dorigen^ o Dorigene^ corne anche
si scrîve, fossej gîusta la convinzione delIo Schofietd', di deri-
T . Quale dato d'ordine posîûvQ mi guarderô bene àalV âdiiurre îl raccomo
della Donna di Bath ; giacchè, se non è inverosimîle che esso metta capo ad
un lai m Ungua d'oïl (v, G. Paris, in Hist. iitt. de h Fr*^ XXX, 102), deve
mettercelo aura verso ad ahri aneili. Questo almeno ml pare poiersi ntencre
în me^zo aile oebbie die avvolgono il soggetto anche dopo il récente ^^tudio
di G. H. Mayiîadier, Thf Wij€ t/ Bûih\ Taie, ih sources and îitutltfwSf
Londra, Nutt, 1902, c la sagace recensione dî J. Koch^ EngHsche SbtâîtH^
XXX, 460-64* QpaQtû ai rapporto fra Tepisodio della resurrezîoiie nel eosid-
dciio Chdmtr's Dnam e VEUduc (V, Kôhler nelT t^d. Warnke del i&Bs,
p. cvn), é posto fuor di causa dopo cbe lattribuzione di quel pocmetto al
l*âUtore dei Caukihury Ttiks ha perd uto ogni ombra di credito,
2. Egli immagina un avversano, stando al quale il Chaucer mise insîeme
una stoHa nnova, di cui le singole parti K>no sempîici ecbt délie pot:^ie di
Marie de France, w e per cotale motivo cbiam6 un hy hnUmte ci 6 che in
reaiti era Invemione sua propria n (p. 452, n* t). Ma no :non si tratta di
questo» bcnsl deirimromissbne di eleraenti secondari affano. Si sent a anche il
Lût, p. m : « Quant aux nipprochemcms de d<^iail avec tel ou tel liii breton
signalé par 1 auteur, ils sVxpHquent facilement par des r^^minisceGces plus
ou moins conscientes, i^
5. P» 414, Il richiamo ad un Dorguen o Drognen^ su cni la convinjcione
si fonda, e cbe sarebbe stato tl nome delJa mogUe di Alano I, è preso dal
Tyrwhitt,
234 ^' RAJNA
vazione celtica', e chc i modclli greci sui quali io lo avevo
stjpposto fabbricato% avessero servîto soUanto a dargli una
mano di vernice- Ma sîa quel che si vuole di Dorigm, parlano
un Hnguaggio chiaro VAtviragus e ÏAurelius^ dei quali bcn
conosciamo la provenienza. Essi mostrano in modo raanifesto
corne il battesimo sia di fresca data e sîa stato eseguito con
acqua di serbatoio, non già di sorgente. Corne mai nomi siffatti
siano ancora oggidt pomti parer prova di provenienza cettica
schietta^ capisco assai poco ',
lY
Questa tuttavia chc son venuto csponendo è una mera
supposition e. Di fronte ad essa mantiene a buon dritto il suo
posto iattrâ, che il Chaucer, additando quai fonte un lai^
dlca la verità. Non la dice egli forse quando fa che il « Clerk n
dichiari di aver dal Petrarca la storia di Gnselda* e chc il
« Monk » si richiami a Dante per il Conte Ugolino K e, so-
sianzîalmente, altresi quando pone che il a Doctour of Phisyk *>
si riferisca a Tito Lîvio per Virginioc la figlia^? E polchè a me
é rimasto affatto oscuro, donde il Boccaccio abbia cavato la
novellasua^, non potro essere che Heto, se Tidea dcllo Scho-
field, debitamente corretta per cîù che concerne lo scriitore
'l. Il Lot contesta. Li mcîgîic di Abno si chiamava eflfertivamente Olmri^'ften,
SentîOQchè il et Dro^*itnt o Doii^urtt i* de! Tyrwhitt, anche sproposiut»^ con-
serva no lo stcsso vaJorc* purchè letti in vecchie cronadie. Eiî Lot stossoctta
un Doriftn, sia pure <quâl nome mascoîino.
2* Kammiû, p. 41. Oltrc chc dcH' atteggiamento assunto ncï resto delk
paroli, chlederei loro conto dell* 0 linalc, che le rime mostrano dcl resto
mcramente grafico,
3. SCHOFTELD, p. 420-22-
4. V. 7902-16. E si vcda dà chectico più ohre, p. 245.
S. V. 147^-73^
6. V- II9ÎÎ, Chi voglia saper benc come le cosc stiano» rkorra a!îc illu-
strazîani M Hertz berg aile Cantffbury-Gfuhtchîrn, p. 619-40. V, per l'indi-
caiione bibltograflcâ b p. 206. m nota, La verîlâ era gîà în parte stata vîna c
mes» în lucc dal Sandras (V, l'fr.). M« lo ù conoscere lo stesso Hertiberg,
7. V. Rominia, XXXI, 4t c 41-
ORIGINJ DEL FRJKKBLEYNS TALE 25 J
itâlianûS condurrh a rbolverc questo enimma\ Bîsogna
dunc|ue smdiarsi di accertare, col raffronto dei particolari e
dellc parole, non plù dell' orditura soltanto, quale ipotesi n-
sponda meglio ai fatti : che il Boccaccio e il Chaucer prendatîo,
dtrettamente o quasi, da un originale comune; oppure che il
Chaucer si affisi nel novellatore nostro^ Mi rifaccîo dal Fiiocûh.
Le osservazioni spécial! concernenti il Decaimrdn si soggiunge-
ranno poi; e non richiederanno un lungo dîscorso.
Il u Frankeieyn » cosi principia a narrare':
la Armorik, that called is Britayne,
Ther was a kmght tliai loved and dide hb payne
To serve a lady în his beste wyse \
And many a labourj maiiy a grcet empryse
He for his Ijdy wroghte, er she were wonntf.
For she was ooii, the fai reste under sont>e^
And eek iherïo corne of so heigh kinrede^
That»»,
E Menedèn, Pin terlocu tore del FHocolo :
Nella lerra là dove io nacqui, mi rîcorda esserc ano ricchîssimo e nubile
cavalière, il i^tiale di perfeuissimo amore amando una dorina nobîle dclla terra,
perisposa îaprese : délia quai donna^ essendo bdiissima.. .*
Limpostatura è idenrica; ma raentre ïl Boccaccîo vien subito
âl fatto, il Chaucer si ferma a lungo sulla fase proemiale. Ladif-
fcren^a si pu6 immaginare del pari uscita da un amplihcazionej
corne da uno scorcîamento, Sennonchè lo scorcîaniento c sup-
pôsiziooc prêt ta : ramplificazione, ohre ad essere conforme al
1. V. p. 2aT f 223.
2. Vano il credere che alla soludone poni un conmbuto il Boiardo. La
sîoria di Prasîldo, Iroldo e Tisbina, OrL Inn,^ I, xti, 4-89, ia quamo abbîa
rapporti cou quella del giardino incantato, an^îchè un raccomo indipendente
e paralleîo^ corne afferma lo Schoiidd, p. 436, è d^ ritenere col Dunlop,
DcNLOP-LiEBRECHT, p. 251, C col Panizzi, nota finale al canto, una dériva-
fïone, E di succhi boccacceschi s'è nutrita auche in alira mariera. V. Savj-
Lopo, La novêUa di PrmiUoedi Thbina, neïla RaceoUa àiStudii mtkiàedkaia
ûâ Akuattdro d'Ancùna^ P* ^} sgg.
%. Neiresameche qui intraprcndo riescono îneviubiU akync ripetizioni di
co$e dette nel mlo primo studio, p. 42^ n. i e a«
2jé P, RAJNA
procède re abituale del Chaucer, si trova per una parte messa
fuor di dubbio dagl' imprestiti presi dal Roman de la RoseK
E c'é di piû. Concepito il racconto come dev* essere^, glî
sforzi a cm Arviragus è soitomesso per conseguîre la donna,
nonchè essere inutili, turbano. Ce bcnsl qualcuno da cui logi-
camente ci dobbtamo aspettare che molto s'adoperi, %'ale a dire
rinnamorato* Ed ecco dirci di Tarolfo il Boccaccio :
E di t^nto amore fatÇAva, che oltre a leî non vedeva niunâ cosa^ né
ptù di&iavii» e ïn moite maniert, forse con sovenie pâ^sar dâvantî aile sue cas«^
o giosirando, o anneggiandOj o coq akrî attî^ s1ngcgnd%^a d'avcre Famor di
leî ; e speaso manda^ndole raessaggierij forse promet tendolc graodissimi doïîi,
e per sapere U sua imeodîmento,....
O sarebbe mai che quaiuo si fa fare inopporttinamente dal
Chauccr a chî diviene marlto, fosse propaggine dell' agire più
che opportuno dell* innamorato boccaccesco? Il sospetto délia
trasposizione s*accresce, vedcndo che là dove raffaticarsi è al
posco suo vero, non abbiamo che un soffrire soUtario. Aurelîus
ama da due anni passionatamente Dorigen (v. 11251-52)^ le
sta vicino di casa ed è ben conosciuto da lei (v. 11273-75), sa
assente da un pezzo il marito, e nondimeno non le ha osato
manifestar le sue pêne (v. 11255*55), ^ ^'^ limitato a sterîli
sfoghi poecicî (r 1256-60) e a domandare pietà con sguardi non
avvertin od iniesi (v. 11267-71).
Nel giardino rîdente a cui, per tentar di svagarla, gli amici
hanno conduite Dorigen» Aurelius trova finatmcnce il coraggio
di dichiararsi- Uoccasione è certo ben immaginata; e come raie
non ha riscontro presse U Boccaccio. Ma non ci offre questi
nulla a cui la mente possa volgersi ? In quel giardino una lieta
comiiivaè venuta a passare nel sollazzo tutta una giornata : in
un giardino ridente akrettanto(siamo del pari di primavera ^) si
è condotta al modo stesso a darsî spasso per un giorno iniero
la brigata, di cui una parte prenderà trastuUo durante le ore
calde porgendo orecchio alla storia di Tarolfo. E si badi. Al
colloquio tra Aurelius e Dorigen mette fine il soppravvenire di
amici, che nulla sanno e di nulla si accorgono.
î. V, p. 129-50.
a. V. p. ito,
j, Cmi. r., V, riilB-t9 : Fi7,j t. Il, p. 23-2 j.
ORIGINI DEL FRANKELEYNS TALE 237
But sodeiniy bigonne revel newe
Til that the brighte sonne loste his hewe;
For th' orisonte haih reft the sonne his light ;
This his as muche to seye as it was night.
And hoom they goon in joye and in solas
(V. 11327-31.)
O perché « revel newe »? Non vedo che il festeggiare sia
mai stato interrotto, se non forse dal passeggiare di taluni su e
gîù per i viali, del quale d'altronde non ci si dà punto un
perché'. Non ci sarebbe allora il caso che Tinterruzione fosse
riflesso di quella che nella méridionale Mergellina divien neces-
saria quando « Âpollo col carro délia luce salito al meridiano
cerchio » dardeggia raggi cocenti % sicchè la ripresa fosse da
rannodare con ciô che nel Filocolo segue dopo esposte e dispu-
tate le tredici question! ? Ivi dice allora Fiammetta :
Noi veggiamo già Febo guardard con non diritto aspetto, e sentiamo
l*aere rinfrescato, e i nostri compagni avère ricominciata la festa, che qui
vegnendo per troppo caldo lasciammo, e perô ci pare di noi tomare simile-
tnente a quella.
Né qui s'arresta la corrispondenza :
Sonarono i lîeti strumenti, e Taere piena d'amorosi canti da tutte parti
si sentiva, e niuna parte del giardino era senza festa, nella quale quel giorno
infîno alla sua fine tutti lietamente dihiorarono : ma sopravvenuta la notte,
mostrando già la loro luce le stelle, alla donna e a tutti parve di partire,
tornando alla cittâ ).
Poiché qui s'ha a fare con un tratto che nel Filocolo non
appartiene alla novella, il legame sarebbe di tal natura, da
mettere fuor di dubbio la dipendenza délia rima inglese dalla
prosa nostra. Perô esso riesce ben più prezioso di certe conve-
nienze minute, spiegabili anche solo colla conformità dell* ordito,
nel colloquio — se diretto, o attraverso a mediatori, poco
monta — tra la donna e il suo sollecitatore ^.
1. « Tho corne hir othere frecndes many oon, And in the aleyes romeden
upand doun «, v. 11324-25.
2. P. 31.
3. P. 119.
4. Cant, T., V. 11 299, « Tak this for fynal answer as of me » : Fil.,
dentro ad un contorno différente, « ponessesi in cuorc di non stimobrla più
238 F, RAJKA
Accompagniamo il poveretto ne! la peregrinazîone în tracciâ
di chî possa operare il portcnto rkliiesto, Aureliuseii fratello,
partiti alla volta délia dotta Orléans^ giuuti li presse,
A yong £lerk roniînge by hîm-seif ihey mette,
(Y. U48î)
nel quale essi trovano il loro uomo, a quel modo che Tarolfo
lo trova nella Tessaglia — la regione magica per eccellenza —
in un vecchierello che vagando per la campagna w egli si vide
davanti a piè d*un monte^ il quale andava cogliendo erbe ».
Se i due si manifestano poi col fatto pari di scienza, non
vengono a contrapporsi solo soito U rispetto del!' età. Lasciando
altrOj del vecchierello greco sentiamo che « i suoi vestiiaienti
giudicavano lui esser povero » ; e che la sua sia po verra vera>
non solo apparente, perqiianto sia lecito tneravigliarsene in chi
tanto puo, mostra subito lî modo corne accogUe le proffene
délia ricompensa, larghissima di certo : « ...Sequesto facessi^
a me non bisognerebbe d*andare più cogliendo l erbe. » Invece
il giovane d'Orléans nuota negli agi ; délia sua casa ci è detto^
So wcl arrayed hous as ther was oon
Aurelius in liis lyf sattgli never noon.
(V, 11499-500.)
Che se quanta si mostra poi agit ospiti — foreste, parchî,
cacce, un ballo a cuî partecipa Madonna stessa^ e Aurelius con
leij — e mera tllusione, nulla indica che illusione sîano queste
magnificenze e la copia di cibî delicati. Ora, alF andaniento del
raccontû corrisponde nieglîo, resultando cosi più verositnil-
mente originale, la versione italiana che Tinglese; in quanto
sarà ben aîtrîmend magnaninio, rinunziando al compenso^ il
avant] ». — Cant. 7., v. ii}oi, «i Aurelîe, quod she, by heighegod abov€,
Ycl wotdc [ gratmte yow to bec 11 your bvê j* ; 1 1 joç» « Thari wol I tove
>nou bcst ôf any man ; Hâve hccr my trouihe in al thaï cvcr I caii u ; 1 1 )tf ,
* For wcl I woot ihat it shal iievcr bitydc »; 1 1531, « Madame, quod he>
this WLTe an in possible m : Fi!., n Ella m^ndô cosl d kendo a Tarolfo»chc..*
db voltra da lui yn dono, il quale corne Tavesse ricevuto, glurava per î 5Uoi
iddîi. e per quel la kanxa che in gentildonna dee espère, che et la fsrebbe
ogni suo piacere ..,. frt se dicendo ; Qucsta è cosa impossîbile.^...
Tarolfo, ... ancorcht impassibile gli paresic... »
ORIGINI DEL FRANKELÈYNS TALE 239
miserabile vecchierello che il ricco giovanotto. Ed ecco che
infatti la povertà è Targomento cardinale che s'adduce da
Menedôn per assegnare a lui il primato nella discussione a cui
la novella dà luogo.
Cosl Aurelius corne Tarolfo sono, e troppo ben si capisce,
impazienti d'indugio :
But loketh now, or no necligence or slouthe,
Ye urie us hecr no lenger than to-morwe ;
(V. 11544-45)
Amico, a me si fa tardi che quel che m'imprometti si fornisca ; perô senza
^ indugio pajtiamo
Partono dunque; e arrivano alla patria loro nella stagione
medesima; e possiamo anche dire, non nella stagione soltanto.
Chè r « assai vicini del mese » — il gennaio — « del quale
era stato dimandato il giardino », non è nel Filocolo riferibile
ad altro che al dicembre ; che è il mese per l'appunto indicato
espressamente dal Chaucer,
And this was, as the bokes me remembre,
The colde frosty seson of Décembre,
(V. 11555-56)
di cui si fa una descrizione particolareggiata (v. 11557-67).
Ma perché dal poeta inglese si è scelto questo tempo ? — Un
buon motivo poteva essere Timperversare maggiore délie
tempeste, per cui riuscivano allora viepiù funesti gli scogli che
Dorigen aveva desiderato fosser rimossi. Ma si sarebbe dovuto
dire; e non se ne dice nulla; sicchè resta il dubbio che
Timpulso, secondato forse perche offriva Topportunità di una
descrizione adornativa, da far come riscontro alla rappresenta-
zione délie attrattive primaverili dataci prima (v. 1 1218-29),
sia venuto dalla storia del giardino incantato, ossia dal Boccaccio.
Il a the bokes me remembre » rispondercbbe allora al vero, e
ne sarebbe in certo modo una spia.
Le fattucchierie seguono in maniera diversa. Da rilevare
tuttavia che di fronte alla lunga esposizione degl' incantesimi
nostri sta nel Chaucer un discorso non troppo brève di materia
astrologica (v. 11582-603). Sia come si vuole, gl' incantatori
adempiono il loro compito e i due innamorati s*afFrettano a
darne avviso. Parlino qui da soli i testi :
240 p. RAJNA
And to the temple his wey forth hath he holde,
Wher-as he knew he sholde his lady see.
(V. 11618-19.)
Madame,
(V. 11643)
I hâve do so as ye comanded me ;
And if ye vouche-sauf, ye may go see.
Doth as yow list
(V. 11645-47-)
He taketh his levé, and shc astonied stood.
(V. 11652.)
... E dovendo essere il segucnte giorno nella città una grandissima solen-
nità, egli se n'andô davanti alla sua donna, la quale già gran tempo era chï
veduta non l'avea, e cosi le disse : Madonna, dopo lunga fatica io ho fomîto
quello che voi comandastc : quando vi placera di vederlo o di prenderlo,
egli è al vostro piacere. La donna... si maravigliô molto...
Facciasi quel conto che pare di queste altre convenienze
dentro a cornici disuguali :
And hoom she gooth a sorweful créature
(V. 11658.)
... I^ gentildonna..., tomando nella sua caméra piena di noiosa malin-
conia...
For out of toune was goon Arveragus.
(V. 11663.)
... Vi piaccia tanto indugiarvi a richiedermi del vostro disio, che'l signore
mîo vada a caccia, o in altra parte fuori délia città...
La comice conviene invece in questi altri passi :
Allas, quod she, on thee. Fortune, I pleync,
That unwar wrapped hast me in thy chcyne ;
For which, t'escape, woot I no socour,
Save only deeth or elles dishonour...
(V. 11667-71.)
... E pensando in quai maniera tornar potesse addietro ciô che promesse
avea, e non trovando lecita scusa...
And told him al as ye han herd bifore...
(V. 11775.)
... dal principio infinoalla fine gli narrô perché dolente dimorava.
Ye shul your trouthe holden, by my fay 1
(V. II 784.)
ORIGINI DEL ERJSKELEYNS TALE 24 1
... Ye sholde your trouthe kepe and save.
(V. 11788.)
Ne make no contenance of hevinesse,
That folk of yow may demen harm or gesse.
(V. 1179S-96.)
... Va, e copertamente serva il tuo giuramento, e a Tarolfo ciô chc tu
promettesti liberamente attieni.
Attenere, madonna Dianora non vorrebbe a nessun patto :
« ... In niuna maniera io faro questo : avanti m'ucciderei che io
facessi cosa che disonore e dispiacere vi fosse »; parole queste
che ci ricordano corne Dorigen abbia consumato un centinaio
di versi (i 1670-766) a pensare appunto alla morte ed a passare
in rassegna le eroine che la morte preferirono al disonore.
Nella scena tra la donna e Tinnamorato vogliono partico-
larmente segnalarsi queste rispondenze :
Aurelius gan wondren on this cas ;
And in his herte...
(V. 11818-19.)
AUora disse Tarolfo : Senza fine mi fate maravigliare
La quai cosa udendo Tarolfo, più che in prima si cominciô a maravigliare e
a pensar forte, e a conoscere cominciô...
And in his herte lie caughte of this greet routhe,
Consideringe the beste on.evcry syde,
That fro his lust yet were him lever abyde,
Than doon so heigh a cherlish wrecchcdnessc
Agayns franchyse and aile gentillesse.
(V. 11824-28.)
... £ fra se cominciô a dire, che degno di grandissima riprensione sarebbe
chi a cosi libérale uomo pensasse villania.
I yow relesse, madame, in-to your hond
Quit every sûrement and every bond,
Thaï ve han maad to me...
(V. 11837-39.)
... r ho pcr ricevuto ciô che io di voi desiderava.
She thonketh him up-on hir knees al bare,
And boom un-to hir housbond is she fare,
And tolde him al as ye han herd me sayd...
(V. 11849-51.)
Rammnim, XXXU 16
242 p. RAJNA
Ringrazîôla donna molto Tarolfo di tanta corcesia, c lieta si parte tomando
al suo marito, a cui tutto per ordine disse quelio clie avvenuto l'era.
E il « philosophre », che ad Aurelius, il quale gli chiede
facilitazioni per il pagamento, demanda (v. 11891),
Havc I nat liolden covenant un-to thee ?
è più vicino, se si guarda bene, che non ne abbia Taria a
Tebano, che dice a Tarolfo,
Dunque per qucsto avrô io perduto ciô che da te mi fu promesso ?
Ma non c'è bisogno di aguzzar l'occhio per ravvicinamenti
corne questi :
Evericli of yow dide gentilly til other.
Thou art a squyer, and lîe is a knight ;
But God forbede, for his blisful might,
But-if a clerk coude doon a gentil dede
As wel as any of yow, it is no drede.
(V. I 1912-16)
Unque agi* Iddii.non piaccia, che là dove il cavalière ti fu délia sua donna
libérale, e tu a lui non fosti villano, io sia meno che cortese.
Sire, I relesse thee thy thousand pound,
(V. 11917.)
For, sire, I wol nat take a peny of thee
For al my craft, ne noght for my travaille.
(V. 1 1920-21.)
... Voglio che ciô che in guiderdone del servigio prcnder dovea tuo si
rimanga siccome mai fu. Kè di quelio di Tarolfo voile mai alcuna cosa
prenderc.
Lordinges, this question wolde I aske now,
Which was the moste free, as thinketh yow ?
(V. 11925-26.)
Dubitasi ora quale di costoro fosse maggiore liberalità...
E per ciô che spetta a quest' ultimo raffronto, non sarà
inutile rilevare corne il vocabolo « questione » datoci dal
Chaucer, in questa parte del Filocolo ritorni non so quante
voltc e sia messo in un' evidenza particolarissima. O non costi-
tuisce la storia del Giardino Incantato una délie Tredici Que-
stioni d*amore ?
ORIGINI DEL FRAWKELEYNS TALE 243
Fino a qui il FiloœlOy con cui un' osservazione propriamente
scrupolosa conduce a riconoscere maggiori le sotniglianze ' ;
aile quali gioverà ancora aggiungere Tambiente similmente
pagano. Ci sono tuttavia alcuni passi dove il Decameràn par
meglio convenire. Uno s'incontra subito al primo principio. Le
parole
In Ârmorik, that called is Britayne,
combaciano con
In Frioli ë una terra chiamata Udine,
in maniera da suscitar gelosia nel cominciamento riferito a
p. 235.
Poi, è similmente di puro danaro la ricompensa che Aurelius
ed Ansaldo pattuiscono col negromante; Tuno s'impegna a
sborsare « a thousand pound » (v. 11336 e 11539), Taltro una
somma a noi non precisata coU' espressione, « grandissima
quantità di moneta » ; mentre Tarolfo offre a Tebano la meta di
quanto possiede, « castella » non meno che « tesori ».
Dopo che è stata eseguita Topera d'incanto, Aurelius dice,
tra Taltre cose, a Dorigen :
Ye woot right wel what ye bihighten me ;
And in myn hand your trouthe plighlen ye...
(V. 11639-40)
hâve vour biheste in minde ;
(V. 11647)
e Ansaldo manda a significare a Dianora che deva
ncordarsi délia promission fattagli e con saramento fermata...
Dorigen,
Allas I quod she, that ever thés sholde happe !
(V. 11654.)
Dianora,
s'incominciô a pentere délia sua promessa.
E quando Tuna e Taltra vanno per adempierla, Dorigen ci va
con « a squyer and a mayde » (v. 11 797), Dianora « con due
1 . Maggiori le avevo dette di già, avanti di essermi addentrato nel soggetto
corne ho dovuto &r poi, nella seconda délie note richiamate a p. 235, n. 3
244 P- RAJNA
suoi familiari innanzi e con una cameriera appresso »; il che
viene a offrira corrlspondenza netta di linee, là dove il FilocolOy
col suo « e presa compagnia », ci dà una sfumatura.
Finalmente (ed è forse la convenienza più notevole), saputo
dalla dolentissima Dorigen il corne e il perché délia venuta
sua ', Aurelius
... in his herte had greet compassioun
Of hir and of hir lamentacioun
And of Aneragus, the worthy knight,
(V. 11819-21)
a quel modo che Ansaldo, saputo dalla donna « vergognosa e
quasi con le lagrime sopra gli occhi » la grande « liberalità di
Giliberto », « commosso, il suo fervore in compassion cominciô
a cambiare ».
Questi i fatti. Si tratta ora di cavarnc le conclusioni, senza
lasciarsi annebbiare la vista da alcun preconcetto. E qui veniamo
a dar di cozzo in un problema bcn altrimenti comprensivo che
il nostro non sia. Ebbe il Chauccr conoscenza del Decamerdn}
Se Dio vuole, è passato per sempre il tempo in cui al cieco
amor proprio nazionalc di George Lillie Craik e di Sir Nich.
Harris Nicolas * poteva esser lecito, abbandonando le sane
tradizioni del Tyrwhitt e del Warton, di pretendere che il
Chaucer nulla dovesse airitalia nuova, délia quale avrebbe
ignorato del pari e la letteratura e la lingua. Uno stuolo di
1. Qui il Chaucer le fa dir tutto in due versi (11 816- 17), propriamcnte
mirabili pcr concisionc cd efRcacia. Aurelius, incontratala, domanda dovc
vada :
Un-to tlic g.irdiii, as myn houshond bad,
.My trouthc for to hulde, allas ! allas !
Un vero scoppio di singhiozzi e di pianto. Diventa perfîno supcrfluo il « half
as she were mad » del verso précédente.
2. Al primo (i 799-1 866) originariamcnte, credo, nella History of Literature
and Larning in EnirLnuly pubblicata ncl 1844-46; al seconde (1799-1848)
nella biogr.ifiJ del Chaucer premes^a ai Pck-m^ nell* ediztone Aldina del
Ftckering, 1845.
ORIGINI DEL FRANKELEYSS TALE 245
studiosi tedeschi ha niostrato quanto siffatte idée offendessero il
vero e messo bene in chiaro corne Tazione italiana determini
nella vita letteraria del Chaucer il trapasso da una fase médié-
vale ad una moderna. Ma riguardo al punto specifico che ora
ci occupa il dubbio è rimasto possibile anche dopo che tanta
luce si è sparsa *. Non ci meraviglieremo dunque di certo che un
anglo-tedesco, John Koch, nonchè del dubbio, si sia fatto
sostenitore délia negazione recisa precisamente nel conchiudere
un lavoro tutto intento a indagare, cosa, nelle mani del
Chaucer, divenisse la Teseide *.
E invero, nessuno dei Canterbury Taies è resultato finora
emanazione diretta délia raccolta nostra. Dalla novella del
«Frankeleyn », attualmente in causa, dobbiamo qui fare astra-
zione. Del Rêves Tale^ v. 3919-4322, H. Varnhagen nega,
dentro ad uno studio particolareggiato \ che abbia dipendenza
dalla storia di Pinuccio, Dec, IX, 6. Ne io vorrei ricondurre,
corne fu fatto, lo Shipmannes Taie, v. 1293 1-13 364, ^ Dec,
Vin, I. Quanto alla Griselda, è cosa nota come sia stata con-
dotta sulla traduzione latina del Petrarca, anzichè sull' originale
boccaccesco *.
Per la Griselda sono tuttavia da osservare due cose. Se essa
fil realmente composta come opéra a se, prima di metter mano
1. Fa piacere, in quanto mostra la spassionatezza délia critica italiana,
che non dia bando ad ogni incertezza Cino Chiarini, La Casa âella Fama di
Cfjauccr, Bari, 1902, p. 4, pur avendo egli stesso — Intoruo aile « KaveUe di
Canterbttry » di Goffredo Cfxtiicer, nella Xucn'a Antologiit, vol. CVI (nov.-dic.
'^97)> P'iî3ï"34 — niesso in luce ragioni validaniente suffragatrici delF idea
che a noi deve riuscir più simpatica. Risolutamcnte, ma pur sempre serena-
mente affermativo è Carlo Segrè, Oniucer e BoccacciOy nel Faufulla délia Dome-
nicûy 25 nov. 1900.
2. Ein Beitrag itir Kritik Chaucer' Sy nel vol. I (1877) degli EngUsche Studien^
p. 249-293. Tradotto in inglese da lui medesimo, il lavoro del Koch prese
poste un anno dopo tra le pubblicazioni dclla • Chaucer Society a.
3. DU EfxàSilutig von der Wiege^ negli Englisclie Studien^ IX, 240-66.
4. Proprio, si badi, sulla traduzione scritta, non sopra un* esposizione
orale, cotne credctte il Warton e non discredcttc il Dunlop, 2« éd., II, 349
(vers. Liebrccht, p. 253). Misero le cose a posto il Hertzberg, nelle note aile
CanUrhury-Gtschichtaiy p. 625-26, e il Kissner, nella dissertazione già indicata
(p. 217, n. 2) eche quind' innanzi sarà da avère ben présente, p. 75.
246 F. RAJXA
ai Canterbury Taks S al suo non provenire direitamente dal
Decamerôn è toi ta pcr cio solo ogni portata che tra^cenda 1
Umiti suoi propri, E nella conduione in cui ora si alfaccla,
quale Clerkes Tak^ mi présenta una circostan^a, che, se è
dovuta a mero caso, riesce singolarc di certo* Essa è s^;:uita
immediatemente dal Marchantes Taie, che conta corne
Whîloni ther was dwelliog^ in Lumbardye
A wortby knight, îhat boni uas of Pavye,
In which he lived m greet prosperitec ;
(V. 9121-23)
c nel Drcamcfbn si trova del pari contigua — solo seguendo,
in cambio di precedere — alla storia, affano ererogenea del
resto, di un ricco signore lombardo, e precisamente pavesc,
cioè di Messer Torello*.
E la forza dîmostrativa délia mancansca di una derivazione
immediata incontesrabile è d^alç ronde actenuata da più che una
riâessione. Dice il Koch : a Non è uwia la congettura» che, se
il nostro poeta avesse realmente conosciuto » il Decamnèn^
tt cgli îiei suoi cosi numerosi prodotti ne avrebbe preso dirctta*
mente perlomeno una novella^ in cambio di rielaborare scritture
piii vecchte? » Oui col « cosi numerosi prodotti », in parte d
si conduce fuor di strada, in parte si esagera; se ci Umitlamo,
com'è dovere» ai Canterbury TaUs^ rammentiamoci che i Talrs^
non sono ncmmeno il quarto di cio che porta va il disegno
primitive; sono cioè ventiquattro in cambio di centoventi
air incirca; e î ventiquattro si riducuno a poco più che la meta,
se deduciamo quelli spettand a generi, che îl Boccaccia non
avrebbe mai accotto. Poi, dirimpetto alla congetmra del Koch,
s, Taîe Qon lifannosolo coloro che, m iKs<!quiô al Pmloga, ^otio iJomi- <
nati dal pensiero 4i mettcrne la coraposizloiie in immcdiato rapporto calU I
supposta c non improbabile vbiu al Pctrarca : con tma dctcnnîna^ione crono-
logic3 Jîvcrsa pensa cosî anche il Ten Brinfc, conie resnlu dalle p. 125-27 e
171 ddta Gesch. dtr tngï, LiUr.^ t. IL
2* G, X, nov. 9 : « E avendo * il Saladino con piccoU compagnîa * ccrcbc^
moite provincie cnaianc, e per Lombardia cavalcando pcr pastarc ohf«
a' inDDti, awviine che» aiîdandoda Melano a Pavia, ed esscndo gïà vespro»
SI scomrarono in un gcntik uotno, il cul nome era messer TorcEo d'IsifU da^
Pi%'ia^ il quale con suoi famigHarî e cofi cani e con falconi k» tsoc.
ORIGINI DEL FRASKELEYSS TALE 247
demanda posto quest' altra, che precisamente dal Decûtncrôn il
Chaucer sentisse molto ritegno a prendere. Non appartengono
i Canterbury Taies a quel période délia vita in cui il Chaucer,
pienamente maturo, sa essere più originale, e risolutamente
afferma il suo io, schernendo i rivali d'umile specie ' e non
risparmiando i maggiori * ?
D'altronde la convenienza, o non convenienza, dei racconti
costituisce solo un aspetto délia questione, e davvero non il
più importante. Quale metamorfosi abbia prodotto nel Chaucer
la conoscenza délia letteratura italiana, s'è ricordato poc' anzi.
Délie tre nostre massime glorie trecentistiche, stampô orme nel
suo spirito Dante ' ; gl' inspirô affettuosa reverenza il Petrarca ;
ma, per via di una peculiare affinità d'ingegno e tendenze, e
insieme in grazia dello star meno in alto, e sopra un colle
anzichè sopra rocce, esercitô su di lui un' azione di gran lunga
maggiore il Boccaccio-». Ed ecco il Filostraio convertirsi nel
Troilus and Criseyde 5; la Teseidt^ essere elaborata anzitutto quai
poema a se in una forma perdu ta 6, allogarsi in nuova veste nei
Canterbury Taies quai narrazione del « Knight », e dare ancora
perlomeno le mosse a quel misteriosoframmento che è VAnelida
and ArciteT, E accanto aile derivazioni più ricche e patenti ce
ne sono altre che meno appariscono. Quanto al concetto géné-
rale il Monkes Taie vuol essere ricondotto al De casibus virorum
1. Ten Brink, op, ci t. y p. 180-82.
2. Ih,, p. 164-65.
3. Contributo a questa parte dell' indagine è il récente lavoro, ricordato
qui dietro (p. 245 n. i), del Chiarini sulla Casa délia Fatna, che porta altresi
il titolo Di una imitm^ionc inglese délia Divitta Commedia.
4. Il parlare cosi è un far eco al Ten Brink, p. 51 sgg., che ha veduto più
addentro e più largamente di ogni altro. Sarebbe tuttavia ingiusto non rilevarc
che egli aveva avuto ottinii predecçssori nel Kissner, dissertaz. cit., p. 66
sgg., e nel Hertzberg, proemio aile Cauterhury-Geschichten, p. 43 sgg.
5. Lo studio di questo soggetto riempie per buona parte (p. 13-58) il lavoro
del Kissner.
6. V. Ten Brink, p. 69-70, e lo scritto citato del Koch, che è appunto
in particolar modo una ricerca sui rapporii fra le due rcda/.ioni.
7. Per il Koch, p. 280-91 (cfr. Ten Brink, p. 196-98), noi avremmo qui
anzi il principio di un rimancggiamento délia materia stessa, anteriore al
Knightes Taie,
248 P- RAJNA
iUusîrium^ donde esso anche ripete taliina délie « tragédie 1»
di cm si compone % mentre poi un' aitra ne deve al De mulk-
rikis Claris % suscitacore alla sua vol ta délia Ligend af gôod
fVaomen^ ; parecchi riflessi delT Atnorosa Vhïont ha st^gnalaco il
Koeppeh; qualcosa délia vedova — vedova, si noti di duc
mariti — cosi sanguînosamente vimperata dal Cm^haccio, pare a
me di sentire neUa Donna di Baîh *, sulla bocca délia quale
d alrronde la confession e sfacciata délia sua vica e de' syoi
appetiti potrebbe fors' anche essere stata messa A^Wa RuffiamUa^
cioè da una composizione attribuita al Boccaccio con moka
insistenza^. Facile profezia \\ presagire che nuovi rapporti
resulteranno dagli saidi ulteriori.
Ma se il Chaucer ebbe famîliari le opère miiiori del
Certaldese, non so quasi comprendere corne si possa imma^iiiare
possibile che ne abbia ignorato la maggiore^ Ignoraro, in
quanta non laleggesse; poichè del resto, arrivât fino al segno
di pretendere che resistenza ste$sa gti rimanesse celata^ sarebbe
inescusabile balordaggine, per via di ciô che ne è detto tiella
1. Ten Brink» p. 1S5* « Hene begrnneth the Monkes Talc, de Casibus
Virorum lîbstrmm », dicono aj^erutnumc i manoscrittî ; e il « casibus * si
riflette nel 0 isy-fallen » del v, 15982, nd « filkn « del 15999. Le rebxioni
s'illustr;tnâ ânche per il coiifronto â\ tutia k parte proemîitk del Chaucer
(compresi î v\\ t5997-ï4c>04) colla prefit^ionc boccaccesca. Quamoad ema-
tïazîom specïHchc, provjenc dal De casibus (1. 1, c. 1 e 17) il trano tonccr-
nente Adamo (v, 1401^*14100).
2. Zenobla (v. 142 $^-580), dl cuî sarà da rîparlare più olcre, p* léa.
3. Si capt&ce abbastania che lo ammcite il Ten Brink, p. 11 2-1 j.
4. Xel o. V dd Chmufrmmt : ArtgtiHj XIV, 2^5-38.
5. Ddle fonti dd Prologo, încui co^td presçnia dnicamentesè stcssa, ha
îranato per uhimo W. E. Mead in una scritto che nelle FtthL &/ tbi M*^i.
iMti^, Assoc. of Amer, précède immédiat amen te (p. ^88-404) it nostro dcllo
Schofidd.
6* Per la Ruffiandh% e per l'atiribuzione mî basti rioviare al Gaspan'i
Gisâh d, il. LiUr., II, 64 s, e al Giorn. stor. J. Ittkr. iL, XJI» 2î9» n. 2,
doridc si ricaveranno anche le altre îndicazioni bibliografiche occorrenti-
7. Pcrô si meraviglia anche lo Skeaî (p. xvi ddr Introduxîoneallo Stttdenfs
Chaucer) tiell* auo stesso in cui dà a vedcre di pensarlo : • Strtiioabbastatu»,
non c*è nul] a che niostri che il Chaycer cono^cesse, dî pnma niano, tl
Dtfmnermf del Boccacdo. • Sytl' incredibihti deUa cosa insistono, com* é
naiurale, lanto il Chîarini, Su&i*ti Ani., CL VI, 352, <)uanto il Segré, ûrtk.eit.
ORIGIl^l DEL FKAmELEYSS TALE 345
Icttem dlnvio e di dedka air amîco autore premessa dal
PeCTârca alla versione sua délia Griselda. E sapendo deir opéra,
non <avrebbe desiderato di conoscerla da vicino ? egli cosi singu-
lannente portato al novelbre dalle inclinazîoni naturali, corne
mostrano in modo incontrovertibile i fatti ? Vorrei sa père in che
tempo gli dîventasse nota la pietosa storia délia marchesa-vilLma.
Se cïb avveîine comunque avanti il 1578, a nessuno sari lecito
pretcndere che ail' appâta mento del desiderio man cassera le
occasion i. In quell* anno il Chaucer fu mandato in Lombard ia
ai Visconti; e pressa i Viscunn di libri non si paiiva diferto \
E quand' anche si pensasse che appunto cola gli venisse alla
mano ta Grisclda pcirarchcsca, ù poco concepibile che subito
conosciuta tjuella egU non sî desse alcun pensiero di scorrerCj
non foss' altro. Topera per la qualt^ il mirabile saggio doveva aver
suscitaco in lui interesse vîvissimo'. Ma poi, ritardando fino
a questo moniento la conoscenza del Decameron, si va contre
ad ognî verosimiglianza. Se nel 1378 il Chaucer fu in Italia,
cera venuto di gtà sei anni înnanzi. Ed allora vi era rimasto
molli mesij conducendosi pressochè di sicuro anche nella To-
scana e precisamente in Firenze ^ ; ed appunto a questa andaia
si riporia univcrsalmente la sua trasforniazione lettcraria* Che
in Firenze, nella cîttà del Boccaccio, egli, poeta appassionato,
venutosi certo a manifestare uonio di lettere con coloro coi quali
ebbe a iraitare, non sentisse alnieno parlar molto di Messer Gio-
vanni e non acquistasse notizia délie opère suc principali, pensera
isoltanto chi, per amor di una tesi^ non rifugga dagli assurdi,
E accanto a quest' ordine di considerazioni viene a coUocarsene
un altro. Dello schéma dei Canlcrbury TaUs dîce il Koch : « Si
dovrebbe mai a un cosi insigne poeta, al fondatore dell* arte
poetica inglese, al crcatore di quella Ungua, al padre dell* umo-
rîsmo. si dovrebbe mai a un genio cosiffatto non voler consen-
î* V,, a buon como, oWdda^ Indii^hii sulh Uhntîa Vhcmko-Sfmxtica
M Gisiflh di Piivfj, t. H, Milano, 1879, p. Vï sgg. ; Magesta, / Fhcùnîi e
ih S/oma fief Citsîelh di Pavhu Mibrio^ îSHj, I^ 112-17,
2, « EmesçinerUeblingsdiditiingen », chiama il leti Brink k Griselda,
n, 171-
î* V, Ten Bri>;k, Ckmtr* Situikn ^nr Gt^schkhk sehttr Entu^kkim}^ nmi
^r Chren^l^-k uimr Sthnjkn, Pane prima, rimasîd unica, Mûnsttr. 1870,
p. 180-81 (n* VI ),
250 p. RAJNA
tire tanto di fantasia da poter ideare da se questo piano ' ? » Belle
frasi e nu IF altro. Il foito si è che il Boccaccio stesso, seconde
spero di aver mostrato nello scritto sulle Tredici Questioni,
non arriva al suo disegno se non per gradi; e il fatto.si è che
prima di lui non abbiam nulla in Europa che propriamente cor-
risponda. I Sctte Savi, voluti mettere al posto dell' opéra sua
dal Sandras^ — insieme colla Disciplina Clericalis, coWocsLia loro
irragionevolmente al iianco — , sono ben altra cosa; ivi la comice
è essa stessa parte essenziale del quadro; il libro non ci pré-
senta già una brigata novellatrice per mero passatempo. E senza
paragone più lontana ci sta la progenie del Paiiiatanira, Corne
poi fu apparso il Decanienm, tutte le raccolte congeneri, e moite
anche délie non congeneri, si manifestano figliuole o nipoti sue.
I Canterbury Taies flirebbero eccezione. Il fenomeno — g'uardate
caso! — del pari che in Italia, e solo pochi decennii dopo, si
sarebbe prodotto presso di un popolo in condizioni tanto difFe-
renti dalle nostre c di tanto più immaturo.
Il caso riuscirebbe nondimeno amniissibile, se Tincorniciatura
inglese trovasse un* altra spiegazione sodisfacente. E trovaria
parrebbe. L*oste di Southwark propone, od anzi impone, ai pel-
legrini il partito del raccontare novelle
to shorte with your weye
In ihis viage;
(V. 793-94)
•(( per accorciare la via )). Ora, non soltanto il discorrere, cosa
di cui sarebbe perfino ingenuo far parola ', ma proprio anche
il novellare, doveva con questo scopo essere in uso durante
gl' interminabili viaggi del medioevo^. Il Chaucer si sarebbe
dunque inspirato alla realtà.
La realtà non vorn\ essere perduta d'occhio; ma, guardando
con attenzione, si vede come tra essa e la supposta sua immagine
vi sia molta diffcrenza. Altro c il fatto che là dove due, tre.
1. l'.mrl. St., I, 293.
2. Ncir FJiuk a me nota solo di seconda mano. Mi ragguagliano sul punto
attuale l'Ebcrt, ]ahr. f. nvn. u. f//;^/. Lit., IV, 104, e il Koch, nel luogo
citato dianzi.
3. V. nel nostro Prologo stesso i v. 773-76.
4. Rinvierô aile mie Fonti iJelF OrhimJo Furioso, 2« éd., p. 236.
ORIGINI DEL FRAWKELEYSIS TALE 25I
quattro persone cavalcavano o camminavano insieme, questi o
quegli fra loro, ed anche tutti successivamente *, intrattenessero
con un racconto il compagno od i compagni, altro il porre chc
una brigata di trenta persone (anzi, par bene, qualcuna più)
si appigliasse a un partito sifFatto. Che razza di voci, non mai
sentite sulla terra, bisogna prestare ai narratori, se si vuole che
essi potessero essere uditi da tutti ! Fossero ahneno a piedi ! Ma
no : sono montati su cavalcature; il che rende senza confronto
più lunga la schiera, ed aggiunge per soprappiù uno strepito di
passi, quale ognuno puô figurarsi.
Si dira che il mio è un sofisticare e che non tengo conto
deir elaborazione fantastica ; e mi si ricorderà che nemmeno
la brigata novellatrice del Boccaccio riproduce la realtà vera ^.
Ma in quel caso appunto si vide corne al disegno non reale del
Decutnerôn sia preceduto quello ben reale del Filocob K Per il
Chaucer nuUa ci dà un motivo qualsiasi di supporre una fase
antécédente; una fase, poniamo, in cui, invece di novellare
soltanto, si novellasse e si discorresse di argomenti svariati.
Tutto ciô che, tenendosi su codesta strada, s'immaginasse per
rendersi conto délie cose, dovrebb' esser cercato tra le nubi, e
più lontano ancora. E una volta che li accanto sta il Decameroriy
al quale non ce che da volger gli oCchi per vederci e poterne
togliere ciô a noi occorrc, io non so perché gli occhi si dovrebbe
ostinarsi a farli spaziare pel vuoto.
Ne fra la cornice del Decamerbn e quella dei Canterbury TaleSy
pur cosi diverse, mancano convenienze speciali. Di eloquenza
inconfutabile sarebbe una segnalata, non so se primamente, dal
Ten Brink*. Una pestilenza fornirebbe l'occasione anche al pel-
legrinaggio inglese : i personaggi del Chaucer sarebbero incam-
minati a Canterbury per ringraziare san Tommaso « fur die
glùcklich uberstandene Seuche ». Non capisco tuttavia corne
ciô si possa dire. La turba (i personaggi nostri ne sono una
frazione), che, venuta la primavera, s'avvia a quella volta
1. Trasporto alla vita reale ci6 che mi è dato dal Pahiwedh : V. Fow/i,
p. 267.
2. /?oy/iJ/i/i7, XXXI, 75-76. ♦
3. Ih., p. 35, 70-74, 77-
4. Gesch., p. 146.
F, RApîA
The holy blisful martîr for lo seke,
Tliàt hem halh holpen, whao ihat thcy were sckc,
{V. ,7-18)
a me par costituita da persooe guarite da infermità loro perso-
nalij non da una malattia epidemica '- Lasciando stare che allora
si sarebbe costretti a supporre che anche il Chaucer avesse avuto
la peste o si prendesse il gusto di attribuirsela, poichè al pelle-
grinaggîo panecipa lui pure, ognuno vedc quanto sarehbe strano
il porre che i pellegrint fossêro staii tutti malati effettivamente,
anzichè essere in buona parte gente che avesse faito voio di
andare al Santo, se il flagello li avesse risparmiaii, E s'aggiunge
che nel tratto înîzuile a cui appariengono anche i versi citati,
il poeta parla di quel che avvicne ad ogni ritorno délia buona
stagione, non di un faito seguito in un derermînato anno.
Ma se quesio riscontro non regge, o si riduce a una sempUcc
ombra, altri due mi accade di scorgerne. A quel modo che nd
Lkcatnerèn ciascuno dei personaggi deve ogni giorno recitare la
sua novella e si trova alla fine aveme dette dieci, nei Canierhury
Talcs, stando al disegno primitivo^ che è il solo valevole per noi,
il turno si doveva ripetere quattro volte; e che ci6 s*annunzi e
siabilisca anticipatamcnie, v. 792-97 ^ mentre poi non si riescc
punto a fare che sîa, indica bene la présenta di un esemplare
dove qualcQsa di analogo s'avesse iit realtà : condizîone oitima-
menie adempiuta dal libro boccaccesco, mentre i Sfiti Sifi'i
radempirebbero maie, e anicamente in redazioni delle quali non
è punto attribuibile al Chaucer la conosccno, O ci sarebbe ami
chi volesse supporgli noto il Syntipas greco, o il Lihro de lus
mgûnfws spagnuob, che primi crasportarono in lingue europee
quel lipo orientale, dove ad ogni Savio, in luogo di un solo
racconto, vennero ad assegnarsene due, narrati tuttavia, si noti
bene, da ciascuno di seguito nel giorno già suo, non con rinno-
vata vicenda ^?Nè la mente sarà, credoj più disposa a corrcrc
alla SkTria uosrra di Sufano^ dato che dietro alla redaisione in
I. Perd mche il Brjuidl, FMXTL^Gmndrm âtr ftrmm. Phtlel,^ i* cd,, II, ^
éjS, ^codo suo U fîseontfo dcl Tcn Bdnk, gU moiza sciua ftviwdeTscne le
gantlie, a « Sci>die » snslitucoda « Krmnkhcit ».
t. V. CoMFAitrm, Ruén-he mi.ytrtif 0I Lihrû Ji SMihjJ, ncïle Memte>H§
dél R. Utii. Umi*. di Se. e UtL, CL J* Ltti, vo!, XI» Mibno. 1S69; p, 9-10,
ORIGINI DEL FRANKELEYNS TALE 2$^
ottava rima, troppo tarda per entrare in campo, ce ne sia stata
una anteriore, di cui quella sia semplice versificazione \
Ho detto che nei Canterbury Taies il quadruplice compito per
ogni individuo della comitiva è anticipatamente annunziato e
stabilito. Lo annunzia e stabilisée Toste; il quale, dopo essersi
fatto concedere, ed avère esercitato, Tarbitrio di stabilire la
legge, vien corne ad imporsi da se stesso quai sovrano per tutto
il viaggio :
And for to make yow the more mery,
I wol my-selven gladly with yow ryde,
Right at myn owne cost, and be your gyde.
(V. 804-6.)
Ed ecco un altro riscontro col nostro libro, e un riscontro che
accennaancoressoaderivazione. Chè il concetto di quella curiosa
creazione di un signore, dove il popolo non fa se non consen-
tire, e, meravigliosamente docile, ail' assenso accompagna perfino
le preghiere (v. 812-20), presuppone, oso dire, il libero e spon-
taneo insediamento dei re e delle regine del Decamerbn. E c'è
motivo che si parli anzitutto del Decameroriy piuttosto che del
FilocolOy perché in questo le novelle sono eccezione, non regola,
quai semplice varietà delle Questioni d'amore,e perche la sovra-
nità deir oste, del pari che quella dei suoi riscontri nelle « Dieci
Giornate », si estende ad ogni ordine di cose, a tutto Tanda-
mento della vita. Anche il Filocolo tuttavia puô pretendere ragio-
nevolmente ad una partecipazione, per via dell* ufficio di « giu-
dice » che Toste attribuisce a se stesso e che dalla turba gli è
confermato * ; egli giudicherà della bontà comparativa delle
novelle, a quel modo che la Fiammetta del giardino napoletano
giudica le Questioni.
Sicchè il Chaucer conobbe — non posso dubitarne — il
Decamerànj e al Decameron è da riportarc la concezione dei
Canterbury Taies, Cosi nella sua serenità ha continuato a pen-
sare la scienza germanica ' ; cosi, segnatamente, giudico il Ten
1. V. Ramanid, VU, 569-70, 388-89.
2. V. 798-803, 807, 816, 820. Toglie ogni dubbio che gli altri luoghi
potessero lasciar sussistere il v. 3 16, « And of our taies juge and r^portour ».
3. Segnalerô VEben, Jahr. f. rom, u. en^l. Lit., IV, 104; il Kissner — al
quale da W. Hertzberg, ib., VIII, 1 54, si attribuisce ben meritamente, contrap-
2)4 P' RAJNA
Brink * ; e il parère di un uomo di ranto valore, in un domi-
nio nel quale ognuno gli riconosce singolarissima competenza,
basterebbe da solo a hilanciare non so quanti dissensi* Clie
quakhe impulso indetermîiiato poss.i essersi ricevuto d altronde,
che altri coefficient! si siano poi venuti ad aggiungere^ non
sigïiifica nylla per il problema fondamentale. Ne mi fa ostacolo
la differen^a di fattezxe. Anche net monde délie idée si puô
esser figli di taie a cui poco o punto si assomigli, anzichè
di quakunQ con cul la somiglianza apparisca maggiore* Mag-
giore per più di un rispetto sarebbe colla cornice imma-
ginata dal Sercambi, Questi pure conduce ia sua comiliva a
viai^iare *; e se parte délie novelle sono narraie nelle città dove
la brîgata si ferma, altre sono dette în cammino V, non divcr-
samente dalle chauceriane, e, beninteso, col medesimo intento
di cacciare la noia e di far parer brève la strada ♦. S'aggîunga
poi che la persona cui è commesso il governo — a il preposto »,
corne qui si cliiama — rimane sempre la stessa, in cambio dî
mutar giornalmente ^ Che se dalla cornice si pona un pochino
lo sguardo sul quadro, il Sercambi si a%^ncîna al Chaucer di
quanto si allontana da! Boccaccio nel trovar buona qualsivpgUa
materia narrativa, senza distinzione di sorta: e cosî, per limi-
tarmi a pocbi esempi spiccati, colla storia di Piramo c Tisbe d
offre un riscontro per quella che, pur non essendo profferito il
poGcndoIo al Sandris, « eîn klârer durch keînc vorgefa&ste Meiaung oder
panikubre Interosen getrùbier Blick » — -, p, 76 ^ il Brandi, /* £^^7- Stuotiâ tl
Kûrtlng, Gruftdrhs dtr Gt^hkhie drr tn^lhchiu LiUrdtttt ^ MûnstçT, 1SS7»
p. 169.
1, Si Icggano anenumentc le pagme 14 V4^* ^*^^ • attcn lamente 1^
perche in utu riîcensione pubblicata nell' AngUa, t. XII, du R* W[ùlkcr] ne
vcdo rbssunto in modo mesatio il con tenu 10 (p. 475),
3. V. b « Prcfaiione » ûtà Renier aile Nm^îU itadite di Gïovanki
SERCJkMjt] tratt€ dû! Codk4 Trmdihtm CXCIlh Torino, iSS^, p, ui-Ltn.
î* ih.^ p. LV-LVi. Ma â me, desîdcroso di rjgguaglî icstunii, ne ha forako
k pronia e iroppe volte sperimcntata cortesta dd dotto bibliotecario delb
TrivulEiana, Emilîo Mona.
4. Tra gli e&empi favoriumi dal Mot ta, scdgp qu&to, che précède mDa
novelU V, De mmm^ jusHtiû i «... Et peniQCo che il camma non Increscha
aQa brigata, fiie pregaïo Vûiùtc che dovesse passarc il caniino eoo quakhe
dilettevote novclla, fine che â) bel Ci^icUr di Prjio f^ix la su4 posjia. •
|. P. Lti, e, testo, p. j-6*
ORIGINI DEL FRANKELEYNS TALE 253
nome, dirô di Coronide, emanata del pari, sebbene ingrossata
con tutt' altre acque, dalle Metatmrfosi di Ovidio ' ; al fianco di
Virginia mette Lucrezia ^; al miracolo del fanciuUo devoto délia
Vergine, che, sgozzato da Giudei, puô far conoscere lui stesso
il delitto e provocarne la vendetta, dà per compagno il miracolo
délia Vergine, che, parlando e stendendo la mano a benedire
da una pittura, induce un Giudeo a convertirsi '. Con tutto ci6
non isperi il Giovanni lucchese di sbancare il fiorentino, sebbene
una conoscenza dell' opéra sua sia cronologicamente possibile-»,
e, con un po'di sforzo, si lasci anche mettere in rapporto col-
Tandata in Lombardia del 1378. Se mai (ne inclino troppo a
pensarlo) al Sercambi non sarebbe da consentire che un' azione
modificatrice ; e a rifiutargli la parte principale sono indotto da
ragioni d'ordine générale, anzichè dalla divergenza, non abba-
stanza conclusiva, per quanto ragguardevole, dell* essere nel suo
novelliere commesso ad una persona sola TufBcio dell' intratte-
1. Chaucer, Maunciples Taie : Sercambi, Novelle inédite, 93, p. 326.
2. Chaucer, Phisiciens Taie : Sercambi, Nov. itieJ., 26, p. 109.
3. Chaucer, Prior esses Taie : Sercambi, Nov. in. y 25, p. 105.
4. V. Renier, Prefaz., p. l e lviii. Naturalmente, sarebbe da pensare alla
redazione del misterioso Codice Baroni (//'., p. xlix sgg.), posto che Tipotesi.
schizzata dal d'Ancona e dal Renier accuratamente disegnata, che quella
redazione costituisse una forma primitiva deir opéra, risponda alla verità. Ma
essa, pur avendo molto per se, non è al di sopra dei dubbi. Ci sarebbe il caso
che si traitasse invece di un rimaneggiamento, Dio sa di chi. Che il codice
non fosse autografo del Sercambi, corne Bernardino Baroni pretendeva,
résultera poco dubiubile a chi esamini bene e confronti colla lezione trivul-
ziana Tunica novella trascritta di là — poniam pure con molto arbitrio e
scarsa awedutezza — che noi si conosca. Curioso che il Codice Baroni, sem-
preaLucca sul finire del secoloxviii, sia sparito per l'appunto (Renier, Prcf.,
p. lu) quando venue sul mercato toscano il manoscritto posseduto ora dalla
Biblioteca Trivulzio. Mi comunica il Motta, che esso fu offerto al Marchese
G. G. Trivulzio dal libraio fiorentino Molini con lettera del 17 novembre 1807 ;
e Taffare fu conchiuso al principio del 1808. Naturale che la vecchia idea che
i due codici, e conseguentemente le supposte due redazioni, siano in realtà
una cosa st^a, sia tentata di rimettcr fuori il capo. Ma essa deve anche
ritrarlo; poichë, per quanta poca fiducia si voglia riporre nell' accuratezza
degl' inforraatori nostri Bernardino e Luigi Baroni, restano a stabilire la
distinzione dati non contestabili di fatto.
256 P, RAJNA
nere con racconti la brigata,cîoè a \n\ medesimo \ Un servigio
tuttavia il Sercarabi rende in ogiii caso a noi; giacchè la dériva-
zione non tmpugnabile m nessuna maniera del disegno suo dal
boccaccesco^ mostra lôIT evidenza delT esempio corne ne possa
âlcrettanto bene derivare quello del Chaucer. Non occorreva
neppurej corne si vede, un grande ingegno per sostituire una
comitivain moto alla brigata fissa del Decameràn. E al Chaucer,
meravigliosamente disposto air osservare, i viaggi suoi propri^
olrre air idea fondamentale, ebbero, credo, a fornire il mezzo
dt anûvaria, facendogli successivamente incontrare tipi anche
più svarîati di quelîi che, scegliendos eglî venne a rapprescntare
tutti rîuniti insieme. Mi si lasci andare più in là coU' immagi-
nazione, e figorarmî che le reminiscenze del Decameràn e la
realtâ vissuta si assocîassero nella mente del Chaucer^ produ-
cendo Tembrione dei Canlerbury Taies, appunto per via, mentre
il cavallo avanza passo passo e il suo cavakatore ha tutlo Tagio
di mcditare.
Ho detto tt le reminiscenze del Decameràn »* Per consentira
air opéra del Boccaccio Tazionc che io son convinto spet tarie,
non occorre davvero che il poeta inglese se la trovi attualmcnte
(ra le mani. E la conoscenza acquis ta tane pu6 esserc di fresca
data (chi ci assicura che il pensiero di emularla non nascesse fin
dal primo viaggio in Italîa?), e puo anche risalire a molti
anni addtetro, Quindi si vede più che mai, quanto sia lUegit-
tima la deduzione vol ut a ricavare dal non essersi accertàte
relazioni dirette di novella a novcUa ^ Bensi la memoria non
basta nel casa spéciale donde siam mossi, e a cui è ora da far
ritorno. Si avverta tuttavia che, pur non avendo più a dispo-
siziooesua il Decmmrèn tutto intero, il Chaucer potrebb'esser-
I. Rekïer, Prêt, p, ui-un, lv, e poi il tcsio, verso U fine dd Procniio.
p. 8, Dato che la redarione baroniana fosse Toriginaria, avrebbc per \vm
importanza il sapert sç il novellatore ri manesse coûtante andic \n essa. Chi per
una frase dt Bernardino Baroni, « novelle. raccontacc DA una brigata «^
ùp, d/., p, XLCX, si credesse in diritto dl afferaiare nsolutamcnte che no,
farebbe iroppo assegoarnentû sul rigûre ddte parole.
1. hx confûrmiïa cra ben maggiore col ïesto baron îa no; il qilâlc perunto
neir jpotL-si che ravvisa m cssa \\ primo getio assume Tuffido di foriDa
mcdiairicc, o dî trapasso. \% la soliia Prçfazionc, p. xux-Ur Lvni.
f. P. 145.
ORIGINI DEL FIUNKELEYXS TALE
257
I
I
sene procaccîato qualche parte. E si capîrebbe che attraesse in
modo particolare il suo desiderio la Giornata dccima, che dava
compimento ail' opéra, che conteneva !a Griselda^ che per
nobiki costante di contenuto s'inal^ava suif altre tutte. Ad essa,
ramnientiamocene, insieme colla novella di Messer Ansaldo,
appartienc anche Taltra di Messer Torello, a cui siamo statî por-
tât! da un curioso indîzio^
Quell* indizio nondimeno è un vîrgulto, aggrappati al quale
noi non vorremmo dî ccrto star sospesi sopra un abisso.
Quanto aile ragioni ricavabili dal Fratàekyns TaUt convien
riflettere che il più délie somîglianze sono comuiii al Deçà-
mmm e al Filûcoh, e che, data un' ordittira consimile, conve^
nienze minute vengono facilmente ad accompagnarcisi per
nuova produzionej e non per derivazioiie soltanto. Ne viene che
anche un fautore dell' origine boccaccesca di c|uel racconto,
deva essere dispos to a rinunziare alla presenza attuale delF uno
ti deir altro dei due modelli possibili. Ne la scelta saprebbe
allora esser dubbia, Ben più che il fatto délie convenienzc mag-
giori, riesce éloquente la circostanza che solo col Filocolo ci si
siano manifestati di quegli appigli, che costituiscono un aggan-
cîamento con questa opéra % e conseguen te mente con questa
versjone.
Di fronie al Frankdeym Taie il FUùcoÎq potrebbe dunque ba-
stare a retîder conto cosi dellesomiglianze proprie corne di quelle
del Decanurîm. Ma per il fatto stesso che allora tutio riposi sulle
sue spaile, diventerà più che mai difficile e pericoloso il disfarsi
di lui pure. Se anche dopo il rafFronto minuzioso rimane spazio
per la congettura, cosi legittima prima *, che i rapporti fra il
Boccaccio ed il Chance r, quantunque prossimi e pur avendo
Taria d'esser diretn, siano dovuti invece a comunanza di modelli,
quello spazio si è venoto facendo assai angusto. Délia libertà di
foggiare a piacimento un modcllo supposto, del quale non
s*abbiano a temere le smentite, è da usare con grande cautela.
Per preferîre questa ipoiesi alK altra, di tanto più ovvia e suf-
i. P. 246.
2, V. p. 2^6*37.
j; V. p. 2H-ÎÎ
nia XXXIÎ
17
2j8 ï>. RAJMA
fragata anche dalle coadizioni storiclie, occorrono ragioni ben
font. Vediamo se s'abbiano,
Una pu6 cotisiscere in convenien?îe estranee al Boccaccio clic
venga facto di scoprire tra il Frankekyns Taie e i parallcrli orien-
tali. In générale non è dubitabile che lo sent tore iuliano ci
da una forma pio arcaica che il poeta ingluse. Mentrc i) giardino
rigoglioso di pieno invcroo si rannoda ad una tradizioiie lar-
gamente diffusa ', la sparizione, o diciam meglio dissimulaïîione
dellf rocce, costicuisce un tratto necessanameute legato ad una
determinata localizzazione, e perô, anche alF infuori di alrri
argonienti *, sî dà a conoscere per cosa relativamente tarda.
Tuttavia certe somiglianze peculiari coî remotissinii cugini nel
Frankfleyns Taie accade di scorgerle.
Qutvi, non ahrimenïi che nei riscoutri astarici» la donna è
richiesta e promette se siessa dirctta mente, non già per via dî
m<^diatori, corne presso il Boccaccio. E costoro m' lianno ben
raria dlntrusi. Souo intrusi nondimeno deî quaïi era facilisstmo
sbaraxzarsi; e pero sulla îoro asscnza non vorrei mai londarmi.
Ce deir;iltro; ed c curioso che ci mctta din*inzi in funxionî
sccondarie un giardino \k dove appunto con ufficîo principale
esso non apparisce* Richiesta e promessa avvengono in un gîar-
dino cosi nel Frankekyns Taie, come nel gruppo indiano delLi
Vetâla-panéaviittçati ^ e in quello persiano del Tûtî-nâmfb ^. E
il giardino s'ha di nuovo quando la promessa deve essere adan-
piuta : a quella volta s'awiano tanto Dorigen, quanto Lftvanya-
vatî in Gambhaladatta ^ e îe consorelle persiane, per le quali
ultime la cosa ha una ragion d'essere intrinseca^ dacchè Ioro
creditore é li appunto il giardiniere. In quesco secondo momcnto
il giardino mi pare nel Chaucer semplice co m segu en za del tanto
discorrere che se n*era fattu nel primo ^. £ dunque di quel-
1. QuakhemikindicaiioncinDu>3iOP-LiEBRECHT,p, 251 c 475 (n, lîvi).
2. W p. 221.
î. V nelbvaradi V. Bcttd, Ftfdkpii/iàivim^atikd^ le pp. t^Ssgg. : Simli
Itaiiatii dt Ffloît^ia hutù-irmkû df'trtti du Fr. L. PuLLê, vol, III (1^99).
4, Rûttuma, XXXÏ, 4î.
$. D^TîEi, p. 14^. Desïderando mgguagtî su questa ri'daiione dd!â
yttiik'fHtfUavimdîtf, %\ potunno avcrc âàWo siesso Bcttei^ Giotu. deita Soc,
Atmt. îtitL, voL Vil (ifi^î), p. 99-1 Où.
6. In ctJiil modo di vcdcnf mi £Dn A:rma il duverci vcnire jnche ptrr
ORÎGIHI DEL FRÀNKELEms TAIE 2^9
Taccordo soltanto che dobhîam renderci conto. E altora, a con-
trastare i diritti a le pretese délie redazîonî remote e dissînuli^
si présenta quel la prossima e si mi le del FUûcoh^ che, se non
ha il giirdino essa stessa, se lo trova dattorno, e in maniera taie,
da dar luogo a ravvicinamenti come abbiam visto seducentis-
simi '.
Stremato, a dir poco, quest* ordine d'argomenti, Tipotesi
dclP indipeiidenza ancora non rovina. Studiosi assidui del
Chaiicer giudicanOj o'giudicherebberOj aliéna aifatto dai proce-
dimenti suoi la meiamorfosi délia materia che la dorivazione
boccaccesca condurebbe ad amniettere ^. Ne! Chaucer la parte
GâmbhalâdMta^ consîderato che tra le versionî iodbne ta sua, tion prïmitiva
davvero, scrabra esser ta sola a mener !e cose cosi. E si noti con quali parole
il tesio è rîassuntû dal Bettei : « Il Itiogo delF appuntann^nto era Tangoio sud
del giardîno ove sVraîï visti, * A un appumamenio, o qtialcosa di simile,
allude anche il Chaucer quatido avvîene Tandata, v. 1 1807-8 :
As sbc W4S boan to g£>oti th'Ç wcy forthrigbt
To\\iirJ tbe gardid ther-as ihe hid bight;
ne d^ahronde senza accorde prevt-niivo si capîrebbe, come Dongen possa
pensaj-e dl trovare Aurelius in quel luogo. Ma il fatto si è che 11 riferîmento
non ha riscomrQ, ch' io veda» in cl à che prcc^ede. Bisogna che il pocta abbia
crcduto di aver deito cïà che in rcaîtâ non ave va. E ne resuha ch' eglî aveva
ta mente pîeiu deirîdea del giardîno : cosa per noi non indifférente.
t. V, ancora p. 256-37.
2, Se la nota che si legge alla p. 4^2 muove nello Schofield da una conce-
lione di versa da quella di ctii qui si tratta (V. la nota mia a a p. 2 j 5). egh non
è meno rîsolutamente awerï^ a quest' altra, « Familiar as I am with Chaucers
mcthods, I regard it as impossible that he has în ihîs instance proceeded as
you suppose i», mi dice in una leitera scritta dopo avi:r Icuo le pagme mie
ncl lavoro sulle Tredici Questioni del Filocoh. Col « giudicherebbcro »
întendo di riferirmi segnaïamente al Kochj dd quale é opportuno rîponar
testuat mente le parole p recède nîi a quelle, che a p. 246 ho dato tradotte :
(t Wcnn auch einîge erzdhlungen der Canterbury Taies âhn lichen in halls
MQd, wie ein poar novellen des Boccaccîo, so ist doch durch nichts
nachgewiesen^ dasf er eine dièse r direct bcnutzt hat. Die ûbereinsiimmungen
bcïder autoren sind vielmehr dadurch zu crklàrenT da&s sie denselben qukikn,
fran^sischen fabliaux, gefolg: sind, Wûrde Chaucer dem Decameron sdbsc
entiehnt haben» so hàuc er sîchcr, wie wir a us der sonstigcn bchandlung
seiner originale mit gewissheît folgern kOnnen, dassclbe in den hauptstilgen
gcnau nâchge^mt und dieselben personennamen beibehahen. lï
260 p. RAJHA
inventiva è per solito minore, A me pare nondimeno che il
dedurre d;i questû fatto aiialogico un cnnone assolyto, senza
distin^ione di circostanze e in partkolare di tempi,sîa un far
torto al poeta \ quand'anche non riesca contradittorio, corne
si trova esscre, allorcht^ Tafermazione venga da cali, che vogliano
invece supporlo dotato di tan ta forza créatrice, da aver archi-
tettato da se i Canîerbury Talcs ^, Non perdîamo mai di vista
che il nostro racconto appartiene al tempo délia maggiore
maturità. Ma poi, si dovrà bene riconoscere da tutti che, data
al Fiiocolo rimportanza che gli spettava e scnitati ben addenîro
i rapport] 5 il nuovo è vcnuto a scemare d'assaî 5, Taie continua
ad apparire la partenza di Arviragus per Tlnghilterra t lo staio
in cui rimane la mogUe. E se qui Tispirazione fosse venu ta
dalla Fiammetta^ tutta intenta a rappresentarci un dolore simîle
a quelle di Dorigen, ancorchè non legittimo allô stesso modo ♦,
e sforzi non mcno molteplici per procurarne lo svago, fatti se-
gnatamente, invece che da amici dc%'Oti, dal troppo dabbene
marito > ? Un ahra opéra boccaccesca verrebbe ad aggiungersi
a quelle che sappiamo essere state nelle mani del Chaucer* Si
tratta d'altronde pur sempre delTatrio. Quanto ail' edlficio vero
e proprio, la sola diversiti ragguardevole colle forme boccac*
cesche û riduce realmente alla sparizione degli scogli di
1, Si cfr. il moào dt vcdcre che manifesta \\ Teiî Brink in patecchi luoghi ;
p, es., p, 170, 180, l8î, E forse che gîà al Trmhn tmd Crisfyik, per tan ta
parte mera traduz:îone, îl Chaucer oon aveva dato un' împroma sua, dctcr-
mir»ata beue dal Kissner in quel suo esame coniparativo, che il Ten Brink,
Stmiifu^ p. 72 ^ dkhiara eseguito « in musterhafter wcisc ^ ? Utruitîvo poi îo
sommo grado il fatto che ci prcsentano le emanazioni dclla Taetde : col
Knighks Tnk, chç vicne a sunrogarsl alla prima redixionet confermaia ben
piii ftdelç, corne avevano pensato îl Tyrwhitt, TEbert (Jûhrh., IV, t^%% il
KïssnO' (p. S9X «i^llo studio approfondito del Koch (V. spcdalmente p. 183);
e con qucir Amiida and Antie^ che^ dovunque si coHochî, comunque si
gîudichi, apparis<:c una iratiaziotie Hberîssima délia tnatena e dei personaggi.
2. 11 paiso del Koch che ho riportato dîanzî, précède di poche ri^he îe
parole enfatkhe che ho tradotto a p. 249-50.
%. V* în particolarc p. 235 c ^\%*
4* Qualche nguardo mérita dtresl Griseida nella prima fase ddla scpa-
rarîonc da Troioto (cosi è da dire, aniichè, corne %t suolc^ « Trojlo ») :
FiimhatQ^ p» 6*, sL i sgg*
f, V. neircd. Moutier le p. 91 sgg.
ORIGINÎ DEL FRJNKELEYNS TALE 26 1
fronre al gîardino iiivemale ' : diversit;\ da non richiedcre per
essem inirodotta nessuno sforzo énorme dî fanusia. Già, poiche
gli scogli una novicà sono di sicuro, se Don verranno dal Chau-
cer, bisogncri attribuirli a qualche rimatore minuscolo. E basta
immaginare il Chaucer posto un giorno lui stesso sopra una
scogliera nell* atteggiamcnto di Dorigen, v, 11169 -"^gg-j P^r
aprlre un hen âge vole adito (e quanti altri se ne possono fan-
tasticare î) alla coace2ione^ ; corne basta supporte che sia srata
di fresco tra le mani sue una raccolta dî lats^ perche cutto cio
che sa di /ai, principiando dal Prologo, riceva spiegazione più
che sodisfacente.
Eppure quel Prologo, coU' affermazionedi un* origine che non
è punro la boccaccescaj continuera a far da spauracchio per
molti, Accostiamoci dunque^ e vediamo cosa lo spauracchio sia
in realtà.
Rilevaî altrove' come nel Chaucer s'abbiano allegazioni di
aatori rispondentî alla verîtà. Qui è il luogo di soggiungere corne
âccanto aile indicazioni vcricicre vengano a mettersene non
poche affaito cervellotiche e îraviatrici ^. E talune di queste s'în-
I* IluNU>Pj U, J43, w *„ The drcunistances are predsdy ihe same as in
ihe Decameron, escept that the impossibk thing required by the hdy is^ that
her lovL'f should remove the rocks froni ihe coasi of Britany » ; Kissner,
p* 74, " The Fmnkfiifws Tah siimmi zu Decameron, X^ >» nur d^ss die
Lpkalitât von Itatkn mch dcr Bretagne verltrgt ist und die Bedingung stait
des blûhenden Gartens bei Bcccaccio eine Felsetiverseuung isi. » Non pare
significative quesu concordanzj d'inipncssioni?
1, A ricordi personaU ha pensato anche il Lot, p. 1 it^ n, i ; il quale in
pari tempo suppone altresl, p. iio-n, che ia conce^ionc sia da ncormetiere
con un trasporto merliiiîaûo di enormi macigni dall' Irlandaall' Inghilterra. dt
oii narra pârtiiTolareggiatamente — con attenuazîone tuttavia del meraviglîoso
— Gaffrcdo di Monmouih, VIII, lO-ia, e che è tseguito m servbîo di
^u^W cf Airelius », che deve aver fornito il nome air innamorato del Chau-
cer (V* p. 2t2-n). SilTatisL assodaiione di elcmenti è certo notevole, e non
era sfuggita alio Schofidd, p. 418. Posto il legame dei due portemi, non
sanebbe poi facile deciderct se si venisse dagii scogli ai macîgnî e da quesd ai
tîomî « Aurelius » e quindi « Arviragus i>, oppufe se daî no mi si passasse ai
raacigni e agli sa>gli^
j, R 334.
4* V. segnatamente Hertzb£rg, CanUrbury-Gtsdnchtm^ p. 42 1 44 (n. 67
«71).
262 P. RAJKA
contnino prcdsamente in coniposizioni di cui ïl Chnucer va Jebî-
tore al Boccâccîo^
Nel Monkts Tak b ricavata dal capitolo 98 del libro suo De
Claris nmîieribus la parte concerncnte Zenobia% v. 1^253-580^
e in quel capitofo si conta à\ lei con maggior larghezzn. Sennoa-
chè il Chiucer rimanda chi voglia saperne di più
utt-to my tnaistcr Peïmrk...,
Thaï writ y-nough of this, I undertake.
(C. r., V. T4HÏ-Î30
O dove mai, se %^orremo far nostro pro del riiivio, troveremo
nel Petrarca di che appagare il desiderio?
Cosa fosse destin ato a di venta re Witielida and Arciîe^ noi non
sappiamo'; e Tignoranza impodiscc di giudicar neitamente
anche délia dichiarazione che abbiamo in principio,
First foïow I Stace, and aftcr him Corinne.
I. KissMER, p. 7-9; Hertzberg, p. 44; Ten Brlnk, Sludiin, p. ^-M.
Tra le allegarioni crcdute ksivt? dd diritti boccaceeschî lascb in dispane i!
« Trophée ji dato dal v. 14123 dei Cankrhury Taks; non perché col Ten
Brink 10 lu crcda sen^' altro élimina to dalla lezione « as trophée », quai
trôfeo, che il Hemberg, Cunt.-G., p. 6^6, tjahrh. f. r. u. e. Lit., VWl, 155,
SOSliEubcccongctturdl mente a «t sailh Trophée »; ma perché il Boccaccio non
è U in causa, A \oxXo lu creJuto dal Sandras (V. jdhrh. qcç., i, cit** p, 152)»
se^îto dal Ktsïficr, p. 8, che il Chaucer prunde^se dal Dr atsthus iUusîrium
virorum il tratto che nel Mùtikes Tak riguarda Ercole. Quai fonte fu addîtico
dallostesso Ikruberg il « metmm • col qtJiile nel De comd. PhiL di Boe^io
icrmiïia il quarto libro ; e di coU cmanano infatli i versi 14101-16. Quanto
alb stabilîmento ddle famo^e colonne, a cui si annoda rallcgazioDCi non
proviene piiii da Boedo* ma nt^ppurç, che io veJa (ho riscontrato anche il
De geatalogia D^ûfum), dal Boccaccio. Pcrô il « saith Trophée » c'interessii
solo indirenamente, daio che possa aver spinto il Lydgate a dichîarare, pnelu^
dtando a que* suoi Fa!h 0/ Princes che ^ono appunto traduitone del Or cmibus^
w a boke whlche called is Tr^plie- in Lumbarde tonge »» originale del Troiîus
and Cristytîe : opinione professât-* dal HerubergC/à/fr/»,» p, 1 56), e non punto
Inconciliabile coiridea di W. M. Ross cui {Athnaeum, ifiéS^ a* scm.» p, 401
e 465), che qticl « Trophe ». w trophy 1*, trofco, voglta come traduire
« Fîlostraioi», che, a dctia del Boccaccio, « lanco viene a dire, quanto uomo
vinto c abbattuto da amore ».
i. Il Boccaccio traita di Zenobla anch^ nel De casibui, h VIII^ c* 6.
î- V, p. 247^
ORIGINI DEL FRANKELEYNS TALE 263
Poniam pure che alla fantastica Corinna s'intendesse di asse-
gnare un dominio, sul quale il Boccnccio non avesse giuris-
dizione alcuna. Di supporte il medesimo per Stazio, non ci è
consentito dal Knightes Tale^ che, se Dio vuolc, si lascia para-
gonare in modo ben positivo colla Teseide. Ed ivi, allorchè,
prima del solenne combattimento finale che deve decidere fra i
due rivali Arcita e Palemone, Emilia sagrifica a Diana, il Chau-
cer, che vien seguendo da vicino Tesemplare ' accorciandolo,
dà a siffatto procedimento, usuale per questa redazione % anche
un' espressione aperta col dire :
And dide hir thinges, as men may biholde
In Stace of Thebes, and thise bokes olde.
(C. r., V. 2295-96.)
Ma no : non a Stazio ricorreremo ne ad altri antichi, se
vorremo sapere i particolari che qui si tacciono; bensi aile
stanze 73-76 del libro VII délia Teseide.
L'essere spogliato a benefizio di Stazio è cosa che il Boccac-
cio vorrà portare in pace, conscio com' egli è che dal poema di
Stazio ripete effettivamente parecchio la Teseide K Gli cocerà
più assai un altro caso, ben più curioso di certo, che da un
pezzo costituisce per gli studiosi del Chaucer un enimma tor-
mentatissimo.
Là dove nel libro I del Filostrato Troiolo ^ si riduce dal tem-
pio dove i suoi occhi si son fissati su Griseida, nella solitudine
délia propria caméra avendo la donna nel cuore, pi ace al Boc-
caccio di fare ch'egli dia sfogo ail' animo suo anche col canto :
E quindi lieto si diede a cantare.
(St. 38.)
Cosa egli canti, il Boccaccio non dice ; bensi nel Troilns and
Criseyde il Chaucer gli mette in bocca tre strofe, non liete di
certo, che afferma di tradurre fedelmente dal suo autore, desi-
gnandolo col nome di« Lollius » :
1. Si vedano nello studio del Koch, Englische Stiidien, t. I, le p. 265-66.
2. KiSSNER, p. 59-62.
3. Si veda in particolar madoil Crcscini, Contribuio agli sludi sul Boccaccio,
Torino, 1887, p. 224 sgg.
4. V. p. 260, n. 4.
2^4 P- RAJNA
And of his song noughi oui y the semence.
As writh myn autour called LoUius,
Bue pïevnly» savc our congés différence,
I dar wcl ^^yn, ....................
E le tre strofe sono realmente tradujcione; traduzione, corne
si Si! Ja gran tempo, del sonecto tlel Petrarca,
S*amor non c, che dunque è t^uel ch'io sento?
Non per questo s'immaginj che con u LoUius n venga qui
dunque ad essere desîgnato il cantore di Madonna Laura;
a myn autour » non puo, quanto alT intenzione, riferîrsi che
alla fonte deî poema in générale, Ciô è cliiaro dî per se * ; e
rîceve poi conferma solenne dalla st. 237 del L V :
The whiche cote, as tdleth LoUius,
Deiphebc it hadde y-rem froni Diomede
The strae day,
pone il Chaucer; che è un far eco al Boccaccio, VIIl, 8. Ne
pago di queste allegazioni, egli éleva al suo « Lollius w,conic
g\h accadde di ricordare *, anche una statua nel Hous of Fatne,
dandola compagna a quella di Omero e degli altri che
Was besy for to bere up Troye*
{V. 1472 )
Dopo vaiie ricerche e fantasticaggini, tutti oramal s'accordano
nel rîienere che il « Lollius » provenga dal
Troiani belJi scnptorem« Maxime LoQi,
1, Corne sarebbe mai concepibile che il Chaucer volcsse a quel modo
chiamare *î myn autour n uno scrittorc éi cni avesse trasportato egli stesso
nel pocma una liriea, che non aveva nulîa che vtîdere con es*o ? Pcrô sî è
pcriomeno esprcsso poœ fclicemente il Kissncr, colle parole, p, 8, n, t»
«... wenn er ntin dodi ats seincn Autor Lollius n en m und damit hier £ur
Abwei^h^liing Petrarca begreift... » Plù logica l>cn'vi la congcttum dcl
Kbsncr stcsso» che rintru^lone patcsse forse essere avveriuta di g\à neïF cfero*
plare dd Fihitrai& che il Cbaucer si tnovava davami. Più logica; ma smenlita,
conic del nesto m'aspettavo^ dal comune consenso di tutti i manoscritti — una
trentina I — da me riscontfati nelle biblioteche di Fireme-
2, P- 11}.
Otrcmi DEL FRANK ELEYNS TAÎM Séj
che «dîamo dalla bocca dî Orazio al prîncipîo délia seconda
Epîstola del libro I '. Fosse poi quel verso letto in forma cor-
rotta* o intcrpreutto sbadatamente n sproposito dal poetâ o da
predecessori suoi, o servisse sempHcemente — che non sarà k
supposizione meno probabile — a suggerire un nome alla fan-
tasia, poco importa, Sia corne si vuole, è ben certo che i!
Chaucer non si trovo fra le maoi l'opéra di nessun a LolHus w.
Al Koch, venuto tra Talcre cose a immaginare che forse in capo
air esemplare suo del Filosiraio si leggesse « Hic incîpir
Lollius » ï, temo assai che non sarà mai accaduto ne accadrà di
irovare anche solo un Êiutore.
Lo scopo délie allegazioni dalT aspetto solennej cosi di quelle
che riguardaoo il Boccaccio corne délie numerose conripagne,
meglio che da ahri è stato messo in luce dal Kissner*. Si vuol
prendere un' aria dotta e accreditare le cosu che si dîcono. In
forma deteraiinata si mira cola dove itideterminatamente si
tende anche colle tante allegazioni degli « olde bokes », che a
noi stessi è accaduto di veder dati per rincalzo a Stazio î. Il
TuQïino dei poemi romanzeschi puo adempire Tuftizio d' illu-
strazione efficace. Abbiam dunque in générale un capriccio inno-
f » Uidea fu prima, a quanto pare, faita pubblîca da H. G. Lathâm, AUjenaturHf
i8é8, 2à&çm., p. 45 î , indotto a parîare da una congetltira infellce strombûwtata
uoa 5€Uirnana prima dil gîornalc insieme con quella sul o Trophejï; CûDget-
tura che graverebbe la coscienza di W, M. Rossetti, se candidamenie egli non
SI ibsse ftffrqiiato a far pubblica conftrisîone del suo errori; (p. 46s}. H subito
cgli dichiarà anche la sua conversione alla fede del Latham. Il tjuale, con
modcstia non fréquente, Tavcva mcssa innaml corne cosa probabilmente non
propHji di lui solo : « My own view, and ihat I believe of others,.. i> Infatti
giâ pensa va cosi, com' ebbe a dire pîù tardï (Siudmif p. 87), Il Ten Brink*
E i'idçâ è tantû naturale^ che a me pure s*affaccià avantî di vedere che fosse
CQSâ vecchia.
a. Il Ten Brink, op. ai., p. 87-88^ projjone Tipotesi che il codice usato dal
Qiaucer portasse tf scriptorum w invece di « scripiorem >i, e cosi nel verso
scguente « le legi » in camblo di « relegi jj.
î. Prima che nell' Jnglia, III, 190, ci6 dovrcbl>* esser stato detto nella
vcrsîone inglese (V» qui addieiro, p. 145, n. a) del favoro che 10 conosco
dâgli BîfglmheSiuiikn,
4. P. 9^
266 P* RAJÎJA
cente. Ma pruprio innocente possiam noi dichiararlo anche net
caso del Boccnccio ?
Taie îu lo direi di biion grado, se vi fosse qiiakhe luogo în
coi del Bûccaccio si parlasse con termiiii paragonabdl a qiielli
che si usano per Dante e per il Petrarci : l'intéresse del Chau-
cer a far discendere da fonti alte c fécondité le sue narraseioni
verrebbe allora ad essere couciliato coi doven délia graiitadine.
Ma un luogo siffatto non esiste. Mai e poi mai il nome di colui
verso il qi^ale s'hanno gli obblighi di gran lunga niaggîori esce
dalla bocca, La cosa lia suscitato meraviglia da un pezzo *. E si
badi. Il Boccaccio non è defraudato unicamenre a beneficio di
personaggi che appartencssero o senibrassero appartenere al-
iantichità : abbiam visro il Petrarca messo al posio suo per ta
Zenobia^; e conforme alla giustizia non sarà nemmeno cne al
Petrarca sol tan to rimanga tutto il merito délia Griselda. Che
verso Messer Francesco il Cliaucer potesse senti rsi attraito da
senti menti particolari, di cui vien naturaîe il chieder conto alla
presunta visita, che ne riesce efficacemenre suffragata e che lo
vorrei mettere in rapporte con un' andata a Veneziaj non è certp
un buon motivo per far torto ad un altro. per toglier^ii "îaUe
difficolL\ il Koch non vedescampo se non in un' ipotesi, ch' egli
stesso riconosce do ver a prima giunta parer strana L II Chaucor
avrebbc ignorato, di chi fossero le opère boccaccesche da lui
messe a profitto, in quanto fossero anonime ncl manoscritto o
iiel manoscritti che gli stavano fra le manî. In cotai modo di
pensa re il Koch dovrebbe sentît si con fort a to non poco dalla
notiîîia che il FHosîrato è anonimo rcalmentc in nientemeno che
sedici dei ventiiiette codici, che io conosco a Firenze ♦• Can
tutto ciô îo giudico l'ipotcM inammissibile» Essaè inconciliabile
1, Tbn Bjumk, Stttdif»^ p. 85 i « Es ist schon vi^kn au Hall end gewesen,
da&x Chducer^ wâhrend er Dante utid Pctran^â mit verchrung ncnm, mcht
ciii ciniigcs mal dc5 Bocciccio gcdenki und in dcn dîcscin Ici/icrn nachge-
âhmten dkhitungca Hch auf jf^tui andcrc nameti à\s idnc qudlcïischrifciidkr
berufi •.
a. P,26i-
|, EngL Stud.t 1, 391*
4* Il moiivo di codcsta condî^iQne dî cost è da ct?rc*trc iï*;i Ikitû cïw U
Bo<cacdo dovettc taccrt il propria nome, allorchèp giavane cÛ ignolo, pubbUcû
prîmamentc il poema.
ORIGINI DEL FRAXKELEYS5 TALE 267
colla conoscenza che il Chaucer manifesta, non già semplice-
mente di questa o quella scrittura, ma di tanta pTte délia pro-
duzione letteraria di Messer Giovanni; e ne confermaiio Tin-
sostenibilità la dimora prolungata del 1372-73 in Italia e la
venuta in Firenze stessa ^
In qualche accidente che allora seguisse sarebbe mai da cer-
car la causa del singolare contegnoPO starà essa invece nella
moltiplicità dei debiti ? Il problema è increscioso, non comporta
una soluzione positiva * e perô io lo metto volentieri in dis-
parte'. Ma nessuno potrà contestare che il Boccaccio è leso nei
suoi diritti coi silenzi, è leso colle parole. E cosi penso non sia
troppo contestabile la conseguenza che viene a resultarne per
la questione intorno alla quale mi sono tanto affaticato. Che il
Chaucer dia come derivata da tutt' altra fonte che il Boccaccio
la novella narrata dal Frankeleyn, non è punto un motivo che
dissuada dal credere che Tabbia potuta prender da lui. Strano
sarebbe invece che, dovendola al Boccaccio, il Chaucer lo
dicesse.
Pio Rajna.
1. « Chaucer mag nun wohl den berûhmten Boccaccio in Italien haben
preisen hôren », dice anche il Koch, dandosi un poco la zappa sui piedi.
2. « Die ursache dièses verfahrens zu entschleiern, sche ich keinen weg »,
dichiara il Ten Brink, di seguito aile parole che ho riportato poco fa.
3. Non tralascerô tuttavia di riferire le parole espliciie del Segrè ncll* arti-
colo del Fanfulla délia Domenica (V, p. 245, n. i), conosciuto da me solianto
mentre correggevo le bozze : « Ma... come si spiega (jucl Lollius, che
interviene a rubare i diritti di autore del Certaldese non solo, ma anche
una volta di Messer FrancescoPLa matassa è délie più imbrogliate, ne si puô,
a mio credere, sbrogliare senza colpire un poco l'Inglese, e accusarlo di
mala fede. Mi pare questo oblio frutto più di artificio che di ignoranza : egli
non hacitato mai il Boccaccio, o nlia cangiata la targhetta alla mercanzia,
perché ha voluto traviare il lettore : ed è questa forse una prova délia co-
scienza, ch' egli aveva, di aver mietuto con soverchia larghezza ncl fertile e
giocondo campo del poeta del Demmerone. »
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL
d'après le MS. R. 14,30 DE TRINITY COLLEGE (cAMBRÎDGe)
Petit livre en parchemin (hauteur 14 cent., largeur 10) com-
prenant 136 feuillets écrits à longues lignes par diverses mains.
Les huit derniers feuillets ont été écrits en Angleterre au
XIV* siècle ; tout le reste a été copié à la fin du xni'^ siècle et
(ceki est certain du moins pour les 66 premiers feuillets), dans
le midi de la France. Le volume a perdu iri feuillets au com-
mencement; en outre, plusieurs des feuillets qui subsistent ont
été grattés de telle sorte qu'on peut h peine çà et là reconnaître
quelques lettres. Au xvi* siècle il était complet. A cette époque
en effet, appartient une foHotation qui commence actuellement
au foL 113 et s'étend (avec quelques irrégularités vers ia fin)
jusqu'au foL 242, C'est d'après cette ancienne foliotation que
je ferai mes citations^ sans tenir compte de la pagination ^
moderne (au crayon) qui n'est marquée que de loin en loin.
Le foL ir3, qui est actuellement le premier, a été gratté des
deux côtés, comme aussi les suivants, jusqu'au foL 118 f.
Mais, à la fin l'opérateur s'est lassé : le verso du foL 117 et le
recto du suivant sont imparfaitement grattés, et rien ne serait
plus aisé que de faire reparaître récriture si la chose en valait
la peine ' . On se proposait vraisemblablemenï de faire place
nette pour écrire autre chose : ce qui est certain c'est que récri-
ture supprimée contenait le commencement du recueil de
recettes médicales qu'on ne peut plus lire qu'à partir du
l. Grïtc opération ne devrait être autorisée qu'i là condition de faire immé-
diatymeiît une transcription des pjges ravivées^ cat le seul THcûf qui puisse
être employé sans inconvénient (le sulfliydriie d'ammoniaque) ne doûne
pas de risuJtAîS permanents.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 269
loi. r 18 verso. Ce recueil commençait au fol, i ij ; oa lit encore
au haut de ta première page les mots,,.,, adsit mbis gracia qui
annoncent le début d'un ouvrage.
Le manuscrit devait être en Angleterre au commencement
du xv^ siècle, car on a ajouté à cette époque, dans la mnrge
inférieure du foL 210 verso, à la fin du traité de Trotula, une
recette ad pilos dekndos, dont récritore est incontestablement
anglaise. Les huit derniers feuillets, que j'attribue au xïv^ siècle,
sont ajoutés.
Celui qui a gratté les premfers feuillets a, de place en pîace,
exercé ses ravages en d'autres endroits ; ainsi aux ff. 126 v^,
147 V**, 149 r°, 160 V*», Il est à noter qu1l n a rien attenté
contre les parties latines du manuscrit. Sûrement il ne s*inté-
ressait point aux textes provençaux et ne pensait pas que per-
sonne pût s'y intéresser-
Le manuscrit de Trinîty est un recueil d*ôpuscules médicaux
dont voici Ténumération sommaire :
I (fol, iTî-f43 r^J. Un recueil de recettes en provençal, dont
les premiers feuillets, comme on Ta vu plus haut» sont mainte-
nant illisibles. Rubriques en vermillon,
n (fol. 143 v^ -t6o). Un autre recueil de recettes proven-
çaleSj entre lesquelles plusieurs charmes. Ce recueil a été écrrt
vers le même temps que le précédent, mais par une autre main.
Les rubriques sont de la même encre que le texte. Sur le foL
i6î recto ont été écrites de deux mains différentes, trois
recettes. Le verso est blanc, de môme que le foL 162.
m (fol. 163*186). Le Pomum ambre (btin). C'est une com-
pilation de remèdes dont on possède di%"ers manuscrits et qui a
été traduite en français et en anglais. Les remèdes sont classés
selon la forme sous hiquelle ils se présentent : poudres, élec-
luaires» pilules, sirops, emplâtres, onguents'. Le titre de
Pomum ambre vient des premiers mots du traité : « Pomum
ambre dupplicaium ad rcuma suspendendum, et contra cerebri
debilitatem... »
IV (fol. 187-210). Trotula^ De ornaîu muîierunu Premiers
mots : ^Cum auctor universitaiis Deus, m prima mundi origine,
1. J'ai é%i quelques mots de cet opuscule dans YHxsî, lin.di. h Fr*f XXXII»
595'
270 ^^^^ p. MEYEU
rerum naturas sîngulas juxta genus suum dbtingueret... a Ce
triiicd, t^ui appartient à i*Ccole de Salerne, mais dont h date est
encore incertaine et dont l auteur reste assez mystérieux, a été
très fréquemment copié au moyen âge, sous des titres variables.
Ainsi, dans le ms* B* N* lat. 7056 (fin du xiii'' siècle), il a pour
rubrique iniiiale ; Incipil summa (jue didîur Trottda, Il a été
publié trois lois au moins, en 1544*, 1547% et 15^6 », Mais ces
trois éditions reproduisent le menu- texte, qui, je l'ai dit dans
un précédent mémoire^ est très rem^inié, au moins dans la
forme* Nous avons vu qu*il avait été traduit, ou du moins tar-
gemeni mis à profit en deux poèmes français î. Je montrerai
eu une autre occasion qn*il a été traduit en prose française. Lej
titre A* ormitu mulkrum s'applique mal au traité tel qu'il sel
présente dan: notre manuscrit : il n y est en effet question que
des maladies ou infirmités des femmes et des soins à donner
aux jeunes enfants, et il ne saurait y avoir de doute sur l'en-
droit où il se termine, puisqu*on lit au foL 2to verso cet
ex pi ici t en forme d'hexamètre : Finih Ubro reddatur graîiai
Chrhto. é4men. Mais les manuscrits du traité de Trolula pré*^
sentent des variantes considérables, surtout vers la fin. Le ms,
B. N. lat. 7056 contient (fol. 84 b) un Dcntijrkium ad denîes*
nign^s dealbandos^ et (fol. 84 r) un ungmnîum ad Jiickm
atbandiim^ qui justifieraient en une certaine mesure le titre
I. EtptrhnrnimitiS meàkinT^ cùniinetn Iroiuîx lUramiarum iFtjriluJinum
muhehrium^ ûnU^ m et ptnt parfum^ hî\ntm\ umcum nusqunm autta tdilum.
Argoit[ûraiil; 1 544 ; in-fol.
1. Mciiui anîiqfti omnti qnl luthis Htiris âtwnvrum ntQrhynttn ^tnera cig
rtmahû peneiuti suttt, uttditiur am^mifti H mw vùlumim comprrljtmi^ ut rarumM
qui it mrdkhtst Utnih titdidauttt œmmoth cotnuhtittr, V\*nctiis (Aldu^j i >47*
in-faL — Le xtâM iîUitul^ Trotul^ iuratutarum xgritudimim .... Hkr unicm
occupe les ff. 71-80.
^. Gynstcwmm^ f}oc est àt mulknim tum aHîs tum gravidantm pariattium tt
putrptrdmm affatibm et morHi Ithri tf terutu ac ncmtlorum altqitoi, pattim nnm
pnmum tdiSi\ partim multo qtmm ûHtta casti^atiorfs.^.'^AÛhx^ pcr Thomam
Gmnrramt MDLXVI; iiï-4". — Trotulj se irauvc dans ce recueil (col. 315)
sous ce lïlru : Brùth mfdia\ tibfrtijtàijt^ ficm aliqui Trùtukm inepte
nuHt^ muhfhriHm liber tmge quam anttîiai emendahor^
5. Li-J«r^us, pp. HS, JOi.
RECETTES M£DIC\LES EN PROVENÇAL l'^l
adopté par le manuscrit de Trinitw De plus. J^ h suite Ju
traiié sur les maladies des femmes, le ms. 70^0 en contient un
autre attribué Clément à Trotula, qui a spécialement pour
objet les soins de la beauté; il est intitulé Alius îrthMus ijui
dkitur minor Trotula \ et les chapitres dont il se compose ont
pour rubriques : Je ornatu fdcin\ — Je ornatit /<iWi»riiw, — i/«j-
litfr dentés dealbantnr et munJiticantur, - aJ fetorem oris^ —
amtra fttorem mulierum,
V (fol, 211-220). Voici un nouveau traité sur les maladies
des femmes. Il est attribué à un certain Ascarit^s (ou Ascarus)
philosophiis que je ne connais pas. Dans le ms. B. N. lat. 7056
il se présente avec une tout autre attribution et un commence-
ment différent. Mais d'abord citons les premières lignes du ms.
de Trinity :
ÏHcipit epistold quedam brn'is Ascari phihsophi ', Ascaritanus philosi^phus
scripsit hanc epistolam decerpiam et defloraiam a libris phisicalibus vinutc
filie sue Margarite de signis egritudinum mulicrum, et cure quas in grcniio
nature pacientes rubore confuse verentur medicis elicere. Hic uutcni Asciri
(sic) Qeopatre regine hiit phisicus denunciaius. Hune auiem libclluni irans
tulit Enricus Constantinopolim, familiarius Manuel imperatoris, et scripsit
legine Anglie.
Do sigm's btitnorose rniUricis, Signa humorose maiiicis oculorun) dolor,
caput subcalidum
Je ne connais pas ce Henri qui aurait été familier de Tempe-
reur Manuel Comnùne, et dont, par conséquent, Tactivité
devrait se placer vers le milieu et dans la seconde moitié du
xii« siècle. La reine d'Angleterre pour laquelle il aurait écrit
serait très probablement Aliénor de (iuyenne, femme de
Henri II. Ce qui complique la question c'est que le munie
traité nous présente, comme je Tai dit, un tout autre début
dans le ms. 7056 '.
1. Premiers mots (fol. 84 r) : « Ut ait Ypocras in libro ijucin de pronosii-
corum sciencia composuit, omnis qui de medicine artis studio scu fjloriam
seu delectabilem amicorum copiam consequi desiderat... »•
2. Cette rubrique est écrite deux fois : une fois en vermillon et une fois en
tncre noire.
}. Voici ce début (fol. 86 c) : « Incipit i^rnecea Cleopahe ad Paklatiini. Dvsi
deranti tibi, filia karissima, et liabcrc volcnii comincntariuin turaiionis mulie-
rum, laboravi, et eligensduosprcclarissimos libros, Thcodoten et Meuticum,
272 P. MEYER
Le traité d'Ascarus paraît se terminer, dans le ms. de Trinity,
au fol. 214. A cet endroit en effet se trouve cette rubrique :
Incipit Trotula, Le traité qui suit, et qui est tout différent de
celui qui occupe les feuillets 187 à 210, commence ainsi : « De
pas^ionibus mulierum utile previdi vobis scribere, superve-
nientibus plurimis et diversis passionibus sepius de matrice, ex
quibus aliquando quedam insanabiles sunt De moiione matricis.
Quando matrix mota fuerit, dolor et sinthomata valida adhè-
rent et sicius non occuratur, vulnera erunt in illis locis... » Ce
début se retrouve dans le ms. 7056, même plus correct', mais
il fait partie du traité attribué à Cleopatra. A la fin de la copie
du ms. de Trinity. (fol. 220) on lit Exptisit Trotula. Celui qui,
un jour, voudra nous donner une édition critique de Trotula,
aura une belle occasion de faire preuve de patience et de cri-
tique.
VI (fol. 221-228). Traciatus de secretis mulierum cum aliis.
Premiers mots : « Reumatizat flegma ad nares frequentius et
facit corrizam quam sic curabis. Accipe olibanum et in vino
coque et ablue inde nares et fumum ejusdem fac recipere »
Tout ne concerne pas les femmes dans ce traité, qui, au fond,
n'est qu'une collection mal ordonnée de recettes entremêlées
de charmes; ainsi (fol. 222 verso) : Ut pili nascantur in quo-
cumque loco...; (fol. 223) Unguentum probatum ad artheticam,
podagram,..; (fol. 225) Experimentum probatum contra epilen-
tiam...; (fol. 226 v°) Ad volatilia capienda. A propos de la
fièvre l'auteur fait mention d'un « rex Willelmus » que je ne
saurais identifier ^
magno ac diligenti studio in latinum ex greco transtuli, quia bona sunt in
memoria durare. Memineris autem me tibi sepius preccpisse et jusjurandum
a te exegisse ut nulli tam gloriosam rem facile credideris. Nunc ergo, si eam
perdideris, tue culpe queraris. Cupiditas enim hominum non habet certam
fidem. Paciar enim Atheodata dici medica, reginarum (corr. regine ?) Cleo-
patre soror Arseones Arsetioes (5ïV), que remédia medicinalia quibus sepe usa
sum, et ubi experta, conscripsi, et in populo tradidi. Et ut posteritas mea bene-
ficio hujus artis aput feminas duret, ante miseria {sic) de \âciis que mulicribus
accidere soient indicandum esse credidi.
Signa humorose matricis. Oculorum dolor, caput subcalidum... »
Ce texte est certainement corrompu en plusieurs endroits.
1. Au lieu de sicius^ il y a si cito qui est évidemment la bonne leçon.
2. (Fol. 227) « Quidam quartanarius a nuUo medico liberari potuii, cui
RECETTES MÈDICKLES EX PROVENÇAL 27 J
\TI (fol. 229-234). Ces SIX feuillets forment un petit cahier
indépendant du reste du manuscrit, et qui, par l'écriture est
certainement antérieur de plus d'un demi-siècle. Ils contiennent
un recueil de recettes médicales dont le texte est souvent cor-
rompu. La fin manque. Premières et dernières lignes :
Okrinn în quo cocta est primaveris facit cutem extensam et sine rugis.
S0C11S seniper nive mixtus cum oleo roseo dolorem capitis qui est ex niniio
soictollit
Ad phistuiosos microcosmi da os hisdoti (?)creniati et lig.^ sub sexus dis-
CTcdone cognoscatur divisio, et mosculus niasculu et t'emina t'emiue '.
Vin (ff. 235-242'). Ceb feuillets écrits au xiv* siècle et en
Angleterre, contiennent des recettes les unes en latin, les
autres (ff. 237-240) en français. Voici !a première des recettes
firançaises :
Pur emfturw' de jambes z de braz, pertiet la ruge carsuns« si Imincet menu
r metet en un pot z des espèces liesoseoc(?) z bren de furmeni z le siu de
mutun ; si lesset quire ensemble, que il seii ben espès ; si pemci un drap
que paisse coverir le emflure ; si liet entur ra[m]plastre, si cuset entur le
emflure, si lesset estre tute la nut ; si garra. Probatum est.
Parmi ces recettes il y a des charmes. En voici deux :
(Fol. 2)j vo) Al hum malade, que; vus ne savet si il murr.» u nun, pernet
le of que est puni devant prime en col jur que il est en la maladie, e escri-
\'çt sur le of od enke ces lettris + ^ Go.s.p.p.x.p.x.g.y.x.s.q.r. Pus metet
le of tors en sauf dcsuz la severunde de la meisun, e pus lendemain depe^^cet
le of. Si sanc s*en ist, si murra, z si il n'ist nule .*>igne de sanc si garira. —
Si tu veus saver si li malades vivera u nun, al \'isiter di trei fes : .//// c*<) exopxiu
toi arche -}-. Si il garrar, si se turnerai vers tei ; si nun si se turnerat suii dos
vers tei.
On possède un grand nombre de ces charmes composés de
lettres donty en ^énéralle sens nous échappe'. Il s'en trouve
quedam vetula succum tapsi barbarici tribus dicbus antc acccssioncin dcdit, et
statim liberatus est. Quam rcx Willclmus jussit vocari, et confessa est quo-
modo fecit. »
1. Il est évident que cette recette a été mal transcrite.
2. Le feuillet 235 est placé entre les ff. 241 et 242.
3. Voir par ex. Leecfxhms y woitcunttini^^ ami stanraH oj ciirly HugUiml...
Ramami», XXXII l8
274 P- MEYER
plusieurs dans la partie provençale du manuscrit, comme on
le verra plus loin.
Présentement je vais faire connaître par des extraits les articles
I et n, qui sont l'objet principal de cette notice. Il me serait
impossible d'en donner dans la Romania le texte entier, et d'ail-
leurs une édition complète exigerait des recherches auxquelles
je suis mal préparé. Toutefois, les morceaux que je publie suf-
fisent à montrer que ce texte présente un intérêt considérable,
sinon pour le fond, du moins au point de vue lexicographique.
Les autres recueils de recettes provençales que je connais sont
beaucoup moins importants à tous égards.
I. Recettes médicales en provençal.
Ces recettes sont en grande majorité tirées de V Aniidoiaritw
Nicolai et du Liber de simplici medicina^ autrement dit (d'aprèî
les premiers mots) Circa instans^ de Platearius. Ces deu>
ouvrages ont été souvent imprimés à la fin du xv* siècle et ai
xvr ; V Aniidoiarium, notamment, édité pour la première fois er
147 1 à Venise, chez Nicolas Jenson, a été souvent réimprima
a la suite des œuvres de Mesué. Mais cts éditions ne peuvem
être utilisées pour la recherche des sources de nos recueils er
langues vulgaires de recettes médicales. Le texte en effet en es'
très remanié, sinon pour le fond du moins pour la langue
comme l'a été celui de Trotula. j'ai oonc dû faire usage, poHi
l'annotation des recettes provençales que je publierai ci-après,
d'un manuscrit. J'ai eu recours à cet effet au ms. lat. 7036 de
la Bibliothèque nationale, où V Antidotarium occupe les feuillets
123 à 147 ^
On observera que nulle part l'original latin n'est traduit
exactement. En général les formules sont abrégées. J*aime à
croire que les recettes ne perdaient rien en eflScacité. Car, dans
les recettes compilées par Nicolas, il y a beaucoup de substances
collectcd and cdited by the Rev. O. Cockaync (Collection du Maître de*
rôles), III, 40.
I . Je ne mentionne pas les feuillets du ms. dans mes citations : les article:
de l'Antidotaire sont rangés dans l'ordre alphabétique des noms de niédica
nients : ils sont donc faciles X trouver.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 275
inerttis ou du moins peu actives que Ton pouvait écarter sans
incon-vénieni. Le point est de savoir si les retranchements ont
été opérés avec intelligence. Remarquons aussi que le traduc-
teur provençal substitue aux poids (onces, dragmes, etc.) spé-
cifiés dans les textes latins, des équivalents plus ou moins
approximatifs, évaluant les poids en deniers et mailles.
Le manuscrit de Trinity n'est lisible, comme on Ta dit plus
haiat, qu'à partir du fol. ii8 v*>, et encore cette page est-elle
plus ou moins endommagée, comme si on avait commencé à la
grAtr^r. On y lit les rubriques suivantes : De unguento scabiei,
— ZI>^ tnacula oculorum, — Contra ficum, — De lentiginibus
facîn . — De ung[u]ento. je transcris deux de ces recettes :
C€>9ttraficum. Ad home qucs aura fie, pren lo suc de la plantage c de la pol-
vera d^ls carbos de la figieira, e per .viiij. jorns e tu n'i met, e guerra.
De- i^ntiginibus faciei. Ad home o a femena ques aura lentigines en la
*^^ra, pren lo sanc de la lebre e molla l'en la cara.
Ln. recette qui vient ensuite, et qui n'est plus entièrement
lisible ^ est sûrement celle de Vunguentum album de Nicolas, mais
cependant il y a quelques différences :
-D^ ^^9i^u]etUo. Enguen blanc per ostar salsa fleunia, se es pura rasca e gra-
tige. FH-cn delbon » blanc iiij. d. peszans e d'ences .viiij. d. peszans. Aquestas
cauzas *leus pizar cascuna em per se, pueis deus penre la polvera del blanc et
^^ -) - pauc d'oli e tu la destempra, e met o en .j. mortier de coire ab la polvera
**cl lîtiu-gion e del mastic e de Tesces, e pisa o fort iro que sia blanc. Can sera
"'^^ nnout e ben espes (fol. 1 19) com el, e tu i met .j. pauc d'oli et autre pauc
^ î^ga rosa, e fai o boillir tan que non sia trop clar ni trop espes, e pueis,
^^^ te voiras onhe tora la rasca de graiige o tota ronhna, e guerra.
M3.ÎS les articles qui suivent ne viennent pas de l'Antidotaire
^^ ] en ignore la source : •
^ 9M4itiotte pilorum. Cant tu voiras far naisser pels en alcun luec, pren la
lefvida. de la rata e destempra la ab mel, e aqui on tu onhneras naisscran pel.
^* Corr. pion} Antidot. : « Unguentum ad salsum fleunia lib. j. R. ceruse
5 Vf* signe désigne Votice) ij, litargiri 3 j» olibani, 3 (dragme) iij, mastici J ij,
ut^ueque species per se teratur, pulvis ceruse cuni pauco oleo distempe-
relur; postea addatur litargirum, deinde masiix et olibanuni, cum pistello
5Ȕwpcr agitando paulatim; ponatur acetum, et cum incipit inspissari, addatur
okum et aqua rosata, et tamdiu ducatur donec liât nec niultuni spissum nec
fnultum liquidum. »
[
276 P- MEVER
De eodtm, O prcn de las abc lias c crema las e fai ne pûlvcTii c mescla las ab
lo md. et on h ne 4qucl lucc on voiras Uit naisscr los pt-b,
Df agiiiiocw. D'aganos faj poison d'aiul guis;î;i : Prcn de cerieiras agras
e gcta ne los clos ", c fai las boillir en alga et en laig de cabri pur bollir ad
avcm(?) part'; fai copier Jij. tailbs de rafc, e casiTuna cauita lu cola cm per
se ; pùcis nu*scia o tôt essems e liona ïo a beure e fai li emplaust de la sa de »
bcn pasiada ab b vinagrc blanc, pucis esc al fa on* e faissa l'en lo ventre*
f:mphust[r\jiift ad mtîdmmm A febre coud la na, cant ho m es fors Tcnis,
pren del suc del glaujhol c del i^uc de la menta, e loi aquesi suc fai boillir
e!.Séms : pueïs pren de las roszas e de las violas, c cos las ad una part ub de
vinagre blanc, e de tozs aqucits suscs (sk) e d*aquesias rosjias c d^aquestas
violas fai empîaust ab farina d ordi, e paujîa Tal cor,
je ne retrotive sûrement l^Antidutaire qu'au foL 126:
Littotipim ï* Aquesi Içctûaris dona ad home qucsx es tôt jorn irâïs e pcr
nialencolia* Mot es prophctios^ c boîi per gran frevoletat et ^d home ques a
soven mal el ventre. Ad home que ren la memoria e sens )i aggusita 7; bos
es per frênes i e per litar^a •* e per apoplexia t: per tôt as malautias de la testa e
per mou tas autras; si es ris, usze ne de matin ede vespre.
Contra frfnts\im itctOiirium. Mîos atropos ", aqucst lectoari doua ad una
malautia ques a non frênes i et als sariguinosKOs, e per la peira franncr el
h;!3clc ♦^ o S) %'ols poîts ïo agui'.ar de À\\. obolos pes/ans d'esscamonea *\ e
pueis lo i dona ab lo vin caut de matin.
i , Ms» ckyy avec une 1 aw-dessus de Ty, qui toutefois n*est pas cxponctué.
« Ch% noyau, en Langiîcdoc ** (Mistral). De même Sauvages.
2. Corrompu î coït, ad ttm (où ad nuit a) /m#7? mais cette correction ne
suffit pas,
î* Faut-il corriger tasa ft'ttda 7
4. Tour a. Cf. p, 191, n. 7.
}. Double erreur ; d'ahtird il faudrait hVfotripim; ensuite ce nom est celui
d*un remède qui prend place plus loin. La rubrique du 5 correspondam de
Nicolas est Electmirium pîtrh ar&yhatm (Dorveauît, S 31).
6. Sk, corr. pro/fclm.
7, « HMemdriam réparât» vcnsum actiit. » Supprimer ^m^- avant rtn,
5. [] n'y a rien de lel dans le texte latin.
9, Ure Filantrôpù%. Ce 5 manque d^ns la traduction.
10. Tout cela est asse?. éloigné du lextc* Void le latin : « Propric vaJrt
nefa-ticis, strangurio^i^ de frif^ida causa, calculosis in renibus et vesica» mir;ï-
biJiter ïapidem friingît et fractum potenter educit : façit eiiam ad duricici«
splcnis et epatis », — Bisdt, rate (Mi^stral). Ka\Tiouard (II, 144) a un en. de
ht if ht, au plur., qttll rend par « fressures •».
t ï , Cette pres<rription n*est pas celle de TAntidotairt.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 277
Contra singtdtum. Gariofilatum ' ad home quesz a sanglot, qucn meta en la
boca, e guerra.
Contra malam eruclnationem. Ad home que rotara per malvaizas humors
dona Ten lo vespre e guerra.
Omettant quelques recettes, je reprends un peu plus loin.
C'est toujours à rÀntidotaire de Nicolas que nous avons affaire,
mais remarquons que les rubriques latines ne viennent pas de
Nicolas : peut-être se trouvaient-elles dans quelque compila-
tion à laquelle notre provençal aura puisé.
(Fol. 127 vro) Contra quodUbel mahim capitis, Pigra, molt es bos aquest
lectoari a tôt mal de testa ques hom a près per freig el ventres ^ — Pilule
durée ». Per soj apella hom pillulas aureas, car, aissi con aurs es plus [precios]
ques autre métal, aissi son plus caras ques autras pillolas. Aquestas son plus
preciosas ♦ als oils et al cap, e per aucir e per ostar la ventoszetat del ventre
e del[s] budels, e purgara $ moût ricamen ses tota angoissa. Dona Tcn .v. o
.vij, e, si es trop durs, .xj. *.
{Fol. 128) Si 7 tu vols far la recepte pren de l'aloen e de Pescamonea egal-
raen .xx. d. pesans, de las rosas e de la grana del :ipi egalmen .vij. d. e
mesalla pesans, de bon safrant e de la coloquintidaegalment .j. onsa, e pueis
1. Cet article et le suivant viennent du § Gariofilatum de TAntidotaire.
mais la formule du remède manque.
2. Le texte est incomplet : Voici ce qu'il y a dans l'Antidot. : « Pigra
Galieni... mirabiliter valet ad omnem capitis frigiditatem, et stomachi diges-
tionem procurât, vomitumstringit, frigiditati matricum multum subvenit, con-
ceptionem confortât... »
5. Le ms. devrait marquer ici un alinéa, car cet article sur les pilulœ aureat,
est distinct du précédent. Antidot. : « P Ulule auree... auree dicuntur quia, ut
aurum preciosius est omnibus metallis, ita et iste sunt preciosiores et effica-
tiores aliis; precipue capitis sunt purgative, lumen oculorum et auditum
acuunt aurium, ventositatem stomachi et intestinorum expellunt et sine
molestia purgant. »
4. On ne sait trop comment ponctuer, et son plus preciosas paraît faire double
emploi avec plus caras qui précède. Il faudrait quelque chose comme aqueMas
Villon als oils.,,
5 . Sic on attendrait purgan (ou purgoti).
6. Obscur ; la façon d'administrer ces pilules manque dans le ms. latin
dont je me sers, et il y a dans l'imprimé : « dentur in sero .ix. vel .xj. cum
mulsa aut cum vino. »
7. Cet alinéa n'est autre chose que la recette des pilulœ aureas de l'alinéa
précédent. Seulement la fin diffère un peu du texte de Nicolas.
278 P, MEYER
(al 4c lot disso polverd bt^n prima, C met la tcmprar ab ù\gik boillida, Je ta
gtniia c del dîagragnm, e pucis fai ne pi lî ni as a for de cesze, c met tas en
cuer on h d'oli d'otïvas ode bagav, e pueis ne dona lo vespre .v. o ,vij .
De çasloriis ^ PiUuk atUone. Âquestas pi 11 nias son mol ban as per to
paJazin : ,(. o .iij, l'en deu[s] destemprar aî> aiga cauda, et aqueî* aiga si dcu
mètre per \m nars, c faî lo jas/,er envers ^ can lo voiras ^ mcire dejosial fuec ;
adoni: si deu guirar daus ta terra et ubdr ta boca >, e gitara la ^euma que
curara los oit s el mat del fin ne e mo^s autres.
^Contra irnieiinm iiculornm. Pilluh une quthm e^^t noh, Aquestas pittulas
son mot bonas per u^ur h cruite/a de! oï\[$] e del * cap purgar de fleuma e
de colcra e de totas nialas huniors ^
Ad lu€fm c^nforiamhm *. Aquestas plltutas» qui hus usa, gardon lo vis ad
home e b lesta, Lo vcspre^ dona Ten ,xj. o klW] ab ous o afb] fjtrina.
Ad debii^m\ confariandum. RQiaia mnvilaT^ qui vomiiara trop per lo %xn-
tfeil, can sera trasîomaïs, btjs es per conforta r home ques a trop gran dcbi-
lïiai , es bos per sanc » esuncar e per gardar la sariltat longamen ; dona J'en
de matin e de vespre ab aiga freja.
Conira fcbrfs. {V^) Ruhea if^hcaia. Atjuest letoari dona a las lersanaj»,
a las cotidianas, sitdona, ans quel prendal mal, ab lo rodostamata, Distempr^
ne lo comot ' d'una aillana'".
Conira maium capiiis, quanJo non poUit d^rmirt. Ad tiome ques aura mal
en la testa , que non poîra dormir, las nars c la testa Ten onli œma dengeir "^
i , Ce sont tes piUuh diacastont de t*AniidouJre-
2. Ms. molrm ou uwhas,
3. n . . . ita ut patiens supin us jaceat atiquantulum juxta îgncm; itçtn
vcrtai se et ore aperto dimitiat fpsum flegma exïre. «
4. Il faudrait pei,
5. it Pnecipue valent ad cataracta^i et ohscuritatesoculorum, capui mire pur-
gant a cotera, flcgmate eï mclancolu et ab omnibus humoribus, visum con-
fortant et custodïuni. •
6. C»t ta suite du S précèdent*
7. C'est le 5 Rosala uoveîh de t'Antîdotaircj le prcmîer J de la lettre K.
%. Il faudrait ifl^ Antidot. : «t vomitum et subversioneni stomachî
aufett, dcbilitatem et silim repriniit.
9. Ce mot, qui retient plus loin, est i^vldemmentte m^me que (i*m<mt dans
Pierre d* Auvergne : » Q^i d'aver sai a ^rant a^mout •, où te sens est (hndcni-
mcnt lï quantité, abondiiiôc • (E. Levy, Pra%K suffpl. H^ôrt,), Fuin cornet^
dins le Bffviarî (ibU \ signide h abonder * en un lieu* et par suite se
trouver ïpéciatement en ce lieu
10. ... a data cum rodo^tomate ;id modum avellane. »
ïi. Ou dmgàr. Je ne sais ce que cela veut dire, et je n*alpas trouvé rori-
ginal de ce passage.
RECRTTKS MÉDICALES KX PROVENÇAL 279
mot li dara gran sanitat ; pcr ostar la fleuma agra destempra lo ab la tiszana
e gerra.
Contra diversas febres, Requies^ aquest lectoari pozs donar a la tersana et a la
cotidiana et a la cartana agusa, e dona lo ab vin caut '.
Contra quodlibet venenum. Irraca*, aquest es plus cars de trastozs los
autres. Aquest es bos contra tôt veri e per morsura de serpen e de can enra-
biat e de tota autra bestia. Can tu loi voiras donar, destempra lo ab suc de
menta e dona l'en a beure, e desobre la nafra tu Ten fai emplausi. Ad home
ques aura los bos malaig } si'n pauza j. pauc desobre. Ad home ques aura
cotidiana o cartana ab lo vin caut lai destempra ; enan sia i cuejha la ruda o
la genciana, e dona Ten a beure.
Contra dtus febres, Triofilon*, aquest lectoari es mot bos per guérir las
febres cotidianas e lascartanas; en uvern las (corr. lo /'?) dona après manjar
cl vespre ab lo vin caut.
Qmîiter possis stare juvenis. Trifera sarracenica i fai home qui soven Tuza
estar jovencel. Aquest es bos per lo tet^e refrejar e per guérir la malautia
ques hom appella ictericia, so es mal de que es home gruey. Bos es per
ostar mal de testa de que hom pren colera rubea, can aonda trop en home;
aquest es bos per ostar color^(/o/. 129) d*ome e per ostar tota febre tersana.
Aquest lectoari dona ad home per restaurar lo vis can hom lo pert per trop
gran calor. Donar ne pozs lo vespre, lo comot 7 d'una castanna destemprat ab
aiga cauda.
Contra tortuositatem stotnachi. Trifera tnagna^ aquest lectoari pozs donar per
la torcion del ventre guérir ad homen o a femena ab aiga cuejha en que sia
cuejha la grana del anis e del mastic, de cascuna .j. pauc, pueis l'en dona a
beure; a femena propriamen ques aura mal en la maire", pren Tartemi/a
ben pisada e cos la e dona la i ab la trifera.
Contra malum matricis ». Autra causa per la maire : pren Tartemiza bem
1. Pris du S Requies de TAntidotaire.
2. Faute pour Tyriaca. Cet article est tiré du § Tyriaca diatessaron de TAiiti-
<iotaire.
3. Le latin, qui est obscur, n'éclaircit guère ce passage : « venenosa etiam
apostemata sanat superinuncta ; bonum melannum, quod Salernitani scagiam
vocant, curât. »
4. Trianfiîon, dans TAntidotaire, le § manque dans la version publiée par
le D^ Dor veaux.
5. « Trifera dicitur quia hominen juvenilem facit. »
6. Sic, corr. calor}
7. « In modum castanee »; « en quantité », dans la trad. française.
8. « ...datur contra omnia vicia matricis. »>
9. Cet article et les deux suivants sont pris du § Trifera magtia de TAntido-
^ire.
î8o
p. MHYKK
piiuda, ^ met i j. pauc d'oU d'oUvas c df bagas o ilu murct^olon % e fa» n*:
subpcisitori eii la boca de la maire.
Qumtdû non pifkst tmmperf muUer. A femena que nom pot aver éiati,
M tu destemprAs d'aquc^t letoari, .j. onsa ab b vin en que sia cyejha U
itiandragora, ^ pucb lo met ab lo cnsteri per fa boca à^ U ma^lrei esi podia
avcr .j, pauc dt' basme ', en'i metia, ses dupie auria cfan.
Qttiîndi^ pKtr ierrrlur dmmienâo. Aïs efiinsi ques an paor en dormens c
non pttdon dormir e ^arlon en dormens, pren d'aqiie^t lectoari *j* pauc c
desiempra lo ab lag tk lemena tan con ten J, cesiscr % e tu Ten dona a beurc
c guerra.
Qmthkr fiHHt cirupi cofUm fibrem ♦, Sï tu vok far ïssarop rosat, pren las
rosas secas ij. Ib. e d'^îga .vlj. Ib, e .nj Ib, de sucre e faîz o tm essems bollir
en .j. pat roi ; e can comensara bollîr ajas âç claras d^ous .iij o .ni}, ben
batudas ab aiga freja (f**) *j. pauc, o s bat las tan que fas^n escuiîia» et aquesta
esc u ma tu i meiras, e ain comessara bolltr, aqyela esc u ma tu deus sovcn
menarab .j, paleta tro sia espes ; e can fara lonc fil que tirara, adoncsescucii.
Aqnust tssarop datas contra tota calor ostar*; es bas pcf cofortar e per guérir
mena,sEos. Atressi pozs tar issarop viulatT; aqucst sera bos a las febres
tersanas et ad home que non potra issir a cambra.
Contra pîn^iHum *. Issarop fai contra pkvedn e tîcis. Aqtiest faras en
aissi : Pren .nlj Ib. daiga c .%\]. d |>esans de violeras c de requicia e de papii*
ver blanc, égal m m .i*j. mesalladas peszans de cascun, e de h grana del
codofg e de la grana delà mal va ben mundada e de la grânadel[s] melos, la
mezolla* e de la grana de las bortolatgas* e de la grana de las cogorlas» h
mc^i^ola, e de la goma del dragagan e de la goma arabica cgalmen .viiij. d.
pcs^ans; totas aqueslas causas pîsza fort e met o en aiga boïiir» e boil o Un
que faiga tornc eiidoas Ib. ; pueis cola o per *j. drap, emeti Jij. Ib. de sucre;
puds i met MW]. pies cul li ers d'aiga cauJa,
Cùtiirû menasim cirttpum *^* Issarop per esiancar iota menaszon. Pren de
sucre una lb> e mieja de mJrtîUi« e de rosos e de sumac e de gada e de las
balaustias e de lîpoquiiiridos epodii '* egalmen .vlj, d. pcs^an, e de sorbas
vcr$ *it. e de requicia c de dragagan, de goma arabica egalmen .vî], d. pe*-
i. ¥ ...cum arthemisia trîta bene et oleo muscelino admlxta. »
2. Iln*es« pas question de baume dans l'An tidotaîre.
5. w ..in modum ciceris *>.
4. ^Syrnfms rôsacius de TAntidotairc.
5. Sic. corr, r.
6. Il faudrait supprimer oitar, ou mettre prf au Heu écrmtr&.
7* Antidot. Syrtipus vwkcetis^
8. Ancidot. Sympfts cmtta pliurtsim il penp^tumemiam (sic}.
9. « BouRTOULAlGO... iat. potiuhiii, pourptcr » (Mistral),
10. Antidot, Syr tipus Centra ôfnmm venîrh sûtutumtm,
1 1. « ...rosarum, sumach^ àcatiei b«lausiie« spodii ypoquîstidôS. ■
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 28 1
zans, e de nespolas vers .v. e de cormas vers .x., e tôt aquo que fara a pizar
e tu piza, et aquo ■ que poira fondre e tu laissa fondre, e pucis o boil tan
que no t aja forsa .j. Ib. d'aiga ', c pueis o cola ; pueis o toma si^brel
fuec, e met i lo sucre, e boilla un tro sia espes, et ab claras d'ous batudas tu
o esclargizs.
Les recettes qui viennent ensuite ne sont porint tirées de
l'Antidotaire de Nicolas. La première toutefois, est écrite, avec
bien d'autres, sur la marge (fol. 140) du manuscrit de l'Anti-
dotaire (lat. 7056) dont je me sers. Elle a pour titre : Sirupns
de mirobolano ad coleram. Quant aux recettes de sirops qui
suivent, je les ai vainement cherchées soit dans les additions
marginales du manuscrit précité, soit en d'autres livres, et
notamment dans le Pamum ambre^ ou pourtant sont énumérées
près de soixante espèces de syrops.
Contra coleram, {Fol, 1 30) Issarop per curar la colera ' e la ventoszitat
e la ictericia e tôt lo cors. Pren de mirabolas citris ) e de violas e d'eisseis,
de cascun egalmen .iiij. s. peszans ab .vij. Ib. d'aiga, e pueis met i atrestan
de suc de sumuera 4 con del sucre, e fai ne yssarop.
Contra continuam, Issarop per la febre cotidiana. Pren de la grana del
apie de la grana del ereissel s e de la grana del fenoil egalment .j. d. pesan
e de la grana del[s] meios e de la grana de las cogorlas e del citruli .viiij. d.
pesans, e del reobarbi .iij. mesallas peszans e del sucre .j. Ib.; e sil malaute a
tos. met i de las amen las e de gragagan e de la gonha arabica egalmen .j. d.
pe^an, e pueis fais en aissi con es dig els autres iss;irop[sj.
De duritate splenis. Issarop per mollezir lo bescle cant e^ durs, e per
guérir home cant es ictericis et es cruecs et a la fFebre cartana [o] tersana, et
a totas malas urinas que son de calor. Pren las razis del fenoil e del api e de
Tesseil e de scariola dometgua : si pren del (sic) salvatga e de reopontit *
dometgue; tôt aisso fai boillir en aiga e met i .j. paùc.de la polvcra scandali
(awT. sand-), e can sera ben cueg, e tu o cola; pueis met i tan quesassas n'i
aja ; e d*aiso pozs totas las menaszos guérir.
1. Ms aque,
2. « ...et bulliant adquantitatem libre unius. »
3. SvLT \^ miroholanus citrinuSy voy. Dorveaux, Antidot. Mr., p. 76.
4. Corr.f umitera, La formule du ms. 7056, f. iso h en marge, porte : a R.
corticem mirabolani citrini, kebul. (^= kebule ou kcbuli) ynd[ici] anaj xxx,
ros. S XV, viol., podagre, lini, fumii. ana 5 x, absinthii ethimocriti ana J
v; infundamur omnia in tribus libr. aque calide... •>
5. Cette plante, que je ne puis identifier, reparaît dans l'autre recueil
(p. 296, 1. 4).
6. Rhapontic (Cent, rhaponlica L.).
282 I». MEYfiR
Df quoUbn tthth hnmar^. Is^jrop que fara purgar tatas Us m*iiiUi liumors
ses grjnangcirssâ, l*l es bos per donar a bs nc;is gens que non voLon penne
poizos amaras * . Prcii lu pnljp ïdî e del sinegrcC, Je Li rjKÎs de k grâtia,
e de bs caïaspudas * (î*") e Je b razîs dt; h baica », e Je la ra^is de Uuna-
bïlla (?) egalnien, c lavas las c pisza las fort e met o en un pairoil que Uû sobnes-
tarniai c ïixh o bollir J. pauc^ e pueis cob o e (m ne issarop ; e sii vgls met i
,j. pauc de CAmiom^ e puc^îs e tu o destenipra ab aiga cati b voiras donar.
Is5arit»f> aceids*, Pren de bim vin aj^reepueis a met en ^j. mortier, c puds
veiia cpattca; i met mais autra Ib, de buct^ e mcscla o fort^ e can voiras c
tu o dona ab atga tebcza.
Cûnira sitim. hsarDp cou ira set mtiir o vomîî eatancar Pren lo me de Li*
mitgranas mieja Ib. c àû tamaris, e Mïi\. Ib- de sucre, e d'aigua de plueja
tan que pro n*ï aja pcr mc^^ura, »? h\t o en aîssi co comanda els autrvs
issarops.
Ek coj^iiitionc Jhumiîtum, Quant tu veiras home mot nègre et aura la boca
afïiara e la saliva er ajuls^ adoncs podcs saber que sa Isa fleuma * Il aanda. Si
h boca es dousa e la saliva ci aitals, adoncs podes saber que doussa fleuma
Il aanda, Aquesi deu aver lou ora mal cor, cossi voHa gitar, e la orina de lui
deu esser alqties grossa et .j. pauc rossa et esj'»eisa; lo fegge simple dcu pur*
gan (cûrr. purgar) ab la benedecta et Ab lo catarticum impérial t cl ab Taïga et
(r^3lT, en) que sera cueg lo polieg.
A salsa ab la gerapigra o ab d^odorîtonami cardjtum et ab icr.stogodion ».
Colera rubea ques aonda dels ob deu[s] purgar ab (/a/, i^i) tri fera sarracc-
nlca, ab Taïga en que sia cuejha cassîa fistuhr. Melencolia dcus purgar ab
ierologodion, Lo sanc dtus purgar cani aonda trop, fiii llo sagnar o venîos-
iar ", si el a mal en la testa, de la vena sephalea ; sî cl a mal el poimo o el
bescle, de ta vetia mejana; si el a mal el ventre del{mrr. o el)fetge, de la
si el a mai el[s) ronnos, de la vena de! pe jus ta la cavlUa ; e si non es temps
He sagnar» fai lo ab las ventosas.
Di wgmiîmie poçimii. Quant lu auras donada ta poUo* aissi ptairas contm-
ser sîl mena ben : non deu sentir el ventre nulla torcion. Adonx li deus donar
i. La préoccupation dlndiquer des remèdes appropriés aui gens riches et
dilïcats se manifeste déjà plus haut (p. 376, Utrùtiptiti),
3. Corr* ftnugrtc,
!♦ « Catapuce, épurgc {Buplforbîa hiihyrii^ L)^* Dorveauit» AniiJ,^p, 52.
4. Siutco (Mistral) est un nom qui s*appïique à diverses graminées.
>. Il y a bien, dans le Po/num ambrt^ un ivrwpuj actt&sus, mais la rrccîie
est tout autre.
6. Siî/jww* ^/^tfiiïdèsigcic ordinairemem une sorte d* ulcère ; voir la Chtrut*
f if de Mtïtideville, éd.Bos, au gio^sAÎTc (fléu^nit nanssf),
7, Confection laxatîve sur laquelle voir DorveauK, Antuî.^ p* 10.
81 Sur la yerup^^ra et le ytrûio^ûdium^ voir Oorveaux, Antid. , p, 97,
9. Le ins^ marque ici un alinéa qui ne me semble pas justifié.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 283
del sablier de la gallina .j. pauc, e pueis fai Tendurar ' .j. pauc, que si lai
era remazut de la poizon que s'en issis.
De temptrata comistione. Garra que non mange ' ni beva trop, que non lo
prenda la febre, e sil mena, al segon jorn lo deus bannar, e gara lo del
freig.
Quoi diebus cusiodiaiur. Gara lo per .iiij. dias, que non fassa nulla obra,
c fai li manjar bos condugs. Hncaras deus purgar ad aquels que seran
escolorit metra fi .j. d. pesan d*escamonea ) ; a la fleuma .ij. d. peszans; a la
Tnalencolia .iij. d. Si febre li vene, fai li banh. Si non pot aver bainh, onh lo
cJel dialte * entre dos fuex devan e dereire ; si non gueria de la lebre per la
primieira preizon, pren Taigua en que sia cuejha la goma arabica, e dona Ten
â beure.
De siti posi pocionem. (F») Motas ves s'esdeven ques hom que pren
poizon a tan gran set ques 5 nos pot estener de beure, e beu ques hom non o
sap; peraisso efHa lo ventreil et a gran torcion. Hn aissi lo deus guérir : pren
<]*aiga cauda et .j^. p ^ plena d'oli e fai li beure d'aquela aiga cauda, et el
ineszeis si meta .j». pluma en la bocao sozs dezs, e fassa ne issir aquel beure,
car si non o fazia, ben poiria morir.
De pocione nimis extenta. Motas ves s'esdeven ques hom dona poizon que
s'esten el cors de Tome, e nom pot issir. Aisso pozs conoisser a la torcion del
ventre e dels budels, et eHla tro que ven em péril de mort. Aissi li pozs
acorre : fai lo bannar, o si non lo bannas, onh lo al fuec ab bos onnemens
cautz lo ventre ab .j. teule caut o ab la fisicanea, e cofortara li tôt lo cors e
las naturas, e deu lo menar, e si aiso no voira 7, fai li lo cristeri en aissi :
pren de las mal vas e del polieg e de Tagaric, pisza e cos ne en aiga, cola o e
met i .j. pauc d*oli, e d'aquela metzina ques hom li aura donada i met .j.
pauc, e pueis met la i desozs.
De pocione débilitante nimis. Motas ves s'esdeven que las metzinas* que
^om dona ad home lo mena trop, per so car el es trop frevols, autra car es
trop agusada. Sil pren dissenteria ques es gran péril de mort, e per aco deus
tost ponnhar con guerisca. Pren d'aiga e fai cozer goma arabica e de las amen-
das e del blanc e dels teules nous e de diacodion' (Jol. 132) e de la roszada, c
<^ona lo i a beure, e s'es obs esmet lo i en bain e non sia trop caut. Aqucsta
*iîssinteria pozs conoisser al sanc que fara a tozs dias.
1. Jeûner.
2. Ms. ma^e,
5. La phrase n'a guère de sens; lacune après escoloril} Corr. fi en 5/ ?
4. Dialthée, sorte d'onguent; voir Dorveaux, Antid., p. 58.
5. G>rr. que.
6. Le reste du mot a été laissé en blanc ; padeUi ?
7. G>rr. valia ?
8. Corr. la metzina.
9. Confection à base de pavot; voir Dorveaux, p. 13.
i
Î4 P' MEYER
De c^niikim urmirnm. Si tu vols conobscfr] las urinas» aissi o trobaras :
câTi veiràu en là urina desobre gran escuma c deso^s veiras .j, sekie toi
emom, sapias ques el a gnm veiiîoîtîut d ventre ei el[s] budels.
£> yjfArjf* iin^^r Urina, can la veîras grossa, et .j». nevolîna blanca,
el aura ftjbre Jguda, mort significa.
Di f0,Um. Urina, can la va iras negra, can k malautc auran (iiV) fcbre
aguda ot c micig aura una nevoUtia negra, mort sîgni lîca.
De vci^ricfa. Urina sitrîna, so es grue^a» plena d'cscuma et e mîeig cossî
a via purs patîjhe^s^gruex, ictericia mort sîgnîfica.
De petra. Urina h lança con laig, se ni a pauc et es mot tenva, peira
^igni^ca,
Dt dcftorr tocius t^rporu. Urina, can sembla ques aja el mieig bren, et aura
un pauc diarria, slgnifica, si el fons de la urina ves grans fresum» signi^ca
dolor de rnnno,^, pucis* pur tôt es niesclames aqud frt'sum que sembbra.]
pois per tôt lo cors es h dolors*
Urma de femciKi piucella deu esser cïara con aiga.
De nn'Mû hotmmtm d muUaum. La urina dels honie^ c de las femcnas
conoiss^ras can compannia auran essems, aquela deu esser trebûlla. e U
luîsuria po^s conoiîiser 0-^) desohre e deso/s.
Dp tithm ffrti'tmndum. Urinas de las femenas prenh, can auran engairat
après 4, mes o dos o très, aiijiiela deu esser mot clara e per mîi'ig veirasiicvo*
Unas btancas ^ inota<i ; en aîssî o po7.s conoisser.
Di urtmj muJifrum. L'urina de las Tenienas pojts conoisser can aurati ta s
Hors :aquelideu e^sermot e:spessa, e deu esstr alqu^^scon satiguînolenta.
Dt ibhrt maitUh. Si en la[ï] urinas de las iemenas vesgoma, et es gn)SSÂ
el espes^a* signa * dolor de maire*
De urim mûttiftra. Urina, can vtiras que n*i aura petit |e] dcsobre iriv^o-
las anar coma de calort {îk)y mort signât.
Voici la fin de cette partie du manuscm :
(Fol 141 v*> CoHÎra vidum p^ctark. Contra lo nul vis^i del picig de tisïis
c d asmatkis e de dcfcci (?)* qui al comensamen s'en dona sucînh bcn poira
guérir. tVeii delà mîrra .vij* d. [ve^^ans e de la gomâ arabica .f. nnsa,^ âc .
6gas ,j. cartairon e de sucru j* «^uartairon c de vin blanc tro que pro ni ajji
1 , Le robricateur a écrit Dehrt
2 Des points : la graphie ordinaire est poncho. Ce qui suit ii*est p* très
clair; faui-il entendre « signifie la mort par la fiiirvre « ? ou n'est-ce p«5 plu-
tôt : " signifie fièvre [et] mort ■ ? ou, enfin, ne faut-il pas supprimer nwrt ?
f . Ms. p, surmonté d'une barre. Grtie restitution est douteuse t:i la fin da ,
paragraphe m'est obscure.
4. Corr signifier*
RRCFTTFS MÉDICALRS EN PROVKNÇAL 28$
et msfto stra bona poison ad hc!mc[s] quc^ aurait (foi, 14a *> mal el piuig de]
plus ionts mabutias del ventreil H cossomïra toxs los maïs viszîs^ per que
5iieiurft1nrf cliil3ji?mf nilrt frta i-rrt
mwn ff rîu*rm«i ritmA i^triiff n^Jiw menuea
ïftfflirftit* amttti MniiiOtitt " - — -^
cmtUifimmfwmfmjg.(^mtCmnr^fVnnt
A ft ?* iKi ttu^ qiif (oum imimC. tneTam-ii i ttî — ^
Wi fîm'mi tituûitf mirtrUf i^yimiirUd ai ii^fi«F
/^ Lj% ,mÇ fïwt^^^^mntkiwwimv^ Utf nmlaC
mrmyvcnla fvmrm ïMmtuî (U 4M^ unm^
^iûtmf^ cmmn mdïmn iHgiiimtl - - -J
f
ham prt±n Ji» granit kbrcs c las gotas en la testa et els ob. Aqucscâ pobcm
es mot CArn e bona c guerîzs tôt homt queii beu d icn san.
CoH/r*/ paralti^im. A pâlay^in .j* on^neii ques a non diarrogonv Escalta
1. Le nscto de ce fetiillet est reproduit ci *a près en fac*simîlé* 11 est bon
d^lve^tî^ que les rubriques, qui ici ^e confondent avec k texte, s'en dis-
tîn^ucnt lort bien dans rorigînaK puisqu'elles sont, comme les initiales des
par^igrEpheSf en vermillon.
2. l! y a, dan^ rAmidoiaire de Nicolas, b formule d'un onguent appelé
ua^uriitum ura^atr, mais il est fort différent de cetui-ci.
286 P' ME^^R
la tn ucia cassa, e paés met \ de la potvem dd cufbfbi» e pueis odqc lo
nurmbre en que <^ le milt t^ guern.
Cmiirâ $putitm mn^mms f>er as* Ad aqueb q\âe& escapon sanc pcr U boca, cl
csdcvcn si ora ' laora can lu venas rampan, pcr so car son trop plimA*. Prcn
|j "icrmiînna ■ vert t seca 11 e lai b bollir ab vin blanc, ê dona li a beyre
C&uira ver m fi aurtum. Ad home* ques aunt vcnns tai raurctlla pim lo
*uc tïcb arcctis » c la poîvcra deb nitreon ujia sîîÎs* c met loi pcr l*auivlla.
Quid iiî ni^ffîé. Kiclla ï ts caudla e seca ti icrs gra* pos dut» .x, an^ ; mol a
jçfan venuï dt irairc tas humors del cors. Pr^i b gratia cl (ai ne poîvera
mtrsirb b ab lo me dtl arcens <*, c bî ne empbust, c paujui o sobre I vcntîdll
p<»ijhenîl dçl cbn qtics aura vernis « e morran. Ab autres» proi b polvera c
mçicîa b ab tnd e bi ne letoari. Autra pozs br: Prcn b brina de b niclb
ab îo vinagrc c h\i o ciscalbr?, e mei o en la aurelb per los verms ad aussrr.
Contra mal h m itij^uims. A mal dt:l flanc^ pren b nielb c bj la boUir ab
vin blanc c dona la i .1 Nrure .îj. joms o ïrcs,
Quid sii ptrfirum. Ptrctrum es cauzs e secx cl ters gra ; (t**) pos dun ,v.
An%. Ciran fors' a ad home que» a encombrât lo servir) Je mala^ h timoré de
Ikutna c de colirra, cl aura lo ^^cnirc picn de ventosxïtat *- Pren lo piretrc e faî
lo u*jr ad home qucs aura aqucstas hum ors» e fai b masie^ar enlre las dens, '
e si d a pabbî, d ne j^utrra : e si! bs bollir ab vin blanv ab bs tigas, e qyd ^
bs\as bcurc îo vin e nmnjar b figas, mot b cafortara.
Cimira pàraUsitm », Cant li pabiiln fer home, pren lo piretrum e tai ne
polvera e mescla i .}. pauc d oli ab aquda polvera en J\. pauc de vin pur, c bu
o bollir, puds bi ne eraplausi sobre tozs los membres on le pabjzi ^^ta e b
goU anciîca; e si podias aver de Tcrba de pilctra tota vert» si la pi^aton, pueis
bî b jasicr en vin blanc .?i\. j«»mv* e pud^ o boil, e pueis o cola e met en
aqud suc cobi .j, pauc de cer^i et .j^ pauc d'oh e îam o bollir toi essems, e
t . Ce mol 01 à supprimer*
2. Il budrait probablement sermi/ntana^ b scrmcmtatne.
j. G:ttc leciure est certaine, mai^i il esi probable que le copiste aura écrit
ar(em au lieu d'aktni : u immttiatur pulvis nhri confcctus eu m succo ûhstnihtt. »
5, Pbtcarius, I> simpl, mii.^ kigella.
6. tt Conini lumbricos (kt empbustrum ex farina ejus et suca> absmthîî
cireu umbilicum, et precïpue pueris. « Pbtearius, ihid.
7, Ms, fkalfar,
8. Ce qui préc^Me ne vient pa^ de Pbtearius, où on lit seulement (sous
HHfrtKUM) : " Cercbrum a superHuitate Reumatica mmiditiciil, *■ Ce qui suit,
au conimire» est pm de Platearîus.
^, VjÉi article est le développement des dcmid^res ligne* du S fïmrruuM.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 287
sera bon onnheniens ; pueis onhc lo palaizin cl[s] membres on sera la gota
artedca e las autras gotas.
Qtud sit piper K Pebres es cauzs en lo cari gra e secs el mieig del ters
gra. De .iij. manieiras n'i a ; mas le nègres a mais de fors;i ad home que sera
refrcjazs de totas malas humors. Pren lo pebre et .]*. herba ques a nom ellebo-
rum album, e d*una espessia ques a nom euforbium \ e del castor» e ùù ne
polvera ben prima e met las(iiV) per las nars, et estomudara. (Fol. i.n) Mot
es bos e cars, que mai val que son J peszan d^argen ; et aquest esiomut ne
fara issir lo mal de la testa.
Contra guttam caducatn*. Contra cpilencia, so es una gota de ques hom
cas, e fai perdre la memoria, et ades aquest mal mou de passio» pren la ruda
e trai ne lo suc e met i .j. pauc de la peonia et .j. pauc de vi» e dona lo i a
beure.
Ad debUes rohorandos. Diasatirion », aquest lectoari das ajs despoderazs dels
rennos, et ad home que sera refrejazs» que nom porra aver companna ab las
femenas per qualques (51V) ocaizon; aquest lo guerra. Dona l'en lo malin e de
vespre ab lo vi.
Contra quant Jihet i^nttam. Pren de cerbe* et vin blanc e clar, plus del
vin en doble que de la cerbe, e cosz o fort, pueis pren d'oli d'olivas e mescla
o e coga entro que remanga la liquor de Toli ; pueis pren de cera blanca nova
et mescla o tôt et on ne lo luec gotos cotidie ad igmm o al soleil tro sia
guerizs.
Contra crematuram. A cremadura pren d'oli d'olivas et atrestan de claras
d*ueus, e bat o fort tro ques tenga et on ne la cremaiura, e guerra e nom
praliticara.
II. Recettes variées, charmes
Le recueil de recettes compris dans les ff. 143 v" à 160 est,
comme on en jugera par le fac-similé, d*une tout autre écriture
que le recueil précédent. Les usages graphiques difl'érent aussi
notablement, bien qu'au fond la langue soit à peu prés la
même: l'un et l'autre recueils appartiennent visiblement à la
1. Certaines parties de cet article viennent du 5 Pn*HR de Platearius.
2. Ms. eliforbium.
3. Ms. 5.
4. Cette recette est indiquée dans le § ruta de Platearius.
5. Ms. DijauinirUm \ mais cf. VAnt'uhUtirc Nicohis (l)orveaux), p. 8. Cxi
article n*a qu'un rapport éloigné avec le ^ saiirion de Platearius.
6. Il y a bien dans Platearius un *', sinai'Is, mais il ne paraît pas que le pré-
sent article en vienne.
288 «^^ p m^YER
région voisine du Rhône en son cours inférieur. Mais la diffé-
rence la plus grande est dans la namre des recettes qui les
composent : celles du second recueil ont un caractère beaucoup
moins exclusivement médical ; un ^rand nombre ne sont rien
de plus que ce que nous appelons des remèdes de bonne femme.
Il y a aussi beaucoup de charmes, le tout jeté pêle-mêle. Cette
curieuse collection mériterait assurément d*ètre publiée en
entier. Je ne puis en donner ici que des extraits. Pour la facilité
des renvois je numérote le*; paragraphes.
Il ny a pas lieu de chercher, à proprement parler, les sources
d*une collection formée dYléments aussi variés. Çà et là on
trouve la mention de remèdes qui sont indiqués dans les livres
de médecine du temps, mais il paraît bien que Li plupart de ce^
recettes sont recueillies d'après une tradition orale. Le compi-
lateur était-il médecin ? Je serais porté à le croire; radmission
de formules superstitieuses, de charmes, n est pas une objection.
On trouve parfois des charmes intercalés dans des compilations
dont le caractère médical n est pas contestable* Il y en a un grand
nombre dans le k^chbook qui occupe le second tome du recueil
publié par Oswald Cockayne pour le Maître des n.les'. Ce
qui nie porte à croire que le compilateur écait un médecin,
quelque modeste praticien de campagne, c*est une référence fort
précise qui est donnée au §47-11 y est question d'un remède,
inédit ce me semble, pour la goutte. Ce remède^qui n'est peut-
être pas beaucoup moins efficace que ceux auxquels on a recours
à notre époque, consister prendre des bains dans une eau où
un aura fait bouillir des tortues itvv^Stir^larîugas bos£a\iytnctli*)
et à s'appliquer la chair de ces tortues, aussi chaude que pos-
sible, sur les parties douloureuses. Et Tauteur ajoute : « Je sais
cela d'une façon certaine par le père de Berenguier Pallada de
Sainte Marte de la Mer \ qui gisait dans son lit, perclus, et ne
s'en pouvait lever si on ne Ten levait; et je le sais par son fils
qui lui fit foire ce bain, n Nous ne savons rien de plus sur ce
î. LffcMofHs.umrtmnnine ^nd starcrap ôf tarly Bngiand^ ..XQÏhxx^à and
cdUoi by che R. Owald Cockayrte. Ijotidon, 1864-1866*
1. Oti ne trouve plus aauuHcmçnt La tenue terrt^stre dans le Midi de la
France. H y en a encore Cïi lia lie, en Grèce, en Espagne.
%. Le* Saintes^Mari^s-dc-b-Mert ch.-l de c, de T-irr. d'Arks, lieu de pèle*
tijijigv célèbre en i^rovtmcc ; ^oir Mirtùi,
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 289
Berenguier Pallada, mais il y a là une indicaiion suffisante sur
le pays auquel appartenait le compilateur.
Dans la seconde oioitîè du xiii'^ siècle, époque où fur rédigée
notre compilation» pouvait se dire médecin tnut homme qui
pratiquait Tart de guérir, ou, si rLKpressîon est trop ambitieuse,
lart de soigner les malades. Il n'Otait pas besoin d'uiit qualifi-
catÎQit officielle, Sansdoutt, à Montptilier une licence, obtenue
à la suite d'examens, était imposée; cela est constaté par les
Statuts donnés à rÉcole de médecine en 1220 \ mais il est bien
probable que cette gaiantie n'était guère exigée que dans le
territoire de la cité. On n*avait pas coutume en ce temps de
poursuivre les gens potir exercice illégal de la médecine. Que
notre homme nit été un vrai médecin ou un qttack^ comme on
dit en anglais, il faisait de la médecine populaire. Ses recettes
sont d'une grande simplicité : pas de ces ren)èdes composés qui
rcniplissent les traire^ laiins du tetnps ou des âges précédents;
pas de termes scientifiques; tous les ternies employés ^ont vul-
I paires ^ parfois même très vulgaires (voir arc* m, 17, 19), Et
. c Vst ce caractère populaire de nos recettes qui en f;tit le prin-
cipal intérêt. Le recueil commence ainsi, en latin :
{Fol, 141 i*) Ad fistulam vel cranirum, Accipe md coctum bene dispuma-
tum. et* du m meï ceph bullîrc, mitte in illud farinum t rit ici, et de hoc [Jac]
I^^rnpbu^t[rjUni, etponesupermalLim, Jujsvîces vcl tre.s.cilidum, lît sanabitur.
Ut muUer dio pariât. Homo solvat suam dncitiram et ctn^^t panurieniem
Icr. et dicat : « Ego le cingo, Christus te solvat '. »
Après un certain nombre de recettes et de charmes en latin,
le provençal commence* ainsi :
1. (FoU 144) Si vols honi[c] satïar de gou caduzcha \ puejd al tm de la
fonde*, ncgyn non te vetra^e preii un delz poUis, et, ans (|ue toms a terra, toi
H I. Voir A. Germain, UÉcolt dt mèikcim de Mottip^Ui^r, s^s onifhtti, sa
U^-^mtiitiUm, ion rnsfi^tianmi (Monî^d\hf\ i8î4o, extrait des Métn. de la Sac,
■ a^rchéol. de Montpellier), p. t6 et suiv.
a. Superstition bien connue, Eîle est mentionnée dans un livre rotiergat
du xv< siixic (Bttit. dt k Sih\ tiits am, texits, 1 &90, p- 94)* Voir iussi T h Sers.
Trmi€ dfs sîtpfniitions, I, 274 et 58^.
}. La gui fil r^Tf /«m mentionnée plus haut (p. 187), le mat caduc, Tépilep^ie*
4. I! y a dans Raynouard, IH, sh>* >5ï. intmia, î>c»m/n\ i ronde,
Hftff XXXil i S^
290 p. MEYER
H lo ca[p], e pois obrc li lo cap, et airobaras ins doas peiras de las cals es la una
roja e Tautra blancca. La roja ajuda en las demandadoiras cauzas, si om sobre
se la porta ; la blancca, si es lavada en Taiga, da n'a beure ad aquel que a la
goia, e pueis sera sans ' .
2. A goia que longament esta en cors d*ome et de femena, pren de la
fuella de la savina, e cos la en aiga, et en aquela aiga fai Tomen bainar, e sera
gueritz.
3. A gota, quin qua : cuelg solscgia, aicesta erba, de la scima tro a la razits,
(yo) cascuna per ;xij. oras e per .xij. dies, e dona ad aicel oad aicella a beure
una vcs cascun dia.
4. Item, ad aquest mozeus : prenlo cor de la granoilla, del mascle a rome,
del femen a la femena, e da Ten a mangar, e sera garitz.
5. A gota que es en las gautas o en austres (sic) luecs, prin (51V) de la ver-
vena e trissa la, e mescla la ab la clara del ou, e d*aiso fai enplaust e pausa
l'en desobre.
6. A gota a sanar, pren de la ruda e cos la ben ab oli tant tro que voilla
ardre, c d'aisel oli ung lo loc on la gota fer, e desobre pausa la ruda, e desobre
la ruda pausa la lana suzolenta cauda, e sanara.
7. A gota a sanar, prin aloen e destempra ab clara d*ou, e d*aiso fai pego-
mas ', e pausan desobre la gota, e sanara.
8. A gota pessima, pren .xxx. ous de gallina et co ) los en aiga, e pueis
vrai de quascun los moiols. De la clara fai quet vols, pueis mescla los moiols
ab sain vielg de verre ♦, en la sarta lo ferra 5 tant tro que sia faig engucnt cais,
e mescla i .iij. fcls de porc, et ab aiso ung lo loc on la gota er a calor de foc
o del soleil.
9. Ali oculos lagainoses, pren ierziziris (sic) e mescla lo ab la clara del ou,
e fai cnplaustre c pausal desobre l'oil tron quant sia garitz.
10. A femna trop luxuriosa, pren * locoillo destre del lop e mcsclal ab oli
et ungan soven lo con 7 dedinz.
11. Si vols forz dens aver, pren lo mastege ç mastegel ab las dens.
12. Ad aquest mezeus, lava soven las dens ab aiga freida.
13. Ad aquest mezeus, pren lo mentastre e fai en polvera, e mesclal ab
lana suzolenta et ablo mel, et ab aiso brega las dens soven.
1. Sous cette forme, cette superstition ne m'est pas connue. Mais on sait
que certaines pierres trouvées dans le nid de l'hirondelle, selon d'autres dans
son ventre, passaient pour guérir diverses maladies, et notamment l'épilepsie.
Voir Eug. Rolland, Faiitte pop. de la Frame, II, 318.
2. « Pe^oumaSy emplâtre de poix « (Mistral). N'est pas dans Raynouard.
3. Pour cos (cuis),
4. Raynouard (V, 503) n'a que ver au sens de verrat.
5. Corr. freja (plutôt fre^^ ou f régi s) 7
6. Ms. prena.
7. Le nis. répète ici soven.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 29 1
14. Si vols aver clara votz, pren lo suc dcl polieg e beu ne en dejun.
15. (Fol, 14s) Sx crcmas ta cara ab lo soleil, en aisin la podes enicndar :
escampa dcl comin en vinagre quant quet voillas, e fara graissa ; bregas la
cara, e si as la cara tacada, pausa i d'aizo que es dig desus en la nueg quant
vos ires jazer ; et al mati lava ' la cara ab aiga freida.
16. Si vols que la boca ben ti flaire, pren lo polieg sec e manjan per una
ves cascun dia, o«del sarpol, o, sis vol, niastegc la seniensa del api o la foilla
rubi tems ' ô la, s'en lau J la boca ab vin san.
17. A nafra clausa obrir o sanar, pren la merda del porc ♦ e niescla la ab
vinagre et ab molsa J cocha, e pausa l'en desobre.
18. A pruzige* et a roina, pren la semensa de Tapi e trisa la ab lo vin et
ab lo mel,et oigne tôt lo cors, et cr sanatz.
19. Ad aquest niezeus pnizigen? que es tom lo cul, pren la salvia et cos
la ab aiga e lava t*en lo cul.
20. Si volsanar foras *tart, beu .iij. globs de bo vin soven en dejun.
21. A la nieiras» ad aucir, cos la (sc]mensa del cogonibre salvatge en aiga
et escampa Taiga per la maison.
22. Ad aquest meteus, cos la foilla del cardo en vinagre et escampal per
la maison, e mor[r]an totas.
23. A rabia a sanar, pren la plena man de la cemensa del comin salvaige
e trissa la c da Ten a beure ab aiga, a home o a bestia o a can.
24. Als lunaiics '° que sofron lo cors de la luna, pren la peonia e lia la H
ai col d'aquel o d'aquella, e si aquesta erba esens portava ab se, unquas
aquest mal non aur[i]a, e si la mas " enan ab vos tempesiag nous nozeria.
1. Ms. lava lavai.
2. Sic, avec un signe d'abréviation sur le premier jambage de ce que je
prends pour une m ; ce mot doit être le nom latin d'une espèce de ronce,
rubi,..
3. Subjonctif de lavar; le nom de la substance avec laquelle on doit se
rincer la bouche manque après 0 la.
4. Pour les pustules, les furoncles. Fauteur recommande »< la nicrda delb
cans cauda » et « la merda de la cabra » (fol. 1 5 3).
5. a MuUa, mulsum, potio ex melle et vino confecta » (Du (Lange).
6. La première syllabe est écrite en abrégé ( n), mais plus loiii/)/«- en
toutes lettres (Mistral, prusigk).
7. Il y a sur IV un signe d abréviation qu'on ne peut rendre que par n. Ce
n'est pas plus extraordinaire que tron (9) «/w/m (15), etc.
8. Cette expression, qui est suffisamment claire par elle-même, n'est pas
relevée dans les dictionnaires.
9. Les puces. Le mot n'est pas dans Raynouard.
10. Ms. Umatirs.
11. 5if, corr. Vavias ?
292 p. MEYER
25. Ad fluxum sanguinis escrieu aquestas quaractas e lia las li al col, e
si non o crézes, escrivas las en un coltel que ajal mange blanc, e fires ne un
porc e ja non eisira sanc . Fcilissexhi 1 1 1 n cco a i^ (yo) hgh x g g 9 •.
Aqui meteus escrieu aquestas : *uhnbsen:(zsrooadshccchxxp
olxavsihiarcoiliponsior.
26. Ad aquest meteus conjurament de sanc a estancar : Sans Acarias * fon
degolatz davan Taltar, el sanc de lui fon cais peira, et en aisi lo sanc d*aquest
onic sia fagt. In nomine Patris et Ft'Ui et Spiritu[s] Sancti. Amen, amen. Fi.
f. f. î.
27. Ad aicel cui lo sen vaireja «, escrieu aquestas letras c lia las li al col :
Malignitatz te gadzaignet 5, e nostre seiner Jhesu Crist te sanet, la Verge
niadona sancta Maria te salvei, m m a. r vos.
28. A enfantament ' mort, pren la sadriega? et ab la soa semensa trissa
la e do l'en ab vin a beure.
29. Ad aquest mezeus, pren lo suc de la vervena e da Tenab aiga freida
a beure, e de mantcnent sera deslieura[da].
30. A febres, coil la vervena dizen aiso : In nomine Patris et Filii et Spi-
rittis sancti^ amcn^ et ab una orazon domenegal*, e trisa la,e da Ten a beure
ab aiga benedicta.
31. A trastota febre escrieu aiso en carta vergée fai al febricitant .viiij.
dias sobre se portar *ihc 4- ihc 4- ihc ^ Soter ynos» adonai o.
32. A quarta[na] febre, pren .j. poma e trenqua la en très para^ et escrieu
en ella aquestz nom desobre [esjcrig ab .j. ferre agut, e pois da n'a manjar ab
pan al febricitant.
33. Encara per febre escrieu en carta verge e pen lo al col del febros, mas
non sia legiz, ne cant anara ad alcuna cauza non neta nol porte ab se : 7- Ego
sum alpha et <•> primm et (fol. 146) notnssintus^ initium et finis •*>, Dominus noster
JIm'Sus Cbristus,
34. Ung^ujentum a febre a tolre. Pren lo suc d'aquesta erba jusquiami, el
suc dcl api, el suc de la menta, el suc de la febrafuga, e mesclal a vinagre, e
d'aiso ung las gautas els piegs e las plantas e las mans totas, e gerra.
1. Cette reproduction est approximative: les/ notamment sont douteux.
2. [Zyjcarias}
5. Fiat, fiât, fiât.
4. Le prov. mod. vareja, « vaciller, chanceler » (Mistral).
5 . Cette notation par d^ se retrouve ailleurs ; voir la préface de Guillautne
de La Barre, p. Ixxvij.
6. Faut-il suppl. [d'enfant]}
7. Prov. mod. sadreio, v sarriette des champs » (Mistral).
8. Cf. Jorct, Les incantations botaniques^ dans Romania, XVII, 337.
9. Corr. v/o.v? Ce signe tient ici la place d'une croix cantonée de quatre
points qui ne peut être reproduite en typographie.
10. Apoc. I, 8, 17.
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 29 J
3$, A fcbrç% a sdn.ir cscrieti mso en qiiartd verge e îi;i la aî col Jel ft'broi :
Sieptmnui, Poriuriits^ Sanbucitts^ Duvttius^ Ei^tnitti, Gfiifiusd QHitiaiittsK —
A febrts (sukvui da kUrts). — A febres a sanar cicrien abo €ti -iij. osiia> : en
la prcmicira ^ ^u*i/ii /la/rr a ^/ *o Ti t^n b st;cuîidu o5tLi -r /*t//^ //'/'i r*Viî
CMi ^ , en b lersa ostia -r i^is Spirilus Samius rtmedium r ^^i t' î c pois da
n' a manjar al fchros una aprcs l'auira» c cani tous jij. las aura manjadas
wra gcrit-
36. A irastotas febreî. ts^ncu aiso en pur}a{a}niîn verge, e pausan sobre
|'*iutar dcMît/ \o calice e[n]craque très mesasi sien cantadas desohre : + on hna^
<mtî^ 0m t me, &mi, oftm^ am, 0nc, omi\ c puèb liai aJ col del febros. — hem, per
.viirj. dias, sobrt'l cap dcl febros, Quknmqm vhH * trastot cl premier dia, ,vuîj.
vcgadas, al segon .viïj, aî ters ,vij,, al quart »v[*, al sinquen dia .v. vegadas,
al sejen /t'dj., al seten Ji]., al oclien .ij*, al novcti *j. En aisi sera deslletireii
de trastota la febre.
37- A febrcs escrîeu aîso e pois lia al co! : Beahis Prtnts Tapostol jaiia
davan la porta de Galilea, e vcnc nostre scîncr Jhesu Crbt i e dis a lui : « O
Pcire» per que tu jajees aisi ? •> Sain Ptirc rçspt>n a lui : *= Seiner, car plens scï de
febrcs, » Nostre Seiner toquet lui, c de mantenvnt sain Pcire rornei sans, e
Nûstrc Sçinef (t«) dieîs a ïui ; « Peire, quai causa tu vols de me > o Sains
Pcirc dis ad cl : n Setner, qui aura aquesta paraula o la porta escricha non deu
avcr febres. » Nostre Scincr dis a lui : « Peire, sia fag aisi coni tu voîs -r » *.
Voici une recette qui, pour n*avoir rien de médical, n'en est
pas moins curieuse ;
38. (fol* 155) Si vols saber de Jj, ornes ques vol on combatre cal sera
vencutjî, pren la cera bencdicta *j. carga de .ij. sols s e depan las en doas
jiAru, de tal gisa que peso cascuna partida égal de .xij, d., e d'aqui fai .rj.
siris egaïment grans, e pausa aicel davanf .j. altar prop .]■ det d'espa/.i, et escri
en cascun del[s) siris lo nom d'aicel[sj que se volo combatre, et cNComprent
I . Cette formule se trouve, sous une Forme plus correcte, a la fin d*U5
traité des maladies des femmes en partie tiré du traite bien connu de Trotula,
que renferme le nis, B, N* lat, 7056, foK looff : Très guitiU ante accfsmnrm
bihat kicth rmtltrHi Ha ni ig^nord tjuid Nbt'ril (rien, dans ce qui précède, n'in-
dique le sujet delà phnisc). ikm Bugtnim^ Sttfûnus^ PorCAttitts {Porcnrius}),
Samhtitiiii, Dymfism, Gfksjm^ Biasius H Quitymm. Hec supfr iéptvkt. Il n'est
pas dît pour quelle maladie ce charme est recommandé^ mais les recettes qui
suivent se rapportent à la fièvre.
a. Début du symbole d'Aihanase,
î. On a en diverses bngues des formules du même genre, où figurent,
comme ici» Jésus et saint Pierre; seulement elles concernent le mal de dents
(R, Kôhler. KIntu're Schrijkn, 111, 545).
4, Voir la suite sur le ùvc similé. Il y a de bien bonnes recettes.
j. Soit 24 deniers-
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RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 295
amdos aicels siris egalmcnt. E quant los auras escomprezes • , e tu, scincr
Dieus, en dcmostra sobre nos la lo[a] miscricordia. Dcdaratio sermotium tuo-
rum ; da intellectum^ Domine. Gloria Patri et Filio et Spirittii Sartcto, ab Pater
noster ; et aisi com come[n]saran ad ardre, de mantcnent veiras aiccl que pre-
mieirament come[n]sara ad ardre enasprezira sas flamas si combaire si devo ;
si nos devon combatre, cremaran ambedui egalmen et en pas; e si se con-
baton, esgarda los siris entro en la fin, et aicel que preinieiranient sera cre-
matz signifîca lo vencui, et aicel que pois cremara longament significa lo vens-
cedor.
Fin (fol. 158 v°):
39. Si vols que blat non si afole% pren de la fenida î del porc niascle, que
non sia crestatz, ains l'apele om verre, petit o gran, e aquele fenida lia en un
drap e met la ins en l'arca o el granier o el sol, o la on lo blat sera, e non
s'afoUara blat tant co aco i sia.
40. Si vols escr amatz per femena, pren .j. meailla* viella e muella la en
cresma, e tota moillada met la e cera bezeneita $, e pois fai cantar .xiij. nies-
sas sobr* ella, e pois met la en ta boca e baia cella que tu amaras, e garda pois
que la cera ni la mezoUa non crem.
41. La dieta* es aitals : maninc^ carn de mouto e de gallinas e de perditz
1 . Lacune ? Ce qui suit est une incantation qui n*est pas annoncée, et dont
il se peut que le commencement soit omis.
2. Ms. sia foie,
3. Plus haut, fol. 119, il est question de « la fenida de la rata », puis,
fol. 150, de « la fenida las cabras «.Je ne connais pas ce mot.
4. Les mots atnati p.f. p. ./. tneaillu ont été grattés par un lecteur qui vou-
lait rendre cette précieuse recette inutilisable. — Raynouard (IV, 175, sous
MEDin.LA) enregistre meallki au sens de « moelle » avec un exemple tire de
B. de Bom (Un sifivntes on mot^ nonfalh), mais ce mot est entendu dans Pcdi-
tion de M. Ant. Thomas et dans la seconde édition de M. Stimming, au sens de
« maille », demi-denier. Cependant le sens de moelle ou de jaune d'ceuf
serait admissible, car plus bas notre texte porte meioUhi. On pourrait sup-
poser qu'ici meailld est une faute pour meoilla.
5. Pour hene^eita,
6. Je ne sais pas à quoi se rapporte cette prescription ; je ne pense pas que
ce soit à l'objet indique dans la recette qui précède.
• 7. On rencontre plus haut (fol. 152 v») maninge. Le subj. pr. manque (de
man^ar) est employé dans le poème de la Croisade albigeoise, v. 4641 (cf.
^liiaifûi, VII, 434). La forme plus ordinaire maniée se lit plus bas. Au fol.
1 50 yo se trouve le pi. maniggo : « Si vols que las abeillas not manii^go » ; au
fol. 151, Tind. pr. maninga : « e pois geta aicel lart ad .j. can, e sil imninga
l'om vieura. »
296 ' p. MEYER
e de cabrit c carn de porc qitc aja est^t /ij. dias en sa, et estenga ' se de cam
de vacâ e de carn de lebrt% e dt cam de conil manjc .j. petit, e mange siJvâgcs
du^else d^atjuels de Tai^a .j. ptcit; e manje sch^iicl jb U borjgc (/ïj/. i j^) e ab
lo fenol et ab Terebd cucg mange bledas * ,j, p^uc, Tavjs e lentîlUs c mil non
m^nc ges; »exer5 et amenks e rîs mange, ou^ cueg en aîga tnanje, lops f e
pieisos ah cscaraa et angulllas e pasarx * mange d'anguilas, c de bcstina î e de
rajada * se garde t: de peis sens escapa i ; ous de rajada pot ben manjar^ vin blanc
e %in cas tain ^ adagat beva, pan de frottten e be iresc manje, codons e milgra-
nas duQsati -^ e razims scecâ e Jigas secca!^ mange, datils niânje .j. paitc, e non
îna(njge cam ranstida, gingibri e safran e cardamonis e semcnsa de fenoil en
sas salsas; piment |iroflai beva, mel escumai mange. Si usât de jazer petit ab
femena tôt temps si a malegransa '^ et ab aîegrch ornes. Uze diasene ' ' en que
aja aur e musc et ambre, et aiso que sia tin*
42. Use aquestas pillolas contra malenco::!ia : prtn de lapis armcnius*' c de
lapis la^ulif de cascun egalmeni, e dos ait;ins de semé, e metes î u pauc de
masiec o del lu, et aquestas use pillas '^ .j. ves la setmana. Ab ta gauda manje
de pluis(?) o de diamargariton'^; e manje de safra e sos manjars, e gingibri
et anis cai^ît, cardamoni en derier; si aiso non prophieitava, fasa .j. cochura
lai on los àj. tes se joignon ; prena pois ab carn de porc *s fresca pas salât ab
eruga '* el raïs del rave ab met e scba cruza, ab que b raiitz *', e fasa rmiti-
rium ï^ de caotaridas, cant sera sazons.
i. Du verbe tsteufr sur lequel cf. ftww., XXI, aai
2, Emseî^ voir p. 281, n. j* — « BtEDO, poirée, bette, plante potagère »
(Mistral). Raynouard (11, 227), « blette 1» avec un ex, tiré de ÏHiucidati.
3 , Des loups de mer,
4, Corr, pastat^^
5, Je ne connais pas ce ttioi.
6, Raie (Raynouard et MisiraJ),
7, Je ne connais pas ce mot. On ne peut corriger ticamû, puisque le pois-
son à écailles est permis, *
8, Je ne sais ce que c*est que celte sorte de vin.
9, Pour dousas.
10, Corr, en ahgrama}
î t , • Dias<^ne en Diasenne », conlection dont le séné était la hase <Dor-
vcaUK. ÎJAniiéoî. NimUn).
il, Pierre d* Arménie* carbonate de cuivre (Dorveaux, VAnfiduL N<a>Lu).
15. Construction singulière : on attendrait ust jqttoias pitim.
t4. 4 Confection dont les d^ax sortes de perles éuient là base 1» (DarveauK,
VAniid, Xk.^ p. s8).
tj, Ms.pocr.
16. Chou-roquette, Brassica iruca L,
17. 11 doit manquer ici quelques mots,
18* Un cautère (De Cange, ructorium et RurroRttJM ; Bos» Gloss, de U
ChiruffU de Mondevîlle, RUPTotHE).
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 297
43. Ad refrigerendum lo postairol, acùpe stercus asine virgini mulieri cur-
gilla... »/flc sihi balneum et homini asini inveni ^
44. Si vois de vin trebol, aisi trcbol que no sia mudatz que aja perduda
sa sabor, far tornar bel e clar, prcn ad .j. sestier de vin .j. ou de galina, e
pren aquest idem < aitant vin cot voiras esclarzir, e ajas .j. escudela, e bat la
darael moiol e gita ins el vaisel del vin, et ab una verga e tu remena ins fort
aisi co sic « fazias piment, et asi $ o fai lo vespre el sera clars e bels Tende-
man, e sia ab la fes o ses la Tes. Empero, (t^) si esta va gaire que non si voges,
séria adeus agrès, ef^qui meteus va a fonsaquo del ou et esclarzis lo vin.
45. Si vols guérir de postema, pren la rusca de la radiz del amalin (?)
quant sera lavada de la terra, e co[s] la en aiga tan tro sia mola con pasta, e
pois frigis la ab saîn de porc e fai ne emplaust e pausa sobre la postema on
pus caut poiras, e tota la traira (bras, et aisso fai .j. ves lo jorn.
46. Si vols gerir de mal de cranc que nais en la niola ^ o en autre loc
dins la gola, fai cozer Terba que a nom basillas en aiga, e can sera ben coita
fai ne emplaust e liai defora aqui on sera lo mal tôt caudet, e ceras dins
.vij. jorn tôt gerit, mais .ij. ves aja del sanc del drago be mont et ab lo
det pausan desus lo mal dins la boca.
47. Si vols gerir de gota, ajas tartugas boscarencas, e fai las fort cozer, e
fai ne baig e baina te ins? .viiij. jorns, e las carns de las tartugas non
gietes jes del baig, ans las tenga[sj ab la ma aitan caut cant sofrir poira la
ont aura lo mal; et aisosai ieu aita cert con per son paire d*en Berenguier
Pallada, qu*es de Sancta Maria de la Mar, que jazia contrag e[l] lieg e non
s'en podia levar qui non Ten ievava ; e o sai per so fil que li fez far lo bain ; e
tota ora que las tartugas pusca aver pot far aquest bang, e si per aiso non
ger, bons meges er aquel quel ge[r]ra.
48. Si vols gerir de mala buba que ven en aisensa (?) pauc e pauc, prin
lili blanc, la foilla vert, e pisa la ab sain de balena, e fai ne emplaust e
pausa desus .ij. ves lo jorn, e seras geritz.
49. Ad aquest meteus, pren .j. gai jove e ten lo que non pusca tener la
1 . Ms. uaet avec signes d'abréviation sur Vu et sur IV (yerc^mynt ?). •
2. J'ai copié littéralement cette recette, évidemment corrompue et que je
ne sais comment restituer. Posiairol se comprend aisément, quoique non
relevé dans les dictioimaires. Inveni est écrit jueni avec abréviation sur le ; ;
corr. juveni ?
3. Je ne puis lire autre chose que id\ c'est-à-dire l'abréviation d'idem.
4. Corr. il?
5. Corr. e si 0 fai^.
6. On lirait aussi bien mola, mais cf. le prov. mod. nivouleto, niouleto,
luette (Mistral). Une autre forme, en prov. ancien, est leuîay voir le vocab.
de mon édition de Flatnenca.
7. Ms. 11115.
298 p. MEYER
soanatura mai sus en la buba, et adonxs logal remanra se fortmens, et après
tornara lo gai totz blancs, et adonxs tu l'en osta e neus» er meravilla
s'adonxs non mor lo gai, et ajas atretan tost .j. autre gai e fai atretal, et aise
te tant, si sofrir o pot, [tro] tota la buba n'ajatracha de radiz; mais enans que
acomens aja on:ies apareiilatz que tengo lo malaute per gran forsa, que
moût gran pena lies a sofrir. Hoc prohatum est .
50. Si vols gerier * de mala buba, pren .j. gavel de vitz viella^, e .j bel
sol escobat tu las croma e pren d*aquelas cenres et (Jol, 160) ab oli tu las
pasta, e pausan desus, e tota traira lan de razis mot' breument, e non li
durara » gaire d'afan, e vol ne pausar .ij. ves o .iij. lo jorn per refrescar, que
coic ♦ lorna per lo brac que tra, et hoc prohatum est.
51. Si vols gerier de roina, on que Tajas, o de rasca o d'esquintadura de
cara e de tota escorgadura, pren lo graujol \ que nais sus en las teulas de
de las maios c pisa lo, et ab aquel suc, cant Tauras calfat, que sera tebes,
destenipra alaquana e pausa la sus cant cera a fort* d*emplaust, et après .iij.
jorns levara s'en tôt lo mal, e géra, que sus non ferre ren dins aquels .iij.
jorns, e seratz geritz, que moût tort eisuga, et es de frejor.
52. Si vols que femna, cant a jagut ab orne, aja bel efant, cant se levara de
lieg on aura jagut om ab ela, si tant es que aja jagut consebut, gare se que
non encontre omc si bel oc, que si encontrava p[rijmieirament al levar del
lieg o dins sa cambra, o al eisir de sa cambra o de sa raaio o en ? qualque
luec lo priniier encontret ^ que trobara si era contrah e tortz, o de alcun mal
aip de faiso d'alcun de sos membres, aitals séria aquel efant. Item, si era
encargada d'efant feme et encontraria femna ab negun d'aquest mais aibs,
aitals séria aquel efan ; si encontrava bêla femna, bel efant feme aur[i]a. Et oc
custodiutit Saraceni,
53. Si vols gerir de tota corensa, prin .j. ola nova e met ins de pes qu'en
sia demieja, e fai la fort boillir, et ajas .j. sella traucada^, e mit la desotz,
e fai o de giza que tôt lo fum iesca per lo trauc, e fuman fort la natura, et
aquel fum totas las vcnas estreinera et escalfara, e seras geritz. Et oc proha-
tum est.
' I . Çjoxx. nous ?
2. Pour gerir. C'est de même qu'on trouve plusieurs fois, dans ce texte,
dormier, pour dormir.
3. Corr. donara}
4. Il y a bien coic, mais avec un signe d'abréviation sur l'i. Je ne sais pas
comment entendre ce mot; coit, cuit?
5. Ce ne peut pas être le glaieul (.Mistral, glaujol, cf. graujo) qui sûre-
ment ne pousse pas sur les toits ; ce doit être une espèce de mousse.
6. Corr. for.
7. O en, ms. om avec une barre sur Vm.
8. Corr. encontre}
9. Chaise percée; cf. le roman d'Esther, v. 92 (Rom., XXI, 206).
RECETTES MÉDICALES EN PROVENÇAL 299
54. Si vols farbcscueg e vols saber cant merma de .viiij. que de farin[a]
auras, .viij. que de bescueg, si ben es fag a razon.
55. Si vols far de vin mudat que sia franx e ben clars, prin dcl bo vin-
agre fort, que sia ben franx, e mit ne en lo mueg .iiij. sestiers, e de .ij. no si
cambiara mais. Fer aiso non pert sa sabor. Et hoc probatum tst.
56. Si vols vaisel de vin mudat adobar, que sia franx, pren sal c .ij.
aitans de cenres, et ajas .viiij. aitans d'aiga en .j. par, fai o boillir be e pois
met ins el vaisel e clau li be tôt sos traucs, e remena aquo ins per tôt, e pois
laisa Testar tro Tendema.
L*écriture du verso a été grattée, de telle sorte qu*on peut à
peine lire çà et là quelques mots. Au recto du feuillet suivant
(fol. 161) se lisent, de deux écritures différentes (fin du
xm* siècle) *, les trois formules qui suivent :
Ad furtum istam horationem scribe in cera benedicta, et claude in ea
argentuni vivum, et dorsuni ejus tange, et mox tibi cofitebita {corr. confite-
bitur) furtum. Hec est oratip : Horemus. Deus qui in monte dlvarie signum
santé crusii {corr. crucis) ostendisti, per Judam depreenssum, qui Judas tra-
didit filium tuum, demo[n]stra michi quidquit perdutum (m'c) habes, et die
per eundem doniinum nostrum Jhesum Christum filium tuum, qui tecum
vivit et régnât in unitate [cum] Spiritu Sancti (sic) Deus, per omnia secula
seculorum, Amen. Set siendum est quod oratio ista débet esscscripta super
cera.
Si vols guérir home de menazon, pren del lag de cabra blanca, et ajas lo ters
de vinagre, z fais Tenbeurc ganres ves lo jorn, e ren plus fort non est[r]eng,
z si esta j. petit, ades cera près aissi con formatgue.
Bevenda az ome nafrat per conoiser si deu guérir. Pren cauls vermeils,
tanarida betonica, cosouda major e menor, capillis Vencris nepta, semen
decarbe, de cascu lo pie ma, roza major, dos plenas mas, esia coii ab las dos
parts d*aigua, e la tcrsa de vi blanc, e coz a[n]tro veina a la mitât, e met i la
mitât de pie ma de Terba pilosella. Al nafrat dona a beure lo mati una copa
el vespre autra, entro que sia guerits ; e si gieta fora la premieira copa, deu
morir, e si la rete deu guérir.
J'aurais voulu joindre à ces extraits des observations gram-
rnaticales et un glossaire, mais la Romania est fort encombrée,
et il faut faire court.
Paul Meyer.
I. Les deux premières formules sont de la môme «ÎCriiure. L*écriture de la
troisième est différente. Aucune de ces deux écritures ne reparaît dans le
reste du manuscrit.
\
MÉLANGES
FR. SEMILLANT
L'adîccdf sémiHani gù aujourd'hui runique représentant
d'une famille autrelbîs nombreuse ; Taitcieniie langue avait en
ertet le vcrbi: semlUkr^ i^adjectif Jt'wi///e^ïiJ, et le substantif semilk^
pourvus de sens variés, sur lesquels nous allons revenir.
Quelle est Tétymologie de ces mots? DîeXj partant sans doute
de Tadjectif semillau^ veut le tirer d'une racine gaélique jimi,
« vif, légers* Mais cette racine nVxiste pas dans les langues
celtiques, si on en croit M. Bugge V; celui-ct panant proba-
blement du verbe, le dérive du latin •sub-miculare, qui,
ayant signifié d'abord a briller, étînceler u, aurait ensuite dési-
gné la vivacité des mouvements.
Cette étymologie soulève au moins deux objections : i** il
serait peu vraisemblable qu'un dérivé de micaresubsistât^ alors
que le simple n'a survécu dans aucune langue romane' ; 2° un
dérivé de mkatt se terminerait^ non en -Ulkr, mais en -tillin.
On comprend dune que les auteurs du Dictionnam général se
soient montrés sceptiques à Tégard de rbypoihèse de M* Buggc,
et qu'ils aient rangé sémillant parmi les mots « d'origine incon-
nue *>.
Il est pourtant une étymologie qui se présente d'elle-même,
A b suggestion de laquelle il est, si je puis dire, impossible
d'échapper si on Ht avec quelque attention rartîcle semilk du
1. RotmniUt IV^ ^oj. Le fait que cette famille ïi*est représentée qu*cn fran-
çais semblerait appuyer Thypotlièsc d'une étymologie celtique ; utils
M, Thumheyseii, cxceîleni jujçv en h matière, conteste aussi l'cKistcoCc de b
racine |raélique si m (KeltôrmtutthcJm^ p. 1 1 1 ).
2. M. Buggei il c»t vrai, dit le contraire, nm% mm ^Idguer aucun cïteniple*
FR. SÊMILLAST 3OI
Dictionnaire de M. Godefroy *. ^('w/V/f n*esi-il point le repré-
sentant rigoureusement phonétique d'un *scniinicula, qui
nous apparaît comme un dérivé possible de semen ' ? Si d'autre
part, on trouve attesté pour semille le sens de «semence»,
l'existence de ce dérivé ne sera-t-elle point rendue extrêmement'
vraisemblable ? Or c'est précisément ce que permet de constater
l'article auquel je viens de faire allusion'. Il s'y trouve deux
exemples où semille a le sens de « semenc* » ou de « race ».
Avons-nous affaire au sens propre ou au sens figuré ? C'est ce
qu'il est assez difficile de dire, et, aussi bien, ce qu'il importe
assez peu de savoir, l'un se dérivant, en français comme en
latin, immédiatement de l'autre^. La seule objection que l'on
pourrait faire à *seminïcula, au point de vue phonétique,
c'est qu'il devrait donner un dérivé en -eille. Mais aucune subs-
titution de suffixe n'est plus fréquente, peut-être, que celle
de -icula à -ïcula: que l'on songe à *vitîcula, *cratîcula,
*anatïcula. La difficulté est si mince que M. Thomas, dans
son article antille\ n'a même pas songé à la signaler.
La difficulté, en effet, n'est pas d'ordre phonétique, mais
d'ordre sémantique : elle consiste à trouver le pont qui nous
conduira sans effort du sens de « semence » aux diverses accep-
tions où sont pris ordinairement les mots semilleus, semille,
semilliery et que notre devoir est d'abord de préciser
Une « semille » dans la plupart des exemples cités par
Godefroy, c'est une idée, un caprice, une invention de l'esprit,
le plus souvent fâcheuse on perverse : Jean de Meun qualifie
de merveilleuse semille l'audace de Jason partant pour conquérir
la Toison d'Or^, d\'stran^e semille'h machination de la vieille
maudite qui introduit Myrrha dans le lit de son père '. Froissart
1. M. Godefroy a tort de faire deux articles de semille^ « malice, tour »
et « race ?». Nous allons montrer que cVst le même mot.
2. Comp. ge r m i n a r e, germer, 1 u m i n a r i a, himure et s e m i n a r e, semer.
3. Tous les exemples cités s;ins indication de source lui sont empruntés.
4. Cf. notre locution « mauvaise graine >>. Le passage de Vliscoufle cité par
Godefroy associe à semille le verbe iissemillier, « germer, se développer »,dont
il V a un autre ex. dans (îuillaume de Machaut.
$. Mélanges tVetymoh^'ie fruiiçiiise, p. 17.
6. Roman delà Rose, éd. Michel, v. 10262.
7. lbid.,\. 22195.
302 MÉLANGES
dira d'un personnage aux rases redoutables qu'il était çruels\
pkins de nitnmUmsfs scmillcs '. S'agit-il dans tous ces exemples
de la conception de Tesprit ou de l'acte qui en est la consC'-
queiice immédiate? Peu importe, ce me semble» Le substantif
y est, comme on le voit, précisé par une épithète. Il doit en
tae de même, A fortiori^ dans les exemples antérieurs, et c'est
en effet ce ^wt nous constatons dans ceux d'Etienne de Fou-
gères et du Reclus de MoLliens, où il est question de malts
semilUs. On voit que Tépithète est k plus souvent défavorable *.
On comprend donc que semiUcm ait aisément signifié « sujet
à de fkhcux caprite^. rusé, trompeur >i; c*est, à peu de chose
près, le zsX'JiJMfi'/Jiv^; d'Homère. Dans le Roman de Im Rose, h
Fortune est umiUemi^ un personnage antipathique tlespitem H
ffud scmUkus. Parfois aussi, il est vrai, le mot signifie simple-
ment « agitèj pétulant >j (sans doute 3 abord « désagréable par sa
pétulance ») : Martin le Franc dit que le vin a sur T homme des
effets divers suivant les tempéraments, qu'il rend les uns dûrmil-
knSj les autres jrmi7/*^/iJ : nous nous rapprochons singulièrement
ici du sens de notre sémillant (dont le premier exemple connu
est de 1564)*
Semtllier a naturellement tous les sens apparentés a ceux-là.
Il signifie simplement, dans le passage de G, Guiart die par
Godeiroy, « s'agiter»; nous le trouvons aussi dans Jean de
Meun avec celui de « s'ingénier « : tant mnilla por gms dis-
traindre^ est-il dit de Jupiter s'ingénîant pour nuire à Thuma-
nité ', Il s'agît donc bien ici, non plus de mouvements du corps,
i* A ccj exemples» on peut ajouter les suivants, que veut bien me fmimir
M, G. Paris : Se îrur tnfant fait trop mniUr^ -* Et |7 hatttf hasurt et HiU...
(Fahtfs m vtT§ du XHh tikk publiéts d*iiprh un mu de Chartres pstt Gfnitei|
lJ(upk¥îis|, p, éi ; cf il*U.^ p. 40: 7Vp/ï est comles €i mnitîius*
3- tA*pcî>dant à b fin du xiv^^sièck, Froîssan pu* ut encore parler des ttchît>
sfmiJifi de sa prcJtcctrict: h. a-iiK* éc Hjîiijui. Le mot paraît ctru svnonymc de
w bonnes^ actions» bonnes œuvrus u. Schcler (Poésies tU fr&itsstrt^ lll^, 401)
încline vi^rs le sens, suggCT^ par le contexte, mab, selon moi, trop précis, di:
• fondations picuseii ». Nous rvous rapprocherions ainsi dy sens printiuf de
^ttttin cl h survivance serait wurieuM: ; mais jt n*osc y croire,
V lui. Michel, v. 1 1068. CVsï un second ck. 4u mot. à joiiidre au stu\ que
citent Godcfrov et le Dkt, t:éit/rai. (Je m\tperçois au dernier moment qa*îî
a d^j^ i^le cité p^r Ro*|ucfon d aris son Gic^ssairt^}
I
I
THE CHANSON BV COMTE HHRNiaUÏN JOJ
mais d'une opération de resprif , t^ncendue dcins un sens nette-
mcni défavorable.
Revenons maintenant à notre question r commcTit ces sens
divers peuvent-ils s'être attachés ^i un dérivé de semcnPJe
suppose qu'il faut partir de semillîer^ sorti lui-même, comme
stmilleuSy de sanilk pris au sens propre» ei je m'explique tort
bien que ce mot ait été employé dans l'acception de " s*a|^iter »,
Et cela sans doute par Tintermédiaire d'une métaphore qu'au-
raient peut-être quelque peine h comprendre ceuK qui seraient
tout à fait étrangers aux choses des champs. Mais quiconque a
îamais plongé la main dans un sac de menue graine bien sèche,
de millet par exemple, ou même de blé (n'oublions pas que
nous partons d'un diminutif de se m en), quiconque a transvasé
de pareilles graines d'un récipient dans un autre est tout dis-
posé à admettre qu'un verbe tiré de *seminicula ait pu dési-
gner le mouvement vif^ pressé, d'un objet qui fuit entre les
doigts ei étincelle en fuyant. Le sens primitif de mniUkr serait
wn sens concret, sans rien de dépréciatif; puis on serait passé
de l'idée d'agitation matérielle à celle d'agitation de l'esprit :
^'est alors que se serait développée la nuance péjorative qui
infecta d'abord saniUkr^ seinillt'us; quant à smiiUc, après avoir
longtemps vécu dans son sens étymologique (de « semence,
lignée »), il aurait, lui aussi, souffert de cette contagion et fini
par désigner les caprices, les boutades d'un esprit sftfiilleus.
Si le lecteur trouve cette explication médiocre, je souhaite
qu'il rencontre mieux. Mais j'espère au moins qu'il acceptera
sans scrupules Téquation sf mille > *seminicula.
A. Jean ROY.
THE t:HANSQN DU COMTi: HERNIQUIN
In an erudite study of « La Mesnie Hellequin « published in
the Ëîutks Romanes déâtm à GasUm Paris (1891), M. Gaston
Raynaud remarks that our knowledge ot the lost CImusùh du
mute Utrmquin {Hclkquin)^ aliuded to in the thirteenth-cen-
cury poem on the capture of Neuville by the Flemings, would
be very imperfect but for an analysis of it preserved by Sir
Walter Scott : « Maïs nous jugerions împartaiïement de ce que
devait être ce puème^si, par un heureux h^isard, le résumé ne
Î04 MÉLANGES
nous en avait été conservé par Walter Scott dans les notes qu'il
a jointes à son ouvrage sur la poésie écossaise. Très amateur
d'anciens romans de chevalerie^ Walter Scott avait dû lire ce
poèmCj aujourd*hui perdu pour nous^ dans une traduction en
prose française ou dans une imitation anglaise, qui jus<)u'ici
n*a pas été retrouvée w (p, 6i). He adds : « r,e poème, venu
du Nord, passe en Normandie, puis en Angleterre, où, sous une
forme très abrégée, Walter Scott nous l'a conservé » (p. 63).
The passage in Scott runs as folio ws :
tr TIk' chitf of tins band [that is^ihe FamUia Helk^mmi] was original ly a
galbnt knight anJ warrior; bui, having spent hjs whole posstîssicins in the
service of iKe emperor, and boîng rewarded with ^orn* and abandoned ta
subordinate appression, lie became desperate, and, with liîs sons atîd folb-
wers, formcd a band of mbbers* After commirting many mvagrs, and defcâ-
ûng ail the forces sent againsi hitn» Hdlcquin, with his whole iroop, fdl
in â bloûdy engagement wiiîi the impérial hûst. Hb fornîcr good llfe was
supposed to savt; him from iittcr réprobation ; but he and his (ollowers were
condemned, after death, 10 a ^taie uf wanJering^ whfch sould endure tUl the
last day. Retaining their mîHîury habits» they were usually seen in the act
of justïng tûgeiher, or in similar warlike employments. See ihe anctent
French Romance of Rkhard sauT Peur '
Unforcunately M. Raynaud overlooked Scott 's référence to
the source from whîch he derived his account of the earthly
career of Count Hcllequin ; « See the ancien t French Romance
uf Rkhard sans Peur. » Scott did not draw the résumé which
appears so valuable to M* Raynaud from any old or myste-
rious source, whether French or English, but from chap, 11 of
the Hisknu de Rkhard sans Pmr as printed in La Bihiwîhêque
Bleue, eniièremmt rejondmj et coiisidérabkrmni augfmnîé^^ Liège,
1787, I> 14 ft. This becomes immediately obvious when we
compare the Englîsh summary with the chaptur in question.
The history of the chapier is curions, and at otKe deprives
Scott's words of ail theîr supposed significance with regard to
the lost cfmnson de gfsk In the sixtecnth-century prose romance
q{ Rkhard sans peur^, the folluwini; chapter cornes immediately
ï, M/wi^r/'^îj i^/ the ScûUUh Border, 2^ éd. iSo;, II, 194-J. The passage i*
noi m the fim cdition, (802 (see II, 1S6).
2, My statenients about the sixteeiitli-cemury prose roniance are Èi^sed on
ati édition of 1601 (in the Bibliothèque Nationale), which Dr, A. C. L. Brown
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THE CHANSON DU COMTE HERNIQUIN JOÎ
after that in whicli Richard finds u la mesgnie de Hellequin n
dancing in tlie forest :
Cjf se dmm de ia fmsgnie de Hdlfqmn, & qui il esiôii.
« On noirs disi rhistoîre qu'il fut un v^iillant cheualier en son temps, &
eut gninde lignée de sa semence. Ccstuy cheualicr Hellequin, en vnc guerre
que fit Charles Martel contre ki> Sarrazins, qui estoient entrez en Fr^mce,
despi^ndit tout son bien & et cheUiince a icf ux guerroyer, & niesniement il
vendit vn beau chasteâu qui siet en la Duché de Normandie pour fournir à
SCS affaires, tLllemeni qy*apres la guerre finie, luy qui n*auoît rien, il com-
mença a piller le peuple, luy ^ ceux de bon lignage commencèrent a guer-
royer &r ibrcer les gentilshommes, dames, & dimoiselles, &. prmdretii
leurs ctiasteayx, & ^ussî prindrent les héritages de plusieurs orphelins» dont
tout chacun demanda vengeance a Dîeu contre luy. A donc il aduint qu'il
mourut, & fut en danger d'estre damné, mais Dieu luy fîsi pardon, pour ce
quHl auoil b.uaillé contre les Sarra/iiis & exaucé la foy. Si fut condamné
de Dieu que pour vn temps déterminé luy & ceux de son lignage feroiem
pénitence, & iroicnt toute U nuîct parmi la terre pour leurs penîtetKes faire,
& endurer plusieurs maux & cala mitez, dont aduenoit qu*en allant parmy
le monde ils faîsoient plusieurs merueilles longues a racompter : & ainsi
endurerenï maintes peines et trauaux pour Ta ccom plisse ment de leur péni-
tence, & aucunes fois ils trou oient les gens par le chemin, & aussi Ifô
irouoit on en maintes formes, principalement eu dançant , comme fist le duc
Richard, «
In the fourteench-ccntury verse romimœ of Rkbard sam
Ptur thcre is ,ibsoliitely iiutliîng to correspond to [lie ch;ipter
just quoted, ahhough everythîng else th;it the siictcench ccntury
prose rotnance has to say about Richard's aventure with Hellc-
and Dr. R H. Fletcher hâve had the kindness to eîtamlne for me t L'His-
toire de Richard um Peur. Non u elle m eut rei^eu^ corrigé & imprimé a Lyon,
par Banhdemy Ancelin. 1601. For the verse-romance 1 bave used the
reprint of Crapelet, published by Silvtstre, Paris» 1ÏI58 {Rotnanî Jr Ricfîard^
etc.). The prose roniancc is reprinîcd by Le Koux de Lincy m the Xom^eik
BiMifHffèifuf Blette, 184^, p. S 1*96. He uses a la te copy and omits mosc of the
ehaptcr « Cy se deuise de la mesgnie de Hellequin u, and the whole of the
f0nawtttg chapter (« Commem Ktchard uns peur paria a Hellequin^ & des
dons que luy fit Hellequin »). He aiso omits two cliaptcrs which foHow the
advcnturc of the Appletree : « Comme RicharLl sans peur combatil un diable
qui esEoit entré au corps d'un excommunié »^ and « Comme un ange ik un
diabïe s^apparurent à Richard pour auoîr îuiement de Tame du moyne. » Ail
lïiese oniitted chapters, except the hrsi, are taken from the rominccin verse,
wilh slight changes in phraseology.
JOÔ MÉLANGES
quin is, with one trifling exception, mercly the poem turneJ
into prose *.
The whay in which tire prose romance treats the poem may
be seen by comparing the following passages :
, . au Jcuam 4e îuy vint vng sien escuier,
M.tis mori e^Kîît pa^s<? aiioyt vng an entkT.
CIa,int RicKart l'apperceut niouit s'aïlâ merudlitT,
Mais n*en eut point paour; auani Iuy demanda
Dont venoyi ne qu'il quicrt ne qui Pamena la
« G>mmeni! se dit Richart, ne fus tu pas pieça
Seneschal de ma court et moumt vng an a ? »>
Car il vcil passer par devant Iuy un sien esctiyer, lequel estoit trespa^sé i|
y moh un an tout aitier. Et quand le duc Richard sans peur le veit, il «i fut
moult csmerveillé : ce nonobstant il n'en eut point de pt?ur, mess très hardî-
ment lui demanda dont il vcnoit, ne qu'il qucToit, & aussi qui Tamenoit en
ce !icu-là : te Comment (dist-il) ne fus tu pas (il y a long temps) seneschal
de m'A cour, & mourus il y a un an passé?
Clearly, then, thîs chapter is a sixteenth-century fabrica-
tion. Yct even if it were genuîne, it woutd not afford us tlie
information about Hellequîn's career ihat we finJ in Scutî.
For this we nmst go to the eightecntli-century version in La
Bihlkyihêqu£ Bleue. Hère we hav^e a long account of Hellequin's
[\kj baseJ on the fevv vague statemenis of the sixteenth-cen-
tury prose. The additions in the Biblht})éijuf Bleut are of course
oi no valut. They are mcrely the embellishment^i of Je;m Castil-
bn, of the kind mentioned in the pnblisher s préface : « L'Au-
teur ne s'est pas contenté de les rajeunir» il a tâché de les
rendre dignes de toute sorte de lecteurs, en les refondant
enuèrement, et en y ajoutant des situation^ et des épisodes
nouveaux u (vol. U p- ^^\
Sir Watter Scott was early acquainted with Castillou's pipe-
clayed Bibliotbêqtu* Bleue of 1787, and there is a copy in hîs
library at Abbotsibrd',
G. L. KnTKEDGE.
i, The « prologue m of ihe édition of 1601 ends at follows :
i( Et ati^si qu'il leur plaise prendre k petit liure en gré. en ci>rfîgeâni le*
tautcs, si aucunes y sont trouuces, lequel a esté nouucîlcment translaté de
vieille rithtne en prose. »
2, fj. G, Cochranel Caiaï^w of y^v Uhmry ai Abhotifotd^ Eâinhnf^h,
i8^8, p. ï 12.
COMPTES RENDUS
iu\es PiRsos La langue des inscriptions latines de la
Gaule (Bibliothtjque de la Faculté de Philosophie et Leur es de l'Univer*
site de Li^e, fasc. XI); Bruxdliîs, igoi, tn-8, xvi-p8 pages.
Alb. Cârnoy. Le latin d'Espagne diaprés les inscriptions.
ïtîude phonctiquc et niorpholûj^ique ; première p;irtre : tWaîismf,, Louvaiii
IstaSj î^oa. ln*8, 119 pages (tirage à p^itx du Muséott, 11. s-, II, 1901),
yâi réuni ki les ûtres de ces deux ûuvr.iges^ bien *^ue le second soit Ina-
chevé '^c! j'en rapprocherai VHistûîre Je lalan^iu' roumaine de M* E>en5u|ianii '
(i,lîl, LtLatin^^^ 14-15. Inscriptions latines de la péninsule balkanique), parce
que lenr ptiblication simultanée pourrait marquer le début d'une série de
travaux nécessaire ; une collection de relevés des particularités linguistiqties
présentées par les inscriptions btlnes, relevés qui se répartiniient asseït naïu-
rvllctncnî suivant les grandes divisions du Corpus (sauf à remettre ù leur
pïâct géographique les imcriptionfn uniïqmmmat et» quand il y a lieu, Vimirn*
mtntum dùmeslkum) et qui en rempîaceraîent les index grammaticaux incom-
plets et trop sommaires. L*étar d*avancemeni du Cûtfin permettrait rétablisse-
ment immédiat d'un certain nombre de ces nouveaux index et Von peut espérer
que les autres n'auraient pas à attendre trop longtemps *. Ils nous renseigne-
raieail enfin d'une manière exacte sur le contenu granmiatîcal des inscriptions,
sur leur valeur, si discutée, pour la connaissance du développement latino-
ruman, peut-être aussi sur quelques problèmes posés par le latin vulgaire, celui
de Tunité du latin, par exemple ; du moins, si sur beaucoup de points ils ne
donnaient, comme je le crois, que des résultats négatifs, ils auraient lavan-
1 . M. Carnoy annonce la pubîication de la 2^ panîe de son travail dans le
Miofiïw et en tirage à part pour cette année,
2. Cf. Romania, XXX^ 1.13, et KXXÎ, 645
j. J'hésite a faire à M. Pirson un grief de ri*avûir pas attendu la publica-
tion intégrale du volume Xlll du Corpus; t\ a en effet recueilli ses maté-
rîatix aux mêmes sources où iront pujser les éditeurs de ce volume et, ce
semble^ sans en avoir négligé d'imponante. Il y auront cependant intérêt, en
^éral, à laisser le matériel épigraphique passer à Tépreuve des critiques du
Lùfpm avant de Tutiliser définitivement ; de plus un index, tel que je l'ima-
gine, devrait, pour inspirer et mériter confiance, être de vérification facile ; il
est difficile de se reportera vingt recueils. Enfin la disposition typographique
est assez délicate dans un travail de ce genre pour que la possibilité de
JOS COMPTES RENDUS
tagc de <Coupcr court aux travaux de dépouiIlcmc;nt que cïiaquc romaniste est
(oTCù de reprendre pour son compte pcrs^onnel» après tant de devanciers qui
n'ont pas tait connaître le bilan de leurs recherches, et par là ib éviteraient
pour favcnir un fâcheux gaspillage d'efforts.
Ces index devraient être dressC*s avec un ^in et une rigueur extrêmes, qui
manquent encore aux trob bons travaux cités plus haut. M. Densufîuno
s*cst seulement proposé de relever dans les inscriplions du troisième volume
du C0rpui> les particularités intéressantes pour l'histotre du roumain. Je
ne doute pas que son choix ait été bien fait et précédé de recherches
scrupuleuses, niais il es: trop évident que, pour être définîtifs et d'utilité
générale, nos indeit devraient être absolument complets On n'en devrait
même par exclure les fautes probables des lapicidcs : en effets telle graphie
à qui on prêterait d'abord ce caractère pourrait par la sukc, rapprochée
d autres, devenir âu contraire T indice d'un phénomène important. Je
regrette par exemple de n^tvoir pas trouvé dans le travail de M. Firson
les exemples de chute de r devant ti, mafusio (Pamans, an. 537; XIL
3193)1 TEstA (Tourdan, an, 565; XII, 2187), et peut-être matjas (Nar-
bonne, an. 541: XII, 5l4t) : il n'y a vu sans doute que de»* erreurs,
tnais on a donné récemment (Rumatita, XXIX, 60 ï) des deux premières
formes une interprétation toute différente, et il ne faut pas oublier que des
formes voisines se rencontrent ailleurs ^ Même pour les phénomènes
bien attestés on ne devrait pas se contenter de quelques exemples, mais les
donner tous ou du moins en établir la statistique et en indiquer la réparti-
tion géographique. Pour fe vocabulaire en particulier, i! me paraît însuiBsam
de noter surtout, comme Fa fait M, Pirson, les mots et les sens nouveaux, et
il y aurait lieu de relever tout ce qui n'est pas conforme k T usage classique,
et dont û importe de connaître Textension, même si Ton en possède des
exemples en dehors des inscriptions.
Il faudrait apporter une grande attention au classement des phénotnénes
dans ces index : four que la comparaison fût facile et complète entre Ici
diverses seciiotis du trésor épi|;raphîque, ce classement devrait être objectif,
fondé sur des caractères extérî(jurs et non sur rinterpréiiition plus ou moins
lointaine et variable des faits ; cela entraînerait sans doute A ranger un même
phénomène sous plusieurs rubriques, phonétique, syntaxe ou morphologie ;
peu importerait^ et d'ailleurs chaque auteuf donnerait, mais seulement en
supprimer des références compliquées et diverses entre tn li^nc de compte, —
Je profite de cette note pour annoncer Tapparition du 1*^' fascicule de la ;« pr-
tie du volume XI II : In^ripikmi's trium Gaîliarum ti GtrmumarHm ùntfummii
dûrmdîd collegerunl Otto Hirschteld et Caroîus Z;mgemeister, edidit Oscar
Bohn, 1901. — Il offre naturellement peu à glaner; jV ni relevé quelques
exemples de syncope et dVpenîhése et, sur des vases divers» mais qui
semblent de niéme origine gauîoise. des formes en -us et en -o» -onîs du
même ncmi Arrus, -o»-onis (iooio, (71 et 172), Miccius, -o» -onis
(luoto, lîjî gf, iîs6a).
i. Cf. Seelmann, Aussprajchr, jjo.
PiRSON, Langue iks imcr. îat. de la Gaule 309
seconde ligne et comttie accessoire, rinterprétaiion qui lui parait mit la plus
rcocivenable. L'on éviterait ainsi qu'un phcnoméiie pliorii-Hique ou lexical
passât inaperçu, t:onime cela peut se produire dans le travail de M, Pirson,
parce que Fauteur y a vu plutôt une modification morphologique ou une
liberté de style. Le classement devrait être très minutieux, groupant les
divers exemples d'un phénomène selon le^ conditions où il se produit :
structure interne des mots, entourage, place dans la phrase, eic* De
pltis il faudniit constituer autant que possible aux divers exemples leur état
civil ; date de finscrîption, ïieu d'origine, nature (funéraire* militaire, chré-
tienne^ métrique, imitée d'un modèle, etc.)i et même qualité» — car il
importe souvent de savoir si on a affaire à une inscription barbare, mais
soignée, ou au travail d'un ouvrier étourdi ou inimelît^eni. Enfin il serait
parfois mile de ne pas s'en tenir aux formes exceptionnelles, mais d*'in-
di<)uer au moins dans quel rapport elles sont avec les fornies normaks*
Nous hésiterons à voir dans PRArrEKEEKS (11, ^ajé) une forme intermé-
diaire cntfv praeteriens et 'praete retins, comme on Ta dit, si nous
savons que le graveur a liîen écrit fraetekiens quelques lignes plus haut, Ki
de même Topposition de toutes les inscriptions d'une région, à une certaine
époque, nous fera hésiter à attribuer une grande importance à un exemple
unique d'un phénomène.
CLes index, tels que je les conçois, seraient tort longs à établir et le tra-
vail, tout objectif, assez ingrat. Je ne doute pas cependant qu'ils soient réali-
sables et le premier fascicule de Tétude de M. Camoy pourrait en fournir
une preuve* C*est un travail très soigneux et complet, auquel un dépouille-
ment atitérieur des inscriptions d'Espagne ne me pentiet d'ajouter rien d Im-
partant. Les phénomènes y sont en général bien classés; pourtant il y
aurait là quelque peu à reprendre : il est peut-être légitime de voir dans DtE-
NENSis (tl, 3115} pour Di an en si s un fait d assimilation, mais on peut y
voir autre chose et par exemple une influence du J (di) initial; dés lors je
voudrais trouver ce phénomène staus la rubrique chmgfment de A en E en
mène temps qu'au chapitre de rassimilation. M. C. ne s*est pas non plus
sutlisamment astreint à observer la règle* qu'il s'était fixée lui-même, de don-
ïKr d abord tous les exemples avant de les interpréter : cela rend en
ines parties de son travailj les recherches asseje difficiles. Par contre ses
■exemples sont munis de tous les renseignements nécessaires à Testlmation
de leur valeur et sur ce point Ïl* travail est irrcprochabie. Pour rinterprétation
des phénomènes, jai quelque peine à voir dam fie et pour fecit !a preuve
que V\ final de feci avait déjà agi sur ê tonique au début du iit^ siècle (p. Jj; ;
je ne vois pas pourquoi ae pour è a ta finale des adverbes (p. 75) parait peu
sur à M. C, Jes e:teraples en sont répandus un peu partout ^
I. Je signale k M. C. deux expressions A éviter : (mr; bien Ae (p, 76 et
108) pour un dï^f^ grantf tmmbrf *ie^ et dt htn devant un superlatif pour de
btûucoup (p, 70).
îro COMPTES RENDUS
Le tovail de M, Pirson pourrait être compîéit' sur quelques points : chute
dv r devant n ; — 3phérèsi;% spanilia(XJI» 488); — di&similauon* pei.eger
fcf. Le BL 6s6 et ,V* H, 2^2); — dédinai&on, hos ADïTosfXJt, 499), ctc,
— Je note îd que j'ai vainement cherché dans k îivre de M, P. la forme sim,
que M. Mohl (RofftanÙi, KXIX, 604) a rapprochée du fr. as, maîs je ne croiiipas
quMJ y ait la unu lacune dans le dépouillemeni de M. P. : il faut, bien
entendu, ne pm tenir compte de l'inscription 56$ de Le Blani (Coudes»
Vl^ S!è:k% XIIL isîo)oû on lit Tix, exemple de numérotatton n&ti^grade z^
XViK — M, F. aurait dû être p!us large dans son étude du vocabubire :
âdjutarç (XIIÏ, 906), adoîesccns (enfant de tjuatn ans, Le Bl., N, M.^
wé), concomis, (Xllli 2^99), decesepte (Le Bl.^ ,V. R.^ 2) et autres
mots (cf. pour quelques-tms Le Blant, Retufil, préface, cxïx), ^ni asîtejt
rarts pour mériter une mention. Le classement n*est pas asse^ rigourcuit
tt dé|jend trop de Tinte rpréut ion des phénomènes propre à Tauteur.
Pourquoi t pour e dans TRis = tret» esi-tl rangé dans les modifications
morpho briques (p. 119)? Pourquoi remploi si curieux de face re pour
Tex pression des dates (facit J an u a ri us dies tôt) dans les inscriptions
chrétiennes manque- t-il au chapitre du P'ûc^kikin et est-iJ rd^ué h la fin de
la stylistique (p. ^16)? etc. L'interprétatioti des faits^ juste eo général, est
parfois bien hardie : à Texplication du maintien de quadriiviuin par It^
formes contractées qu ad ru vis où u serait normal (en latin ou en roman?),
je préfère encore Thypothése d'une influence de quatuor; il me paraît
diljicile de voir dans CAtLVi pour calvt(i) la preuve d'une mouillure de l
(p. 76); vntsisrr est-il bien uti parfait en si et non une dittographie (p. ij i)
et faut-iï décidément accorder à FtFJtiA plus d*importance qu'à fililiae ou
A VEVENES (-= vanh) et en faire Tancétre du diminutif^;ï/l(f?*
Il y a dans Texposé de M. Pirson trop de formules inexactes et trom-
peuses ; l'expression langne^inère tt iangim-fUîti (p. 10a) devrait être bannie;
Ja distinction entre !e fait ^aphique et le phénomène linguistique qu^il repré-
sente est trop facilement oubliée dans des phrases comme celJes<i ; k îtn-
dançt de t â poi^trà i s'est accentuée (p. 2); - [e pour ï à l'atone] constitue
un des traits caractéristiques de la tan^ttt latine des v* et vt« stccles ; — la
knguivul^am recourait au sifftn' de i aspiration,., pour supprimer Thiatus â
rintéricur d'un mot, ei : dagnihil (p. 82); — certains vocabk s... prennent
â Taccusatif pluriel la désinence is au lieu de es (p. 118), etc. Ce sont li
d'aiiïeurs cririques de détail qui n'ètcnt pas beaucoup au livnc de M. P., dcs-
1. Je signale à ce propos la dissertation de M, Léo Sommer^ Di fr^tlhni
fl aphatrtii e j^îossûriîs l^inis iîhisirandis^ léna, 190O-
2. Il y a dans le travail de M Pirson quelques pages un peu confuses,
mais intéressantes, sur rélargissement des thèmes dans la déclinaison des
substantifs féminins au moyen de n. M. Pirson ne connaissait pas encore k
travail de M. Phîlipon sur les accusatifs en -mt, ^in, et, s'il n'a pas vu la
question aussi largement que ce dernier, il fiut reconnaître qu'il s*€Sl appro*
ché de la solution « Mab rhypothése d'aune origine grecque était peu probable.
CARNOY, Le latin if Espagne d\iprè$ la imcrîpikms ) 1 1
ûné â rendre des services, ^inon il servir en tout de modèle aux mivaux
futurs sur le liitin C'pigraphique,
MM. Camoy, Detiiitî^ianu et Pirson se sont pose tous les trois la question
des dttïerences locales du ladn. M. Densuçianu est très net dans sa réponse:
le tome 111 du Corpm ne lui a montré w que des faits connus et qui se
retrouvent plus ou moins souvent dans les inscriptions des autres provinces
romaines... Seuls quelques mots d'origine grecque apparaisseni ici j>our b
première fois ouplu.*ï souvent qu'ailleurs ï>. Conclusion semblable chez M, Pir-
son : « Une foule de particularités qu'on serait tout d'abord tenté de cori-
sidérer comme spéciales à une province se retrouvent dans les textes prove-
nant d'autres régions. D'autre part les traits qui restetu isolés après la com-
paraison trahissent des altérations d'un caractère si général t|u*il serait très
liasardeux d'y reconnaître des différences locales, w M. Çarnoy n^^ pas encore
né sa réponse déïinitive à la question, mais il a, chemin faisant, indiqué,
dès la pamiére partie de son travail» quelques traits du latin des inscriptions
d'Espagne ou Ton pourrait voir des hispanismes ; il n'a d'ailleurs présenté
CCS hypothèses qu'avec les réserves nécessaires : nous avons déjà exprimé
des doutes sur la valeur de ficet qui se trouve un |>eu partout; de même k
changement de écn i devant palatale (p. 29)poun:att bien être un indice de
la fermeture de i*e dans cette position» teîle que l'espaguol la présente^ s*i! nV
en avait pas d'exemples dans les pays où t est resté ouvert- M. C- remar(|ue
que la graphie e pour ï en hiatus se présente surtout dans le nord de la Lusi-
tanJe» et» dans cette région, beaucoup plus fréquemment que i pour e en
libtus» ce qui rendrait ditticile l'cîtphcation du premier phénomène par Tépel
inverse : une prononciation ouverte de î étant vraisemblable en celtique et en
ibérique, nous aurions dans les inscriptions lusitaniennes une trace de ce
vocalisme; mais nous remarquerons, avec M. C, que les exemples du
phénomène en question appartiennent à des noms propres non latins^ où
(lous ignorons si e représente i ou tout autre son, et qui ne peuvent en tout
cas rien prouver pour les modifications locales du latin importé* Les ins-
criptions du nord et du centre de l'Eispagne ne présentent pas d'exemples
de confusion de o - u A la finale» nV a-t-il paj. là quelque indice du main-
tien de b distinction en asturicn ? mais les exemples sûrs, très tiombreux
dans d'autres pays, sont très rares même dans les autres régions de l'Es-
pagne, ce qui diminue la valeur de la remarque. Enfin M, C. signale (p. 62)
octuber comme l'ancêtre de Ta. esp. otuhrty ptg. oiituhte^ mais i;n recon-
naissant que cette graphie n'est pas inconnue ailleurs: i^l aurait dû dire quelle
est en particulier plus fréquente en Gaule qu'en Espagne. Si bien que notre
conclusion sera la même pour le travail de M. C. que pour ceuît de
MM. Pirson ou Dcnsu^ianu : s'il a existé des dialectes du btin parlé, les
inscriptions ne nous permettent jusqu'ici d'en saisir aucune trace *.
Mario RoauES.
j . Exception faite peut-être pour le vocabulaire.
ÎI2
COMPTES RENDUS
Les suffixes toponymiques dans les langues française et
provençale. Prt^mitTc partie : dévdoppcmeni des suffisei a n u s ^
-irrys, -eiisis*.. par Isak Coixijs, Upsal, Alrnqwit* 1902. Ia-8. iio-3tl
p. (ihè^é pour le doctoral).
Les romatiisies suédois nous ont dè|â donné plus d*urî inieressant travail
sur la topoiïymîtf française ; celui de R, Collijn vient s'y ajouter. It est fait
avec conscience et savoir, mais Fauteur, bien qull m parfaitemeni le sens
delà méthode -historique, ne s*y astreint pas assez. Par « sufHxes topony-
miques » il entend leii suffixes à Taîde desquels on tire d'un nom de lieu au
de pays soit celui du district dont le lieu est le centre, soit celui des habi-
tants du lieu ou du pays. Or les noms de cette dernière catégorie sont très
rares dans T ancien ne langue^ où les villes ou régions très importantes ont
seules produit des nonas dèsigmni leurs habitants ; pour les autres, — ei
même très souvent pour celles-là. — on disait d'ordinaire simplement : cih
crm de (Mantes, Brie, etc). Aussi presque (ous les noms qu'on a éprouvé,
— dans des milieux lettres bien plus quti populaires, — le besoin de forme t
à Tépoque moderne sont-ils de création purement savante , reposam sou*
vent sur den étymologics erronées et (Quelquefois extravagantes. L*étude de
leur formation serait une curiosité plutôt qu'une recherche vraiment scienti-
ûque. Il aurait fallu, pour traiter le sujet qu'avait en vue M C, suivre danj
le cours des siècles l'apparition successive des noms en question^ et soigneuse-
ment séparer ceux qui se présentent diins les textes vraiment populaires de ceu3t
qui n*apparaissent que dans des documents d'un caractère visiblement savant.
Pour avoir entassé péîe-méle les formations anciennes et modernes, M. C. a
enlevé à son travail, au moins en bonne partie» Tintérét historique et phîloso^
phique qu'il aurait pu avoir. Il donne par exemple en une même liste (p. 15)
comme dérivés populaires en -nin des noms de toute antiquité conmic
cljaritiin (il ne cite que diartrain^ qui est postérieur) et higufi-mortmn^ tout
récent, loirain (de Loirtf^ département l)» bellifùtitaitt (de Fûitùiint'hHaui com*
pris comme Fontaine belle rtJw, etc.)* Il ne suffit pas de dire ensuite que
fc quelques-uns de ces mots sont formés d'une manière plus ou moins irré-
gulière, même savante w; il fallaît en fairt des cat^ories distinctes. Ailleurs
(p. 22), a propos de la forme grotesque mtmipontm ou tNtusipûtJktin (de
Pont-à-Mousson), l'auteur remarque gravement que w la forme pmvcnçile
est mmsipùniitMi i>, comme si le provcnijal pouvait posséder un noiu pour les
habitants de Poni-à-Mousson î Ou bien encore (p. 26), en opposant c^iàn
(de Sceaux), Jux/m (de Foix), comme u de formation savante » A sc/tft (de
Sceauît), ayeen (d'Aï), Jonta'mehlè^n (de Fontainebleau), il semble admettre que
ceux-ci sont de formation populaire. — Cela n'empêcfie pas qu'il n'y ait de
fort bonne choses dans le livre de M. C, et que la liste même des fortnattoûs
qu*î) a patiemment recueilliçs (où ? on voudrait souvent le savoir) ne soft
assez curieuse. L'auteur connaît bieti les tejttes anciens, bien qu'il n'en ait pas
ZENKER, Die Lieder Peirfs von Auvngm ji}
(kit à notre avis Tusagc qullî» comportaient La polfimique contre I explication
par Tacc. fèm. des noms de rivières en nm^ -ttht, -mi (p. ij) n*cst pas con-
vaincintc, m*ib mérite d*étre lue. Parisk (p. Jo6) peut bien équivaloir ii Pari-
ii/ et représenter (ainsi que Parhi, p. ta$) Pârisiàcuii, Gâvrai, dans Ui
Manche (p. 29), n'es* pis » sur le territoire brçton ». Pourquoi les dérivés
î^fvrrim, stigieit, spatttticim, vèiavien etc. auraient -ils (p, 43) « un sens plus ou
moins plaisant »? G. P.
R. Zenkeb. Die Lieder Felres von Auvergne, kritiscJi
herausge^eben mit EîBleituog, Uebersetzung, Kom-
mentar und Glossar. Lrbngen, Junge, 1900. In-8^^ s-266 p*
(Extrait des Uomanisàye Forschungtn^ t. XU),
Cette édition» pour ïaquelle M. Zcnker n'a évidemmem pas ménagé ^
peine, est égaîement soignée, sinon également réussie, dans toutes ses par-
ties. L*une des meilleures me paraît être Tintroduction (bien qu*on puisse
lui reprocher d'Être un peu diffuse et non exemple de répétitions). Eîle
comprend quatre chapitres: dans le premier (p. i*i6)» Tai^teur discute diverses
questions d'authenticité et il écarte, pour des raisons qui m^om paru très
solides, six pièces, quil a d*ai Heurs imprimées (mais non traduites) en
appendice; puis il réunit (p. 16-40) tout ce qu'il est possible de savoir ou
permis de deviner sur la vie du poète^ et étudie ses ceuvres au point de vue
littéraire (p. 40-66) et métrique (p. 66-78). Pour la biographie, M. Z.
a tiré des textes tout ce qu'ils pouvaient donner; ce n'est vraiment pas sa
faute si quelques-uns des plus importants a cet égard sont précisément des
plus difficiles à interpréter* Il est fâcheux toutefois que ces intéressantes pages
soient déparées (vov^ p. î8, 39, 58) par une grave erreur, reposant sur un
contresens : M. Z, attribue en effet ;i Peire d'Auvergne de nombreux
cupbits guerriers sur la foi d'un vers (iîl, 23) qui îtignt fie tout autre chose'.
L'étude littéraire témoigne de beaucoup de fuiessc et de godt, et M. Z. y a
fait preuve (ainsi que dans son commentaire) d'une rare connaissance de la
lyrique proveni;ale, surttuit dans sa plus ancienne période; j'y signalerai
notamment la traduction et le commentaire du curieux sirvcntês de Bcr-
Marti contre Peire d'Auvergne, et les pages consacrées à la comparaison
ttlre celui-ci et son modèle Marcabrun. Uétude métrique n*est guère^
comme on pouvait s'y attendre, qu'une statistique. M. Z. a raison de faire
resioftir chci: le poète la recherche de ralljtératîon, qui est évidente; mais
il a eu tort de citer des exemples oix la rencontre <;^t certainement fortuite :
il va jusqu'à noter rident tté entre une consonne initiale et une consonne
dans le corps d'un mot : iah, taiurs \ csf\mvar^ Cûntra. A ce compte, iJ
t. La fjute a déjà été rcïevétî par M. Schulu-Gora (Liirraturtktt, 1902,
col 7î).
fXJ^ COMPTES RENDUS
tî'esi pas une pmposuiun cjui ne présente un on plusieurs esctnplci d'alli-
tération... N'y a-t-îl pas» dans la phrase même Cjue je viens d'écrire, sans y
mettre le miindre jrtifici;, quatre/» il Tmitiali;?
La constuuuon du texte, je regreiie d'avoir à k dire, ne mérite pas les
nièraes éloges. Je ne reprocherai pas à M, Z. de ne pa! avoir tout compris :
il faut bien reconnalîre que Peire d* Auvergne est, avec Marcâbrun et
Rambaut d'Orange» un des plus redoutables représentants du irobar
dm; beaucoup de passages m'embarrassent autant, et même, comme
on le verra, plus que M. Z., et je crains bien que ces énigmes ne
résistent longtemps encore S la sagacité des plus expert^ provençilistes ' ;
je regrette bien plutôt que M. 7,. jit passé auprès de véritables di flic ut tés
sans pamître les soup^^onner, sans le^ signaler dti moins» et, d'autre part»
quMl n\iJi pas réussi A comprendre des passages d'une très moyenne difficulté,^
Ces deux reproches sera rem, je crois, justifiés par une étude complète de
Tédition, Je ne puis entreprendre cette étude, qui exigerait beaucoup de
temps; je me bornerai, comme l'a déjà fait M, Coulet\ à Tcxamen de deux
pièces. Je choisie îa quatrième des chansons d'amour (les deux premières
ayant été cxaraiïjécs par M. Coulet ci la troisième n'étant pour moi qu'un
rébus) et la seconde des pièces religieuses (XV t dans l'édition), k première
ayant déjà été publiée par M. Appel ï.
IV, ï) t. ïq^kï vol qu'oui se cipteahii
St-gon qu'cl poi semprcs fiire,
Q^reii breu temps plus isijrotiîi.
Qu'a pm d'iJsio don ac fam.
M. Z. voit dans st^if^ le sujet de tous les verbes des vers 1 4*16 ; ^«ssî ne
faut- il pas s'étonner que sa traduction n'ah pas grand sens. A mon avis (et je
vois que cet avis est aussi celui de M. SchultK-Gora) le sujet de /^i et deofest
ûm, et celui damit^ûfia (pris au sens iniransitif) est joh (v. 12); de plus je ne
comprends pas les vers i^-ié, et je propose, fort dubitativement d'ailleurs,
de lire au vers 15, avec I, au lieu de brrii, bm (K briu^ ou de corriger ce
mot en hrau; te mot hrtu a pu L-tre amené indépendamment dans deux
groupes de manuscrits, par h fréquence de la locution en breu temps ; au
î. Cenajncs pièces, h troisième par exemple, sont tellement obscures que
M. Z eût mieux fait, a mon âvis, de reproduire simplement le texte des
manuscriïs ; le lecteur n'y eût pas perdu pjrand' chose, et il eût été dans de
meilleures conditions pour en tenter a son tour I.1 reconstruction.
2. Artttahi du Midi, XIV, ^74.
î. J'avais écrit ce compte rendu en vacances, sans avoir sous les yeux celui
de M. Schultj:-Gora. J'ai reconnu après coup (cette constatation ne peut du
reste que me flatter) que sur plusieurs points, je m'étais rencontré avec lui*
Je supprime naturellement les observations qui K^raient double emploi, mais je
conserve celles ou je me sépare sur quelques points de détail de mon savant
collègue, et celles aussi ou il me semble que j'ai ajouté quelque chose à ses
remarques.
ZENKER, Die Lieder Peires von Auvergne 315
vers 16 je lirais avec le groupe)', ab. Je comprendrais : « Le monde veut
qu'un homme se conduise de son mieux (même dans l'adversité), car la joie
mûrit plus vite par un temps contraire qu'avec ce dont il (Phomme) eut le
plus grand désir v (â savoir les encouragements de sa dame).
25 Moût fai ves mi gran temensa
Car tan pauc si abandona ;
Jois qu^enaisi trop bistcnsa
Moût mostra mal 'entressenha.
M. Z. traduit : « Ma dame fait preuve à mon égard de trop de timidité en
se montrant si réservée ; joie qui hésite si longtemps manifeste de fâcheux
signes. » Cette traduction, quoiqu'elle soit (ou par ce qu'elle est) très litté-
rale, n'est ni claire ni exacte. Je comprendrais : « Ma dame m'inspire de
grandes craintes (en lisant, avec x , mi fai grandà), en se montrant si
réservée : joie (la joie espérée par le poète, le succès) qui rencontre (Jrob de
irchar) de telles hésitations présente des signes fâcheux » (c'est-à-dire j'ai
bien peu de chances de réussite).
Il y a du reste entre ces vers et ceux qui les précèdent d'une part, ceux
qui les suivent de Fautre, une contradiction que M. Z. eût dû signaler : le
poète avait reconnu (v. 23-4) que sa dame faisait déjà beaucoup en lui
adressant la parole et en tolérant ses hommages ; puis brusquement il se
plaint que ce ne soit pas assez et n'aperçoit plus que de médiocres chances
de succès ; enfin, passant encore une fois de la plainte à la résignation (v. 32)
W poursuit : « Mais qu'elle me traite comme il lui plaît, car (M. Z. traduit
â tort ce que par « quoique ») elle ne me fait point tant souffrir; ses liens ne
?5ont pas tellement lourds : aussi suis-je celui qui ne veut pas l'accuser. »
Je ne puis résoudre cette contradiction et incline à croire que ces brusques
sautes d'idées sont voulues et font partie des procédés du poète.
Il y a entre les deux parties de la strophe suivante une difficulté toute
pareille. Je traduis la traduction de M. Z. : « Sans avoir péché, j'ai fait péni-
tence et il est inju5te qu'elle me refuse l'absolution; depuis longtemps je
l'implore (cette absolution); j'aurai encore à souffrir longtemps (le texte dit
plus énergiquement : assat^ cttig qtie mal m*en prenha)^ car il est perdu celui
^ui désespère ; voilà pourquoi j'ai bon espoir et j'implore votre don. » Qui
ne voit que le car souligné fait à cette place un véritable contresens?
Néanmoins ni dans la traduction ni dans le commentaire M. Z. ne signale
la difficulté." Faut-il prendre assati au sens de « trop » et comprendre : « Assez
[et trop], j'ai cru que mal m'en viendrait : [je préfère espérer], car... »? —
Le vers 40 est bien plat et je le comprendrais tout autrement : don est, à
mon avis, non donum, mais dominum, et je lirais, non rostre, qui n'est que
dans A B, mais nosire (j'ai lu nostre dans E) et comprendrais : « Je fais appel
à Notre-Seigneur qui a condamné le désespoir. » S'il n'y a pas dans l'Évan-
gile de verset qui puisse être allégué ici, la condamnation du désespoir, se
dégage d'une foule de passages.
^
3l6 COMPTES RENDUS
On voit que J*étude de ccitu pitct: a surtout justifuS le premier Je mes
reproches; cdli: du m 16 montpcra, je l'cspCTC. que Je second est égatcrocm
fonâù.
V. ti, La leçon âdopt(.^e : d^mtra^ufai athlr asi fKU* intelligible ; ï) est
rcmart|uablc du reste que V seul donne le d initial {duniracufat}; contriire-
meïît à M. Schultz-Gom qui adopte la leçon isolée de R {ïoiraauiat âaîbir)^
je lirais t H oitîroiujat aîhir et comprendrais ; « les esprits présomptueux ».
— 14. L expression mîar dt gahp aut^ÏI eu grand besoin d'un commentaire
explicatif.
16- ï 7. M. 5khuU^-Gora a parfartement compris ces vers : « Rail]€ric et
Outrecuidance, si parfois elles croissent, poussent en feuilles, ne fleurissent
jamais. i> Mais i! paraît avoir renoncé il traduire la fin de la strophe, bien
qu*il ait identifié wVmoi/, confondu par M* Z. avec nausmt. C'est qu*cn effet
il faut résolument tvarter îraitof\ qui donne du reste une syîlabe de trop» et
lire avec Va (représentant deux tarnilles) rinhador \ Le sens est c'est un
jardin d'une bien Qcheuse espèce (je traduis approxiniativement resptit] que
celui où rien ne pousse, « et tel que tous ceux qui y entrent en sonent boi-
teux B, — 27. Je lirais k)caii (^ k)C4t H) avec T«î. — Le vers ^t* est tra-
duit à contresens : w Tl devrait souvenir à quiconque ne serait pas insettse.., »
— La strophe VI est ainsi traduite : « Il devraîï bien penser â la mort, celui
qui regarde en face le crucifix et voit comment Dieu, pour nous sauver, soulTrit
ta mort, et comment il la tua en se laissant crucifier pour nous. Nous motif-
ronstous, car notre richesse ne nous protégera pas plus que la sienne n*a pro-
tégé JoK rt On voit combien le raisonnement est incohérent : c'est que M. Z.,
égaré par une expression fréquemment appliquée en eriTcî à Jésus-Christ, D*a
pas compris les vers ^9-40 : ils signilîeni au contraire : « Puisque la mort a
frappé celui-liî même qui se fit crucifier pour nous, comment hésiter i croire
que nous mourrons aussi f* li II faut modifier la ponctuation, mettre un point
et une virgule après tmri (î9) et une virgule après cr^ji* (41). — Au vers 41
ff(?« (donné par Ed + V) fournirait un meilleur sens que nnus. — 53, Ganît
serait une l\»rme iiicorrecti: du subjorïCtif : corriger t^uf nm f^urî (le ^-ers n'est
du reste (sous celte lorme^ que dans V).
A. Jeakroy*
\. La bonne leçon est h peine ahénée par T Otm trmdor)\ C R manquent ,
H trsA donc seul a donner îi tfmiùt. — Au vers i6 on est tout étonné de trou-
ver une variante de C, alors que la strophe manque dans ce manuscrit.
HASSAU NOORDEwiER, BcoordeeUfig van den WilkMm 517
BiJ cirage tôt de Beoordeellng van den Will^halm. ProcU
schrilt der verknjging van den graad van Doctor in de Nedcriandschc
Lutierkun4ie, a^n de Rijks-Umversiteii lu Groiiingen door Joh;inna
Haùz Nassau Noordewier, Te Delfi bij P. 1. Koumans, 1901. In 8**,
128 p.
L'auteur de cette petite thèse hollandaîse (qui a été présentée à la Facuïté
des lettres de l 'Université de Groniiigue) s^est imposa la tâche ♦ assez ingrate
du reste, dex^imincr de nouvi*au et a fond trois dos questions multiples que
soulève une lecture minutieuse du tVUlfimhn : c*est à savoir i^ si Wolfram
d'Kschenbach, en composant sa paraphrase poétique lïAUscans^ a connu et
utilisai d'autres branches du vaste cycle de GuîflaunK d*Orange; lo si la
rC*daction fraii^^aise dont il s'est servi, est. ou non, identique avec ime de
celles qui i50us ont \L\é conservées; y* si le WiUthdlm est resté inachevé*
En se posant une lois de plus k question de savoir si Wolfram a été au
couont des panies essentielles de la biographie poétique de Guîlbunie
'd'Orange, M^^* N. N. s'est rangée A ropinîon négative de MM. Suchîer \
Rôlin % Jeanroy ï^ Ph. Aug Beckcr*, non sans appuyer par des proposi-
tions nouvelles une argunitntiitîon qui tend à nous f;iire paraître Wolfram
sous on jour peu propice à son ambition de poète.
Mïl« N. N. a ennchi le chapitre curieux qui pourrait slniituler « ïes fifs
d*Ainien dans les versions étrangères » J'utie remarque perspicace. Elle est
sûre que Wolfram n\i pas connu te poénie de Guihal tP Atuirena^p, 7, 5^.).
La connaissance de cette branche française ne lui aurait laissé aucun doute
sur ce personnage intéressant quil se prde d'énumérer p^rmi les frères de
Guilldume. Car au début de son poème, il fait mention d'un fils d^Aimeri
i|u'il appelle tout simplement Gybert, mais plus tard^ en parlant du roi
Siitilhtri^ drr hfïnk von TandatHaî (JVh. 240, 26; 249, 29), il désigne ce
dernier comme un allié de la lamille de GuilLat^mct accouru pour prêter son
appui contre les Sarrasins. Pourquoi le poète allemand a-l il scindé ce per-
sonnage en deux? W^'-' N, N. est portée à croire à un manque de mémoire
de Wolfram (p. 27 ff.)».
Elle ne tient aucun compte du fait que le poète s'attache strictement au
1. V^btr die Qufïlr Uirkhs %*ùn de m TfirUn und dif àUesff Gfstaîl der prise
iOrati^t^ 1872.
2. AlhCiim mit Bfrûckskhii^uit^ von tVoi/utms t*o« B^cbfnhach ffiiUhaim^
1894.
|. Noies sttr la l^tfuie dé Vivien^ dans Rmfimia, XXVI, 17).
4. />r fiuîftan^ûiiidM' Sn/^fttknis und mur Frtddrmf^ j%K.
V, M, Reruhardt (Xum IVtlhlhfitft iVùîfrttmi wni Esihmhisch^ dans Ziichrft
I . drtti icbi' Phihkio îV , X X X H , 1 ^t^o, 56-5^), se dispense de toute explication ,
qtmiquUI soit d'avis que Wolfram a pris des libertés avec la généalogie de
Heimrich von Narbon
3l8 COMPTES RENDUS
nombre de sept fih d'Aimerl, undis que ïes manuscrits d'Ahscam ne pré-
sentent que six fiïs : Guilbume, Ernaut, Buevon, Bemart, Guiben Aîmer,
Garin d'Anscune n'y est pas metitiooné une seule fois. Wolfram lui substi-
tue un autre personnage nommé « Berhtram jk Encore faui-il ajouter qu'il
ne confond jamais ce Berhiram avec Bertran le Paladin, fils unique de Ber-
nart de BmsbanL Pourquoi a-t-U complété le nombre de s^pi ? Est-ce une
pure invention de sa part? En parcourant tout le poème on n'en voit pas la
nécessité '.
M'** N. N- se hâte de naus fournir de nouvelles* preuves dç Tignoraoce
lamentable du poète tjuant au Covmant Fwien. Wolfram remplace le ser-
meut solennel de ne jamais fuir « phin pié dt' itrrt » devant les ennemis de
U foi, fait devant Dieu et devant Guiborc, par des termes vagues, é^ expres-
sions toutes faites, comme par es. iVh.^ 41, jo, *t Vwmn ungimt fiéch ».
CXuAnt i ï'iivideute allusion au Charroi de Nîmes qu'on a relcv(^*e dans le ff'*7*
îàîalm (298^ 1%) « kh um nUangi tin kottfman-utf^ kh Nimn gfwan^ die
gtioUn itat' mit xmgen », elle est censée problématique parce qu'elle nous
labse douter si Wolfram a connu le stratagème employé par Guilfaumc.
Pour expliquer la mutilation du nez du héros, Wolfram se sert évidemment
d*une tradition orale {IVb. 91 ^ 27, 55) au lieu de profiter de rallusion qui se
trouve dans Jlùcans (éd. Guessard, 4070) ou de riiidicaiion qui est expHd-
tcmeni donnée dans le Char rm de Nîmes (v. tï4, 55), — La traduction
littérale du vers « rnuirtrks kmir^ a n^kiises ntûilHen a {H' h. 197* 14) ne
représente pas utic réminiscence directe du vers 574 du Charroi : il ne faut
point penser à un emprunt direct^ parte que Wolfram aime à ennoblir îe
caractère des Sarrasins '. — Et ainsi de suite.
J'en conviens, grâce a de tels provédés on peut accumuler les preuve»
négatives à rinfini. Je suis loin de croire que Wolfram ait connu et surtout
conservé beaucoup de détails concernant les faits antérieurs de h vie de son
héros, mais je persiste â voir dans son prologue une composition spontanée,
née dccenaînes indications, puisées à dirférentes sources : légendes, tradi-
tions orales, branches françaises du cycle de Guillaume d'Orange, Quant û
son modèle français, qui, dii-on, a contenu encore d^autres allusions^ dîspa*
I. M. Jcanroy, dans une étude magistrale sur le cycle de Guillaume tu
court neis (/fa wijwxa, XXVM, 1 98), nous avertit que Tidcc de faire de V'^ivicn
le (ils de Garin est asse^ tardive et doit appartenir ea propre â rautcor de^
lîtt/anm. Dans Aîiscam^ cette parenté n*est indiquée nulle part. - Quel
raisonnetncnt nous autortMr donc à affirmer avec M* Beruhardt que Wolfram
n'ayant pas trouvé le nom de Garin d.ius stin modèle, a eu Tidée de compïé-
ter la liste en y introduisant Bcrlitram? — M Cloettj j démnntrè (Dit
Bnjattu'y l^wifH, Berlin. ÏH98) *jue, d'abord, Vivien était censé être le fiJi
d'une M:eur de Guillaume. Le IVilkkdm (îSo, 2i\ fait mcmion d« cette
parwitc.
1. Il l'aurait donc gardé par inadvertance; ou t'aura il- il sauvé picuH*niem
pour i avoir trouvé dans A imam ?
NASSAU NOORDEWiER, Bcoordedittg van den Willehalm 3 1 9
rues de toutes les rédactions françaises qui sont parvenues jusqu'à nous, je
ne crois pas que Ton soit autorisé à attribuer à cet original toutes sortes de
petites déviations, ni, d'autre part, qu'on puisse nier qu'il s'y soit trouvé
d'autres variantes considérables, en invoquant le témoignage des manuscrits
français conservés qui s'accordent autrement sur tel ou tel point. On se
demanderait en vain par exemple, quel passage du récit d^AUscans se serait
prêté sans effort à une interpolation de l'histoire de l'exhérédation des fils
d'Aimeri : même à l'occasion de l'apparition du chétif Aimer : elle n'aurait
guère été à sa place.
Dans la 2« partie de son travail, M"e N. N. enregistre les intéressantes
découvertes qu'elle pense avoir faites en établissant une comparaison suivie du
texte du Willehalm avec les Storie Nerbonesi et la rédaction en prose (Ms. fr.
M97)-
Pour les Nerhofiesij elle a relevé trois parallèles avec des passages corres-
pondants du IVillehalm. La mention du stratagème employé par Guiborc
pour cacher â l'ennemi le manque complet de défenseurs, n'est pas nou-
velle ». Mais en ne faisant que renouveler (à son insu) cette constatation,
elle a le mérite de fixer notre attention sur le vers : « uml ruorte\ sd mit
sinnen a (JVh, 230, 8) qui semble confirmer l'hypothèse d'une source com-
mune. — En rapprochant IVh. 465, 19 des Storie Nerbonesi ^ II, 526 (où il
est question de l'enterrement des rois païens), elle s'élève contre ceux qui
exagèrent le mérite personnel de Wolfram (p. 40). Mais je trouve que les
honneurs que l'auteur des Nerbonesi fait rendre aux princes sarrasins morts
sont motivés par les égards qu'on doit à leur frère Rainouart : l'Italien
invoque la sainteté des liens de famille! Quant à Wolfram, son Guillaume
d'Orange semble rivaliser de nobles qualités avec Richard Cœur de Lion,
dont la mémoire encore récente devait être sacrée aux chevaliers de l'Europe
entière. - Le rapprochement des Storie Nerbonesi, IL 513, avec fVh. 328, 9,
364, 4, ne sert à rien.
La rédaaion en prose fournit d'amples matériaux à conjectures. Je laisse
de côté l'explication de l'épisode relatif au message consolateur de l'ange
qui apparaît à Vivien» (p. 42, 55). Ce n'est pas le moment de traiter à fond
toutes ces questions. P. (Mïï*^ N. N. désigne ainsi la rédaction en prose)
s'accorde avec Wolfram pour diminuer le rôle héroïque de Guiborc en
attribuant d Guillaume la résolution d'aller demander le secours du roi. P.
adoucit (et presque de la même manière que Wolfram) l'invraisemblance du
voyage de Guillaume d'Orange à Orléans, caractérisée par le vers : « que une
1. La note de M. Raymond Wceks (Romania, XXVIII, 128, compte
rendu de Becker, Der Quellemvttt der Storie Nerltomu') semble lui avoir
échappe.
2. Le raisonnement de M. Rolin (cf. Aliscaus, Hinl. XVIII) me paraît
aussi obscur que celui de M^^*-' N. N.
\
Î20 COMPTES RENDUS
titdf m priii il herbtrgaje. n — P. ftxc le chifTre exact (qmrmtt wîi^ f° îSo)
de 11 somme que le Guillaume de Wolfram refuse de payirr au easUlain, —
Dans P* aassî bien que datis le WHkbdîn^ Orïéans est le domidk d'Emaut
de Gironde. On le voit déjà» des points de vue vrais et faux surgissent pêle-
mêle dans cette <întimération. Il se pem que parfois les reinanicurs aîeot fait
effort, sans s*étre entendus, pour effacer la naïveté primai vc de rancieone
épop4^. n y a dans ce chapitre une découverte quil faut adtnirer sans
réserve. Le dialogue entre Tcrramer et Guîborc qui se trouve dans le Wilh*
tmlm(Wh, 215, 5>)t'î <îui reparait dans P (f° Î92) m t- semble rc pré s<în ter
un épisode digne d*ètre restitué aux textes f rampais. Je me risque même i
en retrouver une faible trace dans les vers 4052 ss- ^'Alhcaut. Ils me
semblent représenter Técho de cet entretien du père avec sa filk dans un
monologue de Gui bore déscspi^rée :
Por vostrc amor miert h teste cope«
Ht ma cars arse, a ta pqrre vent te,
Ou jo serai ea la mer sifondrce.
Une giant pierre eator le col ruce;
Comment k'il p retige, nVtî puis cstre eiîcapee
Ke it niî soie a doJauf Upîdêe,
1
M'^* K. N. a eu tort de ne pas diviser ce chapitre intéressant en deux par-
ties distinctes, dont l'une devrait traiter les épisodes que le iViîkftalm a en
commun avec les Ntrtmttni et P., et Tautre, les omissions contestables, Le>
pagfô S 2- S 4 de son opuscule contiennent de judicieuses remarquas sur les
* laisses similaires » et les épisodes qui concernent le côté fantastique du rôle
de Rainouart *. Cest ici encore que j*insérerals Téplsode du moutier Saint-
Vînceni, qu'omettent tous les manuscrits français, sauf A.
Reste a savoir si M"* N, H, se prononce en favt-yr d'une rédacûon plus
ancienne ou rajeunie, La conclusion trop laconique de îa p>»ge 58 nous
laisse dans le doute. Ce n'e$l pas écî le lieu de s*étendre sur cette question
importante '*
Dans son troisième et dernier chapitre, Tautenr a suivi Texemplc des îtiter-
prêtes antérieurs de Wolfram qui ont cherché et trouvé pour les passages
concernant Aéhs et Ralnouart, ^/xaminés séparément^ des explications variées.
Mais il ne ïaut point perdre de vue Tensemble. Car de l'examen judicieux du
1. Tûrhcîm ne ksa pas connus non plus,
2, Je me risque à indiquer en passant trois des circonstances qui, A inoo
avis, semblent accuser rancîCiinetè du modèle : i«» Wolfram ignore le riom
de la sœur de Guillaume, mariée au roi Louis, 2" Ciuand Rennewart, pour
son équipetnent, ne demande ni f^laive^ ni coursier, mais un grand tîncl,
c'est un juif de Narbonne (qui est au service d'Ermen^art de Pavie) qui
lui donne ce qu'il demande, y^ Le combat de Rainouart contre si>n pcre ne
se trouve pas d:ms le tViJUkih» fje réfuterai prochainetnem la théorie de
M, Kold : Zu dtm WiikthHm Vhkhs vmi Tùrh^tmi c(. ZfiikhrJL / deuiuht
hil Phil, Xilh 1)6.)
NASSAU NOORDE^MERj Bfoordclhg vûtt dcn WHkhalm 321
fête jmouretix de Rennewart dépend 100 te solution approstimativc de la
question coniplkiUL^ de savoir si Wolfram a terminé son poème ù son gré,
ou Ta laissé inachevé. Je me dispense donc de récapitttîer les remarques spi-
rituelles que M"c N, N. consacre aux opinions de Gautier, Guessard,
CUfus et Siin Marte. Je suis d'accord avec elle pour repousser Targii m en ta-
lion étrange de M* Rolin ^ Mais je m'étonne que W^^ N. N. cite plusieurs
passages du WilitMm • sans insister sur les termes vagues et le style guindé
(\m rendent méconnaissables les inïcntïons du poète. Pourquoi ne pas avouer
que Waîfram ne parle jamais de la fête qui doit terminer le récit de tant de
combats ? Le poète est toujours empressé d'amplifier les moments joyeux.
Il r^rette même une fois la tristesse de son sujet, qui lui prête rareniçtil
l*occa&ion de dépeindre un moment de joîe :
WK 3S0, 3t, Dije maer b| frcudcn seltcn ist.
kh mûti^tc habt-'ii guoicti Km»
TWcQiie Σh freudedritinti funde.
Ho examinant les passages indiqués ci-dessus, Ml>« N> N., au contraire,
arrive à la conclusion que Wolfram a connu la fin de la chanson. La mort
«Jott avoir interrompu son récit. Ces conclusions ne sont pas nouvelles, et
î^ârgumentation laisse à désirer. Voici pourquoi ; i^ le choix des passages
qu'elle accompagne d'un commentaire, est incomplet ? \ a^ elle n'y suit pas
mcnic le Hl de la narration; 3" elle néglige d'étudier Tceuvre du continua-
teur TûrheJm ; 4^ en perdant de vue Tensenible, elle ne s'est point aperçu
combien le poète allemand aime à Improviser aussitôt qu'il s'agit de chanter
J atTîour, En établissant des relations suivies entre les deux amants» Wolfram
^*^t Souvent détaché de son modèle : il a donné l'essor à sa fantaisie.
On peut regretter que les résultats ne soient pas en proportion avec les
pctues infinies qu'a prises Tauteur. Le titre de la thèse en question m'avait
Mji ci*abc)fd espérer que Taureur aurait enfin démêlé le mérite personnel de
oifrsiro^ et que, par conséquent, son travail, tout en résumant les recherches
^'^^'^^cs, aurait une portée psychologique. Mais l'analyse de To pu seule en
^ "es lion nous a démontré combien sont lents les progrès que permet de faire
tîne coo naissance même approfondie de la littérature allemande du moyen âge.
^ K^iiî^ un peu obscur de Wolfram ne sera peut-être jamais complètement
5*1^* P^r nous autres romanistes, tandis que les germanistes se heurteront
touiotir^ (et peui*élTC sans trop s*cn apercevoir) à des obstacles imprévus
i^uaiiij 11^ voudront nous suivre de prés dans les voies de notre domaine
t ,
m,
iv;
17;
Cr Roi in, AlhcaaSy Iiitiî. IX.
^'h. 184, SSSî n^^ 3855; 28s, 135s; 29[,2î 420, ai.
Voici Tensemble des passages qui sont à examiner : ÏVh. 191, 25; 192,
^iS, iî-14; 270^ 271; 284, 145s; 28s; 287, n>s^ 318, lîSSMîï»
41», î4, 15; 4P, 16.
322 COMPTES RENDUS
spécial. Mll« N* N» me semMe être plutôt gemianîste \ mais en s'adonDant
à des recherches aussi compliquées que celle qu'exige toute étude sur Jc
WUUhaîm^ elle a faït preuve de connaissances louables dans le domaine de
l'ancienne épopée française*.
Je me dispense d'autres remarques, compt^ini bientôt reprendre le sujet
int^puisable au IVilkhalm dans une étude spéciale (dont les commencements
datent de 1 894), et qui» je Tcspère, me permettra d*établir quelques points
de vue nouveaux.
M. J. MlUCKWlTZ.
Jean Glopitiel dit de Metmg. Lt Ronmn de la Rme considéré comme
document historique du régne de Philippe le Bel, par Félix GuiLLON.
Paris, Picard, et Orléans, Loddé, 190J, ïn-8«, 225 pages,
J'éprouve quelque hésitation à parler ici d'une pubhcadon dont b valeur
scienii tique est loin de répondre aux exigences de cette revue; mais peut-
être épargne rai- je quelques heures d*une lecture sans profiî aux personnes
dont le titre du livre aurait pu soUiciter rattentioti* M, Guillon > considère
b seconde partie du Roman de k Rme comme « une sorte de chronique riméc
des principaux faits du régne de Philippe IV m (p< 152), écrite sur Tordre du
roi % de qui elle devait servir tes projets contre la noblesse et ta papauté.
Chez Jean de Meun se tenaient « maintes réunions de bourg^îs, de publi*
cîsiet et de poètes, sincères gallicans, commentant i> les événements poli-
tiques : Engucrrand de Marigny, Guillaume de Kogaret, Pierre Flotte»
Pierre Dubois, et d'autres, dont Ténumération occupe trois pages (p, 26-28), y
donnaient « le mot d'ordre pour disposer les esprits en faveur de la cause
royale », « L'osiel de la TornelJe fut Tarsenal d'où panirent les mille traits
satiriques contre la noblesse, le clergé et la cour de Rome qu'on lit dans
Baudoin dt Sebmrg, Rinarl k CùHînfait^ le Roman dt h Rqu^ Fam^l, la
Chromqm métriqm^ les écrits pamphlétaires de Dubois, etc. » (p, 28). €^€iil
i. Autrement elle aurait su profiter des excellents conseils de M* Van
Hamel, qui, sous le titre de ômlkume d' Orange ^ a publié d* intéressants
articles dans le GiWs de 1898 (cf* Rûitmnia, XXVIII, ijo),
2. Mais pourquoi n*a-t-ellc tenu aucun compte de l'épisode du tlnef ? Je
ne prétends pas éclaîrcir cette question. Mais quel motif aurait conduit Wol-
fram A supprimer cette histoire d'un gros sapin coupé par Rainouart lui-
même et si grand qu*il couvrirait cent chevaliers de son ombre? Serail-ce à
cause de k cruauté de Rainouart qui tue le pauvre forestier ? Mais d'où lui
vient répisodc du juif dcNarbonnc qui est pour ainsi dire fourrier d*Ermen-
fart di; Pavie? Car cette tradition appartient à ta ctianson d'Aymeri dt Nar-
mne (cL aussi Girori de Fitt^w),
y En exposant le contenu de son livre, j'y suppôt un ordre qui n'y
existe pas.
4. <c Jean de Meung a continué le roman sur Tordre et d après les vues du
roi, comme firent également pour Philippe IV, dans le même but, J, Gîé-
lée, G. de Rome, G. de Paris, J, de Paris, F* ées Rues n (p, 2^, n*» t)*
^
GUfLLOK, Jean Chpinel dit de Mmng 323
efi 1 296 que Jean de Meun commcni^a son poème, Q le termiïia nécessaire-
ment ivani novembre 1505, date de sa mort, sûrement après la bataille de
Cou rtrai (1302); mais, « au fur et à mesure de leur composition u, ses vers
« tétaient lus avec empressement par le peupk »» à qui on les communiquait*
t-orsque M. G. aflfinne que la composition de fa seconde partie du roman
doit être placée cntTe 1196 et ipS, que fait-il des témoignages nombreux,
fléôsî/s, qui prouvent que l'achèvement du poème est plus ancien d*une tren-
taine d^année^? A qui rappelle les vers où est mentionné Charles d'Anjou,
« qui ore eside Sicile rois «, il répond que le passage n'est pas de Jean de
Mêtin : fl Quoiqu'on n'attribue généralemetit à Guillaunie de Lorris que les
4I-I9 (itf) premiers vers du roman, des commentateurs pensent, et avec juste
raison, qu'il continna son poème jusqu'au vers toi 14 w(p. 191). C'était bien la
peine que le poète prit soin dlndiquer deux fois, en termes très précis, dans
le roman même, puis dans le prologue de Bolciii l'endroit exact où com-
nnëncç son œuvre! D*aillcurs, la ligne de démarcation est tracée entre les
deu^ parties du poème par !e contraste entre îes caractères des auteurs,
plta^ encore par la différence des rimes, riches dans l'une, Idonînes dans
f^^am^rre; enfin cette ligne est marquée dans les manuscrits soit par une
rtil>riqiit» soit par une miniature, soit par un intervalle laissé eti blanc. Une
«^uinaaîne au vacm^ de manuscrits sont certainement an teneurs â 1296, mais
^SL. G, sans les avoir vus, affirme que tous sont du xiv^ siècle ^ Méon
a sîgïïali un arum^emttU du Roman de la Rose daté de laço, en donnant
aa renunieur le nom de La Porte % j'ai eu moi-même Toccasion de mention-
ner cette composition, en appelant l'auteur Gui de Môrî > : « En 15 10, dit
M. G, un poète nommé La Porte reprit ce roman, en y ajoutant, retran*
c^ani et en renversant tonte la marche» (p. 172)... ff Gui de Morî, trouvère,
dte en 1350 le Roman de h Rose comme un des ouvrages les plus populaires
de son temps (G. Piu-is). A la bibliothèque publique de Tournai, on conserve
va manuscrit de ce roman revisé et modifié par ce trouvère a cette date *
t - AiUeurs pourtant il dit (d'après P* Paris) que troU des mss. de la BibL
mt, sont du xiii* siècle (p, 176)»
2 • I>ans la préface de son édition du Roman àt la Rose,
î- ffisioirt de la latipieH de la UtUmime fran^aist, publiée sous la direc-
tion ci<^ Petit de Julleville, II, 150.
4 • 1^« remaniement de la première partie du roman fut termine, et celui de
la 5econ4^ partie commencé
Efi Tan de 11 uc^rn sinon
Jbeju Criîit par Jupliaition
Di! .V^.ec .V. et .XL.,
Le jeudi dev^iit çou c^on chtute
Rtit^freti
1^ autvur, dans un prologue, ne veut pas faire connaître son nom
Autrement fors que par mos teu*
C'oiî entre par moy «s osiçci$.
|4&iti a canctu de ce dernier vers, avec beaucoup de vraisemblance, qa*i)
324 COMPTES RiNDUS
Ccst ie commentaire du Roman de Ut Rosff « considère comme documcïil
liistoriqua du règne de Philippe le Bel 0, qui fiût le sujet principal du livre,
el £|ui en occupe la plus gmtide partie ; ce comiueutaire est uue accumulation
de citaiious, de traits souvent faux ou mal compris, sur les moeurs ei la vie
du moyen ige, recueillis dans quelques ouvrages dont les auteurs seulement
sontdtfe : Millot, Gidel, H. Martin, Velly, etc., Chateaubriand surtout, —
banAlités qui d'ailleurs ne se rapporicnï pas plus au temps de Philippe b Bel,
qu'au %n^ siècle ou au xv** En même temps que ces écrivains, à qui il doit
le fonds de ses connaissances historiques, M, G. se eompbh à citer h tout
propos, souvent hors de propos, des poètes du moyen âge, que très apparem-
ment il n'a pas lus ; il parle à plusieurs reprises des infortunes conjugales du
Bossu d*Arra5, « Tauteur de Saini-Nicoki » (iiV, p. 1 1% de celles k de Vil-
lon et de tant d^auires qui, dans leurs poésies, se plaignirent grandement de
s'circ engagés dans les liens en mariage » (p. 125). Dans un exposé des
eeuvrcs de Jean de Meun, il compte « son Téstamtnt, composition dévote
de 1708 vers eu quatrains mono ri mes, ou Tauteur débute par une invocation
à k Sainte-Trinité,»., TÉpitaphe dts Tre^passe^^.,, et une autrç composition
sous le titre de CodicUk... de 2 î 20 vers en couplets mono ri mes qui d chu le
ainsi : Ly père et ly fils et ïy Saîncu Esperis v (p. 155-154). Qiacun sait
que le second de ces poèmes est ic CodicUîf, que le premier est le TtUantmi
tt que le troisième est encore Je même Ttstameni. M, G. ne se contente pas de
dédoubler les œuvres de Jean de Meun, il est tout disposé k lui en donner
d'autres : c Parmi les dits joyeux dont le poète fait mention au début de son
Codkiiie (lire T^stmttt»it)... on pourrait y {sic} comprendre ceux de la Sor-
gmu d'Chitijns ei des Brayis ûn Cordfiur » (p. 15). La raison unique de ces
attributions est que raction de cesfableaux se passe i Orléans**
Dans un des appendices qui terminent son volume^ Tauteur s*cst proposé
de compléter un travail <^u'il a pubhé en 1885 sur Guillaume de Lorris, en
expliquant comment Jean de Meun a connu le nom de celui dont il conti*
nuait le poème. Supposer qu'un manuscrit donnait ce nom serait une hypo-
thèse trop simple; voici en quelques mots le raisonnement de M. Guillon,
Uauteur de U première partie du roman s'est représenté sous le* traits
i La Pone. Mais dans le poème N s, liomme « Gui de Moîri », et
.._.,. j.,..^ieurs rubriques d'un manuscrit luctjauu de Méon, écrit en I330,
exposé au musée de Tournai, il est appelé e dant Gui de Mon ». Gui
Liporte, un Picard, était sans doute originaire de Mory (Pas-de-Calais).
I, Il serait cruel et sans intérêt de relever toutes' les méprises qu'une
ostentation déplacée d'érudition a fait commettre à Tautcur; on voudrait
voir dans quelques-unes des fautes typographiques, telle la mention, parmi
les critiques qui se sont occupes du kotmm dt la Rose, de n F. Heinrich von
A. BYHAN, Tstrorumâmscljfs Ghssar 525
d'Amant, ni^iis aussi» du moins momsnlandmcm, sous ceux de Déduit, qui est
vêtu
D*un iAmit portrct a. oysîaua
Qui cre tout a or batus.
Ces deux vers « diSc rivent un blason : (Tût â trois aigldîn de,., {gueules) «,
qui es! celui du poète. Les armes des seigneurs de Loun*-au-Bois sont ^or à
hJacÉ d'azur, accùmpâ^né^ de trûh aigletUs de guitile ; un des membres de cette
famille, au xiii= siècle, s'est appelé Guillaume^ Donc Jean Je Meun devait
savoir que Guilïaume de Loury^ ou de Lorris, èîail le nom du poète ano-
nyme (p. 198).
J'âuraîs désiré, en terminant cette note, signaler dans le livre de M. Guil-
Ion quelque renseignement intéressant» ne fût-ce qu'un détail; je ne suis pas
arrivé à l'y découvrir-
E. LANGLOtS.
A, Byhan, IfitronuûÉLiilaches Glofisar- (Sechsttr Jahmhérkhi dfs
Insiituis fur rum, SpracU, p, 1^4- i^B.)
Le dialecte sî intéressant des Istro-Rou mains, quoiqu'il ait déjà attiré Tatten-
d*a5se£ nomhn:ux savants, n'a pas encore été suffisamment étudié. Le
*^ossaire de M, Byhan est assurément très ntéritoire. L*auteur a prolitè de
recherches antérieures, mais il n'a rempli qu'une panie de la tâche qu'il avait
entreprise : son glossaire ne peut suffire pour connaître dans son ensemble cl
ses détails la vie des Rouniains de t'hirie L
L'histoire du glossaire istro-roumain est plus ancienne qu'on ne pense.
Elle remonte à Ireneo della Croce. Depuis lors, sauf dans les documents
d'ordre religieux encore peu connus, il n*esi plus question des Jstro- Rou-
mains jusqu'à la première moitié du XIX<= siècle, époque h laquelle A. Covaz
ks a retrouvés et les a rendus à leurs frères de la Dacie, comme un précieux
cadeau. Ceta imposait évidemment aux Daco- Roumains roblîgatîon de mieux
les conïiaître. Nous ne parlerons que pour mémoire des notices enthousiastes
d'Asachi et des travaux plus sérieux de Maiorescu^ M. Ascoli, Mikiosich,
M. G. ignore *quc la traduction de Végêce a été publiée par la Société des
anciens textes, mais il annonce, d*après la Rotnama (XI, 629), que la ver-
Ion de Friorat « sera prochainement publiée dans la Bibliothèque du cerdi
' wWtmre ( sir) de Stutigard » {p. 15).
i. Un voyage que j ai fait chez eux en 1899 ^^'^ éclairé sur bien des ques-
tions qu'aucun livre ne résout. Je mets mes notes à profit pour présenter
"Quelques remarques sur le lexique istro*roumain.
2, M. T, Maiorescu (avec le concours du libraire Socecû) a imprimé pour
i deuxième fois le n Ititi^raf ift hiria ù vûcabular isiriano-nmidn » de son
Ppére (à Bucarest, 8*', 1900). Je regrette beaucoup mj'un travail d'une telle
importance ait eu une seconde édition si mauvaise. Depuis longtemps déjà,
326 COMPTES RENDUS
M» Ive Cl M* Gartner ont ensuite entrepris quelques recherches. Aujourd'hui,
M- Wcîgaiïd et ses élèves, M. Nanu et M, Byhan, espèrent pouvoir amener à
leur perfeaion les études sur les Istro-Roumaîns.
Lé glossaire de M, Byhan est, après celui de M, Naîîu, le deuxième essai
portant sur tout le lexique istro-roumain. L'apparitioti de ce glossaire a con-
tribué aiî progrès des étiides istro-roumaînes, M. B\'han est un traxailleuf
diligeni, tnals il n'a pas toutes les qualités d'un lexicographe. Il se borne à
copier tous les mots consignés dans les travaux antérieurs et à les critiquer
d'une façon souvent trop sommAire".
L'étude attentive de ce glossaire nous amène k nous demander queUe est hi
rnèthûde à suivre dans Tétude du lexique istro-roumain. En me basant sur
les faits réels, je puis affirmer qu'il est impossible de rédiger un glossaire istro-
roumaJn loin des gens et de leur pays. Les observations directes faites jusqu'ici
ne iont pas suffisantes, et plus d'une prononciation fausse est encore admise.
Même remarque A faire au sujet des différences locales et de la drctjdation des
mots. M, Byhan a accepté trop facilement le résultat des enquêtes deM. Wei-
gand. Les formes notét^par M. Wcigand ont été souvent recueillies à un seul
endroit, ce qui est évidemment insuffisant. Les \nllages istro-rou mains sont
d'époque très diverse. Si nous comparons par exemple Fépoque de Irenco dclLi
Croce avec la nôtre, h justesse de cette obsen'ation est frappante* Le domaine
roumain de Tlstrie était autrefois plus grand qu'aujourd'hui, et s'il a diminué,
ce n'est pas seulement par La dénationalisation de l'élèmuni roumain, c'est
aussi par le manque d'une immigration homogène» qui raurajt soutenu. Je
penche a voir le motif des différences locales dans l' « admigration n qui était
probablement suffis^mte pour les causer. Mais il faut joindre aussi aux causes
externes les causes internes, qui sont absolues et spontanées.
Le glossaire de M. Byhan a des défauts plus grands encore. L*auteur aurait
pu nous donner une classification historique et philologique des matériaux
utilisés. On s'étonne qu'il n'ait pas pris en considération les différences de
temps et de lieu dans révolution du trésor lexical des Ïstro-Roumains. Il aiinut
dû contrôler le rapport des mots istro- roumains avec ceux des autres dklectes
roumains. Il nous donne parfois des équivalents daco-roumains tirés du
glossaire du Cùdktk P^oronefain : c'est tout à fait insuffisant. Four un contrôle
complet» il faut toujours avoir recours à tous les monuments littéraires exis-
tants.
VîHtt/fûirt de Majorescu avait besoin d'être revu. Cet ouvrage, qui témoigne
de la grande diligence et de lamourde l'auteur pour sa langue^ aurait dû être
mis au courant des derniers progrvs de la phîloiogîe. Une re vision aurait été
tnès utile, parce i^uc cet ïtinéraire est le fondement ^ posé dés 1875, de k dia*
kctolc^ie roumame. 1
I. Je rappelle la critique du glosîtaire de M. Byhan, faite par M. Bartoli
(Studj di filo)(fiij tumania, Vtll, fasc. 3?, cf. Rom., XXXI, 47**)- Ce compte
rendu très étendu (90 pages) CM basé sur Tobservation des faits réels. Il est
nécessaire pour comprendre !e glosvsaîrc de M, Byhan.
A. SYHAK, Istrornmânischi'î Glossar 327
Une erreur comme patiia (amant*f) pour patit-a à;xCQ'TQ\im. -^apà^it^ stt/enî,
(cfi Bartotl, i^) csi très semblable aux faiiit^s de M. Weigand, par exemple
siraiîf (Bmiaitr Dkîtki, ug) pour se rad{e = dr* se rade (ie rast). Je cite
encore quc^uLîs fautes emprunta à M. Weigand, sans la critï<|Ue qui eût élé
. très nécessaire. M. Byhan citt! (Jubrésb., Vf, 241) diaprés M. Wcigand (Jb., I,
^114) « iJ^s-aifakut tmi mtin, no^okfum urdindt ». ^Vofomème avecla remarque
de M. W^eigand {Jh.^ VI, 597) n'est pas géndTal, je Taî remarqué aussi à
Villanovâ. Le sens donné par M, Byhan p> 191, dVpr^s p., 111, p), à ohuilâ,
est inexact. OMnld n'est ï»as « guêtre î>» mais « Ungc de pied », Je men-
tionne encore iiptuî de M. Wcigand, Jb., JII, 523, cité par M. Byhan,
p, J70, avec la remarqut que un ^ ne se change jamais en un ^ devant une
autre consonne. En Banat existe tieulemeni ii^mâ et jamais siptttl.
Un dictionnaire ou un jt^lossaire doit, à mon avis, représenter fidèlement
h vie d'un peuple. La vie physique des Istro-Roumains se présente sous deui
aspcas. Les gens du nord, à /cjànu, sont ehart»onniers, et diaprés une per-
mission spéciale, colporteurs de vinaigre dans la banlieue de Vienne* La vie
dans une grande ville, à Fiume ou à Vienne, et pleine des soucis du pain quo-
tidien» leur donne une certaine souplesse. Au contraire, les Roumains de
Valdarsa, liés à leurs sillons, sont plus conservateurs. Outre leur miiniùre de
vivre^ leur milieu est différent. Les Roumains du nord sont en contact avec
les Slovènes, et ceux du sud avec les Croates. Je puis remarquer en passant
que pour étudier les éléments slaves de ce dialcae, il faudrait avoir des dia-
lectes sbves de r ht rie une connaissance qui nous manque encore. Il faut
d*âilleurs remarquer que les Istro- Roumain s sont comme noyés dans une mer
de Sbves, S'ils existent encore, c'est grâce k h force latine, qui les fait
résister à la dénationalisation. Ils savent toujours compenser leurs pertes. Le
f^it qu'une hlîe roumaine mariée dans une famiUe slave la dénationalise n*est
pas rare. On en a aussi des exemples datts d'autres provinces, en Serbie,
Hongrie, etc. En revanche, une fille slâ%^ mariée avec un Roumain devient
Roumaine, par exemple à Zeîânu.
Dans îes pari ers des Istro-Rournains, nous avons affaire à un usage
nonnaL qui nous présente un compromis très intéressant entre les forces
internes et externes de leurs habitudes de langage. La filiation de ieur dialecte
n*cst pas conditionnée par les circonstances loppgraphiques, inaîs plutôt par
llsôïement des villages. Du reste, on remarque aussi en Valdarsa de petites
dilTércnces locales.
Je me permets de supposer, d*aprés Téiat réel des faits, qu'il y a en I strie,
pour le dialecte roumain, deux zones, une au nord^ aujourd'hui limitée
à Éejânu, et une au sud, en ViMarsâ^ dam sept villages roumains.
Je fais cette répartition à la fois d'après la phonétique, la morphologie et la
lexicologie. Je regrette beaucoup de ne pouvoir développer dans ce compte
rendu les preuves, ce qui nous entraînerait trop loin dans l'histoire de ce dialecte
intéressant, mais je me réserve de les publier une autre fois.
Le nmnque de communication entre ces deux lones a causé un certain
)l8 COMPTES RENDUS
tmttgoinsme« résultat des ambitions locales, mats restreint et réglé par le
génk et le sens esthétique de la langue. L'un caniirtérisc Tauire. Par enetnple
f ai entendu une crid«^ue simple, mais juste, d'un Bouttiain de Valdarsa sur
les Roumains de Zeiâuu : « Chaque village a une autre langue, mais notri: lan-
gage à nous est plus clair et plus jolî; ils ne prononcent pas si juste que nous, sm
Sur Tanalyse physiologique des sons du dialecte istj-o-roumain, je ferai
quelques remariiues, car la transcription de M. Weigand est quelquefois
îne.iiacte. M. Banolî a déjà corrigé quelques erreurs; je puis en relever d^aiitres*
Le signe c de M, Weigand, accepté par M. Byban, rq>résente en réaîttè
trois sons (fait constaté par M. Bartoli, 54) : 10 un e ouverî correspondant
au dr. à; a° IV du p.p, en -fit; }^ un son semblable au dr. d de h termi-
naison sans article des féminins. Mon impression auditive diffère peu dans
cette question de ceile de M. Banolî. La première catégorie est toujours
ouvene^ ta deuxième est différente, -eii est variable, mais Yi n'est pas
si ouverrt que îe premier* Pour t de la troisième catégorie de la terminaison
des féminins, je garde dans la pratique la transcription de J. Maiorcscu
jusqu'à ce que le son ait été étudié expérimentalenient.
La transcription de M, Byhan, basée sur Taudition fausse de M* Weigand,
des mots krpt^, t%r^ (pp* 2)4* 3^°)» ^^t inexaae, car le premier r «st un r
trùs ouvert» le second est un ^f roumaiiî, avec un € pour base^ à mon avis.
La déîcrmination de ces sons dépend des expériences qui se feront avec des
appareils phonétiques. Mais si on ignore les différences de qualité de ces sons»
il ne faut jamais oublier les conditions primordiales de l'évolution des sons.
On sait que t^ dans les deux premières catégories, est sous l'accent» undîs que
k terminaison en roumain est toujours sans accent, sauf dans les mots
empruntés.
Je mentionne encore le fait très curieux de Vd dr*, qui devient en tstro* rou-
main tl. Cet â devient parfois une diphtongue obser\'ée déjà par Maiorescu,
M, Kanu, M» Banoli et aussi par moi. M. Nanu nous présente un cas koîmku
{cL Byhan, 244). J*ai entendu de la bouche d'un Voldarsicn s^âre pour iorr
(mk), qui est la forme légitime.
Pour l, é, M. B\han généralise un li, ce qui est aussi inexact* s pour I est
incorrect, s est semblable a îa prononciation vénitienne, laquelle n'est pst%
générale pour les mots roumains. On peut, il est vrai, entendre larpi pour
iiirpt^ mais Uemt en» â mon avis, douteux, du moins je ne l'ai jamais
entendu.
Le complément de M. Bartoli nous montre d'une manière évidente que le
glossaire de M. Byhan n'a pas exploité tout le matériel lexicologique du dia-
leae istro-rouniàin^ De mon côté, je rectifierai ki seulement quelques mots
en me plaçant toujours au point de vue exposé ci-dessus '. Pour la rédaction
î . Dan% les Studi dlfikî^k r0mania,t. IX, sous le titre de Xuov€ ^nliUr
al Dixpmàrh dtlU coionit tutiunt ii*istna^ j'ai donné une foule de mots incoti*
nus à nos savants.
J30 COMPTES RENDUS
prononcbtions, p. ex, les préti^s prononcent bUirml, le peuple regulicrement
hesârikdt pi. hêsdriL
hat, 6» est une forme secondaire de /jïj/ (Bylian, 198), certaîncmciîl
empruntée du croate.
kiiié, inic. -M, pL -£-» Maiorescu, 94; man<^ue dans Miklosich, Baiif n^st
pas seulement chcan de coasâ, mais généralement » maneau b, Byhan»
198, connaît hotiil,
bfk, Byhan, 193, est mal traiiscrît» M. Gartner nous présente pour
riialicn iteecù (mouton, bec)» sous 646 (et non (i}f} et 886, deuxiormcs dilTé-
fentes, Bec est certainement la fonne de 6}6; pour te, d. le mot soivant-
Pour kc, il y a chez M. Gartner, 886, kJyun, mot inconnu de M. Byhan.
hikf Byhan, J94, est aussi mal copié* Maîorescu, 95» connaît seulement
bîk, Miklosich, ao, nous présente hîk, hdk^ erreur attribuée par Byhan à
Maiorescu. Bartoli a remarqué la faute. En effet, bik est tout à ùit inconnu
aux Istro-Roumains. On Jit seulement M -w, v. le mot précédent.
bîi^^ft de ByJian, 194, est corrigé par Bartoli, 41, J'ai entendu ce mot à 4,
mais dans une forme fém. urâ hisa^à, pf, dcibisitgi. Je ne pub savoir la mison
du changement du genre, car M. Bartoli nous présente bisêgik.
hrûii est bien noté par Maiorescu, Byhan est dans Terreur. Bartoli^ 42,
dotine r opinion de Maiorescu . Génér,ilement hrâu ^= cordon, ruban. Le
fîiôt avait à Schitazjîa le sens d'échaqie. En îr., poiîr écharpe, on dit partout
seulement kanttid.
drùti^ Bvhan, a 10, d'après la renurque de Bartoli, 45, est usité aussi dans
Viildarsa. J'ai noté à 4 drob de kai — morceau de fromage.
Jdtê, Byhan, 215, et BartoH, 45, eit inconnu en Valdarsa, où on a pour ce
mot ks expressions suivantes : omuse naiU, bJaga (bou^ oia^ vaka, puricu, etc.)
« lle^tf m^hpora si porkele se pokiesai^ et enfin krilianu se port>d{^ Tous ces
mots sont d'origine slave, excepté se naite,
firmintà^ Byhan, 214. J'ai remarqué à %Ao ftmtinl(\^^M lictJ de i&f ornent u
de M, Nanu. L'explication de io fermenki donnée par mes paysans était :
luhru a mise^, Lc mot est îdetnique avec le dr. frâmînt^
flumtind, Byhan, a 16, Bartoli, 46, est entendu par moi à 4, hîamund^ f^^'l-
fil/, Byhan, la^ , n'a pas été obser\'é par moi. On dit seulement ^»uL Quant
d Télyniologiej c'est une autre question. Gt*/, -«, pL -uri et ^iîurû obwrvé
aussi par Maiorescu, 107»
gfrkfan^ By^lan, 235. nous prés4;ttte le mot diaprés M. Nanu, TC*'flft. Le
mot est -il croate ? je llgnore. Mais je crois qu'il vaudrait mieux, si le mm
cîtiste en ir., iV^plii^ucr à. l'aide du ghckan {et aussi ben^attï) du dr, han*
gubàiî, 6, fém, -d, est croate. Chez Byhan, 123, nous trouvons fûferW,
gurû^ Bylian, 127, Nous avons beaucoup plus d\ipplications pour 1c
domaine roumain, j'indique seulement pour ir* gurù de jâ^er, 6, et gufd dt
hmeiâ, an, -a, pî. -i, -eîe^ >, 6, Byluîi, 252. Le mot n'est pas général.
A 8 il est perdu, on dit seulement kciulm.
A. BYHAH^ fstnwumânisches Glossar jjl
korn, dy Byhan, 247, avec les formes suivantes : kornu pi, hrm,
koruna Byhao, 248, est très intéressant, parce qu'il représente différentes
nuances de sens originaire, qui ont été oubliées par M, Byhan. Le sens géné-
ra! du mot était e couronne*. îl nous présente dans les dialectes roumains des
formes irès intéressantes. Pour Tir. les résultats des recherches de M* Nanu
et pour le mgL les résultats de M, Weigand ne me paraissent pas satisfai-
sants. Du lat, cûtûna nous avons en roumain cununà, ir, comna et les
dérivés: fl ïiwttium^ a éTh*! w«4 -faire un mariage, mettre une couronne sur la
tétc, La forme postérieure cmmui} désigne la monn-iie et la couronne des
monarques, d'où le verbe a tncoromi == couronner. Pour le premier sens je
puis donner les formes méglénes : curûn inL curutmri^ d*où le dérivé
airmmtt{f s. pL dans le sens de taxe d*iin curé pour le mariage; p,
ei. popa duHd curunati^î = le prêtre recueille les taîtes, v. M, Papahagi
Rùmûniï àin MegUnia. (Texte si glossar), Bucuresci, gr. 8», 1900,
p. 39. En ir. le root n*existe plus avec ce sens. On dit seulement : aitâx H
(Fusagc du pronom relatif est un reste du dr.) mcgu po^ûkom (syntaxe et mot
slaves). Le mot hruna 7, ne signifie pas h hak d*épines i», mais seulement la
couronne d'épines de la haie , de même en Banat cununâ de spini ^ ir*
Jkoruna Je 5pu\ Pour M. Nanu il faut observer qu'il est difficile de parler de
la terre « prtnde se kona i>. A 8 on appelle loruna seulement les parois d'un
^raod trou. Le manque de terre a obligé les paysans à pratiquer des
grands trous dans les roches; on apporte la terre sur les parois où se développe
Isi pauvre récolte de ces Roumains. Le nom de hùruna est tout à fait justifié,
p?iir Taspcct. Pour la couronne on emploie généralement le mot allemand
.^fCrùttf sous la forme kruna, laquelle existe aussi chez les Slaves,
kosWej ast.-a 4 comme en Banat, cf. auissi dlrjulâ avec le sens de « maoche
^eU faux. » •
krptây asi.-iî, pL -i, -fh^ 6 Byhan, 254 et Bartoïi, 5 s* D*après la phoné-
tique je crois que cette forme est la seule générale.
krtvàr quelquefois est prononcé comme le mot slave kmvar. Maison peut
^■^mirquer que le roumain l'ukar est aussi connu et usité. Dans le sens de
'taureau comme Va remarqué aussi M. Byhan est invraisemble,
kurudi pipa, 7, Byhan, 259. Cette expression existe aussi en dr ban.
îxdi^^ 6, Byhan, 269, mal présenté. Je croîs qu'il y a influence slave»
màHàku^ 4, forme masc. de mal^ka^ « matou ■. La forme mqtstik-u de
3ii. Weigand (v, Byhan, 282) me paraît invraisemblable. J'ignore si la forme
«st â rapprocher de la (orme albanaise maùok : mais je pense que le mot est
le même que le dr, mi(oc (m/foc suffixaugmO-
tnâtâf Valdarsa, dans la locution f^r tnârf mârë = noble, et aussi, ironî^jue-
inçnt, ariâtûcrate.
tmx,-ti, 5, Byhan» 275, Bartoli.6ô- Le mot me^ de Maiorescu n'existe plus
^U|ourd'hui, La forme que j*ai observée était dans b phrase : korii*i dé hrai^
^^^u-i n luntru la gîtndû ^ dr, çoaja j^lnndtî t a/anl, iar mie^nî in hluniru.
3P COMPTES RHKDUS
Parallèlemctit à me{ on trouve en Valdarsa aussi ; mléif p, ex» ânÈr^ kârdê
di p&gâU-î mîéi =s dr. Inîn çojiU paplcîî U mk^^
mktesk^ Byhan^ 278^ Bartoli, 60^ existe aussi â a, ex, mkk$k ukâm. Non?
avons en Eanat mïdm :^ ir. matsohi ^n fléau*
mîrlœsK st* mîrktsk aik, 8» comme en Banat (coi tus extra-naturd des mou-
tons).
multa ^ MHg ^ pedfipm \ ces troîs formes sont simultanimenî usitées dans
le sens d'atnende pécuniaire,
wa« = mtmt, lequeî est plus asîié, eï. mai wiim ^ dr, nrnl muit = beau-
coup plus.
nJdfsk, -i sdptmu, sekstra, eic«, aussi dans la forme a pure mJa, 4, ^souder
de nouveau, h ûa prcnëdi roba == coudre une pîèce^ réparer les linges,
nàkmmîa existe aussi à 6 (Byhan, 285) — enclume.
ûhTalà^ pL-^ 4. Le mot existe donc aussi en Valdarsa» M. Byhan, 291,
nous donne une forme o/^ic, laquelle» je crois, n*est pas justifiée*
cbruiu^ 6, Byhan, 291, dans le sens de cerceau.
0vtsâr^ optsâr et iohân. M y aussi pekurâff cf. dans le dialecte du Banat
pikurar = berger.
pastir-u, pL -I, 4, du m^me village que le mot de M. Ganner cité
Byhan, jOî, et dont la forme est phonétiquement fausse.
parts de M. Wcigand, cf. Byhan, 319, me paraît incorrccu J'ai entendu
pîris 8, il y aaussi^îVlJ 4e {aprr (évolution du î en * jusiiiiée).
pditùr^ Byhan, joj, eiisie aussi en Valdarsa» par ex., au lieu de km'tam (mot
slave), on dit aussi /»iWor« de kâF ^ — un berger de chevaux*
ptkâtf -If, pU fk\^ par B^han^ 517, ex. dans la phrase pekâuk st i^Hakm an
pîfgaiùrie (l^ pêchers se nettoient dans le purgatoire).
pf^a 8 ^ balance* Le verbe est speitsk ipe^(u 8 je n'ai pas consul é la forme
de M. Byhan, 506, pe^tih,
phkoîiisâ, aussi prkolitiâ 4 = une histoire comique. Le mot est skve,
V. aussi M* Weigand dans les addenda au glossaire de Byhan, p. J98.
pïàknisk^ -I, it 4 = cracher, U forme de M. Gartner (v. Byhan, jio) et
fausse, l*avis de M. Byhan est tout à fait justifié,
prâh-u^ Byhan, pi, = poussière et poudre» ex. prâ!^ de pukm U pre
kik'iprâku. En Banat prah-praf parrintermédiaire de'pray a donné prnu ^
pûadre ; la poussière de la rue s'appelle en Banat ptdhàr
prikinif Byhan, 319, a deux sens : 1° luxer, disloquer, et 2* détacher.
Pour le premier sens h remarque de M. Barioli, 57, contre M, Byhan rclaiive-
mcni à. ahaie est juste, parce qu'on dit pour « disloquer » : p. ex, fata i^
prikinii mùm 6 ^ b filJe s'fôt disloqué la maïn, Frikim = détacher, de
M. Byhan et M, Nanu, est général à 8.
riqd, Byhan, 332, n'est pas bien traduit : ru^a désigne seulement la fleur
du raisin. Pour « vigne », existe à 8 le tnoi %a, comme en Banat*
4
A. BYHAN, Istrorutnànisches Glossar 333
sârèirâf Byhan, 346, a pris la même extension que le dr. insàrcina = peser,
charger. On dit p. ex. en dr. insarcina/U (o muierc) = grosse, enceinte ; en
ir. on dit dn sarèird-i = dr. ban. grf de greu (Ipurd).
skof 4^ Byhan, 339, inexact. La phrase suivante peut nous expliquer la
faute de M. Byhan, shofu-ipre kâp la veskovu, kârle fermer = la mitre est sur
la tète de l'évêque, qui donne la bénédiction.
skuUky Byhan, 342, a encore un autre sens. Skutek est le tablier des
paysannes replié en forme de poche pour y mettre quelque chose. Cette
habitude existe aussi dans la Croatie.
stupy Byhan, 355» a perdu son sens. Il est employé comme le mot dr. à
4 (ruche).
Joseph Popovici.
CHRONiaUE
La mon de G, Paris (j mars) a eu, par tout k monde Tcfiré» il« éoulciu-
reuK retentisse m s; m. De toutes parts ont afflue au Collège de France les télé-
grammes et les kttres de condoléances , les adresses ' , De maint càîè on a
manifesté le désir d'honorer b mOmoÎTc du défunt, sok par des publicaûons
spéciales, soit par des fondations ayant pour objet de permettre à des étu-
diants en langues romanes de poursuivre en France leurs Études. Cette der-
nière façon de perpétuer le nom d'un maître vénéré est assurément celle que
G. Paris eût le plus goûtée, A tous ces amis connus ou inconnus, fa famlUc
adrtsse ses vifs remerciements, auxqueb le directeur de la Rûmattia^ à qui
aussi maints témoignages de condoléances ont été envoyés» se permet de
joindre les siens.
De nombreuses notices ont déjà paru sur G, Paris, qui toutes rendent un
juste hommage au savant êminent, et doiH la plupart portent le témoignage
d'une profonde sympathie pour riiomme. G. Paris n'était pas seulement un
grand savant, c'était un grand cœur. Il avait des trésors de bonté pour tous
les travailleurs en qui il reconnaissait le désir sincère d*apprendre. Et cette
bonté ne, se manifestait pas seulement en paroles, eïle ressortait en quelque
sorte de tous ses actes et de toutes ses pensées. Entre ces notices, on signa*
lera ici les suivantes :
France : A. Beaunier (Figarûf 7 mars); G. Deschamps {Tfmp§^ 7 mars);
A* Chaumeîx (D^bais^ 7 mars); Mclchior de Vogué (Dc'^/i, 8 mars);
Ml BréSl (Revue àt Paris^ ij mars); M. Sepet {Polyhibitottf mars); J. Psichari
(Grande revm, icr avril),
ALLEMAGîiE : E. Stengel (Dk Nation., 21 mars); H, Morf {Frankfurter
Zdlui^, II et 12 mars); M.-J* Minckwitz (BHhgi ^ur Altgtmeinm Ziitung,
21 mars).
Belgique : O* Grojean {Rn'ttf de Belgique) ; Wil motte {Rnmt de tituir,
ùuitL ttt ÎUlgique).
FiKLAKDE i W. Sôderhjclm (Neuphihiefisehe MHUUungiH^ Hebiiigfof^).
HûtXANDI : Ji'J* Salverdit de Grave (De Niderïatmhi Spiciaiûf^ *90îi
t. Le jour des obsèques, M. Levasseur, vice- président de l'assemblée des
professeurs du Collège de France, a donnée à la suite de son discours, t'énu-
mêratioQ de celles de ces adresses qui, à cette date, avaient été envoyées par
divers corps savants.
CHRONIQUE 3 î S
n^ ij); A,-G. Van Hamd (De Gids^ avril, en hollandais; Muséum î« mai,
en français).
Itaj-ie : V, Crescioi (H Veneto^ de Padoue^ lo mars); P. Eajtia {Mariûcco^
Florence, 15 mars); Fr* à!0'>i\âiQ{Fûnfuîlû ddU £feiTwii«;a, Rome, ij mars);
A. d'Ancona {Giomah£lialia, Rome, 16 murs); Ascolî {Rtnâkonti du l'Insti*
tut Lombard, 2^ série XXXVI, p. 351); E. Teaîa (notice lue à rA<:adêmîe do
Sciences de Padouc, le ai mars); E, Monaci Q^uova Antoîogm^ i^ avril),
RoOMAKi£ : O, Densusianu (Bucarest).
Suisse ; G. Muret (La Semaine Utiéfahr, Genève, 14 mars).
Les obsèques de G* Paris ont été célébrte avec solennité ïc ti mars.
Dans îa cour du Collège de Francei à la place où tui-méme, etï i%2» avait
prononcé l'éloge liinébre d*E* Renan, des discours ont été lus par MM. Chau-
mié, ministre de rinstruction pubHtjue ; F. Brunetière (Académie Française);
». Perrot (Académie des inscriptions et belîii s lettres); Lcvasseur (Collège
de France); G, Monod (École des Hautes Études)? P, Meyer (Conseil de
Perfectionnement de TËcole des Chartes); Morel-Fatio (au nom des anciens
t'ièves de G. Paris) ; L. Havet (au nom des anciens élèves non romanistes
de G, Paris) ; E. Berger (au nom de îa Société de l'École des Chartes) ;
G. Sicffens (au nom de l' Université de Bonne); A Thonjas (Société des
anciens textes Trançais). Ces discours ont paru, en tocahté ou en partie, dans
les Whats et dans le Temps du 1 1 mars ; ceux qui ont pour auteurs des
membres de rinstitut ont été réunis par îes soins de ce corps savant. On
reproduira ici ceux qui ont été prononcés par des collaborateurs de la Rùmama,
Discours de M. Pmd Mtym^y
mttiért de Vïmtitni^ dWtdtur de PÈcoU des Charles.
L'Iy:olc des chartes a sa grande pjirt dans le dcutl qui nous afflîgt* G*siati Pïrii avait
conservé t*n« affeaion lîïialç pour celte école où H avait bdlR- comme élève, où if éuh
rcfitrc en iSSt, à h mort de son p^rc, comme membre du Conseil de perrcctîonnemctit.
Il prenait une part active aux travaux de ce Conseil, assistant aux examens^ criiiquanl
<?t discutant avcc uiia incomparable autorité ks thèses qui lui étaient soumises. La
ctemièrc fois que nous le vîmes p^mii nous, c^était a la fin de janvier» sa fatigue était
^î èTidetiie, la pileur de son visage attestait si clairtnicnt k^ ravages de h maladie,
«)ue nous avions ]ti cœur serré par l'angoisseï tandis que. d'une voix aiaîbUe, il argu-
i~iicntiit av^ec sa précision et sa logique habituelles. Nous l'admirions, mais, le connais*
%^tit| nous n'éiioni pas étonDês. L'énergie dont il fit preuve ce jour-là, il ta montra
<la.ns toutes les circonstance» de m vie. KIlc 4vait sa source dans un profond sentiment
vlu dcvoirl Pour lui* le devoir . dans les petites choses comme dans les glandes, com-
ï>qrtjil wne obligation absolue, qui n'admettait aucun tcmpêramein. Ht cette obligation
I M 1 l 'étendait parfois au delà des justes limites. Le devoir du professeur, chef d'école,
^y&nt pour ainsi dire charge d'imes, n'était pas limité, selon lui, a l'ceuvFe de l'ensei*
jgDcnnent tx axthedra ; il se continuait en dehors de la salle des cours* Ceux qui n ont
- pas vécu près de G» Paris sont frappés, assurément, du nombre ci de ïa variété de ses
I Orcrits ; ib admireraient bien d4vantage s'ils savaicrît qu'il a été pour beaucoup de ses
^l^vcs un coîUbonteur bénévole, révisatit et surveillant leurs pnbïicAtions, Combien
«le foi» ne l'ai -je pas vu négliger ses propres travaux pour rcvoîf ceux des autres ï Le
%crmed*« «iltruisie », introduit par la philosophie positive, semblait avoir été créé pour
3}6 ^ CHRONiaUE
Ddni ce% conimiS'StQn& qui iiouï cmlèvcni U ntclllcuri: pirt de notre tctnpSi £t où^
par ïOQ ascendant naturd, il prenait bîent&t iific pUce prépondcr^nte» il se Uissâit
cbafger de h plus lourde besogne. Qm'iI *'igît d^examincT une proposition» de fédiger
nn rapporti de faire un di^iconr^, on le trouvait toujours pfi-t. îl eût été incapable éc
cotisenrr une fonction qu'il ne se serait pas cru t;n état dt remplir ssloii les ciigencés
de «a conscience. Pendant plus de vingt-ciîtq ans fl avait été l'une des lumières de k
Kction d'bistoifi; i:t de pliilolagîe du Comité des travaux historiques, dont il était vice*
président. IL y a quelques mois, sentant ses forces diminuer» il donna^ je devrais dire
tl imposa sa détnissio.i. Plus d'une fois il me manifesta rintention de se retirer du
Conseil de perfectionnement de l'Ecole de* chartes. Par amitié pour moi il y renonça*
n aurait pu du moins, et je Vf invitais, alléger sa tache. Il ne le voulut pas.
Entre ks nombreuies commissions dont il faisait partie, celle à laquelle il m rapporté
la collaboration la plus cllîcact: et U plus prolongée est la commission AcaJeniiijue de
V Histoire Uitèrain ÎU la France. U y était entré comme membre adfoint, petJ iprès »on
élection à l'Académie des inscriptions ; il y remplaça San père, comme membre tita^
laire, en 1881, Pendant les vingt-cin(| ans qti'il y a travaillé» tl y a accompli plus que
sa part de l'oeuvre commune. Les articles qull écrivît pour THhiGtrf Uiiirmrf ne sont
pas de ceuï. qui valent à kurs auteurs «i les g^lorieuit suJïrages du grand public qui ne
peut louer que ec qui l'intéresse », comme le disait notre regretté cottfrcre Hauréau.
Mais, ^au sentiment de» hommes compétents» les mémoires qu'il a publiés sur les
romans de la Table ronde dans notre trentième volume^ sur JoinvUle dans 1« trente^
dcuTtième, sont de véritables livres qui sofltment à illustrer un savant-
G. Paris n'obtint que tardivement ces *^ glorieux suflFra|çcs du grand public ■ que
dédaignait Hauré;iu. La notoriété lut vint d'abord « sans qu'il la cherchât, par m petite
Hiâtmrtde la Uttèraiure fran^aite du moyat âge également remarquable pif Thabite clai»
aîiication des faits» par la critique avec laquelle sont résolues les questions d'origine»
de date» d'attribution, pat la mesure dans l'appréciation des œuvres. C'était, dans »
pensée» la première partie d*un t Manuel d*ancien français * qui devait rester inacbeté.
Combien d'<tuvres iî commença qu*il ne put finir» combi^i^n de projets il forma qu'il
ne put réaliser! C'est encore en vue du grand public qu'il publiait, Il y a peu de mois^
dans une collection de ces résumes que ies Anglais appellent des primer i^ un uuvrage
du même genre, mais plus étendu par le sujet : un exposé gênerai, en moins de Kjo
pages» de la littérature de la France pendant le moyen igc {Mfdixtvit frntfh Utetaltir§%
embrassant toute Thistoire liitèraiire de nos ancêtres depuis Tépoque mérovingienne
jusqu'^ la 6n du \v* siècle. Dépourvu de tout appareil d'érudition, ce petit |ivr« csi
une merveille d'en position claire et serrée, [^rsqull paraîtra en français il aura chez
nous le succèï qu'il obtient maintenant en Angleterre,
Ses articles de la Rft*ué dt Paris et de U Hefia dei Dtux-M&ndes^ qui attirèrent aussit&t
l'attention générale, ont été composés dans ce* dix ou doiiKe dernières année». Il y fil
paraître des qualités de style et une richesse d'Idées qui» en dehors d'un cercle restreint,
étalent ignorées de ceuifi qui avaient entendu parler de lui comme d'un grand lavant.
Ceux de ces articles qne» p^r suite de circonstances panicuUéres, [e suis en état d'ap-
précier» son ei>aî sur Fr. Mistral par exemple» m'ont frappé par leur parfaite juftesse.
En Angleterre, où le$ savanti les plu« illustres aiment» plu» que chez nous, I répandre
leurs idées en dehors du petit monde des spécialistes, il eût été classé parmi le* premien
l[ pcnj4t£» lui auaai» que le devoir de? savints est de travailler non pu seulement iii
perfeetionnement» mais encore h l'en pan sion — je n*oMrais dire i la TulgariiA^ofi ^
de b idence. Il croyait surtout qu'it impofUÎt au premier chef de réptndie la conoalt-
tance des bonnes méthodes de travail. Avant même de poursuivre cette liehe dant son
tnâêignement — et il avait professé dès l'ige de vîngt-sept ans — il y avait travaillé
par ses écrits. Ce devait ètre^ dahs sa pensée, le but Éinal de la Rét^uf miù^m, qui]
fonda, avec quelques amis, il y a trente-tept ans. Certes les quatre jeunes hommi^ qui» à
la tin de Tannée iK6;,se réunirent dan » Tarn èft- boutique d'une modetie librairie pour
établir les bases d'une revue légèrement révolytioniiaire, étaient animé» des ntcmei
CHRONiaUE
337
P
«cnumcnti^ TpuSp forts d'une science qu ibiic pouvaient pas posséder depuU bien long^
temp», tous avilent le fertnc propos de signaler les boui livres, et, pins encore, de siig-
matiser îe» mauvais, de rcnouvdcf notre hiut cnsçignanient, de réfotîiicr bien d'Antres
choses, mais celui des quatre: qnt formula ^vcc le pluj de nette te le crtaîo de U jeune
école, ce fut G. Paris. Presque toutes les conceptions qull développa plus tard ne
retronvent vn gfrm« dans ses articles des quatre ou cinq premières annë{:s de la Revue
(rffJfHc. Et qnand, en 1868, Duruy fonda l'ilcok des Hautes Etuies, c'est parmi les
directeurs et conabùrateursde la Rfvue (riiitihf qu'il trouva la plus grande partie de son
Iii:i^onneL Maiatenant, et depuis nnc trentaine d annce$, nous avons CAUse gagnée*
L'ctticignemcni tcchniquç, spéciiil. rigoureusement scieiitîliqnt% que nom :ivio«s en
vue, a triompbé : parfois même nous avons pu craindre qui- notre snccés ait élc trop
complet. Lorsqu'il devint visible que les idées pour lesqjuelles luttait la Rfita critifuê
gagnaient du terrain, les quatre fondateurs du recueil se retirèrent les uns après Ii»
autres, cédant leur place à quelques-uns de leufs' collaborateurs, et sciWireni châctin it
voie,
Cctt vers ce l^^mps (1873) que G. Paris et son plus ancien compagnon d*étndes fon-
dèrent la Rfimania. Puis naquit la Soci^^té des anciens testes français (187^), I laquelle
Pitris réserva jusqu'il son dernier jour b meilleure part de son activité.
Mais Paris n'avait pas renonce A Isi critique des livres d'érudition, œuvre qu'il fugeait
de pfemîèfÊ impon;ince et à laquelle U sikctc de son jugement et Tètonnante variété
de »cs connaîssancÊS le rendaient éminemmetit propre. Il publia un grmnd nombre de
critiques trè* spéciales dans îa IhmaHia. Il est tel de ces comptes rendus qui renouvelle
te sujet traité dans le livre critiqué. Ailleurs, dans h Jounmî d€s SaiMnii , auquel il colla^
h^r^ pendant plus de vingt ans, il pratiqua un genre de critique plus large, admettant
Hfïn seulement l'examen des livrci^, mais aussi une ample exposition des sujets traités.
U aimait ce joutnaU où il pouvait» sans négliger h pure érudition, répandre le trésor
d'idées générales dont il était pourvu. Aussi êpron\-*i-t-il un vrai chagrin quand il vil
que ce vénérable recueil « né souis Louis Xt\\ interrompu pendant la Révolution et
VEmpire, revenu k la vie en iëi6, était menacé de mort subite par le retrait de la sub-
vention ministérielle qni !e faisait vivre. II fit des efforts énergiques, hors de propor-
tion pcul-étre avec îe but à atteindre, pour f>rolûtiger rexistence du journal qui lui éuit
cher. Et il y était parvenu ^ an prix de quels soucis 1 lorsque sa mort est venue compro-
mettre l'avenir de l'œuvre si péniblement reconstituée. Puisse le Jourmt deï Sattmii
trouver un directeur digne de celui qui^ déjà accablé par la maladie, ». su retracer son
bistokfe d'une façoti si magistraile dans le premier fascicule de la nouvelle sériel
Si j ai fait quelque effort pour mettre en son plein jour la valeur morale du savant
hors pair que nous avons perdu, et que nous ne rempUccrons pas^ je n'ai rien dit de la
direction de son esprit. En raison même de rindépetidauce de ses idées^ ses sentittienis
étaient ceux d*un pur libéraL II était libéral j l'ancienne mode, i la façon de Laboulaye.
Tun de ses prédécesseurs au Collège de France* Aussi n'eutil jamais k désir ni même
la veilétté de jouer aucun rôle politique. Ceux qui ont joui de son commerce, on qui
roilt entendu dans certaines assemblées^ pir exemple au Conseil supérieur de Tinsimc-
tion publique, savent avec quel esprit large et ouvert il envisageait les questions qui
ti#us divisent. Je n'ai guère parlé des qualités de l 'homme privé. Il serait difficile, en
ce moment, k celui qui pendant quarante ans fut son ami et son collaborateur, d'en
parler sans éprouver une émotion difficile à contenir. Qu'il nie suffise de dire qu'il y
avait en lui une noblesse de cœur que yinms n*eâeiirjt une pensée égoiste, utic sensi-
bilitê exquise qui parfois le rendit malheureux. Tonlc inîustice, toute atteinte à 1«
vérité, Texaspérait; et si d'injustes accusations étaient dirigées contre ceux qui avaient
Aûn estime, il s'en indignait et en souffrait plus qu'eux-ruèmes, jamais je n'ai connu ami
plus sûr et plus dévoué. Irrésistiblement, lorsque je pense k lui, me revient en mémoire
ce vers naïf d'une de nos vieilles cbansotu de geste :
Li «uers d'un homme vaut tôt l'of d'un pais*
Mtmtwit, XXXIÎ
22
33»
CHROE4IQÏJE
BiïùQurs iU M. A. TAcïMWJ. prûfmt'Ut à îa FtiruUr M Uttrêî 4e Pêrii^
^istâenl di lu Sodt'ié du tincûns ttxki frun^is.
Au HQm ât U Soclélè dés incieos lexi^s frioçiis» j^ vitîii idfcs&cr le «.:''— ^^^ti
à celui qui fut ton prttwtpftl foiiditctii ci i|a'cl]ç ^hoiAit pour 1j préside/ <•
4J!j9lfcit££ï. Atterré par le c<»up qui notii a frippcs lïi brDSî|ucmeïir. je ne du ., .:-^ ^-^ k
peindre au vif n<H regrets et l'int^rtisitè d^utie doyteur à jamii^ mC4>utol3bIe ; inii& je veui,
CD rappcUtJt <[yellc pla-cc Doirc Société a «>ecupée din» là vie kî daii* le c*Kjr de Gaston
ParU» faire compfetiirt rombicn graodi* e*t (imtc pan dam cette commujiaijtë de deuil
lit de détresse qui no^s f^unît^ aujcïurd'huif autour de sa diêne dépouille. Li Société
dct Anciens Te&ces Eran^aîi est née pour ainsi dire de lui et c'est lurtout pai lui qti'dk
a vécu depuis ut naisunce, c'est <^â'dire^pe:Ddant ving-buit a.ns. II nous a donné à U
loti et le preaeîgc de «on nom univcrïdkmeuE honoréf qitî nous â g*gti^ de» U prc'
ittjèic heur« les sympathies i:mpf»iéËS d« tout !es hommes d*étiide et de quelque»
lutre», non seule fiïcni en France ruai* k TétrangeT. ei le concours efficace de son
libeur iufitigâble. auquel «lous devons la panie là pltis solide et en mente leitips II
plus trilhnte de l'œuvre accomplie lusqu'îcL Un boo nombîï de no* volumo tmt
p«rti tous soEi nom ; niais U liste de ces volumes ne suffit pas à donner une idée de
Km activité. El ft'est ^ucrc de volumes dans notre coltecticm qoi ne doive quelque
clu»e h «a science incQinpar^hle, toujours prête à venir en aide â ceux qui en avaient
beMïtn ci qui sadressateni à lui sana rcHchc, nMH itiènai^fTienti s^ms merci, ^vec l'tl'-
luiîou é^uistc ^uc cett^ itïurcc merveilleuse m UfïSiiAit jarn^îi, l*e télégraphe fiou*
aviii dc{i jppofte U nouveHe foudroyame de la mort que Tun de noy* recevait cncotc
une tetiitic dVpreuve^ ai!i sa main défaillante iviit itiscHt de suprêmes observatiotis«
Nos rejgrett seraient des remords *i nous ne savions quelle joie intime c'éun fwur lut
que dç se dontïer tout entier Jl ce qu*il aimait* Bt c<3mmc il lea * ainiés ces tctt«s dt
latïgue d*od ou même de langue d'oc, où sommeillent d« parcelles d'ime de la vieille
France^ que nul mieux que lui ne sut éveiller et animer! Lui que tim de ticbe%
plus éclatantes solliciuient, lui qui n'ignorak aucune defi^ jouissances que dimnetst les
manîfeJitattons les plus liautcf et les plus dèlicirtei de le^prlt humain, i! ne craigjnait
pâi, que dii-Je? iî se Ëiîsâit gbite de deiscendre au r^le modeste d'éditeur, de c<m»-
mcnutettr, voire de simpk copiste quand il s'agissait de quelque le^ie médiéval Kim
COtttçnt d'en pénétrer le sens Intime, il savait retrouver sous les défaillances des scdbe»
somnolents, comme par deli les audaces novatrices des générations oubUeus<s, iâ,
pureté p U sincérité de rinspiratti^n et de l'expression primitives Pencha sur le ber-
ceAU de notre latigue et de notre littérature, il &'abiorbaic dans Je laWwr phOologiqtte
coftnme damutn culte religieuï, (Comment ne pas reconnaître que l'atnour dei ancien»
textes f rinçai Dr était la forme concrète par eiicellence que revêtait dans son cteur éprta
dldéal cette passitiu ptjur la !icience, pour la vérité, pour k patrie « dont il a dotinc
lAtfl d'âutet preuves, et qui illumine de reAets d'auréole touu u carrière «cientili^ue»
Intcllcctndlc et morde I Aussi, Messieurs, maintenant que nous lepkuton*,dti milieu
de DO» Ufmei surgit, comme em^né de lui, un rayon de sérénité et de réconfort. Oui,
itiifire *énê(t« tioui ferons violence i noire douleur, nous nous dêb»ittrons contre Tan
goisse qui étreintuo» cccurs, nous »ecoueri>n4 U stupeur qui paralyse nos c^iprits pour
B<7us appliquer de toutes ntis forc<^ à ce qui a été votre pensée U plus chère. Cette
tftcbe que vous noua avca assignée et dont vous nous avez fait comprendre par votre
eseoiple toute la noblesse, toute la sainteté, nous la continueroins «toiquemetit* sait*
1PUUS, héla»! mai» en pensant à vou«,^ en nous inspirant de vous, en travaillaut en
quelque sorte pour ramour de vous, iân de disputer 1 la mort le principe de vie que
vous aoîfs avfâ laissé.
CHRONiaUE 339
Discours de Af . Marel-FattOy professeur suppléant au Collège de France^
au nom des anciens élèves de Gaston Paris.
Les anciens élèves de Gaston Paris doivent un dernier adieu à Tincomparablc maître
qu*ils viennent de perdre et qu*ils pleurent. Nous sommes encore si meurtris du coup
qui nous a frappés que nous ne pouvons pas mesurer toute l'étendue de cette perte»
mais nous sentons du moins très vivement qu'un grand esprit a disparu qui nous gui-
dait et nous réconfortait, qui maintenait l'union et la noble émulation parmi nous.
Il fut, en effet, dès ses débuts dans la carrière de l'enseignement, un directeur de cons-
cience tout autant qu'un directeur d'études, un juge singulièrement habile à discerner
chez ses élèves ce qui les rendait aptes à collaborer à l'œuvre commune, un merveilleux
excitateur révélant i chacun sa vocation et les meilleurs moyens d'utiliser ses efforts ;
plus encore, il fut l'ami affectueux et dévoué de ceux qu'il sentait dignes de son estime
et de sa confiance.
Gaston Paris, qui concevait le monde entier de l'érudition comme une plus grande
patrie et honorait sans se préoccuper de ses origines quiconque mettait au service de la
science des intentions pures et dc^ntéressces, était avant tout profondément attaché k
son pays et soucieux de sa grandeur morale. Il aimait parfois à rappeler qu'il éuit de
pare race française et que les liens qui rattachaient depuis tant de générations sa
famille au sol de la Champagne n'avaient jamais été rompus ; bien souvent, il mêlait k
ses conversations intimes le nom de son village d'Avenay et les souvenirs des années
d'enfance qui le lui rendaient si cher.
Oui, II fut un vrai Français de France ; il possédait éminemment les qualités qui ont
toujours distingué les meilleurs de notre nation : la vigueur intellectuelle alliée au sens
critique le plus fin, la pénétration prompte et sûrs, l'art si difficile d'assembler des faits
et d'en extraire des idées, le don du mot juste et expressif, et, comme couronnement,
la grâce souriante, la bonté exquise qui prêtaient un charme si vif i son commerce et '
lui ont valu tant de précieuses, tant d'illustres amitiés.
Ce cœur généreux a cessé de battre, ce beau foyer de lumière qui nous éclairait et
nous réchauffait s'est éteint. Nous sommes comme désemparés ; mais ne nous laissons
point abattre : ce serait bien mal répondre à ce qu'il attendait de nous. Son ime vaillante
et fière n'approuvait pas les hommes qui s'abandonnent. Nous l'avons vu dans ses der-
nières journées, le corps déjà ruiné par la maladie et soutenant à peine la pensée encore
alerte et précise, lutter héroïquement contre la souffrance pour conserver k ses élèves,
k ses élèves étrangers surtout, accourus de si loin pour l'entendre, le bénéfice de sa
parole et de ses conseils.
Qpe cet exemple nous soit toujours présent 1 Efforçons-nous de remplir strictement
tous nos devoirs comme il le faisait lui-même sans trêve ni repos ; accomplissons notre
tiche dans le champ qui nous est assigné, en nous inspirant de ses travaux et de sa
doctrine. Ainsi seulement nous réussirons à rendre à sa mémoire le culte pieux qui lui
est dû, et nous aurons mérité le titre, qui est et restera notre orgueil, celui d'élève de
Gaston Paris.
Discours de M. L. Havety vtembre de VInstitut,
au nom des anciens élèves, non romanistes, de Gaston Paris.
Si on me demande k quel titre je viens parler ici, je dirai que je représente ceux
qui ont en le bonheur d'être les élèves de Gaston Paris, mais qui ont consacré leur vie
à des études autres que les siennes. Je pourrais répondre aussi que si je suis k cette
place, c'est que la douleur se soulage k exprimer l'admiration et la tendresse.
Je me rappelle qu'en un moment où j'avais k Gaston Paris une obligation particulière,
je lui offris une brochure insignifiante avec cet envoi d'auteur : « au maître, au patron,
340
CHROKIQJUE
1 t'âmt et i r^ntfJM cortew. * Dius Cf^tte salyutioQ de Danic 1 celui qii'il ippelW le bon
mdUrc. )>^'f<^rmaLi l'idée f lii, pir-desiuï tout Autre, unit ici nos trîsUs pensées* Cir
ce que nous pleurxîtti, ce n'est pas seulement le savani et le professeur. Ge n'cit même
p*s* tout d'abord* Fami ïncompiir4ble. si délicat à pétiécrer d*t)S ï*âme d^autrui, qai
iav*it cultiver et fîatiiis cti cUdcuti ce qu'il vopit en lui de mcineuT ; qui aidait les
peuncft âvçc H homi d'un père et U simplicité d'un camarade, et qui, dans £cs jdurrt
ter n blés qa*on ti oublie jamjis, et qti» peu i peu fout de notre mémoire un dmctiére,
irouTtït les mois qjUÎ bercent et dpaiïent. Tout cela ne vient qu'au secoi^d tmg- Pour
TTia pilrt, j*Ai commencé a aimer Gd&ton Paris dans un temps où je ne lui devais ricti
encore ; oè je me me ilgutAîs p^s que je pusse î^mjis me dire son ami ; oà fcUis
d'aiUeui^ inCftp«b]e de mesurer *« niji'ttrfsc et de pressentir IVtinn qu'il cicfcexait luf
Iji pensée uvaiîtc de ce pays et de J'oniversK Mou Instinct navice a été d'emblée h \<»u
eoMtne Tceil à h fumiere. Ki îl me semble que l'oHet printipiil de tiotfe deuil n'est m
U blessure des cixiirs, ni utie seîence décApitée ; ni la Franee, autioiodrîe d'nn âls pins
filial que tout autre, et ^jui a f*it plus que personne pour Kieiller toute la ptȐ*ie des
ancêtres, le son di: leur voix, leur sefitimetit et leur pensée. Tf y a pis encore que ce
multiple désastre : il vient de dispartttre une nature tinique^ an équilibre ciqnis des
(acuités les plus hautes, où 1 on it aurait pu dire ce qui était le plu« noble, de Te^prit
OU bie& du cœur.
Soydim s*cst érauoui un charme que les années n*jV4knt pu vicîlUr» et qttî *eraîi
dfmeuté prinunïer fusi^ue dans Thiver de Tige. Déji }c ne $j;îs plus^ ou jie ne vcui. pïuiL
savoir, combieu les cbevcuï de mon cher malipc avaient blanchi: mais }e vobetic^
^-crra* iiïuïoim ce icHîiire, qui à soîsjintc 4BS restait plein de U eundeur premfèfe. F
cruauté de La mort semble avoir saisi iHris dans sa Heur, ciïiiitiie le |cunc fttuftJfé,
qui, dit te poète grec, les Bâts mouvants ont dfïcé la he4utê de U jettocssc
L>tj» l'ordre de la science, Gaasm P^ns était un ^f nte^ Pemploîe eaprèi ce fpraad
mot. qui ne te dit ^éne que des poètes, des capitaines et des géomètres, et ce ti*S«l {
l 'affliction d'an|onrdliul qui me le suggère» Il y a une vingtaine d'années* fe ive il
pelle avoir discuté ivec un Autre tfcs cher maitte, aujottrdlitu dispAm, «i k
de j^nie était appUcabJe au% qualilès qni fendent supérieur un critique, ni linguiste,
un décHiflfrviir. mu «MBOientâieuf, Bt comme U ^noikm oe pouvait le rteodfc pr U
tbéorie^ nous v tépondloiis mi^ BerE^i^e et mol. eft l»ioqtt«ut oomrae ffeQTe Teicoxple
de Paris.
Ces! parce qu'il était un génie ftt'tl â fécondé i'VmttA Itudes ^oc les tiesacv A ne»
binons ruma v^ "-^-t^s venah apprendfe ooiaiaeni ^s doit ptiliUcr Stwfcupc^we ;
lNkliiritp<ar i vieui français, s'orientiit é«9s la phosftifie hy^taUkoe* Dttts
U ^i»i 4''i „, . -,,^, Itvic oâ il KmHatt ne leinncr qve 4e U {MMsaJèiv fetnçilte,
i . i et»elfQeaM»t9^ les piss prèdena. ^bc faie îsnivs fcocweiié*, isr ftft
d .1 mantts«;iiti litlns. LnNoèske, J'itlkafi, mvttît «aut et «neût f^ W«K
en^ij^ner. Mieux que ptTWOmme, il seiiiit qn^ jû nm seieaee et non pu dei i
A Vingt *dnq ani, H Tut o« àg$ §màÊttsun de U Bmm m%n
ca btôc, toute TatmotpbèR de «ne»» les hitâ^ ïà$m6qme% et ]
tisctkMi de tpécialiti»«i 4e Siens*
Lt fèoie t« «innHiaiaÂt dba 1»t ^ar aa i%nc ^ m'ê miàwtmi hiffè. feaiii }e wm
Vtà vn tilt un Urre : le lime était i&i|â Is, eomptK J^, 4|fért, ci ce fni »> tfpswl
d'ofili «Iknemaéi éétfc Cl «HO^ k fSMde in ttahr^. laittik »e M rii pc» ca lE^^
Aém de tmnîl l r«s«tt éi^t Mtt, Se »£mite était «nat pfoâigkne ^m crniliiff
iiitras ^ttl Q* loM foc éei ntooiiev : U fi^a ie «oa jngeiaatf ètsh nae dâfisation.
Lav%ve«r nt h wiMê éi II pcftiée êuieu laéei i la 4i«BtmT Jn c»«r. Nol Fc».
CàÉ> n*;! éi* pl«i lanîttnâ po«r «on <x q^ était riae dÉ k Ftan«c, |4e» MMM2CKA MQ
mlMina de «0» clMfi^«n*9e ée mvis ks Igcs. wé» des prtwers batbttfteaest» de
k pnn^ ■MfiÉiiii et aittil ém ctanaai ^ %iwmt tmm^mr d» lèvsa fen^iakci &
•aaMÉ|^90wttttt.luMiiikffc0nais4 ks psimn m OMkttAeat. DtM fr^^lgtif
m^m fà^ Moi dnanal^ «t fer U (Mik et p^r k ptvtqmt. k «ni eveit MS iii)tk
nifeet, cOh 4n «mdr et 6eiy Je k aacak. Lial-oïkiwn cîfii4«é À fMé k ^^
CHRONtaUE
Î4>
itlervir : • ha hommes sont ilivîséf, nous illMii-il dans un banquet, pïi ïes véritéf
ont liste croient possesseurs, msh h recherche de lu \érhé les uitir. * U siviit ksulî-
laritl nécessiire du meosoug^^ ^tvec l'outrage et rinjustke. On pouvait deviner k l'cn-
tendfe d^ins s» chmre^ rhamme pour ^m tout !vpect;ide d'induite et de frautle serait
«fie wîtîfÎTtncç mgnê et personnelle* lî a été au Collège de Fraoce.i rÉcoîe de* hautes
études, pendant hiéii des annéu^^ le mcme idéili$ic qu'il était îl y a huit ^ours, 1*4 mari,
veille de ^ mort, dtas une ïe^ou enfantine, oil ce tendre pi'rç enseignait k i*amu*er
de Don Quichotte» mab à ne pas te moquer de lui.
U pitï» beau des enjcignemenis, c^est de hisser de ^i un souvenir qii coilte des
l^mmcs. et qui pourtiiitt réconforte. Ceft plein d'un tel souvenir que |c àh adieu â
Uion maiirc bien -aune,
M. George Doncieuk est mon le 21 mars, diiiis sâ quarante-septième innée,
A h îtiiie d'îintr longue mahdle qui, depuis plus d'un an, Itit ïmerdisait ton?
travail C*ëîâit lïn hommu très cultivé çt doué d'un esprit tris fin* Il s'était
partkulièrement appliqué à l'élude Je la poCsie popuîiiire et y apporta ît une
critique minutieuse dotii témoigne son mémoire sur Ld Fernfiif, arigim, his^
idrf il rtîiitnttôn cHliqut J une ifmttson popidatrt fumant^ publié dans le t. XX
de k Romania, Il s'occupait, depuis ptusicurs années, d'un ouvrage considé-
rable sur b légende de Matie-M^dvleinc qu'il n'a pu achever. C'est à cet
ordre de recherches que se rattache la publication {Rmmrm^ XXII, t66)d'un
fragtnent en vers du miracle opéré en fa%'eiir d'un seigneur de Marseille,
par rimercession de la Madelcme* il avait aus^i commencé Timpression d\in
Hùmançerù f^f/fulaiti dt la Franct, qu'il laisse interrompu et qu'on espère
pouvoir achever*
— Le congrès historique de Rome^ que nous avons annoncé précédemment
(XXXJ, 641) s'est tenu en eflet dans cette ville, au Collège Romain, du 2 au
9 avril, sous la présidence de M, le sénateur P. Vîlbri, Il avait été divisé en
huit sections, dont Tune, la troisième, était réservée à Thistoire littéraire.
Nous relevons dans le programme paniculier de cette section les conimuni-
cations suivantes : Piaget, It ifmps rtmuvrt\ poème de Pierre O^ashkin^ amt-
pûs/d RûtMtf in r4)0; W* Fôrster, L'auteritkihi Jet iotiid iPAr barra ' ; d'Ancona
et Fumagalli, Sa! dt^iionanû Uo-bihUo^reipco ilaUam ; F, Flamljii, Di akune
imsitrxûU innia^ioni Haliane in poctî slrmteri dd Cinquectnîo; P* Mcyer,
Etpdmion de la latigue ffauçùiît m liait f^ pfndanî h moyen dgt \ Luiso, Di un
(ommeniô ttsedito alla D. C.^Jmiie deî pin anikhi commentahfL Le nombre des
congressites venus de Pétrangcr, en particulier de France et d* Allemagne, était
conMdérable. Les séances ont été très suivies. Le comité directeur du Con-
grès, de concert avec le gouvernement Italien et avec la municipalité de
Rmne, avait organisé d'intéressantes excursions et des expositions variées,
particulière ment à la Bibliothèque Victor- Emmanuel et à la Casanatense. Le
congrès a parfaitemetu réussi à tous égards, et ceux qui y ont pris pan en
ont rapporté un agréable souvenir*
1, L'auteur a montré que dans la niasse de ces documents fabriqués —
sur lesquels voir Rmiania^ L ^64, ^95; V, S06 — il en est quelques*uns,
d'une époque tardive, qui sont authentiques. Mais on le savait*
542 CHRONiaUE
— M* Eugène Rolknd vient de ptiblkr le î. iV de sa Fhrf pQpMktri^
histoire mtttreiîc dtiplinîtî dans Uun rapports atrc h Uti^uîsijtjut' d k joîkUwt
((îbr. Statide» Parb, a» rue des Chantiers). Ce vola me contiem b 6q des
Hespèndées, les Cïmclliées» Ruiacécs, Kliiimniifs, jugbiidcei» Térèbîa-
thacées, Légumineuses, Mimosèes, Zygof>byllèes. Od sait que dans cet
ouvrage, donc It; t. I a paru en ÎH96, M. Eug. Rolland a relevé oia grand
iiouibrc de diciotîs, de formules diverses, de croyances superstitieuse s, doni
beaucoup remontent au moyen âge.
— Non s avons re^ju le prospectus d'une revue américaine qui sera consa-
sacréc à des recherches sur les langues et littératures modernes : M^dtrn
pbihlogy, A quarkriy Jountal devoifd to rtsearch In modem Lanf^uag۔ and
UkrtiUirts, Chicago, The Unîversiiy of Chicago Press ; Lcipsig, Harrasso-
wiu; Loiidon, Luzac and C^. La partie romane sera sous b direction de
M. Th. Atkinson jenkins. Le premier numéro est annoncé pour le i*^ juin
190Î.
Livres annoncés sonmiâï rement :
Kristian von Trovfô Yvain (âer Làiitnriiter}. TeKiatistgabe mit HnJeitung^
Anmcrkungen iind vollstândigçm Glossar herausgegeben von W. Foers-
TER. Zwdte undgearbeitete und vermehrte Autlage. HaJk, Niemeyer, 1901,
In-ia, IXVM49 p. — Nous nous bornons présentement i annoncer cette
nouvelle édition du petit Yt'ùin ; le titre dit en partie ce que te savant
éditeur y a ajouté de nouveau, c^esi-â-dire d'imponantes nemarquci sur le
texte cl un glossaire complet (pour lequel il a été aidé par plusieurs de ses
élèves)» qui sera certainement le bienvenu. Mais ce que le titre ne dit pais, ^
c'est rimportancede 1 introduction, où, sans parler de remarques précieuses
sur la constitution du texte, M. Foctster émet sur les sources de Chrétien
et le sens de son poème, des opinions en partie nauvellcs et indique de
curieuii rapprochements. Cette introduction appelle un exanieii que nous
ne pouvons entreprendre ici ci p*>ur laqueUc la publication très prochaine
du livre de M. 5r>^wn (voy. Rom., XXX, 622) nous fournira une occasicm
naturelle. — G. F,
Manfredi PoîtiKA* Délit manijrstii^imi plastiiht âd smtinunl» mi ptrsQtu^gi I
ddia Ditnna C&mrmdia. Milan Op Koepli, 190a. In-ii, xij-190 p. --^ Ce
petit livre se lit avec grand plaisir. L*âutcur y approfondit vraiment, en
Tétudiani sous un aspect nouveau, notre connaissance dé Tan merv^dUcui
de Dante ; il Ml \*mï combien^ datis cet art, tout est travaillé jusque dans
les dessous 01:1 on ne pénètre que par la plus attentive réflexion* Il s agit, le
titre ledit, du rapport des gestes et de l'attitude des personnages tnben
Kèoe avec leur caractère et leurs sentiments, Li fine et judicieuse éîiide de
H, I^orcna méritait le prix qu'elle a obtenu dans la gara DmnUica de 1900 J
cot^ tes prmicsseurs de renseignement secondaire. Ur. appendice est cou* {
XÊCrt à Matetda, dans laquelle laiiteur voit une ailèggrie, non cooscne on]
CHRONIQ.UE 34 î
le fait d'orti maire, de îj vie active, mais de h Qlïdtù terrestre ^ et il aliégue
de bonnes raisons en faveur de sa ihèse. Un second appendice donne la
descTipnioîi des caractères physiques des personnages dans les Prûwmsi
Spos*. — G, P.
Simple conjêctun sur ks origm's patirneUes de François Viîhn^ par l*abbé
Rkure. Paris, Channpionj 1902. In-8» 16 p- — L'auteur remarque qu'il
existe près du chAteau de Montcorbier, une ferme appelée In Loges, et îl
suppose que le père de François de Montcorbier (plus tard Villon), qui est
aussi appelé François des Loges, pouvait tenir ce s^icond nom de cette
ferme; il croit en outre possible qu'il descendît d'un bâtard de la maistin
de Montcorbier, M. Ueure ne donne ec rapprochement que comme une
u simple conjecture »»; comme telle elle n'a nen d'invraisemblable, sur-
tout dans la première partie. — G, P.
• Dtf SkUung tkj rthikfrùnomtni ^u setntm Bt^kîmngsuforle in dm âlkikn
fran^mhchm Sprachdffthmlîtrn.,.(yQîi) Karl Gustave Ullj^akn. Greîfswald,
Kunike. 1901. In-S, 42 p. (diss. de docteur). — Le titre de celte disser-
tation dit asseï de quoi elle traite; Il serait difficile de Tanalyser. — G, P.
î^i plm aticiens monumi'nti tie la latigm française, publiés pour îes cours uni-
versitâires, parEdwird KoscHWirii. L TtMes, diphtfmtiqnes^ûyà^miiiàhmn,
revue et augmentée avec deux fac-similés. IL Textes criiiquis et Ghssatn^
Lcipjtig, Reistand» 1902. Pet, 10-8, 52 et viii-92 p. — A la sixième édi-
tion de son petit livre si commode, M. Koschwitz donne pour complément
im second fascicule qui cotitienf des textes critiques et un glossaire. Il a
eu ridée, dont j'avoue que je ne saisis pas bien rutilité, de reproduire la
restitution de Saini*Uger qtie ['ai donnée îl y a trente ans, et celle de la
Pmsimt^ que M. Lùcking a tentée il y a vingt-cinq ans : des essais de resti-
tutions nouvelles eussent été plus intéressants. M, K. en donne pour les
Sertmnti, pour Eidaltt et pour le fragment de Valencicnnes (pourle S/wnjuj
ïi adopte celle de M. Cloetta amendée par M. Morf). lî y aurait beaucoup à
discuter surtout sur les deux premiers testes : changer To de pohh^ ttosiro^
ctc , Va de Siihhtmrni, cadhima, contra, etc., en e, est très contesuble; lef
de sagrament doit être gardé ■ sandre (ou stinâro) serait préférable à sendrt ;
dansHwl. heikisour^ appuyé au glossaire sur rètymologie 'bell iatiorem,
n'a aucune raison d'être; menace pour manaîa-, verginiiet pour vtrgrnitet ne
se justifient pas, non plus que les graphies h pour i et/ simple pour //; etj
figure cdomh^ A\tc la suppression de if^, est contraire à la grammaire (Ef
pour r au V, ti est une faute d'impression). Le travail le plus méritoire est la
r.'stitution du Joms ; il appelle un examen attentif. Pour le glossaire, M. K,
reconnaît les obligations quil a â celui de M, Stengeî ; il Ta revu avec soin
et amélioré; je ne Tai pas lu avec assez d'atteniion pour voir si Ton peut
y relever des erreurs d'interprétation (Bi'ffage dans la Passion n*est pas
Béthanie).'^G. P.
A , SalvI'Irîïa de GitAVE. De f rame i tu /jf/ AWi^H^jWj, 1902. In-8, 29 p.
(extrait de la Tijdich. v. Ni'd. Taal- en LeiUrkunde^ t. XXI), — Datis ce
344 CHRONÏdUE
noyveau chapitre des CcnîribuiuHîs à !a cmnmis&ttct dn mets f rameau
empruntés au nêérkndms, M. de Grave étudie ce qu'est devenu Vi des mots
françats. Cette étude intéresse surtout Thistoire phonétique du néerlandais,
It des mots (lAn^ih en lui-mémc n'offraot rii^n de notable. On rdè*
vcra cependant quelques «marques qui intéressent le français et même
kromao, comme celles (p, 20) qui concernent sicerâ et k rcprésentatît
néerlandais, assez singulier, de ce mot, cdsfr, — G. P.
a Canciontm ClaïS^nst 26}. Nota dî Antonio Hestorj. Roms, 1902, ln*S,
40 p* (extrait des Rattimnli ddh P, Accûdettm dd Umd, vol* XI. fasc. |),
— Liste compkîe des pièces contetiues dans cet intéressant recueil,
compilé en t>S9 à Madrid^ pjr le Pisan a Alon^o de Nabarcic v, appr*
tenanç â une fimilk Navaretti dont d'autres membres ont possédé des
manuscrits espagnole qui se trouvent aussi à Ravenne. — G. P.
E* fiouitccEZ. Ln mots espagnvh t-omparés aux mets gascatn {époqtn andmnt),
paris, Pontçmoing, 1901. In-8, 2} p. (extrait du Bulktin hisptimqîie^ t, (Jl),
-— Cette t'tudc, ou plutôt cette esquisse, du savant professeurs TUniver-
site de Bordeauit, esc tout à îmi neuve et intéressante. M. Bourdei cberchc
à montrer quVntre l'Espagne et la Gasco{;ne il y a un certain fonds com-
mun de mots et déceptions qui indiquent une ancienne communauté
entre les peuples d'origine ibérique au sud et au nord des Pyrénées. Il y
réussit certainement en partie, bien qu'on puisse se demander s'il n'y ap^
une bonne pan de hasard dans tes rapprochements qu'il fait, et si on n'en
obtiendrait pas de presque aussi nombreux et frappants en étudiant cora-
ptrativemem le lexique de deuK régions quelconques de {ARomaniû f n'i-t-on
pas signalé des ressemblances entre le roumain et le sarde et même le por*
tugai^?} Jeme bornerai â faire remarquer que plus d'un mot h ispano- gascon
dont M. B. admet T existence dans tout le midi de la France a aussi estUté
dans le nord et n'est tombé en désuétude qu'à une époque plus ou nioîna
récente : tels son t napus, narix, mulgere, calcaneum, rlion-
chare, passa rem (existe encore dans le fr. pasit, pa%S€tmu)^ etc. La
t coïncidence qui est peut-être à certains égards la plus curieuse de toutes
(p, 30) Dp celle du nom du chèvre feuille, en esp. et pon. m&drtstik'ê ou
maâresilva^ en béarn. îfithtmay\ cesse d'être frappante si l'on remarque que
non seulement tmirtstuvo ou formes analogues se retrouvent en languicilci*
cien et jusqu'au dehl du Rhô ne ^ sàiwmaiu en languedocien, mais que
rit* a également maârtalva^ qu'on lit : » peridmtrpôtt, id est matrmthm vel
mprifoiium », dans les gloses de Tours du xir« s. (Foerstcr, AUfrm^,^
VtbuHgshuch^ coL 2 14)» et que muirisyïva et formes semblables se trouvent
(voy. Diefenbach) dans divers glossaires btins-aîkmatîds, glosant saprifo-
Hum ou gaîUtrklnum (rorîgine du nom s'explique sans doute si on cotn-
pre rit. ûbbracàalmc^ ou Mnjccmhoschi), — L'essai de M. B. n'en est pa*
moins fort remarquable; l'auteur lui-même n'exagère pas la valeur démon-
strative de ses ingétiieuîc rapprochements, il y fait prt-uve en générai d'une
critique circonspecte
et d'un savoir sûr. — G, P.
CHRONiaUE 345
Di un récente lavoro sui dialetli di Lugatio e di Mendrisio^ par C. Salvioni.
Lugano. In-4, 8 p. (Extrait du Bollettiuo storico délia Svi:;p;(ra it,y
vol. XXXIII, pp. 141-149). — M. Salvioni montre que la dissertation de
K. Brôsel, Die hetonten Vohale der SpracJje in Kanton Tvssin sîuUich von
Mante-Cenere (MandrisiO'Lugano)^ outre qu'elle a une base insuffisante,
fourmille d'erreurs de tout genre (l'auteur a notamment confondu très
souvent, dans les mots qu'il a recueillis lui-même, les explosives sourdes et
les sonores), et conclut que c'est une de ces publications clx délia scieuia
hanno solo Tapparen^a t la pretesa. On trouvera dans cette critique plusieurs
observations d'un intérêt plus général et un petit complément â la Bihlio-
grafia dei dialetti ticitu^i, — G. P.
Carlo Salvioni. Nomi locali lombardi. Milano, 1902. In-8, 18 p. (Extrait de
YArchivio slorico lomhardo, t. XXIX). — Importante étude sur les noms
de iWi^fto(metula -|- -ato) et Vigevano (Vicus Gebuin). Telle est la
solution que donne l'auteur de deux problèmes qui ont beaucoup occupé
les savants; il la justifie par une discussion serrée où il touche plusieurs
questions intéressantes pour la philologie romane. — G. P.
Carlo Salvioni. DelT antico dialello pavese. Pavia, 1902. In -8, 64 p. (Extrait
du Bolletino délia Società Pavese di Storia patria^ 1902, fasc. MI). — Cette
étude est fondée sur trois manuscrits, de caractère pieux, du xiv« et du
xve siècle. M. Salvioni donne d'après eux, comme caractérisant l'ancien
dialecte de Pavie en regard du lombard, les quatre traits suivants : chute
du ^ entre voyelles ; d r > r ; / remplaçant d tombé, primaire ou secon-
daire; -oma ou -omo à la i^ pers. plur. de l'ind. présent et futur. L'étude
grammaticale est suivie d'un précieux lexique. — G. P.
Mélanges Léonce Couture. Études d'histoire méridionale dédiées à la
mémoire de Léonce Couture (18} 2- 1902). Toulouse, Privât, 1902. Pet.
în-4, XLiv-360 p. — Ce beau volume avait été préparé pour fêter les
soixante-dix ans de M. L. Couture, homme d'un rare mérite, professeur
à rinstitut catholique de Toulouse, dont les études ont porté sur tous les
aspects de l'histoire du Midi et particulièrement de la Gascogne, mais
qui, médiocrement philologue (voy. /?o/w., IX, 339 et non VIII, 432,
comme porte la notice de Mgr Batiffol), était surtout un excellent cri-
tique en matière littéraire (voy. Rom.y ih.y p. 338), historique, philoso-
phique et théologique. Le destinataire est mon avant l'achèvement du recueil,
et c'est ÙL sa mémoire que Pont offert ses anciens disciples, et ceux qui, de
près ou de loin, l'aimaient et l'estimaient. Ils sont extrêmement nombreux,
mais vingt-trois seulement ont fourni des contributions écrites (sans parler
de la Bibliographie des écrits de Couture et de la notice de Mgr Batiffol,
remarquable i tous les points de vue, qui ouvre le volume). De ces con-
tributions, la plupart sortent de notre cadre ; nous nous bornons à signaler
celles qui y rentrent. — P. 115-126, A. Jeanroy, Un sirventés historique
de 1242 (montre que le sirimtés de P. de Vilar, qu'on attribuait jusqu'ici
à 1226, se rapporte sûrement à la guerre faite en 1242 par Henri III
Î46 cHRONiaui-:
à Louis IX, où k roi d* Angleterre fat aidé p,ir les barons miTidionaux j
eï les rois espagnols; M. J* donne de cette piùce intèressame un lextc
amélioré et une traiiuaion soigneuse). ~ P. 127-1 $6, H. Gocrteault,
Uni chronique béiînmht im'Jité du XI F"" lUck. — P. 193-212, DUCAMIK,
EktiX textes gascons origittairtj de Montesquieu- Fvhvsfre (documents du xv«
et du xvi« s,, avec tradction en parler moderne, ^ P* a 57^26^» A, Tbo-j
MAS, Éfym^cgkA gascûrm^s (l'auteur, avec sa pénétration et sa critiqu
ordinaires^ ramène quatorze mots béarnais et gascons, peu faciles h iden^
tifier^ aux mots latins butyrum, «:onsi(ierium, cubium, dogaj
crvilia» cxiniius, gencsta, lapsus, liianîas, merendâ, papy-
rus^ vîtîcula, et présente chemin faisant plusieurs observations dignes.
d*être notées, entre autres celle qui regarde Temploî, non moins fH
quent en gascon qu*cn espagnol, du suffixe* a ri s « combiné avec un noîîi'
de végétal pour désigner un lieu où abonde ce %^êgétal »), — P, $49-557.
G. Paris> Natmm em Ayinerk (montre que la forme Naifuen^ fréquente
dans les textes français du nord pour le nom ti*Aîmeri de Narbonne^
indique bien une origine méridionale pour les prénoms où die figure,
sans *i*ail leurs rien prouver par leur date ; p. ^^4, K dem.» lire Andr^iS da
Bari>enna pour Francesc4), — G. P.
Reîiquie probahiîi q possibili degH aniichi dialeiii iialici ne\ modem i âmUiti
UaHani e mgf Uhmi r^wMM^i m gemre. Memoria Ictta alla R* Accadernia
.« di Napoli da Francesco d'OvtDio. Napoli, 1902. In-8, il p* (Entrait
des AUidfïï Açfûdtmia, vol. :txiv^)- — Ce mémoire remonte à vingt ans;
il est le prologue d'une série d'études qu'avait faites Tau leur en 1S82 et
qu'il se propose eniin, ce dont nous lui serons bien reconnaissiints, de
mettre au jour. Il ne pose ici que les données générales de la question;
n k fait avec une admirable clarté et une parfaite drcofispeciion. On
trouve b un exposé sommaire, maïs vraiment magistral, des résuflâU
acquis et des principes dirigeants de la philologie romane. Je suis pour
ma pan porté a être peut-être encore plus réservé que Tauteur sur les
sunivances prélatines dans le roman. Le nippon du toscan avec les dia*
lecces îuliens ne saurait être comparé Â celui du litîn avec )*étrysque,
nbérique, le gaiibis ou même Tosque, non seulement pour les rmisons
que donne cxLcikmmeni rauicur» mais parce que le toscan cl les dialecte
Italiens sont apparentés de bien plus près que le latin» et ces lattgaes ont
un fonds lexical et grammatical commun, etc. Il me semble qu'on â uii
pendant bien voisin du rapport du latin av^ec ks langues indigènes dans
celui de Tespagnol et du ponugais ivec les idiomes américains : aii
Mexique, par exemple, comme en Gaule, k population est en immense
majorité indigène et a complètement adopté Tespagnol ; les langues primi-
tives ont-elles intluencé le castillan autrement qu'en lui fotimîssant un
ceruîn nombre de mots? — Quoi qu*il en soit, on ne peut qu*attcndre
aiHcc impatience les mémoires subséquents où le savant professeur de Na pies
cntiera dans lexamen des faits particuliers, ^ G. P.
CHRONiaUE 347
Étude sur Vemploi des pronoms personnels sujets en ancien Jrançais, par Hilma
BoREUUS. Lund, 1902. ln-8, 16 p. (Emrait dt Frân Fiîoîogiska Foreningen i
Lundj II). — L'auteur de cette étude constate que Thistoire de l'emploi
des pronoms personnels sujets en ancien français est encore fort mal élu-
cidée ; elle pense avoir trouvé, pour les propositions subordonnées, une
règle qui consiste en ceci que le pronom personnel est omis quand entre
le mot qui introduit cette proposition et le verbe est intercalé tout autre
complément qu'un pronom personnel atone, tout autre adverbe que fw, y,
ne ; dans le cas contraire il est exprimé. Les textes qu'elle étudie montrent
en eîfetune proportion considérable (de 65 à 75 %) d'applications de cette
régie, mais il y a bien des exceptions. La dissertation est toutefois inté-
ressante et montre une bonne méthode et un esprit investigateur. — G. P.
Den ridderiga Kàrleken i Medeltidens litteratur, af Johan Vising. In-8, 1901,
21 p. (Extrait de la Nordisk Tidskrijt). — M. J. Vising retrace à grands
traits, avec son élégance accoutumée, dans cet article destiné au grand
public, l'histoire de la conception médiévale de l'amour « courtois »,
depuis son origine en Provence jusqu'à sa diffusion dans toute l'Europe.
On y trouvera plus d'une fine observation et la traduction en vers de
pièces provençales, françaises, italiennes et allemandes. — G. P.
^Vords and their ways in engUsh speech^ by James Bradstreet Greenough and
Georges Lyman KirrREDCE. London and New York, Macmillan, 1902.
Pet. in-8, xii-4}i p. — Ce livre cliarmant, écrit pour le grand public,
mais reposant sur des recherches de première main et rempli d'idées
intéressantes pour tous les linguistes, contient bien des pages, notam-
ment sur le rapport du français et de l'anglais, que les romanistes liront
avec profit. Un index très complet permet de retrouver facilement les mots
dont les auteurs ont parlé. — G. P.
^<r. Nyrop. Manuel pJjone'tique du français parle. Deuxième édition, traduite
et remaniée par Emmanuel Philipot. Paris, Picard, 1902. ln-8, viii-
184 p.). — Nous ne parlons pas, en règle générale, des ouvrages qui ne con-
cernent que le français moderne; mais le livre de M. Nyrop se distingue de
ceux du même genre en ce que l'auteur joint à une pratique excellente du
français parlé une connaissance de l'histoire du français qu'atteste sa
Grammaire historique. La première édition, en danois, étak inaccessible à
beaucoup de ceux qu'elle aurait le plus intéressés : M. Philipot a rendu un
vrai service en la traduisant, mais, pour emprunter les paroles de l'auteur
lui-même, « il ne s'est pas contenté d'une simple traduction, môme avec
toutes les améliorations et additions que nous lui avons fournies : partout
où nos descriptions lui ont paru un peu sommaires, il les a élargies et
remaniées, et il a introduit çA et là dans le texte des obseï valions dues à
ses études personnelles ». — G. P.
Beitràge :^«r romaniscben und cw^Uschni Philùloirie dem X.deutsclun Neuphilo-
logentage ùberreicht von dcni Vcrein akademisch gebildeter Lehrer der
neueren Sprachen in Breslau. Breslau, Preuss u. Gûnger, 1902. In-8,
Î48 CHRONiaUE
tjuairc 2t2 p, — Ce volume contient cinq mémoires ^oni trois întêreiscnt
h Romama. Le premier est une édîtign améliorée de la Dû^^a gmeral {de
la Mmrtt), pîir M, C. Appt;!, accompagnée de notes el précédée d'înti*-
ressantus remarques sur le rapport des trois plus anciennes versions (,fran-
çaise, néerlandaise, c^isii liane) de la Danu ât la Mori entre cJles et ivcc
leur original satis doute frani^ais. Le deuxième c^t réinde de M, Pilîet suf
la pastourelle, dont nous avons rendu compte (XXX 1^ 620)* Le troisième,
dû à M. Rcichel, est consacré à la classification des manuscrits de Firra^
bras ; il sera l'objet d'un compte rendu spécial. — G, F.
Ckjniom^ jrux partis cl refrains inèdin au XI U^ sîkk^ publiés et annotés par
A. Jeanroy. Paris, Picard, 1901, in-B, 68 p. — Nous avons ici le tirage
à part de trois publications qui ont paru dans la Rnm€ dis hnguts rùmanês
en 1896, 1897 CI 1902, et dont nous avons parlé en leur temps; mais les
trois dernières pages contiennent des corrections au texte, dont une partie
est due i la critique ou ;! des communications privées^
AaclMin in Philippe Momkiîi Reimckronik, von Edouard Teichmann. Aachcn,
Cremer^ 1902. Jn-S, loop, {Fesischriji àft Gemralvenammhtng des Geiammi-
vfrtim lier deufscJ>ett Geuhichti- und AHertbitmsvereim \n DnsieldorJ ttw
22 bh aj Septemher 1^02). — M. Teichmann, le profond connaisseur
de tout ce qui concerne Ak- la-Chapelle, soumet, dans cet écrit, à une
minutieuse analyse tous les passages (qull reproduit et traduit) de Philippe
Mousket oti le chroniqueur tournai sien parle d'Aïx. On trouvera dans son
commentaire nombre de remar^jnes précieuses non seulement pour Tbis-
toire fabuïeuse d' Aix-la-Chapelle, mais paur Thistoire poétique deCharle*
magne (voy, notamment ce qui concerne le prétendu enterrement de
Tempereur assis sur un trône et non couché dans un cercueil, fabl*^ qui
est d'ailleurs inconnue k Mousket et qui paraît avoir été inventée a l'occa-
sion de rouverture du tombeau de Charles par Octon II), — G, P.
Die dittktt Redt al s stilistisclxs Kunstmiitei in dtn Romantn der ChrtiHm dt
7 foyes... (von) AlfonsHtLKA. Breslau, 1902. In-8, 63 p.(disserE. de docteur).
— Nous n'avons ici que le commencement d'un travail qui sera sans doute
fort élcndu, et que l'auteur se propose de publier complet quelque jour.
Dans cette introduction il n'est même pas encore parlé de Chrétien de
Troies : après trois courts chapitres sur le discours direct dans l'épopée
en général cl dans Tépopée antique nous avons un chapitre sur le discours
direct dans Tépopée populaitc française, où sont successivement étudia k
monolt^ue* le dialogue et ïe if discours en chœur » dans les chansons de
i^cste. Le sujet est neuf et intéressant; îî est traité par M. Hilka avec
iJ3>i.iligence et jugement, ci nous serons heureux de voir la suite de son
travail (je noterai ici que j'ai donné, dans un récent article du Jourmû du
SQvant$^ juillet 1902, quelques remarques sur le monologue d*ns Chrético,
et j'ajouterai que M, J. Mettrop se propose d'étudier le monologue dati&
ren&emble de la poésie romanesque du moyen ige français). — G, P.
CHRONIQUE 349
Zuden Anfàngen der jraniosischen Novdle. Von Karl Vossler. Berlin, Dunc-
ker, 1902. In-80, 36 p. (Extrait des Studien ^urvergl. Litleraturgeschichte^
p. p. M. Koch, t. II). — M. E. Langlois a le premier fait connaître le
curieux recueil de nouvelles en prose du xve siècle, composées sans doute
à Sens, et conservées dans un manuscrit du Vatican ; il l'a copié et m'a
proposé de le publier avec lui. M. Vossler, ayant eu connaissance de ce
projet, a très courtoisement renoncé à l'édition à laquelle il avait songé
de son côté. Il s'est contenté de donner une analyse des nouvelles, qu'il a
fait précéder d'une courte et judicieuse introduction sur l'histoire de la
nouvelle en France, ec à laquelle il a joint des remarques comparatives
qui n'épuisent pas le sujet, mais qui ont une réelle valeur. La comparai-
son de la plupart des « contes décrits » avec les formes versifiées du
xiiic siècle que nous en avons, montre que l'auteur n'a souvent fait que
lesdérinier et les abréger. M. V. apprécie très bien le caractère du recueil,
pour la forme duquel il me parait cependant trop indulgent. Son idée d'y
reconnaître le livre (ou une partie du livre) que le chevalier de la Tour-
Landri avait composé pour son fils me paraît n'avoir rien pour elle : le
style de la Tour-Landri et celui de notre nouvelier n'ont aucune ressem-
blance. En revanche M. V. a raison de dire que l'influence italienne sur
le recueil sénonais se borne à peu près au nom même de « nouvelles », et
que le recueil, dans son fond et dans son esprit, est tout français et encore
pleinement médiéval. — G. P.
^ymologie du mol huguenot appliqué aux prolestants de France, prt)uvée par
des textes authentiques antérieurs à la Réforme, par Charles de Grand-
MAISON. Tours, Péricat, 1902. In-8<», 8 p. (extrait du Bulletin de la Société
de rhistoire du protestantisme français, ]an\'\Kir 1902). — Des « textes authen-
tiques antérieurs à la Réforme » ne peuvent, naturellement, rien prouver
pour l'application du mot huguenot aux protestants; aussi M. Grandmaison
prouve-t-il seulement que Huguenot, diminutif de Hugon, était employé à
Tours, comme prénom et nom de famille, dès la fin du xivc siècle au
moins. Cela ne laissa pas tout de même d'avoir un certain intérêt, puisque
le nom de huguenots donné aux réformés paraît bien être né à Tours ou
aux environs, et que s'il est, comme c'est problable, une adaptation de
l'ail, ddegnoss, il a pu se modeler sur le nom de quelque réformé touran-
geau. Notons à ce propos les formes uganau, es^anau, iganau, qui ont dû
servir d'intermédiaires entre l'allemand et le français, et dont la dernière
surtout est encore assez voisine de l'original. — G. P.
«r Kenntniss des Alllogttdoresisck'n, von Wilhelm Meyer-Lûbke. Wien,
GerolJ, 1902. In-80, 75 p. (Extrait des Sit^ungsbericbte der Kais. Akademie
der Wissenschaften, t. CXLV). — Ce beau travail est le dépouillement phoné-
tique, morphologique et lexicographique du Condaghe di San Pietro diSilki,
récemment publié (Cagliari, 1900) par M. Bonazzi, qui contient de nom-
breux actes en vulgaire des xi^', xii« et xiii^ siècles. On y trouvera à
chaque page de précieuses observations, qui dépassent souvent de beau-
350 CHRONiaUE
coup le domaine proprement sarde. Notons en particulier ce qui est dit,
p. 33 et ailleurs, sur la grande question du maintien du c en logondorien,
la discussion sur la persistance de Tablatif (p. 12), et, parmi les nombreuses
remarques étymologiques, celles qui concernent ilex, *pulletrus,
*adcaptare. Notons encore que l'auteur donne (p. 35) pour la particule
pronominale iteu, itteu la même explication qu'a publiée ici (XXXI, $91)
M. Guarnerio, qui nous l'avait envoyée dès le mois de mai 1902 et qui
d'ailleurs, comme le remarque M. Meyer-Lûbkc, l'avait annoncée dès long-
temps. — G. P.
Dictionnaire savoyard, publié sous les auspices de la Société florimontane par
A. Constantin et J. Desormaux. Paris (Bouillon) et Annecy (Abr)'),
1902. In-8, LXii-446 p. — A Constantin mourut en 1900, laissant de très
nombreux matériaux qui, revisés et complétés par M. Desormaux, profes-
seur au lycée d'Annecy, ont formé le présent dictionnaire. Les matériau.x
étaient classés ou plutôt groupés selon des systèmes différents; It plan
n'était pas arrêté, de sorte que le labeur qu'a dû s'imposer M. D. ne laisse
pas d'être considérable et on lui doit des éloges pour l'intelligence et le
soin qu'il a apportés à la mise en ordre et à la publication du dictionnaire.
Nous devons toutefois formuler sur certains points quelques réserves, sans
entrer dans une critique détaillée, la Romania ne pouvant consacrer aux
études sur les patois qu'un espace très restreint. Le premier auteur avait
pris comme base le patois de la vallée de Tliônes, qui est passablement uni-
lorme. M. D. a cru devoir y ajouter un certain nombre de formes
recueillies dans les communes des environs d'Annecy; il y a même des
mots d'autres parties de la Savoie, de sorte que l'ouvrage mérite, jusqu'à
un certain point, son titre de Dictionnaire savoyard. Nous n'aurions pas
conseillé ces additions. Il en résulte une œuvre très inégale, plus complète
pour une région que pour les autres. La notation des sons nous laisse
quelques doutes. M. D. dit dans sa préface que les fiches de M. Constantin,
tf datant d'époques assez éloignées, n'avaient pas toutes été rédigées
d'après un même système graphique ». En ce cas nous aimerions à savoir
comment a procédé M. D. ; quel système a-t-il adopté? Nous voyons d'ail-
leurs (p. xxxix) que, dans certains cas, M. D. s'est écarté de la graphie de
Constantin. L'unité de graphie est pourtant indispensable dans tout tra-
vail sur un patois. Certains détails de prononciation sont expliqués d'une
façon bien obscure, ainsi, p. xxxv : « Nous représentons le th dur anglais
par çh et le //; doux par jh. Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire? Les
localités où les mots ont été recueillis sont indiquées entre ( ), ce qui
ne peut qu'être approuvé. Mais la façon dont elles sont indiquées est bien
compliquée et incommode. Ainsi ^7V signifie Les Villards (cant. de
Thônes) et 4TV Villaz (cant. de Thorens), le chiffre arabe désignant
l'arrondissement (ici Annecy), la lettre capitale le canton désigné par son
initiale, la lettre minuscule étant l'initiale du nom de la commune. C'est
ngénieux, mais il n'eût guère été plus long d'écrire le nom en entier. On
CHRONIQUE Î5r
ne Saurait blâmer en principu h woniparahoir avec Jts patois apparentés
ou même âvec l'anc. fr. , mais il ne faut pas en abuser. Ainsi, au mot
huiîante, qui est tout fraiiçab^ et qu'il eût mieux valu enregistrer sous la
forme pJtoîse wHdfUaf on nous cîtc, d'jprès Godtifroy, un vers du Voyage
df Omtltmagm à pruitilem où figure uiUmU. A quoi bon? Divers ouvrages
$ur le patois savayard, en partie rêdif;és d'après les notes de Consuntin,
sont annouccs : nous voudrions que M Desortnaux trouvât Toccasion de
mieux expliquer la phonùtîque du patois en tenant compte des variai té s
locales, et qu'il révisât le système graphique de Constantin. La " liste des
lexies anciens >i (p* liv) n'est pas complète : iïy manque^ entre autres, ks
deUK chansons « en savoysien » insérées dans La jkur dts chamotis
(vers iSîo, voir Brunet, MiiwwW, II, 1286-7), ~ ^^ ^'
Giulio Bertoni. La BiNiokm tslrnse f h collum /êrmrese ai Umpi âd dma
Envkî (1471-1505), Torino, Lœscher, 1905, In-8, xi-joy pages. ™ Cet
ouvrage, d'un jeune érudit qui s*est déjà fait avantageusement connaître
par ses publications sur U littérature provençale, n'est pas proprement une
bistaire de la célèbre bibliothèque d'Esté, bien qu'on y trouve rassemblés
de nombreux rcnstrignements» en partît: inédits, sur le* origines, Tcn-
tretien et les a^croissemetits de cette bibliothèque ; c'est plutôt comme
Tindiijue le sous-titre» uîie histoire de Taciivitè littéraire à la cour de Fer-
rare dans la seconde r»iaitiè du sv< siècle* Il y a là d* intéressants chapitres
^urlaconnais^nce de la littérature françaiseÇch. iv)^ sur la culture grecque
et kuinc (ch. v) au même temps, qui seront consultés avec fruit* L'ou-
vrage contient un appendice de documents^ entre autres un fragment du
Catalogue de la bibliothèque de Borso d'Esté (1467) et se termine par une
bonne table. Qu'il nous soit permis d'exprimer en passant le souhait que
le catalogue des mss de TExtense, commencé par M. C. Frati (voir Rom.f
XX Vin, l'y 2), soit continué, selon un plan réduit» toutefois, car les caïa-
togues trop développés risquent fort de rester inachevés.
An ffigUsh Comfnenlary mi Dantû'i Divina Commedta^ by thc Rev,
H, F, ToïER, Oxford, Clarendon Press» 1901* In-8, vij-6a8 p. — Cet
ouvrage, imprimé avec rèlégance et Tentente des choses typographiques
qui caractérisent la Chrmdon Press, est une preuve nouvelle de l'activité
avec laquelle les Anglais se livrent à Tétude de Dante. Uauteur» plus
connu jusqu*ici par ses travaux sur l'archéologie et la géographie de la
Grèce, n*a pas prétendu^ cela va de soi, présenter des explications nou-
velles. Il a su faire un choix judicieux entre les gloses innombrables qui
ont été pubHées sur la Divine Comédie, et il a sur bien des commentateurs
le ulent de s'exprimer avec concision. Ce commentaire est fait j>our accom-
pagner r édition de la D. C. publiée par le D^ Moore, â la Clarendon Press,
en 1900
Itstmnrtth de rofficiaHk' de Besancon (1^65-1500), par Ulysse Rohert T. J^r
(136$' 1400). Paris» impr. nai,, 1903. In-40, 551 pages (Collection des
Documiniî ir$éditsy La série des testaments reçus par roffiçialîté de Besan-
352 CHROKiaUE
çoïi est, malgré !ês pcnes nombreuses qu'elle â subies au x\m' siècle,
Tutie des plus importantes colleajons de ce genre qui existent, Grice à
un ancien inventaire, M. Robert a pu dresser la liste de tous les iJocu-
ments dont c île se composait lorsqu'elle éldl entière. Le premier volume,
qui vient de yâraître^ contient 1 1^ testaments, précédés d'une introduction
qui occupe les 267 premières pages du volume, introducïion dans laquelle
M* R, a ûiit rhistoire delà collection, et Tétudie à tous les points de vue. Son
travail paraît, sauf découverte, peu probable, de nouvelles pièces, déâiiitif.
U intéresse sunout Thistoire de h Franche' Comté, mais beaucoup de
détails curieux pour llustoire des moeurs y sent relevés» Nous n*aurions
pas annoncé ici cette importante publication qui se compose en grande
partie d'aaes latins et qui, par conséquent, reste eo dehors du cadre de la
Rûmûma^ s'il ne s'y trouvait bon nombre d'actes qui sont en langue vul-
gaire ci où Ton peut recueillir des traits caractéristiques de Tidiome local :
n« î (1271), a (1282,) 12 (1297), 24 (iîi>)* 27 (1316), îo (1520), H
(ijili), etc* On y remarquera particuliètï^ment de nonibrtux exemples
de b jr^ pers, sing du près, de rîndic. en m et de b ;* pcrs sing. du
prés, du subj. en cU : « Fais et ordtnûi, et vuU que ainsi sott et demor&it^
mon testament en lel meniere » (m }). « Après, je.,, doin, outroî et Ar«-
Sf}f... » n" 8; plus loin, également au présent, iahmi^ ete,
XolicTéfuit ma tm serti J^ Tthnty Ct^Z/rj^v (Cambridge), contenant les vies co
vers français de saint Jean T Aumônier et de saint Clément» pape, par
Paul Me^^ER, Paris, tmpr. nai, (Klincksleck)^ 190^. lti-4&, 51 pages
(Extrait des Nûiias H extraits, l, XXXV tll). — C'est la publication que
nous avons annoncée précédemment (R<m., XXX.1, 471). 11 est probable,
bien qu'il y ait certaines différences dans la versification, que ces deux
poèmcSi jusqu^ici inconnus, qui comptent respectivement, 77 j 2 et [498$
vers, sont du même auteur* Cet auteur était angbis (ou du moins nor*
mand d^Ângleterre) et composait au commencement du xiU^ stède. Li
présente notice donne environ un millier de vers de la vie de saint Jean
et MtS de la vie de saîni Clément, cette dernière composition èutit
essentiellement une adaptation des Ruc^nitûymi.
Le BrùpttmirÉ'GtrmU, V< E, BOUILLOÏC,
X410N, PKOTAT IHLKES, IMl" JtiM | Vll>
E^ ymtrvu a la même librairie
et
les
Les officiers royaux des Bailliages et Sénéchaussées
msti lut ions r jltri t:ti France à h hn du mavcn âge, p»ir
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La Vie de Saint-Alexis, Pj^m-^J^ixi^siéde. Texte cmi^uc. Noua^Ic
et d'une uHe Jys is.sLT>ti;inces par G, Pahi&, mcmltrc Uc Vlnsiitut tk
Farwe. Un voh în-i « icsui. — Fri\. * , , î Ir. BO
par G. HualR* Un ^-ol in-
i» jèsu> — Prix. S fr. 50
P, Corneille et le théâtre espagnol.
Le Musée de la conversation, P-"' ^^^S^^ Alexandre, 4* édition
de nombreux Artî des nouveaux. [. .>nc
tucntion îiar TAc^idcmie fonv^isc: y^^, -^ j-^-j, .^^j,. .^ Ion
vol- in-8/— Prix . ..-,..,.*. . , - . , . îô £r.
Dictionnaire savoyard, puMi^ soiîs It-? "■— ' - ^- ^' '^
1 mont^iMC, p.vr a
iiiAU^ f'n ^^a vol- ^r. hiS. Acc^^i'"' '""■• ■! ...■>. îccs
(dt : de U Savait; et de s. i voie) et vihlc
des ._ :_- ,.itois CI des travaijx .. ^ tnt Ils pi::
Frix IQir
La vie et rceuvre du troubadour Raimon de MiravaL ^^^^
-^^ — !»ur 14
liïtiraturtï et h iociàic mt^iidianaJci^ a la Viitlc de la gucnc do Albigcob»
pii P, Akdrapd. Un vol, gr. îu-B. — Prix* • . .* * o fr.
Quœ Judicia de litterîs feccrînt provinciales, PJ[ '*^,^'^^*^fg '{îî
Vrix. . .♦. éfr.
Études sur le théâtre français du XIV^ et du XV* siècle.
tji comètïie : c pour U prcnnére (nh J\ipriis \c manuscrit
Hî6| de h i -Lionalc et les miracles de Noîre-Datiîc par
personn^gci^ par T. Kt*t. L'o fon vol> in-Ji. — Pri\ 10 h.
Études sur le théâtre français au XI V^ siècle. ^ î^*^"^ ^*^' i^ -*
Irjms'ab sur tç unmd ^hisme, pubtit' pour b prL-mierc t'oîs ^'
nj^inuïcrîî 179 de* tii Bibliothèque de BesarJ*jo«i CI les mystéri^i Suiiitc*
Ceiîcvîève, par îc njc^me. Vn vol, in-S. — FrU. , . ♦ r 6 fr.
Études sur rétymolog:ie et le vocabulaire du vieux slave.
par A. Mejllet u^ partie. Un vol gr. iD-8. — Prix , . . . 7 h,
L*influence orientale sur la langue et la civilisatjûn roumaines
h Là langue, h> ulijf menti orieiitduii ^n roumain, par L. SAmÉ-^w.
(Extrait de b HrHunid:) Brochure ^çrand^ii-S. — Priv. .,.♦.,.. S fr.
Les éléments latins de la langue rcumaine ^ Çonsoaintisme,
,_ . .. .^ ^ par J*-A Camïiea-
Heght. Un \oî. i^r. in-H. — Prix , , . , , ...,....- 5 fr.
Études sur Fhistoire de Milet et du Didymeion, pa^ B H^us-
-^- - ~ — soullier. Un
vol, gr. in-S, — Prix . , * , , , .-*... 13 fr.
Remarques et corrections au lexicon Comu-Britannicum de
Williams P^^ J* L^th, Doyen de 1j Facultî des Lettres de Rennes
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l« J^cembfc 189S, p;ir le rT^cm*;/Bfocl' -" ■ n — Pri*. .. 2 (t 60
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Etudes sur la civilisation française. P'*^ -^ M^rjgnan. Torr
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gioioe. — Ix culte des Saints sous tes Mérovingien*. Deux vd, gr. in*n,
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Le parler popoLaire dajis la commune de Thaon (Calvados).
Phonétique, morpbobgie. s>*îit3Xc, folklore» suh] d'un lcx^uc de tous les
muîi étudiés, par Cil. GutHtiN m Gvun. Un vol gr. b-8, —
Pnx.. ,,, , lefr.
Mémoires de la Société de tinguistîque de Paris, Ton»rXl,
— — .^ — complet en
6 ùscïcuki. Gf* itî-8* — Prix , ♦ . * 30 ir,
Table analytiaue ^^ ^^^ premiers votumcs, {ur E. Ehxault, Un
^ -^ f-^ vol ^ io-8. ^ PflJt ,.,.,, 18 ÏT-
Essai comparatif sur Poriftne et fh^^^t'^î'^ des rythmes,
9M M. KAWciYNsEï, dtxteur es Icitrcj, 1 rUni\cr:^i:é ic
W3CO\ic, Un riiU m-8- — Prix _..,.,....... 0 fr.
Annuaire de r Ecole pratique des Hautes Études (^^^
— — ^ — — ^ .^^ ce
5 et pbîi
atioée T90Î, 0*r#ïeTïu: Ot
— A,
Dictionnaire de Pancicnne langue française, ***^ *
ntOY, Tt>mc X et dernief* Un voL in^, — IVix . . . ...
6Bfr.
«MOM, rtor^r niâtL i»«iaivM.
N» 187
JuiUet
1903
ROMANIA ri
RECUHIL riUMHSTRlUL
DILS LANGUES ET DES LOTÉRATURES ROMANES
FOMDil ES 1S72 MH
Paul MïlWiR \lt Gaston PARIS
PUHUÉ PAR
PAUL MEYER
Kl If rr des aïKCBStJTS
Le . li]£ c l<b^ 4iurs
%'903
Tome XXXII
PARIS (2')
UBEAllUE ïiMJLE BOUILLON, ÉDITEUR
67» BUE DE HtCWEUEi;^ 67, AL' î*»
CONDITIONS D\\BONNEMENT A LA ROMANI J
Paris : 20 fr. — Départements et Uqïoiî postale . . i tr.
î rs tie se fotîl que pour Tannée entière et à pariir 4c jauvicf
; V tt^miinL'c se vetiJ, prise i P^iris * 2> If.
.^wc«M nmnetù n'est vtndtt séparàmnt^
>i.^M>tAîRB DU PRÉSENT NUl^tÊRO :
H Six:iius Rc<:berdics ^lumimM ife GaObiRiie li^Onfitr
(TpTçniicr art.)u , . , ... ..<,..,♦ ,,.,-....-
Ë, Lavclhii. Kotiei sur \K.fm d^Ut FtmHUi iTAdjot te bo^u
F. L
443^
cnfanr c^iig* tu nnur
• rice. — Charme <o if«rs ImiKal^
COMPTES RENDUS
E Ot*%¥ " ~ ns4t»Allll) I
R. Wleks .,..._ >
] TîEJtSOT. (Jnni^fti pt^fuimm rwcnaUui dûm io Alpii /> JWf^itrf (P^ M* }
FÉRIQDiaUKS ,r;n
CHRONÎQUi.
Lct prodiJtiu numéfos contiendront :
o. r ^ ■ ^ '
AI jni itc raociciinc Uaguc C^tf^l*'}.
A ; liériapc-s.
A. I -il ffr^T/ct >estmiutions(iiitl<),
M. VK-.
RECHERCHES
SUR LES
CHANSONS DE GUILLAUME D'ORANGE
La question de la formation du cycle épique de Guillaume
d'Orange compte parmi les plus obscures de Thistoire litté-
raire. C'est une de ces questions qui entraînent naturellement
les esprits aventureux dans la région des hypothèses. M. Ray-
mond Weeks regarde le roman italien des Nerhanesi datant du
XV' siècle comme représentant souvent un état de la tradition
antérieur aux chansons françaises qui nous restent. Suivant un
autre savant, M. Philippe Auguste Becker, le cycle entier de
Guillaume, loin d'être le résultat d'un travail lent et graduel
de la tradition populaire pendant plusieurs siècles, ne serait dû
qu'à l'activité plus ou moins factice de quelques moines du
XII* siècle et de leurs continuateurs.
Dans les pages qui suivent, je n'entends pas ajouter à ces
hypothèses une nouvelle explication de la formation du cycle
entier. Seulement je voudrais fixer quelques points qui, bien
que se rapportant à des traits particuliers, me semblent ne
manquer ni d'importance ni de sûreté. J'éviterai toute polé-
mique qui ne se présente pas d'elle-même sur ma route. Le
lecteur ne laissera pas de remarquer, par exemple, que Tédifice
entier de M. Becker s'écroulera du moment que Ton reconnaîtra
Aïmer, frère de Guillaume, pour un personnage en même temps
de provenance historique et de tradition vivante.
I. — Bertrand de Bar-sur-Aube
On sait que l'auteur de la chanson de Girard de Vienne
s'appelle Bertrand et qu'il Ta composée à Bar-sur-Aube. Lui-
même nous l'apprend vers le commencement du poème.
ta xxxii
25
354 H. SUCHIER
Ce fu en mai, quMl lait chaui et seri,
Que Terbe est verz tt rosier sotit Ûotï i
A Bar sor Aybe^ un chastel seignori,
La sist Bertrand en un vergier pensis,
Uns genth dcrs *|Uï ceste chan*;on fi st.
Je croîs que ce passage permet pim de conclusions qu'on
Ti*en a tiré jusqu*à présent. Demandons d*abord aux historiens
de la ville de Bar-sur-Aube des renseignements sur le château
seijËîneuriâl, dans le verger duquel la jeune àme de Bertrand a
couvé cette belle et impétueuse chanson de geste.
Suivant ces historiens ' il y avait à Bar-sur-Aube deux chiV
leaux. Le premier était bâti sur le penchant de la montagne
Saîme-Germaine au lieu dit le Chitelet* Ce château, men-
lionnc plusieurs fois sous la désignation de vieux châimu^
semble avoir été abandonné vers le milieu du xir siècle* A
partir de ce temps, quand on parle du ch;^teau de Bar-sur-
Aube, on entend le château construit dans la vallée. Le château
nouveau doit avoir existé en 1091, car dans une charte de
cette année, l'autre édifice est dé];\ qualifié de vieux château
(tn vettri casîro Barri, Blarnpignon, p, 78). 11 en est encore
question dans une charte de 1151, Cest la dernière, à notre
connaissance, où il en soit fait mention. Partant il est hors de
doute que cVst le château nouveau qui est entendu dans le
passage précité de Bertrand*
M. dWrbois de Jubainville, à l'ouvrage duquel (p. 90-92)
j'emprunte ces renseignements^ donne du château nouveau la
description suivante :
Henri le Libéral y fil biiir (dans le château) Téglise Saitit-Mactou pour en
être ÏA chapelle, ei y tnit des chanoines pour la dessen*ir. Le palais s*élcviit
entre 1 église et la rivière* M lis, suivant la tradition, ce païats et Téglbe ne
su^salent pas à remplir renceiiite du château. Cette tradition est confirmée
par les documents écrits; en effet, H est question dans les charte de maisons
que possédaient dans ce château divers particuliers. Ainii, en marf 126|
(v. &t,), Vilain d 'Espagne » damobeau, reconnaît devoir aux chanoines de
Saint*Maclou un cens payable sur deux maisons à lui appartenant, sises à
Ejr-siïf-Aube dans le cliiteau devant Téglise Saint- Maclou (Cari, Saim-
ï, L, Chevalier, Histoire de fîtif-^î/r-Ju/^, Bar-su r* Aube ^ i8ît.— D'AriK»s
de Jubainville, HisiQirf dt BaF-sur^Juhr mts ks comtt^ âf Chûmpûgm 1077-
ît$4t Pirîs, iëS9. — Blamplgnon, Bar-îUf-Àabe^ Bar-sur-Aubc» 1900^
LES CHANSONS DE GUILLAUME D ORANGE JJJ
Maclûu, xii*s. '). En 1270 le comte de Champagne^ toi de Navarre, dojiuc
âuchiiphrede Saim-Madoti tic terniîn situé a Bar, devaiiE TégUse Saint-Madou,
lieu dît le Château de Bar, près h maison du doycuué de Saini-Miiclûu, vers le
milieu JudU château, enire les halles d'Yprcseï celles où les drapiers de Cam-
brai vendent pendant les foires. Ces indications peuvent donner Fidt^e de
retendue <jii'av^U le château ; nous supposons qu*outre régliseSaint-Maclou,
il comprenait au moins une grande panie delà place qui porte actuelleniem
le nom de place Saînt-Maciou et Tespace qui se trouve entre la rivière
d'Aube, réglîse et la rue des Mouhns, Une des portes d'entrée subsiste
saus une tour juxtaposée à Téglise Saint-Maclou ; une autre correspondait
s^ns doute au ix>nt, auîourd'hui détruit, dont les fondatiotis apparaissent
dans les eaux basses à Te xt ré mi té de la rue Saint- M ad ou. La tour est la
seule partie des bâtiments civils du château qui existe encore..» Elle sert de
clocher à Téglise jadis collégiale, aujourd'hui paroissiale de Sainr-MacloUt
J'ai volilu citer m extenso ce passage, qui me semble propre
à éclairer plus d*un point, II fait voir que dans Fenceinte du
château il y avait de lespace pour un verger, et ce sont peut-
être des parties du verger que Ton a employées au Xifi*' siècle
comme emplacements de maisons. Comme ce château était la
propriété du comte de Champagne, la question se pose de
savoir sî ce n*est pas le comte ou un membre de sa famille qui
a chargé Bertrand de la composition de Girard de Vienne.
Les comtes de Champaj^me aimaient avisez le séjour de Bar-
sur-Aube, M. d'Arbois de Jubainville {Huioire des dms et des
comtes ik Champagne, t. III, p, 251) énumére sept chartes
données par Henri II à Bar-sur- Aube à des dates différentes.
Toutefois on ne %^oit guère l'intérêt que le comte !ut-mt"me
pouvait prendre à l'histoire de Girard de Vienne. Mais sa tille
Scholastica était l'épouse de Guillaume V de Vienne, comte
de Mâcon, et les comtes de Vienne rattachaient leur famille au
célèbre héros épique. De là leur prédilection pour le nom de
Girard : c'est de ce nom que s'appelaient le père de Guil-
laume V, un de ses frères et son fils aîné,
José donc présumer que Bertrand, lorsqu'il écrivit sa chan-
son au château de Bar-sur- Aube, avait été chargé de cette
tache par Guillaume de Vienne, geudre du comte de Cham-
pagne, peut-être aussi par Scholastifi^, Pépouse de Guillaume.
La part des dames a été vraiment énorme dans le développe*
ment de la littCrature au \\f siècle, et Scholastica était fille de
1. Évidemment il faut corriger xn« s, en xtii^ s.
$$6 H* SUCHIER
la comtesse Marie, petîte-fille de la reine Éléonore, qui Tune et
Fauîre, parmi les dames protégeant les poètes, se trouvent au
premier rang.
Malheureusement on ignore la date du mariage de Scholastica
avec Guillaume deMkon, Je pencheà croire qu'il a été accompli
vers 1190. Scholastica mourut en 1219; le comte Guillaume^
qui avait succédé à son père mort en 1184, décéda en 1224. La
composition de Girard de Vienne est à placer entre ces deux
jalons, ce qui ne change rien à Topinion reçue. Guillaume
a été aussi le protecteur du chansonnier Guiot de Dijon, et
son père Girard celui de Guiot de Provins, qui honore sa
mémoire par un passage de sa Bible (v. 334) et qui dédie une
chanson ' ù un comte de Maçon qu'il sera permis d'identifier
avec Girard.
On sait que Scholasrica avait reçu comme dot des droits à
percevoir sur les foires de Bar-sur-Aube.
Il est possible que Bertrand ait été logé au château en qua-
lité de chanoine de Saint-Maclou\ La-dessus il faudrait pou-
voir consulter le Ginulaire de Saint*Maclou de Bar-sur-Aube
écrit vers la fin du xiu* siècle, et qui est maintenant en la pos*
session de M. Aubertin, maire de la comnmne de Bayel,
n. — MoHGLAKE
I
Suii^ant le début de Girard de Vienne le vieux Garin,
père du héros, réside à Monglane, la Jort die antie^ où il est
entouré de ses quatre fils. Tout ce que nous apprenons sur la
situation de cette dté^ c'est que defors ks murs cùrî H Rasnes
truian^. Si célèbre que soir devenu dans la suite Monglane, qui
a donné le nom à Fune des trois grandes gestes de répopéc
I, Publiée dernièrement par M, Baydier, Grnoi wm Prmnm^ Halle, 1902»
a. Ces chinoîncs furent établis en 1 1 Sf- La chapelle de Sjijnt-Mftclou 91)1
leur fut ajsignéc cjustait déjà au xi« siècle. Les chancHiies étaient enterrés sur
la hauteur de b mouiagnc Sainte-Germaine où était l'ancien dmefîèfe
(Bl an» pi g non, p, p, 78). A partir de 1165, les chanoines, pendant ^tielquo
annces acuîemcnt, occupèrent Tégllse Sainie^Madeleine (d'Arboîi, p. 6|, 64;
LIS CHÂNSOKS DE GUILLAUME D ORANGE 5Î7
fra^nçâîse, personne n*en a encore retrouvé la position. C'est
en vain que l*on feuillette les ouvrages sur les chansons de
geste : ils ne nous fournissent aucun renseignement à ce sujets
sauf un passage de V Histoire lùtéraire de la France^ duquel je
parlerai par h suite.
Pendant un certain temps, (*ai cru pouvoir atteindre la solu-
tion du prohlcme : c'est lorsque le hasard me tit rencontrer en
Suisse le nom du manoir Glane et celui de h famille noble de
Glane. Tout d'abord je crus que c'était là l*origine du Mon-
glane épique, mais depuis je suis revenu de cette hypothèse
qui m avait fait suivre une fausse piste. Cependant comme
la supposition que j'abandonne maintenant reste du moins
dans le domaine du possible, je résumerai ici en quelques mots
les recherches que j'ai faites à ce sujet.
Que Ton se rappelle avant tout l'ingénieuse hypothèse de
l'auteur de Y Hhtmre poénqm de Cfmrjetmgm, Suivant G. Paris,
la tradition originaire ne connaissait ni les trois frères d'Ar-
naud de Beaulande ni leur père Garin de Monglane (Hhi.
poêt\f p. 80 et 32e)* t^ Arnaud était le plus ancien aïeul qu*elle
donnât à la geste : Girard de Vienne, Renier de Gennes,
Milon de Pouille et leurs enfants n'étaient aucunement men-
tîonnés. Les enfants de Garin et la geste d'Arnaud n'étaient
pas réunis pour former une seule famille, celle de Monglane.
Cette soudure est tout artificielle^ et Tœuvre des arrangeurs
de seconde main; la preuve en est que les poèmes où
figurent les nombreux descendants d'Arnaud de Beaulande
ne nomment jamais ses prétendus frères, candis que ceux-ci et
leurs enfants figurent dans des chansons qui ne connaissent pas
les premiers* On ne les voit réunis que dans des poèmes pos-
térieurs, et nous croyons que l'auteur de Girarî de Fiant est
celui qui, vers le commencement du xnr siècle, a fondu ces
deux gestes en une seule, ^
Les recherches nombreuses et approfondies consacrées à
Tépopée française depuis 1865 n'ont fait que confirmer cette
séduisante hypothèse- Elle ne serait pas affaiblie non plus, si
nous supposions que Bertrand, en réunissant les deux familles
en une seule généalogie, avait de son gré ajouté Tancèire de
toute la geste, Garin de Monglane, et que ce personnage n'était
dû qu*à son invention. Bien que la chanson de Girard de Vienne
soit assez tardive, datant de la fin du xii' siècle au plus tôt, je
JS8 H. SUCHIER
ne connais pas d'allusion h ce nom de Monglane qui soit anté-
rieure à rou%Tage de Bertrand. Il se peut donc que ce soit Ber-
trand qui ait inventé ce nom, ou du moins qui Tait introduit
dans l'épopée.
Voici Itrs faits qui m'ont suggéré cette idée \
En Suisse, la noble maison de Glane (ou Glanne, Glannes)
était illustre et ancienne. Elle était d*origine étrangère, et
c'est à tort qu'on la décore du titre de comte, qu'elle ne prend
dans aucun acte* Le manoir des sires de Gbee s'élevait jadis à
y ne lieue au-dessus de Fri bourg, au confluent de la Glane et
de la Sarine, sur un rocher qui s'avance en forme de pro-
montoire. Le premier de ces seigneurs dont il suit ait mentiiHi
est Ulric, qui épousa en 1078 Rihlende de Villarswalbert
(Walpertswyi) et â qui Guillaume HI comte de Bourgogne
inféoda une partie du \'ully et de grandes possessions à Arcoii-
ciel, Illens, Sales et Farvagny.
Pierre et Philippe, fils d*Ulric, furent en 1127 assassinés
avec Guillaume III de Vienne, dit TEnfant, fils de Guil-
laume n, dit r Allemand, dans Féglise de Payerne, Pierre de
Glane bissa un fils unique appelé Guillaume et quatre filles,
dont Emma épousa Rodolphe II comte de Neuchâtel, Ita
Aymon II comte de Genève» Agnès Rodolphe I comte de
Gruyère, julienne le frère cadet de ce dernier, Guilbume de
Montsalvens.
En II 57, Guillaume de Glane, se trouvant sans postérité.
I. ]' lamjtièrc les ouvrages suivants : J. Kucnîiû^ Dki»mê~ 1
tmift^L-^ ^ ^ :iJiqut tt ki/ori^iu' du ionùm de Fréouff, î. IL Friiïcwitg ,
i8|l» articles Gîam çî Hauttr k>e (om-rn^ fçu correct). BcrchEôld, Huioirt
dit cmt&n àt Frihourf^^ t, ï, Fribourg (Suisse), i8s|i, p. la Mémtairm tî
âo^mmU f. f. h Seciéii ifhitkurê df k Suiae r^mamU, i. l, p. 49 et 60^
i. XXII, p. S7|, HémondiÊ Fréùmz. U II, %%%%, p S*?» |41. Meettbre*.
Ui ^tf,'îfut flodalif iÊsti ht Alpts pmd^nttUti p,p. tAmiénm wvyûkJê TWiii,
série 2, vol. XXU et XXni, Turm, i86î, p. 24S, 274. Ârdknm et k SmHi
rUiiciif* du mmsm ih FHkmri^ t, IV, 188S, p, 16; l. V, 1891. p. lO-ïi. ^
Je dois de pnècicui tmsàgaemsat^ sur les sires de GLioe en Stitssc à Tarcht-
vistc d*Ëuu M. Sciuieuwly, et une très sav^inte notice sur ccui de Glaîae, 1
pc^ffe là Grande- Verrière (SA^ne-ct-Loire), I Fauteui de VHi%Uirièn émià \
et Bom^ifm^ M. Ernest l^ctii.
LES CHANSOKS DE GUILLAUME d'oraHGE 5S9
fonda sur les bords de la Sarine un monastère cistercien,
Hauterive, où il prit Thabit religieux K II y mourut en 1142 et
fut enseveli solennellement dans un mausolée qui se voit dans
Téglise à côté du grand autel. II fit démolir, dit la tradition,
son château ; les matériaux furent employés à la construction
de la maison consacrée à Dieu. Le riche héritage de Guil-
laume fnt partagé entre ses quatre sœurs.
Or les sires de Glane descendaient, ou prétendaient des*
cendre, de h première race des comtes de Vienne, Cela se
trouve souvent mentionné dans les ouvrages consacrés à leur
histoire, par exemple, dans Guilliraanni Hdvetia^ MI, cap^ 14,
texte de 1598 reproduit dans le Thésaurus hlstoriae Helvetkae^
Tiguri, 1735. Pour pouvoir me rendre compte de la nature de
cette parenté, j ai prié M. te D^ Holder, bibliothécaire à Fribourg
(Suisse), de vouloir bien me procurer un ' copie de la Généa-
îogU manuscrite âjts sirts deGlanty appartenant à la Bibliothèque
cantonale, et M, Holder a eu Textréme obligeance de répondre
 ce désir* Selon ce texte, disposé en forme de table, Utric de
Glane était fils de Guillaume de Vienne et de Mau relie de
Glane, et Guillaume de Vienne fils de Guillaume le Grand
comte de Bourgogne mort en 1087 et d'Étiennette de Vienne,
qualifiée d*héritiére du comté de Vienne dans VArt de vérifier fc
daies, éd. in-S^, XI, 109,
Je laisse à d'autres, et surtout au savant archiviste de Fri-
bourg, M. Schneuwly, la tâche dVxaminer le fond historique de
cette généalogie. Ici j*en retiens seulement le fait que les sires
de Glane prétendaient descendre, ou bien descendaient réelle-
ment, de la première race des comtes de Vienne. Quant à
Etiennette (ou Stephania) nommée dans la Géftmhgk, on
trouve sur elle les renseignements les plus authentiques dans
le savant ouvrage de M. Ulysse Robert, Histùire du pape
CalixU //, Paris, 1891, p. 2 et j. M. Robert énunière neuf
enfants d'Etiennette. Le mari de Maurelle de Glane n'en est pas.
Revenons maintenant au poète Bertrand. Ne pouvant con-
naître le nom du père historique de Girard de Vienne disparu
!. Astrolabe, quatrième abbé d 'Hauterive, est probiblement le fib de ce
nom d*Abailard etd'Hèloïsc.
jéo H, SUCHIEK
dins la tradition (il s'appelait Leuthard)» Bertrand ' devaii
donner à son héros un pèrr imaginaire.
Je supposais donc que peut-être notre clerc qui connaissait
les relations des Glane avec les Vienne, avait attribué au père
de Girard le nom de Garin de Monglane. La différence entre
Glane et Af^^ffglane ne fera guère de difficuhc. Bertrand
place Monglane sur le Rhône, peut-être parce qu'il le croyait
situé dans les environs de Vienne Si le père de Girard dans
la chanson est appelé Garin, Bertrand peut avoir choisi ce
nom parce que le premier comte de Mâcon s'appelait Warin
(A ri de vérifier les dates ^ XI, 9). Toutefois la sûretc de celle
présomption est en raison inverse avec la fréquence du nom
Garin.
Tout compte fait, il se peut que le nom de Garin de Mon-
glane soit un nom factice forgé dans une vue généalogique par
un poète familier avec le passé et la parenté des comtes de
Vienne.
Une autre explication de Monglane a été proposée, avec hési-
tation il est vrai, par Paulin Paris {Hist. iiU. de la France,
XXU, 444) :
Q^ant à Morttgkne, l'inctnitude des indications topograplviques chez
les troyvàres ne nous permet pasd*;iffirmer que: ce soît îe Glanum des anciens,
près du Rhône, sur une élévation voisine de Samt-Remy et de TaniKon ; Heu
(|ui conviendrait à notre texte [Enjmtc^'i Garin de Monglatu], comme *uni
sur la Uniitc des provinces îotigtcmps occupées par les Sarrasins d*Espagiie«
et comme ayant dû rentrer des premiers mus h domination des souverains
d'Aquitaine ,
Cette hypothèse tnérite un sérieux examen > La ville de Gk-
num a été détruite au v* siècle- Elle était située un peu au sud
du Saint-Rcmy actuel, près d*oLi passait au moyen âge un bras
de la Durancc appelée la Duransole. La distance de Saint-
Remy au Rhône est de quinze kilomètres. Or te Girard histo*
ri que a eu des relations avec Sainî-Remy, comme je le mon-
trerai par la suite. Bertrand, en sa qualité de clerc, a pu
connaître celles-ci; il est possible même quVlles aient été
conservées dans la tradition. Il est vrai que le nom de Glanum
t. Ou bien uneiraditioa qu'il suivait, ce qui reviendrait presque au même.
LES CHANSONS DE GUILLAUME d'oRANGE 361
ne semble pas avoir survécu à la destruction de la ville* ;
cependant le nom de la ville disparue a pu se transmettre à
un château fort qui pourrait avoir été en la possession du
Girard historique.
Tout compte fait, je laisse la question en suspens. Au cas
où Monglane serait l'ancien Glanum, il faudrait croire que le
nom avait subsisté dans la tradition. D'autre part, si Monglane
provenait du manoir situé en Suisse sur la rivière de Glane à
laquelle il doit son nom, il faudrait croire que le nom de Mon-
glane a été forgé par le poète que protégeait Guillaume V de
Vienne, comte de Mâcon.
Ce qui peut singulièrement servir d'appui à l'hypothèse de
Paulin Paris, c'est que le nom primitif de Saint-Remy était
Fréta et que dans quelques chansons notre Girard est appelé
Girart do Frete^ comme le fera voir le paragraphe suivant.
m. — .Les trois Girards
Parmi les fils de Monglane le plus renommé est Girard de
Vienne, le protagoniste de la chanson de Bertrand. On sait
3ue ce héros est un personnage historique, Girard, gouverneur
u royaume d'Arles de 853 à 870. L'épopée le chante sous
trois noms différents : Girard de Vienne, Girard do Frète
^Fraite, Frate), Girard de Roussillon. L'identité originaire de
ces trois héros épiques a été prouvée en 1878 par M. Longnon *,
mais mise en doute en 1884 par M. Paul Meyer'. Je me range
tout à fait du côté de M. Longnon, qui montre que la chan-
son de Girard de Vienne contient au moins autant de traits
1. Le comte de Villeneuve cite une charte de 1198 (p. 11 38 et 1 141 du
t. II de sa Stastisiique du département des Bouches-du-Rkhic, Marseille, 1824),
dans laquelle les habitants de Saint-Remy firent valoir les anciennes immu-
nités de Glanum ; le souvenir de Glanum n'était donc pas tout à fait éteint.
U serait important de connaître la teneur de cette phrase. Je ne sais pas si la
charte est publiée.
2. Girard de Roussillon dans Vhistoire, dans la Revue historique, t. VIII,
p. 274-279.
3. Giratt de Roussillon, chanson de geste traduite pour la première fois, Paris,
1884, p- xv-xvi.
-.\
362 H. SUCHIER
historiques que celle de Girard de Roussillon. Vienne est la
ville antique de ce nom dans le département de l'Isère ; c'est
le fief de Girard; son lieu d'origine s'appelle Monglane. Le
nom de Roussilloa a été expliqué par M. Paul Meyer, p. xxx :
c'est, d'après la chanson provençale, un château situé sur le
mont Laçois à deux kilomètres environ de Pothières (Côte-
d'Or); la Seine passe tout près.
Reste à considérer le surnom do Fraite connu surtout par
son emploi dans la chanson d' Aspremont , « Girart do Fraite »,
vassal rebelle de l'empereur Charles, réside à Vienne. Turpin
dit de lui dans Aspretnont : si est estrai:( de .y. empereurs (éd.
Guessard * i ? , 47), et un peu plus tard Girard dit lui-même
(17, 50) : je sui eslrai^de ,ij\ empereri:(. Bien que cette dernière
donnée ne soit peut-être pas historique prise à la lettre, il y a
toujours dans ces paroles une grande part de vérité ; pour s'en
convaincre, on n'a qu'à relire les pages 246-249 du mémoire
de M. Longnon.
L'endroit le Fraite a été identifié par M. Longnon avec le
Saint-Remy actuel, dont le nom primitif était Fréta ou Frétas.
M. Paul Meyer combat cette opinion, mais à tort. Il y objecte,
p. XVI, qu' « il est absolument impossible que la forme Fréta
ait produit, soit en français soit en provençal, la forme fraite ou
frète. On sait que le / entre deux voyelles s'efface en français et
devient d en provençal ». La portée de cette objection me
semble nulle. Voici pourquoi.
Fréta comme nom de lieu ne saurait être antérieur à la fon-
dation du lieu qu'il désigne, c'est-à-dire au v" siècle. Il se peut
que le / latin entre deux voyelles fût déjà atteint avant ce
terme, et personne ne niera qu'un mot introduit après l'accom-
plissement d'un changement phonétique n'y participera plus.
Prenons le uîot chapitre que je suppose avoir été introduit en
français vers le vin« siècle. Est-il impossible que ce mot pro-
vienne de capitulum, parce qu'il n'a plus participé aux chan-
gements antérieurs atteignant les p et les / entre voyelles?
Pour Fréta il se présente pourtant encore un autre expédient pour
satisfaire à la conscience phonétique la plus rigoureuse : le
nom de lieu en question dans les documents ne se rencontre
I. Sur cette édition qui n'a jamais été publiée, voir Rom. XIX, 203, note 2.
LES CHANSONS DE GUILLAUME D CHANGE 365
pas avant le x" sièclt;, et, ce que M. Paui Meyer sait mieux
que personne, rien ne nous force à admettre que la forme
employée dans une charte du x^ siècle ait été la forme authen-
tique du nom primitif. Elle peut fort bien ctre due h une lati*
nisation d'une forme vulgaire. Si par exemple la forme éty-
mologique au lieu d'un / en avait eu deux, le scribe du x* siècle,
lequel ne prononçait plus i Titatienne les ît du latin vulgaire,
a pu fort bien remplacer t double par t simple, je continue
donc à croire que ie Fraik n est rien autre que le Freins ou
Fréta des documents. Ce nom de lieu, comme Ta montré
M, Deloclic'j était en usat;e au xîV' siècle. Sa situation, sans
être absolument celle du lieu de naissance de Roumanille, en
était très rapprochée, partant très voisine aussi de Fantique Gla*
num.
Uopinion de M. Longnon restera donc debout, l'opinion
que îe nom k Fraiîe de la chanson d^Asprcmonf est le nom
Fréta ou Freîus des documents et que ces dénominations
gibignent un endroit situé dans le voisinage immédiat de Saint-
Remy, Cet endroit comme lieu de naissance de Girard ne
pourrait-il pas avoir un fond historique ? L^histoire ignore
le lieu de naissance de Girard comme celui de Charle magne,
La vie latine de Girard de Roussillon le fait naître à Avignon,
éloigné de Satnt-Remy de cinq lieues au plus; on croit qu'il
s'y retira et qu'il y mourut. Son père Leuthard et sa mère
Grimildis peuvent avoir habité la Provence, et la tradition
épique cette fois avoir eu une base dans un fait réel. Girard
paraît avoir possédé un manoir près de Saint-Remy. car Téglise
de Reims, qui avait des possessions à Saint-Remy^ les lui avait
confiées pour être par lui protégées et administrées (Deloche,
Je soutiens donc contre M* Paul Meyer Topinion reçue et
généralement acceptée dès le moyen âge : les trois Gîrards
ont pour hase un seul personnage historique, Girard gouver-
neur du royaume d*Arles et en même temps avoué du prieuré
de Saint-Remy.
Le lecteur a déjà vu, sans que je l'aie dît expressément, que
I , Sainî*Rtmy de Provence att moyen d^e, dans les Mémoires tk F Académie
dgâ insCftpHons^ u XXXJV, 1892, p* 94, note.
364 "• SUCHIER
ridentitt^ de h Fraik avec Saint-Remy phiitlt* (on en faveur de
latitre identité de Monglane avec GlantwK II est très curieux
que nous ayons ici deux traditions épiques absolument indè^
pendantes qui aboutissent A un seul endroit. S*il était permis
de supposer que Leutliard iivait eu un niiinoir appelé Monglane
perpétuant le nom de Tancienne ville Glanum et situé près du
lieu appelé Frète ou le Fraite\ tout s'eîtpliqueraît à mer-
veille. Quoi qu'il en soit, on ne saurait nier que l'une de ces
coïncidences est un fort appui de Tautre.
D'autre part il paraît évident que le chAteau de Roussi lion,
situé près de Pothières et, suivant la chanson provençale,
possédé en alîeu par le père de Girard, manque de toute base
historique. Ce château n'a jamais existé. Il y a des ruines
antiques sur le mont Laçois, et comme Girard devait être très
populaire à Pothières et dans les environs, il s'est formé là une
tradiiiun locale prenant ks ruines sur le mont Laçois pour les
débris du château du pîeux fondateur de Pothières. Quant au
nom Roussillony je n'ai rien à ajouter à ce qu'en dit M. Paul
Meyer, p. xxxi.
IV. — Aimer le Chaitif
Suivant une théorie de G, Paris la formation des familles
épiques est souvent due k la réunion de héros isolés en un
groupe* Tel personnage peut avoir existé à Tétat isolé, avant
d'avoir été introduit dans la famille où nous le trouvons* Ainsi
un frère de Guillaume, Garin d'AnseÛne, se rencontre à l'état
isolé dans la Ctmnsmi des Saxifus^ un autre frère, Hernaut de
Gironde, dans Girard de Roussilhn. Quelquefois un même per-
sonnage a^ dans différentes chansons, une position différente.
Ainsi Hernaut de Gironde, dans les cliansons du cycle de
Guillaume, est fils d'Aïmeri de Narbonnc» dans Gaufrty il est
fils de Doon de Mayence, et dans Maugis beau-père de Mau-
gis*
Je signale ici une curieuse coïncidence que j'ignorais lors
de l'impression de mon édition des Narbonnats. Dans les Nar-
* I. Le nom vulgaire ne se renoontrerait-îl plus dins les chance <ie la
contrée dy xin* siècle ou du xiv* ?
LES CHANSONS DE GUILLAUME d'oRANGE 365
bannaiSy Bueve de Comarchis, frère de Guillaume, devient le
gendre et le successeur d'Yon roi de Gascogne, et le païen
Clargis, baptisé sans changer de nom, devient duc d'Auvergne.
Dans la chanson à^Aspremont (éd. Guessard i8, 54-71), il est
question de deux neveux de Girard do Fraite, fils de. son frère
Milon, appelés l'un Bu eson ouBuevon, TautreClairon (cas sujet
Claires) ; celui-là est appelé de Gascogne, celui-ci d'Auvergne.
Comme la chanson d'Aspremont est antérieure aux NarbonnaiSy
je penche à croire que les données de celle-là ont plus de droit
à être regardées comme primitives, et que les données de celle-
ci en sont imitées.
Pour l'un des frères de Guillaume je crois pouvoir démon-
trer qu'il a existé non seulement dans la tradition épique,
mais encore dans la réalité historique, avant qu'on l'ait ratta-
ché à la famille d'Aimeri. C'est Aïmer le Chaitif.
Dans les Narbonnais nous apprenons l'adoubement d' Aïmer
par la main de Charlemagne. En vain l'empereur Tinvite-t-il à
rester auprès de lui et à le servir comme l'un 'de ses grands
feudataires. Aïmer refuse. Il fait vœu devant Dieu et les
hommes qu'aussitôt sorti de la terre des chrétiens il ne cou-
chera plus jamais sous un toit.
Chevron ne late n'en sor moi por oré,
Ne ne jerrai desoz fête levé,
Se Sarrazin ne m'ont enprisoné ;
Mes an niontaignes o en bois o en pre
Lez les rivières ferai tandre mon tre (2918 ss.)
Et cette téméraire promesse, Aïmer la tiendra à la lettre. Au
siège de Narbonne, quand il arrive avec ses hommes, ceux-ci
n'ont pas le inême air que ceux des autres conducteurs de
troupes.
... Lor escu sont noir et anfumé,
De ledes armes sont trestuit adobé,
Si en resarablent plus fier et desreé
Qpe cil qui sont si richement armé. (6823 ss.)
Aïmer dit à Hermanjart, qui voit arriver cette troupe noire :
Ci voi venir le gentil bacheier
Que Tan apele le Chetif Aymer.
Ainz ne doingna dedanz vile osteler;
Tozjorz se paine de Sarrazins grever. (5926 ss.)
366 H. SUCHIER
De même dans Aliscans ' , Aimer n'est pas avec son père à
Paris :
En Espaîgnt est entre les Sarrasins,
U se comba! et par nuit et par dis. (3602- j.)
Quand il arrive ù Orange, Guillaume veut le loger dans
son pakb; mais Aimer refuse d y entrer :
Defors les autres (îestresort murs) fist sa gcm osieler, (4158)
Et qyand Yost se forme pour la bataille, ses guerriers ont le
même air sauvage *^ue dans les Narhttnms i
(H) n'ont escu ne soit frais et crolsis.
Leur hauberc sont enroïlIi*Ss et pris,
Leur elmes quas, nVuretu pas brans forbïs»
Attis est cascuns de sâiu becé noircis. (4916 ss.)
Presque chaque fois qu*il est question d'Aïmer, il se montre
avec ces mêmes traits héroïques.
Dans le Courmtmuent de Lmis Guillaume renseigne Corsolt
sur sa personne, ènumérani ses frères. It se contente de les
nommer, sauf pour Aimer au nom duquel il ajoute quatre vers
peignant ses qualités héroïques :
Qui n'entre en loge ne (este clievroné,
Ainz est iot\orz aL vent et a Tore
Et si deirenche Sarrajîins et Esc!ers,
La vostre geni ne puci il poini amer. (827 ss,)
Et dans Aimeri dt Narhnne le poète lui consacre ces vers :
[II] ne vûst oaques gésir, tant corn fu vh^
En lor entic ne en pjliîs voiii,
Ain^guermij sor Sarraiins toz dis« (459] S$.)
C'est une des plus belles figures de Tépopée française, œ
héros franc qui, dès son adoubement, fait vœu de ne jamais
coucher sous un toit et de sacharner contre les infidèles sans
trêve ni repos* Tandis que les autres troupes portent des
i . Je die Aîùtûm d *a près Tédit ion que trois de mes élèves, MM.Wienbcck,
Harînackc, Hasch, publient â Halle et dont Timpression est presque i*;nni-
née. t>*aillcars cette cditioti conserve la nu nit; rotation des vers de rédition
Guessard.
LES CHANSONS DE GUILLAUME D*ORANGE 367
armes neuves et reluisantes^ les guerriers d'Aimer sont noircis
de rouille ei de sang.
Or, ce grandiose personnage n'est pas un produit de l'imagi-
nât ion ; c'est un homme réel : c'est Hadhemar comte de Nar-
bonne, le même qui combattait à côté de Guillaume dans
rexpédiiion de Barcelone en 801.
J espère que Ton ne m'objectera pas les soi-disant « lois
phonétiques ». Les changements phonétiques n'étaient plus les
mêmes dans la période franque que dans la période romaine,
qui l'avait précédée. Un nom H ad hem a rus mtroduit du
temps de Dagoburt ou de Pépin ne donne plus k* même résul-
tat qu'un Hadhemarus (plutôt Hathumerus) introduit du
temps de Vcrcingétorix, Je renvoie à ce que j'ai dit plus haut
(p, 362) pour répondre aux objections dt* M. Paul Meyer.
En 8or le Sarrasin Zaddo, gouverneur de Barcelones avance
jusqu*aux environs de Narbonne, où il est fait prisonnier. On
prépare une expédition contre Barcelone avec trois armées. La
ville est assiégée ; les habitants envoient à Cordoue pour avoir
du secours. Le roi des Sarrasins fait partir aussitôt une armée,
qui parvient jusqu'à Saragossc. Là ils apprennent qu'une armée
franque leur barre le chemin. C'était Guillaume, premier porte-
drapeau, Hadhemar et avec eux une forte troupe :
Vcnicntîbus porro his qui missi fuerani CaesaraugusEani, latum est cis de
eiercitti in via sibi obviam eonstiEuio. Erat enim M Wilîelmus primas signi-
kf, Hatihemarus et cum eîs valîdum iUixilium {A slrtmom ^ ^ c^p. tj, dans
Pçrtjr, MûtnttHmla G^rttmttijt' hhfùrica^ IL p. 6t2| 32).
Après la paix de Barcelone les Francs y laissent le comte
Bera comme défenseur de la ville.
Le comte Hadhemar reparaît à plusieurs reprises dans les
annales du règne de Charlemagne, En 800 il est envoyé par
Louis t?n mission auprès de Charlemagne^ qui se trouve a
Rouen. Dans les deux expéditions de 809 et de 8io contre
Tortose^ il est Tun des chefs de l'armée franque '.
En 809, Louis divise ses troupes en deux armées, dont lui-
K H serait ton curieux que Aimer dans les chansons eût été qualiiîè de
seigneur de Tortose, commelepréitîtîdail ?^u\m Paris (Hisî. îiit., XXIÎ, 49B),
Cctaît cep«ndanî une erreur : die a été rectifiée par M. Sielc <C/Ww e/r>
Chsnwtt Giiibert tPAtuiremi^, Marbourg, 1891, p, a 3).
ifft H< SOCHIER
même conduit la plus grande contre Tortose, tandis qu'il
envoie Isembard, Hademar, Bera, Burell avec les autres, le
plus vite possible, vers Tintérieur, a6n qu'ils passent TÊbre
et que, pendant que lui-même attire rennemi du côté de
Tortose, ils Tattaquent subitement par derrière ou du moins
qu*ils l*effrayent en dévastant la contrée. Par conséquent,
pendant que le roi marche sur Tortose, les dits guerriers se
rendent dans la région de l* fibre supérieur, marchant la nuit et
se cachant le jour dans les forêts, jusqu'à ce qu'ils passent à la
nage le Cinca et rÈbre, Ils firent ainsi six jours de marche; le
septième ils passèrent les rivières,
Intcrea in loco, eu jus est vocabulum Sanctae Col unibae»dî\nsit copias suas
in duo, quam maximam quldem paneiTT stcum contra Torîosam duccns»
pon'O fscmbarduTTi, Hadem^rum, Beram, Burell um cum rdi<|yb tïxpediiis-
fime ad supcriora dirigeas, ut Hibero flumine transito, àum hostes jd *e
dcfigcrentur, ab istis insidiis *tx inproviso aggredcremur, aut ccrie lurbau
regtonc in pavorem solverentur, Igitur rcgc 1 ortcisam tendcnte mcmorati vîri
tamdîu supefii-îres Hiberî partcrs, noctibus eumc$ et die bus silvarum losira
sectantes, obambiilaverunc , usquequo Cîngam et Hiberum natatido pariter
transierum. In quo itincrtt s^x diés transige nces, scptima transmi:arunt
{Asirmom.^ cap, 14, dans Ptru, Mon.^ Il, p. 61 j, |o ss*).
En 8ro, les hommes d'Hademar, de Bera et des autres chefs,^
après une marche de trois joors, prives de tentes et n'ayant
d^autre toit que le ciel, n'osant faire du feu pour ne pas être
trahis par la fumée, se cachant le jour dans les forêts, employant
la nuit à des marches forcées, atteignent le quatrième jour
rËbre, qu'ils passent en bateaux, sauf la cavalerie qui le pa
à la nage :
At vero hnq\x\ ad opus supradictam sum députât i, Hadcmarus scilictt*
Btfra Cl reliqui, tnuiîi dierum em«iso itinere — erani enim sine sagTiiatjbi»
^ coclo pro tecto ut entes* foco, ne fumo deprrhctideri^ntur, renunlianteSi^j
si] vis se die occuleaies, i^oac quantum posse dabacur iter agentes, qu
die Hibero conpactis navibus ipsi qnidcm ininspûâitif equos autem natatui
cominisenim Çiitrmtom.^ c^p 1^ dans Pcrt-c, Mon,, I, p. 614, yi).
Cette méthode de faire la guerre est à peu près celle que Ton
nomme aujourd'hui la guérilla, la même que dernièrement les
Boers ont employée contre les Anglais. Je cite le premier jour-
nal qui me tombe sous la main, la Saaleidtung, de Halle» du
iS juin 1902.
LES CHANSONS DE GUILLAUME d'oRANGE 369
« Ces dernières poursuites privèrent les Boers de toutes leurs provisions.
Dewet ne couchait jamais dans un édifice, craignant d'être fait prisonnier.
I,e$ détachements ne dormaient jamais au même endroit deux nuits de
suite. Ils tâchaient de la sorte d'empêcher de la part des troupes anglaises
les terribles surprises nocturnes. »
Il faut que les récits des exploits d'Aïmer aient fait une
forte impression sur les iimes des contemporains. Plus d'une
fois il avait passé une série de jours en pays ennemi, n'osant
faire du feu, couchant le jour en plein air, coelo pro tecto titenSy
employant les nuits à faire des marches forcées. Tel apparais-
sait Hadhemar aux Français du ix* siècle, tel apparaît encore
Aimer dans les chansons du xu*. Seulement la tradition a
grossi les proportions. Aïmer fait vœu de ne jamais coucher
sous un toit; il emploie sa vie entière à verser le sang des
infidèles. De même qu'ils sont décrits dans les chansons de
geste, les armes toutes couvertes de rouille et de sang, de
même devait être l'aspect qu'oflfraient en réalité ce chef intré-
pide et ses braves guerriers.
Reste à mentionner un trait qui regarde l'Hadhemar de
l'histoire : il était en 812 comte de Narbonne. M. Emile
Cauvet en a donné la preuve dans son Étude historique sur
ritablissetnent des Espagnols dans la Septimanie aux VIII^ et
/X* siècles {Bulletin de la Commission archéologique et littéraire de
r arrondissement de Narbonne ^ t. I, Narbonne, 1877), p. 512-
315. Nous avons un document du 2 avril 812 qui énumcrc
les noms de huit comtes, un autre du 10 février 816 qui
nomme les sept comtés correspondants (auxquels il faut ajou-
ter Besalù), un troisième du 11 septembre (et non pas du
30 août) 834, qui montre à l'évidence qu'Adhemar avait, été
comte de Narbonne *. Voici les noms des huit comtes en
question : Bera de Barcelone, Gaucelin de Roussillon, Giscla-
fred de drcassonne, Odilo de Besalii (comp. Hist, gén. de
Lang.y 1.933), Ermengar d'Ampurias, Adhemar de Narbonne,
I. Ces documents sont imprimés dans V Histoire générale de hinguedoc,
t. II, Preuves^ col. 73. 109. 185. Le troisième (texte et fac-similé) se trouve
aussi dans le ^(///^/tn... </t' Narbonne, I, p. 112. La littérature ayant rapport
au premier et au second est relevée par Sickel, Àcta rei^um, Kar. 241, ïjui.
79, et par Bôhmcr-Mûhlbacher, Rcgesta imperii, I, n^ .47(1 (456), 608 (588).
mia, XXXII 24
370 H. SUCHIER
Laibulf de Béziers, Erlin de Gerona. Erlin est peut-être pour
Erluin ; autrement on pourrait penser à THernaut de Gironde
des chamons de geste.
La portée de cette circonstance saute aux yeux. Guillaume a
combattu prés de Narboiitie, Aïmer était comte de Narbonne.
Ces rapports avec la ville de Narbonne ont fini par faire de ces
deux héros des Narbonnais. Ils avaient combattu côte à côte en
Espagne : de frères d'armes on en a fait de véritables frères'.
Aïmer a le surnom de C/jaitif pour avoir été prisonnier des
Sarrasins; mais la chanson qui nous racontait sa captivité est
perdue- Il va sans dire que des captivités immédiatement
suivies de la délivrance, telles qu on en trouve dans Tépopée,
ne comptent pas.
Suivant la Morî Ainteri (v. 1384) Aïmer est tombé en
Espagne contre les Sarrasins. Un Hadumar, autre que le comte
de Narbonne, était comte de Gènes et tomba en 8oé contre
les Sarrasins de la Corse, Il est possible querépopée ait con-
fondu les deux homonymes et attribué à THadhemar de Nar-
bonne la mort de celui de Gènes. Pourtant, Thistoire ne rap-
portant rien sur ia mort du premier^ la tradition pourrait tout
de même avoir raison, !
Au XII* siècle on a composé une chanson racontant comment
Aïmer enleva à un païen qui sVtait emparé de Fmkf, appelé
Rogon ou Drogon, sa femme, la belle Soramonde, qu'Aimer
fit baptiser et épousa. Cette chanson romanesque est perdue ^
nous en connaissons le contenu par des allusions plus ou moins
vagues (dans Aliscans^ les Karbonnais^ Aimeri (k Narhninr^ la
Chronique d'Aubri de Trois- Fontaines, etc.). Ces allusions
placent d*une commune voix Venice en Espagne, Je suppose'
qu'il s'agît en effet de Benisa, ville espagnole située près de
Dénia et ayant appartenu aux Maures jusqu'en 1245. Au
xn^ siècle on a confondu ce Venice avec la ville italienne du
I. II est probable que Garin d*Aoscûne, fiénc de Guilbumc, est aussi tui
personnage hisiorîqut* Jl dcmeun- aux environs de Narbonne : Ait^cûne^
appelé au x* siècle Àm;eduna, est j'Oupïa aaud (Hérault). Uarchevèquc
Aimeri de Narbonne ftt don de cet alku, en 9^8, lu chapitre de Samt*Pâiit«
Voir Tabbé Sabanhés, Etudr hhtorique sur f^hhayf Je Smnt-Ptmî de Nar-
^rir, Narbonûc, iS^j, p. 171, et RGmania, l\\ p. 191.
LES CHANSONS DE GUILLAUME D ORANGE 37 1
même nom ', et ainsi s'explique le nom Saint-Marc de Venice
(Fenis) qu'on trouve en plusieurs passages à'Aliscans (4179,
4920, var. du v. 2602). Par contre, le cri de guerre d'Aïmer,
Venice la gastui {Aliscans 5132'), peut être dû à la vieille tradi-
tion.
V. — LES TROIS GESTES d' APRÈS LA MORT AIMERl DE NARBONNE
M. Couraye du Parc a publié la chanson de la Mort Ainteri
de Narbonne à Paris, en 1884*. Cest une chanson d'un carac-
tère assez archaïque, mais très personnel en même temps, comme
je le ferai voir.
On sait que l'épopée populaire est censée former un grand
ensemble dont les branches particulières ne sont pas toujours
nettement séparées de ce qui précède et de ce qui suit. L'auteur
de la Mort Aimeri place la sienne tout à la fin du grand courant
épique :
Seignor, oez, qui chançon demandez 1
Soiez en pes, et si m'oez conter
D*une aventure, onques ne fu sa per.
Cornent les jestes vindrent a décliner,
Les anciênes dont Ten soloit parler.
1. On sait que le français du moyen âge appelait la ville des lagunes
Venice et que cette forme s'est conservée en Angleterre.
2. Je propose en note quelques corrections au texte imprimé. Je laisse de
côté tout ce qui regarde le choixdes leçons et la ponctuation. 133 un] lisez une
— 159 ce vers est identique à un vers de la chanson du comte Rainaut — 242
lisez Aspor^d'Ossau — 304 lisez vohes — 311 Un] lisez Une — 450 points —
469. C] mil cp. 781 — 530 mes — 562 espie — 641 .LX.] .xxxx. cp. 621 et
6s8 — 673 supprimez Li et lisez Rois Galafers cp. 798. 956 — 794 Tante —
1027 Qui Pot — 1074 Pent Va — 1 107 mènent] muei'ent — 1 228 [/] sofit —
1230 .iiu.]. ni. — 1236 .XXII.] .xiiii. cp. 1228-123 1 — 13 16 seij^nor, peut-être
à corriger en saignas (sanglent) — 1320 est] es— 1396 etc. Oieneliu — 1478
[i]est — 1589 Pristretit iluec milhorjois — 160S supprimez Biax — 1607 et
l6c&nostre — i6i5.xin.] .xmi. — 1637 /« — 5168 de ramananderie^phn^
tatioQ d'amandiers). Ce mot se retrouve dans Brisebarre de Douai, voir Ch.
Bonnier dans Otia Merseiana^ III, Liverpool 1903, p. 34. — 1674 Et arri-
vèrent — 1687 Li amiraJs monte de maintenant — 1797 ne la] la ne — 1874 et]
372 H. SUCHIER
Il répète k même pensée à la fin du poème :
El l'esioîre est d endroit aconpiie.
Damedcx^ gart toi cds qui Tont oîe
Et mot avuec qui la vos ai fcnie.
Ne troverez qui avant viîs en die,
S* il ne fausse rcsioîre*
Cest donc la dernière chanson, non par k date de k com*
position (je la croîs composée entre 1 150 et 1170), mais suivant
la date des événements racontés; c'est h fin du %^aste ensemble
que nous appelons Tépopée, La ^^uestion, qui divise encore les
savants, de savoir si le cycle des croisades doit être compris dans
Tépopée, est résolue dans les passages cités en sens négatif.
De la Mort Aimcri il nous reste deux versions : k plus
récente dans deux manuscrits (C et D) du milieu du xiii'= siècle^
la plus ancienne dans deux manuscrits {A et B) écrits vers
1300, Nous avons en outre deux fragments de manuscrits, se
rapprochant Tun et Tautre du texte de D : celui trouvé à Dus-
seldorf (xïv^ siècle) a été mis à profit par M, Couraye du Parc;
il embrasse^ à quelques lacunes près» les vers 511-791; l'autre,
écrit pendant la seconde moitié du xni* siècle et coté Nouv,
acquis, franc. 6298 à k Bibliothèque Nationale, contient les vers
2324-2757.
Avant d'aborder quelques particularités de la chanson qui
me semblent remarqiiableSj je relève ici un passage fort curieux,
mais un peu obscur où le poète fait une division de Tépopée
en trois gestes antérieurement au célèbre début de Girard de
û — 1878 Aguiere — 1999 U\ Les— 201755. La rime csî en u€^i jW-
gwiilenfj htutilîtt tmeilk^ s'eslurngftf — lioQ gradti] mercki — 2211 suppri-
tïici iî — 2249 tiser ImlUtr — 2267 Jamajts — 2J96 Aupmirt ^ ^\J^i suppri-
me* Ai — 2461 roche] mmtaignt — 2704 sôr] son — 2756 tmmt — 2744 cl
275 î *XX*] .X. cp. 2182 et 2756 — 277$ remi's — 2848 hmm — 2908 stra
m, T, sfFvif ^ 2954 Asex — 29 Î9 soUk'icp, 5142 — 29S0 ^^i^ — %22'j of]
*ï — ÎI38 n>tt\ f$fn — VÎ41 supprimez k premier et — '5288 mti] oent —
HJ4 '«] w^ — Ijai anfo/if, aujourd'liuî anchùis — 5 $59 Qui] Que ~ }lSoA\
hr it>rfit\ A la fôrési cp. J651 — 3471 Va} ht — 3481 nt %*ùis] rien as —
J511 retnà — 5658 atuê — 5857 enioise — 4074 aprmhitr — 41 ^4 Giir, —
En comp;tfint le songe d^\i^leri avec le récit de b chanson, je crois constauf ^
<|yç certaines parties de celle-ci oni été mutilées par un rtiiiMnieur>
LES CHANSONS DE GUILLAUME D ORANGE 373
Vienne. Voici ce passage constitué à nouveau d'après les manu-
scrits '.
XCVIII Oés, seignor! Que Diex vous beneïe,
Li glorieux, li fîlz sainte Marie !
3055 Nus hons ne puet chançon de geste dire,
Qjae il ne mente, la ou li vers define,
As mos drecier et a taillier la rime.
3057* [Mes ce qu'espont l'escriture Latine],
Ce est bien voirs ; gramaire le devise.
Vies hons la fist de Tanciëne vie :
3060 Hués ot non, si la mist en un livre
Et seela el moustier saint Denise,
La ou les gestes de France sont escriptes.
Or est bien drois que vérité vous die.
Qui eles furent et de quel baronie.
3065 Charles li rois a la barbe flourie
De Jursalem aporta les reliques
De cel saint fust ou Diex souffri martire
Et la corone, qu'il ot el chief, d'espines
Et les sainz clos et la sainte chemise,
3070 Qp*emprés sa char avoit sainte Marie
Qpant ele fu de son chier fil délivre.
Ce aporta en France la garnie.
Ce fu une des gestes.
XQX L'autre si fu du fort roi Charle Maigne,
3075 Cel qui conquist Baiuiere et Alemaigne,
Basde, Navarre et Poitau et Bretaigne
Et Normendie et Anjou et le Maine,
Oncle Rollant, qui fu mors en Espaigne
En la bataille fiere.
3056 B que il, A quil — 30S7» manque — 3059 Vies] AB Mes — 3065
Charles] A k', B k' F — 3066 A jursalem , B lerl'm.
3067 Diex] AB il — 3074 AB k'im'— 3078 AB Roll'.
I. Manuscrits : A, à Londres, Musée britannique, Old royal 20 D XI
f. 256^' ; B, à Paris, Bibliothèque nationale, fr. 24370, f. 23^; C, Musée britan-
nique, Oid royal 20 B XIX, f. 185*; D, Musée britannique, Harl. 1321
f. 211 (autrefois 204)*>. Les fragments I> et Di ne correspondent pas au pas-
sage en question. Je dois à M. Max Fœrster, professeur d'anglais à Wurtz-
bourg, la transcription des textes de Londres.
374 "• SUCHIER
C La tierce fu dant Aymeri le riche.
3081 La soie geste fu la plus seignourie.
Il ot .vii. filz, bons chevaliers nobiles :
Cresiiênté essaucierent et tindrent.
Otes li rois, H sires d'Yspolite,
3085 Icil fu oncles aus chevaliers nobiles;
Moines devint dedenz sa saine vie,
Si en fu s anie et sauvée et garie,
En paradis coronnee et florie.
Des or coniencc bonc chançons nobile,
3090 Si corn les dames de terre Femcnie
Sont en prison dedenz Esclabarie >.
Le vers que j'ai intercalé après le vers 3037 est nécessaire au
contexte. Autrement on ne comprendrait pas ce qui suit, et le
a du vers 3039 resterait sans relation. — Gramaire (v. 3058)
3083-85 manquent dans B — 3084 AB Li rois oies.
I . Les manuscrits C et D ont remplacé ce passage par un autre tout à fai t
insignifiant que j'imprime en note, pour compléter le dossier.
XCVIII-C 5055 Ocz, seigneur, que Dex vos bencïc,
3054 Li gloriëus, li filz sainte Marie!
a Geste chançôn est de grant seignorie,
b De bone estoire et de grant baronie,
c C'est del paraje de la jeste enforcie
d Ht del plus iier qui onques fust en vie:
e Coni Aymeris a la barbe florie
f Si fu ocis dcsoz Hsdabarie,
g 1^0 l'ocistront la pute jent haïe.
Il Ainz tex doniajes en France la garnie
i Ne fu por home qui onques perdist vie
j Puis le tens Charle a la barbe florie
k Et puis Rollant a la chiere hardie.
5081 La soe jeste (u tozjorz esbaudie ;
3085 Crestiënté fu par lui essaude.
« a Moût Tama Dex li fll% sainte Marie,
$087 Qjic s'ame en fu et sauvée et garie,
5087 En paradis coroncc et florie.
3089 Hui mes cOmencc la chançon seignorie,
a Bone. bien fcte, de grant chevalerie,
b Q^'onques par home ne fu meillor oïe.
505 5 D Oiez — 5054 b C bone. D grant — d D do plus trcsfler — e CD Ay\ D
forie — f C si, D com ; I) Aclabarie — go manque dans C — j C 1* tens k', D le Uns
ckr — k C lioir, l) Roi' — 5085 C lui, D aus — $089 a D bone et — b qu'onquet]
C que, D onques
LES CHANSONS DE GUIT-LAUME D ORANGE 37 J
signifie la langue ladne, comme chez Philippe de Thaon et
ailleurs.
Laissant de coté les vers banals de C i), nous allons consi-
dérer le texte primitif.
Hues, qui y est nommé, a été pris par plusieurs savants et
par l'éditeur même pour l auteur, réel ou prétendu, de la chan-
son de geste. On n'arrive pourtant pas à ce sens sans forcer la
signification des mots. Une autre explication que je vais sou-
mettre au lecteur me semble de toute évidence. Je crois que ce
Hues n'est autre que rhisiorien Hugues, moine à Fleury. On
lui doit plusieurs chroniques latines^ parmi lesquelles Touvrage
Moiknunum rtgum Fmmorum acius dédié à l'impératrice
Mathilde, par conséquent écrit après 1114. La première laisse
du passage cité est la traduction française d'une phrase qui se
trouve au commencement de Touvrage de Hugues de Fleury,
Voici ce commencement après le prologue que je supprime :
Karotus igitur Cal vu s, Liigdovici Pii imperatorîs filius, post beHum'Foma-
nidiim Francomm obtinuit regnum anno iticarracbtiis divinae 84a, et régna-
vit ûnnh ferme 58. Qui cum csseï vir gloriosus atque tnagnanimus valdc,
edihcavit in regno suo Conpcndium villâni, et eani Karnopolim suo de
nomine vocari precepii; quam etbm prcciosa dorniDÏ nostri lesus Christî
simbtt^ nobiliter insignivit. Obiulil eiiam seretiissimus rex iSLuao martiri
Dionisio imum Je dans quibus in cruce fuit adfixum corpus dominidum et
qiiandam Hgni samtiif amis port i une uhfn eu m quadam p^irtiçub spinme
iormûfno&ïfl redcmptons (Peniz, Mni.^fr^M. htii.^ SS. IX, 377).
Là chanson nomme ces mêmes reliques : un morceau du bois
de la croix, une partie de la couronne d'épines, les saints clous,
mais elle ajoute la chemise de la vierge Marie ^ Ces mêmes
reliques jouent un grand rôle dans Tépopée française, comme le
t. Suivant Pûckert, A marte littd Gfllmt (Lcipiîg, 1899), p. J2î note, le Iwîs
de la croîï n'aurait éié apporté à Saint-Denis qu'après 4124. Serait-il permis
de rajeunir VHistorûi mo^kma de Hugues de Fleury au point de la croire
postérieure i ce terme ? Mais le bois de la croix se trouvait à Saint-Denis au
XI* siècte, suivant un texte {Descripiio qmlîter etc. *ians Hausclien, Dit Ltgenâe
Kdrhdis Grosîfff, Leipzig, 1890^ p, 114), qui connaît aussi la chemise de b
sainte Vierge {inUnihim qmqut bedimimt Marie mûtrh iptius Doniim\ sfntper
virgiuii, quam in ipsû pariu hatuil^ p. 120, 22) et que Puckcrt, pour la partie
en question, croit postérieur â 1124.
Î76 H. SUCHIER
témoignent le Voyage de Cbarkma^ne à Jérusalem et Fieralfraï\
Notre poète avait-il lu Hugues de Fleury? Ce ne*it guère
admissible: il ne sait pas même la ditÏÏTence entre un livre et
une charte, puisqu'il croit (v. 306 1) que le livre est scellé* Un
clerc de Saint-Denis peut lui avoir communiqué le contenu an
passage latin. Ce clerc peut avoir connu à Saint- Denis le savant
Hugues en personne; car il est de toute probabilité que ce
dernier^ qui a rédigé une Hishma rt'gum Francorum monasttrii
suncii Dionysii^ a habité Saint -Denis pendant quelque temps.
Je constate que l'auteur de la Morl Aimeri a été à Saint-Denis,
et comme sa langue paraît appartenir à Tlle-de- France — sauf
quelques petits traits dus sans doute a un léger remaniement
dans les manuscrits J et Bj — il est probable qu'il habitait Saint-
Denis^. Partantj la Mort Aimeri est une chanson proprement
fnin<;aise, le premier texte français, que je sache, qui montre
l'imparfait en -oc correspondant au latin -abam (comp. les rîmes
de la laisse XLV) \
Dans le récit latin de Hugues de Fleury, il s'agit de Charles
le Chauve. Dans la Mort Aimeri^ au vers joés, il est question
de Cbark h roi a la barbe ftorie. Ce n'est pourtant pas Charle-
1, Voircneorc G* Paris dans la H&mima, IX, p. 52, note 5. sur des r^écîts de
Jean des Pre^, Une exfHÉduion de Charles le Chiiuve à Constant inopîe, d'où
Il iurait rapporté des reliques, est racontée dans le Lîber â( compost! hnt casiri
Amhiisiae (publié dans le Spkikgtum de d'Achcry).
2, L'auteur de FkrtéraSj à coup sûr, n*étijit pas dtf Siint-Deuis^ à considé-
ror sa langue. Le nôtre, soit dit en passiint, kii tîgiirçr un chevulier fran^ais^
Jofroi, appelé tantôt « de Saint- Denis », tantôt « de Paris ». Jofroî, prisonnier
des Sagittaires, est délivré par une demoiselle française, Blancheflor, qy*il
cmmcne en son pays et qu'il épouse* Il est traité avec une prédikctlon visible :
lorsque le chef des Sagittaires a mis i mon Aymeri et Garin son fils, c*est à
Jofroi de Saint^Denis qu'est réservé 1* honneur de les venger en tuant le terriMe
adversaire. A moins que le poète ne se cache sous ce nom tui-mème, ce sera
toufours un argument de plus eu faveur de Saint-Denis comme son Heu d'ori-
gine. Je note en passant levers 3272 où le roi de France jure fmr Sûint-Dmis,
ati horn jt mi dd chitf (c*est-â-dire, dont je suis le vassal hnmèdiai).
î. Voici encore quelques particularités de sa langue : vermtni au fém. 141.
cf, 5î70 — to/f'f^ (tcneat) 667 — dônes (dominas) 1097 — etttrt hr 1341 —
tlttsés j668. Î167. Cette dernière forme est un emprunt au provençal, comme
d'autres noms d'armes (psb^c etc.).
LES CHANSONS DE GUILLAUME D ORANGE 377
magne, que le poète introduit aussitôt comme chef de la
deuxième geste, et qu'il distingue visiblement du premier.
L'autre si iu du fort roi Giarle Maigne,
Cel qui conquist...
Je n'ose pas conclure de là, bien que ce soit toujours une
possibilité, que la barbe florie des chansons de geste ait tiré son
origine de la superbe barbe de Charles le Chauve. Charlcmagnc,
suivant les images, ne portait que la moustache franque \
Les trois gestes, telles qu'elles sont distinguées ici, embrassent
évidemment, la première l'histoire exacte représentée par les
chroniques rédigées en latin et en prose, la deuxième et la
troisième l'ensemble des chansons de geste, la deuxième étant
consacrée aux exploits de Charlemagne, la troisième à celle
d'Aimeri et de sa postérité. Ces deux gestes sont les mêmes qui
sont qualifiées à'anciênes au début de la chanson.
A la troisième geste appartient It roi Otes, li sires £ Yspolite
qui se fit moine dans la force de l'âge. Oncle des fils d'Aimeri,
par conséquent frère d'Hermanjart, il faut qu'il ait été fils de
Didier roi de Lombardie, qui lui aussi se fit moine « dedenz
sa saine vie ». D'ordinaire nous lisons qu'Hermanjart est sœur
de Boni£2ice roi de Pavie et que ce dernier mourut célibataire,
sans laisser d'héritier; c'est pourquoi, suivant les Narbonnais^
Garin d'Anseûne sera son successeur.
Un roi Oton revient en plusieurs endroits des chansons de
geste, qualifié quelquefois de sire d'Espolice (JSpoletium, en Ita-
lie). Rarement il est désigné comme fils du roi Didier. C'est le
cas dans Lohier et Mallarty chanson de geste perdue, mais dont
il nous reste un remaniement en prose en traduction alle-
mande. L'auteur de cette chanson semble avoir puisé à la même
source que notre poète, quand, au début de la Mort Ainuri,
celui-ci parle de l'antagonisme entre les deux princes impé-
I . Une seule fois dans la chanson Charlemagne est appelé a le barbe florie,
ao vers 2413 où Féditeur, on ne sait pourquoi, a remplacé Car Charlemagne,
Icçoo de b version primitive, par Charles li rois, leçon de la version rajeunie.
Vt^'ù^!it a la barbe florie peut fort bien avoir remplacé ici une autre épithéte
de Forigioa], comme a la chierc Ixirdie.
378 H* SUCHIER
riauK Lohier et I^uis*, et encore quand, dans Liyhter et Mal
lart, il est question d'Oion fils du rui Didier, lequel y joue
d'ailleurs un rôle peu honorable.
Dans Amm de Carîage, !e même vers (9347) se lit dans l\
des manuscrits ;
Droit a Pavîe manda le roi Oton,
et dans un autre
En Es polisse manda le roi Oton»
On voit que ce dernier scribe, du moins, identifiait Oton de"
Pavie avec Oton d*Espolice\
Ce personnage doit sans doute son existence à la tendance
qu*on avait à rattacher la généalogie des maisons nobles d'Italie
aux ducs de Spoîète et aux rois de Lombardie. Beaucoup de
familles italiennes faisaient remonter leur lignée à Didier, comme
hciiucoup de lamilies françaises la leur à Girard de Vienne K
Je renvoie au Stamna Deskitrianum d'Eccard, 1708, et à Tou^
vrage analogue dlmhof, Hisîorm Italiae et Htspaniai gaicùlogiù
Nuremberg, 1701. Voici la série généalogique que Ton dres
en Italie :
Didier» Everard, Guidi), kilo Ansdiaritis.
Ce dernier, père d'Adelbert marquis d*Ivrée % pourrait Hi
rOton des chansons de geste appelé quelquefois Aim ou Hatû
(voir L. Willem^, Vêtement historique dam le Corommatt Ijl
Gand, 1896, p. 7J ss, Baist dans la Zeitschrifi fur Rùmanische
Philologie, XVUr, 272).
Notre poète, ayant appris quelque part qaOton d'EspoIice
était fils du roi Didier, et sachant d'ailleurs que la femme
I» Voir Zenkcr, dans Ikiirâ^^ lur Rtfumnîicben Phitota^k, Ffstgûàe ftir
Grohtr (Halle^ 1^99)» p- iSS-igu^ei le même» Dus Bpoi von i^afdmrà und
Gormund (Halle, iiïi?6), p, 1^6,
2, \Sï\ duc OUi di Pavie joue un rôle dans Gui de Wirwlck. Cf. au
Gûydm, p. 144, cl Hâte de Favie, dans Fm^on de Candie, p.p. Tawhé, p. ^
Otm dé Pai'î', p. ng,
\. Ijaî^nnc, dans le Diciimmire historiette de ta francf^ an. Vittinf, étvu-
mère ju^u a vingt et une fimilles nobles, toutes issues de b maison de Vienne.
Voirausït Golîut, MM^irei biitonqim dt la r/pubtiquf séquamis^^ 1. VI, chiip, 4e
4, Siiivam Imhof, p. 3^
LES CHANSONS DE GUILLAUME D* OR ANGE 379
d'Aimcri en était la tille, a cumbiut:, ingénieusement, il fnut
Tavouer^ ces deux données pour ajouter ainsi un nouveau tiirc
de gloire à ceux qui distinguaient déjà la race des Narboniiais,
Car notre poète, s il n'était pas un sa%Mnt, était du moins un
curieux qui aimait a intercaler dans son récit ce qu'il avait appris
ailleurs. Ainsi quand Aimeri, pour débarrasser les maisons et les
rues de Narbonne des cadavres, les fait brûler dans les champs
près de Narbonne — dtfors Nerlmtf les ardrnt par ks chans — »
le poète ajoute cette remarque d'archéologue : c'esiûit cûsîmne de
tanciénvr iens (v. 2732),
A côté de Hugues de Fleury il * avait à sa disposition un
ouvrage latin de géographie ou d'ethnographie, fabuleux cela
va sans dire, semblable aux dérivés du Psatdocallistljêne, à la
Letiff du Priîre Jfan^ ou à Vhmgo mundi d'Honorius d*Autun
ou d'Augsbourg ^ C'est un ouvrage à retrouver. Là il a pris le
nom de pays Orfofrm 2470, 2488^ 291 S provenant d^Artùhn\
peuple antique d'Espagne, Les deux 0 de la fornte Ortohric au
lieu des deux a de la forme latine du mot semblent prouver
que le poète ignorait le latin, et qu'il dut ses renseignements
ï la communication orale d'un autre.
Les quatorze mille puccllcs du pays de Femenie forment un
peuple gouverné par une femme* Elles rappellent les Annuîones
aussi en ce qu'elles exécutent des danses. Autrement elles ne
leur ressemblent guère; car elles ne sont pas belliqueuses. Cette
nation de pucelles n'a d'autre raison d'être dans la chanson que
de fournir des robes de femmes aux guerriers d'Aimerij quand il
veut employer ce stratagème pour reprendre Narbonne K Leur
apparition pourrait fort bien provenir d'un récit populaire; elle
est dans le genre des traits qui s'ajoutent au cours de la tradi-
tion orale.
Les Sagittaires, par contre, n'y figurent que pour donner au
poète Toccasion d'étaler son érudition. Ils n'ont rien a faire
I, Ccst-i-dire lui ùu %ii jourcr. Q|ie k lecteur veuille bien suppléer ces
trois mots toujours là où il y a lieu.
1. Honarius était probablement Allemand, voir lit-dessus Dicierich dàûS
Mm, Gtrnt. bisî.,LibeUi dt lUt, t, lli, p, p,
\, V* I5î9 2540 i^j tmUi €^r(nî pucetts tt mtschimi s' m trmmt droi df
àmrsn baillm.
jSO H. SUCHIER
avec Narbonne. Ib s'emparent deîs puceHes laissées en Ortobrie
sans protection suffisante, et îb les mènent dans leur ville
Esciabarie dans les cachots» Cest pour Aîmeri un motif d'en*
treprendre contre eux une expédition belliqueuse, pendant
laquelle il succombe avec deux de ses fils sous leurs traits enve*
nimés. Remarquons que dans cette partie de la chanson la
géographie est toute fantaisiste ; Aimeri avec les quatorze
mille pucelles va â Esciabarie et de là en Ortobrie^ X ce qu'il
semble, rien que pour changer de vêtements.
Les Sagittaires sont décrits avec tous les détails désirables
(2416-2468). Cette description se base sur les deux sîgnitîca*
tiens qu'a eues le mot latin mgiitattus : comme traduction de
xévTaupq; et comme traduction de Scytha. L*une et Tautre se
trouvent dès Tantiquité; cette dernière est déjà dans Pline.
Notre poète, ou bien sa source, a combiné et confondu les deux
significations. I! dit des Sagittaires ; Dnmiî sonî hvnes et chtml
par dtriere (2 5b2). On trouve dans le Dictionnaire de Godefroy
des exemples de Temploi en ancien français de yajttaire pour
centaure. Les autres traits se rapportent aux Scythes. Les
Sagittaires cueillent les « herbes et épices » qui croissent aux
environs d*Esclabane %et ils vont en Egypte les échanger contre
du fer et de Tacier dont i!s font leurs armes. C'est donc un
peuple qui, avant ce commerce avec l'Egypte, avait vécu dans
l*âge de la pierre. Ils sont surtout d'excellents archers; ils
emploient des flèches envenimées. Ce peuple ne cultive pas la
terre et ne mange pas de pain. Les Sagittaires font la chasse
aux ours et aux cerfs, dont Us mangent la chair crue et dont
ils boivent le sang.
i> D'après AUsmm (570$ ss.), U^s Sâgîctâlreâ ne connaissent pas le !fO-
ment : ITespkéi vivent tt (Todour de pimmenL Ici encore Hugues de Heujy
pourrait avoir fourni à notre pûète des renscignemeois ; il parïc des Scytbci
en même temps que des Amaîones, et il dit de ceux-là ; « Scytlia; pcr incul-
tas solitudlnes errarc solili non âgrum exercent, a Cf, Hugmis fbrimimif
Cinvnmfn^ ex musûeo Bernh. Rotienàorffii^ Munster 1638, p. 19, Comme le
icKie imprimé de cette chronique reproduit une version très abrogée, ii Éaq-
dniit pouvoir consulter 1^ tnanuscrtts complets, surtout le tns. parisien bt,
4890, où k deunîème livre est précédé de la rubrique : De iitu Scitk et irtrr-
m dusâem r^i&nisfentibmit êarum m0riliiu{Mon. Germ, hisi.^SS^t IX, p. 559,
note).
LES CHANSONS DE GUILLAUME d'oRANGE 381
D'autres tnits se retrouvent dans le chapitre consacré aux
Sagittaires dans la rédaction provençale de la Lettre du prêtre
Jean (imprimé dans mes Denhnàîer dit Promft\ùîisd}en Littratur^
tome I, Halle 1883, p. J48). Suivant ce texte les Sagittaires, du
nombril aux pieds» sont faits comme des chevaux. Près d'eux
demeurent des hommes sauvages dont la race ne plaît pas à
Dieu et qui craignent surtout les grands serpents de ce pays-là-
Ces serpents jouent un grand rôle dans la Mort Amert^ où ils
sont décrits en détail (25ÎOSS*), et après la défaite des Sagit-
taires Tannée chrétienne s'efforce de les extirper.
Je ne connais pas la source immédiate de ces parties de la
chanson; mais je crois que quelques données pourraient prove-
nir en dernier lieu de Pomponiiis Mêla, Ce géographe nomme
les Artabri que Ton ne connaissait guère au moyen /ige. I!
mentionne les Amazones et les Moschi leurs voisins habitant
entre la mer Noire et la Caspienne, Dans une énumération de
montagnes il fait suivre les montes Anmionici immédiatement des
(mopitfs) Moschi^ et je me demande si le nom de Miicikrne^ capi*
taie de Femenie dans la Mort Aimcri {w 1674), ne pourrait être
un composé de Moschi et de ttrrc changée en terne.
Plusieurs traits qui sont rapponés des Sagittaires rappellent
les mœurs des Magyars, telles que nous les peignent les chro-
niqueurs du x^ siècle : ceux-ci étaient d'excellents cavaliers et
de fort habiles archers; ils mangeaient de la chair crue et ils
buvaient du sang; ils ne cultivaient pas la terre, mais se nour-
rissaient des produits de la chasse. Ici un passage me semble
assea remarquable. Le poète avertit le lecteur de se donner garde
de confondre les Sagittaires avec les païens ou les Sarrasins; ils
sont plutôt Turcs :
Ce ne sont pâs païen dc Sarrazii]^
Mes Turs fdons du regnè 4'Orqoanîe *
Et SogUaire, a qui ja Dex n'ait, (v. ] js5 ss.)
Cette distinction entre les Sarrasins d'une part et les Turcs et
les Sagittaires de l'autre rappelle un passage du chroniqueur
Ekkehard IV, qui proteste contre la confusion fréquente chesc
ses contemporains des Hongrois avec les^ Sarrasins » écrivant :
i . La rime est fausse ; on pourrai l lire du ngm Orquanm.
jBl H. SUCHIER
•f qui Ungros Agarenos putant, longa via errant » (Pertz» Mmt*
Germ. hisî.^ Il, p. 119, Î4). Dans la littérature du temps les
Hongrois sont souvent appelés Turcs (voir Diimmler, Geschkhtc
des Ostfrânkischen Rfirhts, 2^ édition, IIF, p. 450). Suivant notre
chanson, le5 Sagittaires guerroient contre le peuple congénère
des Turcs d*Orquenlc, qui habitent une Ile fortifiée; cette guerre
est terminée par une trêve (2457-2468).
Ces coïncidences m*ont suggéré une idée au sujet d*Esclabarie,
ville des Sagittaires. Cest une ville détruite et abandonnée,
une cité frète et gasît. Elle est située en Espagne (vv, J023, 3417
s.). Charleniagne Tavait incendiée et démolie dans la même
campagne que celle où il prit Narbonne, Tout cela est de la
fantaisie pure. Les Sagittaires se sont emparés de cette ville en
ruines et ont redressé quinze tours de ses fortifications (v. 2417),
Or on sait que Sabaria en Pannonie était une ville importante
détruite au v* siècle et dont les ruines imposantes n'ont pas
encore tout à fait disparu. Si 1 on pouvait supposer le nom
Sabaria défiguré en *Stabana et rapproché par là du nom des
Slaves (en latin Slahi ou SflaH)^ ce serait là une explication du
nom Esclabarie, Malheureusement je n'ai pas réussi à trouver un
*Slaharia pour Sabaria. Le pays des Slaves est d'ailleurs appelé
Eîclai^nir (3098),
Quoi qu'il en soitj je crois avoir démontré que pour de
grandes parties de cette chanson de geste, nous nous trouvons
en pays d'érudition plutôt que de tradition épique*
\ L — Ragnar Lodbrôk
On n*a pas encore remarqué que le célèbre viking Ragnar
Lodbrôk est mentionné dans la Mort Aimeri au vers 1059*
Puis lace l*elnic RagueneL de Mondetp
Un roî pâkn, tillague fu de mer :
Sel vTOi galîçs scult avuec loi mcner^
Qijam il aloit sor crestïéns rober;
Fait î avoit un charbocle fermer :
De la clarté soloii veoir par mer.
L'éditeur renvoie les deux derniers vers aux variantes; je
crois que c'est à tort, car le manuscrit qui les contient n*a guén?
coutume de faire des additions de ce genre.
LES CHANSONS DE GUILLAUME d'oRANGE 583
Il me semble hors de doute que Ragucnel n'est autre que le
terrible Ragnar. Ln forme Ragurml rappelle la forme irlandaise
du même nom, laquelle est Raghnall (Steetistrup, Normanticrne
II, p. î82).
Ragnar s*est fait connaître et redouter en France surtout par
son invasion de 84 î^ remontant la Seine jusqu'à Paris, qui alors,
k veille de Pâques, vit les vikings pour la première fois (Steens-
trup, II, p. 154). Suivant Prudentius Galindo, continuateur
des Annaks Btriiniant\ Ragnar avait avec lui cent vingt bateaux,
nombre qui ne s*éloigne pas trop du nombre sei vint de la chan-
son. Steenstrup (I, 215) mentionne Tcxpédition d'un viking,
qui n*est pas nommé, expédition dirit^ce contre l'Irlande en
849; cette dernière flotte consistait en cent quarante bateaux*
Le nombre donné par la chanson est donc dans le domaine du
vraisemblable*
Cela me ramène à la question de savoir si pour ce passage
le poète n'a pas eu recours a une source latine. Si !e nombre
des bateaux semble Taffirmer, f avoue d'autre part que la forme
Ragi4€ttel a plutôt Tair populaire, et le passage entier ne peut en
aucune taiçon provenir d*une chronique latine. Il est possible
qu'à Paris des traditions aient gardé le souvenir de ce pirate, et
qu ason nom se soit rattachée la légende du carboncle qui, fixé
au casque, lui permet par sa clarté de faire route sur la mer pen-
dant la nuit *,
Wace et Benoit, qui, à la suite de Guillaume de Jumitges,
l'appellent, Tun Loîroc, Tautre iMlrocus, ignorent le nom Ragui-
mljOn bien, s*ils Tont connu, ils n'ont pu identifier le porteur
de celui-ci avec le porteur de celui-là.
H. SUCHIER*
{A suivre,)
I* Un • carboncle « qui éclaire est aussi mentionfjé aiî vers S^, ce qut
plaide en faveur de ramhentiché des vers !o63 et 1064 rejet*5s par rédiieur*
Consulier sur de teUes pierres Uhl dans îa Feihchrijl inm sîeb^igsien GthtrU'
tagt Oskar Sdidde dargebrachi (KànlgihçTg^ 1S9É), p* ^oi-joy ; Rajn»! Origim
âilV epopta francae, p. 446; Cotrsuns, Roman dt T^nki, II, p. 536; Paul
Meyer, Girari de Roumlhrî^ p. 25, note; Oskar Jaenicke ââu% Alideuisdïc Sht-
duH (Berlin, 1871)^ p. 45 ; ïe Chtvaîkrdu Paprgait^ p* p Heuckcnkamp (Halk,
lS96), p. 47» 6.
NOTES SUR LE JEU DE LA FEUILLÉE
D'ADAM LE BOSSU
I
Jadis Paulin Paris \ Magnîn ' et d'autres, choqués des rôles
attribués à maître Adani^ à son père, à sa femme, dam le Jeu
de la Femlléc, ont conçu des doutes, mais sans s'y arrêter, sur^
la paternité de cette pièce. Pour les mêmes raisons, M. Guesnon
a nié récemment, en termes fonnels, que le drame fût du
célèbre poète : « Dans ce qu'on a appelé Li Jus Adan, c'est
Adam que Ton joue; il n'est pas Tauteur, mais le sujet des
scènes où on le parodie, où lui et les siens sont bafoués. S'il y
a jamais collaboré, c*est malgré lui^ et le comble de Tinvraisem-
blance, à nos yeux, serait de supposer que lui-même et soo
père en aient été les auteurs ^ »,
Une affirmation aussi tranchante, jetée en travers de roplnlon
générale, méritait quelque justification plus amplement déve-
loppée.
On a généralement exagéré fa portée de quelques plaisanteries
d'Adam sur les charmes de sa jeune épouse. Il ne la voit plus,
dit-îL maintenant que ses désirs sont assoupis^ parce qu*elle a
fait pour lui « trop grant marchié de ses denrées >^ des mêmes
yeux dont il la regardait quand « pris fuau premier bouillon »»
Son teint ne lui semble plus aussi frais, sa taille aussi fine, sa
chevelure aussi dorée. Certes, Taiticisme de ces facéties n'est
pas du plus pur, mais elles ne contiennent rien, en définitive.
1. Jourmt! da Savants^ 1846, p, îjO.
j. Moyen Ai-e, 190a, p, l72*J7î*
ÎÎOTES SUR LE JEU DE LA FEUiLLÉE jSj
de blessant pour h jeune femme, qui savait, comme aussi les
spectateurs, ce qu'il en fallait retenir. Le poète a soin, d'ailleurs,
pour éviter qu'on s'y trompe, d'ajouter aussitôt, par la bouche
de son âmî Riquier, qu'il serait surprenant qu'on pût oublier si
vite if faitures si délita vies ». Ces plaisanteries, sur lesquelles
personne assurément ne pouvait se méprendre, ne sont qu'un
prétexte à Adam, je dirais volontiers une précaution oratoire,
pour présenter de Marie un portrait dans lequel la plus belle
femme du monde se reconnaîtrait avec plaisir. Aussi, quand
Riquier dit à Adam : t< Maître, si vous me la laissiez, elle
serait fort à mon goût n^ celui-ci lui répond : « Je vous en
crois sans peine ^, Et finalement le poète annonce qu'il n'exécu-
tera pas son projet d'aller à Paris, parce qu'il n'a pas le courage
de s arracher aux bras de sa femme, « qui est mole et tendre »*
De maître Henri, le jeu plaisante, en termes inoffensifs et visi-
blement sympathiques, la répugnance à délier les cordons de sa
bourse, l'amour de la bonne chère, la crainte de se compro-
mettre auprès des puissants.
Au sujet d'Adam, il nous dit qu*il interrompît ses études de
"t clergie w pour épouser une jeune fille dont la beauté Tavait
troublé; qu'il avait promis à ceux qui le dissuadaient de bri-
ser ainsi son avenir, de s'éioîgner de sa femme, après son
mariage, pendant deux ou trois ans, pour aller à Paris
« aprendre b ; qbe le moment arrivé de tenir sa promesse, il
est très hésitant; enfin qu*il est très amoureux, gai et bon fai-
seur de chansons, Est*ce ainsi qu'on « bafoue n un homme ?
Quel que soit du reste le jugement qu'on porte sur les par-
ties du jeu dont le poète, son père et sa femme font les frais,
l'argument de M* Guesnon ne saurait être pris en considération,
d'abord parce que nous ne connaissons pas suffisamment Adam
pour affirmer que tels écarts de langage et de goût ne peuvent
lui être imputés; en second lieu, parce que, si les propos tenus
sur le compte des siens surprennent sous sa plume, on doit
trouver non moins extraordinaire qu'un autre ait osé les
écrire.
Avec des arguments de cette nature, qui reposent uniquement
sur une appréciation personnelle des convenances, on peut faire
de la critique littéraire, mais non pas de l'histoire, et c'est une
question d'histoire qu'il s'agit ici d'élucider.
I, MXU
^5
î86 , H. UKGLOIS
Voici, par concrej une preuve, assise sur une base plus solide,
en faveur de rattribution à maître Adam le Bossu du Jm de la
FeuilUc, Dans les trois manuscrits qui nous l'ont conservé inté-
gralement ou partiellement, le poème est intitulé Li jus Aâan
(Bib, oat., fr. 25)66)» Le jéu Adan U Boçn iTArra^ (Bib. nat,,
fr. 837), Le jeu Aâan le Boçu (Vatican, Reg. 1490). Pour
M* Guesnon, le nom d'Adam désigne, dans ce titre, non pas
l'auteur, mais le sujet du drame. Il n'a pas remarqué que la
grammaire s*oppose à cette traduction. Le nom de personne
employé dans cette construction, avec fonction de génitif pos-
sessif, est nécessairement celui de l'auteur; s'il désignait l'objet
du poème, il serait précédé de la préposition ifc, qui lui donne-
rait la valeur d*iin ablatif: Le jeu d'Adam. Cest ainsi qu'on a,
d*yne part, le Doctrinal Sauva^Cj la Somme Laurent ^ la Bihle
Gukn^ le Livre Alhuma^ar^ VÈ^ltre malUr Jean d^ Meun^ la
Régie yaint Benoit, les Étahlissem^nts le roi de France^ le Bestiaire
maître Richard de Fonrnival, etc, et, d*autre pan, le Jeu de saint
Nicolas y ï* Histoire d\4iol, le Livre de Baîlaam ei Josaplmt^ le
Roman de Renard, etc. Les deux cas peuvent se rencontrer natu-
rellement dans un même litre, pour indiquer à la fois l'auteur
et le sujet de la composition : Li Lai Ernoul le Vielle de Gasii-
noiSf et cis est de Noslre DaffieK Que l'on compare les titres des
différentes œuvres d'Adam le Bossu dans le manuscrit Bib.
nat., fr. 25566» où elles sont réunies : Les Catuf^ons tnaistl^^
Adan de le Haie, kt Panures Adan^ li Rondcl Adan^ li MomÊ^
Adan, Qi Jus du Pèlerin)^ li Gieus de Robin ei Marion^ U Jus
Adan, du roi de 5r^î7r, li Ver d' Anmtrs ^ H Cmgiis Adan^ li Fit
de k Mort.
Donc le titre Jeu Adam signifie Jeu dont Adam est l'auteur;
c'est celui de toutes les copies; contre cet accord des manu*
scrits Tûpinion de M. Guesnon ne saurait prévaloir.
Que le Jeu de la FtuiUk ^ ait été composé pour une séance
solennelle du Puy, on ne doîi aucunement le contester, et,j
I. G. Raynaud» Btbîkgraftne dn ChamoHnifrs françait, l, 159.
KOTES SUR LE JEU DE LA FEUILLÈE ^87
vrai dire, chacun tombe d'accord là-dessus ' ». Malheureusement
la plupart des critiques qui se sont rencontrés sur ce point
n'ont accepté cette opinion que parce que d'autres 1 avaient
émise avant eux; ceux qui ont essayé de la justifier nVnt pas
produit de raisons sérieuses, L'afiîrmation de M. Guy est
empruntée à M. Bahlseo, qui la doit à P. Paris, Je voudrais
une autre preuve que celle du consentement unanime. Mais,
dira M, Guy, « les plaisanteries que !e fils de maître Henri
adresse au nouveau prince de l'académie littéraire sont^ i cet
égard, concluantes^ ». Peut-être, en effet, concluantes, mais
dans un sens opposé.
Le nouveau prince du pui^ est Robert Soumeillon, dont le
nom revient à deux reprises dans la pièce*. Une première fois
Adam se contente de railler cr sen pui ^ », et ceux qui se pro-
posent d'y porter des chansons ; un concours de jeu de dés
serait mieux leur affaire. Mais plus tard il revient à la charge,
et cette fois pour accabler Robert Soumeillon , non pas de
simples brocards, mais de sarcasmes blessants, de traits inju-
rieux. Il ne lui suffit pas de tourner en ridicule ses prétentions
de bourgeois singeant les paladins et les chevaliers de la Table
ronde, son habit vert à raies rouges, sa vanité^ sa dissimulation;
de rappeler une aventure récente dont le souvenir devait lui
être cuisant; il Taccuse, en termes exprès, d'être Thomme le
plus hypocrite, le plus fourbe qui vive entre la Lys et la
Somme.
De tous ceux qu^Adam a touchés du fouet de sa satire, per-
i, H. Guy, Essai iwr k vie €t ks mtvns HUérairts du ttùmire Adan dek
Htûi (Paris, 1898, in-ôo), p. 537. — Je fcrat cependant remarquer que dans
U Littérature française du nwyen dge, M. G* Paris [le fait, -ï propos du Jeu
de U ftuUye^ aucune allusion au dit pui.
1. Ibid.
3. M. Guy croit que le nouveau prince du pui fut élu le jour même de la
représenution (îoc, cit., p. xl). S*'û mi était ainsi, comrnent son C'Ieclîon
auraii*clle pu ^tre mentionnée dans la pièce ? Comment Wauiier as Paus ai
Thomas de Clan auraieni-ils pu se vanter ■ rautr*icr » de présenter des chan-
sons à son pui. Si quelque pan un prince dcvah être élu à k Chandeleur^
c^ëtait bien, semble-t-îl, dans la confrérie de k sainte Chandelle.
4. Vers 404-41 s et 71 7-7 î9.
î . Remarquer l'expression d^ïdaigneuse : « scn pui ».
'i|8 E. LAHGiOIS
sonne n*a été cinglé comme Robert Soumeîllon ; c'est avec une
évidente antmosité qu'il parle de lui; ce n'était pas le prince de
son choix et il s est probablement bien gardé de rien faire pour
« son pui » : c'était bon pour des Wautîer as Paus et des
Thomas de Clari,
Quoi qii*il en soit des sentiments du poète à regard du nou-
veau prince, qu'il ait boudé ou non son pui, peut-on considérer
comme un point d'histoire incontestable que Robert Sou mei lion
ait organisé à ses frais * une ftte, qu'il aurait présidée, pour s*y
faire bafouer et diffamer? A quiconque lira le texte même du
jeu sans se préoccuper des commentaires d'un tel ou d*un tel,
pareille hypothèse paraîtra plutôt déraisonnable.
Ajoutons que, si Ton admet, et c'est aujourd'hui Favis de
tous, que la pièce a été spécialement écrite pour être représen*
téc aux fêtes des kalendes de mai% il ii*est pas nécessaire de
chercher dans la tenue d'un pui une autre occasion de la même
représentation.
m
On a conclu d'un vers du Jeu de h FmilUt que la pièce fut
écrite cni vue d'une représentation où les femmes devaient
assister. Ce vers indiquerait plutôt le contraire* En tous cas il
est susceptible de différentes interprétations, desquelles j'exclus
précisément celle qui a été communément adoptée et qui me
I . « Le prîncç que les membres du Puy venaîeat d*C*lire a cert.^iticment
contribué de ses deniers à îa reprC^scntaiion de b Fatiltà » (Guy, toc. «V.,
p, 140, n, î). Cette note a pour objet d*auènuer, tout en rapprouvant,
raffirmation de M* Bahlsen que Riquicr * a couven les frais de rcntrcprise ■,
Si la représentation avait eu ticu â Toccasion du pui, Riquîer, simple monbiv
de U confrérie^ n*avait pas à s'occuper des dépenses occasionnées pour cette
2* Avec cette due du ù' mai s'accorde parfaitement une autre date men-
tionnée dans U pièce et que je n*ai vue relevée nulle part : dame Douce, dcms
la grossesse commence à se manifester, cl à qui on demande « Quant fust
avenus chisaUires a, répond : « Il n'a encore waires^ Cbe tu un peu devant
quaresme * (v. 283-285),
NOTES SUR LE JEU DK LA FEUIUIe jS?
semble inadmissible. Je tais allusion au passage où le père du
ce dervé » dit à son fils : «Taisiés pour les dames' ».
Si ces quatre mots indiquent qu'on doit s* imposer, en pré-
sence des femmes, une certaine retenue de langage, si peu
gênante soit-ellcj ils prouvent nécessairement que les femmes
n'assistaient pas à la représentation. Celles qui auraient pu
entendre le vers 44^ le vers 26e ; celles qui auraient pu voir le
geste dont le vers 419 était accompagné pouvaient tout entendre
et tout voir ; elles n'avaient pas à craindre que la grossièreté,
Tobscénité de l'expression, du geste et de l'idée fussent dépas-
sées. Rapproché de ces vers, l'avertissement du père à son fils,
tel qu'on Ta compris de nos jours, devient un non-sens.
Les personnages qui évoluent sur la scène d'un théâtre
forment un groupe absolument indépendant de ceux qui
peuplent les gradins delà salle; ils sont censés ignorer que des
spectateurs les écoutent et les regardent. Si, dans un jeu de la
même époque que celui de la Feuillée, un aveugle dit à son
guide :
Nus ne m'oc fors que tti ^eulcneot,
il n'en résulte pas que la pièce était jouée devant des ban-
quettes vides; quand un acteur dit à son partenaire 1 n sois
convenable, on nous entend », cet « on >j désigne des person-
nages en scène et non des spectateurs. Ce n'est donc pas dans
les rangs de ceux-ci qu'il faut chercher les dames pour qui le
père du fou impose silence a son fils. Il y avait, à ce moment,
sur la scène, tout au moins une femme, dame Douces il y en
avait probablement d'autres parmi a le commun », si cette
expression désigne une foule de personnages muets. On pourrait,
il est vrai, supposer qu'elle s'applique seulement à l'ensemble
des acteurs, car c*est à une invitation qui semble s*adresscr à
ceux-ci : <« faisons tous le veau w, que répond *< li kemuns », en
mugissant : « moie » \ Mais, outre que la première interpré-
t. V. 425. — « Cet avenissement du prud^homme nous montre que le
beau sexe assistai! à la représentation, ex que r.iuteiir» psir déférence» sun^eil-
bit un peu son langage m (Guy, Im-. cit., p. xu).
a. V, 576-378. — M. Guy, n^ayant pas compris ce passage, en conclut *que
'le tCîttc est, a n'en point douter, corrompu *, et « que les expressions Li
390 E. LANGLOIS
tation est plus naturelle, d'autres deuils de la pièce semblent
foire allusion à des figurants. Le moine trouve parmi les
oflVândes qu'il a reçues un « crespet w^
Que ne saî ^uels caitis offrî (v, 894),
Lorsque tous les autres acteurs ont quitté k scène, il voit
encore autour de lui « baisseletes, en fans et garchonnaîlle »
(v. 1093-1094).
Mais, à l'instant où le père impose silence à son fib» celui*ci
précisément ne disait rien de grossier. En vain prétend ra-t-on
qu'il s*apprêtait « à proférer des énormirés^ »; rien n'autorise
cette supposition. Il avait simplement poussé le crî « bau »•
Cest Ih. une donnée essentielle dont la solution du problème ^
doit tenir compte : ce n*est pas pour empêcher te fou d*êire
indécent que son père parle des dames, c*est simplement pour
le calmer, pour rintimider. J'ai montré d'autre part que ces
dames ne peuvent être des spectatrices. Ces deux considéra-'
lions m*ont amené à les identifier avec les « bêles dames parées ï>
du vers 587, c'est-à-dire avec les fées, L*heure approche où elles
devraient arriver:
Car c'est droite coustume esta vie
QM*elcs vicneni en ces te nuh (v. 566*567);
et bientôt Riquier va imposer silence au fou ' et au moine, en
disant à celui-ci que, sans lui.
Dame Morgue et se compalgnie
Fusi ore assise ^ cesie m vie (v, 564*565),
Les fées inspiraient de la terreur aux simples et aux gens du
peuple ^ et lorsque Rainnelet apprend qu'on les attend, il
tremble de tous ses membres :
Aimi î sire, il i a péril 1
Je vauroie ore estre en maison (v. 584*585).
Ketmns ... nrnie.,. que les copiste ont arrtngées à leur guise, ne sont que le
débris d'une phrase mutilée » (/oc, cit,^ p. 14a). Les vers sont complets, les
rimes exactes, et rien ne révèle une lacune,
i. Guy, îoc. ai., p. xlu
î* Prcdsémem au moment où il pousse de nouveau le même cti « bau m/
5, Cf. Auciiisili ei Nki>hik, p. lî, 1. jo Je Véd. Suchier*
NOTES SUR LE JEU DE LA FEUILLÈE 39 1
Si cette conclusion est acceptée, le seul argument ayant une
apparence sérieuse sur lequel on se soit fondé pour prétendre
que les femmes assistaient à la représentation du Jeu de la Feiiillà
ne pourra plus être invoqué. Il sera permis de supposer que le
public devait être en principe exclusivement masculin ; et le
reproche de grossièreté qu'on fait à Adam le Bossu s'en trouvera
considérablement atténué.
iV
En discutant la question de savoir si le jeu d'Adam fut repré-
senté à l'occasion d'une assemblée solennelle de la confrérie des
jongleurs et bourgeois d'Arras, et si l'on a le droit d'affirmer
que les femmes faisaient partie du public, je n'ai eu en vue
que la première représentation, celle qui fut organisée par
Tauteur, et pour laquelle le drame fut spécialement composé.
Mais j'entends bien que la pièce a pu être jouée plus d'une fois,
même en l'absence du poète, et mes observations ne visent pas
ce? reprises. Je me crois même en mesure de signaler dans le
poème une interpolation commise à l'occasion d'une de ces
représentations ultérieures.
La fée Morgue, promettant à dame Douce de la venger d'un
homme qui Ta offensée, lui dit :
Je Tarai bien tost a point mis
En sen lit, ensi que je fis
L'autre an Jakemon Pilepois,
Et l'autre nuit Gillon Lavier(v. 863-866).
Ce dernier vers, qui fait allusion à un événement antérieur
seulement de vingt-quatre heures à la représentation du drame,
ne peut s'expliquer que comme une addition faite après coup; à
moins de prétendre qu'en un jour la fin de la pièce, 230 vers au
minimum, a pu être écrite, et la pièce entière étudiée, montée
et jouée.
L'interpolation étant constatée \ la question se pose de savoir
I. En admettant même que l'expression w l'autre nuit » ne désignerait pas
nécessairement la nuit immédiatement précédente, l'interpolation n'en
paraîtra pas moins évidente, je crois, lorsqu'on aura lu les lignes qui suivent.
Î92 E- LANGLOIS
si elle est d'Adam lui-mc^me» Elle se trouve précisément dans
un passage rimé en sixains âab C€h\ Voici le sixiiin dont fait
partie le vers 866 :
E l'autre nuit Gtlïon Lavîer.
MÂGLOftË
AlODs, nous vous irons aîdier.
Prend es avoec Agnès vo fille,
Et unç qui mmnt en chil^ï.
Qui ja n'en avéra pité.
MORGUE
Faroc Wâutfer Mulet»?
DAM£ DOUCE
CcstcHIlcCv, 866-871 J,
Ce sixain a éloigné du vers 865,
L'autre an Jakemon Pilepois,
avec lequel elle rimai t^ la phrase chantée par les fées :
Par chi va la mignoiise, ♦
Par du ou je vois (v. 875-874).
Il fallait donc y ajouter un septième vers eo -ois :
Aies devant et je m'en vois(v, 872)*
On remarquera dans ces vers les rimes fille : chille, ims : vois*
Fois a dans les deux cas identiquement ie même sens; rimant
avec lui-même, il constitue contre les lois de la versîficatioîi
une faute qu'un bon Timeur, tel qu'Adam, ne se permettait
pas* Le fémmin clnlh\ formé surffeV, était-il employé par Adam?
On n'en trouve aucun autre exemple dans ses rimes. Avait-il
une / mouillée? Cest peu probable. Jacquemart Gielèe accouple
ci lie avec fille (Retmrl le Nouvel ^ v. s^39'4*^) ^^ ^^'^^ concilie
1, Et non pas en tercets M\ ace \die\ djf^ comme le dît M. Guy i^ùc. mi,,
p. 361, n. i). Ce rythme est emprunté au Jm di saint Nkt>kii de Je
Bodcl.
3. Un Wauiier Mulet, sans doute celui donc \ï est ici question^ est mon
en Î274 (Lf Moyen- Age ^ 1900^ p. 55^ n. 2), mais l'expression * Urne Wai^-j
ticr Mulet 9 n'implique pas que le mari soii encore en vie.
NOTES SUR LE JEU DE LA FEUILLÈE 393
(v. S7'S8), mais aussi concilie avec ghille (v. 6637-38, 7259-
60) ; pour lui, fille n'avait pas 17 mouillée, ce qui n'était pas le
cas pour le poète d'Arras.
^addition n'est donc pas de l'auteur du jeu ; elle a été faite
à son insu, lors d'une reprise de sa pièce.
Gillon Lavier devait être un personnage connu, sinon l'allu-
sion n'aurait pas touché les spectateurs. On peut par conséquent
espérer que M^ Guesnon trouvera son nom dans le Registre
des jongleurs et bourgeois d'Arras ; et si la date de sa mort est
celle où il fut « mis en sen lit », elle sera aussi celle de la
représentation qui fat l'occasion de l'interpolation.
n est utile de remarquer que le seul manuscrit qui donne
intégralement le Jeu de la FeuilléCy c'est-à-dire le seul où se
trouve cette interpolation, est précisément celui du Jeu de Robin
et Marion dont le texte a été interpolé par l'auteur du Jeu du
Pèlerin.
Ernest Langlois.
A NEW MANUSCRIPT
OF ADGAR'S MARY-LEGENDS
Tlie coUeccion ofMînclesof the Virgin inoctosyllabics, by the
Anglo-Norman versifier William or Adgar, whidi is conîaioed
in Egerton ms. 612 (Brîtish Muséum), bas been much studied
sînce Wri^bt's article ' on ^ William the Trouvère ff first
called attention tu it* There îs no need hère toattempt a com-
plète bibliography of the subject ; but référence must be made
to Dr. Neuhaus's édition of the text % to Prof, Mussafia's dis-
cussion * of ils relations with other collections of Mary-legends,
and to Mr Ward's description* of the nianuscript. But Eg, 612
is unfortunately imperfect at the beginning, and also wants a
leaf after f" j. Thèse deficiencîes were not made good by the
discovery of four leaves from another copy among the mss, at
Dulwich Collège K This fragment, however, which was edited
by Dr. Neuhaus in 1887*9 is of great înterest, supplying a
new introduction and dedication, and helping to correct ihe
text for two of the taies ^.
The ms. which we are now enabled, through the counesy ^
of its présent owner, to bring to notice, appears to be in a
K Th, Wright, Biagr. Brit Lit. Aogto-Non^aa pcriod (1846), p, 464.
2. Adgar*s Marienl/genJen, ed, C, Neuhaus» Bd. IX. ofDr, W, Fôi5tcr*s
Akfr. Bîbliotbek (Hdlbronn, ï886).
J. A. Mussafia^ Studun ^u dm mittelaU, MarimL^ IV (Wicn, 1^91)1
pp. U-lJ, 36-85.
4. H. L* D. Ward, Cfl/, cj Romands, II (tBqi\ pp. 708-7 17,
5» G» F. Waracr» Cai. of thf Dulwkk Cdttigt mn.^ iSSi, p. )46.
é, Das Duhvkh*fr Adgêr^Fragmffit, Aschcrsiebcn.
7. Sise Mussafia, IV, 51-52.
adgar's marv-legends 395
complète state. It does not^ however, extend to more than
half the length of Eg. 612^ being a copy of a shorier collec-
tion made for the lady named as patroness in the Dulwich
fragment t, Iwîll perhaps be found convenîent if we préface
the description of this new manuscript with a brief summary
of the contents of the two others*
Eg. éî2 contains forty » taies, three of whîch (n^* ij s and
6) are imperfect, Prefixed to n° 2 is an introduction, în
which the author states that he was « primeseinei is Wilbrae
and baptized Adgar, and that he ha^ taken the miracles which
he narrâtes froni a book in the anmbry of St* PauTs Cathedral
în London, A second introduction précèdes n° 11 ; hère Adgar
says that his original is in Latin, and that he is translating it
for his friend Gregory* After n° 40 is an épilogue, in which
Adgar congratulâtes himself on ha%'ing reached the end of the
St, Paut's book, the compiler of which he names « Mestre
Albri Ki divins esteit muU vaillant »; and déclares that
lie 100 willend his work now, though he could recount many
more miracles of Our Lady from other sources. This is fol-
lowed by a dedication to Gregory and a prayer to the Vîrgîn.
The Dulwich fragment (henceforth called D) contains :
i** the latter half of the Theophilus-legend (^'11. 559-1102
of Eg. n*" 17); i"" an introduction to a book of Miracles of
the Virgin, which the anchor names u Graciai » and dedicates
to tt Dame Mahaut » j 3** rather more than half of the Vision
ofWenin (= IL i-i8é of Eg. n^ 23).
The library of the late Sir Henry Hopc Edwardes was sold
by auction, by Messrs* Christie, Manson and Woods, in
May 1901- Lot 598 wasthus described in the sale-catalogue':
Vîes dé Saints en vers, Mânuscrîpt of ihe xnî»*» cçntury, on velïutTï
{16 leaves) wriïten tn double columns, brown morocco «nstra^ gilt c4gcs,
by Bcdford.
i* Not coynting the mirack of the abbcis, the authorship of which b
doubtruli sïnct h cornes after épilogue and dcdîcaijon, and îs scparated from
them by a cùfiv of the RoniaDce of Gregory, Netihaus omits ii; bui it is
printed as an appendix to the présent article.
2. Catalo^iif 0} the choke and valêtëbU LH^rary af Sir Henry Hope Edwardn^
BarL dtfeoitd, p. 73. The purchaser vcry ktndly placed ît for somc tnûnihi
396 J.-A, HERBERT
The manuscript consîscs of i6 vellum leaves, measuring]
23 by î6 centimètres, the first eight leaves in double columtis,
the last eight in triple, 34 to 43 Unes to a column* In two
hands of the ij"" cent, (probabiy arc. 1240), the change
occurring at f" 3» lop of col. 2 (beginning of art, 2), Initiais in
red and btae, The contents are I. Vie de S"' Marguerite,
P i; IL Miracles de Nostre Dame, by Adgar, 1° 3, col, 2.
L UFE OF SJINT MAROARET.
This lire does not seem to be known, It Is in 85 mono-
rhymed quatrains. The opening stan^ias are
I A b Dcu locnge c a b sue gîoîre
Faire volums d'une virgînc mémoire,
A qui Die us dona ' venu e victoire.
Co qu*€n dirum estrait est de Vestoîrc.
n Pc3i$ icd hure ke Dieiis ai tarre vînt
E pt^on pur pécheurs sustîai.
Qmi Deu ama e dreite vêle tîat,
Baptizé fut e crestîen devint.
VI Eh Antiochc, une cité muh ridie,
Ot un p^en une mult gente fille.
De giant buntë çn tute rcpknie;
Lé non de lî si est dît MarganEe.
The last threc stanzas are :
• E Deu ! m dist-il, « par ta samte pitîi.
Ne m*«tablîr ceste chose a peduè! •
Dressa l'cspée. Le chîef U ad trenchté,
li ai^e I>eu i funcnt aparillîé.
Celé sainte aime en uni el csd portée;
Devant cdi Tunt mbe e aloèe,
Eq kî servùe de fu tâot pcoée,
Otc est d ôd letne co/rxmtt.
ai tbr dbpoal of llie pnsent wriier, oaly
ootbedbcloied.
dur liîs itaiee 1
ADGAR^ MARY-LEGEMDS
A ctile glorie peusscnt tuit cil venir
Qiù îi aidemni k soeti liu jchcîr,
E cel église acrcstre e asurdir,
Ou l'un deît Deu e la virgme servir» AmetL
397
n. MIRACLES DE KOSTRE DAME, BY AI3GAR.
The Prologue is în thrce pans : i"* 11. 1*62, a général întro*
d action j i
dedîcates i
ich tho author nnmes his book « Graciai w and
^ the Holy Trinity and to Our Lady ; 2° IL 63-
78, an appeal to good people in gênerai, and to « Dame
Mahaut » in particular, to listen to the miracles which he is
going to narrate as he finds them in his « essamplaire »; 3"
IL 79-86j an in%'ocation of the Virgin.
This is identical with Part 2 of D. But ît is printed in full
belowj coUated wîth Dr. Neuhaus's édition ot the Dulwich
text — the édition being rare' and the ms. mutilaied.
Of the twenty-two taies which folio w, n"*' to-22 are aiso
found în Eg. ; and n^* 1-9 are only new versions of well-
known storîes, being the first nîne of the séries of seventeen
ules which Prof. Mussafia* has called H M. As the ms. has
no rubrics or other headings, the taies are indicated in the
following list by the short tîtles used by Mr Ward in the
Catalogue of Romances.
î. Hildefotisus of Toledo (= HMi. Ward, li, 604), f" j v^ b. Printed
bclow.
2, The drowned Sacrbtan (^ HM2; Ward, II, 604), f° 4 vo. Prîmcd
below,
î- Clerk of Chartres (— HMj ; Ward, II, 605), fo 5 r« h, Prmted bclow,
4, Fivc Gauties{^ HM4; Ward, U, 605)1 f° S ^ ** Prihted below.
%. The Charitable Aimsman (= HM5 ; Ward, 11^ 605), f^ 6. Printed
6, Ebbo the Thief {— HM6; Ward. II, 606), r« 6 r^ K Printed helow.
7. Monk of St. Peter's at Cologne (= HM7, Ward, H. 606), fo 6 ^k
Printed below.
8 Pilgrim ofSt, James (= HM8; Ward, II, 606), Jû y \^ j^ Printed
bdow.
I. The Britîsh Muscum does not potsess a copy,
a. Siudim, m, s$; Ward, II, 590, 604-9.
398 J*-A, HERBERT
9, The Pricsi who ottly kncw ont Mas$(= HM9; War^, II, 607X f^ &
V». Printed btrlow.
to. Two Brothers at Rame (^ Eg. 612, no ij, fo 9 r> K 2 lé Ikies» «M
whîch the uni 66 are printed beiow^ £g. wanting the ftrst 65.
Next, as in Eg-, cornes the introduction in 47 Unes, in
which ihe author names himself Guilleaume or Adgar, and
speaks of his (c esan plaire » at Si. Paul's, Begins : w Surent
fet D^n merveiles meintt?s d, f* lo, It wHl be seen from the
photograph which accompaotes thls notice that ihe text hardly
differs at ail from that of Eg., which has been printed more
ihan once *.
n, Prior of Sl Sav»our*$, Pavia(= Eg., «<* 2). 119 litics, bcg. Am*ti dirai
{4> k'tn tnprh, fw to fw c,
12. Hicronymus ma Je Blshop of Pavia(= Eg., n<? %). é% lîoes, bcg. £« la
ciU^ (iuiit 0fi cvntm\ f> ïo vof.
ij. St^med Cûrporale (^lEg.^ n» 4). 91 ïlncs, beg. ^b mv tffîmrmumét^
14. Jew of Bourges {-^ Eg*, no 5), f^ ri vo, Pnnted bclow, ^. wam-
tîng ail but the fîrst 19 lines.
15. Milk : 3} pUois în flower(= Eg., w> t). |oo liocs, the 1iT« dgtii
of which are printed hi^low, Eg. being imperfuct. f« i3^
16. The Nun who saw ihe world (^ Eg., n» 40, but wiihout Ihc intro-
duclory IL 1 «96, and concluding more briefly). pi tines, bcg. De h tsumîn
vui deifunUr, (^ i^ !<> K
17. M-iry îmage insuhetl (= Eg,, n** î7), 68 Unes, bcg. En CûtknHtiaNÊ
18. Wife Jinà Mîstress (= Eg,» n"» 54), 42 Unes, b^. A^ itm fimmm
dirai brtfmeni^ f** 14 v* ^»
19. HustJcChurch enlarged (^ Eg,, n* 30, bui omitlîng the iatrodoé*
lion), 310 Unes, beg, Bitn mi kt Dm nul nt dnpit (amwcring to I. |5 of
EgO, f"iS.
20. MaUr Misericordim (= Çg., n» 15), 41 Unes, beg, Unt mûhdê$ ma^
OMgoiii^, fo 1$ y^ c.
at. Dcâth of Julîan the Apostate (= Eg., np 16). 88 Unes» hcg. Enét"
mriirs h Julktsi^ f* 16,
22. A b bol « Elstmuii » and ihe Feast of the Conception (^ Eg,, a« 2t),
J46 Unes, bcg. Li nis GuilUoiinté dt EngUierrt, ^ î6t^ c.
J* P.Mev*^, lE&r, d'âne, trjttfi, II, ^4^ ; Keubiu», Ai^ifr^i MuntnUi'enden,
p. 8.
' U*iw>Wri>— .
•
c
Romania. XXXlf, 398.
ADGAR S MARY-LEGENDS |ff
Ends : E Deu ta nus diiinst si tenir
Qpe turner îi puise à pleisir. Amefi,
fo 16 vo c (prolonged one Une beyond cols, i and 2).
It îs curious that tKe Edwardes ms, includes neither ot thc
two taies found in D(Theophilus aod Wettin). Thb omission
would lead us to suppose Edw. imperfectj bue for the <^ Amen »
at the end ol n^ 22^ and the prolongation of the bst column
in order to finish the taie* Perhaps the archétype of Edw, was
incomplète. But itseems possible, on the other handj that Adgar
made a seleaion, for the Lady Maude, from the longer séries
which he dcdicated to Gregory; and that Edw, represents this
sélection. The order in D is certainly confused* It can hardly be
supposed that ihe prologue to the a Graciai » was meânt by
Adgar to corne anywhere except at the beginning of that
book; and it seems unlikely that, while so popular a legend as
that of Theophilus was expressly excluded from it, it should
hâve begun with the Vision of Wercin. We know of no Latin
collection of Mary-legends in which the latter taie cornes firbt,
and there is no obvions reason for giving it spécial promiiience
in a book designed for the amusement and édification of a lady.
The text of D, as regards Wettin at ail events, is undoub-
tedly nearer the original ihan that of Eg. (see Mussafia, IV,
32-}), although the ms. isassigned by Mr Warner to a much
bter date, The Edwardes ms., on the other hand, probably
represents a later rédaction than Eg., being considerably shor-
1er in six of the taies (Edw, i j-19, 22J, But it would of course
be impossible, withont a minute comparison of the two texis,
10 say positively whether the discrepancies are due to abridg-
mcnt or interpolation. For the other taies, so far as they are
still extaut in Eg., the two mss< hâve practicalty the same
text, It is noE easy to account for che variations in the order.
Neither Eg. nor Edw. seems to follow throughout any Latin
original now extant; and perhaps neither of them exactly
represents Adgar's own arrangement.
400
I.-A. HERBERT
Pr&kigue.
Mat fci bien kî sun wfns 4«pent
En tel liu dunt Peo dt ^ ameode-
[tneni,
Meîllur livre ne ftut hume Im
4 duc sd et autre a Deu atrere.
Qjji stib i lient /tncfie ' a drette vie,
Micidre kt î mctne cumpnie.
Pur ^ qui set se deii pener
% Que plu^urs puisse a Dcu fneoer.
Ki bco set et ne s'enin^nei,
MieU K venist estre muet,
Kar de Deu tî en repnivè
ts Pur queî sun savdr ) ait ceté.
Si cTî jvra nia! gueiredun ;
Deu le fra juger a lairun.
Q^i sages est ne Ta de sd ;
16 De sul Deti Tad, sachez « en fci.
Par sei ne put grant sensaprendre;
Pur ço ie dcîï ai autres rendre,
Q)je de Deu dd <x\ ne ait mal grû.
20 Endrdt inei m'en sul purpensé
Que aukune chose voil trdter,
Cfcïe de Deu se aie repni\*er.
Uvraîne ai emprise ' gloriuse,
24 Dunt vui mener vie penuse,
Q^e m'aime en ait * guerredun
E de mes péchiez veir ? pardisn.
H nuD dcl père faz l'escrlt,
aS Dd fiz et dd saint esperit,
De la dame sainte Marie *
Ki desux Deti est ixmre aie.
De ses vertui voil * amier»
p Ki duces suni a escuter.
Enï d livre poet rem oîr
Cyme Tem deit la dame servir.
Gcst livre a nun « Graciai •,
}é Pur ço qij*en grâce est oimunal.
Tut cstret '" de grâce seînte
De mcint humme^ de femme
[mcintc, (t | v^')
Si est commun a tute gent <
40 Ki de Deu servir unt taJeot.
Estrdte est d'îcele reîoc
Ki est pfetne de grâce fine;
I>e la Deu gracv est repEenie,
44 Cume*' sa mère et sa duce amk;
Pur ço est ■ Gradal » numea
Cest cscrit* si rapdcrez.
A Dampnedeu Fescrii présent
48 E a sa mère ensemcnt i
A ]m loeoge, a lur hunur
Sdt le livre feï par dulfçjur**.
Sel pre^ntase a che^^alcr,
ÎZ Tost roe dunast un chcv-al cher ;
A riche dame u a meschine,
Tost me dunast pelice hermine;
Mes td dun serdt tose dé*
16 Al rei le fai de majesté
E a sa mère gloriuse,
Kî tant est sainte ei'* prtciuse»
A la dame en hz presem*^.
60 Deu sdt a mun cutncncemcni,
E la'^ dame sainte Marie,
De qui treiter vol par sa mfe f
EscuteXf bone geni senée»
64 Ki en Deu estes asemhlée,
E vus» dame Mahauî, premers,
I. D gent aient. The Une it îco hng (En tîu dunt dt amendemeat ?)^ —
2, Su^rm mené* — 5, D aaef. — 4* O co îddcx. — S- Rtml emprise ai, ^
6. Iniert [ban] ? — 7. D en ait — 8, Linti j$? and jo ère u^ntittg in D, bav-
11^ htm mi mwofhy tke Mnéer; ihc htgtHmHgî ûfhnes i^aS arf ummUngfÊr ^èi j
MMM rmsom. — 9. D i uoiL — lo. Dest estraii. — 1 1 . Hiri and dsmtàirt rmâi
cum. -—12, The haf has hem mutUaied, mmâ afifrwardi rtpair^^ fmt ai ibu'
poittt; D im dulcur. — t), Z3 ^ftftUs et. ^ 14* D ccst prcscm, — tf. D OM.
ADGARS MARY-LEGENDS 4OI
Se ço ne scit cssanple u dit
A vus dirai plus volentiers
Des miracles , des > grai^ sueurs,
68 Ke fet nostre dame a plusurs ;
A tuz et a tûtes ki Teiment,
E ki de bon quor la reclaiment. 80
Ûnkes ne fu hum ki Tamast
72 Que ele bien ne li guerredunast.
Pur ço voil jo de li treiter
QJa» mun busuin aie luier. (f. 3 84
vo h)
Mes n'en voil treiter, ne ren faire,
76 Fors dreitsulum mun essamplaire;
I. Hildefonsus of Toledo. For the Litin text, see Pez, PoIIjo-
nis... Liber de Miraciilis S. Dei Genitricis Mariie^, cap. i.
Ki bien se cuntenge en Tcscrit.
Sainte Marie curunéc,
Reine d'angles bonurée »,
Mère Jesu nostre Seinur,
Entendez, dame, a ccst pechur !
Preez pur mei vostre fiz cher,
Qye de vus me duinst si treiter
Ke meindre puisse el ciel amunt,
E tut cil ki lire l'orrunt.
En Tulette, la grant cité,
U li pupics est mut loé,
Ert uns arcevesques eslit
4 Qui ama Deu de quur parfît.
Mut ert de grant religiun,
Danz Hildefuns aveit nun.
Mut se pena el Deu servise
8 E muteshaucha sainte église.
Od tut ce k'il fist si grant ben
Nostre Dame ama plus ke rien,
La mère Deu sainte Marie.
1 2 Cist prudom ert de sainte vie ;
En sa loenge un livre fist,
U sa virginité descrist.
Tant plot a la dame cel fct
16 Del livre ke cil ot estreit,
QM*en un jur, la u il se seeit
E le livre en sa main tcncit,
Vint la dame a lui vcirement ;
20 SU mercia mut ducement.
Li archevesques s'en esjohi,
E de [cco] mut plus la servi ;
E establi ke en Tuitimc jur
24 Einz la feste nostre Seinur (f. 4 r©)
Qjie l'en la feste dune feïst
De la vailante mère Crist ;
Uit jurs ainz la nativité
28 Fust fête la solemnité,
E d'an en an, et refust anvel,
Tuz tens .viij. jurs ainz le nocl,
Que se l'ennunciaciun
32 Venist dedenz la passiun,
U en la semaine de pasche,
Ainz noel fust fcte par tasche ;
E mustra ben en sun cuvent
36 La raisun pur quei et cument :
Si cum Dei deina de li ncstrc.
Si deust la feste ainz la suc estre.
Puis en cuncille gênerai
40 Fist celé feste cumunal ;
Uncore i est si célébrée
Par les mustier[s] de la cuntrée.
1 . Read dei ? — 2. Z) E a. — 3. Lims 80 ami Si are wanting in D, eut away by
the hinder,
4. At the end of a volume entitled Veit, Agnetis Blaniihekin... Vita et Rêve-'
lationes (y icnnx, 1731). This collection is analyscd fully, and the attribution
to Potho disprovcd, by Mussafia, Shidieny I, 22-30, II, 53-5. — For another
text of the same Miracle, sec Romania, XXIX, 35.
Rmêmm, XXXIi , 26
^^^^^H ^^^^^^^1
^^^^^^H Dune vînt a lui U dame heie,
Bo Cestui ad diable deceD, ^^^H
^^^^^^H 44 U il Sïst eu J'çve5{|ual sde
(luan4 en U chaere s'asist, ^^^H
^^^^^^^H Kj de f auicr estetc près mise.
Que nostre Dame ain^ cunircdisi, ^H
^^^^^^H Sil mcrcia de cel
La sainte aube voleit user, ^^^H
^^^^^^^H Une bêle aube en sa main tmt ;
B4 H cumençha si a parler ^^^H
^^^^^^H 48 Dist lî ke de par^iis
Eosement ; « Cume sui hum ^H
^^^^^^H Diss : vt Cesi vestt^ment que ci ai,
[vivant, ^H
^^^^^^H De parais ça la portai,
Si fu dt ki mei Tu devatit, ^M
^^^^^^H De] parais, mun très cher ûz.
Dune me puis jo bon aturner ^^^H
^^^^^^^H $2 Dedenz ^vras joie et dditz.
$6 Oé veste ment qu'il sout user, ^^^H
^^^^^^H Ve&t ce&lc aube, kc ne forveies,
Ëvesque snl , eu m il csteit, ^^^H
^^^^^^H AI Testes m un ûz et as meies.
E ordené en tel endreit. ^^^H
^^^^^^H En ceste chaere serras
Je ruserai tut ensemcni », ^^^H
^^^^^^H ^6 Quant le plaîst et quant vuJras,
92 E vesù sei del vestement. ^^^H
^^^^^^^H Mes saciez tre^ bien que après tei
Mes, si tost cum il le vesti, ^^^|
^^^^^^F Ne sera nuk hum sanz derci ;
De la chaere aval chai, ^^^H
^^^^^^B Hum nH purra sanz peine cnit^T,
E si Testreinst le vestement ^^^H
^^^^^^H 60 Ne 4:este aube, fors tu, user.
96 Que mort ebaî susdeement* ^^^H
^^^^^^^^^H Se aucun le fet par fol
La gent k*t fureni i^o virent, ^^^H
^^^^^^^^^^H Jo en prendrai vengement )i.
De poure % de dute fuïreni. ^^^H
^^^^^B
Cd saint vfâtemeni iduac pris- ^^^B
^^^^^^^^m Cum dît lî ot la profede,
[mm, ^M
^^^^^^^r é4 Si s'en parti la Deu ;iniîe.
100 El ircsor del mustïer le mistreat ; ^M
^^^^^^H £ laissa lui le vertement
{t 4 V») ■
^^^^^^H K^aporté li 01 en présent.
Si guardcnt h u d urablemeat « ^H
^^^^^^H H cil mut foroient l'enchéri»
Uncore i est il veremcnt. ^^^H
^^^^^^H 6S £ mut nettement k vestî
Sï ben îgiie ment h u n u ra ^^^^|
^^^^^^H El servîse al Deu
IÛ4 La dame celui qu ek ama, ^^^H
^^^^^^H Icbt hum devint seint et bon ;
Hîldtluiis, suu très cher amî, ^^^H
^^^^^^^H 'Fus ala boneureement
Pur ço que de grê la servi ; ^^^^
^^^^^^^H 7a Del seck al Deu satm cuvent.
Sîâgrius, qui li ^st ton, ^^^H
^^^^^^H Mut bone essanple a^ sun$ laisa
loë Ne put guarîr de maie mort, ^^^H
^^^^^^H D'à mer cde k*il tani ama.
Par ço nus raustre apenemeot ^H
Ke quiqtinke' la sert boncuijcat ^H
^^^^^H Arcevcsque estât esJii
La grâce Deu avra pur veîr ^H
^^^^^^^^ 76 Uns clers aprC^ su 11 saint obit ;
j 1 2 £ la suc, matin et seir. ^^^H
^^^^H Siagrius esteît numé.
E Deu servir la nus duinst ^^^H
^^^^H Mut lî fu poi de la humé
E de nos pecch<» mis tsluimt 1 ^^^B
^^^^H , Del saint ki anz archevesche I fu.
1
^^^^K^ t* Head pim. — a. Read qui q uac. ^^^H
ADGARS MARY-LEGENDS
2. The Drowned Sacristan.
cap. 2.
En un mustier un muine esteit,
Q.u[i] la segresteinerie avcit
Del mustier et des apentiz.
4 Trop ama seculers deliz.
Diables Tôt forment espris,
En grant lecherie Tôt mis.
Ja seit ço ke feîst folie,
8 Mut cria a sainte Marie ;
Quant devant sun auter ala
De mut bon qur la salua,
E dist suvent : « Ave Marie,
12 Pleine de grâce, Deu amie,
Damnedeu seit ensemble od te.
Ma chère dame, pens de mei ».
Un fluvie esteit près del mustier,
i6 U dst frère seut repairer.
Quant il alot en sa folie
Pur parfere sa lecherie.
Avint une nuit k[e] il vot
20 Aler al mal k'il fere soit ;
A Tauter Nostre Dame ala,
E la dame bel salua ;
Tuma s'en puis ver cel mestier,
24 Uveri les portes del mustier,
Vint al âuvie, passer quida ; (f. 4
vo b)
Mes diable ens le trébucha.
Il neia [tôt] sudeement,
28 Cum cil qui ert en gref turment ;
Par sun pecché perdi sa vie.
D*enfern vint Torde cumpanie
Pur icele aime seisir,
52 Cume celé qui fist sun pleisir.
Malfé la pristrent et en menèrent.
Envers enfe[r]n la débutèrent.
Li angles Deu, ki ço virent,
36 Par la Deu grâce i descendirent,
Kar il pensent par aventure
Sucurre icele créature.
Li diable plein de felunie
403
For the Latin text, see Pez,
40 Distrent as angles grant folie,
E dient : « A quei i venez ?
En ccste aime rien n'avrez,
Kar par iço qu'ele a urée
44 Nus est ele a reisun dunée. »
E li angle se turent tuit.
Que en li ne truverent frut,
Dunt li puissent faire aïe.
48 Estes vus tost, santé Marie,
E dist par grant autorité
As mauves, qui furent desvé
Od esperit de culvertise :
52 « Pur quei avez cestealme prise? »
Li diable li respundirent.
Qui tuttensles aimes haïrent :
« Pur ço que si fîna sa vie,
56 A nostre pleisir, en folie. »
E la dame lur respondi :
« Vus i mentistes, enemi !
Bien sai [que], quant cil i ala,.
60 A mei vint, si me salua,
E quei qu[e] il unkes mesfist,
Tuz tens ainz a mei cungé prist
Al aler et al revenir ;
64 Pur ço le vusf[e]rai guerpir. (f. 5 r«;
N'ert mie de vostre purchaz.
S[i] vus dites ke tort vus faz,
Metuni le jugement avant
68 Devant mun fiz, qui est puisant. »
Si cum il estriverent si,
Si plut a Deu, la » sue merci.
Pur Tamur sa mère chère,
72 Ke l'aime au cors venist ariere,
Ke el secle prcïst pénitence
De ses mesfctz en pacience.
Endementcrs que ccsi estrif
76 Dura si entur cest chaiiif.
Vint li tens que li ' moine el muster
Durent lever al Deu mester.
I. Suppress/a. — 2. Supprcss /t.
■
404 J,-A. HERBERT ^^^^^|
^^^^^1
Pur chanter matines la nuit.
louKî mut voleoter^ s'en fuïst; ^^^|
^^^^^1
80 Mui s*esmer veilleront trestuit
Mes cil les preni a cunfortier ^^^|
^^^^^H
Ke lur seins oe sunercnt mie*
£ par ordre tut a cunter, ^^^|
^^^^^H
D*cus levèrent nnc partie
Cum \\ avint par sa folie, ^^^|
^^^^^1
E (juistrent mut ïursegrestciii
104 E de t sueurs salnti* Marie; ^^^|
^^^^^H
84 Amunl et aval, lut fu " en vein.
E cil loerenc Dcu forment (!. > ^|
^^^^^^B
Equant ilukes nel truvcrent,
rv^) ■
^^^^^^H
Aval a Teue s*cn alcrent;
E la chère dame ensemeni. ^H
^^^^^m
Tru[v]ercat ïe mort et neiè
Li frères, ki si fu guari, ^^^^
^^^^^H
8S E ciiï en Teuc aukes plungé.
luB De bon qur la dame $«T%i; ^^^|
^^^^^H
Treîstreni en Teuc le dolent.
Sdement ne laîsa il mîe ^^^H
^^^^^H
E s^esmervcilereot durement
Sun délit de celé folie, ^^^H
^^^^^H
Par quel achesun i venîsi
Mais chascun autre mauves fet* ^H
^^^^^B
92 Cil niuînes, et qmi i queîsi.
]I2 Suvint lui ;isse£ del malveis plet ^|
^^^^^1
Sï cume il de ço plus p;irlerent,
Dunt h diable estrivercm, ^|
^^^^^^1
E cume plusurs choses mu sire rem
Quant envers enfem le menereni. ^|
^^^^^H
De cel niuine, de cd chattif»
Mm démena puis bone vie. ^^k
^^^^^1
96 Saut il sus entre eus, sain et vif.
u6 Si kc Deu ad la cumpaîme. ^^k
^^^^^H
Li autre, ki aînz de lui parlèrent,
E Dcu la nus dutnst purchaccr ^|
^^^^^^^^^^^^^H
De pour, de du te ircmblcrcm.
kel ' i ot, ke ke it deîst,
Ke matifc n'i eit que engin nier! ^|
^^^^B
3. The Clerk of Chartres.
For the Latin text, see Pe2, ^|
^^^^r
cap. 3, oï Rmmnia^ XXIX^ jé
^H
^^^H
Et! Chartres, la belc cité.
Li pu pies î vint de la cumr^. ^^H
^^^^^H
Mîst uiï cl ers de ^-rant legiené;
Pur sa foie renumée ^^H
^^^^^1
Mut ésteit de legieres myrs,
JugtcTent kc digne n*estelt ^^^H
^^^^^^B
4 Cures dcl scclc a m a plusyrs ;
ao D^esire en dmuere par d reî l ; ^^^H
^^^^^H
Dclît ama uïtre mesure ;
Defors le dust hum enterrer, ^^k
^^^^^1
En i^o mist tute sa cure.
\%o VQleient bien pruver* ^^^|
^^^^^^H
Neqoedent il ot en mcmoîrc
Crestienn^ li défendirent; ^^^|
^^^^^1
S La merc Dcu, le reî de gloire^
34 LI prestrc defors l'enfuîreni ; ^H
^^^^^^B
Si cume nus de Tautre cutitamcs,
Sam messe ci sani lute Jreiiurc, ^|
^^^^B
Ke des muincs maint numi»*tnc5,
Mistrent le cors en scputtarc ^|
^^^^^^
fci&t soleit tut ensemcnt
Cum cheitif de sî foie vie, ^|
^^^H
Il Saliier la dame su vent.
iH Kt tuz jurs démena folie, (t 5 v»; ^^H
^^^H
Suveïît li àm : « Ave Marie,
Qpant ti^nte jurs jeu i aveit ^^^|
^^^^^^
Dame, de vus requer aïe » I
Si vil ment et en tel cadrcit» ^^^|
^^^^^K
Avio! que cest clerc fu octs
Nosire dame sainte Marie ^^^|
1
16 Crudemcnt de ses en émis.
p Vint a un clerc de bone vîe; ^^H
1. Suf^fss fu. — 2, n^jâ Tel?
j
68
ADGARS MARY-LEGENDS
Dist )i, cum fust par malulant :
« Vus avez fait mut malement
De mun chancelier, qui est ocb,
36 Qui par tort est la defors mis.
Defors cimitere meîstes
Mun chancelier, si mesfeîtes. »
Li clers prist a esmerveilier;
40 Dist : « Ki est vostre chancelier ? »
E la dame sainte li dist :
« Cil ki la fors si villement < gist,
Icil est mi chiers chanceliers;
44 Si me servi mut volentiers;
Qpant devant mun auter ala
Mut bonement me salua.
Demain par matin le pemez,
48 El cimitere le metez ;
Enterrez le a muh gran hunur,
Cume celui ver ki' ai grant
[amur. »
Gl vint avant, al puple dist
52 Cument la mère Jhesu Crist
Li aveit dit et cumandé;
De tut en tut l'a recunté.
Li puples mut s'esmerveilot
56 Des merveiles ke cil cuntot,
405
E cel mort de terre levèrent ;
Dedenz sa huche dune tru[v]erent
Une flur mut bêle et mut chiere ;
60 La lange truverent entere,
Cume preste de Deu loer«
Dunt la dame soit saluer.
Tut cil, ki dunkes iluc furent,
64 Apertement s*en aparceurent »
Ke la huche alkun bien fet out,
K*a la sainte dame mut plot,
U fust salu, u fust prière;
E par ço fu sa lange entière,
(f. 5 vo h)
Pristrent sus sun cors, sil por-
tèrent,
El cimitere l'enterrèrent.
Mutes grâces a Deu rendirent
72 E a la dame, ki ço virent.
Creire devum veraiement
Ke pur lui nel fîst sulement
Nostre dame sainte Marie,
76 Mes pur nus treire de folie,
E ke nus amun Deu et li,
Ke des pecchiez aium merci.
4. Five Gaudes. For the Latin text see Pez, cap. 4.
Uns autres clers, prudum et hier,
Mist en un liu, nel sai numer.
Icist servi Deu bonement
4 E sa chère mère ensement.
Od ço ke sun servise fîst
Ceste antienne su[v]ent dist :
Gaude, Dei genitrik chiere,
8 Tute Fantiune en sa prière.
Qst cumencha mult a languir
Encuntreço k*il dut mûrir;
E cumença mult a trembler,
12 De pour de mort a suer.
Dune vint a lui sainte Marie
E dist lui : « Je sui vostre amie.
A que avez pour si grant,
16 Ki Gaude me deîstes tant,
Ki untes feiz me nunciastes
Goie, quant Tantiune chantastes?
N'aies pour, ne vus dutez ;
20 Sachez, ke mal ne sentirez.
La goie, ke a mei nunciastes,
Quant tantes feiz me saluastes.
Des ore en serez parçuniers
24 Desgoies et des granz luiers
I. Read vilment. — 2. Read Cum c. cui. — 3. Ms. aparccurerent.
^^^^^V 406 ^^^1
^^^^^^H Ke d« mé avtir e^perasies.
Gœi ' et îcesce od Jesu Crist. ^^M
^^^^^^^H duant Garnit de bon 9 tir chan-
Pener nus de vu m volenticrs ^^^H
^^^^^^^H u
|6 A pyrchacler icels luiers ; ^^^H
^^^^^^H H quant si renteridt ,
Ser\'ir la dame en tute guîse, ^^^B
^^^^^^H 28 Del mal qulâot estre gujiri.
Ki eissî reni as su us le> lur scr- ^H
^^^^^^^H Ne prist guarde â& h tristesce.
[vise. ^H
^^^^^^H Reseer volett par leescç ; (f. 6 r«)
Vis m*est ke quiqunkes la sert ^^^B
^^^^^^H Maïs Talnie s'eti parti atieîn;
40 De bon luer sera bien cert» ^^^^|
^^^^^^H 33 Drcit en parais tut sun eirc,
E Dcu la n«s duint {untj servir, ^^^H
^^^^^^^H Si cttme ta dame ainz 11 premîsi
Que en parais puî&sum venir ! ^H
^^^^^H 5, The Charitable Almsman.
For ihe Larin text, see Pe2, ^^H
^^^H
^^Ê
^^^^^^H Uns pavres i hum , ^uffretu^
Q^ie de sun serf eûst merci, ^^^H
^^^^^^H
2û Si[i] ddlverast de Tenemi ^ ^^^H
^^^^^^H Mîst en une vile entre gem,
E que parais li dunast, ^^^H
^^^^^^^H Ki chacun jur ah rcqucrre
En goi Cl en repos* le menas! . ^H
^^^^^^H 4 Sun pam d'us en us par la terre;
Dune vint saime Marie a lui; ^^Ê
^^^^^H Ki â\o ke îl û aquist
34 Dtst H, « A meî ert tuo rvfuip ^H
^^^^^H H ke par le travâtt kcfist^
Ore t'en vien a m ci s^ns délai, ^H
^^^^^^^K Si purchaça a mangier« bien.
En parais bien te mettrai. » ^H
^^^^^^B 8 E chx aim sur tutc rien
P l ush urs gen / cel e vo i ^ 0 i rent , ^H
^^^^^^H La mère Dcu,
1% Qui en la mcisun escut firent^ ^H
^^^^^^H De tut sun quor la réclamât.
{L ét^b) ■
^^^^^^H De ^î bon quor la dame ama.
E la vérité fu tost^ pruvée, ^^k
^^^^^^H 13 due d1ccl pain, ke il purchaça,
Kar Taïme est dcl cors sevrée. ^H
^^^^^^^H Duna as autres buisuinus^
Si tûst cume la dame Toi dit, ^H
^^^^^^^H As mcndianï^, as suffreitus ;
|i Murut cei povre sur sun lit» ^^|
^^^^^^H l'ut pur sainte Marie
£ Ta) me en parais s'en v«tt ^H
^^^^^^H t6 Fist de ses almoncs partie.
Od Nostrc Dame en gok et tait. ^H
^^^^^^H Cist h u me, q y an t mûri r de veit ,
Deu duinst itel dclînemt'nî ^^|
^^^^^^1 Cria a la dame a apleit.
^é A tute cresciene gent 1 ^^^H
^^^^^H 6. Ebbo the Thief. For the Latin teit^ see Pez, cap. é, ^^H
^^^^^^H Ci poe^ merveiies oîr
E sa duce mère ensement. ^^^H
^^^^^^H De ces ki Deu volent servir
4 Amer [les] deîveni » lute gent ; ^^^B
^^^^^^H 1. Mrâd Gaie. — 2. Suftprést le. — ]
[, Riaé povre^ — 4. M$. mangner. — ^H
^^^^^^H $. Mf. del tenemj. «^ 6« Pès, iuhsHtuitâ Jùr r^pos, wonld ru^ûtt ihi profit ^H
^^^^^^H mtaiuf4 4y the Htu, ~ 7, Tûst, wMch mdkfî thiî Une toù hm^^ thùuid hm^^^^
^^^^^^H tramftrtd to ik ntxt Um, ii/jfn est. — %
, Mu dcnicnt; ^^^H
ADGAR s MARY
Ne put < li biens estre perdu
Ki seit fait en nun de Jesu.
Chascun bien est gueredunez,
8 Et li mal ensement mustrez.
Si cume je crei, n'est nul pechur
Ki face bien pur Deu amur,
Dunt Deu ne rende gueredun,
12 Par fei et par cunfessiun.
Cil ki sa bone mère sert
De bon luier sera bien cert ;
Ja seit iço qu'il seit pechur,
i6 Ki envers la dame ait amur,
Deu Tamera mult pur sa mère.
Oez que vus dirai de un 1ère,
Si cume je trufs en cest sermun,
20 Ebbo, me senble, aveit a nun,
Ki mult embla et mult mal fîst.
Autri aveir embla et prist,
Dunt paisscit sei et ses vassaus.
24 Mut ert malfesant, mut fîst mais,
Mes nequedent, od la folie.
Forment ama sainte Marie,
E honura a sun poveir
28 Cume sa dame en bon espeir ;
Tuz tens, quant [il] ala embler,
Prist ainz la dame a saluer,
E fîst a li sa hureisun
32 Od bon quor, od devociun.
(f. 6 vo)
Vint a un jur, si cume soleit,
Embla aveirs et pris esteit,
E cil ki od Taveir le pristrent
36 Od le mal fet avant le mistrent,
E fu dune tost gugé a pendre.
Li dolent ne se pout défendre ;
Menèrent le et sil pendirent,
40 Pendant pur mort le déguerpirent.
LEGENDS 407
Si tost cum il ert suspendu,
Vint a lui la mère Jesu ;
Sil sucurut par sa merci
44 Que deus jurs sanz mal i pendi ;
Vis li ett que ele le sustint
De ses deus mans, pus ke ele i
[vint.
Quant icil, qui iluc le pendirent,
48 Revindrent la et vif le virent
E sanz mal, joius et haité.
Mut se tindrent a enginné ;
Quiderent que pendu ne fust
52 A pleine hart, si cume il dust.
Estiker » vulent le chaitif.
Pur ço que si lunges ert vif;
Dreit a sun guittrun le fer mis-
[irent,
56 De Testiker mult s'entremistrent.
Mes Nostre Dame i mist sa main ;
Le fer refist venir en vein ;
E li leres en haut lur crie,
60 E dit lur de sainte Marie,
Cume ele i est, cum le defent.
Gl s'en esmerveillierent forment.
De la dame orent grant pour
64 E sil despendent pur s'amur.
Pristrent la dame mult J a loer
E sil laisent tut quite aler.
Qst s'en tuma, muine devint,
68 E saintement puis se cuntint.
Deu et sa mère ben servi,
Des icel jur, unt cum vesqui.
Deu nus duinst faire sun servise,
72 Que diables par sa cuintise
(f. 6vob)
N'ait en nus part, grant ne petit,
Mais ke de Deu seûn eslit !
i.Put m<ans pot or puet. — 2. Registered hy Godefroy under cstachier, tliough
it is a différent verh. — 3. Read P. mult la d.
^^^H 4^8 J.-A. flERDHRT
^^^1 7. The Monk of St Peter's at Cologne, For the Latin text
^^^H see Pez, cip. 7.
^^^^H En b grant cité de Xuluine
Cumcnt put cist dune entrer hî»
^^^^^1 Ad am musiicrs u mistrent
^6 Qui od tecchc i vient sanx merri
^^^^^B
E san^î justîse et sanz bone ovne?
^^^^H 01 muMîer sï est de saine Pent.
Sis mesfet ascz le dcscuvre. *-
^^^^^1 4 Un jxiomt i ot fadls lecherre ;
(f* 7 î*)
^^^^^P , Mult amat sectiter ddlt,
Cume saint Pierre iço entendi
^^^^^M B si desph! muh sun habit.
40 A lui sein z recria merci.
^^^^H Plus aitia femme od betc chère
d'il deus^nt pur sun serf precr
^^^^H^ 8 K'en sun mustkr ferc prière.
Que malfé nei peust travailîcr;
^^^^^D l'anç purchaça par ses deliz
E il si firent bonemeni ;
^^^^H K'i! otp puis qull fu moîne, un
44 Requistrent Deu pur lé dolent*
^^^1
E Deu lur redist de David :
^^^^^H Mut ama k% deduz de! mund,
« Oomim^ qnii haHtaHt} r
^^^^^H 1 2 Iceus k'encuntre riwdc sunt.
Si cume a saint Pcrre aveit dit ;
^^^^^1 A%int un jur k'il prtst pubun
4S La saunie lur mustre et Tescrit*
^^^^^1 Od frères de celé miabuii.
Qpant cil ne porent espleîtier.
^^^^^H . P ur m^Z guerplr la prîst cl jur :
Dune ala saint Pcrrc prier
^^^^H ]6 Mais iichaî en mat greinur.
Nostfetl;ime sainte Marie,
^^^^^1 Si ke ne pout a ver cumrort.
52 Dei virgincs b cumpaînie ;
^^^^H Qpe ne murust de maie mort
Kar il soit bien, cum veirs estcit,
^^^^H Siin£ cumfessiun a dulur
Ke li piuïjesu les orreit.
^^^^^H 30 H unz le cors Nostre Sctnur
Dune se leva ' sainte Marie
^^^^^1 U diable Talme seisirent
56 Od sa vailante cumpaînie ; ^^Ê
^^^^H [E\ envers enfern h ravirent.
A nostre Seinurs'enala; ^^M
^^^^H S^int Pierre en hout piti [mut]
H îl encuntre elei leva ; ^H
^^^H
^^^^^P 34 E vint a Jesum k pu ban t.
éo E a sun glorius cuvent : ^^|
Criant pur sun muine merci.
« 0 cliîere mert% humain sucuo,
Ï-: Jcsu bel ti respuiidi :
0 vus* racs trcschicres surtirs»
« Dune ne sei tu kc David dit
Que requérez, que voîdx d? »
28 El Muter, par munesperit.
^4 E la dame requtst merd
R thfmttf^ qtds babitdbîi
Pur le frcre kî i»si ert mort»
tt En U niaisun «1, ce dit Davîd,
K( e] diables tiiidrcnl si fort.
« Ukî reposera el muni
Li Sau verres dunkes II dît :
J2 « U tu, Sire, ei ti angle sum?
68 Ja seit iço ' ke U laint escrit
« Cil ki Mrtz malctecch^ vient,
Dient kc nus ne put entrer ^
9 Etait justisc et ço maintient. »
Pur c&goier, pur reposer ^H
i. Ms. lava. — 2. Hmd ço. J
En mun tabernacle u je maien,
72 Ne en mun saint munt suverain,
Fors cil ki vient sanz tecche et
[mal,
Een justise seit leial,
Kequedent, pur ço que a nus
[pleist,
76 Cumand ke li diable leist (f . 7 r» ^) .
Cclc aime el cors repairer,
Ke ' puis se puîst adrecier
H faire pénitence digne,
80 Ke a nus venir seit bénigne,
E ait od nus joie suveraine ;
Par nus seit délivré de peine. »
Qjjant sainte Marie la bêle
84 Dist a saint Perre la novele
Ke sis hum ert si délivrez,
Vers les culverz s'en est tumez.
De une grant clef, ke en sa main
fout,
88 Les culverz en veie chaçot.
Li malfé durement fuirent
E del tut Talmc guerpirent.
Saint Pierre Talme cumanda
92 A deus beaus enfanz, si rova,
K[e] il au cors le remenassent,
Si ke de rien ne se urgassent.
Li enfaunt le resusciterent,
96 A un frère le eu mandèrent
Qui moine esteit de cel mustier
Ke je numai el chef premer.
E li frères le remenat ;
X 00 E humblement li depreat,
Ke chascun jur pur lui chantast,
Purço que si bel le Aienast,
« Miserere wei, Deus. »
X04 Dist li : « Servise vus frai plus;
Vosire sépulcre aturnerai,
E de balais le neierai.
Vostre sepuchre vieu avez
M. 08 Ainz que fusez resuscitez. »
adgar's mary-legends 409
Li frères de mort releva ;
De tut par ordre recunta,
Cume li avint, en» quant ke vit,
112 Pitusement Ta trestut dit ;
E cume il guari par Taîe
Nostre dame sainte Marie (f. 7 v»)
Cume des diables fud ravi,
1 16 Cume saint Pierre cria merci
As sainz et a sainte Marie,
Par qui il ot icele aïe. '
bi aucuns ccst miracle ne creit
120 KMl fust si des diables toleit,
Dune penst en sun quor et re-
[penst,
E sei meimes en bien assenst
De la bunté, de la vertu,
124 Queovererput la mère Jhesu
Sur tuz seinz et [sur] tûtes seintes
Ki a Sun cher fiz funt lur pleintes,
Ki Sires est de ciel, de terre.
128 Ki de bon quor vult qo enquerrc
Tute ostera la mescraance
E débutera la dutance.
E se il de la clef cuntredit,
1 52 Que cil es mains saint Pierre vit,
Dunt le diable espoentad
Qpant Talme si bel delivrad,
Idunc repenst en sun curage,
136 Que ço que n'ad cors ne visage
Estre ne put mustré el munt
A ceus ki cors ne visage » ne unt
Fors parcorsdeaperte semblance ;
140 Pur ço ne vei ge ci dutance.
Deu put certes, et jur et nuit,
Fere quant ke il vult sanz cun-
[duit.'
Sa grant vertu loeie seit,
144 E sis nun glorius et beneit !
Lui puissum nus trestuz servir.
Que diable n*i ait 4 ke envaïr !
Amen, dites trestuz de aïrl
Read k'ele. — 2. Recul et. — 3. Read vis? — 4. Ms. ni iait.
4îa I.-A. HERBERT ^^^|
8- The Pîlgrim of St James* For the Latin tcxi sce Pcz» ^|
cap. 8.
^H
' Tcisîf 11 e d cvu m n e celo^, (f . 7 ¥** *)
Tet pendanz m estut coper, ^^^H
Kc ûmi Htigc< soleit cunier.
1 Ki â< Ouim ate esîcît.
Or le faî lost de1i\Tement ; ^^^^H
4 Dont * sun moïnc conter soictî
40 Far cest fet avéras lauvem^l », ^^^|
En l'onur sainte Marie,
Ql qoidout ke ce fyst sain Jatne^ ^^^H
Qjjî al mûîne 5st bd «ïe»
Equc fere k pust sanz blâme; ^^^|
Ccl fnere esteit ' par nun Gérard
Tresi suti cutd, ne l'en fu goeres, ^H
\àih
44 E {toi] trencha ses gcnîtart^ ; ^^^H
8 Si cunie nus tnivom en l*cscnt;
^ Fuis se feri [êns] el guitrum, ^^^H
Taoî corne cil lais hum estdt.
Ke a mort se rend de randun. ^^^H
Mut cuvdtad en bon endreit
Cum il de jeu mains et pie^, ^^^H
De alcr a saint Jame le bcf ,
4$ Sunt sis cumpainun aveÛet, ^^^H
Il E par pèlerinage iloc ' urcr*
Oîren 1 1c chai û ( gorgekr, ^^^H
Furcha^a ço dum out mîcsttcr
Pristrent éutic a esmeneiler. ^^^H
A éçipendnf nieim bel dener.
Chascun cndrdt sci s'esmer\'eile, ^H
Menues le jur ke il aler dout.
>i E aiumein une chandele ; ^^^H
t6 A sa femme vînt, si cam Ji pboi.
Virent donc le ddent gésir, ^^^H
Fîst Sun délit et sun talent :
Le sa ne de ^un guîtrun boilir. ^^^^|
Maïs ne sai pas veraiement
Laiseut mûrt iluc le dolent « ^^^H
^^^^^^^ S*cle fu sa drdte muilier
0 Si s'en fuient dchvrcment ; ^^^^|
^^^^^^^H 3D U âttre pur set déliter.
Les hommes dei païs duiercnf« ^^^^
^^^^^^H Ala puis, ad meint cunpainun,
H pur la poùf s'en tuméfient,
^^^^^^H Envers saint Jamc le baron.
Qpe Tcn a mai nés dcmcniii.
^^^^^^^H CuTO il fud en l>ire entré bien,
60 E de cclc mon nm rctasi, ;
^^^^^^H 24 Vînt a ïm li colvert chien,
Kc fjit le cu5cnt par fclunie^
^^^^^^H Ll diable, humain cnctoi.
Pur son avdr* u par envie.
^^^^^^H Une nuit qoam d\ se dormî,
Si tost cume le chaitif fu m<ïr*.
^^^^^^H Ki se demustre a la gent
64 Vint diable par sun effon»
^^^^^^H 28 Hfi clané de ^nglc
Sdsi [4] Talmc dcl dolent,
^^^^^^^B A cestot ^int en tel sembbnce
E si s*en esjohi forment,
^^^^^^^H Cume iaîni Jime fuit , sanz d u taiice>
Kc se %t mie pd hdlé
^^^^^^H E dî!ct 11 tut apertemcnt
68 Del dolent qu*oi si enginn^.
^^^^^^H ^2 • Furie fei, k*as fet foleincnt,
Cum diable l'aime cnfnenciciit,
^^^^^^V Ne p6c£ salvâdun avdr.
En coac d'un mustîer pisicrciit^
^^^^^^H Se lûsi ne fcies mun
Ki de saint Fierre csiabli fud.
^^^^^^H San« mat le pùcz faire et sam
71 Ço avim» par b Deu venu, <t S
^^^^H [blamc
r>>)
^^^^^H |6 Çosu ic lis sire siint Jame :
Qoe saïQt Jame le eocunt ra^
^^^^V I. MfnJ D'un, — 3. Bêadm, —
ADGARS MARY-LEGENDS 4II
E sant Perre od lui ala. 104 K'al cors dust repairer aricre.
Dune dist saint Jamc fièrement K'cl siècle se peust espurgier,
76 Al mestre diable del covent : Que malfé nel pust chalangier.
« Pur quel as pris, felun mastin, Par la dame sainte Marie
L'aime de mun pèlerin? » 108 Out cel chaitif icele aïe.
E li diable ad tost retreit Ke Palme vente el cors ariere;
80 En dît, en voleir, et en feit, (f. 8 vo)
E al derein cument se ocist. Par la dame, par la prière
Mais sain Jame cncuntre ço dist Ke saint Game priad pur lui,
Ke li culvierz ne joliireient 112 Pur ço que a lui prist einz refui.
84 Le chaitif que enginné aveient, E quant cist hum fust repaire,
E dit lur aperte pruvance : Truva sei tut sein et heité ;
ff Sachez, ke en la meie scmblancc Mes el guitrum de la nafreûre
Le deceûstes par semblant : 116 Truva un poi de sursaneure,
88 Tut cume a mei obeîsant En tcstemoine de la plaie ;
Fist simplement, et si se ocist ; En ço est pruvance veraie.
Nent pur vus, mes pur mei le fîst: Mais ses bamiltez, k*il ainz prist,
E se alcun de vus ço defent, 120 Duinst s*engendreùre deffist,
92 (Si] vienge tost au jugement Ne li suni restoré a dreit,
Nostre dame sainte Marie : Fors un petit pertuis estreit.
De la venir ne faudrum mie. » Par unt il sa date rendi,
Cil s'en alerent, mes dolent, 124 Si cume nature cunsenti.
96 A la dame pur jugement. Cist fu fet muine en Tabeie
Quant la chose ert tute mustrée Qu el chef avant numai Clunnie,
De ça, de la, en la assenblée E vesqui puis mult lungement.
Devant la dame e sun cuvent, 128 E servi Deu mult honement,
100 Li fel l'encuserent forment. Qui nus duinst sun ser\'ise faire,
La dame, pleine de pité, Que malfé ne nus puise atraire.
Ad dune l'aime dereichné E que part n'ait en nos uveraines.
Par tel fait et en tel manière 1 32 E délivrés seiun de paincs !
9. The Priest who knew only onc Mass. For the Latin text
see Pezy cap. 9.
Un prestres ert messe chantant; En l'onur Deu, ki nus rent vie,
Parroisse out église hantar.t. E en l'onur sainte Marie ;
Mult se cuntint honestemcnt, Ço fud Sahu\ sancta parens(î, 8 %•<> h)
4 E vesqui gloriusement ; 1 2 Icele chanta il tuz tens ;
Mes gueres ne soui de letreure, Autre ne sout, autre n'aprist;
Kar en ço n'out mise sa cure. De bon quor *ccle suie dist.
Une messe sout sulemcnt ; Li clerc, ki la messe oïrent,
8 Celc chanta il bonement 16 Suvent le pruveirc eschamirent.
^^^^r 412 i.-A, 1
HERBERT ^^^^^^^B
^^^^^^H E â l'cveskc &*éti
56 Eiiveilla sei, saîlî del lît^ ^^^H
^^^^^^H De tL^I fait forment ' T^ncu^rent.
Puis le prov eîre fïst mander, ^^^H
^^^^^^H U cveske en oui grant ire,
Sun cnruz li volt parduner. ^^^^|
^^^^^^H 20 De ^0 k'il altre messe ne soit dire,
Li prestres devint dehaitet. ^^^H
^^^^^^B E fîst [e lost a
60 Li eveskes chiet a ses ptet, ^^^H
^^^^^^H La vérité en veut
E si [li] demande pardun ^^^H
^^^^^^H Demanda lui, se vnm esEeit
De) dit de la defensiun^ ^^^^|
^^^^^^H 24 De la messe ke îssî discit.
Que dit lî out par est u tic ; ^^^H
^^^^^^H Li preâcre li dÎ5t,
64 Pitusement merci li crïe. ^^^H
^^^^^^H Kc autre mes&e unkes n'aprist,
De la dame tut li recunte« ^H
^^^^^^H Ke autre chanter ne saveit
Cnni ek > 11 prcmist mort et huntc. ^|
^^^^^^H 3 S Fors celé suie ke diseit.
E li prcstre pardun li âst ^^Ê
^^^^^^^H U eveskes en out irur,
68 Del ^mki ke a tort li dist. ^^^|
^^^^^^H Si J apela fet trattur
Puis li eu manda bonement ^^^H
^^^^^^H E snsduître de Crestiens,
Chanter h messe a sun talent ^^^^|
^^^^^^^H 31 Fans pruvcîr^, povrcs de sens;
K'iï soit de b damechamier. ^^^H
^^^^^^H Tut li defendi sun mestier.
72 Dist li : « Ore vus vol cumandier ^H
^^^^^^H E cil se mist repeirer.
Kc autre messe ne chantez ^^^^|
^^^^^^^H Revint a sa niaisun dolent.
Fors celé suli^ ke save^ . ■ ^^^H
^^^^^^^r 16 Plainst sei a Dcn pituscmcnt,
E soit durement mal ^ù ^^^H
^^^^^^K H cumencha mult a plurer
76 As clers ki t orent encusé. ^^^H
^^^^^^H De ^0 ke ne pout mes chanter.
SI i ania puis par bon talent, ^^^^^
^^^^^^^H La nuit puis k'il tî defendi,
E honura le durement ^^^H
^^^^^^^H 40 La u II eveskes dormi,
Pur amur la dame chère i ^^^|
^^^^^^H Vint k dame i^m tnensiun^c,
80 L ama pyis [en] meinte manercf, ^H
^^^^^^H H pria mutt od lui par snnge.
Bien le paisset, bel le vcsti, ^^^H
^^^^^^^H Si li dtst alkes fièrement
Si lun^ement cum il vcsqui. ^^^H
^^^^^^H 44 ff Tu as err^ mult folement.
Tui si set nostne cherc dame ^^^H
^^^^^^H Cument osas tu currucer (L 9 r^)
84 Défendre de hunte ei de hlasnie ^^^B
^^^^^^^H Mtm proveîre, mnn chanceler,
ro ir) ^^M
^^^^^^^H E le servise Deu défendre.
Cd(sj ki la servent bonemeni, ^^^M
^^^^^^^H 48 £ le mien, u il sent entendre ?
V ki rien funi de sun talent, ^^^H
^^^^^^H Ccncs, se tu ptus tost ne fais
Cume ele fis! sun chapelain^ ^^^H
^^^^^^H K'il face ^un ^r% ise en pais,
88 Ki la servi de bone main, ^^^^|
^^^^^^^B Cum [il] unke^ miex le soit faire.
Ov£ nus duinst Deu, li veir sau* ^^^^|
^^^^^pV 12 Tu en avras hunte et cuntraire,
[vere, ^^H
^^^^m E muTTàs el trcntisme jur
Fur amur de sa chère ment ^^^H
^^^^1 A ctmitiveté ' et a dulur. »
hele e&sanple a cesti prendre, ^^^H
^^^^B^ E ti eveskes, ki ço vit,
91 Ku nos aimes H pussum rendn^l ^H
^^^^^H 1. Mt. Cormérc. » a, Rmd chaîtivesce or duitivter. — ;. Supprm ék, ^^H
ADGARS MARY-LEGENDS
4Ï3
10. Two Brothers at Rome. For the Latin text see Pez,
cap. 10.
En Rume, la riche cité,
Mistrent dui frère a grant feirté :
Li uns esteit cuintc et vailanz
4 E nobles mult et enpemanz ;
Icist esteit Pirres numé,
Archediacre en la cité,
Del mustier del barun saint Perre.
8 Avers esteit de grant manière ;
Li autres ert Estieunes clamé,
Juges de meimes la cité.
Suvent prist duns pur jugemcnz,
12 Par unt il destruist plusurs genz ;
Fais jugemenz fist pur luiers,
Les dreiz torz, les torz drciturers.
Mult par out la lange vendable,
i6 Kar le dreit fist tenir a fable.
De riglise de saint Lorenz
Toli treis maisuns, li dolenz ;
De un'eglise de saint Anneis
20 Toli il un curteis maneis.
Tut iço fist il a grant ton.
A vint ke sis frère fu mort,
E fu tost en peines mené
24 Pur sa dulerusc averté.
En peines fu de purgatoire.
Cum cil ki Deu out en mémoire,
Ses malfez deûst espenir
28 E le règne Dcu dcser\'ir.
Li juges, ke est Estieunes dit,
Murut après, sans lung respit,
E fu tost cumc chaitif jugé (f. 9
fo c)
32 Pur les granz mais k*ot cnginnc.
Qpant saint Lorens lu vit mener
Par desdein le prist a esguarder
E mult cruelement Tenviiï
36 Pur les maisuns, k*enz li toli,
Treis feiz le feri cruelement,
Estreinst sun braz durement,
Mult le turmenta, et si Testreinst
40 Ke cil de la dulur s*en plenst.
Sainte Anneis od sa cumpainie
L'a despit pur sa felunie,
K'einz li out feit, tant cum vesqui,
44 Del curtil k*a tort li toli
Idunc [fist] li omnipotent
De cel chaitif tel jugement :
« Pur ço ke cest chaitif toli
48 L*aveir a la gent sanz merci,
E prist aveir et duns suvent
Pur juger felunessement,
A nient tuma la vérité ;
52 Pur ço est dreit k'il seit damné,
Od Juda seit, le traïtur.
Si ke jamais ne veie jur. »
Oir poez sentence dure
56 A tuz ki as plaiz mettent grant
[cure ;
Ci puent li jugcur aprendre
Ki tant aiment as plaiz entendre ;
Ci puent oir lur luier,
60 K'il avrunt pur les plaiz traiter,
Pur haut parier et encuper,
Par faire tort et dreit celer.
Ohi ! quel luier il avrunt,
64 Quant del siècle s'en partirunt !
Pur lur grant sens sufferunt peine,
K'il nel mistrent en bone uvraine,
etc. as in Eg , ii- 1, l. 1 (= 1. 66 hcre) et
sec, Sce Ncuhaus, Adgar's Marienl^, p. 4.
14. Jew of Bourges (=Eg., n° 5). Only the first 29 Unes
remain in Eg. : they hâve been printed by Neuhaus, p. 19,
and by Wolter, Der liuienknabe (Halle, 1879, n« 2 of H.
414 J.-A. 1 _^
HERBERT ^^H
Suchier^s Bibliotlieoi Normannica), p* 78, The Latin version ^^H
on whkh this is based is that of Pez, cap. 51 (Wolter, p. 44); ^M
not the longer version of Cleop* C, x», which was prioietl by ^M
Wolter, p 47, and by Neuhaus, Die lai. Vorlagen ^u dm all/r. ^M
Adgafschen Marmdeg. (Heilbronn, n. d. [18S6]), p* 10, ^^^Ê
Eîi Biiurre, une cité, (f. 1 1 vo)
C un lent il vint al mustier, ^^^H
A vint un fait muit rcQurné,
j6 E cuni pui«i vint a racumengicr, ^H
Que uns niôînes cumer solcit,
Cume od tes enfan?. od receu ^^^^^
4 Qui Je c:iuse mornes cstciL
Le glorîus cors de Jesu. ^^^H
Cil motnes ert Peires nutner ;
K quant sis pères Tentendi, ^^^H
Dt bom vie fud ' locï.
4u Par curui: T enfant envaî ; ^^^H
Bien djsi ke il en la cité fud.
Ne sout ke faire ne que dlrv, ^^^H
8 E kc iJ ' i vit ceste vcrtuil.
Tant ot el quor curu^. et Ire ; ^^^H
Al juT de Pa-sclies vt;irement
Reguarda entur sei adt;s, ^^^H
Avini niuli gloriusemeni
44 E vit un fur ardant bien près ; ^^^H
Kc uifani a crtstïçn î ilerçni
Aneirt: i çurut od Tcnfant, ^^^^|
Il AI mustier» et od eb mènerait
Sil geta en cel ré ard^i. ^^^H
Un enfïuit, fiz a un j[ujeti.
Si tost cume ert eni'. el fur mis. ^^^H
Kl fokment rcclaiment Deu*
48 Vint la dame de parais, ^^^^|
t)d dîi îîoli aprciidrL- kttrure.
Sainte Marie, et aparut, ^^^^|
16 Latin, cbreu ; par enveiseurc
De tu;^ mab Tenfant sucurut, ^^^H
Cil enfcâ vint tm d mustier
Sil guari del bx et del ardur, ^^^H
Od les enfant t pur envciser*
^2 Que pulnt ni senti de chaïur* ^^^H
Avint puis ke tu te h gent
Itclc sembla al enfant ^^^^|
20 Vindrent a racymungemem,
Cume celé ke il ont vcùe avani. ^^^H
E reçurent le cors Dcu ;
L) mère al enfant s*escriad. ^H
Si fist II cnfes al jueu-
$6 Had ^es main^, raifani clama, ^H
Sur Tauter tstdl un ymagv
Cume custume eii de nicrcs pieu ^H
24 De sainte Marie en parage ;
Un veil li fu sur le chef mi^.
Seient crestieneat u [[ujeues, ^^^H
Al hi al Jtujcu en avis
Quant veient mesa vente rien ^^^H
Que «te cum vive moilier
60 A cels ki eles volent biett, ^^^H
28 Aida^ at prestre a cuoiengier ;
£ surketut a lur enfant, ^^^H
(L u v^b)
Dutic guaimentent et fiint cri grant. ^H
A chah un dtma < de la gcrîi *
Si fist la mère a ceste enfant ; ^^^H
De cel saint acumungement.
64 Guaîmenta et plura tant ^^^^|
Rêvent li enfes a maisun.
Ke eu muU poi d'ure out ascmbléc ^^^H
p Sis pea-s le met a riîsun,
Tute la gent de la cuntnêe (f ♦ 1 1 v« û) ^^^H
U U csteit tant demurê,
Cresticns, Gîeus, ensement ; ^^^|
^p
£ il enfes ad dune cimté
68 Muk tost i ascnbla grani gent ^^^H
l\ %; nmlt- — 2. Eg. k*iL— j. Eg. enfant ÇTvstien» — 4- %- aidâst. — ^|
^^^^^^^k_v
J. %. dunast* — 6. £f . krmks off bere.
1
ADGARS MARY-LEGENDS 415
Al fur ardant et acur[ur]ent Li crcstïen ki ço oïrcnt
E Tenfisuit vif dune aparçurcnt, 88 A la dame grâces rendirent.
E sanz mal, tut sein et heité, La gent ver le gïu se pristrent ;
72 Si ke de feu n'esteit tuchié. De li malfere s'entremistrent,
Del fur le pristrent, sil menèrent, Ço fu au père al enfant :
£ ducement li demandèrent 92 Geterent le el fur ardant.
Cument il fust guari itant Si tost cum il fu mis enz,
76 El fur entre le feu ardant. Tant tost ert ars li dolenz.
E il lur dist : « Duce cuvine, Quant ço ert veu en Tasenblée
Icele honurable reïgne, 96 Tuit ensemble en la cuntrée
Qui ert sur l'autel el mustier, Crestïen, j[u]eu, ensement
80 Qpi aida al prestrc a cumengier, Servirent Deu omnipotent
Ki nus duna le cors Jesu, E sa mère la dame sainte,
Ele m'aida ore od grant vertu ; 100 Ki fist et fait merveilles meinte.
Si me aida celé boneurée Ore nus seit la duce reïne
84 Ke odur ne senti de fumée, De périls, de pecchez mescine.
Feu ne chalur neis ni senti. Ki est et mère et meschine!
Ne del chief [nul] peil ne perdi. »
15. Milk : 23 plants in flower (= Eg., n^ 6). The first
eight lines are :
Ja avint en une cuntrée, (f. 12 r») De tut sun quor i entendi.
Ke Europe est apeléc, Mult les servi, matin et seir,.
Ke uns ders i fu mult renumé, De bon quor et de bon vuleir (=:
De grant religiun loé. Eg. 1. i).
Deu et sa mère mult servi ;
APPENDIX
THE ABBESS DELIVERED BY THE VIRGIN
In Egerton 612, Adgar's Mary-legends end with an épilogue,
a dedication to Gregory, and a prayer to thc Virgin. This last
is immediately foUowed by a copy of the Romance of Pope
Gregory (a well-known poem, and assuredly not by Adgar);
then cornes the miracle of the Abbess delivered by the Virgin,
like the rest in octosyllabics — the whole ms. being conti-
nuous and in thc same hand. In the épilogue Adgar states
explicitly that he has come to thc end of his cxcmplar, and
416 J.-A. HERBERT
ihat hc does not iiitend to go buyond it* So that there is a
strong presumption against his authorshipof the Ahbess-srory,
But this presumptioii does nut amount to conclusLvc pu->of ;
for there seems to be room for doubt (see abovç, p, 399)
wh^ther the taies in Eg- are in the urdcr in which Adgar
himself arranged them, and in the re-arrangement (suppusing
that there has beeo any) une of the talcs may conccivably bave
become altogether detached from the rest, and been silently
added by the copyist when he discovered his omission* On thîs
supposition the opening Une (« De plusurs nunains cunté ai »)
woutd suggest that the proper place for the taie was immedia-
tely after n** 40, « The Nun who saw the world »,
The story of the Virgin *s intervention on bchalf of the
erring abbess is one of the most popular of ail the Mary-
legends, and practically ail the great Latin collections încludc
ît. But in its présent form it bas certain features not found in
the ordinary versions — the most noteworthy of thèse bcing
the betrayal of the abbess by the nun in whom she has con5dcd.
The sanie features appear in Royal 20 B. xiv, a 14''' cent,
collection in Anglo-French verse, analogous in many respects
to Adgar's collection \ and translated from a compilation in
Latin which must bave been ideniical (except for two or three
stories) with the Oxford ms. Balliol 240. The Toulouse
ms, 4S2, which is very closely atlîed with Qx(. (see Mussaîîa
n, 17-3 0* ^^^^ which includes the original Litin of ail the
Mary-legends that were undoiibtedly versified by Adgar, con-
tains the same text as OxL for the Abbess-story. And this lext,
which is printed below from Royal 6 B. xiv % is clearly the
original of the Eg. version. It seems thereforc probable enough,
a priori^ that it was in the book of 0 Mestre Albri » and was
translated by Adgar, But it is only fair to state ihai an indm-
trious philologist^ has decided against Adgar*s authurship ot
this poem, after a carefu! comparison of ils language with that
of ihe other Mary -legends in 1^.
t* S^ Mussafia, IV. jj-îS, î4-So, 84-i ; WarJ, II, 718-734,
2* For a dc^ription ofthis nis., see Ward, 11^ 657-643.
î. Rolfs, * Uk Adgar legend en a, m Rom. fiwuh., l, 179336; but ^*c
Romania, XII, 132.
ADGAR^S MARY-LEGENDS ^ÎJ
For the ordinary versîonj seePez, cap. $6; Vinc, de Beauvais,
SpiC. HisL, VU, 86; Hcmlt, Prompt. Exempl. (éd. 1728),
n** 659; T. Wright, Laîin Stories (Percy Soc^ 1843), n'' 38;
etc»
De * abhûinsû instinciu diaboU mpr^mia^ et in dm partus per samiam
nmlnm miser mrdif likrata.
S^Tictimonialis quedam fuh abbatbsa m quodam monasterio, que cunciis
slbi subjcais sororibus ttAi odiosa, quia sine discretione in sacro ordine
extitit fervida ; quod ncquaquam stbi prospère cessit. Kara instinctu i|î,Tbolî
etpropria fragilitite decepu concepiî- Unde mox mestissima elTecta, meditari
cepîlcuîrevclaret sdcreu sua. Excogiiato iiaque ingenb, quatidam ex soro-
ribus prcpositam constiiuit omiil monasterio, paulalimque eam sibi famjlia-
rem faciens, demum totius sccreu 5m conscîam ascjvit. O nusquam tuta
tides î Ips*, que debuisstt secretum celare, revelavit ; facmmque est per eam
notum ârdiidiacono, pcr archidiaconum episcopo. Sur^çit exinde maxîma
commotio. Omnibus fit sermo in commune, iibbatissam îliani deponi * vcl
ctîam ardere debere. Quid amplîus? Venit dies partus, et ecce in capitulum,
însîdîts ducius, cum omnibus dericis adest epis<:opus, Produdtur cLimorc
sororum tam abhoniinabile crimen in médium* Vîderes quosdam aures
ôbturare, alios ne înter Christian os abbatbsa veniat judrcare, ilîos deridere,
hos * probrare, omnes insimul eam contemptui habere. Quid agerct intcr
talia abbâtissa ? Non est opus verbis edicere quant us dolor, iimor ei t rem or
iimni parîter illius in corde. Spe itaque anima ta, spc, înquam, que soïa
hominem nec in morte derelinquit, confugit viriliterad mitissimamet miseri-
cordissimiim dominam nostram sanctani Mariani. Ad quam enim, nisi ad
Uîam? Ad, illam, dico, que omnibus ad se confugientibus in necessitate
prebet auxilium» que est omnium peccatorutn refugium, oranîumque Chns^
tianorum solatium ? Ad illam confugit abbatissa in tania necessitate^ ante
aïure ilHus orans et plorans, multoque cum gcmitu^ singuliu et lacrimis
vota exaggerans. Nec dcfuit mater mîsericordie* Nam,cum pre nimia tnstida
cordis akus sopor abbatisse irrepsisset, adest domina nostra sancia Maria,
pbrum pïissima, angelorum obsequio comitata ; primo ream increpans, post
cûnfcssionem vero et voium illius piis visceribus eandetu bénigne consolans.
Cumque abbatissii in somno, ut sibi visum est et veruni fuit, infantem
parcret, ac tania quasi obstetrice astante, jussit mittssima domina angelids
spiriïibus ut puerum genituni ad quandam animam sibi dilectam deportarent,
t:tquatînus illum ad serviciuni suum diligentisstmç enuCriret ex sua parte
saïutîindo juberetur; quod et factum est, Igitur m ter ista opéra miscricordie
tit in capitule masimus tumullus miserie. Mittuntur ab episcopo clericî, ut
I. Ms, Royal 6 B. XIV, f. 87.— 2. Mî. depontre. — 3, Ms. hoc.
mmXXXÏi
27
4l8 J,-A, IIËHB£IIT
cuni dedecorc* abbatîssâm ad judicium âdduoint* Cum vûid cssict Adhibîti,
direxii epîscopus legdîos tit tilerym cjtis dilîgcmîssînïc considtnircnt ; qui
nallum hujusce rd sîgnuni omnitm invenietiies, inirantits r*;numuvi'ruot*
Destiiiamur alîi ei silît divcrsi ordinis ce scxm, amm ex [ac]cus*intibu5, qui
idem mirati rcporunt. Ad ultimum jp<rgn ipse inçrtîdulus episcopus, cl
vîdcûs eam dacreni et sanaui ei omnino ab omni pondère ïibcratn, fellt
Ciommotus jussii ignem copiosum acccndi, et in illum accusaîones et accusa*
irices abbatiss^; précipita ru Hec ut illj audïvit, ad pudcs episcopi se prosier-
nens omneni rei serîcm ordiiialim c'narravit. Admiratur cpiscopus supra qujm
dici pptest, henignissimamtiui^ Dei genicnceni cuni otmtiibas alih cxctïsa voce
colEaudaïiSj cxtimplo cum cterids ad personam pergit, puerumque sicui
prcdictum esc a s^incta Maria coninittidaTuni mveuîf . Qui ^eptcni anoi» intbi
tiutritus« postea in caria cpiscopt studiosissinie cxiîtit cdcxrius. Dcfyticta
auicm ep!SCOj>o, m catlicdruni pontificalem ho non lî ce est sullimatus, obi
sanciissimani vitam ad fiiiein u^ue perduxit, Per umnîa et ifi omnibus bcûc-
dicius Dcus. Aiuc».
Dr /\i/¥.Wi«<vml("V(Eg, 6il, f. 961^) l\tr k dame deUvtrêi ,
De plusun* tiuitaini cunté sa \
D*utic abc[ejs5t; vus dirai ,
Cument la danic de pitié
4 La delivcra puis sun pcchi<^i (ft^é
r* h)
La sainte dame boiienierkt
Ses vertus niu^ïre a tute gcnt ;
A \ià\i^ a ba^* ki unt mesdçr,
8 Rst sa piiic retuï j>renïicr*
Cco senti Eres bitr une dame
Ki en alKssc di: grani fat ne.
Hn ordre ert de tel fervur
12 Ke de ses nunaîns oui haùr,
Pur cfio que sanx discreHun
Les encrepa e par tençim.
E ceo n'ist pas de bon ctirage,
16 Ainj£[c3t) fait d'oi^guil e d'uliragc»
Kar ki sujî sei vclt guvemer
Pîusurs e bien endoctriner,
Li covendra clianger &ovent
20 Manière de dtasticment :
Les ynx deii [om] par bel atralre,
A alcuns grant (icstrcscc faîrcj
Ke lux suUmc lur qualité*
24 A b parlin scient salveî»
Ceste abbes^e e^teii trop Jkrc,
M îurvea en icL triAniere
Ke par sa propre fraillctè
28 Perdi de son cors chaslee.
En ses delîjt si se cuntitit {f, 96 1
Ke pur veir enceinte devint*
Mais en effrei de Taventure
p Ert sis penser^ï de grant cure ;
Ne soit quel cunscil avrcit,
Del les cunï se dcî néant,
Mult crient dcl mund la hnncvsun;
î6 Plus crient nature craisun,
Ki la dcstreineni a ^u*^^*^^
Cea qu*en sei ^ent fructifier.
De ceo ftst ele Sijgeinent,
40 Ke [ki] dcsturbc ;i escient
Naturele engendr[è]uric.
Vers Deu niespreni ulirc meaure.
G tant péclnt ot dcî dcîiturbcr,
44 Grcîgnur. l*engcndrure tuer
E a Dcu tolir sa faiture^
Pur ki sotFn passiun dure ;
Maint est en pechlé engendré,
ADGARS MARY-
48 Ki puis demeine grant scinté, 88
Dunt en escrit plusurs trovom,
E en noz tens alcuns veûm.
Geste abefejsse s'amesure
52 De trop doleir pur sa porture. 92
Une des nunains prist a sei,
E li mustra tut en secrci (f. g6v°b)
Puis li bailla la seignurie
56 De.sei e de sa abbeïe, 96
K*ele ait pleine poesté
A parfaire sa volenté.
Qpide par tant sei délivrer,
60 Qpant tens vendra d'enfanter. 100
Mais ki seit debonerté,
Mustrer a altre en poesté,
Sovent faldra de cumpaignie
64 Qpant plus avreit mestir d'aïc. 104
A ceste daroe avint issi ;
Kar celé, en ki suie merci
Sei tute cumandé aveit,
68 La volt mettre en grevus plait.
D*eus tant dit mot prové adès,
Ki dîst Nusqtuitn tuiafides.
Eelment * ert ore nuls trové
72 Ke plus n*aimt sei que Icalté ;
Ja n'ait tant pramis ne bel dit
Ke pur un petit de purfit
Ne turt Sun queor a ceo haïr
76 Ke ainz désira a guarantir.
Ceste nunain li fist issi,
Ke sa dame tost descoveri
De ceo dunt ele en bone fei (f. 97
ro)
So Mustré li aveit en secrei. 1 20
La nunain sa dame enpeira
Vers uns, vers altres, e quida
Ke, si sa dame fust hunie,
^4 A li remeindreit la baillie. 124
A l'evesque dit la novcle
De rabe[e]sse, e la querele ;
E il volt saveir, sanz sujor,
108
112
116
LEGHNDS 419
S'il out eu verai cuntor,
Ceste abe[e]sse est anguissuse
De son péril, et poeruse.
Par certeins signes voit très bien
Qu'a l'evesque n'est celé rien.
De l'aventure, endreit de sei,
Est sis queors en grant efFrei.
N'ad ore ami, ne neis amie ,
De ki espeire aveir aïe.
Pur nient de cumfort pensereit,
Kar riens el mund ne li valdreit.
A la parfin prent a penser
De celé, ki est bone sanz pcr,
Ki est refui a pécheurs,
E de tuz mais verai sueurs.
A celé sovent merci crie,
Ke el siècle no seit hunie. (f. 97
r^ b)
Od lermes, od gémissement.
Requiert la dame bonement.
En li suie est sa Bance ;
En altre rien n'at espérance.
Son jor aparceit trop haster,
Ke par dreit enfant deit aver.
E ses nunains a grant espleit
Très bienguaitent cel ternie dreii,
E dune volent faire venir
Le dergié, tut pur li hunir.
Qpei vus ireie jo plus cuntant ?
Maimes li evesque vint bâtant
Od tut le mielz de l'evesquié,
Ke rabe[e]sse seit jugié.
Dreit lendemain, sanz targerplus,
Frunt jugement de H pilus.
Ki l'abeisse dune veïst
Iceo plaindre dunt ainz joîst,
Cunter pureit de grant dolur
K'ele démena sanz sujor.
Ainz out de plaindre grant matire.
Ore voldreit mult mielz eslire
Ke [Dex?] li dunast bel mûrir,
I. Rfiid relment?
420 J*-A
11 S E par sa mort sua docl ^ntr,
£ ncpur^uant pas ne se ubiie
De la dame s.unte Marie;
Devant sun alter vait piurcr
I ja E de SCS mais merci crier,
Tani depriê U sue aîc,
Tant se repcnt de sa folk,
Kc h diime pi i use ment
136 Alegîcr volt sùti grief tonnent.
L'abeess€ est anguîssuse
De requcre la glorîiise*
Tant gient e plurc a Icisicr»
140 Ke sa' 11 covint [ajdortnir.
En dormant lî est a vis
Ke h dame de parais,
Od sa très bcle cumpaîgnîe,
144 Lui vint mustrer la sue aïe.
Primes la prist mut a bîasnier,
Ke foi délit volcit liatiKT
La u essample de nette
14g A tu^ deveit a ver mustré ;
E ncparquant» pur cco qu*en lui
Aore aveit mis sun rcfui,
A ccste Icii de huneisan
i$2 La voltguaHr par td raisun
Ke jamais p1u$ de tel foIic
Ne eust teclïe ne cunipaignie.
(f. 97 >^" '0-
L'abe[ejsse, tut en dormant,
156 G rit: bien [ijcest co venant,
E praiiKH que od la sue aie
Démener voldra ncciL* vie.
Atant comcnce a travail lier ;
1 60 De son enfant, dunr out mc^iier,
Ke ain^ le jor délivré fust,
Kc li cvesque ne la * seûst
E la d^me, del ciel reînc,
164 Ri merc Dcu est c mcschine,
iisi pur vit sa dcliverancc
HERBERT
Ke guaircs n*out grîevc pesance ;
E puis, quant li enfant fud né^
16S Si Tâd h dame coniandc
A dous de son très bel covent,
Qu^iî le portent privecment
A une dame del pals,
172 Ki en seinté vesqui tut dis,
E li tomandent de s.i pan
Ke l'enfant nurisc e gan
Dcsque ïl ail sen c scient
176 De H servir dévotement .
Selunc ceo, quVIe 01 conuindé.
Si est Temfant tant tost porté*
La dame aiant s en dqMim, (t.
180 E Tabcssc s*en espcri
De son sunge si dt'ït table,
Ke ja senti bien veir provablc.
Par cco ke est Icgiere c seine,
1^4 De mais alegice de peine.
Si ne seït nul si mesc néant
De cest mîrack M e gnint,
Ke cek, ki ad sii^ Deu poeir
lëë De faire trestui sun voteîr.
Ne pcust si grant veriii mustrer^
En ceo que ci me oci cuiiter*
Ore est haitic cest*abessc,
192 Ë ses niinainsaprès la messe
L'cves<|uc od SCS clcrs funt venir
En lur cliapitte, pur oîr
Cum[eJ Tabesse s^est portée»
196 E cum les ad deshonurèc»;
Muît la déjugent, e bien plus,
Ke de mesfaîre eûst en us»
E tant que plusurs en ruvii\:nî
200 De cco k* îloec cuuter otrenu
Atkuns dicnt ke digneté
Perdre deveît tut son eé;
E alkuns« k' en rdligiun
I RaU si. — 2, Rfosi k. — i- The rhymc is in contradtciion witti ihc
grammar.
(
ADGARS MARY-LEGENDS
204 Demuref ne pot par reisun. (f. 98
ro^)
Li evesque très bien oï
Cornent chascune s*esjo!
Del deshonur, ke si avint
208 A rabe[e]sse kis maintint ;
Comanda as clers qu'il alassent
E de son estât espiassent,
Si sun forÊiit si apparust
212 K*en sun ventre emfiant eûst.
Gels, si cuni lur est comandé,
L*unt asez veu e espié ;
Ne veient en li nul semblant
216 Ke seit grevée d'erofant;
Ainz repalrent e unt mustré
Q)i*en la dame n'unt rien trové
Ke seit provance de folie,
220 Ne que peust tumer a vilanie.
Puis vunt altres a espleit,
E meimes ceo dient tut dreit.
E li evesque dune leva,
224 E rabe[e]sse araisuna ;
Ne soit par riens aparceveir
Ke par dreit dust emfant aveir
421
A tort estre deshonurées
E de lur pleinte trop blasmées,
As piez Tevesque chiet errant,
244 Merci li crie en plurant,
E cunte tutes*aventure,
Cument la dame, virge pure,
Li ad esté defensiun
248 Encuntre aperte huneisun,
E cornent ele sun enfant
A nurrir bailla meintenant.
Li evesque ariere enquist
252 De cel emfant, se vcirdeîst;
E fud iloec Temfant porté,
E quant que ele dist a veir prové.
(f.98vo^)
Dune veîssez communément
256 Uns e altres pitusement
Plurer de joie e de tendror,
E mercier lur Creator
E la dame sainte Marie
260 Ki as soens fait itel a!e.
E li evesque ad comandé
A rabbe[e]sse de bon gré
Ke se peine en sa maisun
En son ventre, ne neis semblant 264 Garder selunc religiun ;
228 Ke foie fust ne unt ne quant.
A ceo blasmentmult les nunains
(f.98vo).
Ke par signes issi certeins
Lur dame pristrent a enculper
232 E faillirent en ceo prover.
Errant unt fait un jugement
Ke tel peine e tel turment
Sufirir covendra as nunains
236 Cum freit lur dame, e nient mains.
Se sur li eussent veir prové
Ceo qu'a Tevesque eurent mustré.
Cum Tabeesse ceo veeit,
240 Ke ses nuneins coveneit
Kar sur celé ki Tad guarie,
De li ne velt aveir mestrie.
Mais Tenfant [en] prist a garder
268 E sulunc Deu endoctriner.
Gl par tens muli pruz devin[t],
E si seintement se cuntint
Ke, quant Tevesque dévia,
272 Le poeple en sun liu guverna;
E ama Deu e sa justise,
E mult valut a sainte iglise.
Issi set la sainte reïne
276 Mustrer as suens sa merci fine.
Suvent quant unt grcinur mester
Les fait tut quites d'eneumbrer.
J. A. Hfrbert.
I.A MESNIE HELLEQUÎN
ET LE COMTE ERNHQUTN DE BOULOGNE
Dans la dernière livraison de la Jïfwwiïffiâ^ M* Kitiredge a
montré que M. G. Raynaud s'était mépris' en croyant retrou-
ver dans un passage de Walttr Scott une courte analyse d'un
poëine perdu sur Hernequinj comte de Boulogne, Dans son
compte rendu du mémoire de M. Raynaud, M, G. Paris ' avait
fait de prudentes réserves sur l'identification d'Hellequin, chef
de la fantastique Memit avec un comte de Boulogne, Herne-
quiu» tué à Saucourt en 880, en combattant les Normands. Le
regrette maître faisait observer, en outre, que rexistence de ce
I>ersonnage au ix*" siècle était contestable, car aucun document
contemporain n'en faisait mention. Néanmoins, il concluait en
ces termes : *' Malgré tout il reste comme assuré des recherches
de M. Raynaud^ Texistence d*une chanson de geste sur le
comte Hmlliquin et comme vraisemblable le fait que cette chan-
son expliquait, comme le rapporte Walter Scott, le nom de
Mesnic Hdkquin, î> Cette dernière phrase ne peut plus natu-
rellement être maintenue après la découverte de la source de
W. Scott faite par M» Kittredge, Faudrait-il aller plus loin eï
dénier toute réalité au comte Hernequin ? Je ne le crois pas. Ce
personnage est certainement historique, mais pour des raisons
1. Avril 190^ p^ 5ûî-}0é,
2. Lï nmnk HeUtquiîK — IK Upùhm perdu au comte Hernequin ^âam fAndn
LA « MESNIE HELLEaUlN » 423
toyt autres que celles qu'a alléguées M, Raynaud, et» puUque
l'article de M. Kittredge redoune de ractualité à la question de
la Mtsnie Hdlequin^ je demanderai à la Romama d'accueillir
tin mémoire sur les comtes légendaires de Boulogne, mémoire
rédigé il y a cinq ou six ans déjà et détache d*un assez
volumineux travail manuscrit sur les anciennes dynasties féo-
dales de la France. J*espère qu'il contribuera à débrouiSler le
problème compliqué des rapports du comte de Boulogne et
du chef de la Mesnk.
Lorsqu'on ouvre VArt de vérifier les dates et les histoires
locales du Boulonnais et du Nord de la France, on rencontre
une suite de comtes qui portent les noms de Guillaume \
Hernequin, Régnier^ Ernicule, Gui à la Barbe blanche, Bau-
douin* Une particularité singulière c'est qu'il est impossible de
trouver la moindre allusion à ces personnages dans les docu-
ments contemporains des ix* et x*" siècles. Les textes qui les
signalent sont seulement au nombre de deux : i" la Chronique
de Gîdnes etd'Ardres^ écrite peu après 1303 par le curé d'Ardres,
Lambert*; 2" une Gétiéalogie des comtes de Boulogne composée
entre 1279 et 1314^ Nous ne traiterons ici que des comtes
Ernicule et Hernequin,
I. Ernietile. — Il n'est connu^ que par Lambert d'Ardres.
Celui-ci rapporte incidemment qu'Ardolphe, seigneur de
1, J'âî traité du premier, Gtiilbume dit de Ponticu, en 1890, dans un
petit Arikk, k premier de ceux auxquels h Romama (XIX» 390-293) a
bien voulu accorder P hospitalité.
2. Éditée par le M'* de Godefroy -Me nil glaise. PariSj 1855, în-8.
5. Elle est reproduite dans les Chroniques anglo-mrmamks de Francisque
Michel^ III (1840), p. XIII sq>; Paulin Paris, lf$ manuscrits ftançôis di la
BihJhtyqHf du rûi\ 111 (1840), p. 201-208. Les notes du M^» de Fortia (ihid,,
p. 209-211) sont de nulle valeur. Le dernier comte cité est Robert « qui
encore est ». Il s'agit de Robert d'Auvergne, comte de Boulogne de 1279 â
1514. Celte généalogie se retrouve sous forme latine dans le ms, 184 de la
bibljothèque de la ville d*Arras. C'est d*après ce ms. qu'ont été publiés
quelques fragments par André Duchesne» Hhioire de k maisùJi de Gaines,
Frmtves.p. î (Paris^ 1631, în-foL), reproduits dans les Hiiioriem de France,
XI t 146; et plu 5 complètement par Mone dans Anxei^et fnr Kunde der
ieuiuiMii Forint, i8jSt *""0Î* 14^-547- ^ ]^ ^*^ ^'^îs lequel du texte
btin ou du texte français est l'original et la chose n'a pas grande importance.
424 ^' "^
Guînes, dont il fait le fils d'un certain Sîfrid le Danois, épousa
Ma haut, fille du célèbre comte de Boulogne Ernicule : « Faino-
sissimi Boloniae comîtîs Ernîculi filîam Mathildem daxit uxo-
rem^ », Dans le système généalogique de Lambert, Ardolphe
est cousin d'ArnouI II, comte de Flandre (de 96s à 988) qui
lui donne Tinvestiture de la seigneurie de Guines. Ernicule,
beau-père d'ArdoIphe, aurait donc vécu dans la première moi-
tié et jusque vers le milieu du x' siècle. Lambert ajoute que
cet Ernicule est enseveli en Tabbaye de Samer-au-Bois, oîi il est
appelé Ernnldus^ en compagnie de deux de ses fils, Ernulfims
et Ensîachius^. Il s'élève avec violence contre ceux qui pré-
tendent qu^Ernicule a possédé non seulement Boulogne mais
Saint-Pol et Guînes et qu'il a partagé ces territoires entre ses
trois fils. Le curé d'Ardres a interrogé vainement témoins et
chroniques \ il n*a rien appris de pareil ti il oppose un autre
système à celui des (< Boulonnais ».
De ceci il faut seulement retenir que Lambert n'a pas pro-
duit à la légère son Ernicule et qu'on ne doit pas le repousser
de parti pris.
II. Herntqnin, — L'esprit de ta Gétiéxilogir de la fin dn
xni^ siècle est bien difFérent de celui de Lambert. Celui-ci a
tenté honnêtement, ou à peu prés, de faire oeuvre d'historien*
L'auteur de la Gétiéalogk, qui commence au roi Arthur et nous
énumère une foule de soi-disant comtes de Boulogne mérovin-
giens et carolingiens, suit les traces de Gaufrci de Monmouth,
Il prend çà et là des noms historiques ^ et brode autour d'eux
des récits dont son imagination de faussaire lui fournit la
matière. Disons de suite, parce que la chose ne vaut guère la
peine d'être discutée longuement, que Gui à k Barbe %
1. P, 39 et 41*
a. P. 4ï.
l^ Ainsi HelgAad^ comte de Pontîcu, Florent dont i] lait un comte de b
même région. Il y eut des Florem^ mais aux xi»? et xir* siècles et ils étaient
comtes de West frise.
4. P. Paris, III, 306. Gui est inconnu de Lamt>ert d'Ardres. Les àktMxH
sur ^es enfants sont chronologiquement inadnusi^ibtes. Gui I la Barbe d dû
être inventé pour expliquer la possfôsion par l'abbaye de Samer des terres
4*Estrchem, Fossemes, Li Haie-en-Campagnc, Ce monastère avait en effet
pcfdu toutes ses archiva lors des invasions normandes. Les titres les plus
LA « MESNm HELLEQÏJIN » 425
Régnier' et, sans doute» Baudouin*, n'ont pas plus de consis-
tauce que les Legiers, Eymes, Ronulphes^ etc., ^ de l'époque
mérovIngieuDe.
En ce qui touche Hernequin,on nous raconte sa lutte déses-
pérée et inutile contre les païeps conduits par Gormond et
Isembard. Uantenr a puisé k connaissance de ces derniers dans
une épopée bien connue^. Mais le personnage d'Hernequîn
n'y figure point* L'a-t-îl pris à quelque autre récit épique ou
est-ce décidément le fruit d'une invention personnelle?
Avant de répondre à cette question il est nécessaire de bien
nous rendre compte de ce que représente ce nom de Htrnequin.
La finale -AfVî indique de suite que nous sommes en présence d'un
diminutif, lequel est propre aux dialectes bas*allemands et aux
régions romanes adjacentes. Il ne commença à se répandre,
semble-t-il, qu'au x*^ siècle s, mais sa fortune fut rapide et très
grande, même dans les pays romans dn Nord où il fut employé
non seulement pour les noms de provenance germanique, mais
encore pour les mots d origine latine^'. Dans la région romano-
germanique du Boulenois et du Ternois un nom comme Her-
anciens actuellement consen'és ne remontem qu'au début du XI l^ siècle,
Voy. Haigneré, Dktîmnmrt du Fas-dt^Calais^ arronâisiement de Bottîognft
t. nr, p, 377-
K Régnier doit son cKistcnce à une k^gcnde éiyniologiquï. Nous o*cn
parlerons pas ici pour ne pas abuser de la patience des lecteurs de celte
revue. Disons seulement qu'il est nommé occasioimellement dans un ChHst-
mas mrol Éditîant (p. 53-61) racorni: par tin vieillard au comte £usCachc de
Guines pour Texliorter à être<i bénin ^ envers les siens et non « tortigoex »
(lire torii^'ttfx^), comme Renier, envers l'abbaye de Simier.
2, La Grnèiih^ie est encore seule à nous parler de ce Baudouin et de ses
enfants. Il provient sans doute d'une confusion avec Baudouin ÎV de Flandre
{988- 10 î s). VAti de vlfifitr Us ilaks fait gravement mourir eu 103^ ce pcr-
sonn.ige dont on ne suit rien et dont Texisteuce est fort douteuse.
j. Voy. P. Paris, l&c, dî.^ lîl, 201-202*
4. Voy. Romamâ.XXVU, 1898, 1-54.
S» Voy. le mémoire fondamental de Stark dans les Sii^un^ihetkhU de
rAcadémie de Vienne, t. LJI (1866), 540.
6* Aiiisi d.ins TArtois on trouve non seulement Hantuqtnn « Petit-Jetin *>
(Hancyn) dont le radical et le suffixe sont tous deux germaniques» mais
jtmîmquin avec radical roman. Cette formation est extrêmement répandue
dans cette région, et quand le début du mot subit, par surcroît, une aphè-
426 P. LOT
fieqtiin ne peut Jonc ctre qu'un terme familier, un (^ Kose-
name »-
Reste à retrouver la forme normale de ce nom. Je ne croîs
pas douteux qu*elle ne soit Arnou!^
Les deux gniphies Arnulfu^jci Ernuîfus sont usitées simulta-
nément \ Retranchons, par un procédé très répandu, la finale
d^ErnuI/us^ nous avons Erne ou Er/io. Cf, Roik de Rtuiolf^
Agilo de Egihlf, Guigo de Wigddus^ Ado de Adtdfus^ Agù de
AgHulfm, etc. * Par un procédé non moins usité, ce nom
abrégé peut maintenant prendre une finale à sens hypocoris-
tique. C'est ainsi que, sur territoire allemand, Lftdck, Uitke pro-
vient de Liudolf. Reinhe de Reinold^ Gerkr^ Gkrcke de Gewfd ou
Geru!f\ Les diminutifs en -km {-chitt) étant propres au bas-
allemand et aux régions romanes influencées par ce dialecte,
dans le Boulenois Erne donne régulièrement Erm*-kin*
La seule difficulté c'est 17; initiale. Mais c*est un fait fré-
quent qu'une h adventice se place en tête sous rinfluence
des nombreux noms propres germaniques commençant par une
aspirée^.
Maintenant il saute aux yeux que Hernequin > Erneiin tCcst
autre qu Armai, comte de Boulogne, neveu ei ennemi d'Arnoul
le Grand, marquis de Flandre de 918 à 965 K
rèsc, it en résuhe des formes où Von a pt-inc lom d*abord à a^conniittre le
nom nonnai. Ainsi Frekin est rhypocoristîqtie û'Ermcnfroi > irmîtifrcdum»
K Je dteraî entre autres exemples celui de la complamte du x* siècle
racontant l^assassinat de Guilïaumt û\â Normandie par Artioul I^ comte de
Flandre. Celui-ci est dit A mu if us dans Vun des mss* (x* sîtïclu)^ Ernuifta
dans le second (x*^-xte siècle). Vov. Jules Lair, Htudf.,.îitr Cmîlautne h^tt^ut^
Èp€^^ p. 62-64, î^hilippc MousVet rappelle « li c^xazm Bmous » (cd. Hciffen*
^rg» i. 8j), etc. Œ plus bas p- 4^^» note 4 et p 429.
2. Surk, kc. fit., 275-175. 291*
3. [hid,, îOî, îij, îiS. Î16,
4. On a des exemples de Hartiuf/ pour Jrnulf. Le nom de Tarchichape-
tain de Charles le Chauve, Ebroinus^ est écrit dans les diplômes de ce roi
tantôt Ebroinus (J. Tardif, Mmtitmenn khiorii^ufs. -* Cartons da roh^ n« iç j,
162), tantôt Hfhmnuî (Hhfùrûns ât Frmct, VII^ 480» |S'. 4^4)' fïn ^îl
que, dans lin nom répandu, ïh initiale est restée par erreur t Hentian
> Aimrtcm,
%, Sur ce personnage» voy. Léon Vandcrkindere» La jbnttû^km âet princi-
fsuUs ifrritùriakî M^fs, l*êd,, Bruxelles» 190Î* I> î4-$8.
LA fî MKSKIE HELLËQUIV o 4^7
Cest évidemment cet Arnoul ou Ernoul dont Lambert
d'Ardres latinise le nom populaire en Ernkulus. Lm-mèmt
nous avertit, au surplus que, à Tabbaye de Samer, le nom de
ce personnage est écrit Ernnldfis^ forme refaite avec une erreur
de finale sur le français Ernoul, Nous tenons donc pour établi
que Herntquin^ Ernkuim et le comte de Boulogne Arnouï sont
tjne seule et même personne.
Un mot sur la situation du Boulenois : A la mort de Bau-
douin le Chauve, marquis de Flandre (879-918), le Boulenois,
le Ternois et l'abbaye de Saint-Bertin étaient passés à son
second fils Atlou (AdalulftnX célèbre dans les légendes du
temps ^ AUou mourut le ï% novembre 93 î et fut enseveli
à Saint-Bertin ^ Ses comtés et Tabbaye passèrent à son fri^e
aîné, le marquis de Flandre^ Arnoul I, dit « le Vieux » ou
tt le Grand î>. Toutefois il est évident que celui-ci concéda, en
fief évidemment^ le Boulenois d un des fils de son frère Allou,
nommé ArnouL AUou avait laissé un autre fils dont le nom
est demeuré inconnu. Le marquis de Flandre l'accusa de trahi-
son et le fit périr. Mais Arnoul de Boulogne, frère de la vic-
time, pressa si fort son oncle que le vieil assassin dut faire
appel î l'intervention du roi. Lothaire fit la paix entre les deux
Arnoul, et le vieillard qui venait de perdre son fiîs unique^
Baudouin lll, témoigna sa reconnaissance au souverain en lui
léguant ses États (962) ^ Quant à Arnoul de Boulogne, nous le
t. Voy, Lâir, Gmlkum^ Lôttguf-Épei, p. 54, en noie,
1. Fakuin, GfMu ahbatum Siihknsium, cap. 105 ; Vita sanctî Bitttdfi (4a n s
Mmu Gtrm. Script., XV, 6^8).
5. Je modifie assex sensiblement l'exposa de ces faîïs que \*û àotmt dans
Lisdifttitrs Carolingiens (p, 4)), où je subissais rinfluence de l erreur en ra-
ctni^ qui fait mourir Allcïu sans postérité. Fokuin ne dit ncn de pareil, non
plus que la Ftandria generosa originale (éd. par Betlin^ann dans les Afufi.
Gtrm.hisL^ IX, 517). Cette assertion se trouve pour la première fois cIicïï
Lirabert d*Ardres (éd. Godefroy-Ménilglaise, p* 19), C'est dans sa chronique
et dans la Fîandria gtntrosa înicrpolée (éd. par De Smedt, Cor pu i flironicû*
rum FUinâriac, II» ^i) que Jean dlpres a été la puiser i la fin du \iv^ siéck,
et c'est de sa compilation, longtemps très apprécïéç, que cette erreur s'^t
répandue dans les histoires ïocaics. — La paix devait être réublic dés la Cm
de 961, car le 30 novetnbre de cette année^w Arnuîfus nepos » souscrit un
4iS F. LOT
retrouvons le yi janvier 969 souscrivant', sans doute comme
ViTssal, une charte de son cousin, le marquis Arnoul II et, le
l^'' avril 988, un acte du fils de ce dernier, le jeune Biiu-
douîn IV'. On perd sa trace depuis lors. On n'a même pas de
textes anciens prouvant d'une manière indubitable que la
dynastie qui donna des souverains à l'Orient et à TAngleterre
descende de lut. Il semble avoir été enterré à Tabbaye de
Samer * qu*il avait enrichie^.
La forme vulgaire et difficilement reconnaissable du nom
du comte Arnoul, dans la Getmhgu et Lambert d'Ardre s, k
grossière erreur commise par le premier texte qui distingue
de Hemekîn le comte « Èrnous i» de Boulogne s soi-disant
acte d'Amoul 1 et de Riudouîti. Voy. Folcuin^ GfUa abkjtttm Sithknsittm
{Mon, Gtrm.f Script.^ XJIf, fiji). — Sebn une génèalagie du xi^ siècle,
acceptée par M. Léon Vanderkindere {0^. W^, 3* 6ti., 1. 8û, 271-291), k
comte Baudouin plus connu sous la forme BM^oQq « Bauccs s de Vtpopée%
auquel Arnoul l confia la tutelle de son petit-fils Ainoul 111, éuil fils natu*
rcl d*AUou de Boulogne, Nous persistons à croire avec les Anmilu BUndU
nunm que Bauces était fils du connc Raoul (frère d*Arnoyl I)* Il est ctiricux
de voir b Généalogie nous parler des démêlés d*Hernckin avec son oncle le
comte de Flandre (appelé à tort Baudouin). !1 semble qulï y ait un souvenir
de U lutte historique d'Ernoul de Boulogne contre le comte A mou ï et peut-
être Baudouin III, fils de ce dernier.
1,5, AruuJfi BQmnitmh c^métn, Voy. Van Lokeren, Cimrks de Sûtni-
Pierre de Gand, I, n*' 4s*
î. Pas-de-CaUis, arr. Boulogne, chef-lieu de canton.
4. Les archives anciennes de ce monastère ont malheureusement disparu
(cf plus haut, p. 434, note 4). Mais dans une charte d'Etienne de Bloisde
tt4$, celui-ci rappelle les bienfaits accordi^s à rabbaye par ses prédéces-
seur, les deu» Eusuche * et Em{ulfiJ, comîîum Bobnîensîum quorum
scripta amentica vidimus ». Cette charte est connue par un vîdimus tinc des
registres du Parlenîent de décembre 1299, Voy. Baluxe^ Histoirt di h
m*ii^im d Auvergne ^ II, 138*
5. Chronique de Guittes^ p, J9 et 4t* H est intéressant de noter que le tra-
ducteur de la fin du xv^ sîéck a rendu en français (ihid., p, |8 et 40) BmieU'
/uf par Ermkin (sans h initiale). Il est singulier qu'il soit tombé juste, car
il n'avait d*ajtrc source écrite que le teste laiin de Lambert d*Ardrcs, et
c'était, d'atlkurs, un homme (leu sagace. Le souvenir d'Iirnckin auraît-ii
persisté dans b régiott ?
LA « MESNIE HELLEanX » 4^*)
père de Fromont de Lens*, prouvent que ces rèciis ,
reposent tous deux sur une tradition orale. Cette tradition
est, de pan et d'autre^ foncièrement la même. Lambert sait
qu'Emicale a été enseveli à Tabbaye de Samer dans le
même sépulcre que ses tils. La Gcfi/aJ^^U^ nous raconte la lin
d'Hemequin d'une manière plus dramatique. Blessé par les
païens, Û meun en prières dans Tabbaye devant Tautel do
saint Pierre. Son écuyer et sa femme tombent morts au même
insunt : « Quant ce vit Berte, se feme, si se laissa caoir sor
lui et morut ilœc avoec lui. >- Baudouin, son tils aine, ne lui
survit que trois jours ^. Nous sommes évidemment en présence
d'une même légende locale. Lambert la tenait des moines de
Samer. Quant à l'auteur de la GéntalifU il était lui- mémo
moine de cette abbaye, comme Ta très bien vu Paulin Paris ^
On a dit plus haut que Lambert combat passionnément les
Boulonnais qui prétendent que le comte a possédé» outre Bou-
logne, les seigneuries de Saint-Pol et de Guines et qu'il a par-
tagé ces territoires entre ses trois fils. Or la Généalogie attribue
également à un comte de Boulogne la possession de ces trois
comtés. Il est vrai qu'elle le nomme « Gui à la Barbe ». Mais,
étant donné qu'elle fait mourir Baudouin en même temps que
son père Hernequin, la substitution à ce dernier d*un comte
imaginaire était forcée. Lambert et la Généalogie ont donc
encore en commun certaines assertions sur Tcxtension du pou- i
voir du comte Arnoul ♦. '
1 . Par cet artiBce les comtes de Boulogne se trouvent rattachés à lu geste
de Garin U Lorrain, Le résidu réel c*est que les comtes de Boulogne ont
réellement possédé Lens. C'ttc localité semble avoir été le chcf-licu du
comté d'Escrebieu (pagus Scarbeius) et celui-ci appartenait aux comtes de
Boulogne dès le x^ siècle.
2. Paulin Paris, 1^5 manuscrits françois^ III, 204-205.
3. 7W</., 208.
4. N'en déplaise à Lambert d^Ardres, ce sont les « Bolonienscs » qui ont
raison. Guines, situé dans le pagus Bonottiensis, a a*levé primitivement des
comtes de Boulogne. Quant à Saini-Pol, c'est le chef-lieu de Ternois (pagus
Teruanensis), Ce pagus avait pour maître, à la fin du x« siècle, un comte
Arnoul, vassal de Baudouin IV, marquis de I-landre, au témoignage des
Miracula S. Bertae (Mon. Germ.^ Script., XV, 566). Nous n'hésitons pas à
l'identifier avec le comte de Boulogne, d'accord avec M. Léon Vanderkin-
àtxt, op. cit., I, 331.
450 F. LOT
Nous avons montré que, en ce qui touche Arnoul de Bou-
logne, Lambert et la Généalogie de la fin du xiii^ siècle avaient
une source commune et que cette source était une tradition
orale. Faut-il croire que ccUe-cî se présentait sous une forme
épique? La déduction n*est certainement pas obligatoire. Néan-
moins la couleur du récit de la Gètéahgk, rèpithète de « très
célèbre m accolée par Lambert au nom de son Ernicule^ enfin
un passage du petit poème burlesque, le SUge de Neuville^ la
rendent fort vraisemblable :
Assès Tavés oît van Gerben, van Gerïn
Van Wiîlautne d*Orenge <;ui vait !c chief hacUn,
ViQ conte de Boutoigne, vàn corne Hoillequin,
El vjn Fromoai de Lens, van son fib Fromondïn •♦
Ce poème du xin= siècle^ en jargon mî-picard, mi-flamand,
est une parodie des chansons de geste dont un certain nombre
sont énumérées. 11 semble qu'il en ait existé une concernant
le comte de Boulogne nommé Hoillequîn,dans lequel M. Gaston
Raynaud ' a vu notre Hernequin, II est vrai que M. G. Paris
s*est demandé^ si la phrase « van conte Hoillequin », au lieu
d'ècre en apposition ne distinguait pas, au contraire, le comte
Hoillequin du comte de Boulogne et il a proposé de rapporter
ce dernier au roman des Enfances Gode/roi où, dans une rédac-
tion remaniée, le comte Eustace de Boulogne joue un rôle capi-
tal. On peut se demander aussi — et nous y reviendrons plus
loin — si Ton peut croire synonymes les formes Htrmquin et
Hoilkiiuin. Cluoi qu'il en soit, la persistance de souvenirs atta-
chés au comte Arnoul est établie.
Seulement ces souvenirs n'ont conservé rien, ou à peu près,
d'exact au sujet du rôle véritable joué par ce personnage. Les
moines de Samer montraient son tombeau et celui de ses fils.
On sait que rien n*est plus propre que la vue de ce genrede
monuments a exciter Tin ven lion populaire* En Boulenois il
était impossible de n'être pas influencé par l'épopée poncivoise
t. BîH. NaL. ms. fr. 12615» f^U ît| rtcto» Cf. Rayn^ud. kc, ciL^ 59.
Édité par Schelerj Tnmvir^ hl^ts (Louvain, 1879), U, 170,
1. [jx, eiL, 59-60*
^, Rmmnm^XXîi, 1891, ifç. Et aussi M. Guy^ Bs^ai sur.., Adan ai U
Hnk » p. 406,
LA « MESNIE HELLEQUIN » 43 1
de Gormand et Istmbard racontant les ravages des Sarrasins dans
une contrée tonte voisine '. Si l'on ajoute à cela le désir de
donner une étymologie à certaines localités ^> on aura à peu
près les éléments nécessaires et suffisants pour une composi-
tion à laquelle le comte Amoul S familièrement nommé Eme-
quin, prêtera son nom et rien de plus.^
Cette préoccupation étymologique dont nous parlons est
visible dans le passage de la Généalogie concernant le village de
Mirendœl ^ : Hemequin blessé et poursuivi par les païens arrive
sur le bord de la Canche suivi d'un seul écuyer : « Et si avint
que li quens Hernequins regarda a merveilles derrière lui et
vit le grant compaignie des Sarrazins qui les kaçoient. De
coi cis lieus ou il passa a Kance est encore apelés Mirendœl 5. »
On pourrait à cette occasion se demander si une légende
étymologique analogue n'a pas prolongé le souvenir d'Herne-
quin jusqu'au xvii* siècle. Le P. Jacques Malbrancq rapporte
en eflfet que la petite ville de Wimille se serait ainsi appelée
parce que a huit mille » (8.000) Français du comte Hemequin
y furent tués par les Danois en 881 {sic) : « monumenta
Bononiensium cesa e nostris millia octo enumerant et cum
pa^uin Albimeri flumini assidentem aiunt exinde Wimilk
hodiemam nomenclaturam sortitum fuisse, scilicet e theuto-
nica istius aetatis sic gallice sonantem ^. » Malbrancq ne sait
d'Hernequin que ce que lui en apprend la Généalogie du
xiu* siècle. Or celle-ci ne parle pas de Wimille. On pourrait
donc croire que ces « monumenta Bononiensium » sont une
version perdue de cette généalogie ^ ou d'un autre texte. Nous
1. ŒRomania, XXVII, 1898. 1-54.
2. Dans mon édition de la Cljrattiquc de Saint-Riquier d'Hariulf, j*ai
signalé (p. xlii) des inventions analogues destinées à expliquer les noms des
villages de Mesoutre et Dourier en Pontieu.
3. On sait que, aux x*^ et xi* siècles, ce personnage n'était presque jamais
appelé dans Tusage par son vrai nom. Celui-ci était remplacé par un sobri-
quet ou un hypocoristique.
4. Localité disparue.
5. Loc. cit. y III, 204-205.
6. DeMoriniSylly 351.
7. D'autant que Malbrancq en parle tantôt au singulier (I, 647), tantôt au
pluriel : « ex genealogiis » (1, 686, 912; II, 313-314, 350, 594, etc.).
432 1% LOT
avons affaire en réalité à une invention de Malbrancq. La généa-
logie prétend que Hernequiu tînt tcte aux païens avec 30*000
hommes. Ceux-ci lui en tuèrent 10.000 et il s'enfuit avec
20.000, Le jeu de mots est donc impossible dans la Généalogie.
Au reste, Malbrancq ne nous a pas complètement trompé. En
marge de la p* 350 du t. II> il a bien mis « ex genealogiis Bono-
nîensium », mais il ajoute honnêtement : « hic probabiles
adduntur circonstantîae e naîura kKonim. » WimiUe est évidem-
ment au nombre de ces conjectures suggérées par « la nature
des lieux m*
Les historiens locaux ont pieusement reproduit les explica-
tions de Malbrancq. Cet excellent Père jésuite » il faut bien le
dire, a écrit une des oeuvres historiques les plus exécrables que
Ton puisse rêver et d'autant plus détestable quej pendant deux
siècles j il a été parole d'évangile pour les érudit^ boulonnais ^
qui se bornaient à le copier, Malbrancq était moins un impos-
teur qu'un esprit extraordînairement faux et incritiqui. Ses
ScMia in Hbrum VII ^ qui nous intéressent particulièrement,
nous le montrent soucieux de la valeur des sources qu*il utili-
sait. Ainsi il combat les assertions de Lambert d'Ardres sur
Sifrid le Danois, Ernic tle, Guillaume de Pontieu. Seulement
il n'a pas assez de vigueur d'esprit pour éliminer certains textes.
Il les combine tous en tentant de résoudre les incohérences et
les contradictions au moyen d'hypothèses ou d'interprétations
d'une in^^énieuse ineptie* Et comme ses scholies ont été accep-
tées de confiance^ il en est résulté que l'histoire ancienne du
Boulonnais est demeurée dans le gâchis le plus complet.
Il n y a donc rien à tirer de son récit sur Wimille, La seule
chose dont on puisse être redevable i Malbrancq^ c'est une
erreur sur le sens de Herneqtiin, Il a eu la malencontreuse idée
de changer ce nom en Hinnequin, Il l'interprète judicieusement
p.ir Petit- Jean ! « Hennekinus qui antiquo theutonismo sonat
Joannem Parvum % « Ses connaissances philologiques n'ont
1. Voy. entr^ autr^ Hcaor de Ro»ny, Hhtùirt duBùulôHHms, 1, 170.
2. Voy. t. 0, çil, 917, etc. ; cf, %^A^
î* Dé Morims et Mmmrum rtbm (Tomact^ f6^9-;4, | vol 10-4»), t* U
(î647XP^ 3 '4^
LA « MESMIE HELLECOlK » 43J
donc servi qu'à égarer les érudits * et à les lancer sur une fausse
piste ^
Nous revenons maintenant à la question des rapports de
Htrnequin et à'Hdkqnin^ Après ce que nous avons .dit plus haut
du vrai Hermquin, nous ne pensons pas que k thtse de M. Ray-
naud qui voit l'origine de la légende de la « Mesnie fantas-
tique M dans une bataille du ix'^ siècle, ait la moindre chance
d'être maintenue ^
A priori elle n'était admissible pour aucun folk-loriste. Le
thème de la chasse fantastique est trop répandu pour qu on
puisse croire qu*il soit parti d'une petite région de la France, et
sa signification mythique ne peut découler du souvenir d'une
bataille historique du ix* siècle "*• Un témoignage antique,
celui de Virgile, montre que la Germanie le possédait dès avant
Tère ciirécienne». Enfin il est reconnu aujourd'hui que le con-
ducteur de la chasse sauvage n'est autre à Torigine que le
grand Dieu germanique Wodan ^. Sur ce point la question peut
être considérée comme réglée.
N'est-il pas évident, au contraire, que c'est sous l'empire delà
légende très répandue ^ de « la Mesnie Hellequin « que l'auteur
-^ *
1 . Dont M, Haynaudj îoc. cit.^ 59,
2, Cest encore Mal bran cq qui a eu Tidêe funeste d'Haïti fier Hennekin >
Herncquin avec le comte de Boulogne très historique, Erkeiiger, lequel vécut
sous îe règne de Charles le Simple, Vo\\ sur ce personnage, Vanderkindcrc^
It SI-5Î' ^^^^ ^^ permet de rapprocher son nom de Hernequtn.
I . Oti pïtitôt M. Raynaud cherche à démontrer rinrtuence i*un événement
de cette époque sur le thème de U mi$nie où il retionnafl (bien à tort) le
combut de î' hiver et de Télé,
4. C'est ce qu'a bien vu M, Guy : « Était-ce dans les chroniques qu*il fal-
lait rechercher Torigine d*une créature chimérique, d*uiî génie de k tempête
et des airs? Nous ne le pensons pas. Autant s*applîquer â découvrir les
ancaresde Riquet â la Houppe et de Cendrillon ! » {Esmi sut Adan de le Hatk,
5* G/Qrgiqnes, I, 474-475 : « Armorum sonitum toto Germania caelo —
Audtit. jf
6 . W ol fgan g Goî t her^ Ha tîdbuch der gtrman hchn Mylhologk (Leî pzîg, 1 89 s 1
in-8»), 285-295.
7. Selon Gautier Map {Di nugis cufkliumt éd. Wright, p* 14 ei 180), ces
■ phalanges noctivagao » se sont montrées en Petite Bretagne et dans la
inarche de Galles et de Hereford, Le moine de Peierborough qui a écrit la dcr-
434 ^' ^^
du Siège de Neuville a légèrement modifié le nom du « cofnte »
et, de Htrncquin a fliii Hùillequin ?
Néanmoins, il n*est pas sans exemple que le nom d'un per-
sonnage historique se soit substitué à celui d'un être tnythiquc.
En Allemagne mtme, dans la Westphalic et la Saî^e, Hackelbcrg,
ft der vvilde Jâger w, est peut*ècre un personnage historique du
xvi* siècle dont la renommée a supplanté celle de Wode ou
Wodan '- Dès le moyen âge, nous connaissons plusieurs tenta-
tives d'explication de la chasse maudite* La troupe hurlante, ce
sont les âmes des défunts. Plus d*un y a reconnu des parents ou
des amis ^ Le chef a été certainement considéré comme un per-
sonnage méchant transformé en démon pour expier ses crimes.
Mais on conviendra qu'il eût été étrange de faire subir cette
transformation au vaillant comte Hemequin qui est supposé
périr dans sa lutte contre les païens.
11 est certain que cet absurde rapprochement entre un comte
Hellequin et la chasse sauvage a été fiiît, précisément dans cette
Histoire de Richard sans Peur^ imprimée en 1601, où M. Kitt-
redge a reconnu la source du passage de Walter Scott invoqué par
tiïèrc continuation de la Chnmtqi4f an^l&^uixontu'^Tacome qu&, en 1127, te
moines de Tabbayc tl le^ piysaiis n'ont cessé depuis \ç début du carême jus^
qu'i PÂques d'cmendre le tumulte de chasseurs gigantesques montés â chevil,
les abois des chiens et le son du cor dans U forêt qui s^étend de Pcicrborougb
à Sumford du^adviendrA-t-U de ce prodige? il ne sait. Puisse Dieu yvdllcrl
(éd. Tborpc, 1, 178 et II, 224; éd. Plummer et Earle, I, î$8). — 11 y aurait
selon Hampson (1. jij) allusion à la chasse sauvage dans une homélie édi-
fiante que corn posa p à la dn du xc siècle, pour VJsh- Wednesiny^ MMnc k
Grammairien. Cf* Mdrkaï Lkm ùf saints, éd. Skeat, I, 164 (/^(jW/ linglish
΀€t Society^ fasc. 81). La chose me praît fort douteuse, — La croyance
à la chasse fantastique a persisté longtemps en ^os^^. Des gens Tont aperçue
le a 5 juin 1744 et le 2t juillet 178$ et en ont porté témoigtiage. Voy.
H, T. Hampson, Midii xvi ialetidarium or datts^ chûrien md ciutùim 4>f tJm
MuUkages, London, I (1S41), jio-îm^ — En France cette croyance a été
universellement répandue, mais c*cst seulement dans le Nord-Est et la Nor-
mandie que la memie a un chef du nom de Helkquin^
t* Raynaud, toc.ùL^ $3, $y. Œ sur la « Sage von Hackelbcrg der wilde
jÂgier » les articles signalés par Golther {tf.dt*^ 185, note ))p et que je n*at
pu lire,
2» Voy* les cïicmples reproduits par MM. Raynaud et Guy, Ajoute* podr
rAlIcmagne celui du comte Kmicho (oiort en in;) cîté par Jacob Grîmm,
LA H MESNIE HELLEQUIK » 4} 5
M, Raynaud. On y rapporte qu'un vaillant chevalier, Hellequînj
dépensa tout son bien et même vendit un beau château « en la
duchié de Normandie n pour fournir aux frais d'une guerre que
soutenait Charles Martel contre les Sarrasins. Malheureuse-
ment la guerre finie, comme ce gentilhomme restait sans rcs-
sourceSj il commença lui et « son lignage m à fouler le peuple
et à commettre mille excès. A sa mort il eût été damné si Dieu
ne lui avait pardonné pour avoir « exaucé la foy ». Mais lui
et son hgnage furent condamnés i fnîre pénitence en se livrant
chaque nuit à une de ces courses ou danses fantastiques comme
en rencontra le duc Richard '.
M. Kittredge a fait obser\^er que le roman versifié du xiv*
siècle, source de VHhknre de Richard sans Peur de 1601, ne
possède point ce passage, qui est par conséquent une fabrication
du xvi^ siècle. Celle-ci ne présente aucune difficulté. Il est tout
naturel, on vient de le dire, de voir dans la chasse infernale un
ch,itiment. Dès le début du xin^ siècle^ Hélinand qui transfor-
mait Hellequin en Karlequin prétendait que ce dernier était
un roi Charles-Quint {sic), tué sur le champ de bataille et
ayant subi la punition de ses péchés ^ Ce qui est intéressant
dans le récit de 1601 c'est la mention de la lutte d'Hellequin
contre les Sarrasins. Muni de ce renseignement, lauteur a bâti
le reste de sa fable au moyen d'une suite de raisonnements plus
ou moins conscients. Si Helkquin a lutté contre les païens, il
ne peut être damné pour 1 éternité. Aussi a-t-il soin de nous
l. Rmnania, XXXIl, ^05.
a, Hdinand copie par Vincent de Beauvais, 5j5f<:. Imt.^ 1, 29,0. 118. Cette
transfonnaiion en Charles-Quint est pas^ M là dans b Chromqufde Nor-
fwowiif et d'autres textes des xiv«, xv« siècle (voy. les dtaiions de Baynaud,
p, ÇS ei Guy, p. 394, 40, note t). Uorigine est une tentaUvc de combinaison^
«luci Kelinand^ de la n Mesnie [lerlequin » ave^; les légendes ecclésiastique
dci « vî&ions 0 montrant un roi Charles (Charles Martel, Charlcmagne
Charles îe Chauve, Charles le Gros, selon l'occurrence) subissani en Tautre
monde la pénitence de ses fiutes. C'est h une ÎDierpréution ce savante »,
par suite >$ans intérêt pour nous. Elle est d'ailleurs absurde. iMémc en comp*
lant Charles Maneî, il n*y avait eu que quatre princes tic ce nom avant
l'époque d'HcliiiaiiLÎ (commencement du kui^ siècle). IJ est singulier qu'on
k retrouve en AUemiigne, en Hesse. Voy* Jacob Grimm, Lkutsck MyMogit,
I* éd. U, S90.
43^ I'. Lot
dire qu*il n'a été condamné que ^ pour un temps déterminé * »k
Il ne peut avoir péri sur le champ de bataille car il eût été droit
au cieL En conséquence ses méfaits sont postérieurs à ses
exploits. Ils s'expliquent très bien si Ton suppose que HcUequin,
comme tant de gentilshommes, a dû engager ses terres pour
subvenir aux frais de la guerre. Sa victoire même a été une cause
de ruioe< Et si son beau château est en Nonnandie, c*est sans
doute parce que Richard sans Peur qu'il rencontre est duc de
cette région.
Mais d où le remanieur de 1601 tîrait-il cette connaissance
des luttes de Hellequin contre les Sarrasins, qui Tinduisait à ce
raisonnement assez compliqiié ? Cest ici que M. Raynaud pour-
rait peut-être reprendre [avantage. Puisqu'il n'y a rien de pareil
dans le récit versifié du xiv^ siècle, le remanieur de 1601 n'au-
rait-il pas emprunté la connaissance du comte de Boulogne
Hernequin, confondu par lui avec Hellequin, à quelque manus-
crit ou incunable, contenant un récit épique versifié ou mis en
prose ? Peut-être a-t-il eu tout simplement connaissance de la
généalogie manuscrit.: des comtes de Boulogne. Quoi qu'il en
soit, il reste !à un point à éclaircir,
De toutes manières, la conftision du comte de Boulogne très
historique, Hernekin ou Arnoul avec le « chasseur maudit »
Hellequîn, ne saurait remonter bien haut, si tant est qu'elle se.
soit produite ^, Lambert ni la Généalogie n*en ont connaissance,
L*émendatioa de Herlequin en Karlequint due h Hélinand »
semble bien indiquer que, au xui' siècle, elle nVxistait pas
encore* Qu'elle soit du xïv% du xv* ou du xvî* siècle, elle a
donc eu lieu à une époque très postérieure à celle où nous ren-
1. Ced est déjà dans Heliiiand ou Vincent de Beftuvaîs : m fuit cniiHJ
K^rolus Ciiintus qui pcccitorum suorura longam cgii pœniteniiam ei ouper^
latîdem per inierccssionem beati Dionysii liberatus est a (cité par Liebrecht,
p, 198)^ Gautier Map remarque que « les phalanges nociivagae quas Herie-
ihingî diccbant * ont cessé de se montrer en Grande-Bretagne b deuiicmc
anntc du règne de Henri U » {Dt nugis cunaHum^ éd. Wright, 180; Raj^
naud, 53).
2. M. Raynaud a oublié le plus bel exemple en faveur de %a théorie, '
Shakesp<âre oous parle de Htmt le chasseur qui hanic la foréi de Windsor
(Mirfjf «y*tvj| aae I\^. Il Diui convenir que ccî eîicmpic esi iroublant.
î* Vôy, page pféeédenic. note 2.
LA cr MESÎJIE BELLî^OPlN » 437
controns les premiers témoignages concernant la a Mesnie Helle-
quin », le^uels se placent au xn= siècle.
Reste à savoir rétymologie de Helltkin ou Herlrkin*
Tout d'abord il est certain que la forme Herlekin est la plus
TuncitnneKHelkkiu nest qu'un dérivé*. Cette consiatalîon doit
faire hésiter devant certains rapprochements séduisants ^ tels
que celui de Diez : le nom d* homme néerlandais Helkkin \
même celui de Braune qui lui substitue un emprunt direct
Hclkkint s ; enfin une conjecture qui rapprocherait d*un vieux
germanique * Ixnno qui signifierait « mort m une inscription
roniaine portant MERCVRI CHANNINI*. On a vu que le
chasseur sauvage est certainement Wodan, Comme, d'autre part,
il est parfaitement établi que Wodan est le Dieu germanique
que les Latins nommaient Mercure^» on se laisserait amener i
1. C*«t ropinion de M. Gaston Paris (ioc. cii.} adoptée par M* Guy (ôp,
dl*,407)> Le plu5 ancien témoigrïage se trouve dans l'histoire d'Orderic Vjial
qui, vers 1140, racomc comme un fait historique arrivi^ pend^m une nuit
de janvier 1092, la rencontre de Gauchelin^ prêtre de Saint-Aubin, avec la
M tiiuiKa Hertechini i» (éd. Le Prévost» IIJ, nO- ^ 1^ ^^ ^^ ^^^ siièck,
PkiTé de Blôis traite les clercs mondains et ambitieux de « milites Herlewînî »
(Mignc, PatroL kr, t. CCVII» coL 44), A la même époque, Gauùcr Map
parle des « phalanges noctivagae qtias Herletltingi dicebaniB (De tntgh
atriaimm^ éâ, Wrîght, tSo). Les formes « Herlequinf H arlequin » se
letrouvent encore jusqu'au xvï*^ sl^ch (Paulin Paris, LfS tnamucrits Jrati(i)h
4k h BiUiotMqtu du roi, I, ^lî) et M* Raynaud a bien saisi les liens qui
rattachent Herlequin à Ârkquin. Néanmoins; depuis le Xlii*^ siècle, la forme
HdUqmntsi la plus tisitèe. Voy. les textes réunis par Raynaud {kx, ctL^ JJ-
57) et Godefroy, Dktùmtmirf^ au mot Helkquin.
2. La vibrante s* est assimilée à la liquide suivante. Cf. Hftlouin devenu
Hcihitin^ en Normandie particulièrement. Au xïxe siècle, dans cette même
région, Heliequin semble être devenu Hennequin ou Hanoequin, peut- être
sous Tinfluence du nQm picLird « Hanne^uin ».
j. Je ne mets pas du nombre ceuK de Piiulin Paris qui songe à Aliscans
{ùp\ cit.. If 331), Génin (yaHations du lan^t^r françûis, p. 455) cl encore
moins de Scheler, qui se demande si Herlequin ne serait pas une déformation
de tt Guîteclin » (Trouvèrts belges ^ II, 55 a) et deA. Wesselofsky qui y voit
le TOI Hèrode. Voy. Âlickino 4Î Aitdodtsa dans Gkrnaîe slorm Ma kUtra-
ium itiiiiam, XI, ïS88, 354),
4, EtymQh)^is€fies IViwtfrhuch dis romamich^n Spaclien^ J*^ éd. fîSB/), 614.
5, Voy. Zdhdnrift fàr ronianisch Philologie ^ XX, 09-^70,
6, Voy. Siebs dans ZtitscMfifûrdeutsclx Fhihîcgif, XXIV, 146.
7» Goliher» ûp, r//., 295*
438 F. LOT ,
croire qoe le datif CHANNFNI > *hênm est une épithète de
Wodan, épithète qui serait demeurée en France pour désigner
le dieu déchu au rang de démon, Hentieqfiin ' . Cette fantaisie
qui se présente ù notre esprit doit être écartée.
Pour M. Guy \ a Génîna été heureusement inspiré lorsqull
a identifié le conducteur de la maisnie nvec VErl^ânig de la
mythologie germanique *. Ce système repose d'abord sur un
rapport étymologique qui nous parait irréprochable et il a
ensuite pour lui — cela vaut mieux encore — une i^raîsem-
bîancc parfaite. Qu'est-ce, en effet, que le roi des aulnes,
sinon un prince de féerie, ainsi que son titre même Tindique ?
N'est-ce pas au milieu des ténèbres qu'il se pbU lui âusst i
errer ? N*atme-t-il pas à tourmenter, ;\ traquer les voyageurs ?
NVt-îl pas des filles qui mènent les chœurs nocturnes? Le
peuple n'a-t-il point incarné en lui les formes qui se meuvent
dans Tombre, les soupirs du vent, bref toutes les vaines images
qui remplissent la nature après le coucher du soleil et que per-
sonniiie Hellequin? Que Ton se rappelle la ballade de Gœthe,
Elle est un merveilleux commentaire des idées que nous expri-
mons ici faiblement, »
Je ne saisis pas, au contraire, de rapprochement probant
entre les légendes d^enlèvcments d'enfants et la <* mcsnic
furieuse m conduite au milieu d'un vacarme effroyable par le
prince des dieux ou des démons. Quant au rapport étymolo-
gique, il n'est rien moins qu*« irréprochable »* L* expression
tt roi des aunes 0 est un non-sens. Il n*y a pas plus de roi des aunes
que de duc des saules, ou de comte des roseaux. Nous sommes
en présence d'une tentative étymologique déformant un nom
I, }Âa,\s HtniifipiiH est ici ua dérivai moderne Je HdUquin -> Hirkquin,
Voy* plus haut, p* 4j j, ooEe 2 ei 457, note 2*
I* Génîn qn\ plâcc aun Miscamps oy « Arliscamps » Tonginc de h mes-
îiîc tunmh^ dit au contraire : « Cependant la mtsnif Hdkquin ne rctiferm ^
« point ses apparitions dans Tenceinic bomce de l'EIycamps; clic se rcf^riilfi
« par toute la France et même dans FEurcipc eiitîêrc. Partout oh W rrtrwiiV,
« c'étaient des Helïequins. l-c grand veneur de FontâineMcau^ comme k
« FneyKbûu âlleniand, ne som autre chose que la chasse d'Hcllcquin. Le
« roî des auînes^ BrUnkomig^ est une seconde iransformatîon à'Htrkkin. »
Voy. Bn varmiiùm au kns^a^t fmttfiiU depuit k XI h ukU (Paris, J845i
îrt-8''), p. 462, Otî le voit, pour Gcnin, Erlkûnig est un dérivé et tlott un
prototype.
LA ^ MESNIE HELLEQUIN " 439
mai ou pas du tout conipris. Si Ton rappelle que là poésie de
Gcethe, composée en 1781, n'a pas de source populaire % mais
qu'elle est imitée très librement de celle de Hcrder, Erlkônig
Tocbkr^ lequel lui-même * traduisait une ballade danoise '\ il
est évident que c*est en Scandinavie que nous devons chercher
Torigine de Tincompréhensible Erlkônig. Il n'est pas difficile de
s'apercevoir qu*il n*est autre qu'une transformation peu heu^
reusc du danois Elkrkonge, qui est lui-même pour un plus ancien
Elverk&nge ft roi des elfes * »* On saii que les e!fes de la mytho-
logie germanique se plaisent à ces jeux d^enlévements d'enfants»
chevaliers etc. ^ Erlkônig est donc à écarter. ElUrkonge même
ou Elverhnge ne peut être accepté. Les actions attribuées aux
elfes et la clKisse furieuse n ont pas, en effet, de rapport direct*
Les thèmes sont différents! La forme, pas plus que le fonds, n'est
admissible. Elverkonge ne peut phonétiquement donner Herk-
quin ou Htlkquin. En dernière analyse^ nous ne trouvons
T, Du moins les tentatives faites jusqu'à ce jour pour, \m en trouver une
ont échotié* Voy, le Giuth Jarhbttch^ U XIX (1898), p, }Oj et t. XX! (1900),
p* 26 j. M. A. Schônbach, dans les Btilage âtr aUgtmeinen Zeîhchrijt du
1 1 janvier 1 898, a rapproché le thème de k ballade de Goethe d'un passage
du Dialogitt de Grégoire le Grand (h IV, cap. 18) racontant que des
« Mauri homines « en présence du père éperdu, enlèvent V^mt d'un petit
enfant mourant qui avait l'habitude de jurer (Migne, Patroh ht., t. LXXVII,
CûL ^49). Mais la ressemblance entre cette niaise anecdote et VEfïkùni^ est
bien lointaine et ringénieux savant reconnaît qu'il est plus que douteux que
Gxïhe en ait jamais eu connaissance* Le rapport etitFC son poème et celui
de Herder est très éloigné, Ce dernier eût dû être intltalê « Herr Oluf », Le
poème de Lee on te de Lisle, Lis Elfi^^ en donne une idée. Le plus probable
c'est que Gcethe n'a emprunté à Herder que le dénouement fatal et le nom
du démon. Le thème a été très modifié par la fantaisie personnelle du poète,
aidée peut-être du souvenir de quelque légende populaire sur les enlèvements
d'enfants par les puissances des ténèbres.
3. Voîkslieder dans Herder, Sàmmilkhc Wtrkt, éd. ReJich, t. XXV
(Berlin j 1885), p. 445-444.
3. Kiàmpe Vhtr^ Copenhague, 1739. Traduction littérale par Wilhclm
Onmm, Akdànîsch HtUenlkdtr^ Baliadtn und Mûrchen, Heidelbçrg, i8n,
p, 146.
4. Herder. S^ffirm//*V/jf Wîrke, éd. Rediich, t. XXV, p. 682; C, A. Buch^
hcîm dans MïI« and Qtunes^ 4* série, vol. ÎX (1872), p. 241, 308, Herder se
sera laissé influencer par le mot allemand trh «f aune i»,
S* Golther, iî/f. aï*, 1^4,
44» 1'- LOT
en germanique aucun nom hrk dont la signification présente la
moindre analogie avec les exploits de la mesnie furieuse. Celle-
ci est dans tous les pays une manifestation des esprits infernaux
se livrant à une course sauvage et bruyante, w Dame Habonde »,
la contre-partie féminine de Herlequin, résulte de la fusion de
la Vénus germanique j Hohia, et de V Hécate antique \
Le mot qui s'impose irrésistiblement à notre esprit c'est helk
« enfer»* HeUequin c'est la w gent d'en fer ». On va objecter
tout de suite que, si ce nom convient à merveille à la <^ mesnie »,
il peut difficilement s'entendre d'une seule personne, le conduc-
teur de cette mesnie. Il foudrait admettre que celui-ci tire son
nom de la troupe qu'il dirige et non Tinverse* Autrement dlt^
Htîkquin serait simplement le plus important des heUequins,
Cette interprétation est conciliable avec quelques-uns de «os
textes. Guillaume d'Auvergne parle des cavaliers nocturnes « qui
vulgari gallicano biUeqmn et vulgari hispanico txerdtus anttquus
vocintur * »; le roman de Fauvel rapporte un refrain chanté^ au
milieu d*un tapage infernal par les hclkquines K Le Songe duré de
la Pucfllt* porte: «t Dangier, Envie, Malebouche — Sont tout
partout feuk helequins ^ w; enfin deux vers de la Chrmique
rimèt de Oodefrûy de Bouillon sont péremptoires :
Et H rois 4cs TaHurs, o lui sy ttalcquin
Q.ui plus aiment batatlk que li gbs ne fait vin **
Li seconde objection c'est que Htllequîn est une forme qui se
rencontre moins anciennement que herlequin et que nous-mème
l'avons reconnu plus haut. Sans doute* iMais ne peut-on invo-
quer, pour le changement de * helk en bcrk^ Tinfluence analogique
du mot français berit ou barU^ qui signifie « bruit » tumulte
1. J. Grimm, Diuts£èe Myihohik^ |« éd.« 1, 26\ ; U« 877, 902 ; Du Cioge-
Fivre, G^farium, aux mots ahêu^iat Drnna^ Hecata. Sur les rappûns de
m ibme RaboiJe * et de Hétodiide» vôy, Wessdobky. h\\ ai., XI, tSSft»
2. ce J. Grirani. (f. dt., 0,895.
î* Voy, Paulin Paris, Mammurih jrmms, h jH i Guy, Essaie t|9 en
ao%t et 401, note t ; G, P;ms, HiU, UiL ie k Fr., XXXil, 147.
4« MàQtitgkNi, Rmieil df foésm frmcviméa XF« rt XF^ nèekt, 10^ 114*
5. Et non &ii^frui comme imprime Raynjud, p. %$.
6. Ed. Reifoibeigp A^mimemis pour urtir à tkù^m et h fnHma ai
A'umir, 11, t4S, v«rs 6^47. Cl. Godê&oyi ÛKJtewirr» s, v.
tA « MESNIE HELLEQUIN » 44T
tapage ', ce qui convient on ne peut mieux à ta mesnie furieuse ^ ?
Ce Imhkint est ensuite devenu, ou redevenu, heïkquin sous l'in-
fluence phonétique signalée plus haut».
Quoi qu'il en soit de cette explication, il résulte de Fétude
Kqui précède que le comte de Boulogne, très historique j Arnoul,
connu sous la dénomination hypocoristiquede ErnequinoM Her-
ftequin^ n'a rien 1 faire avec la a mesnie Herlequin « ou « mesnie
Hellequin ».
Ferdinand Lot,
I- D'où le verbe ï>etïér, helltr^t aussi hilîir « faire du tapage ». Sonner une
cloche V à herle ji c'est sonner le tocsin. Vo\% Godefroy, Dkimtmire^ IV»
466; Do Gange- Fa vre^ Gîossarium, IV, 466. Peut-<3tre y a-t-il un rapport
eocre ce moi et le nom d'un oiseau (bruyant?) qu'on appelle le !mr}fcn
Kivernab. Voy. h Dtalmmuife Haczfeïd, Darmcsicicr, Thoiûas. Le fran*
çais moderne Mit ne serait- (l pas le repn^scnunt de h4kr > herkr plutôt
^ue fanglaîs ta hail ?
2. Dans tous les exemples concernant le cf wûthendes Heer » en Alle-
magncj la«i mesnie Helle<|tiin ^ en France» la caractéristique de Tapparition,
c'esite tumulte d'une troupe nombreuse, à cheval le plus souvent. Son chef.
Hellequîn ou Wode» a une voix reicntissante qui glace d'effroi le voya-
geur égaré,
l> On pourrait adopter aussi l'hypothèse inverse : herît^ nom commun,
dont Torigine est Inconnue serait dérivé de Herh^ nom du chef de la mes-
nie- Maïs cette hypothèse paraît sémantiqucment peu admissible et, d'aîl*
leurs, on trouve toujours //^/%«j m, Herltqum, jamais Htrle, Helît tout court.
Gautier Map raconte, il est vrai, T histoire de Herh^ roi des Bretons. Celui-
ci, après avoir assisté dans une caverne auît noces du roi des nains, en sort
à chevaJ avec sa suite. Il apprend avec stupeur que deux siècles se sont écou-
les depuis sa visite aux nains et que Tilc est passée au pouvoir des Saxons.
Le roi des pigmC\'S lui avait confié un petit chien avec défense de descendre
de cheval avant que le brachet ne sautât à terre de lui-même. Ceux qui
oublient celte défense tombent en poussière. H tria effrayé n*ose deKendre
de cheval et, comme le chien ne saute pasi terre, H tria et sa suite se con-
damnent à une chevauchée perpétuelle. L'an premier du régne de Henri II,
on a vu cette mesnie s*engloutir prés de la Wye, dans le comté de Hcreford
(éd. Wright, p, 14-17). Gautier Map a librement combiné deux thèmes dis-
liûcis : t» la visite aux enfers avec transformation en nains des fées ou
esprits celtiques ; 2* la chevauchée. La comparaison de ce passage avec le
Herleihingus à^ la p. tSo, motitre que Htrlu a été tiré de Herktlnngtts^ conri-
pris peut-être « Herît, le prince {ihrgn ï) ». Herh est donc une création de la
fantaisie de Gautier Map et non une forme populaire, un mot galiois, comme
semble le croire M. Arthur G. L. Browa dans son intéressant hiMm (19OÎ),
p. I joet 119.
MÉLANGES
an EST VENUS QUf ÀUNERA '
J*ai relevé jadis (iffîwî., X\l, lor) remploi de cette locution, à
Tusage des hérauts d'armes annonçant le succès, dans un tournoi,
d un chevalier qu'ils vantaient d'avaniie, comme se trouvant, en
dehors des passages bien connus de la Cir^rrd/f, dans une chan-
son Je l'année 1381; M* Grôber Ta également relevé dans le
roman de Ham (cf. Journal da Savants^ 1902, p* ^95)^ V^^
ajoute un autre exemple qui m'est tombé récemment sous les
yeux, et qui montre que cette formule était encore en usage
au xv^ siècle. Dans la Moralité de Charité, le Fou, voyant
paraître la Mort qui va régler le compte des bons et des
mauvais, s* écrie ù deux reprises : Il est xrnu qui aunera f
(Ane. Th. fr.^ t. lit, p. 41}). H faut probablement corriger
// en Or, conformément à tous les autres exemples. Le
sens est : œ Voilà celui qui l'emportera sur tous, qui mettra
fin aux débats. » Cela concorde bien avec le sens qu'a cette
formule dans les autres cas où elle se présente,
G, R
SUR UN VERS
DU PELBRÎXAGE DE CHAHLEMAGNE
Lorsque le baron Olivier aperçoit la fille du roi Hugqn» il
s'écrie entre ses dents :
Ploûn ;il rd de gloire, de lalnte majesiet*
Qpc là tcnisse en France 0 a Dun b citci \ (v. 40; -^>
Le second de ces vers est fait pour surprendre- Qu'est-ce
que cette cité Je Dun ? Où la placer, sinon en France ? Et
t. iCf. Ad. Tobkr, Zeiiuhr.J. tvm. Plr»7,. Xî» 4}O.J
SUR UM VERS DU PELERINAGE DE CHAKLËMJGNB 443
alors, que signifie cette alternative : en France ou à Dan?
Francisque Michel a proposé d*identifier Dun avec la petite
ville de Châteaudun (Eure-et-Loir), dont le nom primitif est
certainement Dun. Mais a-t-on jamais vu la qualification de
cité^ qui ne convient qu*à une ville êpiscopalej appliquée à une
SI mince localité? A cette objection, M. G. Paris a répondu
en citant ' h Dictionnaire iopographiqut ifEnr€*ehLoir où on
lit, à Tarticle ChâUaudun : « Civiîas Dum\ îo8$ (ch. de la
ville de Châteaudun) ». Il n'y a qu'à s*incliner devant un fait,
mcme quand il confond ce que nous croyons avoir d^îdées; mais
encore faut-il que le fait soit solidement établi. J'ai voulu avoir
le cœur net de cette dvikis Duni\ j ai écrit i M. René Merlet,
archiviste d'Eure-et-Loir, le proprt- tils de Tauteur du Dictim-
nuire topagrapinqiu. Voici sa réponse : « Je ne connais aucun
document ancien oli ChAtcaudun soit qualifié civitas. Li réfé-
rence que vous me signalez est certainement le résultat d'une
erreur... D'ailleurs le titre le plus ancien que possède la ville de
Châteaudun est la charte de commune^ laquelle ne date que de ,
Il 97, ec Texpression m^itas Duniu^ s'y rcncoutre pas, »
Cela est catégorique : Châteaudun est hors de cause. Le vers
du Pèlerinage doit être corrigé.
M. Fœrster, choqué à bon droit de la présence de la con-
jonction (>«, a proposé de lire, au second hémistiche *a Latin la
dm. Il me semble que Ton peut serrer de plus près la leçon
du manuscrit, lequel porte : n adnn la citeL lî suffit de supposer
Finterversion dedeu^ lettres et Toub!! d*un signe abréviatif au-
dessus de la lettre u pour retrouver, par conjecture, la leçon
originale : a ûdun la dteî. Je propose de lire ainsi le vers 406 :
Qpe la tenîsse en France, a Vtrdun la cîtet.
Le fait que Verdun fiit* en 843, attribué à TEmpirc et séparé
do royaume de France ne me paraît pas être une objection
insurmontable à la lecture que je propose. Bien que le Pekri-
nage n'ait pas de substratum historique, il n'est pas impossible
que Tauteur se soît représenté la France du temps de Charle-
magne comme elle était réellement. D*autre part, ce n'est pas
la première fois que le nom d'Olivier se rencontrerait associe
ï* Uomama, IX, 49, note.
444 MèLAÎJGES
i celui de Verduti. Dans un passage de Flmnmca, où rauieur a
pris plaisir k énumérer les poèmes que cliantaicnt les jongleurs,
on lit :
L*us àÏE del vaiïet de Nantoi^
L'autre d'Oliveit de IWdu \
On a affirmé que cet Olkfeir de Ferdu devaîî être un person-
nage différent du célèbre compagnon de Roland*; je crains
qu'un n'ait été un peu vite en besogne. M. Paul Meyer nous
dira prochainement ce qu'il en pense dans le tome second de
sa nouvelle édition de Flatfmua.
A, Thomas,
DEHÈ, DEHAfT
Je ne sais si on a remarqué que la belle explication de ces
mots qui a été donnée dans la Rmminm^ XVIII, 469-472, a un
appui dans le latin du moyen âge. Il existe sans Joute d'autres
exemples que les deux que j'ai trouvés jusqu'ici de Dei odium
(ou cdîtim I>0 employé dans les imprécations. Le premier de
mes exemples est dans Du Cange, sous odïum : « Si quis autem
socîo opprobrium> aut convitia^ aut odium Dei injecerit, etc, 1»
Le passage est tiré deRymer, Fœdera,l, p* 65, et it est évident
que ces deux mots latins sont la traduction d'un ou de deux
mots français dont ils prouvent rexistence à la fin du xn"^ siècle.
L'autre exemple est encore plus intéressant parce quil nous
donne la phrase complète qui paraît être la traduction de dclsé
ait ou delmit. Il se trouve dans une phrase imprimée par Her-
vîeux (£.£j Fahtilistes latùu^ 2*^ éd,j t. 11^ p. 3 ri, fable 36). Je
cite les quelques mots qui nous concernent : n Aries erat in
ovili cum ovibus, et, aperto (h)ostiOj intravit Lupus. Quo
viso, ait Aries : Deî odium habeat, (h)ostium qui debuît fir
mare> etc. »
kij comme firtnare correspond à Jermer^ de même Dd odit^
fxtkat à del}é ait ou dehatt^ n est-il pas au moins très proba
que c'est lu traduction latine traditionnelle, qui remonte
1. 2* éd. P, Meyer, v. 700-701,
2. Romattk^ VII, 453, note.
BELTRER 445
temps OÙ tout le monde comprenait le sens originaire de dehé ?
Dans deux fables (n°* 6 et 33) de la même collection, il y a des
mots français qui terminent la fable et qui sont nécessaires pour
le sens. Le ms. est du xni* siècle selon Hervieux (I, 468).
E.-S. Sheldon.
BELTRER
On trouve ce mot dans Saint Brendan :
As aviruns dune se metcnt,
La grâce Dieu mult regretcnt,
Qper ne scvent quel part aler
Ne quels cordes deient aler,
Qpel part beltrer % quel part tendre,
Ne u devrunt lur curs prendre.
(V. 229-234)
Ce verbe fc//r«' attira mon attention, et j'eus aussitôt recours
au Dictionnaire de Godefroy, où il est dit « que probablement il est
pour velcrer, au lieu de welcrer, walcrcTy errer en mer. » Cette
explication ne me paraît pas du tout probable, et je crois que
beltrer ne peut avoir ici d'autre signification que celle de « tenir,
diriger le gouvernail », la beatilre ou la peautre, comme on
disait anciennement. Le changement du b tn p et réciproque-
ment, n'a rien d'extraordinaire, et j'ai donné dans cette RevuCy
t. XVII, 102, un exemple de beautre, qui ne doit pas être isolé.
Donc btautre, primitivement beltrcy est un dérivé verbal de
beltrer, mot dont je laisse à d'autres plus savants à trouver et
déterminer l'origine.
A. Delboulle.
I. [Cest la lecture de Fr. Michel ; M. Suchier (/?o/;/. Stud,, I, 569) lit
btttrer.Lt remaniement en versoctosyllabiquesdu ms.de l'Arsenal iporie bouter
(Zeiiscbr. f. rom, Phil., II, 441, v. 178, comme Ta déjà indiqué Godefroy
(sous BELTRER). Qpant au ms. B. N. nouv. acq. 4503 (ancien Libri 112), il
porte betlier ou beitier. Il reste à vérifier la leçon du ms. d'York. — P. M.]
446
MÉLANGES
LOURE, LOERkE
Le moi kuîrt^ traduit directement du biîn lutra^ est vieux
dans notre langue, puisqu'il apparaît dès 1125 environ ;
Uns Juins fud, qui m'aportom
Suvent peîsun» duo il me pout.
(5a int Brandan , v , 1565-)
Quant aux formes populaires kure^ loure^ ÎQttert^ conservées
dans quelques patois j Littrc n*en a assurément connu aucun
exemple ancien, sans quoi îl n aurait pas manque de le citer à
rhistorique de buîre. En voici un que j'ai rencontré par hasard
dans le Dkîhnfiaire de GodefroVj sous le mot Éomstruél :
« Nulle piaus de hure ne de housseruel ne de gourpil ne doit
point de tonJieu n, sans date- J'en avais, dans mes notes^ un
autre extrait du « Livre du Chevalier de La Tour Landry ï>(p. 3 j,
BibL elz.): « Sî a%int que la dame dist à sa claviere que tl
seroit bon de manger la grosse anguille, et en fait ilz la menge-
rent et distrent que ik dîroient a leur seignour que le loerre
Tavait mangée, " Je n'ai pas été médiocrement surpris de ren-
contrer, dans le CompUnunt^ ce passage c\it sous Tarticle Loir,
Les continuateurs de Godefroy ont eu ici une forte distraction^
car ce n'est pas Thabitude du loir de fréquenter les rivières et
de vivre de poisson* Voici encore une autre forme du mot
loutre qui n"a pas été remarquée, que je sache, par les lexico-
graphes : * On fait cuire un hérisson en ces mesmes huyiles et
en vin clairet, jusques à estre pourry, et l'huille le plus gras
convient aux podagriques; on peut aussi autant en faire d'un
renard> d'une Imtîti et d*un blereau », (Tagault, Chirurgie^
p, 714, édit. de 1645).
A* Delboulle.
ORIGINE DU MOT SABRENAS OU SABRBKAVD
Sabrenas ou sabrenaud n'est pas un vieux mot, car il n'a pas
d'historique dans Littré, et le Dkîimnmrt gméral uqu cite
qu'un exemple qui date de la première moitié du xvn* siècle.
A cette époque on le rencontre sunout dans la Mmt mymmnéi
de David lerrand où domine la langue ou jarigon « purinique».
4^8 MÉLANGES
M. Meyer-Lûbke a cherché à la résoudre, et voici comme*,
L7 simple était vélaire {pinguis) en latin et 17 double était
palatale (fXiVi^); nous constatons que calorem donne ffifl/*"ur
et non *chekuri si Va latin ne devient pas ^ , cela tient à la
nature vélaire de 17 suivante qui est plus forte que l'influence
paîatalisante du r initiaL En revanche, n'est-il pas naturel que
Va placé devant une / double, c'est-à-dire palatale^ devienne e^
puisque TinBuence de cette / s ajoute à celle de la f^latale
initiale ?
Je ne veux pas discuter sur la nature de 17 en latin et sur la
valeur du témoignage des grammairiens anciens en ce qui
concerne cette consonne : cela ne servirait de rien ici* Sup-
posons que M» Mcyer-Lûbke ait raison et eff'orçons-nous de
nous représenter révolution de Va devant l double telle qu'il
la conçoit* Pour lui, évidemment, il y aeuune période où dans
le nord de la Gaule, on prononçait ^galina^ ayant réduit
// à /, mais conservant à cette / un son palatal qui la distin-
guait de 17 de calorem qui avait un son vélaire : de là^ en
français, d'une ipûTtgeline^ de Tautre chaUur, Mais quand gal-
lina se réduisît à *galina, la même réduction de // à / ne se
produisit-elle pas partout et gallusne devint-il pas *galus?
Comment peut-il se faire alors que de gallus le français ait
tiré jal^ tandis que de gallina il a tiré gelimt De pan et
d*autre nous avons affaire à une / palatale ; peut-on concevoir
que k même son de 17 'favorise le passage de i*^ protontque à
e et entrave l'évolution de Va tonique ? Il est manifeste que si
gallus donne /a/, tandis que palus donne pcl, cela tient à ce
que Va est suivi d*une / double dans le premier cas, d'une
K Je pra|>hra5e Tidée de M. Meycr-Lûbkc pour b faire plus facilement
comprendre aux Jecieurs français et a quelques autres. Voici ses propre»
paroles : m Fur das i tn gtUne ist vielleicht folgende Deutung tu geben^
Latdntsch l war, wcnn ihn nîcht i, e foigte, velar^ // pabul, oJcr wentg»*
lens jenes dunkel ipinguh), dtcscr hcU {t-xilu), Nun ist gaii;t klar, ^s;^ dk
Fàrbtttig des / sich im g;iUischen L^tetn lang genug geïulten hattc, um deo
Wandcl von vortouigen 4 zu r zu Innderu* Soll a un nîcht umgckchn U hell
gcblieben sein» so dass das zwischt^n xwei Palatale» oder llalbpalatjlen
dngekJemmtc a ïu e wurdc? Die Sadie bcdûrftc tiatùrlich cittcr dngçlKD-
dercn umersuchung. ■
FRANC. CELINE 449
seule / dans le second. Cette simple observation nie paraît
ruiner le trop ingénieux système de M. Meycr-Lùbke.
Une autre hypothèse, beaucoup plus naturelle, consiste à
supposer que gallina était devenu *galina en latin vulgaire:
c'est celle qu'admettent MM. Bourciez' et Nyrop ^ Il me
parait certain que la forme française geliue remonte effective-
ment à une prononciation * gai in a qui a dû être en usage
dans le nord de la Gaule, sinon ailleurs. Le roumain gaina et
\q prowençil galina, jalina ne peuvent pas nous renseigner; en
revanche l'italien gallina, .l'espagnol gallina , le portugais gai-
linha et le gascon garia témoignent incontestablement en
faveur de gallina. Mais ce n'est pas la première fois qu'on
constate des divergences dans le latin vulgaire, et il n'y a pas
de quoi nous faire reculer devant une hypothèse à laquelle
nous sommes acculés par l'étude méthodique de la phonétique
française. Je voudrais aller plus loin qu'on ne l'a fait jusqu'ici et
montrer que l'existence en latin d'une forme *galina est tout
ce qu'il y a de plus vraisemblable, non pas seulement parce
<]U€ le français la postule, mais parce qu'elle est en harmonie
3vec certaines habitudes de la langue latine elle-même.
On a remarqué depuis longtemps que certains mots latins
^ont la première syllabe était suivie d'une consonne double
formaient naissance à des dérives dans lesquels la consonne se
^^mplifiait devant une syllabe longue. Exemples : canna,
cana.lis; far, farris, farina; mamma, mamilla; obba,
ol>î 1 la; offa, ofella, etc. Je me borne à renvoyer à ce qui a
^^^ clit tout récemment de cette particularité phonétique par
f^- X^endryes dans sa thèse sur l'intensité initiale en latin', et
^ i"^inarquer que l'existence de *galina à côté de gallus
P^Ut se justifier par l'existence même de ce que les latinistes
*Pp^ lient brièvement la loi de mamilla. Enfin, passant du
^^ï^Tiaine de la théorie à celui des faits, j'attirerai Tattcntion
* - Pràis hist. de phonétique française, 2* édition, JJ 89, 121, 186,
^- Gramm. hist. de la langue fr., j 348. M. lîchrens, dans la 4^: édition de
^^'^^an, tout en renvoyant à la note de M. Meyer-Lùbke, maintient pru-
"^*ïïnîent que gallina > gcline est encore inexpliqué.
^3* Rech. sur Vhistoire et les effets de V intensité initiale en latin (Paris, Klinck-
*^*=<^W, 1900, pp. 57-58 et 345).
R0mMm, XXXJI 29
450 MÉLANGES
sur ces deux gloses du fameux recueil de Cassel : cal lus (=
gallus) : hano ; galina: hanin^.'
A. Thomas.
AVOIR SON OLIVIER COURANT
G. Paris a connu cinq exemples de cette locution. Trois lui
ont été fournis par la chronique de Geoffroi de Paris, un par
Coquillart, un enfin par Gautier de Coinci. Il se trouve que,
pour ce dernier exemple, un ms. .porte son alevin (au lieu
de son olivier) a si corant. Et de plus dans un autre passage de
Gautier de Coinci on lit : Bien iert coran:^ ses ailevins. D'où l'ex-
plication proposée par G. Paris : « C'est une figure prise à la
pisciculture : quand l'alevin est courant, vivant et frétillant,
il se porte bien, et celui qui le possède est en bonne santé.
La locution ne se comprit plus, et on remplaça le mot alevin,
inconnu en dehors de certains milieux, par celui d'olivier :
il ne donnait aucun sens, mais il était connu, c'est tout ce
qu'il fallait * .»
Cette explication était évidemment conjecturale. Elle pouvait
se soutenir, tout en laissant place au doute ', tant qu'on n'en
avait qu'un très petit nombre d'exemples, mais il est clair
qu'elle devait perdre toute vraisemblance le jour où l'on
aurait trouvé de nouveaux exemples de la locution « avoir
son olivier (et non son alevin) courant ». Or c'est justement
ce qui est arrivé. Je rencontrai cette énigmatique locution en
des textes que G. Paris ne connaissait pas : l'un de ces textes
est imprimé dans la Romania, XXX, 315, et à cette occasion
j'annonçai, en note, l'intention de publier des exemples qui
contrediraient l'explication donnée par G. Paris : seulement,
comme mon opinion était purement négative, et comme en
fait je n'avais aucune explication valable à donner de la locution,
je me contentai de remettre mes textes à G. Paris, l'enga-
geant à reprendre la question. J'ai retrouvé mes notes, et bien
1. Nos 87 et 88, col. 41 de VAÎtfr. Uebungsbuch de MM. Fœrster et
Koschwitz, 2«-" éd.
2. Remania, XVIII, 132.
3. Elle a paru en effet douteuse à M. Tobler, Zeitschr. /. rovt. Phil.j
XIII, 330-1.
AVOIR SON OLIVIER COURANT 45 I
d'autres, hélas ! dont il n'a pas pu faire usage, dans ses papiers.
Je crois utile de les publier.
D'abord il n'est pas certain que le sens soit bien celui que
donne Godefroy et que Paris a accepté : « avoir la chance, le
vent en poupe, la vogue, la bonne passe. » La locution est
relevée par Cotgrave, dont les explications valent mieux, en
général, que celles de Godefroy : « Il a tous ses oliviers courans,
Ar hathbis full swindge or liberly; he dot h what ht list » ; — « faire
ce qu'on veut, n'avoir à redouter aucune opposition », tel est le
vrai sens. Dans l'exemple de la Romania, XXX, 315, on lit :
Olivier aront la courant,
Jamais ne soufFer[r]ont contraire.
Là le sens est bien évidemment celui qu'indique Cotgrave. Il
en est de même encore de velut (ou quasi) Olivero currenU dans
les deux exemples suivants, qui, étant de Giraud le Cambrien,
appartiennent aux premières années du xiii* siècle ou même
aux dernières du xii*. Le premier est tiré de la Gemma ecclesias-
'^, n, xxvii (Giraldi Catnbrensis opéra, éd. du Maître des
Ro/es, n, 293)
*^f^ny exemplum de episcopo qui, per decanos et ofBciales ubi ccclcsie dcdi-
Jf^ *^«n fuerant, diem eisdem dcdicandis satis brevem statuit, ut clerici pro
«tic:>-nead nutum episcopi finem faciant, vel, si forte dcdicentur, pro exhi-
'or^^ finiant. Unde fit ut, quasi Olivero curretiie, et hospitium episcopus in
^l^^^i ^iproxîma vel ecdesiis accipiat, et tamen ab illo pio hospitio très marcas
9^--» âtuor extorqueat.
^^^=i^ici le second exemple (De invectionibuSy IV, viii; Giraldi
?f^^^ ^ m, 88), où la locution velut Olivero currente intervient à
i oco^zi^^Jon d'une lettre de Jean, évêque d'Albano, aux évêques
^ *^^^^^ et de Worcester :
Prcifcs
nde et sic scribebant tam propter personam archidiaconi, quam dilectam
"^^^^-^ntet acceptam, ut promoveri posset, quam propter fructum etiam
^'^^^^ ^-lum et emolumentum quod curiam Romanam ex ejus promotione et
^^^^"^ ^uriensis ccclesie per ipsum vexationc pro ccrto noverant consecuturam ;
ptoim.m:^e tanquam ambidextri, et velut Olivero currente^ pecuniam in tanta
qaatkx.^tate oblatam una manu avide sumebant, et alteram nihilominus exten-
dete "naanum ad lucra futura satagebant.
^^■^ sens est bien celui qu'indique Cotgrave : quant à Tori-
gine de la locution, elle reste à trouver. P. M.
452
MÉLANGES
CHJNjSk; ENFANT CHANGÉ EN NOURRICE
<t Changon ad)., ternie injurieux», dît M. Godefroy, qui à
l'appui de cette interprétation un peu vague, cite une pièce
tirée des registres du Trésor des Chartes (1426) où il est question
de deux particuliers qui se prennent de querelle, Tun deux, un
certain Guillaume Tirant, appelant l'autre clmngan^ et rinjurié
répondant « quHI n'estoit point changon, et qu'il greveroit ut
courrouceroît ledit Tirant avant qu'il feust gaires de temps n*.
Cet exemple avait déjà été cîté par Carpenrier, dans son
supplément A Du Cange, au mot changarb% d'où il a passé
dans le Dictionnaire de Sainte-Palaye, introduit par le nouvel
éditeur.
Carpentier avait proposé une interprétation plus précise que
celle dont M. Godefroy a cru devoir se contenter : w sed et
conviciumj for tasse spurium, sonat haec eadem vox,.. » C'est en
effet à peu prés le sens : changon^ ou plutôt changtmiy chanjùn^
est un enfant substitué. Cela résulte d'un texte cité par Hens-
cliel dans son édition de Du Cange, au mot cambio. Ce texte
est emprunté à un recueil alphabétique de superstitions rédigé
en 1415, piir un certain Nicolaus Magnus de Gawe % et publié
d'après un ms. de Bâle par J, Grimm, dans la première édi-
tion (183 s) de sa Deutsche Mythologie, Anhang^ pp. xLiv-xLVi '.
Le passage qui nous intéresse est ainsi conçu :
Sed forte adhuc diceres vidciur utique quod dcmoncs proprie gcnercnl,
quia compenum est, et apud vulgares ocMumuniter didiiir, quod filii dcmo-
nuttî mcuborum muîimbtîs, eorum film subtraciis, ab ipsis dctnonibus stip-
poii^cur, et ab eb| uiiquam proprij fi tu, outnantur, propter quod ecîoni
Ciimhfinifs dieu mur, eciam rambiti vd mutuati» et mulicrlbus paricntibusia
propriis ^iîs subtracîis, supposili; bos dicuoî maçikntos, scnipçf cjabnics»
laais eosque (eo usque?} blbulos, ut(Ua?) quod nulb uberutc laais nnum
lactane SBfBdunt (^uEdiiit r).
Voici un nouvel exemple de ce mot, probablement le plus
ancien de tous, que je tire d*un sermon de Jacques de Vitri
t| Sous ihangia â^m Tédition Henschel.
a. Jauer, en Silésie.
}, Dtns h quamémeédJtloii(par H. H, Mcyer, I875-8), 111, 414,
CHARME EN VERS FRANÇAIS 453
« ad hospitalarios et custodes infirmorum ». Je cite d'après
le ms. 534 de Cambrai (fol. 112 à) dont j'ai déjà fait usage
jadis'. Le même texte se trouve dans le ms. B. N. lat. 17509
fol. 77 d :
... Qjiidem enim similes sunt puero quemGallici vocant chamjon yéi cJmu-
fofif qui multas nutrices lactando exhaurit, et tamem non proficit nec ad cre-
meotum pervenit, sed ventrem durum habet et infiatum. Corpus autem
hujus non perducitur ad incrementum.
D'une formation analogue, mais avec un suffixe tout autre,
est l'anglais changeling, dont on a des exemples depuis la fin
du XVI* siècle*.
P. M.
CHARME EN VERS FRANÇAIS
En parcourant les divers traités de médecine que renferme
le ms. B. N. lat. 7056, souvent cité dans mes dernières
publications de la Romania, j'y ai rencontré un charme en
vers français qu'il est bon d'imprimer, d'autant plus qu'il n'est
pas long. Ce charme a pris place au fol. 100 (anc. 281), à la
fin du Traciaius de egrittidimbus mulierum signalé précédem-
ment, très peu de lignes après le charme Eugeiiius y Stephanus,,,
publié ci-dessus, p. 293. Voici le texte.
En Betleem la cité.
Un veirs enfant i fut nez
De vcire femme veire enfant
Veires veines de cest home tenez vostre î sang.
Et si fuerit vir, de ipso sanguine scribe in fronte ejus Veronix ; si femina
Veronia,
On voit, par les dernières lignes, que ce charme devait être
destiné à arrêter les hémorragies. P. M.
I. )?(Miiani(i» XXI, 81.
2. Voir Murray, Nnv engL Dictionary :«... Cliangeling. A child secretly
substituted for another in infancy, cspecially a child (usually stupid or ugly)
supposed to hâve been left by fairies in exchange for one stolen. » Il y a
beaucoup d'histoires populaires concernant les djangt-lini^^s dans la Fuiry
Mythoiogy de Th. Keightley.
3. Ms. nostrey en toutes lettres.
COMPTES RENDUS
Mulomadleina Chlrotiis, pubU par E, Oder, Tj^îps^jg, 1901. In-S*"»^
xxxvii*467 p.
Ce traité de médecme vètérmâire de la fia du iv« siècle, auquel a puis
Vègèce et dont Timponance â éié signalée par MM. W> Meycr et Wôlflîîo^
(cf, Lammaizsch, Arch, f. ht. Lfx. t, XJl, pp. 40^, %%l% vient enrichir sur
quel<iues points nos connaissances é%x latin vulgaire. On y trouve ancsièçs
plusieurs formes populaires, rares ou incnnnues jusqu'ici et existant en roniiin ;
j*cn ai relevé quelques-unes dans mon Hi$L de la L rmm. ; de m^nie,
M. Kôrting, dans Li nouvelle édidon de son Lai.-r&m, Wôrkrh^n^ îS7t
Î90S. L'éditioQ quVn donne M. Oder, d*après le ms. unique de Munich,
nous permet maintenant de connaître tout ce qu*il contient dlntérciMnt
pour rhistoire des langues romanes. Au point de vue phonétique et morpho-
logique, le texte n'a certes qu'une vaïeur rebtivc i cause des remaniements
qu*îl a subis et de h date récente du manuscrit (xv siècle); On nV relève
d'ailleurs que peu de parttcubrités phonétiques et Tnorphologlques nouvelles :
bcrbactum» verbactum^=vervaeium 202, 11; 207» 15; cambazir
gamba î, îo; 12,8, etc. (voit V index); crancus:=canccr 102, 22; scar*
pellum=scalpelluîn 202, 15, etc. (voir l'index ; comp. ît. scarpellare^ csp.
tscarpeîaf}\ singlos^rsingulos 2^5, 19; sûldaverint=isâlidavc-
rinï 209, 31 ; armora pL de armus (roum, t^nnun) 9» i\\ 77, 16; 1S7,
î; bobum, bobis=bovem, bob us 290, 25; 284, i (cf, roum. t^&u)i
cadebit (IIU conjj loô, 9; claro adv* 25, 8 (cf. routn. ^hùki}i
îpsahora 71, 16; 93, 2j (cf, esp. «cw-a);i y ajouter peut-^re ad pres-
sura II» 17. àskn% lequel M. Wôifflio veut voir le prototype du fr, ûpTh\ des
formes telles que battere, berbena, c an cru s, criblare, femutn=:
Bmum, ferra go:=ifar rage, grassus^ grassitudo» graticu latim,
cri cul a, salvàticus, acrus^ cocete^ defor as, d esubtus, desupra,
foHa, in contra, lacté, ossum, peduculus, peduculosus» sca-
bia, va su m (voir Vtnâix et la préface» pp. xxiv^ xxvi; nous sontcomiuc^
d*autres textes (le Corp, §hss. lai., etc.); il n*y a non plus lîcn de nouvesni
dans remploi comme subsiant ils de admissarius 3||, 9; 244, j; gatlU
nacîune, gallinacïa 249, i|; 28e, 9; hibcrnus 200, 14; 285, 14. H
R. WEEKS, Aimer le Chéti) 455
y a, par contre, plus de choses à relever pour le lexique ; si nous faisons
abstraction des formes mittere, veteranus employées, comme dans
quelques autres textes^ au sens de « mettre », « vieux », nous avons à signaler :
ambulatura 78, 4 (roum. umhîâturd); caldare 116, 6; 246, 31 (cf.
roum. (inyâl^tre qui peut d'ailleurs être un dérivé roumain de cald; cal car e
employé souvent avec la signification de «r marcher » (surtout dans les expres-
sions : in capite unguîae càtcare 202, 14, iu illo pede.,, calcare 11, ii^roum.
a cdka invirfulurtghilor, in piciorul,..); excarnare 184, 26 (fr. écharner)\
pergyrare 64, 3o(comp. praegyrare 77, 29; 129, 10) attesté aussi dans
la Peregrin. Silviae; comp. roum. (îm)prejurare ; primo vere 289, 20, 21
« au printemps • (c'est un pendant àprimavera donné par une inscription
et dans le Corp,gloss.\ cf. mon Hist. de la l. roum, y p. 162); responderc
per au sens de « passer par » : sanguis per ossum respondeat 22, 4 ; 191, 9, cf.
210, 22--=:roum. sîngele rdspumfe prinos (le fr. emploie aussi repondre de cette
manière); spissusadv. 163, 21 « souvent » comme Tit. spesso; subala
122, 3 (attesté aussi dans le Corp. gloss. lai.), l'étymologie du roum. (sub)
suarà « aisselle»; suspiramentum 37, 25 (cf. a.-fr. souspirement) ; à
remarquer, en outre, les expressions : sanguis amhulaverit 202, s ; amhuhhit
in lotus 102, 21; in unam partem ambulant 102, 2 (comp. roum. tmiumbld
stngele; a umbla intr^o lature; a umbla intr'o parte) \ in directo venae 33, 17
(in dreptulvinei en roum.); in lougo^ in longum 70, 19; 31, 30; longasuspi-
rabit iio, 9 (roum. în lung; a suspina lung)\ per cribrum traicies 226, 20
(roum. a trece princiur) ; ad vivum 209, 2--fr. au vif. Le texte est intéressant
aussi pour la synuxe; nous nous contentons de rappeler remploi de ad, de,
au datif et au génitif (voir Vittdex), la transcripttion du passif par des formes
réfléchies : se sanare 13, 29^ sanari (cf. aussi les remarques, d'ailleurs
très sommaires, de l'éditeur, p. 309).
O. Densusianct.
Raymond Weeks. Aimer le Chét If (Extrait à%is Publications of th modem
language Association of America, t. XVII, pp. 411-434 (oct. 191^2),
M. R. Weeks tente de reconstituer le rôle qu'a dû jouer Aïmer le Chétif
dans notre poésie épique primitive, avant d'être incorporé à la geste d'Orange.
Il s'efforce d'établir que ce personnage combattit les Sarrasins en Kspagnc
avant Charlemagne ; qu'étant tombé aux mains des ennemis, il fut délivré par
le grand empereur ; que les plus anciens poèmes dont il était le héros ayant
disparu, sa renommée diminua, pas assez cependant pour qu'on ne le jugeât
digne d'entrer dans la famille d'Aimer! de Narbonne ; il y occupa d'abord une
place très en \'ue ; on lui adjoignit Vivien, dont on fit son neveu (état de la
légende représenté par les Nerbonesî). Plus tard, éclipse par Guillaume, il devint
le moins brillant des satellites qui gravitèrent autour de Tastre nouveau.
Il y a dans ce mémoire du talent et une finesse d'esprit qui dégénère faci-
45^ COMPTES RENDUS
Icmt'ni en cette subtilité diingcrcuse que plusieurs des devandérs de M. W.
dans cet ordre d^études n*ont pâs toujours su é^îiLT. M. W* me paraît* d'autre
part, attacher trop dlmponance â cenains dêtaîb des NtrhGnmf qui n'ont
petit-iïtre d'autre source que riniaguiation d'Andréa. Et ce reprodie encore,
n nVst p.is seulii YéWok encouru. Etitîn i>ts renseignements sont îneomplets;
c'est ainsi que dans la liste des poèmes (p- 4 12) qui mcniioniient Aîmcr, on
ne trouve ni fe Cottrmtttetfi^ttt Lauis^ v, 826-850 ; ni fieraiftas^ p. 6j; ni
Hftmt Capet, p. 42, 44, iiii 112, 127, 1^1. ;|7» îB% i|6; ni Vivim âû
Mowhrtitft^ V. 715; ni Aniioche^ t. H, p, 269, Le Cmifonnimenî a] au te un té-
moïgoiige à ceux quf Tauteur a cités de la résolution prise par Aîmer de ne '
jamais entrer « en loge ne Teste chevroné *. Il s'^îgit sans doute d'un n co ve-
nant 19 fait par le jeune chevalier à Tépoque de son adoubement» andogue à
celui de Vivien. Fiirabras rappelle, avec Aimtri de Nurbonm (v, 4698)1 la
mort de * raufage», tué par Aimer, et nous apprend que cet exploll fut pré-
pare pi^r la femme même du Sarrasin, éprise d'amour pour le captif, firtmi
Captif commt Ahmrî df Narhonne(\\ 4697), appelle cette femnie Soramonde ;
nous fait siivoir qu'Aimer régna avec clic â Vetiise ; et ajoute, d'accord avec
Aubri de Trois-Fontaincs» qu'il eut d'elle un fils nommé Drogon (Aubri dit
Rogon)', qui lui succédai Venise, t^ns Vivien dr Mombrant Aîmcr est
aussi dit vt de Venise* 1» Huott Capei et Vivien de Motfihrunt doivent donc être
ajmités aux poèmes (cités p. 425-426) qui placent en Italie le théâtre des
hauts taits d'Aimer,
M. W. est convaincu que dans la légende primitive c'est en Espagne que
le héros s*iïlustre eti luttant contre les infidèle^^ mais les arguments qu'il in^
voque à Tappui de cette thèse ne sont rien moins que probants. Ils se réduisent
â une série d'hypothèses, dont 'aucune ne repose sur le moindre appui.
L*un des poèmes qui ont concouru à former la chanson d\4îiscans aurait
raconté les aventures de Garin en Vénétie ; on aurait plus tard supprimé le
nom de Garin, en négligeam de retrancher également celui de Venise (édit.
Guessard* p. 216). qui se serait ainsi trouvé accolé par erreur â celui
d'Aimer. D^AHicam Terreur se serait propagée dans d'autres compostittom*
Je ne crois pas qu'il soit utile d'insister sur cc*s învraisemManccs'. Les choses ^
se présenienr en réalité bien plus simplement. En réunissant les indications
données par le moine de Trois-Fontaines ^ et par les auteurs de Fierahûs
(p, 6î)t à*Aîmn-t à€ Nûrhmié(v. 4589-4602) cl de Huôti C-J/*)*! (passages cités
plus haut), on a le sujet d*un poème perdu dont Aimer était ïc héros i
Armer est allé au secours du pape et des Honxains, attaqués p^r les Sarrasins
(comme Guillaume dans le Cimrùnmmftii L&uîi) ; il est blessé, fait prisonnier
u Fertï, Mmh Gtrm., Scriptom, XXHI, p. 716, 1. 40,
2. Plus ingénieux encore, mais non plus convaincant, est le paragraphe ou
M. Wceks ^'efforce d'établir que dans le CiKtmmi et dans AltMum le nom
d'Amieri a été substitué â celui d'Aimer.
l, Pertjf, Mmi, Gcrm,, 5cripi&r€S, XXI II» P^ 7Pt !• iO et &uiv»
TiERSOT, Chansons populaires 457
et conduit en captivité à Venise ; aidé par Soramonde, femme de Taufage, il
sort de prison, tue le Sarrasin, se rend maître de la ville, épouse sa libératrice
et a d'elle un fils appelé Drogon. Il est raisonnable de croire que ce roman
représentait un état ancien de la légende ; que plus tard seulement on a fait
guerroyer Aïmer en Espagne, scène habituelle des exploits de la geste nar-
bonnaise ; et qu*aIors des jongleurs ignorants placèrent au delà des Pyrénées
« Saint Marc de Venis » (Aliscatis^'édh. Guessard, p. 126, 148, Narbomtais*).
Où mourut Aïmer ? Les Nerbottesi disent sous Orange, la Mort Aimeri
(y. 1385) dit à Porpaillart. Et M. W., qui donne généralement la préférence
au récit italien, l'abandonne cette fois, parce que Porpaillart est en Espagne. Il
n'a pas connu Huon Capet, qui fait mourir Aïmer « en la cité de Mequez »
(p. 42), attiré dans un guet-apens parle Soudan, qui le fit écartcler*.
Malgré les critiques que je viens de lui adresser, le travail de M. Weeks est
intéressant et mérite d'être lu avec attention.
Ernest Langlois.
Chansons populaires recueillies dans les Alpes fran-
çaises (Savoie et Dauphiné), par Julien Tiersot. Grenoble, Falquc et
Perrin; Moutiers, Ducloz. In-40, xxix-549 pages.
Bien que les chansons populaires, comme tout ce qui est postérieur au
moyen âge» demeure en dehors du cadre actuel de la Rornania, nous ne pou-
vons nous dispenser d'annoncer sommairement ce beau volume où sont con-
densés les résultats de recherches conduites avec méthode pendant plusieurs
années. Le rapport au Ministre par lequel s'ouvre la publication (M. Tiersot
avait une mission du gouvernement), la préface qui suit, sont d'une lecture
très attachante. M. Tiersot s'est mis en campagne juste à temps pour pou-
voir encore s'entretenir avec des vieillards dans la mémoire desquels som-
meillaient de vieilles chansons qu'on ne chante plus guère, et qui, pour la
plupart, sont morts pendant que le volume s'imprimait.
Il a pu aussi avoir communication de vieux cahiers, datant de plus d'un
demi-siècle. Mais comme, en sa qualité de musicien, c'était à la musique
qu'il attachait le plus de prix, il était essentiel qu'il pût faire chanter ceux qui
savaient encore des chants populaires, et c'est pourquoi il importait qu'il pût
recueillir la parole vivante. Il n'a pas publié (c'eût été matériellement impos-
sible) tous les textes qu'il a recueillis ; il a dû faire un choix, et nous n'avons
1. Comparer les vers 7951 aux vers 538, 1047-48, 1176.
2. Dans VivUn de Momhraui, que M. W. n'a pas connu davantage, mais
dont il n'y a pas à tenir compte ici, Aïmer de Venise est tué dans un combat
sous les niurs de Mombrant (v. 715). L'auteur d'Aye d'Avionoti (p. 44 et p.
52) dit qu'il trouva la mort dans une bataille où Garin d'Anseùne et Her-
naut de Gironde furent faits prisonniers.
4S8 COMPTES MENDUS
pâs de mi^n de douter de [4 valeur de ce choix. La plupart de ces chânsoDS
sorit fnioçiiîscs, par conséquent importées^ comme beaucoup des chansons
populaires de U Provence ou du Pîcrnont; quelques- unes cependaDt sont
patoises (par ex. Ltttroh smtri^ p. 114)^ mais celles-Jà mairie sont iinitéesde
chants français. On sait que le français a pénètre de borgne heure en Savoie,
bien pîus tôt certaîncnient qu*en Provence ou en Languedoc. Le recwcil de
M, T. est intéressant; il peut utre considéré comme Tune des plus impor-
tatites collections de poésies populaires qui aient été publiées jusqu'à ce jour.
YoM qui est entendu. Toutefois sur divers points la critique trouverait a
s*e3tercer. Et d*abord beaucoup de ces chansons ont déjà été publiées en
d\iutres rédactions, M. T, le sait et il le dît, mais d'une façon Irôp générak*
I{ ne cite gui^re que tes publications relatives à b Savoie, au DauphtnC* et ^u%
pays voisins. Il aurait augmenté le prix de son recueil en donnant pour
chaque pièce une bibliographie systématique et aussi complète que possible.
On s'étonne que M. T.» publiant deux leçons assez médiocres delà FtmetU^
n*ait pas jugé a propos de faire mention du travail si approfondi que Don-
cieux a consacré â cette chanson dans le tome XX de la Romania. Bibliogra-
phie ^ part, des références eussent été souvent bien utiles. Ainsi la pièce
Intitulée t< les répliques de Marion »> (p, |ife), classée assez mal à propos
parmi les chansons de la Mal mariée, n*cs£ qu*un fragment peu tntelUgible.
Une version proven*;aie plus complète, et â tous égards metHeure^ a été publiée
p.ir Lexandre, dans le FHmna^edr Mimlît (Paris, r864, p. 170), d'après une
communication de Fr. Mistral, qui me l*a chantée plus d'une fois, il y a quarante
'ans\ D'autres fois on regrette que M. T. n'ait pas donné un pcti plus de
variantes. Ainsi pour la chansoti de Christophe {p. [84), M* T. en a recueilli trois
versions : uneà Bonne vî île, deux dans le Quei ras. Sont-ellesldemiques? J'au-
rais d'autant plus dibiré en connaître les différences que le sujet est, â peu
prés, celui du Saveiur BaiîUt que j'ai publié dans le t, III de b Romania.
En général M. T. ne donne pas asse^ de varia nieSj et n'explique pas
assez 'comme 11 constitue ses leicies. Dîra-t-on qu'il a craint de grossir soii
volume? Mais il y avait des économies de place à faire d'un autre c6té. Tout
le premier chapitre {CiMnsons Mituriquei} pouvait être supprimé, ou du
moins très résumé, sans grand dommage. Il ne contient guère que des pièces
déj imprimées el dont plusieurs n'ont nullement le caraaére populaire*
D'ailleurs elles ne sont pas toutes publiées de façon â satisfaire pleinement
la critique. Ainsi (p. 11) M. T, reproduit, d'après le livret connu sous le
nom de La Flmr des chanM0m\ une u chanson en savoysien »» mais U
aurait dû dire qu^it ne la donnait pas entière. Les chansons sur TEscalade de
t. Une réfaction un peu di^érente esi dtée par A. Daudet dans Numa
R&umistaff, éd. Charpentier, p. 1 7S.
2, m IjtFkurdachûHsotts, Lesgrans c ban sons nouvelles qui sont en noml*re
cent ct4ï% où est comprise U chanson du Kov, la chanson de F'âvie« b chan-
son que le roy ^st en Êspaigne^ la chanson Je Homme^ la chan^n des Bru*
TiERSOT, Chansons populaires 459
Genève (pp. 34 et s.), dont la seconde est du temps de la Révolution fran-
çaise, sont vraiment hors de leur place. Et on pourrait en dire autant de bon
nombre des pièces groupées dans ce chapitre. Nous aurions préféré que M. T.
nous communiquât d*une £^on plus complète les résuluts de ses recherches.
Malgré d'évidents défauts, ce recueil est intéressant, et fournit à Thistoire
de la chanson populaire française des éléments nouveaux et importants.
P. M.
nettes et Teremutu et plusieurs aultrcs nouvelles chansons, lesquelles trou-
vères par la table ensuyvant. » — M. T. indique, comme date de ce recueil
(dont il existe une réimpression moderne), la seconde moitié du xvi« siècle,
mais Bninet le çhtce vers 1 5 30.
PÉRIODIQUES
ZEXTSCHRtFT FUR ROMANISCKE FHÏLOl-OCIl, XXVI, 5* — P, 52Ï , J. PirSOfl,
Das Oisitkr Ghisar. Cvt article fort savant et fort iiuèressaiit a pour objet de
montrer que ïa partie latttie des Gloses de Cassel est étroiiemttit dépendante
d'autres glossaire, et que la plupan des formes que Ton y considère comme
romanes appartiennent plutôt au latin vulgaire prêroman (mais Tauteur recon-
naît lui*nienic que la limite est artitkielle) ou à la tradition graphique du bas-
iatin ; il m\ résulte qu'on 11e peut guère l'assigner à une rÇ*gion déterminée de
la Roimnui : tout au plus dans quelques formes peut -on reconnaître des traits
ou réto-rotnans ou g^lo-romans. Je ne puis entrer ici dans le détail , et signa-
ler les tïoiubreux rapprochements avec d'autres glossaires et les explications
souvent très plausibles de telle ou telle forme : je citerai seulement ce qui eM
dit de dugf (où lauteur voit avec raison rimpèfatïf), umhtra, mtéum, ipinah^
€%imi et Citmalla {pour mmi et aiuufitit}^ talauun, estlos^ meiiran^ hilf,pn^
ùsrmi ou C4risx ', shirwi, Inïfrmtoi, aihtas oculus, tmimîiKiiril (qui serait pour
* miwdttcattîis, perdu ^ ponderaus^ fuisthis). Je croîs que M. P. va un peu trop
loin dans la voie, d*ailleurs excellente, où il est entré, et que l'élément pro*
premeni roman des Gloses n*cst pas aussi restreint qu'il le dît. — P. 5 5 1 *
Elise RidncTt 2^tir îznhvu'kfuHg u}n /i*'. apud >► npnn** anL Ltude très intéres*
santc Cl très consciencieuse, que je n'M pas le loisir d'examiner en détail, mais
dont les résultats paraissent plausibles. — P. Jp, M, Friedwagner, Dk fVr-
wmtiltscfhifis-iŒd iVerlvtrMHnh^f àtr Menn^h-Handschrifîett (an). Dans cette
étude très longue et très minutieuse, M, Friedwagner soumet â un nouveau
contrt^ie le rapport des manuscrits de Meruugis, et notamment Topinion que
j'ai émise, ainsi que M. Ebeling et d'autres sur la valeur critique du manuscrit
de Turin, a Je voudrais presque, dit-il en concluant, laisser à d'autres le soin
de répondre aux questions posées, car je suis partie au procès. Mais mon avis,
si je îc donne, est que mon ancienne classification est la bonne, et que celle
qu*on a proposée à Tencontre non seulement n*est pas démontrable, ntais est
très invraisemblable, et que quand même toutes les raisons que j'ai donnée?;,
isolèn>ent et dans leur ensemble, ne vaudraient rien, il n'y aurait qu'une con-
1 . C'ci^t le mol où récemment M. Baist 3 cm recontsaitre un mot sîavo
(voy* Rom.^ XXXI, 450). Je nrétonne à ce propos que M. Pirson n'ait pas
dté cet article de M. BaiJrt, dont les obser\'atîOns coïncident souvent avec les
siennes, publiées dan4i le même recueil plusieurs mois plus tard.
pfcRIODiaUES 461
dusion sûre à tirer, c'est qu'il n'y a moyen d'établir aucune classification. » Il
m'est impossible de discuter dans le détail les innombrables passages exami-
nés par M. Fr. ; je me bornerai à dire que ceux de ses arguments que j'ai
regardés de près ne m'ont point paru convaincants; ce qu'on peut dire en tout
cas, c'est que si M. Fr. donne une nouvelle édition de Meraugis^ elle différera
de la première plus qu'il ne semble l'admettre ici. Il faut souhaiter qu'il donne
cette édition, où le texte profitera certainement beaucoup de ses attentives et
pénétrantes recherches.
Vermischtes. Zur Wortgeschichte, P. 584, Schuchardt, Nochmals engad.
îifidorna « limace » (cf. Rom. XXXI, 453) : se rattache au german lendern,
slendern, dont l'auteur signale en roman des dérivations extrêmement nom-
breuses et très variées de forme et de sens (elles ne sont pas toutes assurées).
P. 585, Schuchardt, înoyiX.scMfe « touffe de cheveux », se rattache au haut-alle-
mand 5rÀr//îr, « cosse de fruits». — P. 58 5, Schuchardt, ital. schienaU, « morue».
Ce mot, qui se trouve et dans le nord de l'Italie et dans un passage de Laurent
de Médicis(où il n'a pas été compris), se rattache à schiena. — P. 586, Schu-
chardt, rom. gdrgdrd-ifd ; gàrgàun. Le premier mot, qui a des sens assez diffjp-
rents, représente un croisement de c u r c u 1 i o et du bulgare skakalecà ; le second,
qui signifie « frelon », a des sens figurés curieux, un mélange de crabro et de
scarabaeus. Il est impossible d'analyser ces anicles riches en rapprochements
intéressants et nouveaux. — P. 588, Schuchardt, cuchlia (voy. Z, XXVI,
318): Tu se retrouve dans l'anglo-saxon clucge ; anc. fr. jugottce, m. h.-all. idchant
(Z. XXVI, 398) : cf. diverses formes orientales et slaves. — P. 588, Schultz-
Gora : prov. en. L'auteur en cherche l'explication dans l'emploi de ne (abrégé
du voc. do m ne) après de : lo cas tell de ne BertriWy puis den Bertran^ de ne deve-
nant den comme de lo est devenu del^ et il remarque que l'exemple de beau-
coup le plus ancien de en, dans le vers la molher den Guari e den Bernart d'une
pièce connue de' Guillaume IX, présente en effet, f/rw et peut s'interpréter de
n aussi bien que d^en. Je doute cependant que «r de domne, mot d'origine
savante et peu ancien, et qui n'est pas enclitique comme /o, ait pu être
traité de même ; j'ai dit ailleurs (Mélanges Coutnré) que j'expliquais en par
l'aphérèse de domen > domine. — P. 590, Schultz-Gora, ^5rdr/m<m. L'auteur
montre que, contrairement à ce que j'avais dit (/?ow/., XXX, i$})escariniani est
parfois substantif (il eu cite deux exemples, mais il est évident que c'est l'em-
ploi adjectival qui est le plus ancien comme le plus général) ; il cite aussi dans
le Gir. de Rouss. d'Oxford la forme escharamant ', avec a, qui favorise l'étymo-
logie grecque jxapaaotTxov, déjà proposée par Fr. Michel et reprise indépen-
damment par l'auteur. — P. 591, Zimmermann, Zur Etyntologie des fr^,
Nominalsuffixes -iGT. L'auteur pense que -iarius a pu être pris pour un sufiîxe
et substitué à -arius, et n'admet pas que -iarius ait dû devenir -iV et non
. 'ter,
I. Dans le ms. d'Oxford, v. 2453; ^^ "^5. de Paris (éd. Hofmann,
y. 1834) porte escariman, — [P. M.J
moins de
462 pfeRlODiaUES
81s»» s. McfVcr-Lùbkc, £#»f/xî^M(^' m J^u ^tiuiium étst
dm Sf chtft (J. Moht : Û2si^ CCI ariklc^ ^m n^ pi»
20 fhigi^. iiutoir ^ Jitacbc sunoat à mofttPtT que M« MeyiT-LôMçc 1 îm àt
grmds progrès Jepuis son ^bleau de ladn vulgiîn^ dam le Grmmiriu^ et ^uc
c» progrès coDsisumt essentidlenscin dan^ ced : quU s*esi «ppTfKftié des
théories de M, MohI, — sans le nommer totitefiois^ ce dont i:e]ut'd ne lui
sait d'alllctirs aucun mauvais gré ; à cAtê de cette ihèsc un peu hardie^ 00
trouvert ^ ei li quelques observations bïcrcssanicsj, — P. 62 1 , Ha^ickhorst,
Uéer dk Gic^raphif bti JfiJréd dé' Magnait i{B€Ckct : cf. Htm., XXXI, 6||).
— F, 62 a» Fitz-Maurice Kelly» Hittoria dt U lt$n4iura tip^moi^, tnd. y âao*
lâda por Adotfo Eonilla y San Manin, con tin cstudio preliminaf pot Mucë-
llno Blenècïdejc y Pekyo (Becker : ouvr^^ agréable ee solide en mtênie tea^)*
— P. 62), Mills Gayîcy aod Newton Scott^ An lHlr0timii0n tû îbt mtlkois
and maUriais of Hurary crîUdim (Vosslcr). — P, 624» HugU, Dk rûmamis-
dbn Sirofétn in d^r Dkkung dtuticher RmaanUhriXosûsx), ^ Levi, î môtm-^
tmnU piû itntichi dêl duUttù dt Chkggm (Savf^l^opez : les textes publiés par
routeur sont réiifés eo vénitien et non en dîdkcte de Chioggu). — P. 627.
Bcllorini» Note suik ir^idi^hm iktiiiim dfik Eroidî d'Oi'sdm (Savj-Lopi:^). ^~
P* 625, Segarizri, Lu m Qiiima 9, k ora^ioni t It fpisï^itdi Ska> PûUnUvt Qi^vf^
Lope^e). — P- ^29, Gorra, fra drammi t foemi (Sa%*j-Lopex), — P. 650 ,
Vldoisich, Studf ml diaUm iriistim (Gamier : remarques intéressantes sur ce
très louable travail). — P. éi}, Rolin, Bfrùhi iétr du RfsuUaU seîntr RetitH
in -ren (Subals : fait désirer la suite). — Zauner, Romamuhe Spr^
ih. (Subak), -^ R 60, Li Moym-Agt, Xlll (Ed. Schneejçtns). —
P. 6î7, Schtîchardt, Zut Homamta XXXJ, ijj Anm. i : l'auteur rappelle ^u*il
avait, dé* son VoktUfmm des Vu^ârLUeim^ mentionne la déclinaison en -t -imis^
ce qui avait écbippé à M. Philipon, et explique pourquoi on la Appelé âtmi
Nëue Bûcher. Annonces sommaires de: Dotùn et hingouci^ Ghn^ire du
fhirkr de PUcbdid ; Friedersdorff, Auî Fruu:^ Peiti%fkû%poeîiu})en Brie/en ; Bovct»
Amorti ilprcèUma an dan.* (remarques qui ressemblent de près i celles qui ont
été Cutes ici^ XXXI» 606) ; Koch, CiiUtU)^tie ùf thé IXtrtte Qyiieçtion preuvitd hj
H^tUard Fiîkt, I ; Pochhammer, Ddttte^s Géitîich$ lùnwdie.
G. P.
XXVI, 6. — P. 641, Ph. Aug. Becker, Aui^iûgrapki$chtî wn Jehsm Mmuei.
Commentaire Historique sur la compUinte de la mort de Marie de Bourgogne
{En temp^qut perî Aurota m ^ram pteurt)^ qui est, en effet. Tune dcï prirKi-
pales sources à consulter sur b biographie du poète, — P. 6j2, D. Beltrens,
Wortitsehichiiidm \ complément et correaions à Kôtling, LAt.-r&m, iVûrL^
2' éd. — R 670, H. Und, Laiifttngiiihe Studio, Essai de délimitatîoQ
dialectale diaprés les différences morphologiques. — P, 692, L* Sûtcerliiit
Zut Kmntnii der httdi^fH pikardiuh-jmniiuhcn MunâarUm ; ni, Worikkeê j
IV, WmtV€rhindung€n\ Cgnclusiom.
PÊWODIQUES 463
MÉLANGES. P. 716, Kcao Mevtr. EùuEri.^yù ;'s « Trlsu^. iu /.-.Vi: . i^"
J(i5 ultiszbt HsiLi. n s'isT-^ i<i rzisseij 4^ zy^ dans U chambre même'
d*Iseut et qui apporte à Li ncnc le> éclats de bois, messages de Tiisian. Pocr
M. M. nous avons rien là uc :r2:: celisq^ie. niais nullement u:: resîe d'une
dvilisatioa bariare. Le ruisseau iravcrsan: la rrjison se retroui erair assc^:
tard chez les Celtes ixtsciaires e: ericcre iu:::urd*hul dans le pi^-s de Galles.
Ueiemple donné par M. M. n'es: pas arso^unsen: co?:va:ncan: : il y a loin.
me semble-t-il, du rmsseao passant ±2zs une laiierie. ^ laquelle û donne b
fraîcheur nécessaûre, au raisseau -xissan: dans u::e pièce de la n^aison d'habâ-
Ution. — P. 718, E. KeCer, Szmtz \hrij ::rzs: (Barsegapè, v. 075».
L'obscur adjeaif cirial correspond aux ibmics du ncrd de Tlulie zfrùr^L:,
serioUy « Chandeleur >, avec i protcniquc d'après la tonique de ^:Zj. cera. et
changement de suffixe pour ia rime. — P. 7:$. Schuitz-Gora. « CerJ^l
étAmârt > und « pailt ii BiUrm -. A'-.irt es: lilc dWndrcs don: !a soie est
encore aujourd'hui la principale production : Biz.r^u serait Viterbo. la Kai-
serchramk place en effet Blttrnt en Italie: Texprcssion pailt ii Bûirtu aurait
laisse croire que la ville était sarrazine, de la scn transport en Espagne chez
les conteurs épiques. M. S.-G. rapproche hecreu sèment du nom de BiUnu
les autres noms de villes sarrazioesen ~frné : OdUme, Aujaîenu^ etc. — P. 720,
Schnltz-Gora. anc. fir. ganuu^ = le son le plus bas de la gamme, noté par F.
et appelé of ; le ^ final provient de remploi au nomiiutif. // premiers u^. et
s'est conservé même dans en gamaài ou ^amtù^. — P. 722, D. Behrens. fr.
â»i^nfr<colorare, le coudremcnt du cuir consistant â lui donner, par un
bain d'eau chaude mêlée de tan, une couleur fauve : anc. fr. dai^ru n'est
autre que le d<f «M des Glosses dt Rikhenau (Foerster u. Kosch^itz, Alîj'r. CM.,
851, area ; dania) <Zgcrm. Unni: fr. remouLkU, M. B. préférerait à Tidenti-
fication proposée par A. Thomas de rémouladi, sauce, et rimouladé, emplâtre
pour chevaux à base de son < it. remolata de nmola, son, l'explication sui-
vante : rémoulade j sauce piquante < ramohidi <C ramolat, raifort. <ar mo-
racium (cf. it. ramoLtccio) ; il note d ailleurs l'emploi du raifort en hippia-
trique, ce qui ramènerait à confondre 1rs deui formes françaises : mais il faut
malheureusement reconnaître que le raifort n'entre pas dans la plus ancienne
recette de la rémoulade ; anc. fr. sopûrr^ tondre le drap, et mots ^"allons ou
flamands apparentés < ail. lopf. — P. 727, W. Meyer-Lùbke, fr. noue :
M. M.-L. distingue entre noue, lieu bas et inondé, prov. mod. nau^o, dont il
rattache le prototype bas-latin n au d a au breton njj^, lit de ri\*ière, sans
<i'ailleurs se prononcer sur le rapport de filiation entre ces deux dernières
fonnes, et noue, tuile creuse, prov. nuuco, auge, tronc d'arbre creusé, etc.
Ces dernières formes s'expliqueraient bien par un 'n a u c a < n a v i s, cf. a u ca
<avis; maisid se pose la question, soulevée par .M. Neumann, du traite-
ment de -auca : M. M.-L. critique et écarte les divers exemples d'alter-
nance de -<w>, -oue réunis par M. Neumann, â Texcertion de oie, oue,
<auca. Or : i« -oue est la forme la plus anciennement attestée, oie
D'apparaissant qu'au xiv*: siècle: 20 l'hypothèse de .M. N. implique Texis-
464
PtRlODIQUES
tmcc d'un masculin 'au eu > *(m quî aurait influencé ok^ mai^ h forme
féminine esi b forme ancienne, la plus répandue, îe nom de Foîcest fiêminîo.
âm^ la plupart des langiies de rEuropc ei les formes masculines sont dérivées
du féminin ; tout ccîa rend improbable le passage oi€ > ota ; 3" supposons
AU contraire que om est la forme régulière, le passage à (yie est facile, sous
rinfluence, non de miel, miis de oimî ; ce dernier représente 'aucione
< a u c a, qui eût dû donner Vjm^m, mais que oisfl a pu facilement influencer,
raccc:nt étant à la même place dans les deuK mois. Aîtisi qu£ est la forme
française pure provenant de au ca et de méroe noJte de *nauca est régulier*
^ P» 733, E. Hcr^og, tr, avtu^le : M* H, ne croît pas- que aimgU puîsseétre
eipUqué comme venant de Ja langue du droit (hypothèse de G. Paris :
<nrïi^''^f<ab oc ul us d'après kf^n^x^zni), il y voit Un terme de méd^inc et
Tcxplique par a 1 b u|" m]oc u I », glaucome» d'où radjectif vulgaire *al boculu s
et, par dissimilation *aboeutus; — prov., anc« (r.Jd^/ei&n^ h.JfHo : le type
latin fello serait un dérivé de feUare; — fr. /où^, ît, gâia, rét. ^ulia t
pour échapper aux diflicultés phonétiques que rencontre Téiymôlogie de
Dier 'gauta < g a bâta, M, H. propose cavit a [s] > 'cautu > *gauta;
— roum. iUrp, stérile, et formes albanaises^ siciliennes, frbulancs apparen-
té€s < •cxsiirpîs.
Comptes rêki>us. P. 7î7iG. Dobschall, tFort/ttgung im Pahù van Bmr-
mis (E. Herïog). — P. 741, E* Konnemnacher, Praklisches Lthrifuch d^r
ûitfran^èihchn Sptache fj. Subak). — P. 742, G. Mari, Riûsmttlo e Di^iûmirirtt^
di Ritmica itaïitma (K* Vossler). — P. 745, Bertha von dcr Lagc, Studim ^itr
C^tmitiulfgftuU (A, L. Stiefel). — P. 747, E. Lefévre, Caîalogm Jèiibrim ft
du Midi de h Feamt (A. Schube : critique du plan et du détail de rcnécution),
— P. 750* Heimidf^ htigim romams^ XLIV, 1901 (Schuhji-Goria). — P. 75 1*
Sntdj di Jihlo^ia romcifi-a, fa*^c. 25-21 (F- Savj-Lope/.), — P, 755, Ghrnaie
jfcr/V-a dilh liiUraUim Ualiam, XXXIX, a-j, et XL, r-i (B, Wiesc). —
M. R.
Studi GLOTTOiOGia iTAUANi direttl da G. de Gregorio, îll, 190? . —
P, I, T. Zanardelli, ï n&mi ItKûHin -aticus ntîV Emlim e ntth Bomaj^na,
Le sufîîte -ati c us peu représenté dans le lexique commun est bien plus fré-
quent dans les noms de lieu d*limilie et de Romagne. M, Z. donne une Ibtc
abondante d'exeropîes largement commentés, Nototis que dans ces noms
rinflucnce littéraire a introduit une forme particulière du suffixe, -éik au lieu
de •«%♦ -èd^^ au moins au masculin, car -ûdga s'est conservé au féminin. -»
P. 49, D* Oïivjeri» Studj ^uHa toponomastica veneta. Important travail, fait
d^iprès Je plan excellent de M. Pi cri, et muni d'index, ^ P, 225, G, de
Gregorîa et Chr* F. Seybold^ Ghssarh ddk mci nciîmm di ori^mt ûraha.
G^e liste^ que l'étude des noms de lieux pourra beaucoup allonger, n'inté-
rcssc pas seulement les parlcrs siciliens, mais aussi Tcnsemble des parlers
romans ; cf* p. ex. les articles avaria : h.œvHina^ ff, avijtk, csp, aperia < ar*
piRioDiàuEè 465
avaria; hagascia^ à rattacher peut-être avec toutes les autres formes romanes à
l'ar. haghtja \gabella et formes apparentées < ar. qahihy le sicilien connaît aussi
et tout d'abord la forme cabella, ce qui écarte la difficulté provenant de
rinitiale sonore en roman ; gafia, esp. gafa, pr. gafy fr. gaffe < ar. knffa ;
giannettUy esp. ginete, fr. genêt (cheval)< ar. Zeiiéta; varda, it. esp. barda,.
fr. harde<i9x. harda'a. — P. 253, G. de Gregorio, Nuovi contrihuti alla etimo-
logia t Ussicografia romança coti {spéciale riguardo ai dialetli siciliani. Encore
un complément à Kôrting, utile surtout pour le sicilien; des indications
relatives aux autres parlers romans tout n'est pas également important. —
P. 290-297, Index des mots romans contenus dans les deux derniers articles :
tout index est le bienvenu ; mais il est bien incommode d'y trouver employés
alternativement deux systèmes de renvois, à des numéros de paragraphes pour
un article, à des numéros de pages pour l'autre. Peut-être aurait-on pu
joindre un index à l'article de M. Zanardelli, et le plus simple eût alors été
de donner à tout ce volume des Stmii un seul index des mots à la fois métho-
dique, c.-à-d. classé par langues et dialectes, et alphabétique, et complété
par un relevé des mots arabes cités. — P. 299-312, G. de Gregorio, Sur la
iimpliciU de deux articulations prépalatales et sur la nécessité d^admettre une
classe de phonèmes ainsi nommés. 11 s'agit de c, ^, considérés comme sons
simples et non composés de dentale f fricative.
M. R.
Studi di Filologia romanza, pubblicati da E. Monao e C. de Lollis,
vol. IX (fasc. 24, 25, 26), 1901-1903. — P. 1, L. Biadene, Carmina de
mensihuSy di Bonvesin de la Riva. Il a été donné un compte rendu détaillé de
cette importante publication dans la Romania, XXX, 597. — P. 131, G.-A.
Ccsareo, La sirventesca d'un giidlare toscano. II s'agit de la cantilena giullaresc.i
attribuée au xii^ siècle, et qui est en tout cas du commencement du xiu^,
dont plusieurs érudits se sont déjà occupés. G. Paris a dit quelques mots du
mémoire de M. Cesareo à propos d'un travail récent de M. Torraca sur le
même sujet (/?ow. XXXI, 171). — P. 146, P. Marchot, Dans quel sens, en
Pranu et en Italie, le bouclier est-il le tueur de boucs ? Polémique contre
M. Th. Reinach (Mém. de la Soc, de linguist. de Paris, IX, 126), qui rejetait
l'origine généralement admise de « boucher ». - P. 153, C. de Lollis,
Pfoposte di corre::(iofii ed osserva^ioni ai testi proz'en^ali del manoscrilto Campori,
Nous avons déjà mentionné, d'après un exemplaire tiré à part (XXXI, 160,
note), ces corrections et observations, faites un peu vite, mais dont beaucoup
sont justes. — P. 171, Comptes rendus : La Ceksiina, éd. Foulché-Delbosc
(M. Schiff); K. Mac-Kenzie, Dante^s referenus to .Esop (C. de Lollis). —
?• 176, Notices variées. — P. 181, P. Toldo, Études sur le théâtre comique
fronçais du moyen dge et sur le rôle de la nouvelle dans les farces et dans les
confies. Suite de rapprochements groupés sous un certain nombre de
rubriques, quelquefois un peu vagues (Lutte de ruses \ Contre le mariage,
•M, XXXII OQ
46 e PÈRIODiàUES
L'ûulûrïii dtà mart\ ecc) qyl fie prouvent p^ du lotit que ks forées soîenl
dans iin rapport intime avec Jes notîvelîes qu ks fabîwux* Œ ce que G. P^ns
dit à ce sujci ci-iicssus, p. 176. — P. 370, G.-B. Bonelli, / notm degît uccdli
fut dialtU't îùmbardi. — P. 469, Comptes rendus : A. letmm. Il Trimp
d'amure t di Fr. da Burberim (Fr. Egidî ; observations sur la date de la com-
position des Documenlu en opposition à 1 opinion émise par M. Ant, Tbômas;
cf. ifoMf.^XXXI, 479)v Bertoni, Nuovi riniedi Sordelh (C» de LoUb). Appel,
Wkdintm ^u Janjre Rttdf! (C. di; L. j et Rom.^ XXXI, 472). Savj-Lopex» La
rwî>Éltûpr0V\ dâi pap^^^afio {C. de L. ; cf. Rom., XXXi, 169). Zingar^lli» Lo
fûmans dé San Trv/mu (C. de L.)- T. Crescini, Rambaldo di Vaquelras r Baldopim
imperator€ (C. de L.)* — P. 485, Notices variées. — P. 48^, Savj-Lopei, //
canionkri prown^aUJ. C*^st le ms* F. 4. 776 de la Bibl. nat* dç Florence, décou-
vert trt décrit en t872 par M. Stengd; voir Mom., l, t4j>'T. J*3Î fait repro-
duire, il y à vingt ans» une page (fol. 8 r^) de ce ms* pour T École des chartes
(no ij4 des Héliogravyres). J'ai pu vérifier sur ce fac-àtmilé, qui est excdlen!
(h photographie a éti' faite par Brogi), la copie de M. S.-L, Je nV ai trouvé
qu'une faute, qui n*cst sans doute qu'une erreur typographique, la kctur^e
ne laissatit place à aucun doute : d^itmlm (i la prunuèrc ligne du fetîillet) au lieu
de dr(ereiat. ttudiam les rapports de ce recueil avec les autres chansonniers,
M. S.-L. arrive à des conclusiotis qui différent assci notabk-ment de celles
qye M* Grôhcr avait adoptées daiis son mémoire sur ks chansonniers des
irouhdûoKïT^ {RotmniSCfM Sitidùn, t. H), Il pense avec raison que le ms. de
Florence a été écrit oltmipe. Je le crois, d après les caractères de la langut%
écrit dane une région voisine du Rhône. — F* J95, A* Ferretto» Nottikiniortw
a CaUca Pimiamy inrvaîort gaimese f alla sua Jamigîîa. On savait bien que
Câlega Pansa, troubadour dont une pièce, conser\-ée par le ms. Campoii,
a été publiée par M. Bertoni {et Rom., XXXI, 16a), était génois; on Favait
rattaché avec certitude à la familk Panzano, bien connue dans Thistoire de
Gènes au xiîî* siècle. M. Ferrctto complète notre infomiatioo en imprimani
une trentaine de docunients, tirés des archives des notaires, où figure ce
troubadour. Le système de publication adopté par M. F. n'est pas à louer,
D n^ 3 p^ de ponctuation et les capitales sont placées comme dans les oti-
^naux, c'est-à-dire de la façon la plus irrégulière. Cette alT^ulioii de
minutieuse cxactiiudei dans des copies oii on résout les abréviations et où oti
distingue le i' de l'w, est bien puérile* — P. 617, G. Crocioni, a La itUmV'
nu ta hdkotosa », Com média indiakiio diCin^QU {Mautaia\ s 606^ Texte de
cette pièce Inédite^ accompagné de recherches historiques, d'un dépouillement
linguistique et d'un glossaire. — P. 676, Fr. L* Mannucd» Del likro de k
miurakumam condiciom. Il s*agit d'un remaniement inédit» en prose génoise,
de U traduction déjà assejE libre i|ue Bt^no Giamboni ht en toscan du traité
célèbre dlnnocent ÏIL — P, 69?, SoU leakali ed onamaioli?^ khe di Gioi'annt
FUthia^ idtk àa Giuieppc Rechk. Ces notes sont un spécimen d'un travail
Imporufit laissé par FUlusire linguiste^ et dont on nous annonce la publkadoa
prochaine. — 1*, 707, F. d'Ovidio, Fa il diaktta di Campohass&, L'on des
PÈRIODIQjÔES 467
plus anciens travaus linguistiques de M. d'Ovidio est une fonetica del dia-
letto di Campohasso publiée dans le t. IV de YArchivio glottologico (1877).
Récemment le même sujet a été repris dans Tun des mémoires dont se com-
pose la misullanea composée en Tbonneur de M. Ascoli (Rom., XXX, 573).
M. d'Ovidio se défend avec succès contre certaines critiques qui lui avaient été
faites, et en même temps présente d'intéressantes considérations sur les chan-
gements qui, depuis 25 ans, se sont produits dans les conditions linguistiques
du pays. — P. 714, G. Popovici, Xuove postilU aï di^ionario délie colonie
rumene d'Istria; cf. d-dessus, p. 325 un autre travail sur le même sujet de
M. Popovici. — P. 720, Comptes rendus. I. Nieri, yocab. lucchese (J. Pieri).
V. Cian, Vivaîdo Belca^er e Tenciclopedismo italiano délie origini (C. de L.).
P. Andraud, La vie et V ouvre de Rainum de Miraval (C. de L. ; cf. ci-dessus,
p. 131). L. AzzoHna, La Compiuta doniella di Firen^e (C. de L.). A. Par-
dacd, Sulla cronologia e sul valore délie rime di Bonagiunta Orhicciani da
Lucca (C. de L.). — *P. 734, Notices diverses. La dernière de ces noti:^ie est
ainsi conçue : « Con questo Êucicolo cessa la pubblicazione degli Siudj di
fMogia romança ». C'est bref.
P. M.
L'année UNGUisriauE publiée sous les auspices de la Société de philologie
(Organe de T œuvre de saint Jérôme) \ tome I, 1 901 -1902 ; Paris, Klincksieck,
1902; vi-303 p. pet. 80. — Nous annonçons avec plaisir l'apparition d'un
recueil qui se propose de dresser l'invenuire annuel des progrès réalisés
dans chaque partie du domaine linguistique ; mais il est fâcheux que le
nouveau périodique débute par un retard de trois années et nous offre, en
1902, un tableau des publications de 1898-99'. Le plan du recueil est très
peu rigoureux et les inutilités n'y choquent pas moins dans certains articles
que les lacunes' ; les indications bibliographiques ne sont ni uniformes, ni
complètes; enfin la correction t^'pographique laisse quelquefois à désirer'.
Les romanistes ne trouveront à peu près rien dans ce volume qui ne leur
aût déjà été signalé dans les revues spéciales. Je doute, d'autre part, que le
chapitre consacré aux tangues romanes soit aux linguistes d'une bien grande
. utilité : tout cela est trop long pour une bibliographie et trop vague pour
un inventaire critique; des lacunes et quelques erreurs «.
M. R.
!• le ne comprends pas la mention I90i-i902du titre.
2. En quoi, par exemple. le Partirai de \V. Hertz ou VEru traduit par
M. Qédat intéressem-ib ta linguistique?
)• Cela est particulièrement gênant dans les noms propres.
4-, Pour nous en tenir à la linguistique roumaine prise comme exemple, on
^vait peine à retrouver sous le titre de Bibliographie de T ancien roumain la Bihlio-
r^M romineascâ veche de Bianu et Hodo^; on ne comprend pas pourqur>-
<Ptttre des Studii de fikiogie romind d'O. iX-nsusianu sont citées et la cini
468 PÉlJODK^eS
BULLETIN' DE LA SOCIÉTÉ DES .KSOESS TEXTES FKAXÇAJS, I902. — P. 64,
A. Piaget, Sou :ur le tottu X de: œuvres œmpiîUs £Emstacbe DesàoMÊpi. Soos
le ixLTt de V Fîcc» anribuablts â Desciumps », M. G. Ra>-Qaiki a pubîîé, ca
tète du t. X de son édition d'E. Dcschamps, aise série de &i pièces, dont
U plupart sont tirées du ms. B. N. oouv. acq. (x. 6221. Presque toutes soot
des ballades. Dans cette note M. Fuget identifie ace Tingtaine de ces poésies,
dont quelques-unes sont, non pas de Descbamps, mais de Guiilaufoc de
Machaut ou d'Alain Chanicr. — P. 6S-96, P. Moer, SctUé dum mu.deîa
Bibliùthiqui (fliite a Modem {U^endii dti sainls en frauçais). Ce légendier, qui
n'avait pas été étudié jusqu'ici, a été écrit en Italie. 11 est apparenté de très
près avec le ms. 1008 de Tours, décrit dans le BuiUtin de 2897 (cL RpmamîA,
XXVII, 5:5;, qui est aussi d'origine italienne. Il contient â peu pris les
n)émes vies, don: beaucoup sont traduites de Jacques de Varazze, et dans le
même ordre. — P. 100- 1 19, J. Camus, La uconde iraductUm de la Chirurgie
de Mottdntlle Notice du ms. l. iv. 17 de la Bibliothèque nationale de Turin
(xvc siècle^, qui contient une seconde copie de la version de Mooderille
déjà étudiée par .M. le D^ Bos d'après un ms. d'Upsal (Bulleiim de 1900).
Outre cette version, le ms. de Turin contient un grand nombre d'opuscules
français Ctraduits du latin; concernant b médecine et la botanique médicale.
JoL'RSAL DES SAVANTS, 1905, u» 6 fjuinj. — Ce numéro cooticot,
pp. 337-345, un intéressant article de M. Ant. Thomas sur le poème pro-
vençal de sainte Foi, publié récemment dans la Romania (XXXI, 177;, par
M. Lcite de VasconccUos. M. lliomas, qui a pu faire usage d'un Cac-similé
photographique excjuté par M. £. Châtelain, propose nombre de corrections,
toutes fort ingénieuses, plusieurs ceruines II a fait remarquer (p. 341,
note; que, par un accident survenu â l'imprimene, le v. 481 {Et en $ttn
corps creiss ten vi^or\i]) avait disparu, mais disons que cet accident s'est
produit seulement dans le tirage a part; ce vers ne manque pas dans
l'impression de b Romania.
quiémc étude fDrugescu, Disimiiafiune), importante pour le linguiste, laissée de
c6té; M. Densusianu a pi.blié une vie de saint, et non de sainte, Basile: on
ne s'explique pas pourqu(/i le cinquième Jahresbericht de M. Weigand n'est
pas analysé, etc. — Je dois avouer mon ignorance des intéressants travaui
de philologie romane que ' l'Université slave de Bessarabie » aurait commencé
a élaborer f p. 27).
CHRONIQUE
Nous avoas annoncé par un feuillet encarté dans notre numéro double
d'avril-juiilet 1901, la publication d*une table des trente premiers volumes de
la Romania, dans laquelle par conséquent serait fondue la table des dix
premières années due à M. Gilliéron. Nous estimions alors que cette nou-
velle tabk formerait un volume d environ 600 pages et nous en avions fixé
le prix en conséquence (10 fr. pour les souscripteurs, et 1 5 fr. une fois la
souscription close). L'entreprise que nous annoncions est entrée dans la
période d'exécution, mais elle n'aura pas toute l'étendue que nous suppo-
sions. Notre collaborateur M. le D^ Bos, qui a bien voulu se charger de ce
pénible mais très utile travail, a maintenant à peu près terminé la rédaction :
Timpression est même commencée. Après mûre délibération, après examen de
di\'er5 spécimens, et en vue d'aboutir plus vite et d'é\'iter une complication
qui aurait nui à la facilité des recherches, il a été décidé que la table ne con-
tiendrait pas tous les détails que d'abord on avait pensé y faire entrer, de
sone qu'elle n'occupera guère plus de )oo pages (le prix annoncé sera modifié
en conséquence). Elle sera faite sur un plan très différent de celui qui avait
été adopté pour la table précédente, et croyons-nous, plus commode pour
les recherches.
— M. Alexandre Kirpitchnikok, professeur à l'Université de Moscou,
précédemment à Kharkoff et d Moscou, est décédé le 25 mai dernier à l'âge
de 58 ans. Nous l'avions vu à Paris, en 1874, alors qu'il étudiait les langues
romanes comme élève de G. Paris au Collège de France et à l'École des
Hautes-Études. 11 avait une grande connaissance des littératures du moyen
ige et de la Renaissance, et s'était surtout occupé de l'histoire des légendes
pieuses du moyen âge, notamment des récits relatifs à l'Assomption de la
Vierge (voir Rottumia^ XIX, 492) et à saint Georges. Il avait entrepris un
grand travail sur la légende de la Vierge dans l'an et dans la poésie dont il
a exposé le plan â la Société des antiquaires de France (1892, 27 janvier).
Malheureusement, la plu pan de ses travaux, étant écrits en russe, sont
demeurés lettre close pour beaucoup de ceux qui auraient eu intérêt â les
connaître. Il a cependant écrit, en français ou en allemand, quelques anicles
dans la Revue crilûjue (sur un recueil de chansons historiques russes, 1875, 1,
p. î}i), et dans XArchiv f. slavische Philologie,
470 CHRDNiaUE
--Le îS mai dernier est décOdi^ le Nron Bollah de SAiNi-PiFRRE,sunii"
tendiint des Archives d*Éut à Turin, connu pur un giatid nonibrt? de publk^-
lions hkloriqueSj entre leîiquelk'S uous sign.derons, comme se rupfH>naî)t le
plus particulièrement aux études que poursuit la Romantay la Cfmntc^n di Phi*
iippe iU Sa™*' {1879) ^^^^ "O'JS avons rendu compte ici même (IX, 47a): les
Ces tel ^^ Crofifqtm de îa ttmson de Savoy f^ par Jean Scrvion {1879. 2 vol.
în-8«>) ; un curieux inventaire de livres et objets précieux, rédigé i Moiice-
lie ri en 1 479, ei fort îniéressant pour Thistoire des collections appartenant â%i%
princes de Savoie (Rùtntmiûy XI II, 473) ; des Nmdk e Inytsie franan imâiîeo
nirmimi {iM^^ d'après un manuscrit qui lui appartenait {/?(Vn<jn /a, XIX, ^40).
Le biiron de Saint-Pierre était d'une obligeance â toute épreuve, C*tst à lui
que îa Romaniû a dû la communication d'un précieux rôle de chansons à
danser, daté de 1 517, que nous avons publié il y a dix ans (XXin, 1 56).
— Le n juin est mort à Wûrzburg, à Tâge de quarante-neuf ans, Jakob
StûrïTNger, professeur de philologie romane et anglaise à T Université de celle
ville; la terrible maladie qui avait terrassé son prédécesseur Eduard Mail s'èuîl
aussi abattue sur lui, et depuisquelque temps rUnïversilé avait dû lui donntT
un successeur, tout en lui consentant son titre et son traitement. Né a Wylcn,
dans le canton dt Zurich, il avait suivi, à Berlin, les cours de M. Toblcr^ puis»
à Paris^ ceux de Gaston Pari.s : fia thè^e {Vthtr die Cùnjugatimt in Rxiaroffm- j
w/icAffi, Winterthur, 1879) est dédiée à ce dernier. Ktant privât docent j FUni-
versité de Bono, en 1884, il avait accepté d'aller aux États-Unis pour y profci^ser
dans un collège de jeunes filles, mais il ne put s*y acçlinuier^ malgré un
séjour asseî prolongé. Revenu en Europe» il enseigna comme privai docemà
r Université de Munich, puis comme professeur à Tùbingen(j 892)01, quelques
mois après, à Wurjeburg. Il a publié dans VAiifraniosùçhe Bihtiûthtk (t. VI 11)
sous le titre d'Orthographié gfiUitû^ le plus ancien traité de U prononciaitoti fran-
çaise que nous possédions. Mais son nom restera spécialement attaché! l'oeuvre
de GuULiume de Deguillevillc, éditée par lui pour le Roxburghe Club (voyci
Rifmaffiay XXI, 331 ; XXIV, 485 ; XXVL 344). Le tome Hl, que la Rùmanm i
a omis de signaler à ses lecteurs, a paru en 1897 : il contient le PArrinagê
JfxsmrîsL StûrjEÎnger se proposait de publier dans b même collection tiD
quatrième volume dans lequel t! aurait placé un glossaire précédé d'uiiê étude
complète sur la vie, Toîuvrç et les manuscrits de Deguillevilîe. U devait en
outre donner k texte de la seconde rédaction du Prkrinagf de Vie^ en appen-
dice â la traduction anglaise de Lydgate, dans la collection de VEarly En^gtith*
kxî Sùcitty. Son œuvre reste inachevée; mais il a asse^ fait pour laisscf
une trace durable dans le domaine de la philologie romane. Ceux qui Tout
connu personnellement resteront longtemps affligés de sa disparition, car à
des connaissances étendues et variées StûrjÉingcr joignait La modestie et Timé-
nité. — A. Th.
— M. Ch. LojzKAu DE Grandm.uson^ correspondant de TAcadéniie des
inscriptions et belles-lettres, ancien archivbte dMndre-et- Loire, est décédé à .
7'ours le ï6 juin- Nous ai^noncions dans net ne précédent f^iscjculc (p. 149)9
CHRONIQUE 471
son dernier travail. Ses études avaient trait principalement à Thistoire de
Fart et des artistes et à celle de la Touraine. Il avait été le collaborateur de
Guessard pour l'édition de Huon de Bordeaux (1860).
— L'Académie des inscriptions a accordé le prix La Grange à M. Guesnon
pour ses travaux sur l'ancienne poésie artésienne. Nous avons signalé en
leur temps ces travaux, qui ont fait faire de grands progrès à notre connais-
sance des trouvères d'Arras (Rom., XXIX, 145, 468).
— M. le comte Nigra a bien voulu nous adresser les notes qui suivent au
^ujet des « mots obscurs et rares », signalés par M. Delboulle dans notre
précédent volume (XXXI, 350 et suiv.) :
K Arpeage répond au savoyard et dauphinois alpage, et à Titalien dialectal
et administratif alp^gio, « pacage dans les Alpes » ; dans le Queyras, alpc^e
signifie aussi « saison de Talpage ». Cf. le valdôtain d^or de Vârpa, v jour de
l'arrivée du bétail à Talpe ».
« Balotage signifie sans doute « palier, plate-forme », et correspond àTitalien
ballatojo, Ex. : « La campana che è posta sul hallatojo del palagio dei Priori (a
Firenre). » C'est la traduction littérale de halotage du Palais.
« Barragun, de l'arabe, « sorte d'étoffe de laine », houracatty anc. prov.
harracany ital. baracatfe,
M Beatdse est l'équivalent phonétique de l'ital. balia, qui a aussi le sens de
« voilette, pendant d'étoffe, banderole ».
« BrindoUy cf. vén. sbrindolo, « morceau de drap, pendant », Brescia,
sbritK^a,
« Cawi^wi^r doit signifier «tanguer, s'arquer», et provenir d'un * cattiboisse,
répondant au piém. cambossa, gambossa, valdôtain Uambôsse, « jante ». Radi-
cal camb- « courber ». Cf. le roman gatnba, camba et prov. piém. cambis, cam-
hisa, gambisa « collier à sonnaille » courbé en arc étroit (voir Arch. gl. XV,
280, sous canibis).
« Couderon est l'équivalent de l'ital. codrione « croupion » augmentatif de
^caudarium.
« Cotut, dimin. masc. de l'afr. coiie « queue », signifie la • queue de la
quenouillée », c'est-à-dire le fiocon que les doigts de la fileuse tirent de la
quenouillée. »
Aux remarques de M. le comte Nigra, j'ajouterai deux observations :
Co/^rai^ doit être le même mot que catran, quitran qui, dans le Midi, signifie
«goudron». Cf. l'it. catratf te (qui a son article dans le dict. étym. de Diez),
l'esp. alquitran, et Du Cange sous catarannus.
Challemin, on voit par l'exemple cité qu'il s'agit d'une substance « pour
convertir en ymaiges », sans doute en « yniaiges » de métal. Cela étant, si
nous avons recours à Du Cange, qu'on ne consulte jamais assez, nous y
lirons : « calamina, cadmia, lapis xrarius, seu species terne fôssilis quai cum
cupro commiscetur ut flavum fiât, guU. calamine ». Si maintenant nous con-
sultons Cotgrave nous y trouverons calamine ainsi expliqué : w a certain yellow
minerai substance which fire consumes, but nielts not ; mixed with copper
it changes it into a fine brass that looks like gold... ». Unlîn calamitte, qui
472 CHROKiaUE
n^est pas un mot iclkmtmt rare, est enregistré avec plu^tîcurs exemples dans
le compIcimMit de GodcfroVt et imerprcîé par « nom vulgaire du liliotte
hvdratè de itinç a.
Au sujet de ihatuil, relevé p;ir M, Delboulle dans un texte messin du
commencement du XV r* stécle^ M. Bos m'écrit que ce mol doîl signifier
« gouttière d'un toit w, et il le rapproche de chnei^ chemit^ chenrau.
— Je joins id quelques corrections ou cîtplîcaiîons qui m ont été remises
par M. Am* Thomas pour les recettes provençaïes du ms. de Cambridge
publito diins le précédent fascicule de la Rùmmm : — P. 275» K 11 » prtn
(kl htm hianc. Il u'y a pas Lieu de corriger bon en pion. II faut comprendre :
« prends de h bonne cérusc ». Ct U ligne suivante : hpoîvfm dil hhm, —
P. 275, dernière lîgr^e du texte; p. 295, l, 11 cl 12, Le mot Jcnida dart être
{v^fimiia : c'est le correspondant exact du fran^^ais^f/ïf*?. Bien que cette forme
provençale ne soit pas attestée littétjlemem, elle est trop régulière pour qu'ii
y ait le moindre doute à son sujet ; d. d'ailleurs Raynouard, III» ^ot ^ au Van
trouve fi^tidûi fienda^ fmta. Le Idngucdocieti âctucl dît /*^H(/o (Mistral)* —
P. 278, L 20, tiitiafm; lire aulatta La confusion de m et de h qui se présente
ailleurs, notamment p* 287, 1. 6» où te copiste a écrit éUforhium ^m fufar-
bmtn, rend plus que vr«iisemblable celle de n et de //. ^ P. 2S1, I, 20 et 2<)$^
h 4. Le mot tFfiiiti doit être identifié a eir^stï, qui manqtie dans Raynoyard^
mais qui n'a pas échappé à M. Entil Levy : i) désigne soit le persil, soit le
céleri. Cf. Mistral^ nressèu, et Chabineau, Gramm. Um.^ p. laS et ^4. A la
page 28 î* l 28, /Vi.ïr'iV doit m^inifestemeni cire corrigé en rrrHutL — V* 282,
I, î : siiugrec. Le moi doit être maintenu sous celte formt-, qui e^ï bien réelle*
quoique cmbarras^ame. A rartîcteyrwi^^fi^ Mistnil enregistre concurremment
hni^H^ un^rè, ^inf^rè^ et signale le catalan itmgrtch et Tancicn provençal
sinagric. Lîttré lui-même donne settêgrc, sf^ffr^^ sifte^ain conmie « noms
vulgaires du fenugrec ». — P. 285, L $, mtira fi; lire mttras t. — P. 286,
I, 5, la sttmttnna veri. Il n'y a pas Heu de corriger icnmwmj en sfrmuniana.
Il faut y voir une variante de iertmnha, mot qu'on lit dans les Auxth cmsûdùrs
(Rayiiouard, V, 20S), et q*iî vît encore aujourd'hui en Périgord sous \t
forme urnmù O'a armim (Mistral) t c'est ce que nous appclon* le cerfeuil. —
P, 296, 1. 7, ïir rtf/Wr] u garde f pfis itns e^tupit. Qu'on corrige ncapa^ soit ctt
ficama^ soit en ficaià, ou qu'on le garde» le sî;ns est nécessairement n pmtson
5âns écaille ■» ; il n*y a pa^ contradiction entre ce passage et celui où il est
recommandé de manger piems ah t^cmmt (ligne 6) ; au ctintraire. — P. 296,
L 17, nmngêde pluiiÇ) # df diamargarîtQtt. Il faut lire plms au lîeude^adf.
Il s'agit du fameux élcctuaire dît pUtis archtuon, qui figure non seulenient
dans le Frrcei'al de Chrétien de Troyes et dans la Bihk de Guîoi de Provins,
contmc le rapporte Godcfroy a rarticle/'/cHn*, mais aus^i dans la Cfntrrftie*
vers t4S7t oïi il * niis en défaut la sagacité du demicr éditeur. M- Foerster.
CL Uorveaux, VAntidoiairt Nmlë$^ p, 86. — P- 297,548, L i, mata tien
^uf irn en aisfma (?). Peut-être &ut-il corriger m mùtinm. Mistral cannait
nmitnçû au sens de *■ vulve *. — ^P* 298, $ S'* '* I » daqîmna. Il peut être
CHRONIQUE 473
Utile de faire remarquer que ce mot qui manque à Raynouard et à Levy, est
uae altération du latin médical alkanna, nom de la plante que les botanistes
actuels appellent ordinairement « lawsonia », et, par conséquent, une
variante du français arcanne.
M. Eug. Rolland a bien voulu aussi me communiquer quelques notes
qui font, en partie, double emploi avec celles qui précédent. Il me fait obser-
ver que le ^aujoi du $ $1 (p. 298) est bien une sorte de glaïeul, c'est Tins
que Ton cultive encore sur les toits de chaume. Enfin, M. M. Raimbault
m'écrit de Marseille que arsini, forme à peu prés semblable à arcens de
notre texte (p. 286, note j) se dit en Provence (manque dans Mistral)-
M. Raimbault m'apprend en même temps que la tortue terrestre (p. 288,
note 2) se trouve encore dans l'Esierel.
— On a vu plus haut (p. 360) que M. Suchier incline â identifier « Mon-
glane » avec l'antique Glanuni, dont remplacement, entre Saint-Remi et les
Alpines ' (arr. d'Arles), est marqué par deux monuments célèbres, l'arc de
triomphe et le monument des Julii, J'avoue que cette identification ne me
paraît reposer sur rien de solide. Monglane ou Monglenue (car les deux formes
existent) ne peut aucunement venir de Glanum : il y a impossibilité pho-
nétique. De plus Monglane devait être situé sur une hauteur; or l'antique
Glanum est en plaine : la plaine monte en pente douce de Saint-Remi aux
Alpines, mais il n'y a pas là de mont, et le château fort dont M. Suchier
(p. 361) suppose l'existence, est purement imaginaire. Ayant, dans ma jeu-
nesse, parcouru en tous sens les environs de Saint-Remi, je sais à quoi m'en
tenir sur la configuration du pays. Enfin le nom de Glanum, ville rui-
née au V* siècle, n'apparaît dans aucun document du moyen Âge. M. Suchier
renvoie (p. 361, note i) à une charte de 1 198 mentionnée dans la Statistique
des Bouches-dU'Rhâne du comte de Villeneuve, où les habitants de Saint-Remi,
sollicitant un privilège, auraient rappelé les anciennes immunités de Glanum ;
mais il est visible que l'excellent préfet des Bouches-du- Rhône a été mystifié
par un de ses correspondants. La charte de 1 198 existe bien aux archives de
Saint-Remi (c'est une copie du xvii« siècle), mais il n'y est fait aucune men-
tion de Glanum (renseignement dû à M. F. Raynaud, archiviste des Bouches-
du-Rhônc).
M. Suchier suppose encore que le surnom de Girart de Frai te (ou Frète)
est tiré de Fretum ou Fréta y ancien nom de Saint-Remi. L'identification de
Freliim ou Fréta avec Saint-Remi est bien probable : je serais mal venu à la
contester, l'ayant proposée jadis (Roniania, I, 59). Mais il est moins certain
que le surnom « de Fraite » en soit tiré. M. S. dit que le / de Fretum ou Fréta
peut bien avoir été conservé comme le/ de capi tu! u m, qu'il suppose a avoir
été introduit en français vers le viiic siècle » (p. 362). Que capitulum ait
été adopté par le roman de IVance au viii« siècle ou à une autre date, il
importe peu : c'est en tout cas un moi introduit par voie savante, et il n'est pas
ordinaire que les noms de lieux aient reçu leurs formes romanes dans ces
conditions. Et de plus j'ai fait valoir, dans le passage de mon introduction à
474 CHRONIQUE
Girart ik Hmuîlhn quedîscuie M. S., un aTgumcni d'une cen-iim force : c*^X
que Frailf^ Frète, Fretîe est fréquent dans \^ toponymie de la France (on a
aussi Fracbii dans le Midi), et que toujours Tongine e« Fracia *.
— Aux mots mtkûtrrais (alkcrt^és)^ dimtscre (mercredi), enjun (à jeun), /i»»^
fiifè (juillet), Godefroy cite vaguement un • calendrier du xiii= siècle *, san
înditjucr m ce calendrier est mat^uscrit oh imprimé ni où on peut le trouver» '
Nous trouvons ces informations nécessaires dans une notice que M* Ludco
Auvray, de ta Bibliothèque nationale, a pabltéc dans le BiUlographt moderne^
n" 4(190^), sur les chartes anciennes et manuscrits ayant fait partie de la col-
lection de Mgr Dcsnoye^s^ en son vivant conservateur du Musée d^Orléans,
Godcfroy a trouvé le caleniirier auquelil a emprunté quelques citations sur un
feuillet de parchemin appartenant à Mgr Desnoyers. M* Auvray fait encore
remarquer qu*au mot gteskereck (juin) M. Godefroy cite ïe même calendrier ;J
seulement cette fois il renvoie» par suite de quelque confusion dans ses note», ;
au ms. B. N. fr. 24428, où il n'y a rien de tel ÎA. Auvray ne s*est pas borné à
ces reai^cations : il donne le texte de ce calendrier, qui est en réalité un
recueil de préceptes hygiéniques dont on pos^de plusieurs rédactions en làUn
et en français, et sur lequel on peut voir le BuUeiifi dt la Soi\ des anc. iextes^
1883, p, 92-^* Mats les noms de /<rw/m-/ï, gùskerrch, propres au nord de h
France, ne se trouvent que dans la rCd action publiée par M, Auvray. Les-i
chartes, manuscrits ou fragments de manuscrits ayant appartenu à Mgr Dès-
noyers sont dévolus au Musée historique d'Orléans.
— Le tome XXXVIl des ArcMvis bhtmlqim du dép. de la Gironde (Paris et
Bordeauii, 1901, in-40, xv ei 595 pages), publié par les soins de M. Hr. Ahba-
die % doit être mentionné ici, parce qu'il contient un nombre comidér^blc de
textes béarnais. Ces textes sont : i^ le Livre noir de Dax, divisé en dcuX
parties» le coutumier et le canulaire ; i" les « établissements » de Dix, Le
Livr^ noir a été écrit dans la seconde moitié du xv* siècle ; la copie de* Éta*
blissements est plus ancienne : malheureusenient elîe a été faite par un scribcl
qui n'était pas du pays et qui a commis beaucoup de butes, La pubiicatioitl
se terntine par un glossaire et par une table des noms. L^ruvre est soignée'
et louable dans lensemble. Sur quelques points on peut n*étre pas dWcûrd
avec l'éditeur. On nous dit, p. n% que « îe Livre noir est, dans sa ^ccmdc
moitié^ une simple réédition du Livre rovige ». Alors, pounquoi ne pas avoir,
potir ta partie commune, înîprinié le texte du Livre rougv, qui est plus an-
cien } M. Abbadie imprime le texte du Livre noir, y joignant les variantes du
Livre rouge; mais il est peu commode d'aller chercher ïe meilleur texte dans
les notes, Q.uelqu4^ rectifications pourraient être proposées au g|os&iIrc: acs-j
1 . Voy, par ex. les formes ancien t^es de Fritte (Saônc-et -Loire), dan* k
Dict. i<>pogr. de lûrr, de L&uhans, par M. J. Guilleinin (Chalan>sur-Saânct ,
1S66).
3. Mr Abbadie a publié à part, dans le format des Arch. hùt* di h Giromtê^
une introduction qui peut se joindre au tome XXXVUde ce rccuciL
CHROXIQI'E 47 S
Ivf, i cheval» estiiudniissibk: : il faillit nictta- cette locution sous «.iKi/. Anm:*u
service du bout de Tan. doit probablement se lire auncu. car dans le dîct,
béarnais de Lespy et Rax-niond, baunou est relex-é en ce sens. De mO^me
doit être lu baumor. ^explication du calendrier romain, donn^ s<.>us
a, paraît bien superflue. Scdlor, traduit avec doute par « chaleur », n*est
pas un mot béarnais : c'est la transcription du latin s^tulyrt dons une charte
de Philippe le Bel.
— Le dernier fascicule de la Rn-u^ Je rOrùnt UHn (t. IX, t'asc. i et 2), pan»
en mai, renferme un article important (pp. 164-20$) de G. Paris, sur Philippe
deKovare enxnsagé surtout au point de vue historique {^Us Mr'moiffsJf Philip/^
de Novaré). Cette étude est destinée à prendre place dans l'introduction du
t. II des Historiens arminiens des croisades (lequel ne comprend que des écrits
6rançais), resté en suspens depuis la mort de MM. Schefer et de Mas I-atrie,
chargés par F Académie des inscriptions de diriger cette publication. Cx
tome, préparé dans de mauvaises conditions, et imprimé depuis plusieurs
années quant au texte, renferme, outre les Gestes des Cbil^rois dont une
partie est de Philippe de Novare, les chroniques de Dardel et d'Hayton.
Il paraîtra bientôt par les soins de M. Kohlcr, chargé de faire sous nu sur\xnl-
lance, puisque G. Paris n*est plus, l'introduction, Terrata et la table.
— Le dernier cahier des Rendiconti de Tlnstitut lombard (i* série,
t. XXXVI) contient (pp. 607-9) «ne note de M. G. Salvioni intitulée Vestigia
italiane del tipo flessionale sin^ohre formica, plur, formi^io;, qui est en
quelque sorte le complément de Tarticle publié par le même dans la Rofnania,
XXIX, 546.
— Vient de paraître, à la librairie Hachette, sous le titre h^eudes du moyen
e^e, un recueil de quelques travaux de G. Paris : Roncevaux, L' paradis de la
reine Sibylle, La légende du Tannlmusery publiés dans la Revue de Paris, puis le
Juif errant, tiré de V Encyclopédie des sciences religieuses et complété par un art.
du Journal des savants {iS^i), enfin Le lai de VOiselet, imprimé, mais non
mis dans le commerce, en 1884 (cf. Rom. XVII, 482).
— Livres annoncés sommairement :
Les éléments latins de la langue roumaine. Le consonantisme^ par J. A. Gandrka-
Hecht. Paris, Bouillon, 1902. In-8, xxvii-iio p. (thèse pour le doc-
torat de l'Université de Paris). — Ge volume est une partie, ou plutiNt la
« première section » d'une partie d'un ouvrage d'ensemble sur les éléments
latins de la langue roumaine, qui comportera cinq volumes Plx>nétique, Mor-
pbolc^ie, Formntion des mots et sémantique^ Syntaxe historique, L'xique), et
qui est le fruit de « dix ans d'études ». Il en donne la meilleure idée et
l'ait vivement désirer de voir bientôt paraître un ouvrage qui rendra de
grands services à la science. La philologie romane, et particulièrement
roumaine, compte maintenant en Roumanie des travailleurs excellents, qui
auront bientôt largement rattrapé l'arriéré qui subsiste encore dans cette
47^ CHRONtaUH
partie de notre science. Apres une courte, mais très bonne^ introduction sur
k consonimisnie du latin vulgaire, — où il renvoie, nuis non san?» k
compléter sur certains, points, — à Texposé général de M. Dcnsusianu,
Tauteur étudie le sort de chaque consonne et groupe de consonnes ktines
en romain. îl le fait âvec une méthode parfaite et une cntique rigourcnse,
S*âppuyant toujours, mais seuJemeni dans la mesura où c^est nécessaire,
sur la comparaison des autres langues rottianes. Chemin faisant, il
fcciîrie plus d'une étymologie courante (on a vu ici même, XXX U 29e, un
spécimen de ces études presque toujours décisives). Je n'ai pas trouvé,
en lisant la thèse de M. Candréa^Hccht 0^ troisième thèse de « doctotut
d'université » soutenue à Paris^ avec celles de M"« Cip riant et de M, Lcîte
de Vasconcellos, concernant k philologie romane )i d'oï^ervations sérieuses
à lui faire* Je crois qu'il attache plus d'importance qu^il ne faut à îa posi-
tion des consonnes avant ou après lacccnt, et que cette distinction lui a
fait introduire dans son exposé des distinctions inutiies. C'est par suite
d'une habitude invétérée qu'il prend pour date initiale de son étude la
conquête de la Dacie ; il parle presque toujours, avec plus de raiîiûn,
du w latin balkanique «, — M. C, -H., en souvenir de la pari qu^îl a priait
j mes conférences, m'a fait l'honneur» auquel je suis très sensible, de me
dédier sa thèse. — G. P.
Studù li mtil^ fiîûli^ke^ de Sent il Pvscariu. Bucarest, 1901- In -H, n p,
(extraits des Cûm'ôrbiri Utrrart^ l XXV, n«8 et 9). — Mt S. Puscarîu est
un des membres les plus distingues du groupe de jeunes avants roumains
qui depuis quelques années ont fait entrer la plulologie roumasïne ààns des
voies nouvelles et fécondes. Le présent mènnoire se divise en trois parties-
La pa'mière contient un certain nombre d'ètymologics roumaines (du latîn),
toutes, me semble-i-il, excellentes (je ne verrais quelques doutes que pour
wf » refait sur ittgd<i nîgell um, et pouri^/ < exprimere influencé par
excrément uni) ; l'auteur est beaucoup trop modeste en disant que la'
plupart ne sont ni originales ni neuves. --La seconde partie montre» con-
trairement à ce quedit M. Meyer-Lûbkc, quelessufces -aticus et -ata ne
sont pas inconnus au roumain. Dans la troisième partie, la plus îtnponante
pour ta philologie romane en général, Tjuteur établit^ à mon avis, contre
Topinion généralement admise, que fi finale n'a pas persisté» en italien et cti 1
roumain, sous forme d'i dans îes monosyllabes, mais y est tombée aussi]
bien que dans les polysyllabes. Apres avoir montré qu'il y a des monci-l
syllabes en -s» comme tras, qui ne présentent û'i ni dans Tune ni dans
l'autre des deux langues» il e^tpliquc par ranalogie lï fn^al des mots allé-
gués, qu'il divise en trois groupes . les pronoms noi, tioi, ûii Vi a èrt
ajouté a HO, vo. comme m;ïrque du pluriel (de même il. iti pour if); IcfJ
adverbes» rrn/, mai^ v. it./>*wt. /^n, oii ïi est l'i adverbijl (i\ ce pfopos îll
émet l'opinion très plausible que magis en lat. vulg, était devenu mau et
non maj^f max) ; IeS2« p, sg., </ai, it. (j^i, hsiat^ lior, où Vi a été ajouté à
dd^ i, û^ iUi, comme tTtÂnjue ût b i« personne et pour la distinguer de la
CHRONiaÙE 4?7
3». Celte démoli stmtioD fait grand honticur a la pénétraiion de Fauteur.
— Il nous annonce la suite de ces Éiudu ; espérons qu*elle ne se fera pas
attaidre, — G, P.
I fwriiti di satrcl0 Francisco, seconde la lezlone dcl codtct: iîoretîtino
scritio da Amaretto Mandïi, pubblîcaû di Luigi Manîîoni di Mordano.
Edkione II, con xxx. fotoiiple. Rama, Locscher, 1902. In-i2,xx-294 p,
— M. Manfon!» qui s'occupe depuis lougues années des Fiorfitf\ nous
donne ici pour la seconde fois la reproduction du texte italien contenu
dans un manuscrit de Florence de la Bu dti xivc siècle ; cette réimpression
revue soigneusement sur le manuscrit^ est accompagnée de 30 intéressantes
hèliotypies, au lieu de 19 que contenait la première édition. Elle ne com-
prend que la première partie de rouvragç, la seule qui se rapporte direc-
tement àsaim François; la seconde partie fera Tobjet d'une autre pubîica-
lion* En attendant l'édition critique que M. M., espérons-le, nous donnera
quelque jour, ce petit livre ne saurait être trop recommandé à ceux qui
veulent lire dans un bori texte roEuvre charmante où revit le pùvertlh
d*Assise tel qu'il était dans la tradition de ses premiers disciples* — G, P,
// Ubro dellc irc scriiture e i vûîgari àtîh False scuse eddk Van i ta, di Sonvi-
fin da la RiiHt^ a cura di Leandro Biadfne. Pisa, Spoerri, 1902* In-8,
3DtxV[ii-ti4 p. — M, Biadene avait terminé rimpression de ce livre
.quand commença» puis acheva de paraître Tédition des mêmes poèmes de
Bonvesin donnée par M. V. de Bartholom^is (\*oy. Rom. XXX, 623); en
comparant sur les manuscrits son édition avec celle de son involontaire
concurrent, M. B* s'est assuré que son texte était plus fidèle. 11 a d'ailleurs
pu dans son introduction tirer profit de quelques suggestions de l'autre
éditeur, tout en lui adressant certaines critiques. Son travail nous paraît
mériter en tout les plus grands éloges : le glossaire notamment est fait avec
beaucoup de soin et rendra service aux romanistes (une remarque sans
importa nce : les nmsi de Dieu ou de Jésus-Christ sont, dans Tusage
fréquent du moyen Age, non les ecclésiastiques, mais les pauvres, et cela
r^soridu contexte du second passage cité). M. B. nous fait espérer qu'il
donnera enfin prochainement Tèdition quil avait promise il y a bien long-
temps des oeuvres complètes de Texcellent Bonvesin, — G. P.
Dif Bfiiandhmg der Latevmthm Proparoxytofw ht dm MuudiUttndtr Vo^tsrntmd
im IVdihnischett, von Adolf Horning. Strasbourg, Heiiî, 1902. rn-4<>,
^ï p, {Beilagé lum Pta^r^lmm dér Lycéums, n° 578). — M. Homing a déjà
beaucoup fait pour écbircir un chapitre fort intéressant de Thistoire phoné-
tique du gallo-roman I celui qui concerne le sort des proparoxytons latins,
par ses recherches sur ce qu'ils deviennent dans les parlers du nord-est, où
ils sont traités d'une façon si particulière. Il reprend ici ces recherches
d*une façon plus complète et plus systématique, et présente sur les causes
et les exph cations p<issîbles des phénomènes qu'il signale des observations
d'une grande valeur. Pour examiner et discuter ses vues, il Ëiudrait une
étude non moins longue et non moins approfondie que la sienne, fit il
478 cHroî4iqoe
faudrait m^rae en éUrgîr La base (bien qu*i! ne néglige pas, sur plus d*iin
pmiti, h comparaison avec le français, le provençal et Tiulien du nord).
Nous nous bomcroQs ici à rccomrniinder son mémoire à tous les roma-
nistes, et spécialement â ceux qui s'occupent de llitstoire du lanti en
Gaule. — G, P.
Die dmktt Hfât ah iîiUakher Kumimiltd in d^n, Romamn des Cf^esiim de
Troyts,,. von Alfons Kilka. Bresîau» 190Z. in-8'^, ^4 p. (dissert, de Breslau).
— Nous ti*avons ici que le commencement d'un travail qui promet d^ètre
très intérressant, et dont nous parlerons quand Taut^ur î^aura publié en
entier. — G. P,
Dank à Lammm} par Ernest Mlîket. Lausanne^ 1901. ln-80, i6p* (E^it'"^'
de la Rivm hhlùrlque paudoist). —Dans cette spirituelle note, M* Murei
montre Tinanité d'une conjecture lancée par le P. Berthier et appuyée par
M* Pochh animer, diaprés laquelle Dante serait vetiu de Paris (où il n'a
sans doute jamais été)» en ijio, trouvt^r à Lausanne Henri VU, qui y a
séjourné non « plusieurs mois w, mais un ou deux jours- lî est sin)çulier
que, tandis que la critique réussit à détruire tant de légendes sur Dante,
rérudition s'amuse à en créer d'autres. Il est heureux qu*on leur coupe,
comme Ta fait M. Muret, les ailes au sortir du nid, — ^ G. P.
Jaufrt RiiiUh Question vecchie e nuove. Nota del prof. Paolo Savj-Lopeï»
Homa, 190Î. In-â«, 16 p. (Extrait des RendmnH dtUa R. Accademia dii
LtHCii, vol. Kl), — Dans cette note* M- Sav^-Lope^, qui parait peu con-
vaincu par l'ingénieuse hypothèse de M» Monacî faisant d'Aliénor de Poi-
tiers Tobjet de Tamor de terra loubdana de Jaufré Rudeî (voy. Eùm. XXIII,
489)» s'attache surtout àcombattreceïk%plus ingénieuse encore, de M, Appel
(voy. Rùm.^ XXXI. 47-*), qui veut ddk donna di irrm icnianu fart unn
donna dt cieh. 11 trouve le plus fort, et aussi îc plus méritoire, de ses argu-
ments dans la chanson nouvellemcut découvene et publiée diaprés le ms.
Campori,où il s'agît certainement de Vamor hnhdana. Le texte de cette
chanson est très altéré, et la restitution qu'essaie M. S,-L,, certainement
plausible en beaucoup de points, n'est ni complète ni partout assurée (I 2,
lire p,-ê. h ven^ pour hmter \ mais les vers 14- 1 St if^V ^mjai ia fmg en t^nm/an.
Tan AfVj ni^'m mos brati rtndauiû^ ne soiït pas douteux, et M. Appel lui-
même supposera difficilement quHls s'appliquent à la Vierge Marie, ^
M. S.-L. conjectare avec vraisemblance que le v. 16-17, Lai nirm tî tku
repaire Luire ^ Em fHrU qùm de pm$ar Mûr aient pu contribuer a la forma-
tion de la légende (ou plutôt de la liaion) du voyage maritime où JauCré
aurait trouvé la mort en allant chercher sa dame inconnue ; il me parait
qu'avec Tei^pr^sion d^atttûr [de trrra] hnfMiàna et les quelques passages où
il dit qu**î n'a jamais vu celle qu*il aime, ils en constituent tout le fonde-
ment. — G. P.
M. M. Kawczyshski, Huon de Botûti\i%^poemat ttûrûfrancuski^ stns^cimf,
rû*bùir i oltjisinenM. Cracovîe» 190a* In-S*» (pp, iî^-149 du BitUftm Jt
VAtudèmk des Sdaues de Cracùvù^ oct. 190a). -* Résumé d'un ouvrage
ôHROMiatjfe 479
rît en polonais. L'ayteur, qui a déjà fait dériver de VAntor tt P^yclte
d'Apalée, non seulement PaHmopeu dt BhtSy mak le Chevaîifr au Cy^ne,
vent mainienant nous persuader que Huon de Bordtaux aussi n'est qu'une
adapmioti du conte du rhéteur africain. Il est chk^ d'après M, K., que
Huon n*est autre que Psychi en travesti, que Clurïemagne joue envers
lui le rôle de Vénus envers dle^ el qu^Auberon, le petit roi bt;au comme le
sûjeil, est Amour : Huon enfreint ses ordres comme Psyché ceux d'Amour,
et Auberon le proscrit tout en le protégeant de loin et en T exaltant finale-
ment, comme Amour avec Psyché (il lui transmet son royaume de féerie,
comme Amour, introduit Psyché dans l'Olympe)- Pour faire des contes
d* Apulée une chanson de g^si^i, notre trouveur a rattaché son récit à
répïsode, qu*il connaissait par les chroniques, du meurtre d'un Charles»
fiîs d'un empereur Charles ^ par Au bon in. Les rappons d'Aubcron avec
l'Alberich du î^ibiînngfn, TElbench d'Orhiil, l'Alberich de Hugues de
Toul, sont de pures chimères (ou Ortnit et J. de Guise ont puisi' dans
Huon). Il ne se peut rien de plus ingénieux et de mieux déduit. Quant à
b vraisemblance qu'il peut y avoir à ce qu*un poète comme celui de Hum
ait lu le roman d'Apulée, Fauteur ne prend pas la peine de TéubUr. IL
regarde ïa thèse comme évidente et il conclut ainsi : u On se demande
pourquoi tant de savants...** se sont à ce point trompés sur le vrai sens
du poème en question. C'est qu'ils suivent une méthode erronée*.* Elle
consiste à ne tenir aucun compte de la chronologie, à placer dans le passé,
à des siècles de distance, des faits et oeuvres notoirement postérieurs* Sans
souci du principe du milieu, on attribue des idées et des perfections à
des temps ou 4 des couches sociales qui n'en éuient pas susceptibles* A les
croira, ce ne serait pas un progrès continu, mais une décadence constante
qui ferait la règle de i*histoirede rhumanitè. » Je regrette àtn^ pouvoir
lire daos le polonais les preuves dont Tauteiir appuie ^ns doute cette accu-
^lioQ. EUe me touche (car c'est de moi quii s'agit^ ainsi que de M*
Voretïsch, qui, d'après M* K*, n'a fait que développer mes idées), mais elle
me surprend encore plus* J'ai toujours essayé de tenir compte et de la
chronologie et des milieux, et je cherche en vain en quoi mon étude sur
Hmn dt Bordeaux prouve que Je regarde une décadence continue comme
la loi de l'humanité. — G* P.
RoBEiT OF Brunne's m Hintdlyng Synne », A. D* ijoi, wîth those parts of
ihe Anglo-French treatiseon which il was founded, William of Waoïng-
ToK*s Matiin^l dti ptchif^, re-edited from mss* in the British Muséum and
Bodieian li brades, by Fr. J* Furnivall. Part L London, Kegati PauU
French, Trûbner and Co, 190 j. In- 8», 224 p. {Early english Tfxt Sodfty)*
— Nous sommes heureux d'avoir à annoncer cette publication qui ne sera
pas moins bien accueillie sur le continent qu'en Angleterre. Le Mamul de
(ou its) péchés de Wilïiam de Wuddington est, parmi les poèmes français qui
ont été composés en Angleterre au xiii« siècle» Tun de c^m% qui ont eu le
plus de succès, puisqu'on en possède uiie vingtaine de manuscrits (voir Scwj,,
4^0 CHROSiQpË
\TI1, îîj; XV, îï3;XXIX, 47). Du reste quoiqiie iyam peu devikor]
litténirc. il n'est pis Jcpourvu dlniérèL Cest en 1S61 que M. Fami^l
rsvjil publié pour b pranièrc fois, d'après deux manusarits, eo reg^vd de
U vcTiîoii iQglaisc de Robert de Brunne. Cette édition, tirée à petit 1
pour le Rolbyrghe Club et tion mî^- dans le commerce , étm lutuicUeniefitl
ion rare, principalement sur le continent, et b préieuîe réïmpfessioo oe
peut qti'êîre li bienvenoe. Ce n'est du r^te pis une réimpressior* pure et
simple ; les telles OUI été améLiorés en mAînt endroit. H en i:^éstilie, par
rapport à h première édition, un changement dans U numérotaiion des vers»
Ajoutons que M. Furoivall â indiqué sommairement tes sources des contes.
d'jffè» lart* de G, P^ris dans VHtii. hiî. de k fr ^ XXVITI, iqî et suiv.
Pour qu'il fût possible de placer en regard Fangliis cl le français, un format
im peu plus iirge que celui des auirci volumes de VEarîf fngîish Trxi S&ctdf |
i èlé Adopté. Les dépenses supplémentaires causées par cette disposhion ont]
été piyte à laide de somtnes provenant d'une souscription faite en 1S99J
par les amis et admirateurs de M. FumivaU, i l'occasion du 75» anniver-
saire de sa natssauce (voir Hom., XXX, 6|a).
CûrtuMre du chtê^tn et S^ini-Lâud d'Angui (actes du %i* et du Xll* siècle),
suivi de la Vie de imni SUvestre et Tîm^ntim de h sainte Croix^ poen^e
francs du xti* siècle, publié par Adrien Flanches ault* Angers^ 1905.
In-S", ixiv-ioi pages {Doc. hiifm^îqua $nr t Anjou, p, p. la Soctéié d*^gri«
cuiiure, sciences et arts d'Angers), — la seconde partie de cette publicaïkm^
(pp. i$j et ss.)> peut seule être ici annoncée. Hlk contient le ici le bté-
p^ du poème sur lequel i*ai inséré une notice dans la Rùtnania, XX\1IÎ,
180. Je ne puis guère que signaler cette édition dont M. Flanchcnault me
laisse la principale responsabilité. C'est lui qui a fait la copie, mais 11 m*â
prié d*cn revoir les épreuves, et, pour m*atdér dans celte tâche, tl m'a i
une excellenic photographie du texte. La préface aussi reproduit la piti
grande partie de nu notice, augmentée de quelques rectifications que"
Teianien aitentif du texte c^mpkt ni*a suggérées* Ainsi je m'étais trop
avancé en disant {l L p, 2Sa) que le vriii litre sérail U^^etidt ou Fj> ii
saini SUfeiirr , Eneiîti, le commencement du poème est bien pris de la vie
latine de saint Silvestre, mab le rcsie^ k partir di^ v. ^9) (le poème coti-
itetil 1480 vers) est tiré de VhnvNiiù S. Cruch {A A* SS,^ 4 mai, cl édi-
tion Holder* cher Teubncr 18^9).
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£l I ^-50
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L ^ emprunt du lançais, P*^^ P^iis,
- - ^^ — ^ — — — — H — : mcmltrc *k
tlustitm Ia-4^ — ^^h _ _ . _ . . 2(f
Le roman du Comte de Toulouse, P-T *«= «"^»*^' ^ "
^ — — Pm,,..*,.,^. 50
La Ht' ^ normande avant ranoexion (912-12041. ; -•^**'[^
ié,- '-' lit* h Soartv i'- 1-.*;, ,i,.. -.♦ K^-^^^r \'r^ [^
itr par li: mètHL 50
Rimc^ Mv^Léif^M^^iionnes. 'ïciî- — •- - -^^- Vq
^— ^ — vtpl. !»*«. — l'hit 3 Ir.
É^tud^ sur là ^-ïtjiîtt^fr^rt*, r«^ànr-».\r« r*ir A. Mapîgn^S'. Tuïnt^ 1
— Pût ,. ....j w..... • . ./ aoîf*
Mtoo--* '«^ f^ S'---** é^ linguistique de Paris. "^ "^^
— Table analytique •*^; L^puE E«HAUti, Uu
Essai comparatif sur In -oire des rythmes,
tncovic* Cr ^ Prh . f. • * - » f;
Annuaire de i hcoïc pratique des Hautiss Études ^^;^
■ ^^ — . — -^ uC*
II.-
^t-^ ... -
- — par Friéii v
r^^ .... &f.
H4..1I »«0y*f ntfttik. iwp«ivfip«4
N* 188
Octobre
1903
ROMANIA
RF.CUEIL IKIMLSTKIUL
COSSACBN » L'ÈTCDR
Tome XXXII
\ . '1
DES I-ANGUES ET DltS I.mt^RATUKIiS KOMANHS ^"^ -a
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SOMMAIRE DV PRÉSRNT NUMÉRO
G- Pak«. Le cycle âc 1.4 « Gageuri
P. Tcfipp, P*îl /iï^/rti» tii Çj9ti*it2rtvt du Hamd,
and Kilii r/i^oiy
1^:
s^s
MEÏJVNGH5
h\ Loi, Conjectures sur Gîmri M' Rmiuliatt, I, Boson d*E$CJfpioo,
llf Otiilotî. m, Les Dtticrtok
y Lot. Orson de BcâuvaJs, .
P, MicyiTR. Wjucbler dt Den^nn.
G RaVKaUD. L^ dît au htfJt {Jjrvui
R. Lanclois. lr.uiih» mh à Vindcx au Xiiv sicdt
E Lakguîis. Inicgrutii> aUff,. ...
G, T. Clark. Les explosives sourdes eittrr ^oydicf en itjtki<
%1^
VU
COMPTEE RlilKDUS
i^/ ( fwi/aiM u> . f M.). .^ J97
L, JoRiJAN. Gi (G. HucM 619
Chrutûquc riuitx Ucï noy i^tc^ «Ji: Fbiidre en ï yjq^i >i^a, p.p. H« Piu^KMfc
PliJUODlQ.UliS
CHRONiaUE
TABLB Df:S MATIÉRL^
Ht
\x% pmchaim numérQ^ confient rom
R. J, CUERVO. M*ïrt*i y iimhd; fHù*^Uêf h\ maj^int
P. I, ^ .. -, -
Ci. HlKT. Lj , \%.
F, 1
A, i-
P. I ' ic lii t<»'i»*»»f
M.
II. "-' \^^ clun^ns de Guinéutiic 4' Orange (111^)1 —
LE CYCLE DE LA GAGEURE
Le thème fondamental de toutes les variantes du conte que
nous allons étudier est celui-ci : un homme se porte garant de
la vertu d'une femme à Tencontre d'un autre homme qui se fait
fort de la séduire ; par suite d'apparences trompeuses, la femme
semble avoir en effet cédé au séducteur, mais enfin son inno-
cence est reconnue. Ce thème, plusieurs fois traité au moyen
âge sous des formes diverses, l'a été aussi par Boccace, par
Shakspeare et par Weber\ On le désigne souvent par le nom
de Cymbelifie; mais le drame de Shakspeare en offre l'une des
formes les moins primitives et les moins pures. Nous lui don-
1. [Dans les dernières années de sa vie, G. Paris consacrait Tune de ses
leçons hebdomadaires du Collège de France à l'étude des romans d'aven-
ture. Il se proposait de rédiger sur ce sujet, pour V Histoire littn\iiri\ une
suite d'articles, comme il avait f;iit précédemment (dans le tome XXX) pour
les romans de la Table ronde. Il sera impossible de donner suite à ce pro-
jet : la rédaction des diverses parties du travail est trop peu avancée, et d'ail-
leurs, au point où en est V Histoire littéraire^ il n'est guère admissible qu'on
revienne constamment sur des périodes déjà étudiées en des volumes depuis
longtemps publiés. Mais entre les leçons de G. Paris certaines présentent
une rédaction assez arrêtée pour qu'il soit légitime de les mettre au jour.
C'est notamment le cas pour celles qui ont pour objet les poèmes groupés
sous le titre de Cycle de la (ui^^eure. D'ailleurs, Paris lui-même, peu avant sa
mort, en avait inséré un court extrait dans la Mi^cellanea récemment publiée
en l'honneur de M. le professeur Graf, de Turin. M. J. Bédier a bien voulu
se charger de transcrire ces leçons d'après les cahiers de son ancien maître, de
compléter quelques analyses, de régulariser l'annotation, substituant, là où il
y avait lieu, la rédaction de la Af/.viv//</w<M à celle des cahiers |. — P. M.
2. C'est l'opéra dl:tiryatithe (1824).
Ibmania, XXMI ] i
482 G. PAEIS
ocrons h désignation de la Gageun^ qui convient à peu près â
toutes les formes (bien qoe dans quelques-unes, et des plus
indetines, il n'y ait pas de gageure à proprement parler), et
nous en classerons les variantes diverses en groupes dont nous
essaierons de retrou^^er Tordre naturel et les rapports. Ce cycle
a déjà été souvent étudié : par Francisque Michd\ Von dcr
Hagcti% Reinhold Kôhler», RocIîs\ Ohle», Todd*, Childs
mab, d'une pan on Fa souvent indûment mêlé avec celui de
Barimm ; d^autre pan il semble bien qu'on en ait mal compris
l'évolution, plaçant en dernière ligne et regardant comme
cotuposite le groupe qui est au contraire le plus primitif et le
point de départ des autres. Réservant pour la fin de notre
étude la discussion de ce s\^tcme, nous allons passer en rtvut
les nombreuses versions françaises et étrangères du conte^ en
les rangeant dans Tordre que notis croyons le plus logique et
le plus historique en mèiiie temps.
A : BONNE FOI DU GALANT; SUBSTITUTION ET MUTILATION.
La forme primitive de notre thème nous parait être celle ou
b femme feint de céder aux poursuites du galant, mais substitue
en son lieu et place une femme de condition inférieure, que le
galant mutik ; la femme qu'il croit avoir séduite prouve son
innocence en montrant qu'elle n'est pas mutilée.
Dans une seule des versïoi^ de ce groupe, qui nous semble h
metlletire, U s'agit de la satUT et non de la femme du héro^^ct
ip là i^mmdÊk VkkiU (Farts, iSh)
3. Gi mmm hikmHwktr^ t. ÎII^ pf. civ-cvi.
). IMUFoimrHaU fir girm^aisfàt wU fpmâmisckt ^MkkfU, u IV (i8£7X
p. 270; cL JËfetJMrr Sikri/kÊÈ ^mr M£Mmmf»n^mg von fi. Kèhkfr lig|. %xm
}€kja»m Bqlte, t. f (iS^)» p. m*
4. A. Rodb» Udif dm Viikktm^MpmÊm mmd Ht ir#adkrwv Ja^ EttHmO-
S<y«(ibf.deHalk, lUi),
f, IL Obk, Shaka/mr^t CfmhSim mU uim rom^di(km fmU^tr (fier-
Int, i8>9o>
6. Dtss kf FMic^H^t 0/ iftr wtoiêrm kqpnfv rnsSÊdêtim wf Ammia^
t.II»p. 107.
7, Fr. J. OaU. TV mfSshmmà teotthk fofmiMr Uhds, u V, ^. at.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 483
elle épouse le roi à la cour duquel a eu lieu le défi. Dans les
autres, qui ont gardé les deux traits caractéristiques, la femme
étant Tépouse du héros, le dénouement est simplement la
réconciliation des époux et la confusion du galant. Dans toutes,
le galant est de bonne foi et a été trompé par la femme, qui,
ignorant le défi, a voulu, sans sacrifier son honneur, gagner les
dons qu'il lui offre.
1. Poimegrec '. — A la cour du roi, Mavrijanos vante sa sœur,
que nul, à ce qu'il assure, ne peut séduire. Le roi prétend y arri-
ver : il gage son royaume contre la tcte de Mavrijanos, qu'il met
en prison pour la durée de l'épreuve. Il envoie à la jeune fille de
riches présents, requérant d'elle en échange une seule de ses
nuits. Elle demande à ses servantes que Tune d'elles s'aban-
donne à sa place ; seule, la plus jeune consent \ A l'aube, le roi
lui coupe le doigt qui porte l'anneau (et des cheveux). Il
revient à sa cour, montre ses trophées. Mavrijanos a perdu, il
va être conduit au gibet, quand sa sœur, avertie, arrive,
demande pour quel crime il va ûtrc pendu, et, sur la réponse
du roi, montre sa main (et sa chevelure) intactes. Elle reven-
dique le roi comme son esclave; le roi l'épouse '.
Cette forme est la seule où le roi soutienne lui-même la
gageure et l'épreuve : est-ce la forme primitive ? Il convient en
tout cas d'y noter ces traits archaïques, l'esclavage, la barbarie
de la mutilation.
Dans les cinq versions suivantes, l'héroïne est l'épouse et non
la sœur du 4>arieur, ce qui change toutes les conditions du
récit.
2. Hants Taliesin^, — Ce conte gallois du xiii« siècle offre
avec le poème grec les plus frappantes ressemblances. A la
I. Voyez les formes différentes (onze versions, recueillies depuis 1805),
dans Chîld, ouv. cité.
2.* Dans d'autres versions, sans doute les plus anciennes, elle ordonne à
sa servante, comme une chose toute simple, de se donner.
3. Ce dénouement paraît le plus ancien (cf. B'). Dans d*autres versions,
conformément aux conditions du pari, le frère devient roi, ou le peuple le
dépose et met sa sœur à sa place.
4. Màbinogion (Lady Guest), III, 321 ss. ; cf. p. 356 ss.
4^4 G. PARIS
cour du roi Maelgwn, les bardes vantent sa femme et ses
bardes; mais Elphin dit que sa tenime et son barde Taliesin
sont les iTieilleors qtit soient* Maeîgwn le fait mettre en prison
et envoie son fils Rhun chez Elphin pour éprouver cette femme
et ce barde* Taliesin ' conseille à la femme d'Elphin d^habiller
comme elle une servante, qui reçoit Rhun à la table et dans la
chambre de sa maîtresse : U Fendon (nous retrouverons ce trait)»
et lui coupe le doigt qui porte Tanneau d'Elphin, Le roi fait
venir Elphin de sa prison et lui montre le trophée ; il reconnaît
bien l'anneau, mais non le doigt, pour trois raisons : Fannçau
est trop large pour le pouce de sa femme, trop étroit pour son
poignet; — Fongle n'est pas coupé chaque samedi; — le bout
du doigt a pétri delà pâte. Taliesin apparaît (longue rédtadon
de poème), et montre la femme d*Etphin dont le doigt est
intact.
3. Ballade écossaise, Tht twa knigbis \ — Cette ballade, qui
serait mieux intitulée /> Ommiicr et Vkuyer^ est peu répandue
et de forme récente^ mab d origine ancienne. Ici, le rôle du roi
a disparu. Un chevalier a quitté son château pour une absence
de neuf mois* Son écuyer veut en profiter pour séduire s^j
femme. Comme elle repousse les présents qu*il lui offre,
s'adresse à la nourrice (trait que nous retrouverons dans B), qui
endort la dame et introduit récuyer dans sa chambre. La dame,
réveillée à temps, le remet à la nuit, et profite de ce répit
pour décider, moyennant cent livres, sa nièce à la rempb*
cer. L'ccuyer coupe le doigt de la nièce et s'en va ; la dame
enveloppe le sien. A son retour, le mari apprend Faventure par
récuyer, qui lui montre le doigt coupé, tl convoque à un
repas les parents de sa femme, Finsulte et lui dit adieu; mais
elle délie à la lumière le doigt qu'elle avait lié dans robscurité,
et raconte la vérité. La nièce a le droit de tuer ou d'épouser
récuyer : elle choisit de Tépouser.
4. Mmuscrit de Tours (f. téj v*») », — Très altéré au début,
ce conte rappelle de près la ballade par son dénouement. —
1. Soo rôle mppelie cdui de l*aèdt libié par Agantemnon aoprès de Oy-
tetn oestre.
J. C^iM, Tbe^nglùh tmà Uûitish popular hûUadt, I* V, n^ lé«,
|. Maouscrit 46S (dw XV* siècle) ; recueil d*txemph de la «ecomlr mcàtài
du xin< stà:k.
LE CYCLE DE LA tt GAGEURE n 485
Un bailli, laissé auprès d'une comtesse, la persécute. Elle feint
de lui céder, mais substitue à sa place une donticcllti^ à laquelle
il coupe le doigt, La dame éloigne la servante, et garde sa
main enveloppée. Le comte revenu^ le bailli accuse la dame
d avoir eu le doigt coupé par un de ses ribauds ^ Le comre
réunit en un grand repas les parents de sa femme ex, leur
contaot Thistoire, comme arrivée en un autre pays^ leur
demande quel châtiment mérite une femme capable d*une telle
conduite : la mort, répondent-ib. Alors il déclare que Théroïne
de son récit est sa femme. Mais elle montre son doigt, et dit
cette parole (passée en proverbe) : Qui sain lie son doit^ sain k
desîit. Le bailli est pendu.
S- Ruprecht de Wùrzburg, hs deux marchands de Verdun ^
(poème du xijï* siècle, traduit du français). — -Ici, comme dans la
ballade écossaise (3), la cour du roi a disparu; mais surtout
le milieu social a changé. Après une préhistoire que nous négli-
gerons, un marchand de Verdun, Benraii, se rencontre chez
son hôte, à Provins, avec d'autres marchands qui s'accordent à
médire de leurs femmes. Seul, Bertran loue la sienne^ et Thôte,
Hogier, gage ses biens contre ceux de Bertran qu'il la séduira
avant six mois écoulés. En conséquence, Bertran annonce à sa
femme, Ermenjart, qu'il part pour Venise, et Hogier s'efforce
de gagner son pari : repoussé en diverses tentatives, il lui offre
mille marcs, qu*e!le refuse encore, mais que tous les parents de
Bertran et même les siens la pressent d*accepter. Enfin (et c'est
la Vierge Marie qui lui suggère cette idée), elle propose à sa ser-
r vante Ameline de sliabiUer une nuit comme elle et de prendre
place moyennant cent marcs. Hogîer demande à la fausse
Ermenjart de lui donner, en souvenir de cette nuit, un joyau;
et* comme elle n'en a point, il lui coupe un doigt. Il le rapporte
à Bertran, qui se désole, et conserve pourtant quelques doutes.
Mais tout doit s*éclaircir à un banquet à Verdun : là^ Hogier
-ayant montré le doigt coupé, Ermenjart dit d'abord qu'elle a
Édé aux conseils de toute sa famille, puis montre sa main
intacte; Ameline montre la sienne, mutilée i Hogier Tépouscj
avec ses cent marcs de dot.
î* On ne comprend pas bien quelle relation eaiiste entre Va dame et k
baiîlî.
3. Von der Hagen, Gesammtabenteiitr^ n*> LXVIIL
486 G. PARIS
6, Jakob Ayrer, Contedia wn lu^eyen Jârsîlickn Ràîhcn * (pièce
composée vers léoo, à Nuremberg). — A la cour d'un prince^
deux galants gagent avec un mari qu*ils séduiront, pendant un
voyage qu*il va entreprendre, sa femme FrigiaS et qu'ils
obtiendront d'elle son anneau de mariage et son collier* Fei-
gnant de céder, Frigia envoie à sa place deux de ses servantes,
qui ne se laissent que courtiser par les galants, et qui »leur
donnent Tune le collier^ Tautre la bague de leur maîtresse»
A la fin, Frigia, que tes séducteurs n'ont jamais \Tje, appa-
raît, et, comme ils déclarent ne pas la connaître, son innocence
est prouvée K On ignore la source de Jakob Ayrer^.
B : M.\UVA1SE FOT DU GALANT ; INDICES.
I
Tous les récits quî existent en dehors de A, ont (sauf omis-
sîon fortuite) ces traits en commun : le galant est de mauvaise
foi, il sait bien n'avoir pas possédé la femme (ou même ne
Favoir jamais vue), et il cherche â faire croire qu*il a gagné le
pari en décrivant un signe qu'elle a sur le corps» et (ou) en
montrant des joyaux à elle qu'il s'est procurés,
B * : l'héroïne est sœur du pakîeur ; le calant ne l'a
PAS vue; accusation de viol (et de vol).
Le groupe B ' se caractérise par le fait qu'il s'agit toujours
d*une sœur, dont le frère fait Téloge, ce qui décide le roi à
i. Opus thofittrkum, Nuremberg, 1618. Ayrers Dramen, hgg* voo Adelbert
von Kciîcr (BiHkitkk drs littetarischm Vtmns m Stuttgart^ t. LXXVl, 1865)^
a* Les personnages de la pièce portent généralement des noms roitulns.
3. Par ces traits, cette version se rapproche de B^ On peut admettre
pourtant qu'elle se rattache tout à fiiit à A, que les changements sont voulus
et que les ressemblances avec B' sont fortuites : noter que Frigia ti 'accuse
pas les prétendus séducteurs comme dans B% mais dit toyt de suite qui dk
est.
4* Au groupe A se rattache, sans qu'on voie bien comment, la pièce
d'Alexandre Dumas, Modtmomlk ât BeUt-Isle^ jouée ^uk Francis k
12 avril 1859. Le duc de Richelieu parie qu'il sera dans \z chambfC de
M*** de Bclîe-Isle, venue à Versailles (1726) pour solliciter la grâce de son
père. M^»* de Prie^ maltresse de Richelieu^ découvre son pkn et prend li
place de M^' de Belle-Isle, Le fiancé de celle-ci la croit coupable et veut x
battre â mort avec Richelieu ; tout Bnit par s'éclaircir.
LE CYCLE DE LA « (ÎAGKURK » 487
vouloir l'épouser : il répouse en effet, au dénouement, du moins
dans la plupart des versions. Pour prouver qu'elle n*a pas cédé
au séduaeur, la jeune fille l'accuse en public de l'avoir violen-
tée (et volée), ce dont il se défend en assurant, ce qui est vrai,
ne lavoir jamais vue. Ce groupe se divise en deux sous-groujKs,
suivant que l'accusation de vol est générale, ou qu'elle porte
sur un objet très précieux et formant paire. Le premier sous-
groupe est le plus ancien et proprement français ; le second est
particulièrement italien, et survit dans différents contes popu-
laires. Dans le premier sous-groupe, la gageure manque.
B ' a : Pas de gageure,
1. Manuscrit de Tours 468, f" 33 v". — (iuillaume de Nevers
va servir l'empereur à Rome et se distingue. 11 vante tellement
sa sœur (le manuscrit omet ce motif) que l'empereur veut la
prendre pour femme. Le maréchal, qui avait espéré lui faire
épouser sa propre sœur ', va à Nevers, se foit donner par la
nourrice l'anneau de la jeune fille, et apprend qu'elle a sur sa
cuisse une rose. Pourvu de ces indices, il raconte qu'il a passé
trois nuits avec elle, et Guillaume, désolé, s'éloigne pour tou-
jours. Mais sa sœur apprend l'imposture, vient ;\ Kome, accuse
le maréchal de l'avoir violée : celui-ci jure de ne l'avoir jamais
vue. Un combat judiciaire est préparé : connue il va être livré,
elle dit qui elle est ; le maréchal est puni, on retrouve Guil-
laume, et l'empereur épouse la jeune iille.
2. Guillaume de Dole ^ , — Ce très joli roman a été, d'après les
savantes recherches de M. Servois, composé entre 1 199 et 1201.
L'auteur, quand il l'écrivit (cf. les derniers vers), était devenu
moine. Il avait ainsi perdu son « sornon » : il aurait bien dû
au moins nous dire son nom. On peut croire que c'était /«'/mm,
et que le surnom était Renart. Il y a en effet de sérieuses rai-
sons de croire que l'auteur de Guillaume de Dole est aussi celui
de YEsœufle^ et il n'est guère douteux que celui-ci ne soit l'au-
teur du laide VOtnbrey qui dit s'appeler Jehan Renart. S'il en est
•
I. Œ un motif analogue dans lyoon de la Hoc1h\
a. Publié par G. Servois (Socii'U' litu anciens textes français). Cf. Ad. Mus-
sàRi, Zur Kritik und Interprétation ronianisiher Texte, III (Vienne, 1897).
488 ^^*^'
ainsi, Jehan Renart aurait écrit FËroufle vers ii8y^ le lai dt
rOmbre un peu plus tard (il y cite VEmmJk% serait ensuite
entré en religion^ puis aurait composé Guillaume Jt Dole en
I200. n est vrai que le ton de son poème ne semble guère
contenir à un moine : mais nous ne pouvons douter qu'il le
fût, et d'ailleurs Guiot de Provins rétait aussi, ci pareillement
Raoul de Houdan quand il écri\'it Meraugis K
La fable du roman est très altérée et repose probablement sur
une tradition orale et imparfaite de Guillaume de Nnrrs ou d*un
récit pareil. Il s'agit aussi d un empereur^ mats il réside h
Maycnce * (comme Frédéric I), et non à Rome, et il s'appelle
Corras, par souvenir des trois Conrad des X*, xî* et xii' siècles*
Ce n*est plus ici le héros qui, à la cour où U est venu de lui-
même, vante sa sœur et inspire à Temperetir de Taîmer; c'est
W\ jongleur, nommé Jouglet, qui lui vante le frère et la sœur,
et de telle façon que l'empereur fait aussitôt venir le frère, et
s'éprend passionnément de la sœur'. Guillaume de Dole*,
arrivé chez Corras, s'y distingue de toutes façons, mais ne dit
rien de sa six*ur ; c'est l'empereur, toujours préoccupé d'elle, qui
spontanément lui déclare qu'il veut l'épouser. Un sénéchal
curieux (comme Keu) surprend ce discours et se dit qu'il
empêchera le mariage- Il pan pour Dole, espérant voir (et
séduire ?) Liénor, et se présente à ta mère comme le compa*
gnon d'armes de Guillaume, et comme venu de sa part. Il
demande à voir Liénor, mais la mère lui répond que personne
ne la voit en l'absence de son frère; pourtant» gagnée par ses
assurances et par le don d'un riche anneau, elle lui décrit la
beauté de sa fille et la merveille de la rose qu'elle a sur la
cuisse ^ Le sénéchal revient à la cour, où Tempereur lui fait
j . C'est i tort que M. Friedwagner, en soa 61ition d« Mirangù (p. |_xvt)»
le cornes le.
a. Et aussi à Coîogfte, à Maestrkbt.
j, L*clogc est pcsurtant bien binaï, et même iriiiirect (v. é\€ ssÔ«
4, Le nom GmUanms c$t fcîcé de l'ancien poème; on ne voit pas la nà*
son du furnom ; rtrimrquer que Dole est en terre d^Enipire.
y. Ce rèle donné (seulement id) à la m^re, qui cnsmtc se déiok, c« des
ptus malhcyreiix ; dam les versions 1, ^, 4i 5 de ce sousi-groupe, c'csi U
nourrice, vrai ment a4:hc:téc (ou une servante^ une cousin t:), qyi trahit sdcm-
ment.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 489
part de son projet d'épouser Liénor : il déclare alors Tavoir
possédée et donne comme preuve la rose. L'empereur veut que
Guillaume ne sache rien, mais peu après il lui révèle lui-même
ce qu'il a appris. Guillaume est convaincu du déshonneur de
Liénor, car sa mère et lui savaient seuls la particularité de la
rose. Tandis qu'il se désole, un sien neveu ' part pour Dole
afin de châtier Liénor; il arrive comme un furieux et veut la
tuer, mais on l'arrête, et la mère avoue et déplore son indis-
crétion ". Mais Liénor jure de se justifier. Elle part avec deux
chevaliers et le neveu, et arrive à la cour. Elle fait remettre en
secret au sénéchal, comme venant de la châtelaine de Dijon, un
anneau, une agrafe, une aumônière et une ceinture, tous pré-
sents qu'il est prié de porter sous ses vêtements; puis elle
accuse le sénéchal de l'avoir surprise et violentée, et de lui
avoir volé sa ceinture et son aumônière où sont une bague
et une agrafe, qu'elle décrit. Le sénéchal proteste qu'il ne
Ta jamais vue; elle demande qu'on le fouille, et on trouve
sur lui tous les objets réclamés. Il est condamné i\ mourir,
mais les barons ses amis obtiennent une épreuve judiciaire S
dont il sort vainqueur. Alors Liénor dit qu'il a en effet raison
de nier l'avoir jamais vue, et raconte comment il a entendu
parler de la rose. L'empereur embrasse Liénor et la proclame
sa femme; on va avertir Guillaume, qui arrive ; le sénéchal en
est quitte pour un pèlerinage outre-mer, et Tempcreur épouse
Liénor.
Cette fable, surtout ainsi altérée et réduite, se prêtait mal à
fournir l'intrigue de tout un roman; l'auteur est arrivé à en
tirer les six mille vers de rigueur en y intercalant un long et
inutile épisode (le tournoi), et en délayant son récit par des
entretiens qui forment souvent hors-d'œuvre. Il ne pouvait
1. De qui peut-il être le fils? C'est sans doute un cousin Ccf. p. x, n. i).
2. Rien n'est plus maladroit : il suffisait qu'elle vint ;\ la cour raconter
comment elle a\'ait trop parlû et qu*elle établit que le sénéchal n'avait pas
vu sa fille; partout ailleurs, il va de soi que la coupable ne dit rien et n*est
découverte que plus tard.
3. On ne peut pas faire de bataille, parce qu'il y a des preuves palpables;
c*est par faveur qu'on obtient le julicium aqtiat' friiri.i(ic (voy. Du Qinge),
où on devait toujours réussir.
490
G* PARIS
guère avoir recours aux subtilités psychologiques que Chrétien
de Troyes avait mises à la mode ; il ne trouvait pas dans son
sujet les combats de sentiments qui en sont le thème habituel :
Tcmpereur, en etfet, aîme Liénor sans la connaître; Guillaume
est un personnage passif et vide; les sentiments du sénéchal et
de Liénor sont extrêmement simples. L'auteur s'en est tiré
par des conversations quelquefois banales, d'autres fois assez
spirituelles ou dramatiques. Surtout, il est soni d'embarras en
faisant servir son récit de cadre à une peinture élégante de la
vie de son temps : parties de chasse et de danse^ chansons de
carole, d*histoire, de geste, chansons courtoises françaises et
provençales j fête de mai, fêtes nuptiales. Sa versification est
hachée, son style bizarre, heurté, souvent ridicule par le mélange
de la recherche et de la trivialité, parfois gracieux et original.
}. Nouvelle de Sens (Va t. Reg* 1716) ', — Cette nouvelle
nous est fournie par un manuscrit de la fin du xv^ siècle, conte-
nant des nouvelles en prose, mais ou Ton retrouve des traces
de vers. Dans toutes ces nouvelles, les noms sont changés en
noms du pays senonais- Le récit est sec et gauche ; les sujets
seuls sont intéressants, et aussi le fait qu'on a au xv* siècle
écrit des nouvelles en vers, mises ensuite en prose.
Longtemps le roi Claudin avait différé de se marier « par
doubte d*avoir femme mal condicionnee, complexionnee ou
morigénée»; enfin, à son chambellan Enguerrand de Coucy,
qui le presse, il répond qu'il se mariera s'il trouve une jeune
fille sage et belle, fùt-elle pauvre. Comme Enguerrand a quitté
la salle après ce propos du roi, un « bel et bon serviteur » de
Claudin, Jacques de Voisines, fils d*un chevalier de Sens, lui
vante sa sœur, Ysmarie, et lui conseille de Tépouser. Enguer-
rand est chargé par le roi de s'enquérir de la jeune fille ; mais-
persuadé que Jacques de Voisines veut le supplanter dans sa
charge, il se promet de le perdre. Il gagne une cousine et amie
d'Ysmarie, demoiselle Robine, qui, moyennant cinq cents
pièces d*or, lui fera voir Ysmarie, nue. Le lendemain, au matin,
Robine Tintroduit dans la garde-robe de la jeune fille et le
cache sous des bardes ; puis, venue dans la chambre où dort
I. Vo}\ E. Ljingloîs, 4aEis tes Noii£esei fximtts tks mofiuimtSt t« KXXIH*
t* série, p. 228.
LE CYCLE DE LA <t GAGEURE i> 49 1
Ysmarie, elle la réveille en lui disant : <f Ixvez-vous et faites-
moi voir sur quelle jambe est votre signe, car j'ai gagé âce pro-
pos un chapon, que nous mangerons à midi avec Mademoi-
selle Agathe Chanteprime, notre cousine, t Ysmarie se lève et
Robinela conduit dans la garde-robe où. tandis qu'elle feint de
rexaminer, Enguerrand voit son corps à loisir. De retour auprès
du roi, il lui dit que, moyennant mille pièces d'or, il a dormi
avec ta demoiselle de Voisines; quant à la beauté^ telle et telle
lui sont bien supérieures. Comme preuves de son succès, U
décrit son corps et le signe qu'elle a sur la jambe. Le roi rap-
porte Taventure à Jacques de Voisines et le chasse de son
royaume. Jacques va trouver sa sœur, l'accable Je son mépris et
parij sous le nom de Liénart, on ne sait pour quels pays*
Ysmarie, d*abord abattue, reprend courage : accompagnée de
deux de ses parents, elle se présente à la cour du roi Qaudin,
et accuse Enguerrand de Tavotr prise par force, Enguerrand ne
peut prouver le contraire qu'en avouant tout. Le roi veut le
punir, mais Ysmarie obtient sa grâce. Le roi épouse la jeune
fille, tandis qu'Enguerrand part à la recherche de Jacques : après
bien des périls courus, il le retrouve enfin dansTîle de Rhodes;
il le ramène à la cour, où Claudin le comble d* honneurs.
4. EufemiUj par Lopede Rueda '. — Nous ne parlons ici que
de ce qui* dans cette pièce singulière, se rapporte à notre sujet.
Leonardo quitte sa sœur Eufemia, malgré elle, pour s'avancer
dans le monde. Il entre au ser\4ce d*un prince appelé Valiano.
On voit par une scène qu'il a dû vanter sa sœur à Valiano, qui
songe à Tépouser, Puis, un counisan, Pablo^ qu*on ne fait
qu entrevoir, raconte à Valiano qu'il a dormi quatre nuits avec
Eufemia, qui, l'ayant vu passer dans la rue. Ta fait appeler par
SSL servante Crîstina : elle lui a donné un cheveu (ou des che-
veux) qui croit sur un signe qu'elle porte à l'épaule gauche. Il
I. La Comèlk espagnole d^ Lopt dt Rueda^ tr.id. de A. Germon d de La-
vigne (Paris, Michaud, 188;). -- Lopede Rueda» acteur et auteur, vers 1550,
a surtout écrit des paios fort vjvatîts et curieux. I! a traité sa piècç de même :
le gracmo, la vieille» le bohème, le f^rifaron poltron (Vaîlejo, laquais), la
bohémienne y occupent beaucoup plus de place que le? personnages prind*
patin. L'aciion elle-même est surtout en discours et r^îcits ou en épisodes
inutiles. On regarde Lopede Rueda comme imitant ta comédie italicmie : ici
au moins, je ne vois pas bien enqitoi.
49^ G, PARIS
faut donc sous-entendre h jalousie, le voviige et la ruse de
Pabio, que Cristiua raconte plus tard. Valiano déclare que
Leonardora odieusement trompé et qu'il le fera mettre à mon
(sans explication ni confrontation)* Eufenria est avertie par le
valet de son frère (k gradosû Mekhior)^ qui lui remet une lettre
insultante de Leonardo. Cristîna avoue qu'elle a donné le che-
veu (ou les cheveux) à un étranger- Le jour du supplice de
Leonardo, Eufemia accuse Pablo ' de lui avoir volé un riche
bijou, une nuit qu'elle Tavait reçu dans son lit. Il dit et répète
qu*il ne Ta jamais vue, Elle veut qu'il prête serment, ce qu'il
fait. Elle lui reproche sa calomnie ; mais il maintient qu*il a
dormi avec la sœur de Leonardo; alors elle se nomme et
Cristina raconte toute l'aventure* Valiano fait décapiter Pablo
et délivrer Leonardo» et il épouse Eufemia.
B ' b : Gageure^ accumtiùn du vol d'un objet formant paire .
Le groupe B ' b diffère du précédent, comme il a été dit, en
ce qu'il a conservé la gageure de A, et en ce que la sœur, présen-
tant au roi un objet dépareillé (gant, pantoufle, botte), prétend
que le traître lui a volé Tobjet formant paire avec celui-là. Cette
in%'ention inutile n*a du être faite qu'une fois, et suffit pour
rattacher à une même provenance tous les récits qui forment ce
groupe. Ils sont d'ailleurs tous italiens, et le groupe se compose
d*unc nouvelle en prose du xv* siècle, d'une oous^elle en vers
du xvur, et de contes recueillis de nos jours (dont un en Alle-
magne, mais provenant d'Italie).
I . Feliciano Antiquario, /wj/û Victoria K — Felictano Antiqua-
rio nous apprend qu'il a composé sa nouvelle en 1474» à la
campagne. Il Ta dédiée à Francesca, femme de Gregorio Lava-
gnola. Elle est écrite dans le style de la Renaissance, avec
beaucoup d'allusions et de mythologie, d*ailleurs en beau style
et non sans talent. Le titre en est à la fois réel (t'héroïne s*ap-
1, On ne voit nulle part comment cUe sait que le traître est Fâblo.
2. CaîûtcfQ dti ncvMrri UttUam in ffrosa taa^iUi e pûsseJuH à& Giùv. I
Papanîi (2 voL» Liv^oumc, ïSji), t. Il, Appendice, p. vu. Sur k niaouscnt^
(sans doate autographe) et Tau leur, voy. ibid.^ p. v*
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 493
pelant Victoria) et allusif. — Sous le règne d'Aduardo II à
Paris, le comte Ubaldo, qui a de sa femme un fils et une fille,
envoie son fils, Drusillo, à Paris, où il a un grand succès et
devient Tami intime de Rodolpho, fils du roi. Ubaldo se dit
que Rodolpho pourrait bien épouser sa fille Victoria, et lui fait
donner une éducation excellente par un maître âgé de quatre-
vingt-six ans, dans un château en pleine campagne, où nul ne la
voit, sauf le vieux maître et ses don:^elïe. Le roi meurt et
Rodolpho lui succède. Son sénéchal Galvano est jaloux de Dru-
sillo et médit de lui à la cour. Après un tournoi, â un grand
repas, chacun se vante; seul, Drusillo se tait ; interpellé, il dit :
« Dico potermi gloriare di havere in qtiesto monda per sorella la più
virtuosa giovene e la più bella che habi in si tuio il reamc di Fran-
cia^ t più casla che Diana fiel cielo, e ne Parte di Minerva perita
quanto Aragne, e ne le littere doctissima, » Galvano réplique que
Drusillo n'est pas retourné dans son pays depuis cinq ans, et
qu'il sait, lui Galvano, que cette jeune fille peut bien être bella
e virtuosa^ mais non casta e onesta : il se fait fort de le prou-
ver. Le roi le fait taire, mais dans le jour Galvano dit à plu-
sieurs qu'il l'a carnalmente conosciuta, Drusillo se retire et tombe
même malade (il n'y a pas de gageure proprement dite). —
Galvano va s'établir chez un hôte, près du château de Victoria,
et se fait passer pour un marchand. Il rencontre une vieille,
nommée Giletta, qui cueille des roses pour Vaqua odorifera de
Victoria. Il se fait raconter inolte secrète cose, et lui fait promettre
qu'elle lui donnera de cette eau. Le lendemain, il prétend que
son faucon, qu'il avait la veille et qu'il a laissé à l'hôtellerie, a
volé dans la tour du château ; il demande à la vieille de lui
donner ses habits, grâce auxquels il pourra s'introduire dans la
tour et reprendre l'oiseau. Il entre, jette du mur ses habits à la
vieille, qui le rejoint. Elle, le cache au fond d'une credentia
antique dans une grande salle, et s'ouvre à une des don:(elley
Aquillina, qui dormait souvent .wcc Victoria. Au matin, les
deux femmes tirent Galvano de sa cachette; il dit qu'il désespère
de retrouver son faucon, mais parle de Victoria, et se fait décrire
minutieusement par Aquillina ' la chambre, les images des
I. Dapoi cJjt fton potia atuiarscne a là (p. xviij). Alors, à quoi bon toute
cette machination, et la crédence ?
494
G. FAHIS
saints, la stature et les traits de Victoria, ainsi que ses vête-
ments; Aquillina lui dit essere sùpm la popa sinistra di madonna
Victoria due picoli segni de ntgro colûn\ corne gramlH de migiio^
cumum pila rossoper ciascnno. Revenu à Parisj Galvano traite
devant Drusillo sa sœur de nuretrice; furieux, Dmsiilo tire son
poignard; le roi les sépare, mais Galvano dit qu'il veut être
décapité s'il ne prouve pas son dire ; Drusillo en dît autant :
on leur donne dix jours de délai. — Devant les juges, Gaivano
affirme qu'il a été introduit dans le château par Giletta et
Aquillina, décrit Fappartement, les habits et le corps de Vic-
toria; Drusillo se déclare vaincu, et te roi, bien qua regret,
déclare qu'il mourra \ — Heureusement des marchands aver-
tissent Victoria; elle vient à Paris le jour du supplice, munie
d'utiû MUssitm gtmnto [d'oral ^ ^^ ^^^^> lawrato di sua manOj
côperîû di molît gioie^ sùpra il quale tra histariata la libcraiime di
Susanna faUamente Oicmata di aduUerio, la valuta dil quale cin-
qiuanîo scudi d'are era txfinmla. Elle arrête le roi % et lui dit
que le sénéchal Galvano a obtenu ses faveurs, ne lui a rien
donné, et lui a volé le gant pareil à celui-là. Galvano appelé
dit che mai più ta vide^ ne sa chi essa sia, et, comme elle insiste,
il le jure avec serment. Enfin, elle dit ; t' /o son.*, chiamata
per mnte Vicîùria^., sorella dil sfûrtunaîo Drusillo, il qtmk per tue
inique opère mandi a la morte. Galvano soutient que cette femme
n'est pas Victoria, qu'il a possédée. Elle demande quinze jours
pour faire la preuve, et Drusillo, après avoir embrassé Victo-
ria, est remis en prison. Des témoins démontrent l'identité de
Victoria, et Galvano, mis à la torture, avoue. On lui coupe la
langue, les mains et la tête ; à Aquillina et à Giletta, le nez
et les oreilles; Drusillo est délivré à la joie générale; Victoria,
après quelques jours passés in compagna délia regina *, rentre
chez elle dans una dtwata mrrela,
1. Baucchi, Li Piamlla -** — Le frère, Lisauro, qui ne la cour
1* U est surprenant que Drusillo n'en pro^tc pa.*t pour lUer chez sa
Eti lui rappcUnt k fameux trait de Trajan.
m éuit dôrtc manè? On ne nous Fa pas dit, et, d*aprés le passage
f»cîit» il scniWc bien çjall * dû époiiscr Vieioria.
i (ni^ à Phc 174Î* t iSoi). Rmidta di ntmUf M P. AUm-
LE CYCLE DE LA ft GAGEURE * 495
pour aller à un tournoi» où il vainc un duc, Francatrippe, qui,
par dcpit de sa défaite, devient son ennemi. Comme, en buvant,
on médit des femmes, Lisauro vante sa sœur; le duc se fait
fort de la séduire ; chacun gage sa t€te, le roi garantissant le
pari. Le duc arrive au château, ne réusssit pas à voir Fiordeligi,
mais fait causer la nourrice : sans la corrompre, comme ailleurs,
mais en feignant de douter de la beauté de la jeune fille, il
apprend que Fiordeligi a un neo turissimo entre les seins, un
autre sur le ventre'* — Il revient^ Lisauro est confondu et
condamné â mort* Fiordeligi est avertie par la fée Morgaiie %
qui lut donne une pantoufle d*or ornée de pierreries. Elle va
à la cour et accuse le duc, ayant eu ses faveurs, de lui avoir
volé Tautre pantoufle. Le duc jure qu*il ne Ta jamais vue; elle
se nomme. Le roi lait décapiter le duc et rend ses honneurs à
Lisauro (pas de mariage),
3, Contes populaires, a) L, Gonzenbachj St\i}ianische Mâr-
chen^ 1870, t. I, n^ 7, J>j deux enfants du prince de Monulmne.
— Le jeune prince, qui a été élevé avec sa sœur dans une touri
arrive dans une ville, est aimé du roi, jalousé d'un ministre-
G>mme il vante sa sœur, le ministre gage de la séduire : le
perdant sera pendu. Le ministre ne peut même savoir où elle
est ; mais une ancienne nourrice de la jeune fille parvient à
pénétrer auprès d'elle, rhabille, et voit sur son épaule un signe
avec trois che%-euK d*or tressés avec un fil ^ Elle lui prend
son anneau. Le frère s'avoue vaincu, et demande seulement
huit jours de répit. Il envoie un serviteur tuer sa sœur^ : celle-
ci comprend ce qui est arrivé. Elle prend tous ses joyaux, part
avec le serviteur (cf Gmllaume de Doit) \ et se fait faire une
sandale magnifique. Le jour du supplice, elte arrête la voilure
du roi, et accuse le ministre. Celui-ci est pendu, et le roi
épouse la jeune fille»
K En outre, il dérobe une lettre de Fiordeligi, dont il contrefetit récriture
I un billet obscène.
a* Morgjne protège, on ne sait pourquoi, le frère et la sœur, ei a déjà
dônnè des il mie* au frère,
5. tl esi clair qu'elle devait les couper,
4. Il Jevait rapporter un flacon de son sang \ Il donne au prince du sang de
poules.
% ■ Elle est conseillée par le chapelain q«i a élevé les deux enfants.
49^ û. PAftts
i) G- Pitré, Fmbt, mvdktfmccmm popsHan smitMi^ ^àkxuMtT
i87>, I* D, n* txxv« La Siimh. — Gioseppe, fils de iiiir-
chaod, est secréttire do roi de Ponugal, et se ait remirquer
par sa belle écriture (cf. EË^tmia) ; le roi d'Espigtse le donwde
à SX a>ar. Il prend congé de sa sœur et emporte son portrait.
Le àracckre du roi dTspagoe, (alonx de Gmseppet pêsie asi roi
dece portiaiE que hiîse le jeone homme. Le roi voit le portrait,
ladmire» et Giiiseppe loi dit que cGst limage de sa sœur» dont
3 loue ta beauté et la chastieté ; mais le hra£dere affinne qall a
criitena s& faveurs. Dètnetiti, et gageure : le perdant sera déca-
pité* Le brûiciere vîeoi à Palerme (x^), et appresd qœ nul
n'entre chez la sœur de Gîoseppe. H rencontre uoe vidUe qui
lui promet de Taider. Elle se fait reocvoîr par une noît d'otage,
découvre la jeune fille pendant son sommeil, et voit qu'elle a
smprû la spmiiA étitta tri pila cornu si fuiiiri tri j^a ^ora; die
les coupe avec ses ciseam. Le rot donne à Gtuseppe sis mob
pour fitstiârr sa sœur, et le met en pcison* Giuseppe enroîe qm
lettre À la jeune fille : elk vend tout son avoir, et &si bine une
botte en or incrustée de piorerics. Elle accuse le hrmàin de
ravoir goimtA et de lut avoir volé 1 autre botte. H proti^te qui]
ne 11 connaît pas. H est pendu^ et le roi ^ocse k jeune fille.
c) A. de Gubemads, L£ Nmjdiim ii Smia SÈ^mm ÇTurin,
1869), n* X. // gumUa^mo^ — D s'agit de deux orphelins, fils et
fiOe de rot. La sœur tùptfjt soo frère à voir te monde. Il vai la
vAkét Porto^» devient sansèmamt du roi. Le iracâin (écuy«^)
rjoaase d^tdoJâtric, a cause d'un portrait qu'3 hat^. Il dit qoe
i£*esr le portrait de sa sœur» que pefsoone n'a jamaîs vue* Le
hrmçkn affirme qull a mangé ti œmchi a^cc elle. Le fr^iredentiiidc
b pirave^ et ei^age a tto ; le délai est de qattce îoiiii. Le
èracden va à k tour ou vit k |cune fiOe, ne peut y pàiécrer;
One vieille lui apprend qu'elle a un mo i dnàite, des boudes
d*or et un fennaîl de grenat : il l^t kire des bijoux pareils, et les
rapport comme preuves. Le frère, condamne, obtient quatre
foQfs de répit. D va trouver sa sceur, l'accable de reproches,
revient à k cour. Bk se kit ktre un gant d'or, suit soo firère,
r*r !tr )ourdu supplice, arrétaitt k mt» accuse k hraoÛTr de lui
: vole le gant pareil (après avoir obtenu ses kvesis ?). D k
om ^; abfs^ eUe montre qu^elk a été calomniée; k naitie est
I
{
1. Mtfele
tieên 4B^dédacBer««ciri
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 497
penJu, et le rai addpte les deux orphelins (pas de mariage).
d) V. Imbriani, La NiWêlîaja fiomttina (Ltvourne, 1877),
n* XXXII, Im fwvella dd signor Gimjannidi ComtantitiopoU. — (Pré-
histoire assez absurde et très longue.) Giuseppe envieux de
Giovanni se vante sponLinémentj au café, de passer dix minutes
avec la femme que Giovanni vient d'épouser'. Il engage sa
tète : le mari accepte, et on en dresse acte devant la police.
Giûvatini, suivant les condiiiuns de k gageure, quitte la ville,
Giuseppe erre en vain devant la maison toujours close de la
jeune femme. Une vieille lui offre son aide: elle se fait admettre,
en se disant soeur du mari ; elle dessine la chambre, y prend un
Joyau prédeux, et coupe une touffe de cheveux sur la nuque
de la femme de Giovanni (pas de signe). Giuseppe porte le
dessin, le joyau et les cheveux à la police, Giovanni ^ d son
retour, est arrêté, et va mourir. Sa femme l'apprend, fait faire
une pantoufle magnifique, et accuse devant les juges Giuseppe
de lui avoir volé l'autre (nt viol, ni faveurs), Giuseppe dit qu'il
ne Ta jamais vue. Elle se fait connaître; son mart est délivré, et
Giuseppe décapité, ainsi que la vieille.
e) J. B. Andrews, Cûnks menîonaîs (Romania^ t* XI, p. 415)-
— (Préhistoire.) Un mari part pour un voyage^ Tun de ses amis
parie contre lui une somme d'argent qu*il séduira sa femme. Il
apprend d'une femme de chambre qu'elle a une fraise sur
Tépaule. Le mari, de retour, paie le prix du pari, et accuse sa
femme en justice, A son tour, elle cite devant le juge son pré-
tendu séducteur, en lui reprochant de lui avoir volé une pan-
toufle. Il jure ne Tavoir jamais vue. Elle raconte tout^ et il est
condamné à la prison*
y) G, Pitre, ouv. dtéj t. Il, n^LXXiiL £n/aWrt?irf3. — (Préhistoire:
un père est cause que sa fille est exposée ■ un roi la recueille et
réponse,) A l'étranger ce roi gage contre un cavalieri que sa
femme Ervabianca lui restera fidèle. Le cavaïkri va à Palerme,
se promène en vain devant la maison; une vieille à qui il se
confie se fait passer pour une parente de la reine, obtient d*être
logée chez elle, voit son corps et un MHssinm neu sur Tépaule
1. Seuls dans celte série (cf. 69» le corne d'Imbrianî ut b suivant mettent
en seine deux époux.
nem^niM, XXXil
P
498 G« wàâa
coupe avec des àsi^az ti piliddm qot j soot, m Imi
Ma gakoi» qui \m porte au raL Cdai-d vient à Pakmx^'
enmène m fenuxie ea vcniare sur k Mumi PUUrimmm et la laisse
li^ pojgnarffe. Ud mèdcds la leaieille et la sc%iic; eo
Tabseoce du médecin, um esdive Ali, qui a été ndbaté par
Ervainafica, tue une ftlletie coucbée avec elle; à scm rèreil,
ErvaUagica s'enitiit. Le méderin^ revenu^ k poursuit avec,
rescbre ; îk arrireot dans xm palak d^eft, oà sont aussi l^^
père et le mari repentants^ qui cberchent Ervabianca. Une
lampe magique raconte devant tn% toute I*htsiotre de la fçttne
femme, qui e^ endormie dans le même palais. RéconcilUdon
générale ; Tescbve est écartelé.
if) G. Fînamore^ Tradi^om pofoUri ahu^est (Landano,
i88a), I, n' x%xm (très alceté).
A) K. Si m rock, Dmtscbt Mirchm (Stuttgan, 18^4), n" jï- —
La sœur engage le frère à aller à la cour ; Il un ministre, qui
envie sa &v eur, lui dît quïl va dans son pays ei se Eût fort de
séduire sa sœur. Ib g^igent leurs biens et leur vie. Le ministre
arrive à la ville où demeure la jeune fille^ mats ne parvient ni
à entrer chez elle, ni a corrompre ses servitcuis. U voit chez un
orfèvre une bague d'elle en réparation, et s'en &if faire unei
pareille (cf. le conte de Gubcroatis, c); pub il apprend d*ane
sage-femme que b jeune fille a une violette entre les setns \
Muni de ce» preuves, il convainc les juges du pari. Le frère
demande un répit^ va chez lut^ et bisse à sa sœur, sans b voir^
une lettre où il Taccuse de sa mort. Elle fait taire avec tous j
loyaux un gant magnifique, arrive, et, dans le conège du
supplice, que mène le ministre, coupe b voiture du roi- Imer-
pellce^ elle accuse le ministre de lui avoir volé un gant (pas de
viol, ni défaveurs)* Il dit ne Tavoir jamais vue ; elle se nomme ;
il est brûlé en place du frùrt% auquel on rend ses hoaneurs
(pas de mariage).
I . tt cftipirne un moyen bien pea, vrabembUblc . il prétenil dicfcher un
rcfn^dc pour an signe que sj allé a au raenton i h vie U le Itu parle éc ces
lOTM 4e ligules» et àécm A cette occasion celui de ïa jeune fille.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE »
499
B* : l'hèroïke est la fe^îme du parieur;
ELLE s'habille EN HOMME; ACCUSATION DE V[OL-
Noos abordons des groupes successifs qui ont pour trait
carictérisiîque que la femme s habille en homme; dans h
plupart des versions, elle découvre la vérité par un autre
moyen que dans B* ; mais il existe une version intermédiaire,
B% où elle l'accuse encore de lui avoir fait violence*
Martuscrii de Tours 468, î° 165 v". — Une dame était
renommée pour sa grande valeur* Et comme, devant le roi, les
chevaliers médisaient des femmes (cf, Batacchi, R'hi), on en
vient à parler d'elle. Un des assistants dit : <c Je gagerai ma terre
que d'ici à quinze jours je ferai d'elle ce que je voudrai, et je
prouverai mon succès par de bons témoignages, îï Le mari le
démentit, et gagea aussi sa terre. L*autre, allant au château ^ ne
put entrer, mais il séduisit par fraude une demoiselle de la
dame, qui vola et lui remit un anneau que le mari avait
donné à sa femme; en outre, elle lui révéla que la dame avait
un seing à la cuisse. Et revenant, il dît, en donnant ces indices,
qu'il avait gagné. Le mari l'entendant, confus et trop crédule,
se retira, et ayant conduit sa femme à son tnanoir, la jeta à
Peau. Elle se sauva, transforma sa robe en vêtement d*homme,
arriva à une abbaye de moines, s'y fit coovers, et^se conduisant
de façon édifiante, fut donnée au roi par Tabbé comme aumô-
nier (au sens étymologique), office qu'elle remplit volontiers et
très bien* Un jour, distribuant Taumône, elle vit entre les
pauvres son mari, qui s'était enfui ; elle le prît à part, lui dit
de bonnes paroles et lui demanda son histoire. Celui-ci la lui
raconta, et lui confia que, ce qui lui faisait le plus de peine, c'était
de s'être conduit si cruellement envers sa compagne. Alors elle
lui raconta aussi ce qui lui était arrivé. Puis, ayant obtenu du
roi b permission de retourner dans son pays, et ayant trouvé
[pour son mari?] un cheval et des armes, elle revint [à la cour
du premier roi] en convenable habit de femme et appela ce
chevalier de trahison, l'accusant de lui avoir fait violence. Il nia
par serment l'avoir jamais vue. Alors, s*adressant au roi :
<A Faites-moi donc justice, » dit-elle, (t puisqu'il m'a calomniée et
que par son mensonge mon mari a perdu sa terre et j*ai été
500 G, PARIS
réduire à TexiL » Le traître fut condamné à être pendu, h terr^
du mari lui fut rendue [avec œlle du traître], et elle retourna
avec lui dans leur maison.
B^ : L* HÉROÏNE EST LA FEMAIE DU PARIEUR;
ELLE s'habille EN HOMME; AVEU SPONTANÉ DU TRAÎTRE.
Dans tous les récits qui suivent, il ne s*agic plus d'accusatîan
fausse portée contre le traître : c'est lui-même qui par bravade
avoue son crime, en s*en vantant» devant la femme déguisée en
homme; dans tous, le mari a donné ordre de tuer sa femme, ce
qui n a pas été exécuté; dans tous, il semble bien que le traître
arrive à voir et à voler la femme en se faisant porter chez elle
dans un cotfre * ; dans tous, elle s'est habillée en homme, elle
arrive à une haute condition sociale, et s'en sert pour faire
éclater la vérité.
Ce groupe se divise en deux sous-groupes, dont le second^
plus moderue, est caractérisé par le fait que la femme prend le
mari à son service et le ramène dans sa maison, devenue celle
du traîtrej où celui-ci raconte l'histoire, tandis que dans le
premier sous-groupe la scène a lieu à la cour d'un souverain
étranger. Ce premier sous-groupe est intéressant en ce qu'il
contient les deux œuvres les plus célèbres du cycle, la nouvelle
de Boccace et la tragédie de Shakspeare.
B 5 a ; Avm spontané du traître à la cour d'un roi étranger.
Cette forme se trouve d'abord dans deux nouvelles ita-
liennes, Tune anonyme, Tautre de Boccace {Décanter., Il, 9)-
La nouvelle anonyme, imprimée d'abord par Lami diaprés un
manuscrit du xiv'^ siècle % est donnée par lui comme roriginal
K Toutefois ce trait manque daos deux versions (conte hongrois, conte
norvégien) du groiipe B^b, et on peut croire que, daos B^ba (Wolff), il provient
de Bîâ. On le reirouve encore dans B^bj et B^bé (conte roumain, conte
des Zigmner de b Boukhovine), où peut-être aussi il est interpolé*
2. Dans les Novtllt hUirarif puhbUcaU in firenie, t. XVIl (1756). Elle a iié
réimprimée dans V Appendice ait iîlmîmiioue siôrica dd Boccûccm uriHû d/t M\
Manni (Milan, ta 20), et dans Dut nnvelk anti£k€ mnUrwri aï DecmttirûHi dit
Boccacch (Gènes, 18 59, 25 exemplaires).
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 5OI
que Boccace aurait iravestito; c'est aussi l'opinion de Zambrini \
tandis que M. Landau est porté à croire que c'est l'anonyme
quia imité Boccace. Plus réa'mmcnt, M. Ohle, Tauteur du
travail de beaucoup le plus approfondi qu'on ait consacré à
notre cycle (mais à une partie seulement')» ^ cherché à
démontrerque Boccace avait travaillé uniquement sur la nouvelle
anonyme. Mais son raisonnement a une base fort contestable, à
savoir que le récit italien aurait pour source les romans fran-
çais (Comte de Poitiers, Violette), qui appartiennent en réalité à
un autre groupe du cycle; en outre, il ne signale entre les
deux nouvelles qu'une seule . différence (qui indiquerait la
priorité de l'anonyme), et il en néglige d'autres, au moins
aussi importantes; enfin il omet le livret allemand >. Ce livret,
imprimé pour la première fois, avant 1489, \ Nuremberg, doit
être comparé aux deux nouvelles, auxquelles il ressemble de
fort près^. Il &ut comparer ces trois versions, A (nouvelle
anonyme)» B (Boccaa*), I) (livret allemand), en les supposant
indépendantes et en cherchant s'il y a entre telle et telle un
rapport de dépendance. Pour le faire, nous diviserons le récit
en épisodes successifs.
L Le Pari. — Il s'agit de marchands italiens venus à Paris dans
ABD\ ils font la gageure après une fête {A), après un joyeux
repas (BD). — Les parieurs sont : un i^imnine di (Jenova et
therico d'Alessandria (A), — Hernabô I-omcllin da (îenova et
Ambrogiuolo da Piacen/a (H), Ambrosius von (}enay et
Johann von Florcntz (/J). - Dans Hl), ils commencent par
dire que leurs femmes se donnent du bon temps \ la maison et
qu'ils auraient tort de n'en pas faire autant. - Li gageure est
de 10.000 florins d'or (/f), de i .(K)o exposés par le galant contre
1. Opère volgari a stampa, 4" éd. flifilo^nc, 1H84), col. 702.
2. Shakespeare s Cymbrline utid seine nwuimuhn Vorhtùffr riîcrlin, 1890).
). Il est vrai que rautetir ne prétciul étuJirr ({iic* les antécédents romam de
Cymbeline; mais — outre que cette rrMrii lion m vii est fAcheuse — le livret
flllenund peut 6tre considéré connue italien et forme vu tous cas un grou(>e
avec Boccace et l'anonyme .
4. Je dois la communication de ce livre rare rr)rné de nombreuses et très
amusantes figures) A Tobligeance de la Hililiothèque royale de Berlin. Il a été
traduit en néerlandais, en danois Tet de là en suédois) et en anglais.
502 G. PARÎS
5 ,000 exposés par le mari (SD), Le délai est de trois mois (AÏÏ)^
de quatre semaines (D); le gabnc s'engage dans AB à apporter
des signes convaincants,
IL Le stratagème. — Dans ABD^ le galant se fait porter dans
un coffre chez b femme^ voit le signe qu'elle a sur le corps, et
prend des joyaux dans sa chambre, — Dansai, le galant recourt
tout de suite à la vieille; dans B, il entend dire tant de bien
de la dame qu'il se convainc de la folie de son entreprise et
qu'il cherche une ruse pour se donner l'air d'avoir réussi; dans
I), il la salue sur le chemin qui la mène a Téglise \ et elle lui
répond mit ^uihm mit soïchr guîcr gcpcrd qu*il se sent perdu;
A est évidemment tronqué; B et D sont bien abrégés et]
peuvent être indépendants. — Il s'adresse ad una femmitm che
facn^a senngio aile donne et demeurait dans ta rue, lui promet
cinq cents florins; celle-ci, l'assurant qu*il n'a pas de chances de
séduire la dame, lui promet de songer ;i une ruse (J); il
s'accointe d'une pauvre femme che molîo nella casa usava e a cm
i^leva gran bem^ non la poîindo ad alîro indurre^ con denari la Cûr-
ruppi ÇB); il fait d'abord faire la caisse, puis, se disant qu'une
vieille réussit où le diable échoue, remarque au marché une
vieille fripière, la gagne en lui faisant faire un très bon marché,
puis Tin vite à souper, lui parle de la dame et lui propose de
Tatder moyennant 300 florins (/7). Ici encore les différences
peuvent être de l'invention de chacun des conteurs; la version
â\4 paraît la meilleure. — La complice demande à la dame de
lui garder la caisse trois jours pendant qu'elle va à un pardon»
à trente mille de Gcnes, où elle priera pour son mari; la dame
consent volontiers : au bout de trois jours, la vieille revient en
effet du pardon et reprend sa caisse (A); dans 5, elle feit
simplement porter la caisse dans la chambre de la dame, e
quivij conte sein alcuna parie andar volessi^ la bwnafetnmina la
raccomandè pet ulcun dï^ — et de même, vegnente il ter^o dl^ ...
la huma femmina tornè per la cassa sua ; dans £), la vieille dît
qu'elle veut aller à Saint- Jacques, et la dame lui donne un
florin qu'elle offrira au saint pour son mari ; après trois jours,
elle vient dire qu'elle est malade et renonce au pèlerinage. H
semble bien que AD vont ensemble contre B. — Dans BD, le
r. Cf. cî*de«sous, B*bIIlï,
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » SO3
lant reste trois nuits dans la chambre, sans que cela serve à
îcn. Dans A^ il la découvre, la voit nue, evidc che soiîo la poppa
ritta aveva un mo^ après quoi il éteint la lumière (la dame se
trouve découverte et s*étonne, mais sans rien soupçonner); pen-
dant le jour, elle sort, fermant la porte; alors, il prend, dans
un for:iifre^ une guarnacba^ un anneau, une ceinture et une
bourse, puis referme \tjQr:;ieri; le jour suivant la vieille revient
(de trente milles? c'est bien vire). Dans B, il sort k première
nuit, allume une luniÊêre, voit la chambre, les peintures, etc,
(cf, les versions des autres groupes), la découvre, et voit qu'elle
avait um {segnale] soîfo la stnisîra poppa ^ ciù era un neo^ dinîùrm
âlqualeeranoalqnanîipehi^i biondi conte aro * ; puis, se promenant
par la chambre à loisir, il prend une bourse, une gttarnacha^ un
anneau et une ceinture : e in qimîa mankra fea dm mtti. Dans
D, il se lève la première nuit, voit ouvert le coffre où la dame
serre ses bijoux, prend une bourse de perles, une ceinture d*or
et un anneau : la lime Téclairant et comme il faisait chaud, la
dame avait mis hors du Ht son bras, où elle avait dn schwart^e
DoUn luerîiel der si si^r scht^mî; on ne parle pas des deux autres
nuits : la vieille reprend le coffre le troisième jour, B et D
semblent primitifs, à cause de rinutilité môme de ces incidents ;
A a pu arranger. — Dans B et £>, la dame ne couche pas seule,
mais avec un petite fille (B), ou avec la servante (D) ^.
in. La victoire du traître. — ^ : Le galant essaie d'abord de
persuader au mari de ne pas ébruiter Taffaire, mais veut que
tous les témoin s du pari soient convoqués. Alors, il dit comment
ta chambre est peinte; il montre les objets, mais le mari dit
qu'il peut les avoir achetés, et avoir trouvé Tanneau que la
dame aura perdu; mais il parle du nm : le mari s'avoue vaincu
et paie. — B ; même récit; Bernabo dit qu'Ambrogiuolo peut
avoir appris les êtres de la maison par les serviteurs et s*étre
procuré les joyaux; mais il se rend lorsque le galant décrit le
neû et les sii peîw^^i d'oro. — /) : le galant prend le mari à part
(cf- ^)et lui montre les joyaux; il demande d^autres signes, il
parle de la Daten wertiel; Johann se pâme; Ambrosius lui dit :
ï. Cf. B'a4, B^bi, B'bja,*.
2. Dans B 1& galant se demande s'il ne profitera pas dç Toccasion ; maïs il
n'ose pas.
s 04 G. PARIS
«£ Sois mon homme! « Il paie et se promet de tuer sz femme
li semble bien qu'il y ait un lien direct eiitre A et D,
rV< La vmgtancedu mari. — A : Le mari revient à Gènes» voit
sa femme sans lui parler de rien, et lui dit d'aller à [eur maison
de campagne préparer un repas pour des hôtes qiiHI attend; il
la rejoint sur la route, et, dans un endroit isolé, lui reproche sa
trahison ; elle se défend, mais quand il lui parle du nro qu'a
décrit te séducteur, elle ne peut que dire qu'elle s\y comprend
rien. Le mari lui dit de suivre un serviteur, auquel il a secrè-
tement ordonné de la conduire i la mer et de t'y jeter après lui
avoir ouvert les veines; mais quand le serviteur révèle à la dame
Tordre qu'il a reçu, elle proteste de son innocence et obtient
de lui qu'il Tabandonne sur un rivage désert, d*oii elle s'éloi-
gnera pour toujours, et qu'il prenne ses vêtements, lui donnant
les siens en échange; il rapporte au mari les vêtements de la
dame, comme preuve qu'il a exécuté les ordres reçus \ —
B : Bernabo revient dans son pays, mais s^arrête dans une
maison de campagne qu'il a près de Gênes, et envoie un servi-
teur chercher sa femme, lui ordonnant dd la tuer en chemin,
Quand le serviteur annonce à la dame Tordre qu'il a reçu (il
ne sait pas pourquoi, mais son maître loi a dit qu'il serait
pendu s'il n'obéissait pas), elle implore sa pitié, et obtient de
lui qu'il lui donne son farsetlo et son cappucm^ et qu*il prenne
ses vêtements à elle en témoignage du meurtre ; elle promet de
disparaître. — D ; comme S; le mari dit au serviteur de lui
rapporter les cheveux et la langue de sa femme, le menaçant
de le tuer, s'il n'obéit pas. La femme le suit avec un agneau
qu'elle a élevé; elle lui dit : a Tuons l'agneau; tu tremperas
ma robe dans son sang, tu prendras sa langue et ma tresse »»,
et elle promet de 4isparaître, Il y consent, et porte les
signes au mari, qui reste fort triste. — Nous avons là deux
versions bien distinctes : A d'un côté, BD de l'autre ; on peut
toujours croire que D vient de B, avec changement et addi-
tions \
t. M, Ohle remarque (p* 4S-49) qu*on a là une explication towte nmuretle
du travestissement de lu femme. Nous reviendrons sur ce poim : notons
seulement qu^on scdcmindece que ïe serviteur devient sans habits.
2* L*agneau (chevreau, lièvre, ctc) est un lieu commun d'Iustoires ana-
logues.
LE CYCLE DE LA
GAGEURE
V. Les m^entures dt la femme. — vf : Un vaisseau de cwsaîi
arrive vers le rivage ; le ùipitaine interroge la femme habillée
en homme et la recueille ; elle gagpne son amitié par ses talents
de secrétaire et de serviteur. Le vent pousse le navire in Sarra-
cinia a uno porto d'unû terra, dme ahifava il grande Cûne ; on les
prend, mais, comme c'est un jour de grande fête, on ne les tue
pas; le Can invite même le capitaine à souper, et il est si
charmé de la bonne grâce du jeune page qui sert^ qu*il le
garde, au grand chagrin du GVpitaine, qui Ta donné pour son
fils. Le Can le fait peu après maliscako dune grande ville'.
— B : La femme se procure d'une vieille, dans une vilktta vicina^
ce dont elle a besoin (?), raccourcit \tfarsctio{ï), se fait des braies
avec sa chemise, se tond tes cheveux, et, devenue pareille à un
marinâro, va vers la mer où elle est recueillie par un gentilhomme
catalan, « Segner En Cararch », capitaine d'un vaisseau (non
corsaire); celui-ci prend en affection le marinaro^ qui se fait
appeler Sicuran da Finale.
Segner En Cararch va A Alessandrîa porter des faucons : le
sultan lui donne à manger, et voyant la bonne grke du page
qui te sert, le lui demande. Le page gagne la faveur du sultan, si
bien qu'au bout d'un certain temps il Tenvoie à Acre' sur-
veiller la grande foire qui s'y tient et où viennent des marchands
de tous pays. — D : La femme se fait faire (?) des vêtements
d*hommej va à la mer, et se fait recueillir par un scbifman, auquel
elle dit s'appeler Friederich et chercher un maître; le schifman
prend Friederich à son service : il porte des faucons au roi Stdfan-
nus à Allekeier (Le Caire); les faucons ne voulant pas manger,
le roi se plaint au schifman^ qui dit qu'ils regrettent sans doute
Friederich, qui les nourrissait; le roi demande alors Friederich,
promettant de le bien traiter (en eff^et, les feucons reprennent
leur entrain) ^ Friederich plaît au roi> qui lui donne une charge;
m
r- Qjidle ville ? Celle où a lîcu b fôte est la résidence m&me du Can (voy.
plus loin), qui sans doute éuit ouverte aux chrétiens pour cette fois. 11 y a là
de la confusîo».
2. Acre appartenait aux Satrasi m depuis 1297-
5. Ce trait est préparé dans fî par h mention des Jalcmii peîkgrim que le
capitamc porte au Soudan, détail qui n*a aucune raison d*ôtre, s'il ne conduit
pas au rècii conservé dans D seulement.
joé G- PAKIS
plus tard il le fait prince et lui remet mcme tout le gouveme^l
ment* — Ici encorej D peut à la rigueur venir de 5 avec des*
modifications,
VI, La femme et le îratirt. — A : A une grande foire vient ^
Cherico d'Alessandria; il met pour enseigne à sa boutique la
guarnacba^ b ceinture et la bourse volées. Le maréchal les
remarque et Tinterroge sur leur provenance, Cherico dit que
c'est une belle hbtoire : le maréchal Tinvite à venir b lui dire
à son pabis, où il lui raconte tout. La dame voit alors de quelle
perfidie elle a été victime, et se promet de se venger. Elle
demande à Cherico de répéter devant le Can cette belle navella^
ce qu'il feit volontiers : Aîora ciascun disse che Fera délie Mie
navelle del tmndo. Le maréchal demande à Cherico de venir
souvent au pabis^ qu'il fournira de marchandises^ et le fait sur-
veiller pour qu'il ne s'en aille p^s. — B : Sicurano, regardant
b foire, remarque, dans le fandaco des Vénitiens, sa bourse et
sa ceinture j Ambrogiuolo dit qu'il ne vend pas ces objets, mais
qu'il les lui donnera volontiers, s'ils lui pbîsent; puis il raconte
non b vérité, mais le mensonge même qu'il avait raconté au
mari, et comme quoi ce sot de Bernabo a tué sa femme, Sicu-
rano alors comprend tout. Il goûte beaucoup b ncvella^ et
emmène Ambrogiuolo à A lessandria, où il lui établit nnfondaco
profitable, afin qu'il ne quitte pas le pays. — D : Le traître
Johann vient à Àllekeier et met des joyaux en vente, parmi les-
quels ceux de Friederich : celui-ci les voit, rinterroge : Johann
raconte tout, regrettant seulement qu'Ambrosius ait tué sa
femme innocente. Friederich lui dit qu*il pourra venir à son
gré à b cour et lui demande de lut garder ses joyaux. — Ici^ on
le voit, D est d'accord avec A contre B et ne peut venir de B,
Vn. Explication finale, — ^ : Le maliscalto obtient du Can b
permission d'aller pour deux mois à Gênes ; il y apprend que
les affaires de son mari sont en mauvais point; il se lie avec lui,
et t'assure qu*il fera sa fortune auprès du grand Can. Il rem-
mène et, un jour, dans b chambre du Can* foit raconter à
Cherico b noi'ella ; pub^ ayant signalé une telle perfidie, appelle
son mari ; alors il dette maliscalw si .<pogliû ignudaîo^ e mos^rô com'
ella era feminûj et dit : « Voilà mon mari^ qui me crut mone* »
Cherico demande en vain grâce : a pochidt sil mismo su un
carroe quartarolo, t jtmllo mûrir a grande xntuperia; les époux
retournent à Gènes, où ils vivent heureijx. — S : Sîcurano
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » JO?
trouve moyen (?) de faire venir Bernabô à Alessândrî^, où un
ami de Sicurano riiéberge. Puis^ il mande les deux hommes
devant le sultan (auquel Ambrogiuolo avait déjà raconté sa
mwella)i et dit au sultan d'exiger de lui la vérité; Ambrogiuolo,
, terrorisé, avoue. Alors» s'agenouillant, elle ouvre sa robe et
I montre son sein ; Ambrogiuolo est attaché à une potence et
enduit de miel ; les époux, comblés de présents, retournent à
Gênes. — D : Friederjch envoie à Genay un messager porteur
de lettres du roi invitant son mari à venir à sa cour; celui-ci,
étonné^ vient à Allekeier, Friederich demande au roi d'inviter
i un repas deux aventuriers du pays, Ambrosius et le scbifman
(?); le repas fini, il fait venir Johann avec ses joyaux et le prie
de raconter au sulun son histoire. Il le fait, Ambrosius croit
que le roi l'a fait venir pour le tuer en châtiment du meurtre
de sa femme ; mais Friederich lui dit d'avoir bon espoir. Il sort
avecle roi, et lui demande quelle punition mérite Johann : la
roue et la potence^ répond-il. Friederjch fait rentrer le roi en lui
promettant qu'il va voir une merveille; dépouillant ses vête-
mentSj dûn gîng ah si Gott ^esclmffen bel fur den hlnig und die
gcst in den sal, und nichtes dan die scham mit dnem seidmtmh
kdcckî kî. Tous admirent sa beauté; elle dit qui elle est; le
traître est roué et pendu; les époux retournent à Genay, où
leurs descendants vivent encore, — Ici encore, D est d accord
avec A contre B, non seulement pour le récit volontaire du
traître, mais pour Tapparition de la femme sans vêtements.
Si nous résumons les résultats de cette comparaison, nous
poyoos toujours que D est d*accordavecB contre A^ mais quHl
B*accorde avec A contre B en deux points importants : i°) le
alant raconte à la femme devenue un puissant personnage la
vérité et non le mensonge; i'^pourse faire reconnaître, la femme
apparaît toute nue devant le roi, le galant et le mari. Il s'en
suit que -4 BD sont trois dérivés d*un même original perdu ^
— Mais B ti D ont probablement une source intermédiaire
commune, et cette source et A représentent deux dérivés paraU
léles de cet original. Aucune des trois versions ne provient d'une
des autres. Nous pouvons essayer de restituer Toriginal avec
] . [C'est à cette conclusion que s*en dent G, Paris à^n^ ses notes de
cours; mais dans la MisuUama di studj çritkitdUa in ^tiort di Ariurg Gmj
S08 G. PARIS
les traits communs soit aux deux rédactions A et BD> soit à AB
ou â AD;qn2Lnd A et 5 Z) diffèrent, Toriginal peut avoir été con-
forme soit à A^ soit à BD; parfois une seule des versions paraît
avoir conservé la forme de ToriginaL
Entre deux marchands italiens se trouvant à Paris ^ un
(p. Mo), il pré*:îsç davaouge : iîoq content de dire que * A BD ^nt trois
dérivés d'un même ongïnal perdu n, îl admet ce rapport :
A
^ A
3 D
et c'est en suivant ks règles que lui impose ce classement qu*ïl tente une
restitution de l'originaL Malheureusement l'analyse comparée des trots textes
que nous venons de reproduire d*après les cahiers de cours acheminait le lec-
teur vers la première combinaison ; c'est la première combinaison seule qti*cMe
voulait justifier, et dans son article delà MisuUanea^ G. Fans n'a pas dit
cipressément potirt^uoi il y a renoncé (la noce j de la page 1 14 est à d'autres
dm, et ne sert pas à fonder k classement nouveau). Pour retrouver les
motifs qui ont déterminé G. Paris à le proposer, tl faut esamioer sa restitu-
tion de Toriginal, et rechercher s*îl n*y a pas certains traits communs k B D
coiïtre ^-1, qu'il ait re jetés de celte r^titution comme non primitifs. Nous n'en
voyons que deux^ puisque G. Paris regarde comme « possible », mais non
comme certain (voy. ci-après, p. 510, n. î)» *î"c ^ -^ altèrent la versbn origi-
nale lorsqu'ils s'accordent à raconter que le traître expose parmi ses marchan-
dises les objets dérobés. Voici ces deuit traits i d'aborJ, dans sa restitution de
la source première. G, Paris admet que Théroîne couche seule dans h
chambre où s'introduit te galant ; selon BD, elle y couche avec une petite fille
(ou une set vante), et si G, Paris a rejeté cette donnée, c*est sans doute qu'il
y a vu une invention inutile, propre à la source commune de ^0. £n second
lieu, il n*a pas introduit dans sa restitution de roriginal ce trait, commun à
BD, que le galant passe trois nuits dans la chambre de la femme : il semble
donc bien qu*il ait renoncé à son opinion première, qui était, comme on a vu
(p* PSX <3«^ ^ Irait devait être primitif « à cause de son inutilité même ■, —
Est-ce bien sur ces observations que G. Paris fondait son nouveau classement?
Comme iJ serait plusque téméraire de l'affirmer, nous avons pris le parti de ne
rien changer à. ses notes de cours, jusquVu point où elles rejoignent Tarticle
de la MiK^lîantu ; mais, comme cet anîcïe leur est postérieur et que nous
sommes tenu de le suivre, il nous a semblé néoessaire d'avertir par cette
note, que, si G. Paris avait publié son étude, il aurait assurément modifié
Tanalyse dâ trois versions que l'on vient de lire* — J, B.],
LE CYCLE DE LA « GAGEURE > 509
Génois et un Florentin (D)S s'en^jge un dcbat ^ur Li venu
des femmes et en pomculier de Li femme du Génois : le Floren-
dn gage nne certaine somme de dori::s d'or qu'il la séduira
dans un délai donné (J BD\ qu'il rapportera les preuves cer-
taines de son succès {JB).
Arrivé à Gènes, il se coavainc bïento: de la folie de son
entreprise (£D) et il recourra une ruse pour se donner l'air
d avoir réusâ : il gigne une vieille, bien avec la dame, qui
demande à celle^ de garder n-ois jours dans sa chambre
(ABD), pendant qu'elle tait un pèlerinage ÇJD), un grand
coffine où sont censés être des orrets précieux : dans le coffre est
enfermé le galant. Li nuîr, pendant que la djme dort, il son du
coffire, b découvre, et voit quelle a sous ie sein gauche ÇAB)
un na (^AB D) avec al^iuanti p^^tà'xi bimdi cerne liyro (B) ' ; il
s'em)arc en outre dequelques joyaux. Au bout de trois jours, la
vieille £ût reprendre son coâre (a B D).
Le gdant revient à Paris et montre les joyaux au mari :
celui-d ne trouve pas La preuve surRsante, mais il se rend
devant b descripcion du na ÇABD). H paie la gageure, et part
pour Gênes, résolu i punir sa femme (ABD),
Arrivé dans son pays, il s'arrête dans une maison de cam-
pagne qu'il a prés de Li ville et envoie un serviteur chercher sa
fenune, lui ordonnar.: de la roer en rcàte {BD). Quand le
sernteur annonce! la dame Tordre qu'il a reçu, elle implore sa
pîtîé, et obtient de lui q-'il Ijî donne ses vêtements masculins
(AEl)y qn'il rappone a yozi ma::re 5es vêtements i elle en
tfemoignaBt da meurtre e: qu'il la laisse aller 80l:s la promesse
1. On coonprcnd qzc La i^ui :cr.tirj,n r.ortnt:- i A ci B lient ict^è a-
tndtre nx mue patrc
2. fioooce a ccmincrent :c: ic^-jcr^i «ul jn trait a.-vr-lifr ie "trl*:-
nal : ces poOs ^ui gr.v.cr^t le iLrte '^ :':-v*r.: iirA pl-iieurj t-sUcxis tcct
à Cûtindêprndaicea ''OjreLi £ .Kr.i.zixrr, . zr^r.-.ci it G^-r-zenr^:-. ie Pitrt,
dlmbriam, ^o^ns ie T.~a-.r.*:.i. : >'.: : iî L.-e it P-sîji! s resctitetx
donc a h fisrme prenier» ie '.ù. -ri; :-. 3, \^ .t\ rie 'jyrpc:*, 1 t'.t :n:rod;i:î.
Dansie oxxte iePhre. iirs 7".- -".ria ;t ? -tii. i -.-zLz.lzi i- triitre r^c^
t les poils et Les 1^ rrt:e:; :i tri::. :.: -îççeLe j =:-::lit:cr. ie li tst-
-rf, iohfce rririit:: iir_i 3: :j-- :* C-rx' i* ?::;•>;. r: le c.::n:e
dlnibninx, S esc rti-i: 1 ici '.'-.f-^ix :r::-i.rii :-t :.:ure !a :.;ci-
pike.
s 10 O. PARIS
qu'elle s'éloignera du pavs(5Z>)\ Le serviteur y consent
(ABD).
La femme habillée en homme est recueillie sur le rivage par]
un vaisseau dont le capitaine le prend pour page (âBD). Ce
capitaine porte des faucons au soudan d'Alexandrie ÇB D) ; le
Soudan voit le page, admire sa bonne grâce (ABD) et la façon
dont il soigne les faucons (D), et le demande au capitaine
(ABD). Il le prend de plus en plus en gré et lui donne une
charge élevée (^SjD).
Un jour que la femme, devenue haut fonctionnaire du soudan,
visite une foire à Alexandrie {A D) % elle voit chez un mar-
chand étranger, qui n*est autre que le traître, les objets pré-
cieux qui lui ont été dérobés (A BD)K Interrogé, le Florentin
raconte complaisamment la ruse par laquelle il en est devenu
possesseur {AU)\ la femme comprenant ainsi ce qui lui est
arrivé, dissimule^ et réussit à retenir le marchand à Alexandrie
en lui procurant accès et débit à la cour {A BD\ Puis elle
trouve le moyen de faire venir son mari à Alexandrie, et un
jour^ ayant invité chez le soudan les deux hommes (ni le mari
ni le traître ne se reconnaissent plus qu'ils ne la reconnaissent),
elle fait raconter Thistoire par te Florentin (ABD); le mari
apprend ainsi son erreur. Puis elle se met nue (AD) et se fait
reconnaître. Le traître est puni de mort, et les épouXj comblés
î * M* Ohle (p* 3 î) soutient par di^ raisonnements très spacieux «^iie c*est
le récit de A (yoyttt ci-a.vant) qui esr Torigmal : en ce cas, ce serait Fautciir
de U source de BD t\m aurait fait k changement ; mais je crois plutôt que
c'est Â^Mî^tsl éloigne de ta source commune : Tauteura voulu mettre les
époux çn présence pour avoir une scène émouvante; seulement rinterventîon
du serviteur devient alors asse£ gauche ; datis BD on comprend que te mari,
n'ayant pas le courage de revoir sa femme, contie à tin serviteur rejEécuiion
de sa vengeance,
1* Boccace seul met la foire (non menUonnée dans 0) à Acre, où la
femme se rend et d*où elle ramène ensuite le marchand iialicti à Ate^ndric :
ce détour est inutile.
j. Dans B et />, comme on a vu, le marchand expose ces objets parmi
d'autres marchandises (dans B^ fort bizarrement, il dit qu'il ne les vend pas,
mab qu'il est prêt à les donner). Dans A, il en fait l'enseigne de sa boutique^
ce qui, comme Ta fait ob$er\'er M. Ohle, rend plus vraisemblable que U
femme les remarque. Il est possible que ce soit U la version primitive.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 5II
de présents par le Soudan, retournent à Gênes, où ils vivent
tituTQux(ABD).
n est probable que l'original des deux versions A et BD a été
rédigé en italien, vers la fin du xiii* siècle *. Boccace Ta suivi
assez fidèlement, et en a même seul conservé au moins un
détail; mais il a cm devoir y faire certaines modifications : la
plus importante est que chez lui le traître ne raconte pas spon-
tanément et pour s'en vanter son odieux stragème, mais qu'il
commence par répéter le mensonge par lequel il avait trompé
le mari, et n'avoue la vérité, devant le Soudan, que terrorisé
par les menaces que lui adresse le prétendu ministre du Soudan.
L'auteur de Dicamiron a évidemment trouvé invraisemblable la
Ëinfaronnade du traître et on comprend très bien qu'il en ait
ainsi jugé : toutefois non seulement l'accord de ADy mais la
comparaison d'autres versions de notre histoire, montre qu'elle
devait être dans l'original '.
Avant de passer à un autre groupe de versions, nous dirons
un mot du drame de Shakspeare, qui, dans l'opinion générale,
se rattache intimement à la nouvelle de Boccace.
Cymheline est une des dernières productions de Shakspeare :
c'est aussi à coup sûr, une des plus étranges et des plus « mons-
trueuses ». Le poète y a mêlé trois ou quatre actions qui s'en-
chevêtrent dans l'intrigue la plus compliquée et la plus invrai-
semblable qu'on puisse voir : parmi ces bizarreries pourtant on
admire une poésie souvent surprenante, des réflexions pro-
fondes, un caractère d'homme bien tracé (Jachimo) et un beau
caractère de femme (Imogen).
Tenons-nous en à ce qui, dans cette intrigue, se rapporte à
notre sujet. Le roi de Bretagne, Cymbclinc \ a une fille, Imo-
gen, que persécute sa seconde femme : celle-ci avait voulu
faire épouser Imogen à son fils d*un premier lit, Cloten, per-
sonnage perdu de crimes; mais Imogen s*est mariée secrètement
avec Posthumus. La marâtre, l'ayant appris, obtient du roi
1. En tout cas pas avant 1252, époque où furent frappes les premiers flo-
rins, puisque dans les trois versions la gageure porte sur une somme (variable)
de florins d*or.
2. Voy. ci-après les versions du groupe Bîb.
3. Venu, mais avec de graves altérations, de Gaufrci de Monmouth.
512 G. PARIS
qa'il odle Posthuraus, et elle médite de faire périr Itnogeti.
Réfugié à Rome, Posthamus y vante sa femme m-ilessys des
luliennes, comme il Tavait louée à Orléans au-dessus des Fran-^
çatses '. Un Romain^ jachimo^ parie qu*U la séduira : il gagr^
une somme énorme contre un diamant donne à Posthumus par
Imogen. Legabnt arrive en Angleterre, dans la « ville de Lud i>,
porteur d'une lettre de Posthumus pour Imogen, qui lui per-
met d'avoir accès auprès d'elle; il essaye de la séduire eo Jui
disant que son mari a trompe à Rome; rebuté, il lui demandeJ
la permission de déposer chez elle une caisse, ce qu'elle acceptez-
en ajoutant même qu'elle la gardera dans sa chambre. Il se
cache dans cette cai^e, en son au moment favorable, regarde la
chambre en détail, prend un bracelet donné par Posthumus à
Imogen, et voit
on hcr left tnrast
A mole doque-spctted» like ifae crûnsoo drops
V thc boitom of 2 cowslîp.
E rapporte toutes ces preuves à Po'îthumus, qui doute des pre-
miers indices, mais se rend au dernier. Le mari envoie son
serviteur Pîsanio en Bretagne avec une lenre qui dit i Imogen
de se trouver à tel port où lui-même arrivera; Pisanio a mis-
sion de U tuer. Mais lebonPisanio ne croit passa maîtresse cou-
pable : il lui a même apporté un vêtement d*homme, qu'il l'en-
gage à revêtir; il kii donne en outre une boite qui contient,
croit-tl, un cordial; cette boîte lui a été donnée par la reine, qui a
cru y enfermer un poison destiné à (aire mourir Imogen : en
fait ce breuvage (par une ruse du médecin qut Fa préparé sur
Tordre delà reine) n'est qu'un narcotique. Déguisée en homme,
Imogen s*enfuit donc et se réfugie dans une caverne, où vivent
deux de ses frères, Guiderius et Arviragus, persécutés comme
elle. Épuisée, elle boit le prétendu cordial, et tombe dans un
sommeil semblable à la mort. Tandis qu'elle dort, Todieux
CloteOj qui la poursuivait, revêtu d'habits appartenant à
Posthumus, arrive à la caverne : Tun des frères dlmogeo, Gui-
derius^ le tue^ jette sa tète dans la mer, et laisse à l'entrée
M* Ohle voit ki b preuve que Shâkspcare i combiné Jeux vçnififi&. Pas-
et le Démméfùm \ maïs voy« ci-apfès.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » JIJ
de k caverne le tronc sanglant* Comme Guîderi.tts et les
autres personnages réfugiés dans la caverne se sont éloignés pour
quelque temps, Imogen trouve le corps sans tète revêtu des
habits d^son mari, croit reconnaître Postliunius, et se pflme
s«r le cadavre : elle est relevée par Lucius, généra! romainj
en guerre contre, le roi Cymbeline ; Lucius remmène A son camp,
où elle devient son page, sous le nom de Fidèle, Dans un der*
nier acte, qui esc extravagant, Cymbeline ayant vaincu les
Romains, on amène devant lui comme prisonniers les diffé-
trents personnages du drame : entre autres Imogen, toujours
rdéguisée en homme, Postliumus, qui est revenu de Rome et qui
a combattu dans les rangs des Bretons sous de pauvres vête-
ments, et le galant, Jachimo; Imogen reconnaît le traître,
obtient de Cymbeline qu'il Tinterroge sévèrement* Jachimo»
qui a des remords, avoue son imposture et obtient sa grke.
Ce récit présente des traits inconnus à Boccace : i° le galant
arrive auprès de la femme, recommandé par le mari, et lui parle;
2** il lui dit que son mari la trompe ; 3° ie galant n'a pas d^
complice ; 4'' le signe ressemble à une fleur; s° '^ serviteur sait
pourquoi il a reçu Tordre de tuer sa maîtresse ; 6^ c'est lui qui
conseille à celle-ci de s'habiller en homme ; 7"* !c dénouement
est mêlé à des aventures de guerre*
Or, tous ces traits (sauf le 2"^ et le 4*) se trouvent dans ThiS'
lojre de la Fislmife^ nouvelle de Kinde Kitt ', Ici le galant est
envoyé par le mari^ annoncer à sa femme qu'il reste à
Londres. Elle loge dans une maison, près de sa chambre, mais
rebote quand il veut la séduire. Il se glisse sous son lit (il
^n'a pas de complice), et lui vole un petit crucifix qu'elle a sur
la poitrine (pas de signe). Le serviteur, chargé par le mari de
la tuer, et à qui elle demande, comme In)ogen, d'exécuter
Tordre reçu, la croit coupable, mais a pitié d'elle, et lui conseille
1'.' Cette isouvelk a été analysée par Leonhardt, d.ms À%'îîa,Vll, iyi6.
On a dit à tort ^uH y avjit une édition di: 1605 {Cymbeîim est de 1609).
'•î. On;tte voh pas daircmem dans ce récit (d*après l'analyse qu*en a
Jcvnné Leonhardt) <|uelic ust la situation stxiak des parieurs: au débutai!
semble qtiece sont des marchands; plus loin» on les voit prendre part à des
guerres.
(14 G. P»&
de f^habiUer en homme. Près «fYorfc cUe fcnaMmc le rot]
de Fitifice Édocunda qui Êusaic b guerre à Henri \1, ec «toi Ici
fmâ comïïûe page wm le nom d'Eilinufid. A b bataUIe de]
Baiiiet% cfaerchaiit soo auri parmi ks mairts i^ab, die]
tromre te imm^ blessé, loo cindfix sar sa poîtriac* EUe devine
tout, kii appeler par Edouard iou niari^ qui c^ parmi les pri-
somiîen; le traiere esc oUt^ d*avoii£r; elle se bit comiaiEie ; |
le roi amdâmuc k prétendu séductear I b prâoQ et à pajer
trois fois b somme gagée ; tl voudrait pmik k mari; mak la
femme, chargée de te juger, lui pardonne.
U y a évidemment un lien étroit (quoi qu'en dise Leonhardt),
entre cette mauvaise versicm et Cymktim, M. Ohk peiBe|
qu'elle remonte à une version anglaise perdue^ qu3 appelle i
Pmthumm et qui conienaii le trait 2" (le filant rapporte mec
songèrenient à b femme que son mari lui est infidèle *). De ce
récit anglais, Poithumus, qui mettait en scène des pcrscmnagcs
de haut rang» aurait procédé un drame perdu, que M, Oble inti*
tuk Cymhelim'Pmibumus, où le conte de b gageure auniit été
comtrinéavec une autre histoire. Ce drame, CymMim'Pùnlmmms^
sérail b source immcdiaie de Shakspeare, qui y aurait ajouté)!
des tt^ts pris à Boccace : le coffre et le dgne. Postbumm^ en
effet, et c'est la thèse fondamentale de M, Ohle, ne connaissait
pas le motif du signe ; ]egal.ant (comme dans le Cùmude Pmiurs\
y montrait des objets volés, comme seules preuves de llnfidélité
de b femme. Cette vue paraît contestable, et Ion peut fon
bien croire que le signe a été omis dans b version Fisbwiji^
comme il Ta été en d'autrc% versions déjà analysées ou que nous
analyserom ^ Il eu est de même du motif du coffre : b fa^on
I . On Dc voit pji>, 4âi)s rjinaiyie de Leonbardt, comment il lui procure
é» hiilnts d'homme.
1. En 1471, Édou&fd IV d'York, aidé ptr des troupes boyrgukgnoiiOcSr
y v«inquit et taa Warwkk.
|t Ce trait » retrouve dans le Mirûck dont h « source épique », d*iprès
M, Oltle, est iussi b %omc€ de Fûstbumus, ce qui paiattfbuMbk.
4. Four le Cùmlidê î^mHir$, nous jurons i eï^mincr ^î ce trait y figurait ;
it itiît cirtâjoemeitt» quoi qu'en dl»c M. Ohk, dans Vorigiml épique du
Mlrmk. Q^nt i Tintervcntion de b Vierge, que M. Obîc (p. 70) retrouve
dans une intervention «ntloguc de Jupiter au déooûmtfiit de CymMim^ elle
parjtt ;ij*:»ut<^e àm%\ U MhsuU, qui csl seul â U présenter.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE n 5 I 5
dont le galant j d*après la version Fishwifc^ s'introduit dans la
chambre, est si gauche qu'on peut la croire altérée. Dés lors,
on est autorisé à se demander si Shakespeare a réellement uti-
lisé Boccace. M. Oh le allègue pour le prouver que le motif du
coffre ne conviçnt que lorsque les personnages sont des bour-
geoisj et que, par suite, il est très mal amené dans CymMim;
en outre, que Shakspeare place la scène à Rome et introduit
des noms italiens* Ces preuves sont-elles sufEsantes? Nous
retrouverons le motif du coffre dans un conte gaélique où
rhéroïne est une reine. Le seul argument solide de M. Ohle
est tiré du fait que le mari^ dans Cymbeline, vante sa femme
d'abord ù Orléans» puis à Rome : Orléans viendrait de Pùsthti-
mus^ Rome de Boccace (qui, d ailleurs, place la scène non à
Rome^ mais à Paris). Cet argument ne paraît pas suffisant»
et en somme je suis poné à croire que Cymbeline — qu'il y ait eu
ou non un diame intermédiaire, — repose sur un récit antérieur
perdu, que j'appellerai avec M. Ohle Posihumus : ce récit res-
semblait à roriglnal du Miracle, le galant y employait le strata-
gème do coffre, donnait comme preuves de sa victoire un objet
volé et la description du signe; la scène du pari était placée à
Rome et le dénouement était à peu près celui de la version
Fislm^ife.
B'b i Aveu spontané du traître dans tandenne maison du mari.
Cette forme de notre récit, qui ressemble par plus d'un trait
à la précédente (le motif du coffre se rencontre dans trois ver-
sions), n'apparait qu'au xvi*= siècle dans un poème en magyar;
elle se retrouve, plus ou moins altérée, dans des contes alle-
mand, norvégien (finlandais) et gaélique. Elle est inconnue au
monde roman.
I. La belk histaire du vaillani Francisco et de son épotise, par
Gaspar Riskay ', fut écrite par lui en 1552, en 170 strophes
(sur le modèle et la mélodie de la « belle histoire y^ de Griselidis
i« Elle a èiè Imprimée en i S74} puis en 1579 et en 160 1. et de nos jours,
entre autres par M. Aaron Szilâdy, de l* Académie hongroise. Je dois la
traduction de cette histoire à M. Ph.-A. Becker, professeur de philologie
romane à l'Univt:rsiié de Budapest.
5l6 G, PARIS
mise en vers par Pâul Istviinfi)* Certains noms, surtout Franciscù
(hongr. Ffrmcx)tt aussi Cassandre, semblent indiquer une source
italienne, mais on ne connaît pas en italien de récit pareil; en
tout cas, rhîstoire est localisée en Hongrie et placée sous le roi
Békj personnage imaginaire, car aucun des quatre Bêla histo-
riques (xi^-xîii* siècles) n'a été sans enfants; le château de Fran-
ciscoj Zebernik (Srbernik), est dans la Bosnie actuelle. L'histoire
n'est pas la source des autres contes de ce groupe^ car il y
manque des traits essentiels '. En voici un résumé.
Le vaillant Francisco est heureux avec sa femme au château
de Zebernik, quand il reçoit une lettre du roi Bêla rinvitani à
Bude pour de grandes fêtes. U prend congé de sa femme, qui lui
recommande de ne pas se laisser aller aux vanteries usuelles à
la cour. — Bien accueilli par le roi, il renverse dans un tour-
noi le vaillant Cassandre, resté vainqueur de tous les autres, et
qu'on croyait invincible. Cassandre en conçoit une violente
jalousie \ Le soir, au repas, Francisco vante sa maison, sa vail-
lance et sa femme, belle et vertueuse. Cassandre accorde qu'il
est vaillant; quant à sa maison, elle lui vient, dit-tl, non de ses
aïeux, mais du roi; pour ce qui est de sa femme, elle peut être
très belle, « mais sa vertu, je la nie, et quand il le faudra, j'en
dirai plus ». Francisco riposte qu'il le tuera s'il ne prouve son
propos. Cassandre s'engage à le prouver en quelques jours,
pourvu que Francisco n'avertisse pas sa femme. Celui<i s'y
engage et demande comme preuves l'anneau d'or de sa femme
et le poignard d*or qu'il lui a confiée — Arrivé à Zebernik,
Cassandre erre trois jours autour du château *, mais la dame
ne son pas. Il fait dire ù la duègne qu'un parent la demande;
il lui apprend la gageure et lui promet, si elle veut l'aider,
de l'épouser et de la faire dame du château. La nuit m£me^
I . Le coffre^ et même le signe. Eo outrc^ le marit au lieu d^ vouloir tuer sa
femme» s*éloigne (cf. B').
3, Ce mit et te motif de U convocation du roi se retrouvent dans la Pia-
mîk de Batacchî.
^, Franmco offre sa vie et tous ses biens en gage quVI ne l*avertiti|ias; d
n'est pas parle de gageure sur le fond même : mais ce ne peut être i^u^uûc
ombsion*
4, Cf* le ms, de Tours (B*), Eufimiu, Tîmoncda.
LE CYCLE DE LA ff GAGEURE » fï'J
h duègne enlève les clefs sous le chevet de la dame et apporte
à Cassandre Tanneau et le poignard, Francisco est convainai
et prêt à mourir; mais le roi ordonne à Cassandre de faire
grâce de la vie de son adversaire. Cassandre y consent, à
condition que Francisco s* exile. — Il passe le Danube et envoie
à Zebernik son page, chargé de reproches pour sa femme. Celle-
ci quitte son château avant que Cassandre en prenne possession,
non sans avoir mîs de grandes richesses en dépôt chez un ermite
%^oisîn ; puis, elle et le page, habillés en moines*, cherchent
Francisco sans le trouver. Au bout d*un an, e!!e revient chez
Termite et conçoit un autre plan. Elle s'habille en chevalier et
avec un grand train se rend à la cour du roi, où elle se présente
sous le nom de Roland, venu de llnde (sic). Le roi et la reine
sont charmés de sa bonne grâce etj comme ils n*ont pas d*en-
fants^ ils l'adoptent, — Un roi voisin ayant annonce un tournoi,
Roland s'y rend avec une nombreuse suite : il espérait que
Francisco y viendrait : en effet, Francisco était là, mais en
misérable situation* Roland le voit de ses fenêtres porter une
botte de foin, et l'en tend dire de deux jouteurs : « Ils ne s'y
prennent pas bien, » II fait venir le malheureux, Tinterroge,
obtient de lui le récit de son histoire* Roland l'équipe et lenvoie
à la joute où il renverse le chevalier qui a été jusque-là le vain-
queur de tous les autres, Roland l'ayant pris à son service,
Francisco, sur Tordre de son maître, se laisse désarçonner par
bij en sorte que Roland passe pour le plus fort des jouteurs.
Il retourne à Bude, emmenant Francisco *. — Cependant»
Cassandre, devenu « palatin n^ invite Roland â la chasse à
Zebernik; il s'y rend et est bien reçu; il a emmené Francisco,
qui a grand peur d*êrre reconnu, — A un repas, Roland
demande à Cassandre comment il possède ce château, et Cas-
sandre raconte tout et comment la duègne (devenue sa femme)
lui a remis l'anneau et le poignard, « Vit*on jamais une
pareille trahison ? » dit Roland, et il ordonne à « Thomme à la
botte de foin *> de trancher la tète devant lui à Cassandre et à
I. QJe m», de Tours (B')-
a. Ici un épisode inutile : le roi êirangcr donne sa fille à Roland, qui
aicceptc de se fiancer avec elle, mais dit qn'il doit en parlera son père» €t qu'il
reviendra la chercher.
sa femme, ce qui est exécuté. Puis elle pa.sse dans une chambre,
se dépouille, ne met qu'un large vêtement et fait venir son
mari; elle tombe à ses genoux et se fait reconnaître* Elle
revient, vêtue en femme, raconte tout aux seigneurs présents,
et les charge d'informer le roi* Celui-d, charmé de sa finesse et
de sa fidélité^ la nomme son héritière*
Ce qui caractérise cette version, d*ailleurs fort altérée, c'est
que la femme, devenue puissante, trouve son mari tombé dans
la misère, le prend à son service et le ramène dans leur
ancienne demeure, maintenant celle du traître, où celui-ci, de
son plein gré, raconte sa ruse et se livre ainsi ; sur quoi, la
femme le fait punir, se fait reconnaître de son mari et se récon-
cilie avec luL Nous retrouverons ces traits dans d'autres récits,
où reparaissent d'ordinaire les motifs du coffre (avec complicité
d*une femme), du signe, de Tordre de mon donné par le mari
(ou de sa tentative de mort sur sa femme).
2. Conte allemand. Der Pfiffigsîe^, Il s'agît de marchands
établis à Londres. L*un d'eux gage sa fortune contre celle du
mari % qui part pour huit jours après avoir mis sa femme au
fait de la gageure : trait absurde et propre à cette version en
tout altérée et délayée* Le galant obtient d'une ancienne ser-
vante de la femme qu'elle l'enferme dans un coffre, que T hé-
roïne consent à garder en dépôt dans sa chambre pour une nuit
(!a servante, qui est sur le point de quitter la place, dit que
ce coffre contient ses économies). Par un trou de la caisse, il
voit que la femme a un signe au haut du bras (cf. D) et le périt
doigt du pied de travers, La nuit, il sort de sa cachette et prend
un anneau ; le lendemain on le remporte hors de la maison. —
Le mari, revenu, est convaincu par ces preuves* Il accable sa
femme de reproches (pas de tentative de meurtre), quitte le
pays et se fait soldat en Danemark. La femme s'habille en
homme et se met à sa recherche. Elle devient médecin de Tar-
mée danoise, interroge tous les hommes sous prétexte de s en-
quérir de leur santé, et, ayant retrouvé son mari, le prend à son
service. Au bout de quelque temps, elle IVmmène à Londres
et loue un appartement dans leur ancienne maison, devenue
1. Wolff, Hiiusttmrcheu, p. 55 j.
2. Le mari a épousé unt fille pauvre^ et h vante devant ses confrères, qui
ont épou^ pour leur dot des femmes dont Ils n^ont pas à se Louer^
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » $1$
celle du traître* Elle invite celui-ci à un dîner, où chacun doit
raconter la meilleure ruse quHl ait exécutée de sa vie. Le traître
raconte son beau tour; le médecin assure en avoir un bien
plus fort, va dans sa chambre, sMiabille en femme, et se fait
reconnaître du mari et du traître, qui est confondu et qui rend
les biens usurpés (pas d'autre punition).
3. Conte norvégien '. — Un riche marin a épousé une fille
pauvre (cf. le conte précédent). I! part pour un voyage ; un
ami lui dit qu'il est bien imprudent, et parie sa maison contre
celle du marin qu'il séduira la femme : le marin reconnaîtra
qu'il a perdu si le séducteur lui rapporte la chaîne d'or de sa
femme (pas de signe). Il essaye en vain de la lui acheter ; il gagne
une vieille servante qui la lui dérobe. Le marin, de retour, ta
croit coupable; de son vaisseau, il ordonne à deux de ses ser-
viteurs d'aller à terre, de tuer sa femme et de tut rapporter une
bouteille de son sang fumant. Ils n*ont pas le cœur d^aller trou-
ver la femme, et rapportent la bouteille pleine du sang d'un
agneau (cL D). Le marin repart, fait naufrage et est réduit,
dans une ville lointaine, à garder les poules. La femme, qui
n a été prévenue de rien, est expulsée par le traître (cf. Fran-
dsœ)[ elle s'habille en homme, se place chez un monnaycur et
devient maître-monnayeur dans la ville, située sur la Méditerra-
née, où vivait son mari. Elle entend parler de cet homme, triste et
taciturne, qui a eu de grands revers : elle le fait venir et le prend
pour domestique* Puis elle revient dans son pays et se loge chez
le gagnant, au grand effroi du mari (cf. Francisca^ Wolff). Elle
invite le marchand à raconter ses bons tours; il raconte son stra-
tagème qu'elle lui demande de mettre par écrit ; puis, elle se
fait reconnaître par son mari, lui pardonne, et envoie Técrit à
la justice qui met le marchand en prison (le narrateur ignore
s il fut autrement puni); les époux reprennent leurs biens et
vivent heureux.
4* Conte gaélique ^ — Un prince (bientôt roi) épouse une
t* Beau vois, Cmtm populmus de la Nûrt'è^e, dt la Finlande et dt la Boitr-
^ùgm, Paris, 1862, p* 8 (tiré de J, Aasen, Praver aj Lauditnmîei i Ncrge}
(Qiristiama, 185 j), p. 74-81.
2. J* F* Campbell, Popular Takso/ihe Wfit Highhmh (Êdîn> bourg. 1860),
t. Il, p, 1, n*' XV UL Tl^e Chest. Oi con ce réunit singulîàremcnt notre histoire
avec le thème de Shybck. Je ne m'occuperai que de la partie qui concerne
le conte de ïa Gûgattt.
$tÙ G. PARIS
jeune fille ; un oipttaîne de navire, à qui il %eut acheter de h
soie pour sa femme, parie qu'il la séduti^ la nuit même. Le roi
gage son royaume, le capitaine sa cargaison. Il va trouver la bm-
mfe (sans tentative auprès de b retne) : une servante, gagnée
par la hmwife^ obtient de la reine, sous préteste d aller voir
sa sceur malade, une permission : celle de déposer sa caisse
dans la chambre de la reine. Le capitaine est caché dans la
caisse; la nuit, il son» prend une chaîne et un anneau. Le
roi demande qu'on le mène outre mer, ce qui est fait; le capî-
laine s'installe dans le palais, I^ reine, qui n'y comprend rien*
s'en va, s*habille en homme, passe la mer (cf. D)^ et arrive
dans une maison où elle s*engage comme garçon d'écurie. Elle
retrouve son mari assauvagi, le prend pour aide et, après
quelque tenjps, demande un congé et l'emmène. Elle arrive
chez son père, qui veut faire pendre son gendre; mais il prouve
que, rayant achetée, il avait le droit de la traiter ainsi \ Puis,
ils vont dans leur ancienne maison, elle demande au capitaine
comment il t'a en sa possession : à un étranger, il peut bien le
dire : îl raconte tout, et le mari, qu'elle a caché, écrit son
récit. Ils vont à la cour de justice, où elle montre récrit. Le
capitaine est pendu ; les époux vivent heureux,
S, Conte roumainde Transylvanie'- — Un riche marchand a
épousé une fille pauvre. Se trouvant à l'étranger, il vante sa
femme ; un autre marchand parie de la séduire en une nuit : le
signe qu'elle porte est indiqué d'avance. Il se présente à elle
comme ami du mari, et est bien accueilli; mais, le soir venu,
elle le congédie. Il trouve une sorcière (trait inutile), qui lui
suggère l'idée du cofTre, et s'y fait enfermer elle*même. La sor-
cière voit l'étoile d'or que la femme a sur le seinj découvre
rendroit où elle met son anneau, qu'elle dérobe. Le mari est
con%aincu [ar cet anneau (on ne parle plus du signe). Il aban-
donne sa femme dans un bateau, qui aborde à une rive déserte.
Couchée sous un arbre, elle entend un oiseau dire que la rosée
prise à cet endroit guérirait lempereur aveugle ^ Elle se déguise
I, En clkt,dk a cté achetée (cL CampbclU p. 14) pour ccni livres. —
Cette inEervt^atiati du fiim rattache noire conte a B*a.
1. Autknd^ i^b^ col. to^),
5. Ce trait appartient à d'autres contes (£/ }usu H t Itt/usU^ tOistau Mm
dans Basile, cic»). Nous le retrouverons plus loin (B^aj).
LE CYCLE DE lA ft GAGEURE » ^tl
en homme, guérit Tempcreur, et demande en récompense la ville
où son mari vit, très pauvre, car ses biens étaient Feu jeu du
pari. Elle Tin vite à dîner, lui montre son sein pour se faire
reconnaître, et lui pardonne. Le traître et h sorcière (on ne sait
comment ils sont convaincus du crime) sont mis à mort,
5, Conte tsigane (roumain) \ ~ Les parieurs sont deux
marchands (ils gagent leurs biens?); le signe et la bague qui
doivent servir de preuves sont indi^ijuès d^avance. Le galant
n^arrive pas à être admis auprès de la femme. Une vieille le
fiait pour une nuit cacher dans le coffre; il voit le signe suk
imma, et prend Tanneau* Le mari jette sa femme dans le
Danube : recueillie par un pêcheur^ elle gagne de l'argent par
son travail, s*habille (seulement alors) en homme, apprend dans
un songe le moyen de guérir Tempereur et le guérit; 11 lui
donne son royaume en récompense. Elle voit son mari, qui
portait Teau aux juifs, et lui fait dire son histoire* Elle fait
rechercher le traître : interrogé, il reconnaît ne Savoir jamais
vue de sa vie', « Tu prétends, lui dit-elle, avoir couché
avec la femme de cet homme î — Je Tai fait. — Quelle preuve
en as-tu donnée ? — Qu'elle avait un signe sous le sein, —
Reconnaîtrais*tu ce signe? — Oui. *> Elle le montre, et le
traître, qui reconnaît le signe, mais non celle qui le porte,
est confondu* Elle le fait couper en morceaux, fait donner
vingt-cinq coups de bâton à son mari pour le punir de sa cré-
dulité, mais lui cède l'empire ^
B^ : l'héroïne est la femme du parieur; la femme
juge; aveu forcé du traître
Ce groupe de récits, étroitement apparenté au précédent (cf.
B^b4), n*apparak, lui aussi, noté par Técriture, qu'au xvi'' siècle.
I! comprend une version espagnole, un conte prétendu arabe,
un conte italien très altéré.
1. F. Miklosich, Mârdmt der Zigeuner dit Bul-cti'inat n" xiv {D^tkschriftm
dit k. Akitdemu der Wiîîenîchajtm^é^ Vienne^ t. XX [II, 1874, p. 321).
2, entrait manque dîins le tente ^ en sorte que le récit est inîïitelîigible,
J. On peut rattacher à ce groupe le conte ^S àe. Comparetti» Fttîtrica
(Basilicate), singulièrement altéré, r«;mpii d*all usions étrangères, et qui se
rappone au moins aussi bien à B* a.
p2
C- PAIIS
B^z, InUrvmlim du père.
t. TimoEiediS — Dans k ville de Candja (Gandia?) habite
Casiodaro, né à Ferrare, qui épouse la fille de Hercxliana,
marchand comme lui. Il va à Ferrare et vante sa femme. Un
autre marchand de Candia, Falacio, gage cent ducats qu'il la
séduira. Il vient à Candia^ se promène longtemps, et en vain,
devant la maison (cf, B*bi). Il recourt à une vieille reçue dans
la maison^ Crispina, qui parle inutilement pour lui ; enfin, il
cherche i se procurer des indices par Crispina. Celle-ci, en
ifpulgando Fînea, voit entre ses épaules un lumr^ dont elle
coupe rÛT/^i câMlôS ' ; elle les donne à Falacio, en lui décrivant
les enîradas y salidas de la chambre. Falacto revient à Ferrare.
Castodoro, con%'aîncu, paie et lui demande le secret. Il revient
à Candia, pour y tuer sa femme ; mais, par un reste d*amour,
il n'en a p^ le courage, H ne lui parle de rien et dit seulement
â son beau-père qu'il l'emmène à Ferrare, pour la montrera
sa famille. En pleine mer, il la descend endormie sur une ilc
désene, Fy abandonne, puis il revient à Candia ou il annonce
à son beau-père que Finca est morte de maladie. Finea, se réveil-
lant seule^ implore la Vierge et ^tnt Pierre, se fait de sonman*
teau (elle a'du fil, une aiguille, des ciseaux) des vêtements mas-
culins, et décide de s'appeler Pedro* Au bout de trois jours pen-
dant lesquels elle s*est nourrie d'herbages, un vaisseau marchand
la recueille et l'emmène à Chypre* Eu y arrivant» une tempête
oblige les marchands qui voyagent avec elle à jeter à la mer
beaucoup de marchandises ; par suite de quoi, un grand différend
s*éléve entre eux pour savoir ce que doit perdre chacun d'eux.
Ils vont devant le roi, où Pedro offre de faire le compte, et le
Élit si bien que le roi, charmé de lui, le prend pour secrétaire.
— Le roi de Candia, revenant de Jérusalem, passe à Chypre.
Pedro le prie, comme son souverain, de le demander au roi de
Chypre, et de l'emmener avec lui j le roi de Chypre le laisse
aller, bien qu*à regret, et Pedro arrive à Candia, où le roi le
t, Kat-eUstas anUrhns a Cervantes, j* c(licioti(Madnd, Rivadencv^ra, 1858),
P. siÇi Tîmonedii, B! Patranwh. — llmoneda* libraire à Valence, auteur et
éditeur de rotiianct», éditeur de Lo [te de Hueda. Le Pdîranufh est de 1 576.
2. Cî B'J4, B'bt, Bb}a, h'h}h, B^bji» Bococe.
:
ÎM arCLE DE LA « GAGEURE » 523
nomme régente de sa cabaïkria. Un jour se présentent à son
jugement son père et son mari, le premier réclamant au second
sa subsistance, qu'il lui avait promise ', et sa fille, car il doute
de sa mort, Pedro ordonne que Casiodoro paie et que* dans un
délai de quatre mois, il prouve par bons témoins que sa femme
est morte. Au terme fixé, Casiodoro, ne pouvant produire
aucun témoin, est mis en prison, et, comme il ne raconte rien
de précis, Pedro ordonne qu^on le mette à h torture, sur quoi
il raconte tout* Pedro le fait remettre en prison ^, et cite
Falacio, qui^ torturé à son tour, avoue la vérité* Pedro fait
seniemiar Crispina et bannir Falacîo, qui rend en entre les cent
docats du pari, avec Tintérét. — Puisj Pedro convie à un fes-
tin le roi, Herodiano et Casiodoro, se retire un instant, revient
habillé en femme, et raconte tout, priant le roi de donner un
istado à son mari ; le rot y consent, à condition que Finea assis-
tera à tons les jugements.
2. Moslenmel Rasimi^. — Ce conte, quelle qu*en soit 1 origine^
ressemble de fort prés à celui de Tïmoneda, mais il n'est pas
probable quMl en provienne. C'est le mari qui raconte Thistoire,
voyageant pour distraire sa douleur après la mort de sa femme.
— Moslema^ de Mocca (Moka) vient ù la cour du roi de Zibit
(Zebid), et gagne sa faveur, si bien que le roi lui fait épouser la
fille de Témir Surmassak, Rasimi, Appelé à Mocca par une
maladie de sa mère, il se divertit avec de jeunes marcliands.
Comme il vante sa femme, l'un d'eux, nommé Kachek, qui est
de Zibit, gage cent roupies qu'il la séduira en deux mois, et
part pour Zibit, Quand il revient, il décrit à Moslema sa
chambre et ses meubles, ainsi que les deux signes de sa femme,
« trois grains de café sur la cuisse, une petite souris bien
veloutée sur le dos » (cf. Batacchi). Moslema paie et revient à
1. Herodiano lui âvaît donné sa Htle con cmntas riqui^m y pQmimts tfnia,
COH ial pacfo y condkhtt qttëh hahia df iuUtniar iodos hs dias de su vida,
2. Jl est Mns doute d^ïïivré plus tard^ mais ce n'est pas dît.
3. Dans £/5 JvanUtns (TAbdalta^ fih tPHmiif... iraduiUs sur h manuscrit
arubi îrmtvé à Batavia par M. dt Sandissan^ y édition, Paris, 1745, 2 vol*
111*11 (t. lî, p. 122) [par Jean-Paul Btgnon (1622-174}]. Ce livre parut en
1712-14; il ti^est pas exact de dire qu'il fut publié « sotis k nom de Sandb-
son », Tous les orientalistes regardent comme fictif cet ouvrage prétendu-
ment arabe.
$14 — — ^ pj^j^j^
Zibit, voulant tuer sa femme, mais il veut le faire sûrement
(dans Timooeda, tl Taîme encore trop pour la tuer de ses
mains). II dit que sa mère à Mocca veut %'oir Rasimi, obtient
avec peine le œnsenteraent du père, et l emmène sur un bateau
dont le patron lui obéit. Au Heu d'aller à Mocca, il mène sa
femme à une île désene, où il rabandonne endormie, — Le
vaisseau le conduit de là â Surate, où U passe deu3i ans comme
soldat Ccf* B*bî, B^ba), après quoi il revient à Zibit, où il raconte
ison beau-père qu'une tempête a brisé le vaisseau, que tous ont
été noyés sauf deux matelots et lui-même; que, jetés sur une
plage d'Afrique, les trois survivants ont été vendus à des cor-
saires, et qu'enfin, ces corsaires ayant été pris à Surate, il a
recouvré la libené. L'émir, feignant de le croire, l'envoie au
bain, et l'y fait arrêter. Devant le cadt il raccuse d'avoir &it
périr sa fille, et le prouve par les déclarations d'un marinier et
d'un témoin qui avait entendu son pacte avec le patron du
navire. Moslema est condamné à être brûlé, mais, sur le conseil
d*un archer, il en appelle au roi. Amené au divan, et sommé de
dire ia vérité, il la raconte, o Tu es plus coupable que tu ne le
crois *s dit le roi; « qu'on amène les autres coupables i>. On
amène Kachek avec une vieille, et le roi ordonne au traître de
renouveler son aveu. Il raconte alors qu'il n'a rien pu obtenir
de Rasimi \ et que la vieille, qui était bien re^ue dans la mai-
son, n'a pas mieux réussi ; qu'alors il se fit décrire «la chambre
et la personne de Rasimi », moyennant quoi il put décevoir le
mari. Moslima est indigné, mais dit qu'il mérite b mort pour
avoir tué sa femme. « Ton juge va venir ^ », dit le roi, et
Rasimi paraît en somptueuse parure. Elle dit qu'elle ne peut
blâmer son mari, qui n'a agi que par honneur, et qui n'a pas
voulu verser le sang de sa femme; elle prie d genoux son père
et le roi de pardonner à Moslima, ce qu'ils font, Kachek est
chargé de fustiger la vieille, tous deux sontbannb,et leurs biens
confisqués* — Rasimi raconte alors son histoire. A son réveil
dans nie déserte, elle s'est lamentée, mais a deviné qu'elle avait
été calomniée. Avec des ciseaux, du fil et des aiguilles, elle a
n Dans Timonrdâ, il ri*a pu être admis chct là femitie, au lieu qu'ici il lui
a fait des déckrations d'amour*
3. Œ la FUhm^.
LE CYCLE DE LA ^ GAGBURH 3» 525
accourci ses habits et caché ses cheveux, se déguisant en homme.
Elle à vécu de coquillages, d*herbes et de mieL L'île étant cou-
verte d*a!uèsj des marchands d*Hadramath \ venus pour en
(récolter^ l'ont recueillie, A Hadramath, sous le nom de Soliman,
'^ette a rendu de grands services au sultan par sa connaissance
du calcul, et elle est devenue son grand douanier. Le roi de
Zibit étant venu visiter celui d'Hadramathj Soliman lui a
demandé de Temmener, et celui-ci y a consenti (elle a tout
raconté au roi de Zibic). Revenu à Zibît, le roi a interrogé
Surmassak sur le sort de sa fille, qu*il lui a rapporté d'après les
témoins. Rasîmi n'a voulu se faire reconnaître que quand son
innocence serait établie ; on a arrêté Kachek, qui a avoué sa
fourberie. C'est à ce moment qu'est revenu Moslema, et c'est
Rasimî qui lui avait fait dire par l'archer d'en appeler au roî.
La ressemblance de ce conte avec celui de Timoneda est
tellement frappante qu*il faut, soit quMls aient une même source
suivie de très près, soît que l'un vienne de Tautre. Or, si on
remarque que, partout oii ils diffèrent, c'est Timoneda qui se
rapproche des autres versions, tandis que Bignon est isolé, on
conclura que Bignon n'a fait qu*arranger le récit de Timoneda,
dont il a seulement transposé les éléments pour obtenir un effet
plus dramatique. Ce résultat vient confirmer l'opinion de ceux
qui pensent que le livre de Bignon n'est pas traduit de l'arabe,
mais compilé par lui à l'aide de diverses sources.
Timoneda, comme Va montré Liebrecht % a surtout imité des
nouvelles italiennes; toutefois, il n'est pas exact de dire que
celle-ci soit tirée de Boccace ; nous avons vu qu'elle se rattache
de bien plus près au groupe dont fait partie Francisco (B^b);
mais il est très possible qu'elle ait une source italienne perdue.
Du moins trouvons-nous une ressemblance frappante entre sa
seconde partie et la seconde partie d'un conte du Mont ferrât,
d'ailleurs singulièrement altéré,
^ ^ 3: La nwglie calunniaia K — Le début est très bizarre : plus de
gageure; il s'agit de deux frères, dont l'aîné a épousé la fille trè^
belle d'un bouvier. Le frère, jaloux, se dit qu elle doit avoir
K Ou Hadramaut^ Hiidramaout, région mèndîoniiicdr TArabLe*
1. Dunlop-Lkbrotht, p* 500.
3, Coniparctti Cl d'Ancona, Km^elk popohri Uaîiam^ n^ UL,^,
526 G. PARIS
une tare; i! Tentloft ptf un oarcotiquej la découvre, ec voit
sa jambe une marque t^tisée par une brûlure; un jour que le
mari vante la beauté de sa femmes ^ rèvèlc ce défaut- Le mari>
croyant qu'elle lui a été infidcle, la Hvfc à im capitaine de
navire, qui doit la jeter à Teau et lui rappartcr ses vêtements.
Par pitié, il remplace les vêtements de la femme par ceitxd^un
marin, la laisse sur une île déserte, et rapporte ses vètemeats au
mari. Elle entend sur un arbre des sorcières dire qu^une infu-
slon de fleurs cueillies à cet endroit guérirait le fils du roi
qu'elles ont ensorcelé. Recueillie sur un navire, elle guérit le
prince et demande pour récompense d*ôtre juge dans la ville où
demeure son mari. Or celui-ci est cité par son beau-père pour
dire ce qu'est devenue sa femme : le mari savait déjà (com-
ment Tavait-il appris?) qu'elle était innocente ^ et il était
plein de remords. Elle se Êiit reconnaître^ pardonne aux deux
frères, et ils vivent heureux*
I
I
B*b : Im femme ra^ndique eîle-mime son droit à la cmir du roi
timmn de la gageure.
B^bl ; Pas de Iravesûs^ment nî de ûgne ; combat singulier de la femme
et du traître*
1, Eknâ\ — Ce petit poème du xiv* siècle nous est arrivé
en assez mauvais état dans les deux manuscrits qui nous l'ont
conservé; mais Tauteur lui-même (malgré ce qu'il dit au début)
est incohérent et maladroit^. Son récit se place dans le cadre
de l'ancienne épopée française, Elena, l'héroïne, est la fille d*Ar-
naldo di Gironda, Ton des fils d'Aimeri. Tous les noms sont
français ou provençaux, Roger ou Oger (== Vrger) de Monîpel-
Ikr^ Garnkr {^d^Ollramare^^ Gironda; le roi est Charlemagnc
d'après Tun des manuscrits, Aluisi d'après l'autre. Tous ces
indices font croire à une source française ou plutôt peut-être
provençale* Amaldo di Gironda envoie sa fille Elena * à Char-
ï, Cant4irt di mudûttna Elàm impératrice. Livorno» 1880 (pour les oooe^
Soria-Viulî, p. p, O* Targioai Tozzqxû âux frais de Od, Viiali),
1. C^étatt un simple mniml^ra de place.
\. Et le est appelée mécaniquement impératrice k cause de samte Hélène,
toujouri» ainsi ^^ualjfiéc^
LE CYCLE DE LA ft GAGEURE *> 527
lemagoe (ou à Louis), qui h marie à Rugieri da MotupoUir^ poks-
taâidi Parigî : elle en a deux fils. Dans une scène curieuse de
vanii Rugieri loue la beauté de sa femme '; Gueniieri d'Ohra-
mare prétend qu*ii a déjà fiait d*Elena tout son talent*-
Rugieri le provoque, mais Guerniert répond qu*il peut prouver
son dire sans bataille ; il apportera d'ici un mois les joyaux et
le i^ekito d'Elena ; il donne en caution ses trois enfants. U
partj déjà découragé, arri%'e à Gironda, et se met à se promener
autour du château. Au bout de trois jours, unh cameriera se
met à la fenêtre et Tinterroge; il raconte la gageure et lui
promet de rèpouser *, sî elle Taide- Elle lui décrit alors le
palais d'Elena, sa chambre et (bien vaguement) sa beauté, et
lui donne un de ses trois voiles, un anneau et un smggiak{cdn'
ture). Arrivé à la cour, Guernieri montre les joyaux (il ne
redit pas la description); le mari tombe isirangosciato (et le
livret allemand), et s'avoue vaincu. Le roi dit à Rugieri
qu'il doit mourir (bien que cela n'ait pas été clairement
stipulé)* Rugieri demande le temps d'aller à Gironda. Il entre
dans le château, tue tout ce qu'il rencontre, tue ses deux fils
et veut couper la tète à Elena, mais il « se repent », et la lance
par une fenêtre dans un fleuve rapide ; après quoi il retourne
à Paris, Dieu sauve Elena, qui rentre dans son palais devant
ses gens. Elle avertit son père, retiré dans une ville près de la
mer, le priant de venir en force à Paris pour châtier son mari^
qui a tué ses deux fils^* Elle-même part avec une grande
troupe* Rugieri est venu se livrer au supplice : on va le pendr;
quand Elcna arrive, et dit que son mari est innocent ainsi
qu'elle^mème^. Elle demande à être confrontée avec le traître.
Il arrive et dit qu*il Ta possédée et qu^elle lui a donné les
joyaux- Mais Elena affirme qu'il ment, qu*il les lui a volés.
Guernieri persiste : alors elle le provoque, et refuse un chani-
K II ne vante que sa beauté, sans doute par sîmpîe omission du poète,
2. Cf, Antiquario, la SitiMla^ le Guanto d'oro, Framkco (?), la byline.
î. Cf. Frvtmi$C0y la byline.
4, « Pour châtier son roari m n*cst pas dans le texte : lacune ^vîdentt,
commune aux deux manuscrits.
5. On ne dit pas comment elle est inforniêe : à la str. xly, elle fait dire k
son père qu'elle ne ^it pas pourquoi Rugieri a tué ses 6ÎS.
528 G- PARIS
pioti* Dans le combit (où on ne voit pas qu elle s* habille enl
homme), elle lui coopc le bras, sur quoi il a%aue qu'il lient
tous les joyaux de b camerûra ; Ll ^i décapité ec la mmeriera
est brûlée»* Rugieri» mis en liberté, mais plein de remords
et de crainte^ s'enfiiit, Aroaldo di Gironda arrive sur les entre-
faites, sa iîlle lui raconte tout; il veut tuer Ru^eri, mais
Elena lui dît qu'il se repent» et demande sa grâce. On le
retrouve et on célèbre de nouveau son mariage avec Elena;
les époux retournent à Giionda*
B*bO : Tràvestissci»eût; pas de signe; pas de combat singulier.
Celte forme comprend trois versions, dont aucune n*est 1
ancienne ni peut-être primitive; elle ressemble beaucoup à la '
précédente,
n La bylintXpTi plutôt pobyvûlchkhina)Tuss^ *. — Elle débute
par une préhistoire qui n'a rien a faire avec notre conte* —
Thedka (ou Alècha, etc-) prétend être depuis trois ans Tamant
de la femme; le mari s*avouera convaincu, si Thedka loi
apporte son collier d'or, C*esî Vbdimir qui fixe b peine que
devra subir le perdant. — Le galant se promène en vain devant
la maison ; il fait venir la chambrière * et lui promet de
Tépouser, si elle Taide (cf. Francisco^ Elma ). Elle lui apporte
le collier d*or; le mari, convaincu, est relégué au dernier rang (il
soigne les poules comme dans le conte norvégien, B'b3). Il vend
sa femme, sans la prévenir, à un capitaine de navire, qui l'emmène
en Portugal (histoire de la force surhumaine de la femme, qui
devient capitaine). Elle fait le commerce en Portugal etdevieor
roi. Elle vient à Kiev, se fait reconnaître (au bain) par son mari,
et se présente avec lui à Vladimir, On recherche Tedka, qui
avoue^ son crime, et qui est déoipité (il n'est plus question de la
1. On Im fait donc venir, mus ce n'est pas dît. Ht Je plus surpicnaot, c'est
qu*AiTialdo dî Giroûda, arrivant é\idemmcnc ea même temps, voit de loin le
feu qui la brûk, et croit «^ue c'est ù fille qui a iié cQuâAmnéx, au bûcher»
Peut-être G uemicri avait-il a men^ la f4w«/er*a ivcclui,
2. Voy. Hambaud» La kunU ^i^ut, p. 117;, Wesselofsky, JouJHormtkiyA
hyliny, 18S4, El, p* 01 ; Jmrmi du Minhihw de timirmlim fukîiqm'^
t:a:xui(j&80. p- i6é».
l. Le rôk de k vletUe est absurde et inutile.
LE CYCLE DE LA ** GAGEURE » 5^9
cliambrière, qu'il a sans douce épousce comme dans Francisco);
les époux retournent en Portugal.
Les réflexions de M, Rambaud sur a: conte sont toutes à côté
et ne portent en général que sur des traits (ceux de h préhis-
toire, par exemple) qui ne lui appartenaient pas ^ M. Wessebfsky
est naturellement plus critique, mais il n'a pas suffisamment
discerné dans ce récit (dont il cite de nombreuses variantes dans
les contes) les traits que la tradition orale russe a ajoutés aux
éléments primitifs. II reconnaît bien que la mention du Por-
tugal indique une origine étrangère, mais il pense qu*un conte
occidental s est mêlé à une version russe originale. Ce n'est pas
• probable, et il ne faut voir dans les traits propres aux versions
'russes rien autre chose que de ces additions que les conteurs
populaires mêlent aux récits de provenance étrangère.
2. Conte juif-allemand *. — (Préhistoire*) I^e fils du vice-
roi de Portugal, marié h une jeune fille belle et pauvre, arrive
dans une ville étrangère, où il entend un étudiant se vanter
qu'il séduirait sa femme, s'il le voulait; on gage une forte
somme. L'étudiant arrive, se promène en vain devant la mai-
son, 11 gagne une anciermc nourrice, qui obtient de passer une
nuit chez la i'emme, endort cclIe-ci, voit son signe (noir, sur
le côté), et prend des joyaux. Le prince, convaincu, emmène
sa femme sur mer et Tabandonne dans une barque. Elle
s*habille en homme, devient ministre du suzerain du prince',
puis est faite par lui vice^roi de Portugal Elle interroge le
prince, qui raconte tout, puis Tétudiant, qui, menacé de la tor-
ture (?), avoue sa perfidie. Il est brûlé avec la vieille. La femme
cède le trône à son mari.
Ce conte, comme Ta remarqué M, Wesselofsky, se rapproche
beaucoup du récit russe : il fiut remarquer qu'il a le motif du
sigoe^ que te récit russe ne connaît pas.
j. Lu redi Spa^na c lu Milordn inglisi K — (Préhistoire.) Le
1, Voy. M. Grûnbaum, Jadmhikuische ChmtomaihU (Leipzig, iSSi),
p. 421, Corne du xvcii« sièdc, et, d'après Grûnbaumi traduit de l'aile-
mand.
2, Soû talent d'écrivain h fait demander par le suzerain au vice-roi chez
quj die était employée,
j, G. Pitre j Friï/«, noveili i f^ccùnti p^ari skUianif n« LXXiv, — Le titre
est mal donné : l'iiéroîne est d'Espajçne^ raaîs non le roL
xxxii 14
jJO G* PARIS
niilord voit U reine ù sa fenêtre; il s'adresse à une vieille, qui
lui conseille d'envoyer à k reine trois présents ; elle-même
se charge de les porter, mais au lieu de les donner à la reine,
elle les lui vend. Le milord donne un bal, la reine y vient,
mais ne daigne pas lui parler. lien est indigné, et, dans un café
où le roi se trouve déguisé, il raconte comment elle a accepté
des présents de lui* Le roi livre sa femme à un capitaine de
navire, qui a ordre de la tuer et de lui rapporter sa langue* Il
coupe (et sale) celle d'un chien, et abandonne la reine sur une
île déserte. Recueillie par un navire, elle se fait conduire au
Brésil, dont Tempe reur est frère du roi* Habillée en homme,
elle se fait clerc de notaire et devient célèbre par son talent de
scribe (cf. le conte juif-allemand). Le roi la fait %'enir, la prend
pour son secrétaire, puis pour écuyer. Le roi a des remords
et tombe malade; le peuple est mécontent, La reine-mère pré-
vient son autre fils, Tempercur du Brésil, qui envoie son
braccien en Portugal comme vice-roi. Le vîce-roi calme le
peuple, puis il interroge la reine-mère, qui raconte Thistoirc,
On fait venir le milord qui dit ce qu'il sait, puis la vieille, qui
avoue son imposture. Elle est brûlée, le milord envoyé à la
cîdliHina; les époux se réconcilient.
B*Ï>1II : Trivçstissement, signe.
I, Lt miracle d'Oim^ roi d'Espagne *. — Cette œuvre, ou les
personnages sont comme des vraies marionnettes^ est d'une
extrême faiblesse et d'une insigne gaucherie. Li source en est
probablement un roman d'aventure où la Vierge ne jouait
aucun rôle; elle est introduite dans le miracle d'une façon
maladroite, et qui détruit même le récit primitif.
A travers les fâcheuses altérations du dramaturge, nous
pouvons à peu près reconstituer ce poème primitif perdu.
I. Miracks de Noire -Damt, p. p. G. Paris ei LU. Rûben» i. \\\ n° xxvm.
Ces miracles se ressemblent tous beaucoup (Schmell, AiHgahn und jbfjand-
Imgen, XXXIU, aJmet vingt-sept auteurs, ce qui est douteuît); îb ont éih
composés, vers J580, sans doute à Paris, pour une canfrérie de k Vierge,
Ils imroduïserjt Noire-Dame dans mie fouie d'histaires qui, parfois, sedéaouent
sans miracle. C*est le cas pour celui qui nous intéresse.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE a Jjî
L'empereur Lotoire* a deux serviteurs, Oton (son neveu), ec
Bérenger, qui briguent lii main de Denisej fille du roi d*Es-
pagne; c'est Otun que Denise préfère; il l'épouse; le roi
d'Espagne leur cède son royaume, et se retire à Grenade chez
son frère. Oton quitte sa femme pour venir à Rome et lui
laisse, en .gage d'amour> un os d'un doigt de son pied*. A
Rome, Bérenger, qui est de la race des traîtres, gage sa terre
contre le royaume d'Oton qu'il séduira Denise; sa gageure sera
gagnée s'il peut décrire un seing que Denise a sur le corps et
rapporter Tos. Venu à Burs, il la rencontre allant à l'église
(cf, le livret populaire allemand, B^aj) et lui fait, en calom-
niant son mari (cf* Post humus) des propositions qu'elle
repousse. Il gagne la chambrière et obtient d'elle Tos et la
description du seing, Oton s^avoue vaincu et vient a Burs pour
tuer sa femme qui> prévenue \ s'enfuit, sliabille en homme^ et
se met au service de son père, le roi Alfons, qui ne la reconnaît
pas. — Oton, désespéré d'avoir vainement cherché Denise, s en
va en paknic. Le roi Alfons, apprenant ce qui s'est passé,
déclare la guerre à l'empereur et arrive devant Rome; Denise,
qui a pris le nom de Denis, se fait envoyer comme messager
auprès de Tempereur ; elle accuse Bérenger; chemin faisant, elle
a rencontré Oton, qui est revenu misérable et l'a fait arrêter
(cf. Posîfmmus). Elle fait le combat contre Bérenger *, qui avoue
son crime K Denise pardonne à son mari.
I. Etait-ce un empertur de Rome, comme en d'autres poèmes d'aven-
liîrc? — Sur ce nom de Lotaire, cf. Ohle, p. 44, n. i ; sts rapprochements
sont peu probables. — La forme Lùtairt tndique-t~dïe une source latine ?
ï. Ce don est bizarre {tL Ohlc, p. 44, n, 3), mais se rattache sans doute
i I4 forme yl de notre conte.
J. Peut-être était-ce le serviteur chargé de la tuer qui l'épargnait ei lui
donnait des habits.
4. Dans le Mlrack^ elle s*offre à combattre, mais Oton» que Dieu et
Notre-Dame ont ave ni, se révèle comme mari el revendique le droit Je Caire
la bataille; elle le lui cède. Il y a là certainement un arrangement maladroit^
résultant du Tait que k dramaturge a voulu introduire un miracle : tout le rôle
de la' femme devient inutile. M, Dhle comprend les choses autrement, et veut
que le miracle soit primitif.
%. On va .\ Burs pour exécuter le traître et sa complice.
SJl G. FARÎS
2, Le roi Flaire et la belle Jelmnm '. — Ce petit roman en prose
ne paraît pas fait d'après un texte en vers. Il comprend deux his-
toires qui n'ont aucun rapport Tune avec Tautre, bien qu'elles
se rejoignent à la fin, et dont la première, celle du roi Floire
d'Aussai et de son triple mariage, n'a aucun intérêt ', L'his-
toire elle-même est pleine de gaucheries, de contradictions et
d*inutililés, bien qu'elle plaise par la Éicilité et la grâce du style.
Elle semble provenir d*ane tradition orale, très arrangée par
l'auteur, où diverses versions s'étaient mélangées. Nous la ran-
geons ici parce qu'elle contient, comme le miracle, un combat
singulier, et parce qu'elle fait en quelque manière transition
entre ce groupe et le suivant, où la femme est purement passive;
maiselleprésenteplusieurstraitsqui ne se retrouvent nulle part^ et
qui sont inventés sans douce par Tauteur lui-même, ou empruntés
par lui à d'autres contes K II faut noter l'importance qu'y prend
le sentiment religieux, bien qu'il n'y ait ict aucun miracle.
Un chevalier « ki manoit en le marche de Flandres et de
Hainnau », en reconnaissance des services que lui a rendus un
écuyer très pauvre, nommé Robert, lui donne quatre cents
livrées de sa terre, lui offre sa fille Jehanne en mariage, et
Tarme chevalier. Mais, à peine adoubé, Robert annonce qu'il a
jadis fait vœu de partir en pèlerinage pour Saint-Jacques de
Oimpostelle dès le lendemain du jour où il aurait cté fait che*
valîer : le lendemain matin donc, il épousera Jehanne^ puis se
1. Pubtt^ d'stprts k maauscnt unique: i« par Fr. Michel en 1838; i» par
Fr. Michel et Monmerqué, Aneim ihédire françah (Paris, 1841), p^ 417;
je* pat Moland et d*Hérkauït^ NùttvelUs /ranimer en prose dti XII h iùcli
(Paris, 1S56). — Il est du xm= siècle: M. Oh le (p. 31) remarque qïi*uîi
croisé débarque i Aigues^Mortes^ ce qui lui paraît indiquer le milieu du
xuje siècle. — La langue est pi<:arde- wallonne. — Noieice quedisent Moland
etd'Hêncauli, p. xxxiii, d'une imitation du kv* siècïe (?).
2. Ce roi* qui n'a pas d'enfant de sa femme, la quitte, en épouse une
autre qui demeure également stérile, puis épouse Théroine de notre rédt.
L atiieur semble avoir voulu récompenser celfe-eî de sa belle conduite en lui
faisant épouser un roi : c'est un trait de fort mauvais gôût» et qui fausse tout
l'esprit de notre conte, où la viaie récompense de la femme iidèle cl calom-
niée est Tamour ei Testime de son mari.
;, Comme le rèle de ta femme, habillée en homme, atiprài de son
man.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » S 33
mettra en route- Le père le blâme, ec un chevalier de k cour,
nommé RaouL se fait fort, s'il part, de séduire Jehan ne avant
son retour ; Robert gage contre lui ses quatre cents livrées de
terre, et tous deux vont « recorder lor convenances » au père,
qui, singulièrement, se borne à prendre acte de la gageure. —
Le lendemain matin, en effet, après avoir épousé Jehanne,
Robert part pour Saint-Jacques sans consommer le mariage,
et laissant sa femme avec le galant (cf* le conte de Woltï}.
Raoul gagne à prix d'argent une vieille, nommée Hierseut, « qui
lïianoii avec la bielle dame ", et qui essaie de la persuader K
Comme ses tentatives sont restées impuissantes, elle introduit
un jour Raoul dans la chambre de Jehanne, tandis qu'elle est
dans son bain. Il veut lui faire violence, elle se défend, et pen-
dant qu'elle se débat, il remarque « une noire take ke elle
a voit en la diestrc ainne » ; il Temporte vers le lit, mais choit
parterre avec elle; elle se relève avant lui, « et prist une
buse et en ferimon seigneur Raoul par mi le visage, si qu'ele
Ij fait plaie grant et parfonde, et li sans en cîet a tiere. Et cant
mesire Raoul se senti ensi navré, si n*ot pas grant talent de
dosnoiîefj ains se le%-a, et s*en ala tout le cop fors de la
chambre, » ■ — Retour du mari : il ne peut voir dès son arrivée
le galant, trop blessé pour venir à la cour; la nuit venue, il
consomme son mariage, et cVst le lendemain seulement que
le traître lui révèle quelles u enseignes » il a remarquées sur le
corps de sa femme. Le soir, Robert les vérifie, ne dit rien à
Jehanne; le lendemain il s'avoue vaincu : il est dépouillé de
sa terre et part aussitôt en pauvre équipage (cf, B'), Mise au
fait par son père, jehanne, sans protester aucunement, quitte
le château à rinsu de tous, travestie en homme, et se met en
quête de son mari. Elle le retrouve, lui dit qu elle se nomme
Jehan (cf. Denis- Denise dans le Minicle% devient son écuyer,
le secourt de son argent et de ses services. — Ce récit est tout
à tait invraisemblable : Jehanne pourrait ici prouver son inno-
cence par le fait même que son mart a dû la constater la nuit
ï . Le rôle de Hiersent ressemble à celui de la vieille chez Boccace et chez
queïquf 5 autres conteurs ; mais ici, il ne paraît pas qu'elle se pr^Slc a la super-
cherie par laquelle le galant trompera le mari ; elle croit simplemenl le ser-
vir diin$ ^on amour.
s 34 G. PARJS
de ses aoces» par ta vieille (dont il n'est plus question)^ par la
blessure du traître. Dans les autres formes, elle a besoin d'un
moyen extérieur pour confondre le traître, parce qu'elle ignore
comment il s'est procuré les indices ; mais ici elle le sait, et
pourrait sans peine le démasquer. Sans rien tenter pour faire
apparaître la vérité, Jehan se retire avec Robert à Marseille, y
tient pendant plusieurs années une hôtellerie, subvenant par là
à Tentreiicn du mari, — ^ Cependant, le traître, pris de remords
au cours d'une maladie, se confesse à son chapelain qui lui
ordonne de faire le pèlerinage d^outre-mer et d*avouer sur la
route son péché à quiconque lut demandera pourquoi il se rend
aux lieux saints. Hébergé à Marseille dans rhôtellerie de Jehan
et reconnu par lui, il lui raconte donc son méfait : aveu qui ne
sert à rien, car Jehan le laisse poursuivre son pèlerinage et en
revenir sans avoir rien dit à Robert. Au bout de sept ans»
Jehan et Robert rentrent dans leur pays, et Robert se fait
reconnaître de son seigneur. On s* attendrait que Jehan se ser-
vît ici de l'aveu du traître, comme chez Boccacc, en le lui fai-
sant répéter; mais, sans en rien (aire, il se contente d^affirmer
que Raoul tient à ton la terre de Roben, et le provoque en
combat singulier. Le mari, bien passif jusque-là, revendique k
droit de combattre : il en est de même dans le Mirûclf; que
penser de cette coïncidence? Dans le Miracle ^ il sait Finnocence
de Kl femme, mais, ici, il Tignore ; on ne comprend pas com-
ment, ayant jadis avoué sa défaite^ tl affronte maintenant cette
épreuve : peut-être, dans la source de Fl&irf d Jihanne^ Técuyer
lui avait-il raconté l'aveu de Raoul *, On peut admcnrc que
Fldre et Jehanne et le Miracle avaient une même source^ où
déjà {ci. Elmd) le mari se substituait à la femme pour le com-
bat singulier, — Victoire du mari ; aveu du traître ; Jehanne
ne se fait pas encore reconnaître; elle se retire chez une sienne
cousine, à qui elle s'est confiée, et pendant quinze joun; se fait
baigner et <ïaaisierde tous poins » avant de reparaître enfin j
vêtue en femme, devant son père et son mari. Par là cette fia
rappelle Aocassin et Niœteite.
I. Ce pusage semble findlqucr (éd. Moomerqué et MkheU p. 421; :
« Gratis fu b joie le jour d rendcni^ pors du irtour de Robcn ce 4c Jefajiii
dans kur pays], et tant <iuc misire Kcîbicrs coota a Jehan rooobon et h
fiimiatlle et de {gu F£I êmmt iâ tirrre 4 tort* m
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » Sîî
C. MAUVAISE FOI DU GALANT; INDICES; SON AVEU SURPRIS;
ROLE PASSIF DE LA FEMME.
Jusqu'à présent, dans toutes les formes qui ne présentent pas
la substitution, et montrent, paV conséquent, le galant de mau-
vaise foi, nous avons vu la preuve de l'infidélité fournie par un
signe sur le corps de la femme, et le dénoùment amené
par l'héroïne, soit qu'elle porte une fausse accusation contre le
galant qui ne l'a jamais vue, soit (habillée en homme) qu'elle
recueille ou obtienne l'aveu du traître, soit qu'elle le pro-
voque ou le fesse provoquer à un duel judiciaire. Dans la ver-
sion qui nous reste à étudier, les choses se passent autrement :
il n'y a pas de signe sur le corps de la femme, le secret du
galant est surpris par le mari, et c'est lui qui retrouve sa
femme et provoque, par un duel judiciaire, le châtiment du
traître.
Cette version comprend deux poèmes français, le Comte de
Poitiers et le Roman de la Violette. Les ressemblances étroites qu'ils
présentent ont fait penser que l'un était dérivé de l'autre; nous
étudierons cette question à propos du Roman de la Violette y mais
nous dirons tout de suite que pour nous elle est résolue, que la
Violette, postérieure au Comte de Poitiers, en est certainement
dérivée, et nous nous occuperons pour l'instant du premier en
date de ces romans.
C'est une œuvre singulière ', pleine de charme et de bizar-
rerie, barbare et rude, avec des passages pleins de grâce et de
sensibilité. Elle est courte, si Ton néglige la seconde partie
(v. 1229-1718), l'histoire du fils de nos héros, qui n'a aucun
rapport avec la première. La date en est assez incertaine, anté-
rieure en tout cas à 1230, date approximative de la Violette^.
Par le style archaïque et raide, par la liberté de la rime, par la
grossièreté violente des mœurs, le poème semble très ancien ^ ;
1. Éd. Fr. Michel, Paris, 1831.
2. M. Ohle conclut de certains traits que le Conite de Poitiers est antérieur
à la réunion de la Normandie à la France, ce qui est très probable. Le
choix des héros semble inspiré par le désir d'expliquer l'union du Poitou à h
Normandie.
3. M. Ohle remarque avec raison qu'il n'y est fait aucune allusion aux
romans bretons. On peut penser i 1180 environ.
53é G, PARIS
mais certains traits linguistiques ue permettent pas de le faire
remonter très haut : les allusions au cyck* troyen, kNardssuSf
au lignage Aimeri, le placent en tout cas après 1170, L'im-
pression d'archaïsme résulte plutôt de ce que Tauteur, jongleur
évidemment, était étranger au milieu courtois. La langue
du poème est picarde, et probablement de la partie de la Picar-
die qui a voisine la région wallonne.
Au début se trouve un très intéressant résumé de h légende
de Pépins sous le r^^gne duquel est placée l'action. A sa cour*
le comte Gérard de Poitiers vante spontanément sa femme.
Rose, cousine de Pépin (v. 4^4)5 ^^^^ une sorte d'effusion à la
fois poétique et grossière. Le duc de Normandie se vante de la
séduire en un mois\ Après qu'il s'y est vainement essayé en
une scène fort brutale, une vieille nourrice va au-devant de ses
offres, et enlève à la comtesse ^ son anneau, dix deses cheveux, et
un morceau, grand comme unbesant, âummitd^sacoie. Le galant
revient àParis et montre ces enseignes. Le comte Gérard» funeuXs
envoie son neveu, Jofroi ^5 chercher sa femme. Elle vient et ne
peut désavouer les indices» mais nie le fait. Malgré ses dénéga-
tions, le roi déclare que Gérard a perdu sa gageure* Il parc
en emmenant sa femme à cheval devant lui^ Venu dans une 1
forêt, il va tuer Rose : mais elle lui montre un lion qui \*a se
précipiter sur lui* : il le tue et laisse sa temme dans la tbrêt sans '
lui faire aucun maL Harpin, autre neveu du comte, l'y trouve et
remmène malgré elle K Cependant Gérard se décide à aller à
ï. Voyez G* Paris, La îégtndf de Pépin ^ dans les MékngtsJuUiu Hatmt*
a. On appreod plus tard (v. 414) qu'il l'avait en vtin demandée en
mariage.
\. l\ manque sans doute des vers disant qu^elle fait baigner Rose (cf.
4. Œ te rôk du neveu (anonyme) dans GitUlûume de Dok.
5. Ce trait rappelle Ertc^
6. Ce tion dans une forêt de France poorralt faire croire à une soun:c
orientale; mais cf. Ivain, Aucaisin, eic, ; les contes venus d*Oricnt lavaient
intrûdau dans le « matériel roulant » des romans. Ce lion semble amené
dans notre poà me par Notre Dame (cf. 423, 543, 823); m^îs on aurait lort
d*en conclure (comme on a fait) que nous avons afiairc a un conic
dévot.
7. Il est bien invralKmblablc qu'elle ne dise pa% quî elle est, ce qui
cmpécheruit Harpîn de la poursuivre de ses obsessions.
LE CYCLE DE LA « CAGEUKE » 557
Poîiîers tuer le duc pour le punir de ]*avoir déshonoré. 11
change d'habits avec un pèlerin (cf. Orsmt de Bi'âuvais^ etc.) et
arrive à Poitiers ; niaisj comme le duc lui fait donner h boire et
àmanger> Gérard se dit qu'il ne peut tuer son hôte. Il entend
une conversation du duc avec sa complice qui lui révC^le [a
véritét et, tout heureux, part à la recherche de sa femme. Il
arrive au château de Harpin', et lui reprend Rose en une scène
violente et poétique. Il arrive avec sa femme et défie le duc\
Celui-ci, vaincu en combat singulier, estpenduet traîné; la vieille
est affreusement mutilée. Les époux rentrent heureux dans
leur pays.
Tel est le sommaire de cette œuvre bizarre et attachante.
L'absence du motif du signe, que présentent toutes les autres
versions, peut faire croire qu*elle est dérivée de A indépendam-
ment, c'est-à-dire que deux conteurs indépendants ont eu
ridée de remplacer la substitution qui trompe le galant par une
supercherie du galant aux dépens des époux, cette supercherie
ayant d'ailleurs le même résultai que la substitution, c'est-à-dire
de faire croire pour un temps à la culpabilité de la femme.
Malgré les abréviations et les lacunes du Comte de Poitiers^ il
est, en effet, peu admissible qu'il ait supprimé le signe, qu'il
avait Toccasion si naturelle de mentionner, lors de la scène du
bain, et qui fournissait une preuve bien meilleure.
Le Comte de Poititrs est visiblement une œuvre archaïque et
simple, bien que la date n'en soit pas très ancienne; la Viokiît ^
est une œuvre raffinée, un roman mondain , un roman à la
mode, avec tout ce que le mot comporte de qualités et de
défauts. L'auteur s'est nommé; il s'appelait Gerbert (on Gir-
t. Il y a ici évidemment une lacune : il devait apprendre que Harpin
Tavah trouvée.
a. 11 est singulier que Pèpîn^ qui avâii refusé un jtnsf (v. 428), accepte ici
un duel : il faudrait que Gérard dît qu'il a entendu Taveu du traître ^ ce qull
ne fait pa^. Ceire lacune, et peut-être celle qui a été indiquée â la note
précédente (et aussi Tallusioa des w. 1009 5$*) sembieraieni prouver que
notre poème n'est que î abrégé, parfois maladroit, d'un poème plus :inden.
Notez aussi à cet égard les vv. 306, 595.
l. Roman itf la Violdtf ou df GMtnî de Nei^s... par Gihri de Motttreuil,
publié.., par Francisque Michel (Paris, Silveatre, î8j4, tiré à 300 «em-
plaires)*
53S G. PARIS
bert, Gisben, Gîberi) de Montreuil V. H a composé son œuvre
pour Mirie, comtesse de Ponîhieu depuis 1221, BUc d'Aclb.
(fille de Louis VII, fiancée à Richard Cœur de Lioo) et de Guil-
laume ni. Mariée en 1208 àSimon de Dammartin» qui prit parti
la révolte de 1214 et fut exilé» elle vit son comté confisqué avec^
celui de soD mari (le comté d*Aumalc). Die y remra en 122s
moyennant oûe cession partielle à Louis Vil ? ; mais ce n'i
quVn I2Î0 que Simon de Dammartin revint en France *m|
Comme Gerben ne parle pas de son mari, et qu'il célèbre ta
cour de la danu de Pontliteu, il est infiniment probable qu'il
a écrit son roman entre t22j et 1230.
Deux autres poèmes d^in^ale impcinance partent le nom de
Gerbert, Le premier est unesaite de Ptrceml^ dont nous n'avons
pas la fin et qui comprend 12,000 vers. Fr, Michel a}^nt dit
que ccnc suite de Ptrm^l pou\*ait être de notre auteur, Birch*
Hirschfetd a confirmé b même attribution par des raisons, eo
partie au moins, fort bannes; contestée par M* Olhe, cette
opinioa a été reprise et appuyée de nouvelle preuves par M, F.
KraosS et plus réœmment par M. Wîlmotte*, qui n'admetJ
pas tes raisons tïtées de b langue, fonifie l'argument tiré du
style par Bircb-fîtrscbfeld, et y ajoute l'identité frappante de
la versification (78 00 de rimes riches). Il montre en revaiKhe
que b iMite de Tristan^ dont Kraus avait bit un poèise à pan,
n'est qu'un épisode du Pe^cemi. Le senxmtois de Gr^mi te Petit,
qui porte le nom de Gerbert , offre b même proportion de rim^
riches que les longs poèm^; il doit donc être du même auteur 7,
àté dnkssdos» p. t68.
1. Ko 122%, J
|. Ccit £e qL 1 ii,
4* Wmwc en ï2}% eUe se mmm en ia4} (à 47 ans) wnc Maifcktt <
MocnBBOiàicy. — Oo poonaii donc aom le limHn éoîl oUc tif^ et-'
134), Bkik c'eî poi ivoèibie (voir cefeoâmtt l'ilkNiQfi à m œtam àc
Rond. T, $9t$ ; b mmtm mk de Maie époBii Jcaa de Mmm m
f. IMy Gmhrtét HbmmJ ^ mim W^êmjBÊ^ d'Etiii^en, 1897)*
^ GêÊ^m et MmfmSa k$ irrii$ f» Imi mmtêttnhÊÙ (Smii. df tAt^,
dr Biieifm. 1900. p. 16^189); cf. aiiMiiii, XJUX 481*
7. M. Wiiintte tBdow, l«m fÉte des <
MM 0v sbfK^ wm WEn de Gifw§t i wria voQp* JbvMlfa •* ^
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 539
et, comme il est une phinte faite au nom des fnmestreuSy il
indique que Gerbert en était un, au service de Marie de
PoDthieu. Comme il ne se nomme complètement que dans la
VkietUy il est probable que c'est son premier ouvrage.
La Violette présente avec le Comte de Poitiers une si étroite
ressemblance qu'il est évident que Tun des deux romans dérive
de l'autre, ou qu'ils ont une source commune. Raynouard (et
plus tard Von der Hagen et Landau) ont cm que le Comte de
Poitiers n'était qu'un abrégé, venu par tradition orale de la
Violette ; Wolf ' a montré qu'on ne pouvait hésiter entre les
deux romans pour le caractère archaïque, et que, pour croire à
l'antériorité de la Violettey il fallait être dépour\*u du sens de la
poésie primitive. Toutefois, il était porté à croire que tous
deux avaient une source commune, — provençale d'après l'allé-
gation du metteur en prose. Ce n'est pas soutenable : il y a des
vers, des passages, presque identiques dans les deux poèmes :
si donc la Violette est postérieure au Comte de Poitiers^ il faut que
Gerbert ait eu le Comte de Poitiers sous les yeux. C'est ce que
pense M. Ohle, qui trouve les raisons de Wolf insuffisantes, et
qui en donne d'autres, tirées de la façon dont les événements
sont racontés. Nous y reviendrons; mais nous devons d'abord
tenir compte d'un élément que M. Ohle n'a pas connu, et qui
est indispensable, à savoir Guillaume de Dole. Tant qu'on n'avait
pas ce poème, on se trouvait fort embarrassé, et on était porté
à croire que P ci V remontaient à une source commune diver-
sement altérée. En effet P n'a pas le motif du signe, V l'a ; or,
le signe est ancien * ; mais V est moins ancien que P et a des
traits certainement altérés : donc ils ne viennent pas l'un de
l'autre. M. Ohle est embarrassé pour dire où T a pris le motif
du signe (quoiqu'il pense que Gerbert n'a inventé que la forme
de la fleur) et ne s'exprime pas clairement sur ce point K Mais
nous pouvons maintenant le dire avec une grande assurance :
il a pris le motif du signe dans Guillaume de Dole.
L'influence de ce roman sur le sien est évidente de prime
1. Cf. Ohle, p. 14-15.
2. Qjjoi qu'en pense M. Ohle, qui croit que, partout où il se trouve, il
provient du Roman cfe la Violette.
\. Voy. Ohle, p. 23, p. 54.
J40 G. PARIS
abord par le fart qu'iJ a^ lui aussi, inséré des chansons dans son
récit. L'auteur de Guillaume de DoU se vante d'avoir inventé ce
genre de romans^ mêlés de chansons. Gerbe rt en signale aussi
l'attrait et le mérite, mais sans s en attribuer l'invention : îJ est
donc clair qu'il a imité son prédécesseur K II emploie exacte-
ment les mêmes procédés pour amener les chants ^, et i! inscrc
comme son devancier des chansonnettes à carole, des chansons à
toile, une laisse de chanson de geste, des sons poitevins ou pro-
i^ençâux : plusieurs des cliansons sont même communes aux
deux romans. Mais il a en outre pris à Guillaume de Dûle le signe
en forme de fleur, qu'il a substitué aux indices insuffisants du
Comte de Poitiers; il a *f démarqué » son emprunt en mettant
une violette au Heu d'une rose. Et, à rîmitation de Guillaume de
Ihle^ dont le vrai titre est Rotnan de la Rose, il a appelé le sien
Ratmin de la Fioîitte. Nous pouvons donc dire en toute sûreté
que Gerbert a composé son roman en suivant (sauf les modifi-
cations dont nous aurons à parler) le Cûmkdc Pùiiîers^ mais en
imitant Guillaume de Dole pour le titrie, pour le motif du signe,
et pour l'insertion de chansons dans la narration. Il était d ail-
leurs très au fait de la littérature de son temps : nous verrons
qu'il a imité d'autres romans étrangers à notre cycle, et il dte
plusieurs romans bretons ou d'aventure.
Il s agissait pour lui d'étendre le petit récit du Garnie di Prn*
tiers jusqu^à en faire un roman de 6 à 7000 vers, ce qui était le
nombre requis pour ce genre de compositions. Outre les chan-
sons, les descriptions^ les dialogues et monologues auxquels il a
recouru, il s*est avisé de remplir d'aventures la période où ses
deux héros vivent séparés : aventures sans intérêt, sauf celle
d'Euriaut qui anime la réunion des amants, et qui consistent
surtout en combats et en tournois.
Un changement qu'a fait Gerben, et qui est propre i son
poème entre toutes les versions de notre cycle, c'est que
2 . Tous les autres poèmes où cm neirouve et procédé sont postérieitfs.
2. DiEis Icf deui româfu, le récit »*ouvre pir y oc (éit ou dmnç» et cbcira-
iicTS chaoteni pour leur pUisîr ; par h sitite les pci>ûn nages chAnteot pour
eiprimer leurs semimeots. Gerbert 2 irès Àdrottemcnf mania ce proofdé^ bJen
qu'il sott invnlscmblible 4e votr des gens au désespoir ritprimcr leur ptkm
CQ chautint d^ i:ouplet3 amous.
LE CYCLE DE LA <t GAGEUItE & S4*
l'hémine est, non plusla femme, mais Tnmie ' du héros. M.OIile
(p. 24-25) voit dans ce changement la preuve que, dans le
siècle où Gerben écrivait, comme on ne se mariait que pour
associer des ficft^ le mariage avait perdu toute valeur morale et
I on lie pouvait croire sérieusement à la résistance d*une femme
mariée. Je crois que la raison est beaucoup moins profonde : le
poète, voulant insérer une foule de chansons d'amour (surtout
cotirtôis) dans sa narration, ne pouvait les faire adresser par un
mari à sa femme. Il suivait d'ailleurs la formule des romans
bretons. Mais M, Ohle a raison de dire qu'il a détruit' par là ef
le mérite d'Euriaut, et le sens même du récit, qui tend à la
glorification de la vertu d*une femme (sœur ou épouse).
Le roman débute \ comme P {Poiiiers) et R (Rose), par réloge
d'un roi (ici Loeys >), qui tient sa cour à Pont-de-l' Arche ^. A
une fête qu'il donne, on danse des caroles où chantent la
comtesse de Besançon, la duchesse de Bourgogne^ la soeur du
comte de Btois, celle du comte de Saint-Pol, la demoiselle de
Couci, k châtelaine de Niort, EHenort, une dame de Normandie
(par imitation de R). Le roi avise le beau Gérart, comte de
Nevcrs, connu pour son talent de chanteur, et T invite à chanter :
il chante un couplet de Gace Brûlé (comme dans R) \ et deux
refrains de chansonnettes, et continue par Téîoge de s' amie, qui
IVmic par-dessus tout. Envieux de son succès, IJsiart, comte
de Forois(cf* /î), gage sa terre qu*il séduira Tamie de Gérart, s*il
lui laisse huit jours sans la prévenir* Le roi essaie d'empêcher
la gageure, et^ n'ayant pu y réussir, il la plége. — ^ Lisiart,
accompagné de dix chevaliers, arrive à Nevers^ où Euriaut ^
L Que faut-il entendre par ce nom ? Eurîaui vît dans le château de Nevers»
tout le monde h regarde comme ramic de Guillaume ; elle ne semble avoir
lîi demeure, ni famille à elle Guillaume se vante publiquement de l'avoir
pour amie. Est-ce sa maîtresse au sens complet du naot? Le sigm nelc prouve
pas, Jl finit par Tépôuser.
2. Après un prologue moralisant et un éloge de la dame de Ponihîeu.
, 3, t^ version en prose fait de ce Loeys Louis le Gros^ sans raison,
4. Cette petite ville, jadis imponante, ne fut du domaine royal qu'à partir
de 1204.
î* Mais il est à noter que Gerbert ne nomme jamais les auteurs des chan-
sons.
6. Sur ce nom (ou Oruittt), voy. O. Sçhuke, Tobkr-JbhamlL^ p. l8é*9| ;
le metteur en prose a lu Euriaut^ d*oii Buryanihe,
s 4^ G, PAMIS
habite le chjceaa. Elle le reçoit très bien ; il la requiert d'aînour
(contraste avec P) : elle le repousse. La vieille (oommetlans F)
va ay-devant de Lisiart ; elle loi offre des msagnes ; il lui promet .
de grands dons, ~ Scène du bain : par un trou dam une paroi,
Lisiart voit la violette sur la mamelle droite d' Eoriaut (sa pré-
sence est inutile et ajoutée; le rôle de la vieille est combiné de
P et de R). — Lisiart re\ient à Melun^ où est la cour, mais ne
donne pas d'abord la preuve; il demande qu'on fasse ^-enir
Euriaut *. Elle arrive (?^cne pareille j la scène finale de iî). —
lirinrt révèle le signe; stupeur d'Euriaut ; Géran est convaincu»
lui dit montei! Cl remmène à cheval, refusant toute compagnie^
(cfP, notamment p, 2i ')- Ils arri%'ent dans une forêt» Géran
met Euriaut à terre (^= P) et s apprête à lui couper la tète,
quand elle voit s'approcher de lui un serpent, et l'avertit; il rue
te serpent et pardonne à Euriaut (Gerbert a fondu en un les
deux combats de P; tout ce récit » scène centrale du roman ^ est
fort abrégé). — Euriaut se pâme : survient le duc de Metz,
qui $e compone comme Harpin dans P et veut tout de suite
Tépouser; singulière défense d'Euriaut, qui rappelle un peu une
scène d'Afnadas; le duc Temméne à Metz. ^ Gérart veut se
rendre à Nevcrs pour voir comment Lisiart se comporte dans le
château, qui naguère encore lui appartenait K 11 se déguise, non
en pèlerin j mais en jongleur : il surprend une conversation de
Lisiart avec la vieille, s:i complice, qui lui révèle la vérité. Il
part joyeux et se met à la recherche d'Euriaut, A partir d'ici
(sauf la réunion et le duel judiciaire du dénoûment), il nV a
plus aucun rapport entre les deux poèmes*
En quête d'Euriautj Gérart court de nombreuses aventures,
où le poète exploite sa riche connaissance de la littérature de son
1. M, Ohle volt ki la mcUlcure preuve de la dépendance où F est â Féganl |
de P. Dans P, en effet, i! faut <|uc Rose vienne pour que Ton compatie les ]
cheveux et h robe; îcî, sa venue est inutile:, ei surtout Lisiart n'a ayotn
intérêt à U mander.
3. Ici encore T altéra tion est visible. On comprend que le roi ei les <:licva;
lien laià$ent le comte de Poitiers Uire justice de sa fenim^^ mais comment
^rmenront-ils i Gérart de tuer « s'amic » ?
^. Ceat encore une altération évidente : dans P^ c*cst pour iner cduî qtil
Va dèïhanoré ; ce qui ne pouvait subsister dans P\ ù(x Buriaut ti'^st p^a 11
femme de Gi*raru
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 543
temps ', et qui lui permettent d'allonger son roman : comme
elles n'ont pas de rapport à notre thème, nous les négligerons.
Cependant, Euriaut est à Metz : le duc, qui ne peut l'épouser,
à cause de ses barons, l'a confiée à la garde de sa sœur, Ismene
(nom emprunté au Rotnan de Thibes) : celle-ci l'a prise en ami-
tié, et toutes deux couchent dans le même lit. Un chevalier,
Meliatir, qui a voulu violenter Euriaut, et qu'elle a repoussé, veut
la tuer : il pénètre dans la chambre où elle dort, et croyant la
frapper, tue Ismene à son côté ; Euriaut est seulement blessée à
la main, en sorte qu'au matin, il semble prouvé à tous que c'est
elle qui a assassiné Ismene, et elle est condamnée à être brûlée
vive*. Gérart arrive à Metz au moment du supplice. Il obtient
de soutenir contre Meliatir un combat judiciaire : son adver-
saire, vaincu, avoue. Gérart se désarme, Euriaut le reconnaît;
il se trouve être le neveu du duc de Metz. Il raconte toute son
histoire. Un ménestrel annonce un grand tournoi à Montargis,
qui sera livré par le comte de Montfort, oncle d'Euriaut, contre
Lisîart. Gérart y paraît inconnu, couvert d'armes blanches ; il
a le prix du tournoi, où il renverse Lisiart, mais ne peut le faire
prisonnier. Le roi mande le chevalier inconnu, qui raconte
toute son histoire. Il a fait venir Euriaut, et défie Lisiart, qui
persiste à soutenir son dire et à nier l'aveu surpris à Nevers par
Gérart. Vaincu en bataille, il avoue, et est traîné à la queue
d'un cheval ; on fait venir la vieille, qui est brûlée vive. Gérart
épouse Euriaut ; le roi lui rend ses contés (sans doute le Forez
1. Ainsi, l'épisode de hpucelle du château de Vergis est par endroits une
imitation de celui de Blanchefleur dans Perccval ; — l'histoire bizarre (p. 93)
de l'épée Fineguerre (cf. Finechamp dans Doon de Mayettce, p. 264) provient
certainement d'un récit plus ancien ; — le combat de Gérart et de Galeran est
imité pour certains traits (p. 99-100) de Meraugis; — la scène où Aiglente
et Florentine regardent Gérart du haut des créneaux et s'éprennent toutes
deux de lui, est un lieu commun (cf., par exemple, Auberi le Bourguignon) ;
l'épisode de la méprise d' Aiglente (p. 160) est imité du Tristan de Thomas ;
— le hoivre d'amour (p. 166) vient des romans de Tristan ; la situation de
Gérart entre Aiglente et Euriaut rappelle Eliduc, Ille, Galeran ; etc.
2. Comme l'a remarqué Fr. Michel, cette aventure est empruntée à
Floreiiu de RonWy mais dans toutes les formes de ce conte le traître tue un
enflant couché auprès de l'héroïne exprès pour faire croire que celle-ci l'a
égorgé. — Nous avons vu cet épisode dans une variante sicilienne de notre
conte (B'b3i/).
544 G- PAEîS
avec Nevers) et il retourne avec Euriaut i Nevere, où ils vivent
heureux.
Ce roman qui a été rais en prose au xiv* siècle, renouvelé,
traduit, rais au théâtre, etc. % a certaines qualités de détail,
raais il est bien inférieur i ses deux sources principales, le Qmfd
de Pûiiiers et Guilîamm d€ Dole. U appartient à une époque de
délayage et àc pomif. Pour l'histoire de notre thème, il n'a pas
dlmportance^ puisqu'il provient de deux sources connues.
RÉSUMÉ
Nous avons étudié un grand nombre de formes du conte de
la Gageure^ et nous en avons proposé une classification, fort^
incertaine en plus d*un point. Tous les travaux qu'on lui a con-
sacrés pèchent, corame nous avons dit au début, par Tune ou
Tautre de ces deux fautes, ou par toutes les deux : ou bien on
a séparé la forme B (mauvaise foi, îndices)> de la forme A
(bonne foi, substitution), ou bien on a considéré le conte
comrae appartenant au cycle de Barkrine^ dont il est parfaite-
raeni distinct. D'autre part, M. Oh le, qui a certainement écrit
le meilleur travail qui ait été consacré à notre thème* a systé-
raatiquement (et tacitement) laissé de côté tous les récits oàl
figure la substitution. Il devait cependant résoudre cette ques-'
tion prélim maire du rapport de la forme B à la forme A^ d*où
dépend tout ce que Ton peut penser de l'histoire B. Il voit
dans cette histoire B un conte dévot, il la rattache à celle de
Suzanne, il en tire toutes sortes de considérations sur le
mariage, la condition des femmes* etc* ; il faut d'abord savoir
si, oui ou non, elle ne serait pas simplement un arrangement d*un
autre récit ; et au cas où il serait prouvé qu'elle n*est rien que
cela, c'est ce récit dont il faut rechercher Torigineet la signifi-
cation. M* Ohle remarque lui-même avec raison que ce qui a
fait rattacher par Von der Hagen et autres notre cycle à celui
de Barberine, c'est qu'on a vu dans la âeur du Roman de Ia;
I, Voycï L'èdîtîoD de Fr. Michd.
LE CYCLE DE LA <x GAGEURE » 54 J
Vioklte une transformation de la fleur magique de Barberine, et
ce rapprochement, dit-il, s'évanouit quand on constate que le
Roman de la Violette est dérivé du Comte de Poitiers^ qui ne con-
naît pas le motif de la fleur, et qui présente le même récit ;
mais il devait examiner la question de savoir si B tenait à^. Il
est vrai qu'il ne connaissait pas Guillaumede Dole ; mais les autres
versions de A étaient déjà presque toutes citées par Von der
Hagen, et il est singulier que M. Ohle ne les mentionne pas
même d'un mot.
Reprenons donc cette question : A ti B sont-ils deux récits
indépendants, ou l'une des deux formes (bonne foi, mutila-
tion — mauvaise foi, indices) provient-elle de l'autre ? La thèse
de leur indépendance est bien difficile à soutenir. En effet dans
B', pour négliger ici les détails, nous trouvons comme dans A
que la femme soupçonnée est la sœur du héros; — que celui-ci
est mis en prison ou s'éloigne sur de fausses preuves de la faute
de sa sœur ; — que celle-ci apparaît à la cour et prouve son
innocence. D'autre part, le motif du signe, commun à B* et à B*,
rattache B' à B* où ce n'est plus une sœur, mais une épouse
qui s'habille en homme pour se faire rendre justice, et à B^ où
c'est aussi une épouse qui est justifiée. Il n'est donc pas dou-
teux que les formes AtiB sont unies par un lien étroit. Main-
tenant on peut se demander laquelle des deux est la plus
ancienne.
La date des textes conservés ne prouve pas grand' chose. Le
Roman du Comte de Poitiers est peut-être le plus ancien de tous,
mais Guillautne de Dole est de 1200, les trois versions de Tours
du XIII' siècle, Eletia sans doute du xii'^, la nouvelle ano-
nyme italienne du xiii*, de même Taliesiriy Ruprecht de Wûrz-
buig, etc.
D'abord, quel est le thème le plus ancien ? est-ce celui où
l'héroïne est une sœur? est-ce celui où elle est une épouse?
Dans la forme B, nous ne trouvons la sœur que dans le groupe
B' ; dans la forme A, nous la trouvons uniquement dans le
chant grec. Nous pouvons dire avec certitude qu'on a dû sub-
stituer l'épouse à la sœur, et non l'inverse. Cela est évident
pour le groupe B*b, où l'épouse ne figure que dans les versions
les plus modernes. La sœur a une importance d'autant plus
grande dans la famille qu'on remonte plus haut vers les modes
«M, XXXIl 9C
$4^ G. rAiis
inôan dedvilisituifi '. Ceue inipoftiiiGc e^ mutom considé*
fifcle daiif b poésie populaife serbe, ce il esc airicoK i{iie le
seul texte qui ait omservé U sœur dans ^ est grec^ c'est-è-^lti€
voisin dy serbe (slave r)^ et myn à être tnâuencé par luL
Mais h sœur se crouvior ^dément dans 1^ deux Ion»
A Cl B, on peut se detnander laquelle de cm deux formes est
b plus andenne. La réponse ne oie paraît pas douteuse. La névé-
latîoa d'un signe faite par trahîsoa est un adoodsseroeut de
la substitution avec mutilation ; die amène la transfornsaïkm du
conte en uoposant au gabnt la mauvaise Soi ; mais^ coînnie tJ
est anttpâchique dans les deux cas, cela n*a pas grande impor-
tance. Il faut donc bien regarder A comme primitif, et dans A
le chant grec comme extrèmemeni rapprocbè de l'original.
Ce récit CMigiftal est donc celui-ci : Un jeune bcros vante sa
sœur à la cour d'un roi- Le roi (ou on autre) se &ii fort de la
séduire, et le héros est mis ai prison jusqu au succès de
Tcpreuve; il mourra sa die toiime mal pour lui. La sœur
reçoit la 'déchration du séducceur, feint de faccueilUr, et tut
aivoie dans la nuit une servante. Il lui coupe un doigt ^»
assure avoir gagné la gageure; le héros va être mis  mort^
qtund U sceur arrive et montre son doigt intaa V.
De cette forme primitive, quelle peut être la date et Ton-
gînc ? Nous ne la trouvons pas en Orient- Mais de prime abord
il est peu vraisemblable qu*une telle histoire soit née an
moyen âge : le caractère de la femme sacrifiée* est celui
I* Voy. 4^m k Fmrnivaîti Mimlkaj (19Ô1) l'arec de Gmnjijere airl
k mUfi *m,
1. Vn dmgt àe pied } Vof, Oim (ot eu pied), k doigt avec rannau
(dans um des formes au potmc grec).
}. Les aytrcs vcrMOOs A, qui subsEituem réponse à la sâsnr, sont iltérici
(notons ccpcudant dim h billadc éan^ise l'bterveniioii de b niMiTkv,
quï introduii le ^lUnt dans h chimbrc de b femme; ce i^k va se retrouver
plus oo moi os dan^ totilcs les versions de B. ,
4. Sur d'autres formes de la subsiitutioâ (Q|ltlllilklLi Ali$m^ Msini^.,
Viti, 4, etc.), Toy. Affen, Dos Mander tmlfrsckeè^im Brmi$ (Sd^mtna,
t^)» p' 49- -* U faut noter i pan k ibènie des Trma, cenaiâcmeot
orknu], ou une femme, prise en lUgrant d^iti trouve moyen de substituer i
sa place une amie qui est mutilée par le mari (U Itil coupe k net dans ks
venions oriciîtalcs, les trciscrs dans la r^ltl itlémiés â'Ckdécm% m sone
qu*U est convimcu de rinnoccDcc de sa felïimc.
N
LE CYCLE DE LA ^ GAGEURE » 547
d'une esclave et les divers narrateurs ont essayé d'atié-
nucf cette donnée* Il faut noter dans le poème grec (voy- aussi
Ruprecht de Wûrzburg) le rôle que joue Targent : au fond,
cVst pour acquérir l'argent que ta femme emploie sa ruse. Or^
nous trouvons précisément cette niûme ruse, mais assez
méconnaissable, dans un conte indien récemment publié, et qui
me paraît démontrer l'existence dans Tlnde d'un récit très ana-
logue \ Un prince, séparé de sa femme, vante sa vertu à la
cour d'un roi qui ne croit pas à k vertu des femmes. Celui-ci
dit au prince qu'il va envoyer un de ses ministres qui la séduira.
Le ministre arrive, déguisé eu marchand de perles, et offre à la
femme (par Tcntremise de sa suivante) une grosse somme pour
passer la nuit avec elle j elle habille de ses vêtements une de
ses servantes, et le ministre, trompé, lui donne la somme con-
venue; puis il revient chez son maître % et le prince croit sa
femme coupable; plus tard tout s'explique (?). — On peut sup-
poser que dans ce conte figurait déjà la gageure (ou le trait que
les parieurs risquaient leur tète), que nous trouvons dans A et
iî, car on ne peut faire venir le motif Je lagagcure de Barbet ine^
qui, au contraire, peuiTavoir reçu — et déji en Orient — de
notre conte.
La grande difficulté qui fait douter du caractère primitif de ce
conte indien (une fois restitué), c*est que, comme nous l'avons
dit, on a dû remplacer dans notre histoire la sœur par l'épouse
et non Tin verse. Je suppose donc que le conte (avec la sœur) a
été inventé en Orient (Babylone? Perse?) et a passé de IX en
Europe, où la sœur s'est maintenue quelque temps, puis a cédé
à réponse, et dans Tlnde, où on ne trouve que l'épouse dans la
seule forme connue.
Voilà donc le conte introduit en Europe sous sa forme A*,
très voisine de la forme primitive* Il a du en sortir une formel
i* Voy. Indim Aittiquary, Bombay, 1894-95, Fûlk*Lôf£ îti Southern
IftiHii, par Katesa Sastri(cu conte m*a été communiqué par M, E. Gosquin)»
— Seulement dans ce rt^cit sont mêlés des éléments divers et mùmG contra-
dictoires, notre conte^ celui de Bartvriue (avec le talisman^ qui détruit rcffee
du nôtre) et celui de Aif^ w^îî U^aieftds ïveU, qui rend k nôtre absurde (le marî
suspecte sa femme dci le début, et l*a quittée â cause de ces soupçons).
2. Conïme preuve, » he shows one or Iwo oraaments of the princess »,
;4S G. PAA3
ou OG 2T1XI encore ii sœur, nuis noo pîus ks zxkîs de ii sDbsd*
mdcr: e: df 11 madlidoa ; il nt raciîr pl3$ qae les oîrets
(aaseaUf cherciix et jièx de \>èce:i:^cr, an ISea de doÊgr) enle-
Tés à 11 Sijczr a son iasu pir zzit -D-TÎa? (serrisrc, dtkgne)
^Aczéc, Cecre lonxie sEsiple se trouve ians îe Ccmu ie Pxiers,
nais irês iliérée, i' en ce que rhêroîne est cae êpocse ; 2* en
oc c-^ 'jt dèooûsea: es: loc^cê ao-z par l'héroiDC eSe-oiêsDe,
nuis pîT soc TRiri, qu: scrpnrai Taveu ds trihre niaisesie::! tct
en pcrîk-
Cere bmrv es: uc: i ai: isolée et déliée. Vjzs fidêi« a !i
fcK-ife pre::ûere de 5, zuis ittcc Taddhâoc de sigae, es ie
grocpt B', oc il s'agi: eacoce i'c^e soecr, et oc eîje dêDoerre
soc izaccr-ve en yrrwa*^: le mitre de vol, oc doct ocici<: se
àét^ et: disant qall ae l'a -aouis v^e (3'a : Tocrs, GacïJaiv
îdDcù^ rracTei> deSetrs, £*/f«£a, — B r : Antiqcarlo, Bmcrr:
et les coates pcpclaires o. il s'izî: ^zz. ciret zzz — i^: piînt y
Les gr^-jKs scivans B=. B^ B*, se nni-iDe^: i œlcî-ci et: œ
qu'ils etzpioôet:: le rsodf de sir:» et ec ce q je c'est irœ la >r;..:)r
coi ^Xïrscit et oèckzt sa -cscfcadoc: mis elle est toc-ocrs
cae êMCSc : dooc ljcs ces ccctes rezacctetrt à cre scrrrzc
cjrnznzi^ -, altêraiioc de B'- Dizis plusi-ecrs de oes ooctes
jc aiod: de sizae tii: dêtict (£>ïj, f'-j^.-fi.r, la iyliac,
fL-ÂLT-/}; mis, ccdzx il se trocT* dans des vetâocs de zsèmc
5ocs-^oc>t, il iict croire cc'il irtsirtiec^: i li sccrce ojcizicac
et cae, ran^et o- il zuaqae, il est tcnere rar oe>li-
Li pics ieciecat sa:^ dc^ute de ces Ttrskms est Iliistocre
d'£>«, cticcre tris t<..^^^ de B . ce la it — rjt (q^e le zuri
a «ec i liac^ -\*ct tli-nihne rrreciiqcer soc droct a la cocr
£l^:u, Il "rjliee (r-ià de siizc-e ci de coterai siège '.'ier^, je cjcse
•cdêc-allecsiai, le cccte sidliec, Atl-T^ia :zili:z.
■ se i -nnar rjd li pijnrf r sac ras ics 5 i. TsrH
Sirr ni* ^l'elit le&nr xs ;i r — p* f£j* r'-x ras *=-^ jc caoK
LE CYCLE DE LA U GAGEURE » J49
B*b- La femme s'enfuît en apprenant que son mari vient
pour la tuer, s'habille en homnie, se met au sen'tce d'un
ennemi du roî> que sert aussi son mari, et revendique son droit
par un combat singulier (que livre son mari convaincu par
une vision (Miraik^ Posî humus. De là aussi, mais très altéré»
le roman de Floire et Jthamtt, — Fùlninfe^ venu de Posîhumus^ a
perdu le motif du signe).
B» : La femme, habillée en homme, devient un puissant per-
sonnage.
B^a< Elle force le traître à avouer; intervention du père
(Timoneda, Bignon, La moglk calunniata),
B^b. Elle reçoit Taveu spontané du traître à la cour d*un roi
étranger, y fait venir son mari et dévoile tout (nouvelle italienne
anonyme, Bocaice, livret populaire allemand)*
B'c* Elle rencontre son mari dans une humble situation 4
Tétranger, le ramène comme son serviteur dans leur ancienne
maison, et le traître avoue en se vantant : Francisco (pas de
signe), conte de Wolff, contes norvégien, gaélique, roumain.
Dans ces derniers groupes, il règne encore une certaine con-
fusion : les traits se croisent et se contredisent : pour arriver à
tout débrouiller, il faudrait un travail minutieux \ Mais la
classification générale paraît assurée- Nous en tirerons ces
quelques remarques. Aucun de nos récits ne vient directement
d'un autre de ceux que nous avons conservés, sauf le Roman de
la f^iohîie^ qui est tiré du Comte de Poitiers et de Guillaume de
Dff/e, et la nouvelle prétendument arabe de Bignon.qui est prise
i Timoneda : il faut donc se représenter une masse de versions
intermédiaires perdues, — Il est difficile de dire en quelle par-
tie de TEurope la forme A pour la première fois apparut; c'est
sans doute dans le monde byzantin, — Les contes populaires
que nous avons ne viennent pas des œuvres littéraires médié-
vales : leurs sources les plus anciennes ne sont pas antérieures
au XVI* siècle \ — La propagation du conte a fait éclore de
I . [L'indécision de G, ¥nm pour les détails de sa classification se manî-
esceici à plusieurs craks, tioumment en ce qu'il fait passer du groupe B^au
groupe Bï Tîmoncda, Bigaon ei ta Mogîk adumiûUa^ et en ce quHl iniervenil
Tordre des groupes Bi, B*. — J, B,]»
1, Ils ont parfois des traits qui paraissent prinsltifs : les cheveux couptfe
sur ie nm dans Eufemiat etc*
SSO G, PARIS
tous côtés des œuvres litiéraires, mais elle a surtout été oraleJ
— Llnspimtion première de rhistoîreest, commedansBaràrrm^,
Télexe d*uûe femme qui sait concilier rhonDétetë avec une habi-
leté in tcressée ; c'est en somme, et même sous sa forme pre-
mière, une glorification delà femme, qui vient s'opposer à tant
de contes où elle est représentée comme per^^erse ; mais, même
vertueuse et fidèle, elle ne laisse pas d'être adroite, voire
rusée, et se montre par là très supérieure à son mari, violent et
crédule \ Peu à peu le conte s'est épuré et est arrivé, dans le
Cùtntt di Poiiiers^ dans Fhire et Jehanne^ chez Boccace, à mettre
en scène la fidélité conjugale et les plus hautes vertus,
Gaston Paeis-
TABLEAU EÉSUMANT LE CLASSEMENT DES VERStONS
DU COKTE DE LA GAGEURE
: BONNE FOr DU GALAKT; SUBSrriTL-TIOK ET MUTTLATION.
t Poème grec. — 2. Hartrs TùUisin. — j. Ballade écossaise. —
4. Manuscrit de To«rs, f« 165 v<*. — j. Rupneclu de Wilribuf^.
— 6. Jakob Ayrer.
: MAtTVAlSE FOI DU GALAKT; INDICES.
B* : L'HÉtOlKr EST SCrUR du PARt^tJR; LE GALANT Kl lV PAS VtTl;
AOCUSATIOH DE VIOL (eT DE VOL).
Bva : Pm de gû^turt : accusât hn dé vio! im d'un t*{4 quftttmqîit,
l, Mintiscrit de Tours, f" Vî ^^ — 2. GuiîLmmt dt Dok. —
5. Nouvelle de Sens. ^ 4. Eufemia.
B' b : G&^€ur$ ; aicussUiim du vol d^tin ohfiïformani pair t.
I- Fetidana Aotiqiaario. — a. Batacdii. — \. Cames popubtrcs 3
a. Gonxenbach ; h. Fîtrè, LaStivala\c. Gubematis ; d. Imbiiinî j
i, Andrews;/- Pilrê^ Er^'ahianm -^ g Finamore; I?, Sîmfoclrj
B* r t'sÉROÎïvE EST LA FEMME DV PARtEt^R ; ILLE S*H ABILLE EN HOMME ;
ACCrSATïOK DE VIOL.
Manuscrit de Toors, f^ léj vo.
I Djm b forme A, le frère joue un moins pauvre rôle, et Pautear dn
Comif dt PfÀlitrt a réussi à relever le personnage du mari.
LE CYCLE DE LA « GAGEURE » 5$!
B ' : l'héroïne est la femme du parieur ; elle s*habille en homme ;
AVEU SPONTANÉ DU TRAÎTRE.
B' a : Aveu spontané du traître à la cour d^un roi étranger,
I. Nouvelle italienne anonyme. — 2. Boccace. — 3. Livret alle-
mand. — (Cymheîine ?).
B ' b : Aveu spontané du traître dans V ancienne maison du mari.
1. Francisco. — 2. Conte de Wolff. — 3. G)nte norvégien. —
4. Conte gaélique. — 5 et 6. Contes roumains.
B4 : l'héroïne est la femme du parieur ; la femme juge ; aveu forcé
DU traître.
B*a : Intervention du père.
I. Timoneda. — 2. Moslema et Rasimi. — 3. Lj mcfJie cahmniata.
B^ b : lii femme revendique sofi droit à la cour du roi témoin de la
gageure.
B* bl : Pas de travestissement ni de signe; combat singulier de
la femme et du traître.
I. EJena.
B-^blI : Semblable à la forme précédente; mais pas de combat
singulier.
I. Byline. — 2. Conte juif allemand. — 3. Pitre, Lu miîordu
inglisi.
B* b m : Travestissement, signe. /
I. Miracle, — 2. Floire et Jehanne. i
: MAUVAISE FOI DU GALANT; INDICES; SON AVEU SURPRIS; •
RÔLE PASSIF DE LA FEMME.
Le Comte de Poitiers {Le Roman de la Violette). j
PEL FABLEAV DI CONSTANT DU HAMEL
Glî scrittori dei fûblmux e délie farse mediôevali furono
denîgratori accanitt délia virrù femmtnile, e s'avrebbe totto a
ritenere corne dîmostrazione de! contrario que! pochi esempi
cheessî d offrono di moglï fedeli e soctomesse. Con la leggen*J
dû dî Griselda e delT eroina del fablcau « La bourse pleine dei
sens » SI passa da una esagerazione ail' altra, e quelle donne
senza personalitâ, senza %'olonrà, messe a fianco deU* altrc
pétulant), lascive, rapacî, m'hanno pressochè Taria di carica-
ture. Utia sposa che accetta lutto dal suo consorie, offesc alb
prapria dignîtâ, ingiuriedi rîvali e persino la ferita più grave a]
cuore di madré, la soppressione dei figli, poteva cssere un
idéale pcr que! tempi, in cuî imperavano i forti, ma per noi è
un fantoccîo senza nervi e senza sangue.
Un altro gruppo mutiebre si distingue per certa virtù civet-
tuola^ intéressa ta e féroce, che non mérita davvero troppo caldi
elogi, La storiella dei Segrelain, di cui si compiacquero vari
novellarori, ci présenta il caso di una moglie tenta ta da certo
ecclesiastico con doni e tusinghc. Invece di vokargli le spalle,
corne avrebbe dovuto, la nostra « borgoîse,
(lai moult est oit preuz et coitoîse < »,
profitta deiravventura, e, d^accordo col marito, fînge di accon-
discendere aile sue voglie. Il Segretain h sfrunato in piena regola e
pcr di più assassinato a tradimento, quando crede di cogliere
il prcmio dei denaro sborsaio.
AitïM va fous SI mort quennt ;
I. Montaîgloii cl Raynaud, V, il 5 (n*» ij6)»
PEL FABLEAV DI CONSTANT DU HAMEL 553
e rautore^ con cotale edificante conclusione, assolve la coppîa
ladra e sporca di sangue, anzi trova il modo di ricompensarla
con ahro premio. Ne diversa corre î'avvcntura narrât ad da
Huon Piaucele nel fableau i'Estoimni/m cui invece di un prête
se n^hanno tre, i qualî scontano non meno tristamente le loro
sporche passions Nel racconto di Consiant dtiHamd^ la vendetta
è più giustificarae piacevolc, ma non per quesco appare meno
îgnobile. Labella Ysabeau, moglie di Constant, muove le vogli
del prête del viUaggio che
Molt la re<îuîst de druerie^
offrendole (f fermaus, çaintures et aniauset deniers »> ma semprc
in%'ano. Il tf provost de la vile », personaggio non meno impor-
tance» perché se il prête puô mandare Tanime ininferno, quesu
« les prisons a en baillie n^ rinnova a Ysabeau le stesse offerte
e per Tidentico scopo. Terzo a scendere în giostra è il a fores-
tier ï), personaggio anch* esso di qualche peso e che, come il
suo nome Tindica, ha la guardîa dei boschi e la forza necessa-
ria al suo ufficio. Ma 'Ysabeau risponde ai due compati quel
che ha risposto al curato, ed allora i tre tirannelli del viUaggio
s'accordano per irarre in rovina la savia donna ed il troppo
felice marito. Il prête, che è ranima del complotto, per « amai-
groier Dant Constant «^ dichiara in chiesa che costui ha spo-
sato la comare, commettendo cosî, secondo i pregiudizi del
tempo, una specie d*încesto. Il marito è caccîato ignominiosa-
mente dal tempio e condannato a pagare una grossa niulta. Il
preposto, alla sua volta, inventa che Constant ha derubato il
signore di certo grano; il guardaboschi scopre che il pover' uomo
ha tagliato quercie e faggi, ed entrambi aggiungono gravi muUe
a quella stabilita dal sacerdote.
Constant non sa più a chesanto votarsi : la chiesa, la gius-
tizia e la forza sono contro dî lui, rappreseniante delF umilî
classi; pero la donna, astutissima, per sua nacura, nel bene
come nei maie, niedita il modo di prendere la rivincita. Il mari-
to, pel momento, chiuda gli occhî e lasci fare. Prépara to Tin-
dispensabile bagno ed allontanato Constant, Ysabeau dà succes-
sivamente un appuntamento galante ai tre compari. Primo a
giungere ê il prête, carico di gioietli e di denaro, di cuî la bella
ha subito cura di alleggerirlo, e mentre egli guazza nel
5S4 P- TOLDO
bagno, attendes do le tenere cnrezze, ecco il preposto che batte
alla porta. « Salvatevi ii, grida Ysabeau al sacerdote, e qucsti«
nudoe tremantej deve rifugiarsi in una botte piena di penne,
che !o tr.isformeranno în strano uccello* Il preposto, che non
ha fatto orecchio di mercante airavvertimento délia servctta
d*Ysabeau
Ma dame a moult d ^argent afere»
è pure carico dî doni» ma anche i regalî a nulla approdano,
perché Tarrivo del guardaboschî^ che il preposto prende pel
marita, locostringe asaltare nudo nel kititlf pestando le costote
di chi r haprecedato. Il guardaboschi corre la siessa avventura
deî due suoi compagnacci, e questa voira è veramente Constant
che si présenta, armaio e forte del suo diritto. Per prima cosa
egli intasca i doni del corteggiatori di sua moglie, poî, per un
sîngolare accorde con Ysabeau, manda a chiamare, Tuna dopo
r altra, le consorti pîù o meno legittime dî costoro e fa subire
a ciasciina dî esse, per amore o per forza, Toffesa chei loro
signori volevano fare ad Ysabeau, Che costei si prestî a tal
génère di vendetta maritale, puo parère strano davvero, ove
non si pensi che con un marito di tal génère anch* essa doveva
avère qualche paura La comîcità délia scena liberissmia nasce
da due fattî e cîoè da œrte osservazîonî deile donne che rico-
noscono che la bella non ha torto d'essere affezionata a tal uomo^
e dalla sîtuazione dei tre testîmonî, rinchîusi nella botte, di
cuî ciascuno corbelta Taltro, aspettandodi essere corbellato alla
sua vol ta.
Constant, messe alla porta le donnes corre al totml, vi appiccâ
fuoco e i tre gahnîi nudî e pennuti, scappano perle vie del vil-
lagglo, inseguitî e morsi dai cant, che li prend on o chi sa per
quai selvagginaj battuti da Constant ^ ingiuriati e svergognatî
da tutti, È un inseguimento în cui î disgrazlati cadono e si
rialzano sotto le percosse e perdono sangue dalle ferite e pre-
gano e si raccomandano, nel delirio dello spaventoe del dolore.
Infine la dolorosa caccia cessa, tosto che i tîrannelli hanno gîu-
rato,
Seur la croîz et seur le sautîer,
di non far piu alcum maie alP energica coppîa, e la morale del
racconto è codesta, che la donna ottîene « deniers a grant
PEL I-ABLEAV DI CONSTANT DU HAMEL 555
plenté », perchèy dice i'autore, a a sagement ouvré ». Su questo
sagement vi sarebbero moice osservazioni da (are, ma a noi
importa solo di tener présente che ci troviamo di fronte ad
on ricatto e ad una estorsione, per quanto delle atténuant! Ysa-
beau e suo marito ce n'abbiano parecchie. Qyella che non pos-
siamo condividere in alcun modo è la fiducia di Constant nel
pcrdono dei tirannelli, i quali, riavendo le forze, ritorneranno
ad aver ragionc, ne molto assegnamento potrà farsi su quella
che oggidi si chiamcrebbe Topinione pubblica. Forse ad una
conclusione più rassicurante avrebbe giovato, corne vedremo in
altri racconti, Tîntervento diretto del signore, seppure nella
giastizia di questo lo scrittore medioevale aveva ragione di
fidare*
Pîû avvcduto di Constant, ma non meno interessato di lui,
ci appare il proiagonista di una farsa medioevale, la Farce nou-
velle a .VI . personnages , savoir deiilx Gentil:^hommes, le mounyer,
la meunyere et les deiilx femmes des deulx GentilT^Ijomnus abi liées en
demoiselles^ di cui non trovo fatta menzione dal Bédier, seb-
benesi tratti cvîdentemente dellostcsso argomento del suespos-
xo fableau '. Poichè i mugnai, in quella età, erano considerati
corne abili sfruttatori i dell' altrui dabbenaggine e maestri di
inganni, non c' è da meravigliarsi se ad uno di essi viene attri-
buita Tavvcntura di Constant. Il mugnaio ha la moglie bella ;
due gentiluomini la cortcggiano e le offrono doni e quattrini ;
la donna li rifiuta cd cssi giurano vendetta. Un processo sta per
rovinare il mugnaio ; egli non possiede nuUa, e, siccome « on
ne plaide poinct sans argent », è sicuro di venire condannato.
Che farc ? trarre profitto délia situazione. La moglie finge di
accondiscere aile voglie dei gentiluomini e concède loro un
appuntamcnto separato c con brève intcrvallo. Per6 essa vuole
una spccic di caparra, ed il mugnaio si présenta in scena, ral-
legrandosi col tintinnio dei quattrini, truffati dalla consorte :
Su I su I j'ai de Tor a plein poing.
Femmes sont fines a mer\'eilles.
I. Joseph Bédier, Les jahliaux, 2* éd. Paris, 1895. p.4S4 sgg. Per maggiori
particolari sulla farsa mi sia lecito di rinviare ai miei Éludes sur le Ihèdlre
comique du ftioycndgCy mSiudj di fiblogia romança , fasc. 25, 1902, pp. 270-274.
SjS P- TOLDÛ
L'avvetitura corre corne nd fableuu. Gii amantî dismrbati e
impaurjti, il primo dal secondo e il seconde dal marito si nas-
condono nel polbio, dove troveranno da impennarsî quanto i
loro predece'îsori. Il marito gode !a cena e poi manda a cercare
le dink^iseUes dei gentiluomini e compie su trsse la nota ven-
detta. La sorpresa non totalniente sgradita délie dame a cotale
violenza è messa nella farsa in maggtor luce :
Les mounyers sont tant amoureulil
e non aUrimenti del fableau^ i dtie mariti rinchîusî si svergo-
gnann e si confortano reciprocamente» Pero il mugnaiot troppo
astPto per volere scandalî ed insegiiimenti selvaggî attraverso
il vilki^gio. I due gentiluomini trait i di gabbia, e Tuno di essi
ha pure il grado di prnvsi corne uel fahîeau^ si dichiarano pen-
titi délia loro scappata, rinonciano al denaro ed a qualsiati rap-
presaglia e tan no ritorno aile loro case, mogi niogi e senza dir
nienie a chichessia. E qui, corne nel favolello^ la morale con-
siste nel trîonfo délia debolezza intelligente sulla forza brutale
e neir appHcazîone del proverbio <* i trompeur^ irortiperye ».
Quale è Torigine di questa storiella ? Il Bédier nell' opéra
citata ' drce cosi : « Ce fabliau est représenté en Orient par un
conte des Mille et une nuits (496'' nuit du texte tunisien du
xvi^ siècle; rédition de Breslau Ta supprimé. L^analyse que je
donne est faite d'après la Fkur lascive 9rientah\ Oxford, 1882,
p* 10), Ce conte arabe peut-il prétendre à remonter jusqu'à
l'Inde ? Je Tignore et j*en doute, » E ahroveegli aggiunge corne
sarebbe erroneo il voler ricercare la fonte d'un fableau del
xni'' sec. in racconti arabi posteriori di duecento anni, « car, si
les contes des Mille et une Nuits remontent parfois à des recueils
sanscrits, il est certain pourtant que la Nuit Al-Kader ne fai-
sait poioi partie du roman primitif de Sindibab, que ce conte
n'y est qu'un intrus, mal h propos introduit, à one époque
récente, par un remanieur arabe* «•
lo non credo esatto Tasserire recisamente^ corne fa Tegre-
gio criticoj che non vi sieno narrazioni orientali anteriori al
z. Ivt, pag. Î47.
PEL FABLBAU DI CONSTANT DU HAMEL 557
xii[' st^c, le quali espongano avventure sotto qualche riguardo
analoghe a quelle de! favolello francese, e che per questo il
racconto àtW^ Mille e una Noîîe debba considerarsi come jmer-
polazione récente. Nuîla di più coniQnc délia vendetta délie
mogli oneste^ le quali burlano, punisconoe svaligiano ilibertini
che vogliono imporsi ad esse colla violenxa e colla perseGuzione.
L'Oriente antico, ben prima deir au tore di Constant du Hamel^
s*cra coDipiaciuto, corne vedremo, di tali storiette, sicchè il
gruppo originario, il Navelknkms^ ha una patria d'origine
remota pel luogoe pel tempo. Perù devesi^ in pari tempo, con-
venire che il jabkau e la farsa hanno trattî caratteristîci e par-
lîcolarij sicchè in nessun caso ci troveremo in présenta di una
redazioae che possa indicarsi qaaie fonte. Si tratta di qualcosa
di più di semplici e casuali riscontri, ma le anella délia cateni
non appaîono continuate e progressive*
Si osservi intanto che nelF analisi del racconto orientale, il
Bédier si è preoccuparo piuttôstodi dimostrarele dissimiglianze
che le assomiglianze cnl fabîmu dî Constant du Hamel. Non i
men vero perô che queste ultime sono notevoli. Cercano i
favori di una onesta donna, di niodesto stato, il Kadi, il gran
collet tore délie imposte, il capo délia corporazione deî beccai ed
un ricco negoziante, tutti vecchi c viziosi. La moglie si
accorda col marîto, per spogUare i quatiro libertini e per bef-
farsi di loro. E Tîntrigo ê questo. La donna accorda a ciascuno
di essi un appuncamento, in casa propria, e gli appuntamentî
si seguono in modo da costringere, man niano, i quattro
signori a nascondersi in un gabinetto, lasciando alla bella i doni
e gli abiti. Il marito arriva ukimo, fa uscire i disgraziati dal
nascondiglio e li schernisce senza misfricordia. Le differenze
consistono nel génère di vendetta ^ — travestimento ridicolo degU
innamoratij costretti a ballare come scemi — nella mancanza
delîa rivincica sulle mogli epiù particolarmenie nel fatto,che il
Bédier non osserva, dei libertini i quali non untano colla vio-
lenza, come ne! fabîeau^ di imporsi alla coppia fedele. Questa
violenîîa k invece caratteristica délie altre redazioni orientali,
ch'jo qui verro citando.
Prima fra queste è la Siorta di Upakoçà scritta da Kshemendra
Vyâsadâsa, del Cachemire, nell' undecimo secolo, e di cui rife-
riamo la traduzione francese quale si legge utl Journal Asiatique
(1885, voL 6 & 8, p* 461). Questa moglie, savîa e bellissimaj
5S8
P. TOLDO
alkit comme d'otdinairt- se plonger dans la Gangil, semblable a la Yamu-
ûâ. Sci v£tcméni5 légers et transparents imUaient W blanc sourire de r^aime
gonfl^èe, ses hanches les b^ncs de sable, ses yeux le lotus frais édos, son
teint le bleu sombre des eaux, quand ïe chef de tu police royale, jeune homme
enivré de fortune, et aussi le chapelain du mî ainsi que son ministre, aper-
çurem ce bouquet d*amour. A sa vue chacun d'eux lut subjugué par la passion. Le
ministre dit à Upakoçâ: h Accorde- moi tes faveurs avant tout autre* « Comme
elle revenait du bain à Theure du crépuscule, prise de peur, elle lui répondît
perfidement : «Soit 1 rendes vous (chez moi) àans trois jours a la tombée de
la nuit, q L^amoureuK ainsi berné, elle s'en alla. Délivrée du ministre, elle
dit au chapelain : « Dans trois jours, à la troisième veille de la nuit, je suis
à ta disposition, » Sur ces paroles elle le i^uitta. Puis cîlc s*adressa au chef de
la police : v Dans trois Jours, luidit-elle, àla troisième veille de la nuit, je suis
à toi. n L*accord ainsi conclu, débarrassée des poursuivants, eile rentra cher
elle encore tremblante et répandant en quelque sorte avec ses regards
inquiets, des lotus sur tous les points de Thorizon. Elle alla demander à
Hiranyagupta, dépositaire infidèle de son époux, un peu d'argent sur le
dépôt que lui avait confié son mari. Mais le coquin nia le dépôt et réclama
un rendex-vous chez elle en retour d'un versement : a Dans trois jours, lui
dit*elle, au dernier quart de la nuit je t'appartiens, puisque je suis libre^ et
que tu me veux. » Puis elle coma à ses doniestiqut^s toute T histoire. Le troi-
sième jour vctxUjà la tombée de la nuit^ k ministre se présenta en tremblarit^
presqu*à regret, dans U maison où toutes les lumières étaient éteintes. Upa-
koçâ lui dit : a Je ne puis me livrer i toi sans que tu te sois baigné. » L'amou*
reu3£ obéit et entra dans une chambre retirée et sombre pour y prendre un
bain. Là on Tcnduisit d'huile et de noir de fumée. Des servantes lui en frot-
tèrent les membres pendant un longtemps. Mais voici qu*à la secotide veille,
le chapelain arrive bien vite* La caisse au bois, en forme de coffre, était
ouverte, fl Enire ht dedans, entre, dépêche-toi», crient les femmes au minisire;
«c'est le maître de la maison qui arrive. « Et Upakoçi fit entrer ce haut per-
sonnage dans ta caisse» qu'elle ferma avec un verrou de fer. Bile dit ensuite
au chapelain : « Tu ne me toucheras pas, av^int de te baigner, m A son tour*
il obéit. Tandis qu*on le frotïait dlmile et de noir, le troisième surt'int. En
vérité quel est le roué d'amour» qui pourrait duper même une innocente?
On vous jette le chapelain tout effaré dans k coffre. Par le même procédé^
le chef de la police ne tarde pas, son tour vcnu^ à prendre une mine de
Piçaca. Au dernier quart d* heure de la nuit, Hiranyagupu, cet eKcelknt
marchand, arrive. Le policier, â von tour, est enfermé dans la caisse au bols.
Upakoçâ fait asseoir le marchand à son aise sur un beau siège et lui dît en
face du coffre : « Remets-moi Tarj^ent que l'a confié mon mari. » Hiranya-
gupia lui répond : ^ Livre-toi d'abord a moi, lennne a Taimable sourire.
L'argent que m'a remis ton époux est à moi, ô toî dont ks sourcils sont
beaux, s Alors UpaJsoça élève îa %'oix : ** Eniendea-k, divinités domestiques 1
PEL FABLEAV DI CONSTANT DU HAMEL
5S9
Démons, soyez témoins ! ma fontine esi chcï cet homme* a Ensuite sous pré-
texte d*un bain, elle le fil également endutre de noir. QLiand il fut bien
horrible à voir» eîle lui dit: « Voki îa nuit pa^s&iic; va-t'en. » Le marchand
partit bien viie xm lever du jour, se couvrant le visage par craUne du moniie,
les vétemenis tout déchirés par les chiens qui Tescoruueat ca aboyam* Après
le dépari d^Hiranyagupta, Upakoçâ, qui avait sav^è son honneur avec tant
d'intelligence, s'en alla dès le tnattm à h salle d'audience publique du roi
Nanda. On annonça que b ffiSe d*Upavarsha, lu vertueuse épouse de Va va-
ru ci, étaii Là. Le rot lui fit bon accueil : elle prît ensuite la parole : ce Mon
mari» dk-elk% a déposé sa fortune chez Le marchand Hiranyagupta : cet
homme le nie ; au roi de |uger mamtenant. Le marchand fut appeJé, vint ei
mentit. * Eh bien 1 s'écria Upakoçà, j'ai des témoins à la maison. Qu'on
apporte mes dieux domestiques, enfermés dans leur caisse. Ils diront ce qui
en est. »
Ayant ainsi parlé, elle attendit* Le roi ordonna à ses serviteurs d*apporter
le coffre désigné. On le déposa au milieu de La salle, et L'épouse fidèle s'écria :
^t Allons ! divinités qui méritez tact d*égards, parlez I Dîtes la vérité \ Je vous
brûle à l'instant avec le coffre, sî vous gardez le silence, quand je vous appelle
eo témoignage. « Épouvantés, ils répondirent : t< Oui, c*est vrat^ ton argent
est aux mains d'Hlranyagupta; nous en sommes les témoins. » A ces voix,
à ce prodige, les assistants furent stupéfaits. On ouvrit la caisse et les pri-
sonniers parurent^ frottés de noir et tout nus. Le roi, informé de l'histoire
entière, les punit, traita Upakoçâ comme une sœur et l'honora de riches
présents.
Rassumendo, Upakoçâ è una brava donna, fcdele allô sposo^
molestata e spaveatata da quattro innamorati pott;ntLssimi, da
cui essa deve tutto temere, il capo della polizia, un saœrdoce
accreditato alla cône, Uministro del sovrano ed un debitore, cke
nega impudentemente la somma riccvuta* Upakoçâ finge dî
arrendersi, siaper alloncanare le probabili vetidette, sia per ria-
vere i denari che le sono dovuti e rappuntameato cb'essa con-
cède ai libertini é identico a quelle narrato nel favoletto fran-
cese. L'arrîvo del S(;condo distnrba il primo, corne quello à\À
terzoedel quarto interromperanno le imprese galanti del secondo
e del ler^o. Si noti che in uguale modo i libertini sono spo-
gliati e messi nel bagno, e si osservi anche che rultimOj ossia
il debitore, deve scappare nudo, tinto di nero ed inseguito dai
cani, e un dipresso corne gli eroi gabbati da Ysabeau, La con-
ctusione varia notevolmente, ma essa rappresenta perè sempre
il trionfo delF astuzia femminile che giova al buon diritto; i
potenti piegano il capo e Tagiaterza ritorna a rendere Heta la
JÉO p. TOLÏXJ
casa dti dut sposi. Il martto non app^rc în sceria, ne si sa quai
pine cgti abbia nell* învcnzione délia mogUe^gli dcî famtliari,
rînchiusi nella cassa c che lo spivcnto fa parlare^ ricordano la
nota avvcntura del Jahkûu dt*l prêtre qui fui mis au lardier^
mcoire la tintura ridicola dcl debituie ci £i pensare al priîrt
uint buflato in uguale modoj e per non diversa ragione, in un
altro racconto francesc medioe% aie. Ncl Bahar i dàmsb, cioé nella
Pritnavera dfUa Sapknia^ romanzo persiano che racconta la
storia del princip<^ Gihândâr c délia pnncip€ssa Bahravar', si
cspone un'avvenmra somiglianiissima.
Una buona moglic è perseguicata dal capo délia polizta e da
un magistrato^ per non avère accondisccso ai loro desidcrî. Il
maritû suo è messo da costoro in prigione, e b povera donna, per
salvârc lui e Tonore coniugale^ deve ricorrere ad una asiuzia.
Ornatasi con grazia cî vettuola, essa si présenta ai due tirannclli
e concède loro un appuntamento norturno, a condiziooe che
Itbereranno tl marito. Primo a presentarsï è il giudice, carico di
provvîgionî per una lama cena. La donna l'accoglie affeuuosa-
mente, ma il tenero colloquto c interrotto da un violcnto bus-
sare alla porta. Il giudicc smarrito si nasconde in una specie di
rino, G>Iu! che ha bussato è il capo dclla poli^ia, che entra ed
è uguainîcntc dîsiurbaio neî suoi amori e rinizhiuso in una cassa.
Il giorno M.'gut:nte, la savia donna fa portare i due colpevoli
davanti al sultano, ilquale udita la narrazione del fatto, ricom-
pensa la sposa fcdcle c castiga gli iniqui ministri.
E questa leggenda è ancora oggidi viva e diffusa nel
rOriente, in escmplari sfuggiti, essi pure^ aile ricerche del
Bédier, Uno di essi è del!* Afganistan e lo riassuino brevemente'-
Ëraviun povero tintorc» che aveva unabella moglîe, Fatinia, ed
un proccsso moko spinoso. Faiima prega invano il giudice, il
I. QMéstô raccomOi indicato crroacameme Jallo Scott col liioîodi Bahar
Dûnusçh ç pure crToacameQte trascrilto nell* opcra Dunlop-Licbrccht (Gtt-
£hkhti àtr Prmidkhtm^tn, p. ^46 s^q), fa composto dallo xcdcco înàyât
AlUh ncl 1061 àéV Egîra (16^0 d.C). È quindi opcrâ delb plù lardi
e Jcwjdcntc Ictti^râtura pc-r^tana, mi TA. dicedî averne avtito il soggetia da
uti hrahmino dlndia,
a, Bannu^ ùt tmr Afx'han Frotttiift hy Thorburn, Londra, Trûbncr» 1876,
Ch* U rivisia Miîmm, anno 1878, pag, 177,
PEL FABLEAU Dl CONSTANT DU HAMEL jél
kazij il vizir ed îl re stesso di essere favorevoli aile buone
ragioni del marito, Tutto è inutile, la causa sarù perduia ed il
tintore rovinato, ove la moglie non consenta aile voglie dei
quattro potenti. Che fare ? Fatima finge di cedere, e concède
il soliîo appuntamento in diverse are délia stessa notre. Primo
a presentarsi è il giudice, disturbato daun energico bussare alla
porta» La bella, corne rtel racconco délie Afi7/^ e nna mîte^ lo tra-
veste in modo ridicolo (da vecchia). Il Kazi, seconde arrivaco,
é costretto a coprirsi œn una pelle di vacca; il vizir con
quella d'un vitello, ed il sovrano, cui sarebbe stato irriverente e
pericoloso il tare un simite tiro, è interrotto> nelle sue
galanterie, dalla preghiera matiutina, sacra ad ogni seguace di
Maometto e che vieta le gioie d'aniore. Tutti restano svergo-
gnati e confusi, e Fatima ottiene in taie guisa che il marito
guadagni la causa,
L'altro escmplare è siriaco e raccolto a Damasco dalT Oes-
trup\ Certo marito che ha bellissinia moglie, corteggiatainvano
dal cadi e dal mufti ^ recasi al mercato, per la spesa quotidiana.
Il poveretto à ridotto a tanta miseria da dover %^endere il tur-
bante per provvedere al vitto del giorno. Il tadi ed il muftis
che hanno giurato la sua rovina, Tincontrano, ringiurîano, lo
battono e gli tolgono quella poca compera, che portava alla
moglie* Il marito racconta alla donna quanti gli è accaduto;
costei Tesorta a stare di buon animo; pensera essa alla ven-
detta ed a trovare quattrini. Orna ta délie sue migUori vestî^
ta vezzosissima sposa esce di casa; il caii ed il mufti ^ tosto
che la veggono, Finseguono e le rinnovano le proposte* La fur-
betta finge di acconsencire e concède a ciascuno di essi, in giorni
diversi, Tappuntamento desiderato.
Il mufti si présenta pel primo, e> corne nel racconto précédente,
volendosi nascondere alTarrivodel marito, è costretto a coprirsi
colla pelle di un caprone. Il marito entra, con aria sospettosa,
guarda e fruga qua e là e scorgendo l'animale, gli fa^ con un pre-
tesco qualsiasi,queirDpera;(ionejChe è ricordata in altri favolelli
del génère, quello de) Frestre crucifié^ per esempio* Il giorno
seguente, ecco il cadi che viene ad impigliarsi nelia stessa rete.
i. Cornes de Damas recueil lis et tradulis par J, Ûe^trup (Leyde» i&97)#
p. to; : Le cadi tî h moufîi,
MmanU, XXXÎl }6
562 ^Mȕ^
Questa voira al disgraïîiatè/ nascosto dalla moglie airarnvo
dello sposo, è imposto di fare il bimbo in culla, ma il mariio
trova che per essere di cosi tenera età, egli ha la barba
troppolunga e gliela rade, non occorre dire con quanta grazia,
Poi, tratto di culla, il cadi dcve spazzar la casa e peggio, ed è
alla fine messo alla porta, sporco, stracdato, con una gerla
d'immondtïîiesulle spallc, ed anche lui, corne il mufti, spogliato
di ogni avère.
In una terza versione, dello stesso territorio \ trattasi di
treaniantiy un vescovo, un prête ed un sagrestano, ma qui Tav-
ventura si compUca con qucUa dei tre gobbi e con gli addai-
tamenti a diversa religîone,
Altri racconti di niogli feddied*amanti burlaii offre TOriente
antico, i quali possono essere riavvicinati al fablmu di Constant
du Hanuly pur presentando notevoli différence. Ne! Tuti-
Nanieh^^si esponeuna storiella che ci fa pensare al Roman de la
ViôktU^ a quelle dou roi Flore et de la belle Jeham e del Conte de
Poiikrs^ alla Cimhlina dello Shakespeare, e via dicendo sino alla
QttemuiUe de Barkrim d'Alfred de Musset* Certo militare,
lasciando la moglie, riceve da questa un mazzo di fiori, che, al
pari di altri telesmi di simil génère, conservera la propria fres-
chezza finchè la fede coniugale restera intatta. Un emiro vuol
mettere alla prova codesta virtù femminile e le invia due cor-
teggiatori, i quali vengono si ngoîar mente beffati, Lo stesso
avviene di quattro spasimanti in un racconto dei Mille t un gior-
no K Una divinité, a due sposi che stanno per separarsi, offre
dei loti rossij cui èconcessa la virrù delmazzo succilato. Quat*
tro mercanti estorcono al marito il segreto e tentano la virtù
di leL La bella finge di acconsentire ; riceve, Tun dopo l'ait ro,
i quattro innamorati, li spoglia d*ogni avère, li addomienta,
con certe bevande narcotiche, e poi li segna in fronte con un
marchto rovente. Cosi i quattro passano per suoi schiavi e
t. Comtes d€ Damas traduits et recueillis par J. Oestriip, p. 115.
2. l/s trente-cinq cmtei d'un perroquet {Jôuti-Namâh), trad. di M«» Marie
d'Heures, 4" raccorno (Pirigi, 1S36); cfr. anche Dos Papagaienbuch nellâ ver-
sione dcl Rosen, lipsta, iS^8,
\. I/j miUeet un fmri, ndU iradumoEie un po'sospeitiidi Fèds de kCroim,
ediz. dd Panthéon lit tir aire ^ p. 291. t
PEL FABLEÀU D1 constant DU HAMEL 563
debbono sopportarne d\ ogni génère, prima di riâcquistare la
perduta libertà. Nella stessa collezione' è ripradotta l'avven-
tura dt^lla Storia dti sette visirij ma con taluni cambiamenii,
Uq;i dama ha l*innamorato in carcere. Per liberarlo, offre i suoi
favori alF ufficiale di poHzia, al cadi, al visir ed al governatore,
e, col noto stratagemma, li rinchiude in un armadio preparato
apposu. Poi esce coiramante, e il marito ritornando confonde
la propria vergogna con quella dei quattro rivali.
Ai risconstri ed aile imitazioni di Cmjstant du Hamel che si
trovano in territono francese^ e che sono citati dal Bédier, puo
aggiungersene un' altra, che leggesi nei Contes populaires de la
Hauîe-Bretagm pubblicati da Pau! Sébillot*. Qui glî inamo-
rati sono tre « les trois plus gros bonnets de la paroisse, le
maire, le recteur et Tadjoint », ma la bella Mésille Dorée, che
Qon è moglie, ma fidanzata^ li burla ailegramente e prowede
aile sue nozze coi bro qoattrini. Bîsogna pero aggiungere che
la fanciullaha certa bacchetta magica, regalatale dalla fata pro-
tettricÊ, con cui costringe i tre libertin! a fare quanco essa
vuole, ma, salvoquestaspeciedi ^tï^^/^mIVl^:^/ortt*, non parmi dub-
bio che nel reste, Tantico favolello francese è riprodotto abba-
stanza fedelmente. Ai tre è concesso to stesîio appuntamento
ed essi sono, în modo identico, disturbati, spoghati escherniti.
Qualcosa di si mile trovo pure nelle tradbioni popolari ita-
liane, fra cui una ben nota storiella del Sercambi illustrata-*
dal Rua, ma non parmi il caso di insistere troppo in codes ti
raffrond modem i — i quali provano pur sempre !a vitalità
dell' argomento — perché quello che importa va di determînare
erano gli antécédent! del fabkati e non gia quaoto pu6 narrarsi
ancor oggi a taie propositu.
I . Us miUe d un jours ^ nella tradu^ione un po* sospetia di Pétis de la Crok,
ediz, dd Fantl^on liitéraire^ p. 294*
a. Cfr. per €s. H. Rolland, Romania^ XI, p. n^,
3. Pârigi, ï 880, vol. I, Les galants dupés.
4. Il GiornaU sîQrm délia kikr. itah (voL XLII, p, 265) indica La
wyvtUd di due preii ei un cher m innûmùrati di una donna ^ pp. éii Hermann
Vamhiigen (Erlartgen, lunge, 190^), in cm svolgesi b stesso argomento*
Trattasî di un racconto In ottave, di cm le stampc appaneiigono agli
ivim del 1 50O1 fatte per uso del popolo, con tlue silografie* Il Gtorn. osscrva
ehe il poeratîto si kgge pure iiel ms* Ricc^rd* 1873 ed in un codice
Ginori'Vemun. Sono entrambi mss, del sec, xv; ma il lesto versilîcato
délia novella ù forse ancorà pi y antico.
564 p. TOLDO
Sotto altra veste, con diversi incident! , il tema dei libertini
burlati dalla moglie fedele, visse dunque in Oriente in remou
età e neir Oriente stesso venne poi propagandosi, con singo-
lare fortuna. Nelle redazioni europee, vari e notevoli sono i
cambiamenti che alterano la fisonomia délia prima nanazione,
ma non al punto perô da renderia irriconoscibile. L'aggiunu
più notevole di Constant du Haniel e délia (arsa firancese è quella
délia vendetta sulle mogli ; ma anche ule vendetu non è fatto
nuovo, balzato fuori dalla fantasia délie scrittore francese.
Ricorderô, sempre peraltro in scritti posteriori, un' altra farsa
francese, quella di Naudet che si accorda con la moglie del suo
Signore per un tiro di coul génère, e poi vari racconti popola-
rissimi, il 16** dei Proverbi di Cinzio delli Fabrizi, Talio del
Poggio, la 3* délie Cent Nouvelles NouvelleSy la 3* pure délie
novelle di Margherita di Navarra, la nov. 2* délia parte 4' délie
narrazioni del Bandello e via dicendo, il che dimostra la dif-
fusione notevole di questo racconto, sicchè Tautore di Constant
du Hatnily per dare uno scioglimento, in qualche parte, diverso
a una ben nota storiella, n'aggiunse un'altra attintaessa pure
alla stessa sorgente popolare. Il fatto di sovrapposizioni di rac-
conti diversi è comunissimo in codesto génère di letteratura.
Pieiro ToLDO.
DANTES USES OF THE WORD TRATTATO
IN THE CONVIVIO AND VITA NUOVA
In the course of arranging the material for the article on
trattato in my forthcoming Vocabulary of the Italian Works oj
DantCy I found that Dante uses this word in the Vita Nuova and
in the Convivio in a sensé which, so far as I hâve been able to
discover, is not recognised by any Italian dictionary.
In the Convivio I hâve noted four distinct uses of the word.
In the ordinary sensé of « discussion » it occurs often enough ;
aSy for instance, in such phrases as « ordine del trattato »
{Conv. II, 2. 1. 55 ; ni, 9, 1. i)', « processo del trattato »
(Conv. I, 9. 11. 52-3), « entrare nel trattato » (Coni;. IV, 16,
1. 98), a entrare per lo trattato » {Conv, IV, 16, 11. 34-5),
« procedere al trattato » {Conv. IV, 16, 1. 16), and the like.
It is also the term constantly employed by Dante to indicate a
book or division of the Convivio. It appears from a passage in
the first chapter of the first book that Dante intended the
work to consist of fifteen books or trattati. He says : « La
vivanda di questo Convivio sarà di quattordici manière ordi-
nata, cioè quattordici Canzoni si di amore corne di virtù
materiate » (11. 101-5). As the first book is introductory, and
as, in the existing fragment of the work, a whole book is
devoted to each of the canzoni discussed, it is évident that
the complète work, if carried out on the same plan, would
hâve consisted of fifteen books. That Dante had planned out the
whole work beforehand may be gathered from the instances I
hâve collected of his use of trattato in this sensé of book or divi-
sion of the Convivio \ for, besides the constantly recurring refe-
I. The linc-references are tothe Oxford Dante.
$66 r. TOTKïœ
tmux^w qutsm muato » (Cwitr. II, 7, L 2; 01, ij, U. 214-
I ( ; eu:.), « ti presoitc trattato » (unir, W, lé, 1. 18), « îl prc-
i^crfite irattato »(Oin', II, î, U. 2-3; III, i^ L i» «c); il
fCgtlêfiie ïrar^io » (QmtK II, ré, I, 94 ; III, 7, L 145, ctc),
efc.^ etc., we find points rescrved for disoissioD « eel settinio
trattato » (Cmv. IV, 26, II. 66-7), « nel quattordicssamo trat-
tato w (Gwrt?, I, 12, U. 87-8), lï nci penukimo trattato » (Cour,
n, ip IL 35- 6; IV, 27, L lOï), « neir lUtîmo trattato » (Giiir.
I, 8, L t) r ; m, î 5, 1- 144), and so on.
The thtrd ^ense in whîch Dante uses the word îrauaîù —
ilic scnse which appcars hiîherto to havc becn overlooked — b
that of the narrative or didaak portion of a canzone^asdtstin-
guished from the proemk^ orintroduaory ponion.
Lâstly he applics the tenn on occasion to the canzone as a
whole, in so far as it treats of the panicular subjea he uishes to
discuss* The terni isapplied by Dante in this way even when
he has previously used it distinaively of the narrative portion
of rhe canzone; thos, inG»n^ III, 10, !K 8}-4, after dtscussîng
in ttirn the literal meaniûg of the proemio, the iramtû, and the
îùrnata of the second canzone, he says ; « cosi termina tutta la
litcerale ^ntenza di questo trattato' 9. In the same way» m
his discussion of the third canzone, after referring repcatedly
to the di visions of the poem by theirtechnical namcs, he condu-
èc% with a référence to the caniione in itsentirety asw il présente
trattato ^ (l\\ 2, 1. 164), Similarly in the Vita Ntwva^ after
dtvtdin^ the first canzone into three parts, the first two of
vt^iich he distingtiishes as proemio and trattato {V. N, ^ 19, 11.
9λS), he gocs on in the next chapter to speak of the canzone
itsclf as tt cotale trattato i> (^ 20, 11. 7-8).
To rcEurn to the thîrd scnse of the word — the first canzone
of the Cmvivio (« Voi che intendendo it terzo ciel oiovete »),
which is dividcd by Dante into « tre parti princtpali »,consisting
respectively of the first stan^ta ( « il primo verso >♦), ol the
second, third and founh stanz*is(" ti tre versi che appresso dd
primo seguono »), and of the fifth stan2a( « il quinto ed ultimo
verso »» Conv. II, 2^ Il S 8-72), has no proitnk properiy
I* ComE»ait the sîmllar use €iî trmtûtm^ m Epiii, X, S 9* *^r the Divim
Omtmàia a» a whaKv
« TRATTATO » ÏN THE COKVIVIO AND VÎTA NUOVA 567
spcaking; consequently in his discussion of this canzone Dante
has no occasion to make use of the distincûve terni IratiaîQ,
The second canzone, on the other hand ( « Amor che nella
mente mi ragiona »), opens with an introductory stanza^ and
ts divîded by Danrc înto three parts, to which he gives the
distinctive titles of /^rcs^m/o, îraUato, and tornaîa. He says :
Questa caiT^one principal mente ha ire parti. La prima è lutto il primo
vcrso^ net qudte proemialmcnte si paria. La scccmda sono tuttî e tre U verst
segueniî, ne' quati %\ traita i^acHo chc dire slntcndc ... La terxa pane è il
{|umto cd dtimo verso, ne! quale dirizzo le parole alla canmoe {Conv, III» r
11* 100-9).
Afcer dealing with « la prima parte, che a proemîo fu ordî-
nata » (III, l, \\. 1-3), Dante* procccds to dîscuss the second
part, and it is în the course of this discussion that he makes
use, for thcfirst time in the Cmwivm^ of the word traltaio in the
partîcular scnsc to which I havc rcfcrrcd. Havîng disposed of
the u primo verso » or proemio^ he say.s (III, 12, IL 41-2) :
ft Al secondo verso, il qu.ile è cominciatore del trattato, è da
procedcrc » — « we must now pa^ss on to the second stan^a,
which is the bcginning of the did:ictic or trealise part of the
canjîone *>. A litrlc furtfier on, in the next chapter, he uses the
Word agatn in the samc sensé, and wittiin a few lînes he uses
it to îndicate a book of the Convmo (llh i J, IK 24-Î8), a some-
what awkward juxtaposition which has not unnaturally misled
translatorsof the work,
The third anxone ( « Le dolci rime d'amor ch' îo solia ^ ),
like the second j has an introductory stanza, and is consequently
in like nianncr divided into ihrec distinctive parts* At the
begtnning of his exposition of it Dante says :
Fer meglio dare ad tntendcre la «etitenxadclla proposta caneone, convien si
qudb parti re prima irx due parti ; chè ne 11 a prima parte proemialmente si
parbf nelïa seconda liscguitail trattato (IV, 2^ H* 2-6).
Then, having discussed the first part, he continues : « Veduta
la senten^a del proemlo, èda seguîre il trattato » (W, 3, IL 1-2).
The terni traîtato m this sensé occurs two or three times in the
preceding cfiapter, in which Dante draws attention to the fact
that in the procmw^ or first stanza of the canzone, the subject
5«
4]sci»ive porgpQ of die pocm, tt is deali wîib in tlie itvene
oïïécT :
order, wfaile m die irati^, or
i^fpn 3 Éilio, e poî R tiata E «eii0ir» 3., IL iii-f).
In fbe bst d^pter oT tfals book of tbe Gimcw, wUdi ts
recipinikiory , ihe three dîsïinctîve names, pnmm^ imnaki^ md
tcmaJa^ for îht three divisions of the cuizodê, are ^ain
empbjed br Dante, and hete^in, ^in the thineenth chapcer
of the fhird book, he us^ the word îrûimo m two dtâerent
sensés to two soûceeding paragraphs :
^fOfim Dd vam o^Êtào di
ÔA nd Cifitoio fMdestû, e h lecpoda vxi siesmàoâmo (sicchè la pcma
A 11' *^ -i - jUi» 1 * * il I * * ^ - t X- g 1.
C MIJU— ^t CJBUOIO^ '""^■* tQXft ti^of Wf MJtBttif BdCVCSCflwÇ C flS WtffBfÊÊSK% B
|0, H I-t4X
It is the £}iliii€ to recognize this lecfanical iis^e hy I^nte ex
the term traitai whtch bas led to the misimerpretatîon by sûme
of the amuDentaiors of a disputed passage îti the Fita Anooi.
In bis division ofthe ûrsi canzone ( « Donne^ cfa avetc intdietto
d'imofei )in that work Dante says :
la iSvldcid pHi
diê k dire COÊC S topo, c pofr ncfowt fani. La
fmdk; U secondA è lo tmam tmtM; k
iKM serngide ddk pitcedeiiii piidc ( F. X*., S ^9« ^^ 90^)-
The meanii^ of the expression h mtmto îreitaw in thîs
pas^ge has been mncfa discussol. Somc commentaiors (Gisini
and Pas&erint, for example) take inUnic as a substantive and
Iraiîiiîû as a pamcipk» and intcrpret the phrase to m^n « il pen*
siero ^posto », Inasmtich, however, as Dante, as we hâve seen,
repeatedly in the Gmvniû employs the word tranniû to tndtoite
the trmtise or narrative portion of 1 cinzone, in contradîstiïic-
tion to the prmim and the tamaia^ tbcre can bc hanHy a doubi
*f TRATTATO » IH THE CQNVÎVÎO AND VITA NUOVJ 569
that he oses it hère in the same sensé, Tlie dîfficulty as to the
meaning of ifjtmto has led to a « fadiior lectîo n inîerOy whîch
is adopted by Giuliani. As the mss,, almost without exception,
read intmio^ this variant may be dismissed without further
notke. The explanation propo.sed by Fraticelli seems to be the
right oiie, namely that inlmîù îs to be taken in the sensé of
inksô from inUndere^ so that the phrase would signify « Targo-
mento da me inteso n, i, e, the matter I intend to treat of*
The phrase wou!d, in fact, be simply a concise form of the
expression used by Dante, in the Convivh^ oî the îrattalo of
thesecond canzonCj which he speaks of as ot la pane nellaquale
si tratta quello che dire s'intende » {Conv.^ III^ r^ IL 105-4).
As the term tratîalo^ in the sensé of which we hâve been
speakingj does not dénote a structural division of the canzone,
naturaîly no mention of the équivalent tractûîus is to be found
in the second book of Dante's, De Vuïgari Eloqmntia, nor in the
Summa Artis Rithimici (written eleveii years after Dante's
death) of Antonio da Tempo, both of which deal wîth the
canzone from the point of view of the structure only.
Theterm, however, is usedby Dante's contemporary^Egidio
Colonna Romano, in his commentary on Guido Cavalcanti's
fa mous tt canzone d'amore y> { ^ Donna mi prega perch^ io
voglio dire ») in exactly the same way as Dante uses it. Egidio
begins his comment by saying : u Questo dettato si divide in
due parti, cioè in proiogo, ed in trattato. Il trattato comincia
quivi : In queUa parte, ec. » (that is, at the second stanza).
After disposîng of th^ prohy^o, he takes the remaining stanzas of
ihe canzone seriatim — « questa è la prima stanza del trattato »;
tt questa è la seconda stanza del trattato ^ ■ and so on*
In theletterto Can grande (Epiît, X) — which, inspite of the
doubcs cast upon itsgenuineness by several distinguished Italian
crîtics, I still hold to hâve been written by Dante — in this
letter Dante several times uses the term îractaius of the Comme-
dia as a whole (§§ 9, 12, r?, jj); but he does not employ it
in the spécial sensé to iiidicate the narrative portion of the
poem, as distinguished from the proem. Thèse he hère refers to
^respectively as prologm and pars execuîiva : — « dividicur ista
jïars, seu tertia cantica quae Paradisns dicttur, principal iter in
duas partes, scilicet in prologum et partem executivam. Pars
sccunda incipit ibi : Surgit tmriaUbus pir diversas fauces" ($ 17).
S70
P, TOYNBEE
The terms praemio and trattato, howeverj are used of the Inferm
by Boccacdo in his Cémenta predsely as Dante usesthem of hb
canzoni in the Convivio, At the beginning of his Lei^iom seconda ^
Boccaccio says :
Divîdesi il présente volume (L e, the Cammediu) in ire parti principali, le
quali sono li îre lîbri tie' qyali l'autore medesitno l*ha divjso : de' qiialt il
primo, il quate pcr lèggere siamo aï présente, si divide in due parti, in proe-
inîû, c iraïuto. La seconda comincîa nel prmcipîo del seconde caoto *.
The same or similar expressions will be found in sevend other
cûtnmentarîes on the Conimiâia. Benvenuto da Imola, for
instance, at the beginning of his commentar)' on the Inferm
says :
Primus liber dîvidiiur in duas pannes principales, sciUcet in prooemium et
iraaamm. Prooemium conrinei ma capîiula, in quorum primo autor ptopo-
nit, in secundo invocat, in tertio atiiem incipit tractatum(I, il).
And when he comes to the third canto he says :
EKpeditis duobus primis capitulis prohemîalibus, in quorum primo Dant^
proposuit, in secundo, invocavtt, nunc cûnsequ enter in isto tertio capîttilo
indpit suam narrationem sive tracutum (I, 105).
Again, at the beginning of his comment on the second canto
of the Purgûtorh he observées :
Postquam in supenori capitulo prohemiali poeu Dames proposuit, învo-
cavii^ et narram qualités intravent purgatorium...nuac consequenter in isto
secuodo capitulo incipit suum tracutum de his qui neglexerunt poeoitentiain
usquead ïnortem(in, 50),
The alternative term narratia used by Benvenuto ïoitrûctatus
in his comment on the third canto of the Inferm is interesting
as supplying the due to the correct readîng of the opening
Unes of the comment of the Anonimo Fiorentîno on the same
canto. As printed the passage runs: « Qucsto terzo capitolo si
puo dire essere principio d'un a nazione a tutti gli al tri del pré-
sente primo libro dello 'nfemo û. The editor^ Pietro Fan^nif
t . And again» at the beginning of h^wm seithna^ be says : « Lt gionm $€
m^andmm — Comlncia qui la parte seconda di quesu prima Candca cbiamata
Inficmo, ndJa quak dissi Tau^ïm comincîare il suo tratuto, »
a THATTATO tt IN THE CONVIFIO ANB tlTA NUOVJ 571
finding it difficult to make satisfactoi^^ sensé of the word
tm^ione hère, su^gcsts tlut possibiy the text îs corrupt, but he
bas no emendation to propose. There can be Iktle doubt, I
thlnkj tliat na::^ione is nu-rely a copyîst's blunder for nûrraiiom^
in thesense of Benvenuto^s narmîio or tracîatus. The rtalUn term,
il may be iioted, is used by Vellutello in exactly the same sensé
in the discussion at the begînning of hîs comment on the
înfcrtio as to how the first cantica is to be divided. He says :
È cosâ manifesta che rauiore, secondo lo stile dl molti altri poctî» parte
i^ucsu sua prima cantica in tre parti, propositionc, invocatione e narratione,
Cûme chiaramcnte veggiamo ancora che fa le âm ^eguËntî, £ la invocations
ognihuomo inteiide esser dopo II principio del secondo canto.
. , Ma dove la proposition e, e \â narrratione cominci, sono state de gîi
espositori varie opmioni, perché alcunî hanno detto li primi duc canti csser
in kogo dt proemio, e che net principio del i^rzo cominda la narratione.
We may conclude with two more instances of the technical
ns^ oî tratîato or tractatm by commentators on the Commtdia,
which, with the foregoing, prove tliat tlie term wasa recognised
one in the fourteenth and fifteenth centuries, alihough h has
apparently escaped the notice of the lextcographers. The Pisan
commentator, Francesco da Buti, says in his introduction to the
Inferna :
Qjiesta prima caodca si divide indue pani, perché prima sî pone il proemio^
ove Tau tare propone la materia di che dee tratiare, facendo li uditori dociïî,
bentvoli et attentif corne comanda Farte délia retonca, e la invoca^îone dellc
tnuse ; nella seconda si pone il trattato et incoromcia quivi : Per me st va Sec,
a. H>
Again, at the beginnîtig of hîs comment on the third canto
be says :
Iti questo teno canto lo nostro auiore mcominda il trattatû delsuo poema
Sîmilarly^ Stefano Talice da Rtcaldone says :
Prtmus liber, scilîcet infemus, dividitur in duas partes, scUicet prohemium
eiiractatum. Prohemiuna continct duo capitula. In primo atitor noster pro-
ponit, tangendo materiam de qua est tractaturus ; in secundo învocat ; jn-
lertio iûcipît tractare (1, 8).
Paget ToynbeEp
N
MÉLANGES
CONJECTURES SUR GtRART DE ROUSSILLOH.
1. Bqsoh d'Escam'ion.
Ufi personnage de ce nom joue an rôle important dans le
poème de Girarldi Rmmillm. Cest un alHé du héros auquel il
prodigue les conseils belliqueux. Il est, d*ailleurs, *on cousin*
On ne sait comment identifier Li localité de Carpitm ou
Escar/TÎm d*oLi il tire son surnom *- Je songe à Scarpamief localité
disparue aujourd'hui. Elle était située dans le département de
Meunhe-ct- Moselle, arrondissement de Nancy, commune de
Dieulouard, dans une iie de la Moselle, Détruite par les Hon-
grois eu 9S4î t^nsuitc par te comte Renaud de Bar en î ni^ elle
était réduite i cinquante habitants au xviii' siècle» enfin à
« une « maison au milieu du siècle dernier ^ Mais on sait
qu'elle escistait dés le iv* siècle pour le moins et qu'elle eut
une réelle importance puisqu'elle fut, à l'époque carolingienne,
le chef-lieu du/^aj^'m Scarponmnm lequel s'étendait sur les dio-
cèses de Metz et de Toul V; le nom vulgaire, attesté par des
textes depuis le xni* siècle» était Serpanm ou Charpagne*. Il
représentait une phonétique toute locale; on attendrait m efTtt
Esfharpme,
Ce n'est pas exactement Escarpion ou Carpkm^ mais dans
le poème ou sait que les finales des noms propres simi traitées
avec une certaine liberté pour les besoins de la rime,
I* P, Mcycr, Girart de UmmUmu p. 28, noie t.
3* Vivien de Siiitit-Munin, Dkikmnain de gé^mphU untwrsellf, au
* Scarponric n.
J. Lûtigtioiï. Atiiis fmtonçtifdt îa Framt^ p, 117,
4. Lepagc, Dkiîônttairr iopcff. dt la Mtutif^, p. 127.
CONJECTURES SUR GIRART DE RODSSILLON 573
D'autre part, grâce aux recherches de M, Poupardin*, nous
avons des renseignements sur plusieurs personnages du nom de
Bosooj et il est remarquable que tous appartiennent i TAustrasie
et ne s*écârtent gucre de notre pays. Un Boson» comte de
Metz, est mentionné dès l'époque de Dagobert P". Un autre
souscrit nn diplôme de Charles Martel pour Téglise de Maes-
tricht. Un troisième, en 770, fait don X Tabbaye de Gorze d'une
villa dans la Wocvrc, région naturelle qui s'étend depuis la Meuse
jusque vers Trêves. Au xi^ siècle, deux autres Boson Hreni
surtout leur fortune en Italie, mais il a été prouvé qu'ils étaient
eux aussi originaires du pays entre le Rhin et la Meuse % ainsi
que le plus célèbre de tous, le favori de Charles le Chauve, qui
usurpa la couronne royale le 15 octobre 879 et se rendit
maître de la région où avait dominé auparavant^ en véritable
prédécesseur, le duc Girart dit « de Roussi lion ». Bivin, ou
Buvin, père du dernier Boson, fut en effet comtt* de Metz et
abbé de Gorze, monasière situé dans \q pagus ScarlHinnemis, de
855, au moins, à 863 K II est probable que son fils lui succéda
dans son comté. En tous cas, il esr certain que sa famille hérita
de biens considérables en ces régions* Sa tîlle Richilde, veuve
de Charles le Chauve, fit don à Gorze, en 910, de domaines en
Verdunois et Chaumontois^. En 874, peu après son mariage,
celle-ci avait fondé sur ses biens propres, une abbaye à Juvigny
près Stenay dans le pagus de Woevrc K II parait donc admis-
sible que Boson^ duc puis roi, ait possédé Scarpoime, Mais
il est impossible encore d'établir que c'est lui, plutôt que
ses ancêtres des vu* et vu* siècles, qui est le véritable Bos dEs-
car pion.
La note suivante rendra néanmoins cttte identification plus
vraisemblable.
II. Odilon.
Boson d'Escarpion est donné comme fils d'Odilon, attribu-
tion qui ne peut convenir au dernier des Bosons que nous
\. Lt rûvatttw dr Prcn'ftwi souî ta Carolingiens ^ p» 46 et suiv.
a. pQupardiiii o/ï. cit.^ p. ^û, 77, 296 et suiv.
3./W,. p. 4î-44et307^în.
j, GaUia ChrisHana, XIII s 6ij et Ittstt.f jir.
574 MÉLANGES
venons de nommer, lequel était fils de Bi%în ou plutôt Buvin,
Mais je croîs intéressant, néanmoins, de signaler que le duc
Boson a été en relations avec un personn:ige du nom d'Odilon.
Un cartulaire de Tabbaye de Cluny nous a conservé, en effet,
un diplôme de Charles le Chauve concédant au « fidèle » Odi-
Ion, h la requête de l'illustre duc Boson, une villa royale dans
le pagus de Chaloo-sur- Saône :
..Jibuîtccbittidmi uosire quendam fidelem regni nostri, nomîne Odilônem,
ad dcprecatîonemillustris^tque insignis duds, viddicet Bosonis^ct dilectîssîmî
ministcrialis uostri, de *^uibusdain rébus nostre proprietatis honorare. Siquidem
res sunt site in pago CabiloncnsCt vîllam qoam dicunt Flaviget, mansum
îndominiaitum cum casa supcrposita ac cetens aliîs édifiais et alits mansis
ad ipsum pertinent! bus pariter quinquaginta, ecciesiajti vero in honore sancd *
Evurtii cum molendinisquoque êï cunciis ad se rebus iutraet extra juste Icga-
liEerque pertinentibus^,.
La copie du cartulaire n'a pas reproduit la date, mais le titre
d'empereur que prend Charles, celui de duc concédé à Boson,
le délimitent entre janvier 876 et septembre 877.
Dans le poème on représenie Odilon comme maître de
toute la Provence « jusqu*à Toulon n ou <t jusqu'à Chalon n^
selon tes manuscrits\ I! y a loin, au premier abord, de ce
puissant seigneur au modeste « fidèle >* dont le nom apparaît
pour la première fois dans les textes en 876-877. Sans doute.
Mais, une dizaine d'années plus tard* ^ nous voyons un comte
Odilon faire don à Tabbaye de Saint-Cliaffre-le-Monestier de
biens sis en Diois, et Tacte est daté de mars et de la septième
année du règne de Boson*, Il est difficile de ne pas recon-
naître le protégé recommandé par Boson à Charles le Chauve.
Il éimcmnte, et, vraisemblablement, gouvernait le pagus de Die
qui forme rexirémité septentrionale de la Provence. Il tenait
donc une portion» sinon la totalité de cette contrée.
Il me paraît assez tentant d'admettre que le poème de Girart
ï, Recudî des chartis de Cîuny^ publié par Au g. Bernard et Alex. Bnid,
t. I, p. 2$, D° 21.
2. Tmd, P. Meycr,S 99» P* 4S1 et 134, p. yj-
5. Surb date, voy. Poupardin, o/>* cit,^ 112, note j.
4. Cartulaire deSaint-Cha^rr, publié par Tabbé U. Chevalier (Paris, 1884),
p» 51. L'acte est mentionné dans un diplôme du roi Conrad (iW., p, 108),
CONJECTURES SUR GIRART DE ROUSSÎLLOK 575
de Rotissillan a conservé quelques souvenirs, très vagues, du
fameux usurpateur Boson ei aussi d'un ami et vassal de celui-
ci, le comte de Dlois Odilon. Comment et pourquoi ce dernier
a-i-îl été donné pour père à Boson, c'est ce qu*il est impos-
sible de déterminer.
I
I
m. LesTT3esertois.
On désigne sous ce nom énigmatique un peuple allié ou
%*assal de Girart.^M. Paul Meyer a émis la conjecture ingé-
nieuse' qu'il s'agissait des habitants du Berry^, mais, ajoute^
t'ilj a il semble toutefois difficile que le Berry ait été tenu de
Girari », Cette objcciion, que le traducteur s'est po^ée à
lui-même, n'est pas sans réplique. Il ne semble pas^ en effet,
que Giran dit « de Rousîsillon » ait possédé ou dominé le
Berry, mais un homonyme, son contemporain, a été comte
de ce grand pagus, et, comme le fameux duc, a lutté avec obsti-
nation contre Charles te Chauve. Établi par le roi avant 855,
il se vit dépouillé en 867, sans raison semble-t-il, au profit
d*Erfroi, ancien comte de Toulouse, Mais celui-ci ne put se
mettre en possession de son a honneur w. Au milieu de
décembre il fallut que le roi marchât en personne pour procé-
der à l'installation d'Effroi. Mais, pendant que Charles s'arrê-
tait à Auxerre pour célébrer la fête de Noël, un événement tra-
gique se produisit : Effroi fut surpris en Berry, Il se réfugia dans
une « maison forte ». Les hommes de Girart ne pouvant Ten
déloger y mirent le teu. Effroi tenta une sortie : il fut saisi; ses
ennemis lui tranchèrent la tête et rejetèrent le corps dans le
brasier. Charles exaspéré passa la Loire à Pouilîy (Nièvre) en
janvier 868 et se livra dans le Berry i d'épouvantables dévasta-
tions. Néanmoins il ne put triompher de la résistance de Girart
et de ses comités^ qui demeurèrent en Berry ^. Quatre ans plus
tard, CharkSj décidé à installer solidement en Aquitaine son
1. S 84* p. 40, QOEC I,
3, (Ma conjecture se fonde sur un passage du roman en prose de Lancelot
du Lac. Jeb voudrais mieux appuyée. — P. M.J
5. Hincmar eûtend-il p^r là i des compagnons • de Girart ou des comtes
alliés à celui-ci, on ne saurait décider,
4. Antioks Btrtimani^èd, Waiti, p. 90-91 ; Annale MaltincttmSj «éë.
$7 6 MÉLANGES
fils ai né, réorganisa l*adrainisxration de ce royaume. Il mit
près de Loats, pour le surveiller et le diriger, son beau-frère
Boson qu'il fit charabrier et maître des huissiers. Trois grands
commandements, Auvergne, Toulousain (avec le Carcasses et le
Razès) et Gothie, furent confiés à des marquis nommés Bernard,
dont la fidélité paraissait éprouvée L Bourges était considérée
alors comnae la capiîalc de rAquitaine, Cest en Berry qu'avait
résidé le frère et prédécesseur de Louis II, Charles le Jeune ^,
et c'est en cette même contrée que s'établit évidemment le
nouveau roi d'Aquitaine. On s explique dotic que Charles le
Chauve ait donné à Boson, protecteur du jeune prince, les
« honores Gerardi comitis Bituricensis nK Ce Girart fut cer-
tainement alors dépossédé, si même la chose n'était déjà faite.
Il n*est pas certain cependant, suivant une juste remarque^*,
qu'il fût mort, mais on n'entend plus parler de lui>. Plus d'un
érudit moderne Ta confondu avec Girart de Roussi lion*. Mais
cette confusion peut remonter très haut, et le rôle des Désertais
dans le poème peut être un écho des graves événements de
867-868.
F, Lot,
1. Amtiiiis Berlimani, p. 119.
2. rt A\*aricum caput rcgni AquiEanki « écrit Adrevald ddfis les Miramh
MHCii BtmdicH (Historims â^ FranUt Vil, 560). Cf. la lettre de Cbarks le
Chauve à Nicolasltr que j'ai âiidy set: dans k Moyen- Age^ 190 2, 410-414, 4Ji
416.
j, Annaks Birtvmni^ i<x. cit.
4. M* Poupjrdm {ûp.cii.f p, 9^^294) ^ui a consacre une notice à ce person-
nage obsen'e que, en ce cas, Hincroar eût écrit « quondara comitis »*
5. On voit le 2î juillet 870 un Girart, qui semble comte de Charnsesais
(Ma me), ^Jchanger des biens avec le roi (Roserot, Dixièmes c4irQH9tp(HS dis
Archives de la Haute-Marne, p. 1 1), On peut croire que nous avons sEiIre ay
eomie de Bourges réconcilié avec le roi et déplacé vers 869, mais ce n'est
qu*une hypothèse. Je crois, pour ma pan, que Giran fut réduit au titre de
vicomte et que c'est lui que le pape Jeiin VI 11 eite à Troyes en 878 avec son
seigneur Bernard, marquis de Gothîe, comte d'Autunoîs et de Berry, Voy.
dans Migne, FairôL îaL, u CXXVI, col. 799-800*
6. M. Longnon(^H^ historique ^Vlîl, 261) adonné une raison très forte
contre cette identification. Cf. Poupardirt^ ùf. cit.f z^yi^é.
ORSON DE BEAUVAIS
ORSON DE BEAUVAIS
Dans Hniroduction mise en tête de son édition d'Orson de
Bmuvais S M, G, Paris a cherché» sans grand succès, à retrou-
ver quelque fondement historique à cette composition. Je n*ai
pas mieux réussi que le maître regretté, et il est possible que
cette enquête ne puisse aboutir. Toutefois je ne croîs pas inu-
tile de présenter deux observations-
I* Mjlgré rintérêt du rapprochement avec Ursio^ évêque de
Beau vais de loSj à 1089, je ne pense pas qu'il faille chercher
le prototype d'Orson dit « de Beauvais » dans quelque Vrsus,
Vf sa ou Urno du haut moyen âge, mais bien dans un Hono^
succé^'ané carolingien d'une graphie mérovingienne idie que
Cborso. L*inventairej dressé en 1487, des livres de Charles le
Téméraire, porte en effet Hmrson ^, dont le changement en
Ourson ou Orsm sous Tinfluence à^Ursus ne fait point de diffi-
culté, alors que l'inverse ne s'expliquerait point. Il a existé à
l'époque carolingienne un grand personnage de ce nom, Chorso^
qui fut établi à Toulouse en 778, lorsque Charlemagne organisa
TAquitaine et y envoya des comtes Franks », Dix ans plus tard,
ce dux TolûsanuSt dont la mission était de surveiller les Gascons,
se laissa prendre par leur chef, Adalaric, et eut la faiblesse de
lui prêter serment de fidélité. En conséquence il fut déposé au
plaid de Worms de 790 et remplacé dans la marche de Tou-
louse par le célèbre Guillaume de Gellone ^,
On ne sait rien de plus sur Chrson. Il est impossible de
dire si ce personnage est le prototype d'Orson. Le boulever-
sement du théâtre de ses aventures ne ferait pas obstacle à
ridentification, vu Textrême fantaisie avec laquelle les arrangeurs
des XI 1^ et xm"" siècles ont traité la matière que leur léguait
l'époque carolingienne, mais les intermédiaires font complète-
ment défaut.
I, G. Pans, 1S99, în-8 {S<fC*iti dis ancum têxtts français},
a. G. Paris, c^. ciï., p. v.
j. Fila Hiiidouici par rAsironome, dans Mw. Grrm, Scri(*t.t X. lî» p. 608-
609. La graphie Cf^orso pour Mono est archaïque.
4, Ibid\ Mabille, Le royaume tTAquitûitif, p. 31-52; S. ANl* Jafnhùcher,
des Frankiscixn Rêkhs, i« éd.» î, $10^ 401, 646 ; II, ïi.
578 MiLANGES
2** Nous sommes sur un cerrain plus solide en ce qui con-
cerne le compagnon d'Orson qui le trahit si vilainement,
Hugues ou Ugon^ possesseur de Bourges, Vierzon, Chalais, qua-
lifié une fois (v-, 389) de « comte de Berri ». <t Parmi les
comtes de Berri ouvicorate? de Bourges*,, aucun ne s'est
appelé Ugoa », observe M. G* Parjs S Çest une erreur. Il est
yrai que VArt é vérifier les dëks n'a point consacré à ce person-
nage d'article spécial, mais c e3t un oubli des Bénédictins. Les
destinées du, Berry onL été retracées rapidement plus haut ^. On a
\u qu'ayx fêtes de Pàquçs de Tannée 872, Charles avait donné
à Boson les « honneurs, » 4^^ rebelle Girart. Mais l'habile per-
sonnage était devenu indispensable à son royal beau-père. U
semble n'avoir fait qu'un bref séjour en Aquitaine K A la fin
de cette même année 872 Bernard fils de Blichilde, marquis
de Gûthie, ayant tué !e petit-fils de Guillaume de Gellone^
Bernard « le Veau y^ {VikUiis)^ révolté contre le roi depuis
trois ans, reçut le comté d*Autun où ce dernier s*était main-
tenu *j et devint le premier personnage de rAqnitaine. II me
paraît vraisemblable que, à cette occasion^ il fut également gra-
tifié du Berry. En to^s cas i! est certain qu'il le possédait en 878.
Lui, son vicomte Girarc, d'autres vassaux encore, empêchaient
Tarchevêque Fcotier d*avoir accès dans sa ville épîscopale, sous
prétexte que celui-ci voulait b livrer aux ennemis du roi,
excuse d autant plus plaisante que Bernard était depuis le
milieu de l'année précédente en état de révolte latente contre
Charles le Chauve, pois contre son fils Louis IL En juin 878,
le pape Jean VIII, alors en France, cita au concile qui devait
ce tenir à Troyes en août « son très cher fils Bernard, le plus
noble des marquis » \ Ayant refusé par trois fois de se rendre
à la convocation» Bernard fut excommunié en septembre*. U
tvait jeté le masque et était en pleine rébellion. Au printemps
de l'année suivante le roi s'était décidé S marclîer en personne
1. Loc.dL, pVLXX*
2. Voy.. ci-dessus, p, 576,
5 H Poupirdin» ùp. «Y., 65*^6,
4* AnnaUi BirUniani^ p. 120-121 ; Mabîllc, ùp. cit.
5. Mîgnt;, PaîroL îaL^ U CXXVl/col 7H3, ««cxxxv.
6. îbid,j coU 799 et 8oà, n» CLV et clVî/
ORSON DE BEAU VAIS 575
contre lui pour en finir^ lorsqu'il tomba malade de la mala-
die dont il mourut. Le chambrier Thierry, le plus grand
personnage du royaume ', avec Boson» Hugues TAbbé, Ber-
nard d*Auvergne, conduisit seul Texpédition en Autunois ^
Celle-ci réussit car on n'entend plus parier de Bern.ird \ et il
est certain qu'au lendemain de la mon du roi (ii avril 879),
le quaiuorvirat se partagea ses dépouilles. Boson et Thierry
eurent rAutunois*. Le comte d'Auvergne prit le Berry ei le
marquisat de Gothie, Ce dernier personnage surnommé a Plan-
tevelue » a joué un rôle important an ixvsiècle. Contrairement
aux deux autres Bernard, ses prédécesseurs, sa fidélité ne se
démentit jamais. Il périt dans Tété de 885 en luttant contre
rusurpateur Boson ^ Son fils, le célèbre Guillaume le Pieux^
hérita des te honneurs » paternels, et par suite du Berry^ dont
un acte le montre maître dès 887 •*- Il ne pouvait y avoir grande
sympathie entre le puissant duc d'Aquitaine et marquis de
Gothie et Eudes dont les Francs et les Neusiriens firent un roi,
le 29 février 888 7. Le nouveau souverain enkva n Guîllaunie
le comté de Bourges et le donna i un de ses fidèles nommé
Hugues. Celui-ci ®, bien que secouru par son neveo, le comte
Roger, et un vaillant vassal, nommé Etienne, ne fut pas plus
capable de se maintenir contre lancien possesseur que le comte
Effroi en 867 ^ Une guerre implacable s'engagea entre les
deux compétiteurs, et Hugues périt de la raain de Guillaume.
L^s seuls renseignements que nous possédions sur ces événe-
ments sont dus à Abbon qui lus rapporte à la fin du livre II de
son poème De hcUis Parisiacae urbis. Apres avoir raconté la
campagne d'Eudes en Aquitaine contre les comtes de cette
I * Peut-être k duc Thierr>' d' Ascane de GimH de Rmnsilh» (?)
a . Aunaks Bert m iii tii^ p . 157^
j. Pou pardi Q (op. ctL, 122, note 2) 4 tnontré quUl est fon douteuâ i|uc le
Êls de Biikihildc se soit réfugié à Mâcon*
4» Amuiîâs Biriîmanij p. 148.
S* PouparJm (ûp, cit.^ Î57) comestele fait coQtre Mûhtbacher.
6. Raynal^ Hiûmrt du Btrry, I, 251.
7. Ed. Favre, îimUsœmte de Parts d roi di France {^^^ ï893)t P» ^9-
S. Il se r^ [tac ht? peut-être à Etienne, tîls d'Hugues, coraté çl'Auvcrgîie vers
860, ruéà Qermont par les Normands à la fin de 86 j.
y. Voy. pltis haut, p. 575.
i
580 MÉLANGES
région, révoltés contre son autorité, au printemps et pendant
Tété de 892, il poursuit en ces termes ' :
Inde Lîmovicâs adiens * Arvernicaque arva
Prevalidas Wilelmi acies secum J videt hostis,
550 Ni congressuras fluvius medio prohiberet.
Perdidit ergo suos illic Wilelmus honores,
Ugoni régnante 4 datos, qui Bituricensis
Princeps extiterat consul. Qpare fuit actum
Hos inter germinos comités immane duellum.
Mille super centuni defleverat inclitus arches
Qaromontinsis Wilelmus Ugone negatos ^ ;
Iste minus *, numéro secum majore ^ remotum •.
Hic Ugo dum tandem capitur mucrone Wilelmi,
Supplicat ut pietas ejus succurreret illi.
560 OUi tam sero per verba measse » respondit,
Ocius «<> et dicto trans pectora lancea " transit
Ugonis Intererant ciineis " Rotgarius atque
Valde viri Stefanus fortes, perplura Wilelmi
Leta suis »? dantes, alter comes Ugoniusque
Ipse nepos '«, alter miles Stefanus nimis audax.
Pro dolor ! Ugo necem flesti, Wilelme tropheum 'J.
1. Histor, de France^ VIII; éd. Pertz, in usum scbolarum, 187 1, p. 44;
Tarannc, Le siège de Paris par les Normands en 88 j et 886, poème d'Abbon avec
la traduction (Paris, 1834), p. 220-223, et surtout Paul de Winterfeld dans
Mon, Germ, Poetae latini aevi Carolini, t. IV, 1892, p. 11 3-1 14.
2. Rex dit la glose, qu'elle soit ou non d'Abbon lui-même.
3. Cum rege (glose).
4. R^g^ (glose).
5. Corr. necatos.
6. Ugo sciL deflevit (glose).
7. A millenario (glose).
8. Se. Ijoc dicit quod Wilelmus in illo praelio mille et centum perdidit et Ugo
untum cum se ipso (glose).
9. tarde locutum eum esse (glose).
10. citius (glose).
11. Wilelmi (glose).
12. Ugonis (glose).
13. propriis (glosé).
14. Rotgarius (glose).
15. cepisti (glose).
ORSON DE BEADVAIS S8l
Une traducrîon ne sara pas sans doute jugée superflue '
Puis k roi pénètre en ennemi dans le limousin et k terre d'Auvergne
et voit les puissantes troupes de Guillaume prêtes â k combattre si un fleuve ■
n'eût séparé les armées» Guillaume après avoir été comte du Bcrry » perdit
donc ses « honneiirs », donnés â Hugues par le roî* Ce fut ta cause d'une
lutte acharnée entre les deux comtes, LUlustre duc (aràiôs) de Clermont,
Guillaume avait pleuré mille et cent des sîén^ Cgorgès par Hugues* Les pênes
de celui-ci eussent été moins grandes si lui-même n'eût succombé ♦. Hugues
pressé par l'épieu de Guiliaume implore sa pitié ; « ta prière vient ïrop tard »,
répond ce dernier, et d'un geste plus prompt que la parole il lui transperce
ta poitrine de sa lance. Dans îe camp de Hugues se trouvaient deux
hommes très preux, Eoger et Etienne, 4^U[ mirent à mort maint partisan de
Guillaume^ l'un (Roger) était comte et neveu de Hugues, l'autre» Etienne
était un chevalier très vaillant. Oh douleur 1 Hugues, tu pleures ta mort,
Guillaume, ton triomphe.
On le voit, il est bien difficile de dire si, en rapportant la
guerre d'Hugues et de Guillaume à propos du passage en Berry
du roi Eudes en août-septembre 892, Abbon entend parler de
faits antérieurs ou postérieurs à cette date ^ En tous cas, les
vers qui précèdent ont été rédigés en 896-897, antérieuremeni
à la mort du roi (r' janvier 898). Cest dans cette période
888-896 que doit se placer le gouvernement du comte Hugues
de Berry sans qu*on puisse préciser davantage- Les quelques
vers que lui consacre Abbon suflisent, d'ailleurs, à montrer en
lui un personnage hautement épique, et on ne s'étonnera pas
quOrwn de Beauvah en ait conservé une image, bien que fort
altérée. D'autres poèmes en avaient certainement gardé le sou-
venir, M. Paul Meyer a retrouvé un passage curieux, consacré
aux guerres de Charles Martel, dans une compilation de deux
versions de Girarîde Rmssillm exécutée en 1448. Il y est ques-
tion d'un combat singulier entre « Ourson de Beauvoisin ï> ^,
porte-banmère de Charles Martel, et Hilaire, duc d'Aquitaine, Le
1 . Je me suis aidé de Taranne.
2. L'Allier?
j. Ergo eiplique probablement raititude hostile de Guillaume. Celui-ci
avait donc été privé du Berry avant la campagne du roi Eudes en Aiquîtaine.
4. J'interprète le vers s>7, dont la traduction littérale est impossible.
S* Je penche vers la première supposition.
5. Voy» ce passage dans Orsùn dt Beauvais, Introduction, LXlv^txVL
>S2 '^ MiLâKGCS
pfcmièr suc£OfTibeTatt s'il n'était secoura p^Hi^um it &iTf qui
arrêta les Gascans et AtÊXxrpmts^ On vient de Toir U kttc cotre
Hogu» cU BoTT et Guillaume doc SAqmtûint et comce d*^«-
V€rgm(CIarmmmiinsis^ dit Abbcm). B est vrai qoe le romde dac
est diffèr. nt ainsi qoe Tissue de la lotte et que GuilkoiBe pcs-
sédaic la Gothie et non La GascogM* Le fapprocfaemcot est,
néanmoins, à signaler.
Un dernier mot sur les vîdssttudes dn comté. Le dac Gmï*
taomc se récoodlia avec le roi Eudes ' et coctserra cène contrée
sans contestation le reste de sa vie. Charles le Simple^ dont il
avait été le pintsan en S92 et 895 et auquel 0 avait prêté ser*
ment en 898 ^, n'avait 01 le désir ni tes moyens de la lui reriren
A sa mort (6 juillet 918), ses immenses possessions passèrent
â son neveu et homonyme. Guilbume II, duc d'Aquitaine, eut
peine à maintenir la poissant de sa maison^ La Gotbie lai
échappa aussi toi. Bourgs se révolta ^^ le Beoy très convoité
lot fiit arraché avec son chef-Ueu vers 922 par les ducs Robert
de France et Raoul de Bonrgc^ne. Mais ce deroier, roonié sur
le trône, le lui restrtaa en 924 *. La mésiiitellsgence recommença
aussitôt. En 92e, Raoul fit une nouvelle expédîtîon an delà de
la Loire et mit en fuite le duc d* Aquitaine qui mourut en
Auvergne le ré décembre de la même année. Un an après, son
frère, le duc EfircH, le suivit dans la tombe ^, Lamaison de Ber-
nard Pbntevelue s'éteignît avec lui, et le Beny perdît son iodî-
vidaalité, A partir de cen? époque il n*j a plus de comtes. Ce
grand pagus est aux mains de plnsieufs vicomtes et seigneurs *.
Au cours du %^ siècle, b moitié orientale avec Bourges se relâ-
chera à la « France w. Tau tue mof dé (Dëols^ Issondan) relèvera
I. Le 2 ^eçtemhtt 910, â Bov^e^ il Cbiuk Tilibive de Oiinjr, « fm
mmns iiieîCMociisT«|^> {CMrteideChÊw^^m ira, I, 114)*
|. Âmm^ti M^tmÊtmm ; «9i9(i«r)w Goâdatis
[aQ0ititii}cffli«i( et coojitx i^os IiigicJbii^ fittcm if
BStnnx a GoOldn» ocpoie, ftaode intogepti, m
Vin» m {moer, dfFrmmi, VOL 3|q),
4. Floâoani» Ammâks^ i. ^ 924.
5. iH/., ^ A-9aéet^7;Maliak,if. câ., 47,
6* Sebfi un pissageléfôidam J'Adàmr de QMètaocs, cesL le rot Eudes
qak iurtît éuMi desvkoafteseû Bemr et Ummitio, ea SSj-Mt.
dia i
HBCfL Hoc 4
rcoprtor gqqci-
^^
WAUCHIEK DE DENAIK ^^}
4es çotntçs de Poitou, ducs d'Aquitaine. On nous pardonnera
d'avoir retracé le% destinées du Bcrry de 867 à 927. L'épo--
pée fraaçaiscj nouminent Orson de Beauvais où tes Berruiers
sont sévèrement iugés, a gardé un reflet de cette période tour-
mentée*
F, Lot,
WAUÇHIER/pE pENAIN
Il y a crois ans je puVHaî, dans le t- XXXVI des Noikcs et
extraits des nmnuscriîs^ un mémoire sur un prédeux légeotlier
français conservé à la Bibliothèque impériale de Sainc-Pérers-
bourg, formé d'éléments assez divers eotre lesquels plusieurs
ne se rencontraient dans aucun des nombreux légendiers que
j'avais décrits antérieurement. Il y avait notamment une vïe
de saint Paul TenTiitc (de saipt Jérôme)^ et une vie de saint
Antoine (de saint Athanase), qui offraient un intérêt particulier
pour les motifs qui vont être indiqués. D*abord ces deux vies
étaient rares : ta vie de saint Paul m'était restée j.us(jue là
inconnue; de ta vie de saint Antoine je connaissais bien deux
copies. Tune dans un nis d'Arras décrit ici mérae% l'autre
dans un ms, de Dublin, mais Tune et l'autre incomplètes.
Ensuite on pouvait constater qu'elfes émanaient du même tra-
ducteur, et enfin te prologue de la première fournissait sur ce
traducteur des renseignements assez précis* A k fin de ce pro-
logue, en effet, il était dit que la vie de saint Paul Termite
avait été traduite par ordre du bon comte Pliilippe de Namur,
martyr, J*exp!iquai tant bien que mal ce qualificatifs martyr»
en rappehnt' que Philippe, marquis de Namur, était mort en
odeur de sainteté (1212), mais je n*étais pa^, je Tavoue, con-
vaincu de la valeur de mon explication*
Mon mémoire sur le légcndier de Saint-Pétersbourg était i
peine publié que je fis une découverte fort imprévue qui réta-
blissait la véritable leçon du passage auquel je viens de faire
allusion, donnait le nom du traducteur, et me conduisit à attri-
buer à ce traducteur toute une série d'ouvrages les uns con-
nus, les autres jusqu'ici inconnus ou du moins non étudiés. ,
t^ 31. N9tim.ei exiraiis, XKXVI, 6^ï p, S d« tirage à part.
s 84 MÉLANGES
Cette découverte je la fis tout simplement en parcoumnt,
en vue d'un article que je préparais pour V Histoire httéraire,
d'anciennes notes dont je n'avais conservé qu'un très vague
souvenir, L*une de ces notes se rapportait à un nianuscrit que
j*avaîs vu jadis à Carpentras^ et d'après lequel j'avais publié,
en 1864» des extraits d'une ancienne version anonyme, envers,
de Barîaam et Jûsaphat. Ce manuscrit' est formé de deux par-
ties originairement distinctes, La seconde est une copie incom-
plète du poème de Barlaam et Josaphaî^i la première, d'une tout
autre écriture, contient les versions en prose des ouvrages sui-
vants, tous en prose :
1 . Vie de saint Paul Termite, de saint Jérôme.
2. Vie de saint Antoine, de saint Athanase.
3. Vie de saint Hilarionj de saint Jérôme.
4. Vie de saint Malchus, de saint Jérôme,
5. Vie de saint Paul le Simple (Rufin, Historia monaihù-
mm^ ch. xxxi).
6. Saint Grégoire le Grand, livres I et III du Dialogue^
7. Rufin, Historia mùnachorum^ moins quelques chapitres,
nommément le ch. xxxi inséré plus haut.
8. Rufin, Vêrba smiorum (incomplet de la fin).
Les n** I et 2 sont les vies que j'avais déjà rencontrées dans
le ms. de Saint-Péteisbourg ; les n" 3 à 7 existent en dîi'ers
manuscrits dont il n est pas utile de donner ici Findicatioii*
Toutes ces versions sont du même traducteur, et ce rnduc-
teur, destiné i occuper désormais une place imponante dans
rhîstoire de la littérature du nord de la France, s'appelait
Wauchier de Denain. D nous donne son nom au cours de la
version du Dialvgm de Grégoire.
Le passage signalé plus haut du prologue de ta vie de saint
Paul est, dans le ms. de Carpentras, plus clair et plus complet
que dans le texte de Saint-Pétersbourg; il doit être lu ainsi :
Et pûT ces» ne conte l'en mie la éoicxm ptfolcs ne les gnm fak se ks
i . N« 471 du oûËLvcAu cuAÏûgtie; 465 du ctulogne Lamben. I^ dcscrtp-
ÛOR àotXBéc dans c^ deux cauJûgii» esi eitrèmemcDl dcfecEueusc.
m. Le coEKimen^^^meoi, oottniraeEtt, êià déCnit. Dans ma publkatiaQ de
1S64, fâi donné Le début du poèfiie d'après on ms. de Toun,
I « Ceui qui n'ont cy» de Dieu ni de $& saints» dont d est parlé dans la
piifase pcécédeote^
WAUCHIEH DE DENAIN 58$
âiitts vïes que II saiot home ont menées ça en af riere et menront eocor por
lor enraes sauver^ quar ce seroil perdue chose, por ce qu'entendre n'i vor-
rûienip quar l'en dit, et voirs est, que paroîe est perdue qui n'est entendue
decuer^ Mes a cils qui rcntendeni volentiers vodrai je conter, por ce qu'il
i praignent bonnes essamples et retiengnent, les vies des saînz pères que li
bons cuens Philippes, marchis' de Namur, qui fu hi Baudoin, le bon conte
de Flandres et de H aï no, et la bonne contca&c Margaritc, a faites translater
de latin en roumanz, après Saint Jérôme.
Mais le ms, de Carpentras ne contient pas toutes les œuvres
de Wauchier de Denaîn : il s*en fout même de beaucoup. De
recherches dont on trou\^era le détail dans un anicle du tome
XXXIII de V Histoire littéraire il résulte qu'on peut, avec toute
certitude, attribuer à Wauchier la traduction des vies de saint
Jérôme, de saint Benoît (livre II du Dialogue de saint Grégoire),
de saint Martin* de saint Brice, des Dialogues de Sulpice Sévère
sur saint Martin- Ces traductions se rencontrent en plusieurs
manuscrits.
De plus il est infiniment probable qu'il est Tauteurde la vîe
de sainte Marthe, en prose mêlée de vers, que j'ai fait connaître
dans ma notice du ms. B, N* fr. 6447 (^Notices etcxtraits^ XXXV,
500-503)* II est vraisemblable aussi que c'est lut qui a rédigé
pour un châtelain de Lille appelé Roger, la compilation d'his-
toire ancienne que j'ai analysée dans un précédent mémoires
Enfin, il est à peu près certain qu'il faut le reconnaître dans le
continuateur de Perce%^al qui jusqu'ici a été connu sous le nom
de Gauchier de Dokns, Gancbier de Doudain^ Gauchieràc Dordans^
Gautier de Domt^ etc.-*. Tous ces noms sont altérés. Un ms.
de Perccval, qui, jusqu'ici n'a pas été consulté, porte Gauchier de
Doming î et il n'est pas douteux que cette forme est la bonne.
I, Wauchier avait lu Chrétien de Troies, ce dont on a une autre preuve,
comme on le verra plus loin :
Cir parole fsi tote perdue
S cle ïi*e*i de cucr entendue.
1, Et non pas martyr comme dans Saint*PétersÎ50urg.
5, Ramania^ W\\ %j et suiv. î cf. BuU^ de USoc, des anc. textes, 1895,
p. 83-96.
4. Voir G. Paris, dans HiV^ îitt. delà Fr.,XXX, 28. Cf. Potvîn, Ptrç^
val, note sur le v, 5375;,
5 , DoHamg est randenne îorme de Ekrutin ,
586 ^ ' MÈLANGE*i
je me borne ici à ces rapides indications. Les preuves à Tap-
pui des assertions qui précèdent étant données dans l'article de
VBîstotre littéraire que j*ai annoncé plus haut*, il me paraît inu-
tile de dire deux fois la même chose. Je n'avais même pas Fin^
tedtîon de faire ici la moindre mention de ces découvertes. Maî^j
G. Parisj devant qui je lisais, en commission, mon article, au'
commencement de Tannée dernière, fut frappé de Timportanc^
des faits que j*avais groupés autour du nom de Wauchîer ou
Gauchier de Denain; il me fit observer que le tome XXXIII ne
paraîtrait sans doute pas avant 1903 (en réalîtc il ne pourra
paraître qu'en 1904 ou même 1905) et me pressa de publier
dans la Rotnania un résumé de mes recherches. Je regrette de
ne pas lui avoir donné cette satisfaction plus lôv,
P. Meyer.
LE DIT DU HARDI CHEVAL
Le Dit du cfmfal a vendre que nous avons publié précédem-
ment d'après un manuscrit du musée Condé de Chantilly S sç
retrouve avec un autre titre dans le ms. de la Bibliothèque
nationale fr. 24432 (anc. N.-D. 198), foK 316^- jiyi. Nous
reproduisons cette seconde rédaction^ plus longue que la pre-
mière, en mettant en italique les variantes très nombreuses et
entre crochets les additions que présente ce texte.
Il n'est pas sans intérêt de rapprocher de ce Dit une piêcç
analogue de Guillaume de Machaut, Le Dit du chevah (80 vers)
qui, toute différente par la forme, est presque îdentique pour le
fond-
1 . Cei article a pour titre « Versbns en vers et en prose des Vies du Bere^ u,
il occtipe les pages 254 à 52S du tome XXXUT, mais iî n'est question de
Wauchîer de Detiaîn que dans les pages 258 à 291.
2 . Je dois ajouter que G , Paris se niûntraît beaucoup pluî affirmatîf que
moi sur certains point?. Ainsi j*avaîs d*abord considéré comme simplement
vraisemblable ridentîficatîoti de Gauchier de Denain avec le coniinuateur de
Chrétien de Troy es, G^ Paris la considènit comme absolument certaine^ et
j*aî fini par adopter à peu près son opinion ,
j. Rmnania^ XXI V,. 449-51.
4, Ptiblié par Tarbé, dans Us Œuvres de GuiîJautm ai Maçhault (Paris et
Rdms, 1S49), P* 80-82.
^^^^^^^^^f
HAHDi CHEVAL 587
■
^^^^^^^^F
If A RDI CHEVAL
^H
^^^H Un dm^aï ay qui tst a vendre
32 Car il a le mal saint Eloi ;
^^1
^^F ^ur avoir argent, a dâspi^ndrc;
Les barbes a et îc ïempas.
^^H
^H /^rtroi n7qui Tachâtera
Mitvfisfment va trop tî pas ;
^^H
^H 4 Quemmtt ptiU\ ^aignera.
[Je croi qu'il fu nez en enfer.
^^^1
^H Oi/ ûte 'l'otr, il est fera m
^6 En pié ne li demeure 1er
^^^1
^H ^ Bi est mauvesetnent crrans.
Et si a derrière une courbe
^^^1
^H £/a Mïj.fdomreimis
Qui a Taler moût lî destourbe.
^^^1
^H i Et a soz la gorge oj. neus.
Et s'a formes et s'a molete.
^^^1
^H £/ ^ï/ S£^ U quemîigneui^
40 II est chetive bestelete,]
^^H
^H Et <f^/ potjsis et iit morveus.
Encotdtx ^5f ifn'dttt derrière,
^^^H
^^1 Et si dient hi ^êni entr*eus
Oreilles pendanï; maté chiere;
^^^1
^^^ it Que il t'ai f mojtt pefH tffs i^us^
FûrsiUms est» s*a ks rektis ;
^^H
^H Ht Si sai bien que il n'oit gaute,
44 II est mavaîs, et si ert kns.
^^H
^H Ne 11 ventres ne 11 tient gonte .
Encore plus i meterons :
^^^H
^^M Foi que je doî saîote Péri tu.
Il est trop durs a espérons»
^^H
^H j6 n n*a mestierde médecine.
Et si vous di, se Dîeiis m'avoic,
^^^H
^H Car, se vérité {c5/) en recors,
48 II chiet en rtit tî [chiei] en voie.
^^H
^H Riens ne li demeun? ens d cors.
[Foi que je doî a mes Jj. maîns,
^^^1
^H £; Si mort it regibe c/ grate,
Des mehains n*i a mie mains] ;
^^^M
^H %o Et si fiert âfrrkr de la pâte»
Paeu reuit , on brageus , rest[tyux ,
^^^Ê
^^^ Et SI menjyt tnam*emutnt^
52 Onques mes ch[i]vaus ne fu lieui^
^^^H
^H Mrii il engist plus netement.
[Despuis le tens de Perceval,
^^^B
^H Maigres est et roi des et Ions;
Ke vefstes sî fier cheval :
^M
^H 34 Baui fit et si fst trop fêtons ;
Lons est, deschinês, es piez nctss.
^1
^^M II n^emble ne passe ne trote«
j6 Courbatus, enfosset et creus.
^1
^H ïl ne vaut pas une vk* hùk.
Il sera moui bons a vous tiens
^1
^H [Ht qyanc on Bert et il trebuce.
;........]
^M
^^M 2È li chtet oime pou rie huce,
Or Taehaiis, se vous îH>lésl
^^H
^H Et si ne sai que ce puet estre,
60 Vendus est, se ne vous hastés î
^^^1
^H lï mengue toot son chevestre],
Explkit du hardi cheval
^^H
^H Et si C5iî de mauveïse loi,
^^^H
■
G, Raynaud,
M
^H '6, Le ms. Concté a ki deux vers de pïus. — 9, Vers omis dans le ms.
^H Gîndé, — 1 3 Meilleur^ leçon que
Fecim du ms/ Coudé. — 17. On pour-
J^^^^H
^H raît lire virtt\ pour rétablir îc vers,
mais la leçon du ms. Condé est Car, se
' ^^^^1
^H vfff// ïw*r m-i^rj, — 22. Icï deu»
vers de pîus dans le ms. Condé* —
^^^H
^H 11. lï faudrait nvnjtte, à Tind. pr,, comme au v. 50, mais le ms. Condé a
^^^H
^H la même leçon (m/njust). — 25-6. Vers inter\'ertis dans le ms. Condé. —
^^^H
^H 39. Ms. ferntr. — 40. ki deux vers
de plus dans le ms. Condé. — 4a. Le
^^^H
^H ms. Condé pbce ici les vers 47-d.
" 54- Corr. si fait jfr ?, — 60- Il y a,
^^^H
^H dans le ms. Condé, un vers de plus
qui ne ri ta e pas.
J
j88
MÉLANGES
TRAIT& MIS A LTNDEX AU Xllb SIÈCLE
Le 7 mars 1277^ dimanche de Laetâre^ Tèvêque Je Paris,
Érienae Tempier, prononçait une sentence d'excommuDication
qui mérite d'être menilonnée dans T histoire de la littérature
et dans celle des scit^nces au moyen âge. Le texte en a été plu-
sieurs fois imprimé, en dernier lieu par MM- Denifle et Châ-
telain, dans le Chariularium UniversUatis Parisimsis (I» p. $43
et snîv*), et pourtant il a échappé', semb!e*t-il, à Tattention
des értidits contemporains qu*il devait plus particulièrement
intéresser.
Cette sentence vise d'abord un certain nombre de proposi-
tions jugées contraires à rorihodoxic, dont les auteurs^ « non-
nulli Parisius studentes in artibus x», ne sont pas nommés, mais
qu'on sait être Sigier de Brabant, Boetius de Oacia et d'autnes.
Elle en u mère ensuite :
Ubrum cmm De dmon^ lîve £^ Deo Âmoris^ qui sk incipit : < Cogit
me muhum, etc* », et sic temiinatur : « Cave igitur, GaJtcre, Amoris cmer-
cerê mandatai, etc. «
Item etiim Whtnm gcomantk, qui sic încîpit : « ËititniaveTunt Indi^ etc* »,
et ûc teixnmjcur : «i RâtîûcinAre ergû> super câm, et sic itivenies, etc. >
Item Iibros, rotulo^ scu quaccmos ntgromanticos^ àui continenici expéri-
menta sortilegiorum* învocationes démon tira stvt; conjurationes in pedculum
ânimarum^ seu in qyibus de talibus et stmilibys, fidci orthodoxe et bonis mori-
bus * evidenter àdver^amibus, tractactur, per eandem sententiam nostnài
condempnamus, in omnes qui dicios rot u lus, Jibros, quaierno* dogmatij^ive*
rint aut atidierini, nisi inira septem dies nobb vel canctibrio parisîensi pft-
dicto revebveriin eo modo quo su péri us est expressum in hiis scriptis» CKCom-
mumcatîoiiis sententiam profcricnces, ad allas penas, prout gravitas culpe exe*
gcritj nichilomînus processuri.
Les deux ouvrages désignés par leurs premiers et leurs der-
niers mots sont faciles à identifier. L'un est le livre d'André le
Chapelain, publié en 1892 par M. Troje! ; Tautre est un traité
de géomancie queM, PaulMeyer a récemment fait connaître aux
t, îgituw, dans une édition de 1518, que je possède,
a. L'édition de 1 5 tS ajoute ici i aut oùmikus.
TRAITÉS MIS A l'tNDEX KV XIII* SIÈCLE 589
lecteurs de la Rotnania (XXVI, 247-250), d'après un manu-
scrit de Florence, où Tauteur est nommé Hugo Satiliensis '•
C'est sans doute comme contraires à la loî orthodoxe que
les traités de géomancie, de nécromancie et d autres sciences ana-
logues étaient interdits; j'aime à croire que le livre d*André le
fut au nom des bonnes mœurs. On ponrrait s'étonner que
d*autres traités, jouissant, à la même époque, d'une aussi
grande notoriété, également rédigés dans une forme didactique,
non moins adversanks bonis nwribus^ n'aient pas été l'objet des
mêmes sévérités; cette différence de traitement s'explique
sans doute par le fait que l'un est écrit en latin et les autres
en français, La langue vulgaire, à Tombre de la mésestime en
laquelle elle était tenue par les puissances universitaires et ecclé-
siastiques, jouissait d'une plus grande liberté que celle des
clercs-
La condamnation d'un livre pouvait être efficace lorsqu'il
s'agissait d'un ouvrage commenté dans les écoles, mais que pou-
vait-elle contre des livres destinés à des lectures privées? Il
aurait suffi d*ailleurs, en ce qui concerne plus spécialement
les deux traités mentionnés cî*dessus, d'en changer la première
et la dernière phrase pour se mettre i Tabri de toute pour-
suite. Lorsqu'aura paru, dans VHistoire UtUmire de la France,
l'étude de M. Paul Meyersur les traités de géomancie % nous
y verrons sans doute ^ue l'œuvre de Hugo Satiliensis n'avait
pas été mortellement atteinte ', Il est, en tous cas, évident que le
livre d'André le Chapelain, qui nous est mieux connu, conti-
nua, après 1277, à être lu et traduit. Dans son introduction
à l'édition de ce livre^ M, Trojel a donné les témoignages
qu'il a pu recueillir de la vogue dont il jouissait à la fin du
xnï* siècle. En voici un nouveau, daté de 1290, de quelques
mois antérieur à la traduction de Drouart la Vache.
Guide Mori, dans son remaniement du Ronmn de la Hose^
1. Les éditeurs Ju Cartuliîre de TUniverské de Piris(I, p, S S 7) en signalent
un nunuscm à la bibliothèque d'Erfunh (Amplon., m-4^, n^ 565, fgL 5 j-Bi).
2. Annoncée dans la Romània^ XXVI, 216.
). Au commencement du xiv^ siècle, Jean de ïe Maletotc, de Tournai,
en donnaii un manuscrit à Dierinet. de LUk* (La Grange, Omix de Tma-
mmts ttmrttaisùtis. Testament de juin tJPv n^ to))*
5^0 MÈLAKGES
développant cette idée que ramoitr des femmes n'est soumis à
aucune régie générale, dit :
Kcqucdefit sont aucun pené
De Élire traitté ordcné
Commem on ddt requcrre ûime.
Ou soit datnQLSÎeic^ ou sok dame.
Ou de vikine Eaiion^
^ Oo soit frans ou vikins li hom K
Ce <* traitié ordené i> ne peut être que le De Amore, André
le Chapelain n'était pas le seul, il est vrai, avant 1290, qui eut
donné des modèles de requêtes amoureuses. On en trouve dans
l^ComniaU Mamours de Richard deFournival* et dans VArt
^Aftiours de Jacques d*Amiens', Gui de Mon avait pu lire^
et probablemenc avait lu, toutes ces compositions; il fait du
reste allusion à plusieurs auteurs : « sont aucun pené »■; mais
les trois derniers des vers cités ci-dessus désignent clairement
le livre d*André, Les interlocuteurs de Richard sont toujours
les deux mêmes personnages. Jacques d'Amiens donne à son
disciple trois modèles de prières, la première pour une a dame«, .1
la seconde pour une *^ dame qui est de vaillandise j), autrement dit
« de haut afaire ïi; la troisième pour une « pucelete m. Dans les
réponses qu'il prévoit, il fait parler d'abord une«f dame a mari »,
puis d'autres femmes qu'il désigne uniquement par les expressions
« l'autre », « une autre », « la sage », et qui ne se distinguent
entre elles que par leurs caractères et par la nature des objec-
tions qu'elles opposent au solliciteur* C'est le même soupirant
qui parle dans les différenies situations. Dans André le Chape-
lain, au contraire, les différents cas !K>nt prévus suivant la
classe à laquelle appartiennent les deux amants : pkbeia^ mbiîis
ou nobilior; c* est -à-dire, d'une part, la « vilaine », la k damoï-
selle »,ou la « dame », d'autre part le « vilain jï ou le «t firanc a,
Ernest Lakglois.
ï. Ms. de Tournai, fol, 80.
. 3i Composirion encore inédifé, sur bqudlc je publierai prochainement
une notice,
î, A cause de ces diaiaguts, M, Trojcl estime que Jacques d'Amiem z
connu le De Âmûre. La même observation pourrait Cire faite pour Rîdiard de
Foumlval, et appuyée par cette drconstance que, dans ^% Comdh d'Amours^
INTEGKUM > ENTRE 591
: INTEGRUM > ENTRE
Dans Tédition du Roman de la Rose publiée par Méon et
reproduite par F. Michel, puis par P. Marteau, les vers 395-96
sont ainsi établis :
Neporquant, au mien erscient,
Elle avoit esté sage et gent.
Genty se rapportant à ele^ est inadmissible ; gente fausserait
la rime.
Quelques manuscrits donnent gente ou entey au lieu de gent,
rimant avec escienteou escientre.. Aucun. des- sens connus de ente
ne convient ici, et ce mot, pas plus que gente, n'aurait été
admis à la rime par G. de Lorris avec escientre ; esciente est un
barbarisme.
La bonne leçon, fournie par la plupart des manuscrits, est :
Neporquant, au mien escientre,
Elle avoit esté sage et entre.
Le mot entre, avec le même sens, se retrouve plus loin dans
le poème, où le vers 1 242 de Méon ' :
Mais sages auques, sans outrage,
dQit être ainsi corrigé :
Mais sage et entre, senz outrage.
'% • ' ' j' '
■ ■ Cette fois,, le mot entre n'étant pas protégé par la rime, nom-
breux sont les copistes qui, ne le comprenant pas, ou le trou-
vant suranné, ont modifié le texte. Néanmoins la bonne leçon
n*est pas douteuse.
L'adjectif ^«/r^ ne figure pas dans le Dictionnaire de Godefroy;
je n'en comiais pas d'autre exemple que ceux^ du Roman de la
les supplices ÎDâigés parle dieu d'Amours à ceux qui Tgut dédaigné (voy.
ïfisi. lùt,\ XXIII,'p. 723) sont sensiblement les mènies que dans le traité
d'Artâré le "Chapelain. '
^ I. Dans' l'édition de Méon, le- vers est faux, puisque sages^ aii féminin sin-
gulier, ne saurait être terminé par une s ; dans les manuscrits dont cette
leçon provient, auqtu's est pbcé avant sage^ ou la conjonction et précède san^
outrage.
s 92 MÉLANGES
Roscy et c'est d'après ceux-ci qu'il en faut chercher le sens.
Voici les deux passages où il est employé :
El ' ne se pooit mais aidier,
Ainz retornoit ja en enfance,
Car certes el n*avoit poissance,
Ce cuit je, ne force ne sen
Ne plus que uns enfes d'un an.
Neporquant, au mien escientre,
Ele avoit esté sage et entre^
Quant ele iert en son droit aage;
Mais je cuit qu'el n*iere mais sage,
Ainz estoit tote rassotée (v. 390-99).
Après se tenoit Cortoisie,
Qpi moût estoit de touz prisie,
Qji'el n'iert orgueilleuse ne foie.
C'est celé qui a la carole,
La seue merci, ra'apela
Ainz que nule, quant je vin la.
El ne fu ne nice n'ombrage,
Mais sage et enire, senz outrage ;
De beaus respons et de beaus diz ;
One ne fu nus par li laidiz.
Ne ne porta autrui rancune (v. 1229-39).
Dans le premier tableau, les défauts physiques et moraux sept
réunis, et l'on ne voit pas clairement auxquels s'oppose le
qualificatif entre ; on pourrait croire qu'il est à « force » dans
le même rapport que sage est à « sen ». Mais dans le portrait
de Courtoisie la confusion n'est plus possible. Ici sage et entre
sont les contraires de nice et d'ombrage, et j'en conclus que
c'est à « privée de sens », à « rassotée » qu^ils s'opposent dans
le portrait de Vieillesse.
Quant à l'étymologie de entre, je n'en vois pas d'autre pos-
sible que integrum, accentué, comme en latin classique, sur la
première syllabe. En latin vulgaire, l'accent dans les mots dont
la pénultième brève était suivie d'une muette plus r s'était
avancé sur la seconde syllabe ; mais pour plusieurs de ces mots,
on a signalé une double accentuation : pullîtru>it. pulédro
I. Vieillesse, personnifiée.
LES EXPLOSIVES SOURDES ENTRE VOYELLES EN ITALIEN 593
etpùllïtru> fr. poutre\ palpébra >it. palpébra^ fr. paupiirCy
etpilpébra > it. pâlpetra, fr. /w//>re. Peut-être pourrait-on
citer encore férétru > it. féretro^ fr. fiertre (dont l'origine
savante n'est pas assurée), et cùlcïtra > fr. coltre^ contre. Quoi
qu'il en soit, des exemples certains comme pùllitru, palpébra
autorisent rhypothèse d'un intégru (ouintéger) > entre.
La sémantique, pas plus que la phonétique, ne contredit à
cette explication. Les expressions înteger animiy integer mentis^
intégra mens se rencontrent dans les œuvres d'Horace, et Ton
comprend sans peine qu integer ait pu être employé seul, avec
le même sens de « sain d'esprit », et que son représentant fran-
çais ^/r^ signifie « raisonnable ».
Pour conclure, entre est un adjectif qui doit être certaine-
ment ajouté au lexique de l'ancien français; et très probable-
ment il apporte une restriction nouvelle à la règle du dépla-
cement de l'accent dans les proparoxytons latins dont la pénul-
tième brève est suivie d'une muette plus r.
Ernest Langlois.
LES EXPLOSIVES SOURDES ENTRE VOYELLES EN ITALIEN
De tous les cas où, en italien, on trouve deux résultats dif-
férents provenant d'une même source latine, il n'en est aucun
qui ait été plus controversé que celui des trois explosives inter-
vocaliques, c *,/>, / (fuoco, luogo; stipa^ riva; prato, grado, etc.).
n me semble d'ailleurs, que la question n'a pas encore été
résolue d'une façon satisfaisante. Après M. Ascoli,qui voit dans
rf <-^/, l'influence d'un rf précédent (grâdo^spàda, mais ruôtay,
etM.Meyer-Lùbke, qui considère la sonore comme le développe-
ment normal avant la ionique (jigtitOy hudéllo)^ après la tonique
suivie d*un a Çspiga, riva), et au commencement de Tavant-der-
1. Je me bornerai ici à traiter du c devant û, 0, u, réservant pour une
étude future, la question du c devant e, /, dont la valeur phonétique s*était
déjà transformée en latin vulgaire.
2. Arch. glott. ital., X, 85 et suiv. ; cf. Schuchardt, Lilteraturhl. /. otrm.
u, rom,pbil,j 1887, col. 19. — L'impossibilité d'accepter la théorie d'Ascoli
a été suffisamment démontrée par Meyer-Lubke, Ital, gramm., § 20s, note.
RammniaXXXIl .3
Î94 MÉLANGES
nière sylhibe des ptoparoxycons (pégala^ fâi'ero)^, le dernier
qui ait abordé ce sujet, M. Picri, s'exprime ainsi qu'il suit^ :
Il mio Âssunio è ora di mastrari!, a conferma d'una mia persuasions non
nuova (v. XI V^ 430-1 n.) e cou ttna rassegna îniçgrak o qu;isi ddlc série»
che la dottrina del Mey.-Lb. fillîsce alla pfova, i: che in rcalhà si deve
anc*oggi, e più ch** maî, afferiiiare senjï*altro, che U sorJe mnipit ira vocali
fimangon di rtgoîa inaîkraU, in quahnqttc cofuii;iifnf si frovitto mpêttû alV
mantù. Dd resto, ctrca le càuse che condtjcano ad un anonn^le scadimeûEo
délia sorda, io non presunio dVscluder qudb âoWa attîgtio, intuîia acuta-
mente dairAscoU ; ma incliîio a cr^tï che Va da solo non basii, pel tes-
cano, a produrre codesto efîetto.
En effet, M. Pieri a démontré que les formes avec la sourde %
soit qu'elle précède, soit qu elle suive Taccent tonique, sont
en beaucoup plus grand nombre que les formes avec la
sonore. Quant à celles-ci, il est à noter tout d'abord, qu'il
n'en a pas donné la liste complète, et que parmi celles qu'il a
données, il y en a plusieurs pour lesquelles il n'offre aucune
cxplîcaiion. Laissant de coté, d'une part les formes qui sont,
selon M. Pieri, d'origine exotique ou d'étymologie douteuse,
d'autre part les formes dans lesquelles il voit Tinfluence de la
dissimilation {sîradûyStaiirm^ etc.)-*, nous trouvons les exemples
suivants, qui ne sont expliqués d'aucune façon, et pour les-
quels il est difficile de ne pas croire à une origine tout à fait
indigène, tout à fait populaire : ~ affogare, ago^ O^l^w^'^^^,
agutOf annegare^ asdugare^ hltcga^ dragom^ fégaio, fàlaga, fre~
garf, gruogû, fmpicgare, intrigare, iago^ hutuga, luogo, p'gart^
pégûla^ pcîtégoh^ piegare, sàgatiia, ségah\ segart\ so^ogare^ spic
g&re^ spiga^ spigolû^strigare, sugo; —cave:^ia, cavicchia^ l^^^ggio^
t. Ihii. granim., S S '95» ^^>^ ^^^^ ^*^- Contre la théorie de Meyer-L*
IHerî avait dé\ï soulevé de graves doutes {Ank ghti. ùaL, XIV, 4^, noie;
cf. Meyer-Lûbke, ZdUchr,/. raw, /i/jtX, XXVII, 477).
a. Arck ghlL iîiti, XV, 569 et suiv, Cf, Mever-Lùbke, ZfîYi^Ar, /. rom,
Phil, XXVII, 08.
j. Contre la valeur de quelques-uns des exemples de Pieri^ Meycr-Lùbkc
(Znisihr. f. rom. phiL, XXVll, 568 et suiv.), exprime des objections plus pu
moins griives.
4. Cf. cependant, |ïarmi les exemples de Pieri, pipitu, cocotk, cowmer^^
atcuiiû, hkiXCù^ bacuao^ €dtasla^ meiato, tracoiante^ cotmde, b&ioila, siatni^^
pép&tUy propaggifir, pifuir^îh, pfptrom, propatdû^ artétuù^ etc, etc*
LES EXPLOSIVES SOURDES ÊKTRB VOYELLES EN ITALIEN 59)
imvêntjpévere^fKwero,prmWfravii:(otu^rk^dre, rkauerar^^ sctve-
rare^ stivare; — bûdtssa, badia^ hadiîe^ hidollo, buddlo, caduno^
grado, grfdan\ guidare, medaglia, mescidare, padella^ quaderno,
rédim, scodella, scudù, sodisfan, spada^ spédale^ sirepidin. Plus
douteux, mais à noter cependant : âj^aga, hefana^ covidarcj méliga^
premst0j pûUga, rimproverare^ riva, savûrej scuriada^ j/^wm, soc-
cida, shgare^ scverchto.
Pour ma part> ces quelques mots, sî peu nombreux qu'ils
soient, me laissent dans l'impossibilité absolue de conclure avec
M» Pieri, que les formes avec la sourde représentent le seul déve-
loppenmit mrmaL En d*autres termes, je suis porté à croire que
la seule hypothèse qui puisse résoudre la difficulté, est celle de
deux dialectes dans la ville de Florence elle-même, — Tun, limité
aux classes ignorantes et illettrées, dans lequel la sonore était
normale, ! autre, propre au clergé et aux classes élevées, dans
lequel la sourde se maintenait sans changement.
Il faut remarquer avant tout, qu'une telle hypothèse n'im-
plique que des conditions inhérentes à toute communauté
linguistique, c'est-à-dire, des caractères spéciaux de langage,
propres aux couches différentes de la société, don: la diver-
gence la plus marquée, en général, se trouve entre les classes
inférieures et les classes supérieures \ On ne saurait en donner
un meilleur exemple que celui des conditions linguistiques dans
la ville de Florence elle-même, telles qu*elles existent aujour-
d'hui. Nous ne devons pas croire cependant, que la divergence
actuelle entre la langue vulgaire et la langue élevée à Florence
soit plus grande que celle qui existait au xiii'' siècle. Au
contraire, n'est-il pas naturel de supposer, qu'avec la diffusion
de plus en plus grande de Finstruction et des influences litté-
raires, les différences dialectales ont dû avoir une tendance à
s'effacer plutôt qu'à s'accentuer ?
Uhypothcsc que nous présentons est appuyée encore plus
fortement, semble-t4l, par ]a signification des mots qui pré-
sentent la sonore. En général, ce sont des formes qui ont dû
être d'un usage fréquent surtout dans les classes inférieures
(ago^ boîtiga, spiga, pâuero^ badile, buddh^ padella, scodella, etc.)
ou bien, qui sont d*un caractère tellement universel, qu*eIlesont
I, Cr D^Ovidio, S^f^imfrd, p. s^t.
596 MàtAKGES
dû èire employées consLimment par toutes les classes {luaga^
sirada, pagare, cadum^ etc.).
Il ne faut pas oublier que la tangue italienne s'est formée
dans des coud i lions qui paraissent avoir favorisé^ dans la
ville de Florence, une divergence dialectale comme celte que
nous considérons, NuD^ï part ailleurs, au moyen âge, l'm-
fluence des traditions littéraires du latin parlé, n'était si puis*
santé que dans Tltalie centrale* Il est certain que de telles
influences sur la langue des classes élevées ont dû être au plus
haut degré conservatrices. D*âutre part» la langue des ignorants
et des illetirés, entièrement isolée de ces influences, a pus'aban*
donner librement à ses tendances phonétiques, et devenir avec
le temps, suffisamment éloignée de la langue élevée pour pro-
duire les résultats contradictoires quL' nous avons constatées*.
Enfin, il est évident que deux couches dialectales telles que
noiLs les avons supposées, ont dû exercer l'une sur Tauire une
tnflLience constante, et qu'une définition exacte des limites de
chacune est impossible. Vu aussi la complexité infinie des forces
desquelles dépend la vie des mots, nous pouvons comprendre
comment ont survécu des formes qui montrent, dans des
conditions apparemment identiques, un traitement différent^
comm^fîtoco et luogo^ giîwco et grmgo^ etc.
John Taggart Clark»
I, O, Whitney, Languâ^e ami Uï Study^ l<édlt., Londres, iBfto, p. 148,
COMPTES RENDUS
La chançun de 'Willame. Petit in-40 (imprimé à Chiswick,
juin 1903), non paginé; cahiers signés ait. Deux fac-similés.
La chanson de geste, jusqu'ici absolument inconnue, dont je vais entre-
tenir les lecteurs de la Romania est, si je ne m*abuse, Tune des œuvres les
plus importantes de notre poésie épique, non pas précisément pour sa valeur
littéraire — elle est rédigée gauchement et témoigne d'un art encore bien
grossier — mais parce qu'elle apporte â l'histoire du développement de notre
épopée, spécialement en ce qui concerne la geste de Guillaume au court nez,
un élément nouveau et on ne peut plus précieux. Lorsqu'elle sera connue,
elle deviendra un thème inépuisable de dissertations, et sera, j'en ai peur,
invoquée à l'appui des thèses les plus variées.
L'édition dont le titre est écrit en tète de cet article, a un caractère provi-
soire : elle n'a pas d'autre objet que de multiplier en quelque sorte le manu-
scrit. C'est une copie pure et simple, comme l'indique une courte note finale
ainsi conçue : « Note. The unknown « Chanson de geste » hère transcribed
belongs to the cycle of William of Orange. There has been no attempt to
edit the lext or even to correct not a few very obvious minor errors. » La
transcription, autant que j'en ai pu juger en collationnant l'imprimé avec les
deux fac-similés, est fort exacte. Le manuscrit, du reste, écrit d'une main
anglaise vers le milieu du xiii* siècle, présente peu de difficultés de lecture ».
Mais d'où vient ce manuscrit, dont personne n'avait jamais entendu par-
ler? Voici à cet égard ce que je crois savoir. Il figura en 1901 dans la vente
Edwardes, avec le ms. des Miracles de la Vierge par Adgar, décrit ci-dessus,
p. 393 et suiv. Ce catalogue fut peu répandu. Je ne crois pas qu'il en soit
venu un seul exemplaire à Paris. En Angleterre, il ne paraît pas avoir attiré
l'attention des amateurs, non plus que des bibliothécaires, de sorte que la
même personne se rendit facilement acquéreur des deux précieux manuscrits,
dont l'histoire m'est d'ailleurs inconnue. Sachons gré à ce bibliophile, qui
n'a pas voulu être nommé, d'abord d'avoir autorisé la publication dans la
1. Il y a cependant çà et là quelques méprises : m pour n (ou l'inverse),
c pour «, ui ou «I pour w, etc.
J^S €]OMPT£S REMOUS
Momartia 4'uae notice détaillée du m%* d'Adgar, pais de h libéraliic avec
laijucUe il a mis à îa portée des êrudits compétents le texte de soo autre
manuscrii par utie reproduction tîttéralemetit exacte. Je lut ^uis particuHêre-
ment reconnaissant de m*avûir adresse un exemplaire de son précieux volyme, 1
et, oe sachant si son nom, ni son adresse» je lui adresse ici mes sînUrcs|
remçrcîments.
Le niaiiyscni est incomplet de la fin. Dans son état présent il renferme '
Jî Vî v^^* ^1 €51 bmemabïement corrompu. Un bon quart des vers sont trop
longs ou trop courts, ce qui, pour un texte copié en Angleterre n'est
extraordinaire. En outre, çà et là il semble manqtier des vers. Toutefois, îl^
kudratt se garder de porter au compte du copiste toiit ce qui, dans ce poème,
nous semble étrange et en dehors des règles. J'imagine qiâe, si même nous
en avions une bonne copie, nous y trouverionst en ce qui concerne le style
notamment et la versification, plusieurs pnivttlarîiés asse^ rares ou du
moins dignes de remarque. B: d'abord un moi sur la versification.
Le poème est en vers décasyllabiques assonances Mais, contrairement à
Fusage, dans les iSjo premiers vers environ, les laisses ne sont pas détermi-
nées par une iissonanee unique. Elles ne sont pas monorimcs, La division t^n
laisses est, par suite, asse^ arbitraire, puisque, au cours d'une phrase, t'asso-
fïancc peut changer. Ce n'est pas la, assurément, un signe d*antiquité. Les
poèmes qui offrent cette particularité (par ei. Li ver àel jum^ p. p. Hugo
de Feilitjeen ') ne sont certainement pas très anciens. Mais il serait impru-
dent de se fonder sur cette disposition fort exceplitinnelle pour placer notre
poème à une époque avancée du xn*^ siècle. Il y a des si^^nes d'antiquité qui
me conduisent à en p!acer la rédaction dans la première moitié de ce sièck.
D*3illeurs, à parc ir du v. 1857, les laisses, sauf de rares exceptions, se pré-
sentent dans tes conditions ordinaires. Je ne saisi quoi attribuer cette diffé-
rence. Il ne me paraît pas qu*jl y ait lieu d'attribuer ces deux parties à deux
auteurs, car en réalité il ïCy a aucune coupure dans le récit m v, 1857 ni aux
environs. Le manuscrit étant très incorrect, on peut former plus d'une hypo-
thèse* Le style est simple, peu travaillé. La simplicité n'est pas un défaut ;
mais le récit est abrupt : on passe sans transition d'une idée à une autre, ài^^
sonc que parfois b suite des idées est difficile à suivre. Mais la m en
renurque peut être faite a l'occasion de cetuins de nos plus anciens poèmes.
A cet égard, la différence avec Alhcam, dont la rédaction est plus littéraire,
est frappante. Il y a de beaux passages, des vers bien frappés, la où l'auteur
est porté par Tidée ; mais il y a aussi bien des négligences, et surtout un
bien faible souci de la variété. Si l'auteur est dans le cas d'exprimer deux
fois la même idée, en des circonstances difTérentes, il n'hèsire pas a formu-
ler sa pensée en des terro» identiques. Ces répétitions ne sont assurément
t. Voir Rûmûniû, XJII, 487.
La Chançun de IVillatm 599
pas sans exemple ', mais je ne connais pas de poème où elles soient aussi
fréquentes. Comparons ces deux passages (il s'agit de Girard envoyé par
Vivien pour demander secours à Guillaume) :
750 Toutes ses armes out guerpi li frans»,
Fors sal l'espée dunt d'ascer fu li brant,
Tote vermeille dès le helt en avant,
L'escalberc ) pleine de foie z de sanc ;
Nue la porte ; si s'en vait suz poiant
740 z [vait] la mure vers terre reposant...
Devers la mure si s'en vait apuiant.
Plus loin, en parlant de Vivien resté seul sur le champ de bataille :
En sa main destre porte d'ascer un brant.
Tut fu vermeil dès le holz en avaut,
L'escalberc pleine de feie z de sanc ;
090 Devers la mure [sij s'en vait apuiant.
Guillaume hésite, ou feint d'hésiter à porter secours à Vivien qui soutient
une lutte désespérée en TArchamp :
Loinz sunt les marches u jo ai a comander,
1020 Fort sunt les homes que devreie asembler.
Les mêmes vers reviennent plus loin (w. 1343-4).
Il y a en quelques endroits une sorte de refrain. Il ne faudrait pas s'éton-
ner de rencontrer des vers employés comme refrain dans une vieille chanson
de geste. Nous en avons un exemple ancien dans Gormond^. Mais ici le
refrain a une forme singulière, et, à vrai dire, il n'est pas bien sûr que ce
soit un refrain : il se compose d'un petit vers à rime féminine suivi d'un vers
décasyllabique assonant avec le petit vers. Cette ritournelle prend natu-
rellement place à la fin d'une laisse, ou plus exactement (puisque, à propre-
1. Voir Raotd de Cambrai (Soc. des anc. textes), p. LX, Couronnement de
Louis, p. CLxxvi, etc.
2. Je reproduis le texte sans chercher à le corriger sinon occasionnelle-
ment en note, ou par l'addition d'un mot entre [ ); je distingue u etv, 1 et
/, et j'ajoute la ponctuation.
3. Corr. escalberge (ou escaleberge ?), fourreau. Il y a scaberge en ce sens dans
Guill, le Marécfjaly v. 4596 (oublié dans le vocabulaire de l'édition).
4. Même dans un poème non chanté, comme VEstoire de la Guerre sainte,
il y a une sorte de refrain. Les vers
Qu'il (ou Lors) maldiseient le marchis
Par qui il crent si aquis.
reparaissent plusieurs fois à la fin d'un paragraphe (4^27-8, 4240-2, 4250-2
4263-4, 4277-8), etc. Je dis « une sorte de refrain » : bien entendu, le
refrain proprement dit, tel qu'on le trouve dans les rotruenges, est chose
différente.
600 COMPTES RENDUS
ment parler, « laisse « s*entend d'une tirade monorime), à la fin d*un para-
graphe. Maïs cela n*est pas constant. Le petit vers est toujours le même (ou à
peu prés) : il désigne un jour de la semaine. Le second vers est variable :
lo Lunesdi a vespre.
Oima[ijs comence la chançon de Willame <.
86 Lunsdi al vespre.
Jo ne met mie a pris Wiilame *.
148 Lunsdi al vespre.
En TArchamp vindrent de sur [la] mer a destre.
200 Lunsdi al vespre.
Ja ne combaterai sanz Willame.
a 16 Lunsdi al vespre.
Ben rc deis faire tenir al pris Willame.
Dans le cas suivant, les deux vers sont plutôt dans le corps ou au commen-
cernent qu'à la fin d'un paragraphe :
Lunsdi al vespre,
Les Sarazins de Saragoce terre
330 Cent mille furent de la pute geste,
Il n'i out celai de blanc halberc ne se veste 5...
Le jour de la semaine n'est pas toujours le même :
1135 Des homes Willame ne remist un vif,
Joesdi al vespre.
Fors treis cscuz qu'il out al champ tenir 4.
' Ici le petit vers prend place au milieu d'un paragraphe :
Rcspunt Willame : N'i remaindrez.
Joesdi al vespre,
Descendi li quons Willame,
1x65 Tendi sa main, sil prist par la main destre.
Plus loin nous trouvons mercredi non pas au commencement, mais à la fin
du petit vers :
1778 Iloec desevrerent entre Willame z Gui ;
Lores fu mescredi,
Qjiant s'en tumad Gui li enfcs s
1. JVilîatne est une graphie due au copiste anglais; il faut toujours p
noncer Wilîeme,
2. On pourrait proposer /o ne met mie [tm farce] al pris Willame,
3. Corr. N'i out c. le bl. h, ne veste.
4. Ici le second vers reprend l'assonance qui précède le petit vers. ?
c'est exceptionnel et peut-être fautif.
5. Corr. li en/es Gui.
La Chatiçun de Willatnc 60 1
Dans l'exemple suivant le petit vers ne rime pas :
1977 Après ma mort ten tote ma hérité.
Lores fumescredi;
Or out vcncu sa bataille Willame.
Plus loin revient Lunsdi al vespre. Si on examine dans le contexte tous les
cas où apparaît cette formule, on est conduit à croire qu'on a voulu par là
dater les événements, ou du moins en indiquer plus ou moins vaguement
la succession ou la durée. C'est une indication donnée par l'auteur — ou,
à la rigueur, ajouté par le jongleur chargé de réciter la chanson — qui par
suite, reste en dehors du poème. On peut en effet supprimer ce petit vers
sans.dommage pour le sens.
A envisager les récits eux-mêmes, on y reconnaît tout autant d'invraisem-
blances que dans mainte chanson de geste, et particulièrement dans Alis-
cans. L'auteur n'a aucun sentiment de la réalité. Les combats que Vivien et
Guillaume livrent aux Sarrazins sont d'une criante absurdité. Les héros
chrétiens ont une endurance miraculeuse. Les blessures les plus affreuses ne
les empêchent pas de chevaucher et de se battre. La notion du temps n'existe
pas non plus pour notre auteur. En un délai ridiculement court on ras-
semble des armées considérables. Le lecteur en jugera par l'analyse détaillée
que je donnerai du poème.
Je laisse de côté, par crainte d'être trop long, tout ce qui concerne la
langue, me bornant à dire qu'à mon sentiment ce poème ne peut guère être
antérieur au xiic siècle et qu'il a dû être composé dans la France centrale ;
-an et -en sont mêlés dans les assonances.
Arrivons maintenant à la narration Comme le lecteur avisé a pu le recon-
naître à la simple lecture des citations qui précèdent, le commencement du
poème conte la lutte de Vivien contre les Sarrasms, ayant à leur tête Deramé,
«t les efforts de Guillaume au nez recourbé (a/ curb nies, comme dit le texte »)
pour secourir son neveu. C'est le sujet du Covenant Vivien et d'AIiscans. Ces
deux poèmes, dont le second est la continuation du premier, sont des remanie-
ments de poèmes plus anciens : il n'y a aucun doute sur ce point. On peut
encore admettre que le second, étant rimé, est plus profondément remanié
que le premier, lequel est en assonances. Mais en dehors de ces deux points,
tout n'est jusqu'à présent que conjectures. Peut-être l'examen du nouveau
poème jettera-t-il quelque clarté sur les questions obscures que soulève la
composition tant du Covenant que d'Aliscans *.
1. G. Paris pensait que le surnom de Guillaume était courb (et non court)
2. On verra plus loin que notre poème a été connu aussi de l'auteur des
Enfances Vivien,
602 COMPTES RENDUS
Citons d'abord le début qui donnera au lecteur une idée de l'état de cor-
ruption dans lequel le poème nous est parvenu :
PUist vus oïr de gnnz batailles z de forz esturs,
De Deraméd, uns reis Sarazinurs,
Cum il prist guère vers Lowis nostre empereiir ?
Mais dan Willame la prist vers lui forçur
5 Tant qu'il [1'] ocist cl l'Archamp par grant onur.
Mais sovent se combati a la gent paienur ;
Si [i] perdi de ses homes les meillurs
c Sun nevou dan Vivien le pruz
Pur qui il out tut tens al quor grand dolur.
lo Lunesdi al vesprc,
Oima|i]s comence la chançun de Willame.
Reis Deraméd il est issu de Cordres ;
En halte mer en a mise la flote ;
Amunt Girunde en est venu par force
15 Entréd que si mal descunorted :
Les marchez gaste, les alues comence a prendre.
Les veirs corseinz porte par force del règne,
I^s bons chevalers enmeine en chaenes
z en TArchamp est hui fait cest damages.
20 Un chevaler est estoers de ces paens homes,
Cil le nuncie a Tedbalt de Burges,
lioeques ert Tedbalt a iceles hures;
Li messagers le trovad vei rement a Burges
z Esturmi sis niés z dan Vivien le conte,
25 Od els .vij. cent chevalers de jofnes homes,
N'i out cil qui n'out halberc z broine;
Es vus le mes qui les noveles cunte.
Tibaut revenait de vêpres, accompagné de son neveu Estourmi et de
Vivien, le neveu de Guillaume. Il était complètement ivre. Le messager lui
conte que Deramé, avant remonté la Gironde, dévaste sa terre. « Que
faire? >» dit Tibaut. — « Mander vos hommes », dit Vivien, « sans oublier
Guillaume ». Tibaut répond (dans un passage qui n*est pas très clair) que ce
n'est pas son avis, car si Guillaume vient, ne fût-ce qu'avec quatre ou cinq
des siens, c'est lui qui aura tout le mérite de la \-ictoire. Vivien insiste, mais
I Corr. PL v, 0.. seigiiur^ de f. e? — 5 Suppr. Laicis. — 5 Corr. en FA. a
dolur? — 7 On peut supprimer if-; en effet ce mot est inutile : tous les hommes
de Guillaume périssent dans la bataille. — 9 Corr. Pur cui il out lu^ Uns al
q. d. — 15 Dfsconorter, dont Godefroy ne cite aucun exemple, pourrait se
défendre i cause de dfsccnortar qui est très usité cti provençal ; mais il va plus
loin En ix^stre tere est ijue si mal disotiorte (41) et desettorte {()62). On connaît
en français de<e>u}rUr. Toutefois, avec l'un ou l'autre mot, la locution reste
obscure. Pour le commencement du vers on pourrait proposer En vostre
terre. — 17 Substituer trait à porte. Ce vers revient plus loin. — 18 Suppr.
bons. — 22 L'édition porte ikwins. — 22 Corr. reles. — 2? On peut rem-
placer leîretnent par veire ou dreit. — 24 Suppr. sis niés et dan. — 26 Corr.
ului.
La Chançun de Willamc 60}
Tibaut, soutenu par Estourmi, persiste dans son opinion. Il demande du
vin, il en boit avec Estourmi, et on va se coucher.
Cependant les hommes de Tibaut sont convoqués. Le lendemain il y en a
dix mille. Mais Tibaut, s'étant éveillé, se mit à la fenêtre et vit la terre cou-
verte de Sarrasins armés (on voit que le poète a aussi peu de souci de la
géographie que Tauteur ou le remanieur du Covenant ou à^Aliscans). Il com-
mence à s*inquiéter. Vivien remarque que Tibaut est devenu sage « quant
ad dormi assez », et il conseille d^attendre Guillaume. Mais Estourmi fait
observer qu*il est trop tard : Guillaume n'arriverait pas à temps. Tibaut
monte à cheval, suivi de ses dix mille hommes, pour aller combattre Deramé
(v. 146).
Tibaut invite Vivien à monter sur un tertre pour se rendre compte de la
force des ennemis. Celui-ci, comme il arrive généralement en pareil cas dans
les chansons de geste, s'y refuse : il veut se battre. Tibaut monte alors sur
le tertre, mais il en redescend épouvanté du nombre des Sarrasins, et dit
qu'il ne combattra pas sans Guillaume. Vivien s'entête à vouloir livrer
bataille aux Sarrasins qui sont cent mille'. Mais Tibaut et Estourmi jugent
que la prudence est la meilleure part de la valeur : ils arrachent l'enseigne de
leur lance, par crainte d'attirer l'attention des Sarrasins, et se sauvent. Vivien
reste, car il a fait le serment de ne jamais reculer devant les Sarrasins :
391 Jo me rendrai al dolerus péril,
N'en turnerai, car a Deu l'ai pramis
Qjie ja * ne fuierai pur pour de mûrir.
Ce passage est important : nous avons là un témoignage précis sur le voeu
de Vivien, qui est conté au début du Covenant. Faut-il croire qu'il a existé
un poème où l'auteur du Cmmant a pris cette idée du vœu, et aussi le motif
qui amène Deramé à faire une expédition en France? Pour le vœu, c'est
probable, mais pour le motif, j'en doute. L'expédition de Deramé n'a nul
besoin d'être motivée, et tout le début du Covenant me fait l'effet d'avoir été
imaginé ou profondément remanié par l'auteur de ce poème.
Les Français disent à Vivien qu'ils veulent rester avec lui. Vivien les
engage à se retirer, « car, dit-il, vous n'êtes pas mes hommes et je ne suis
pas votre seigneur. Vous pouvez donc me quitter sans vous parjurer. »
Toutefois un bon nombre d'entre eux restent avec lui. 11 y a ici quelques
vers assez bien tournés :
1. Il y a ici un vers qui m'embarasse : il est dit des Sarrasins : Si pur-
pristrent de fors la certaine terre (229); la même design ition revient plusieurs
fois. Qu'est-ce que la certaine terre ? Nous devons être à peu de distance de
Bourges. Y a-t-il quelque rapport avec les Desertois de Girart de Roussillon
(voir ci-dessus, p. y/Ç).
2, Suppr. ja, comme au v. 598, pour le reste identique à celui-ci.
604 COMPTES RENDUS
Si cum H ors s'esmere < fors del argent.
Si s'en eslistrent tote la bone gent :
550 Li couart s'en vont od Tedbalt fuiant,
Od Vivien remisuent tuit li chevaler ' vaillant ;
Al chief devant fièrent comunalment.
Si cum li ors del argent s'en tume
Si s'en eslistrent tut li gentil home.
Pendant ce temps Tibaut fuyait accompagné de Girart [de Commerci ?]
qui était monté sur un a roncin ». Ici une scène d'un comique macabre :
Chemin faisant les fuyards arrivent à un carrefour où il y avait quatre pen-
dus. Ces pendus éuient atuchés à des fourches très basses. Tibaut heurte
l'un d'eux avec son visage, la housse de son cheval en est toute souillée. Il
s*empresse de l'ôter de dessous lui et crie à Girard de la ramasser. Celui-ci
n'en veut pas, mais il prie, sous un prétexte quelconque, Tibaut de s'arrêter,
et aussitôt, l'ayant rejoint, il le jette à terre d'un coup de poing, lui enlève
ses armes et son cheval, et court rejoindre Vivien ». A noter encore ce trait
qui fait allusion à une chanson de geste antérieure : la targe qu'il enlève
ainsi à Tibaut avait été prise par Vivien à un « hungre »,
57) En la bataille, as prcz de[suz] Girunde,
Qpant il ocist le paen Alderufe 4
z decolad les fiz Burel tuz duze.
Al rei tolid celé grant targe duble ;
Si la donad a dan Willame sun uncle,
580 r il la donad ad Tedbalt le cuard cunte.
Autre scène comique : Tibaut monte sur le roncin de Girart et se sauve ; il
tombe au milieu d'un troupeau de moutons ; l'un de ces moutons se prend
dans son étrier, la tête se sépare du corps et Tibaut arrive au pont de
Bourges avec cette tête de mouton accrochée à son étrier $. Girard cependant
se dirige vers le lieu de la bauille. En chemin il rencontre Estourmi qui
fuyait, et l'engage à revenir sur ses pas. Estourmi refuse : Girard l'abat d'un
1. Edit. ses uiere.
2. Suppr. tuit et chevaler.
3. Cette scène est reprise, mais en des conditions qui la rendent assez
absurde, dans les Enfances Vivien (éd. Wahlund et H. de Feilitzen, v. 3595,
ss.).
4. Pour A del rofe, qui est une forme ancienne. Ce nom se trouve déjà dans
Rolant.
5 . Il est fait allusion à cette scène dans les Enfances Vivien, seulement
Estourmi remplace Tibaut :
Puis en tist il coardie si grant
Hn la bauille W. lou vaillant.
Ce! jantil home, scignor, dont je vos chant,
Voiant .xx. m. chevaliers combatans,
S'an loma il a esperon brochant
A son destrier .j. mouton traînant
(Ed. Wahlund et Feilitzen, v. 580$ et suiv.),
La Chançun de Willame 605
coup de lance avec trois côtes brisées (v. 421). Puis il se précipite au milieu
des Sarrasins en criant Montjoie I « l'enseigne Ferebrace » (v. 447).
Il y a dans le Covenant un château fort construit par un géant a comme
tout exprès pour servir de refuge à Vivien » », et d'où les Français font une
sortie qui n'est guère motivée. On a déjà relevé Tabsurdité de cette
conception *. Rien de pareil dans notre poème. Dans le Coi'enant on voit
aussi Girard se mettre en route pour demander du secours à Guillaume et
essayer de traverser les lignes des Sarrasins en se faisant passer pour Sarrasin.
Cette ruse ne lui réussit pas : il est obligé de revenir auprès de Vivien, pour
repartir ensuite, et cette seconde fois il arrive à se frayer de vive force un
chemin. A quoi bon cette double tentative ? à quoi bon cette ruse mala-
droite? Dans le nouveau poème Girard se rend aussi auprès de Guillaume»
mais en des conditions bien moins invraisemblables, et, comme on le verra,
la scène ne manque pas de grandeur.
Vivien voit ses hommes réduits à sept cents, puis à trois cents :
Vivïen cire parmi le sum d*un tertre
495 Tels trei2 cenz homes vit de sa ) tere.
N'i ad icil n*ait sanglante sa resne
r d'entre ses quisses n'ait vermeille [la] sele.
Devant, as braz, sustenent lur boele.
Que lur chevals nés desrumpent par tere.
De la hauteur où ils sont, ils font, en descendant, une charge contre les
Sarrasins :
Del munt a furent sunt a val avalé ;
Franceis descendent sur le herbe al pré.
Virent des lur les morz z les nafrez.
520 Qui dune veïst les danccals enseignez
Lier lur plaies z estreindre lur lez,
Dune colpat sa hanste qui al braz fu nafrez,
Si la liad, qu'il la poû[s]t porter ;
Dune but del vin qui Tad el champ trové,
525 Qpi n'out de tel, si but del duit troblé.
Excités par Vivien, ils recommencent à charger. Bientôt, ils sont réduits
â vingt, et Vivien, les voyant découragés, les engage à s'en aller ; lui res-
tera fidèle à son serment. Ils partent en effet, mais la voie leur est fermée
de tous côtés par les Sarrasins. Ils reviennent à Vivien et lui disent :
616 Si tu t'en turnes, z nus nus en turneruns,
z se tu combatz z nus nus combateruns,
z que que tu faces ensemble od tei le feruns 4.
1. Jeanroy, Romatiiay XXVI, 182.
2. jeanroy, Roin.y XXVI, 188, n. 2; R. Weeks, Origin of tljt a Covenant
Vivien »,dans The Universityof Missouri Studies, II, 123.
3. CoTT, de la sue?
4. Ces vers sont faciles à corriger : il suffit de lire, au présent, tumuns,
comèatuns (ou de retrancher ei au premier vers) et de supprimer des mots
inutiles aux deux derniers vers.
6oé COMPTES RENDUS
C'est alors que Vivien se décide à envoyer Girard à Guillaume. Il lui
recommande de rappeler à son oncle les services qu'il (Vivien) lui a ren-
dus : à Saragosse, où il lua » le paien Alderufe », à « Limenes la cité »
(Luiserne ?), au « champ Turlenlerei(?) », où il perdit Raher, son fidèle.
Enfin vient une allusion à une bataille sous Orange :
Se lui remenbre de la bataille grant
Desuz Orcnge, de Tedbald Testurman,
En [la] bataille u venquirent [li] Franc.
Jo vinc al tertre od Bernard de Bruban,
670 Cil C5t mis uncles z barun mult vaillant ;
A compaignun oi le cunte Bertram...
Od Deu aie z l'enseigne as Normanz.
Celé bataille li fis jo vcintre al champ ;
675 llocc li ocis Tedbalt lesturman.
Il lui recommande aussi de faire armer Guiot son petit frère (le Guichardet
du Covmant). Girard pan et se fait voie Tépée au poing. Mais, quand il a
traversé la foule des Sarrasins, « sun bon cheval li crevé suz sa celé ». Le
voilà à pied : il a quinze lieues à faire, personne à qui il puisse parler, pas de
cheval où il puisse monter; il a faim et soif. Alors il est contraint de se
débarrasser de ses armes. La scène est vraiment épique :
715 « Ohi ! grosse hanste, cume peises al braz!
N'en aidera[i] a Vivien en TArchamp
Qui se combat a dolenis ahan. »
Dune la lance Girard enmi le champ.
« Ohi I grant urge, cume peises al col !
720 « N'en aidera[ij a Vivien a la mort. »
El champ la getad, si la tolid de sun dos.
« Ohi î bone healme, cum m'estunes la teste!
N'en aiderai a Vivien en la presse
Ki se cumbat el Archamp sur Terbe. »
725 11 le lançad z jetad cuntre terre.
Finalement il ne garde que son épée, sur laquelle il s*appuic en marchant.
Pendant ce temps Vivien continue à se battre à la tête de ses vingt com-
pagnons, qui sont tués les uns après les autres, et il reste seul contre l'armée
sarrasine. U finit par succomber sous le nombre, après avoir reçu de terribles
blessures. Les Sarrasins remportent et le placent sous un arbre (v. 926).
Nous revenons maintenant à Girard. Ce n'est pas à Orange, comme dans
le Ccvtfunt, qu'il va chercher Guillaume, mais à Barcelone; seulement on ne
voit pas bien si l'auteur place Barcelone au sud ou au nord des P>Ténées ■.
Li ^uons Willame ert a Barzelone.
Si tu repcirc d'une bataille lungc
Qu'il aveit fait a BurJele sur Girunde;
9; > Perdu i avcit grant masse de ses homes.
Este vus Girard qui noNcl[e| li cunte.
I. Plus loin nous trouvons Guillaume i Orange. V a-t-il un mèbn^
de deux rédactions ?
La Chançun de Willame 6oj
Il semble bien, d'après ce passage, quj Baiwelone ne soit pas trop loin de
Bordeaux. Sûrement Ténigmatique Archavip est en France, s'il faut s*en
rapporter à ces vers du discours que Girard tient à Guillaume :
960 Reis Deraméd est eissuz de Cordres,
En halte mer en ad mise la flote,
z est en France que si mal desenorte '
On sait que dans les chansons du cycle de Guillaume, VArchant (ou Alis-
cans) est tantôt placé en Espagne et tantôt en France '.
Girard reproduit fidèlement les paroles de Vivien. Le passage indiqué plus
haut, sur « Limenes la cité », paraît ici plus correct :
Sez tu que te mande Vivien le ber?
Ke te sovenge de Limenes la cité
Ne de Breher, le grant port sur mer 5
990 Ne de Flori qu'il prist par pocsté.
Guillaume^ voulant éprouver Guibourc sa femme, feint d'hésiter à aller au
secours de Vivien. Guibourc insiste et le prie de mener avec lui son neveu
Guischard, qui vient d'être adoubé chevalier. Guillaume s'empresse de céder.
Le lendemain il adoube Girard, qui n'était qu'écuyer, et le soir il part à la
tête de trente mille hommes. On marche toute la nuit, et le lendemain, au
lever du jour, on arrive à TArchamp. Les Sarrasins s'embarquaient ; ceux qui
étaient à terre s'enfuirent, car ils étaient désarmés (ce qui s'explique mal).
Ils courent à leurs navires, prennent leurs armes et attaquent Guillaume. La
bataille, dit le poète, qui ici s'abstient de tout développement, dura du lundi
au jeudi matin, et aboutit à l'extermination des hommes de Guillaume :
1125 Des homes Willame ne remist un vif,
Joesdi al vespre,
Fors trcis cscuz qu'il eut al champ tenir.
Ces trois écus sont, outre Guillaume lui-môme, Girard et Guischard. Mais
Girard est tué : le poète conte sa mort en une quarantaine de vers. Vient
ensuite le tour de Guischard, et ici il y a un trait à citer. A Guillaume, qui
lui fait entrevoir les joies célestes, il répond que, s'il pouvait remonter à che-
val il irait à Cordres où il est né* :
1. Pour ce vers, cf. ci-dessus p. 602, note sur le v. 15.
2. M. R. Weeks soutient que le Coveuant place cette localité au double
nom en Espagne {Romania, XXX, 192, 193), mais les passages auxquels il
renvoie sont bien peu décisifs. Je ne crois pas du tout à l'explication, proposée
par M. Jeanroy (/?ow/an/(Z XXVl, 195), de VArchant par Afo«/<r Argetito. Je
suppose qu' Aliscatis, bien connu, a été substitué par les romanciers à l'an-
cien Arclxint ou plutôt Arcijamp. 11 y a toujours Archaut, Arclmis dans les
Enfances Vivien.
3. Il y avait, au v. 651 : Xe del grant port al rivage de mer.
4. Rappelons-nous qu'il est neveu de Guibourc, qui était sarrasine de
naissance.
COMPTES RENDUS
1196 1 N'cQ crtrreic mcb ea voïïrc Ddmpnedé,
Car ço qiit )0 tic vd ne puis lorcr ;
Car SI \o eusic MihQcnet merciei
Ja ne veïsjic les plaici àt m^s costex, •
GuUïâume h blâme, et k prend sur son cheval dernère sa selle. Dans cette
position linfortunu Guischard reçoit un dard <^ui Tachève. « Guillaume ne
fuit pas» dit le potite* tu ai s il s'en va o :
1324 M'en fyît mie Willame» ainz s*en vt\%.
n s'en va jusqu'à ce qu'it arrive auprès de Guibourc, Est-ce à Barcelone?
On ne le dit pas, et la suite montre que cVsi à Orange. Le nîtour est conté
sans détails. A son arrivée, Guillaume est témoin d'une scène asse/ imprévue,
qui toutefois ne paraît pas Tétonner autrement. Dame Guibourc a convoqué
par messagers ses hommes» et la mobilisation s'est opérée avec tant de rapi-
dité que déjà trente mille sont arrivés dont quinze mille sont prêts à se
battre K Elle a réuni les principaux chefs (ks k demeines ») et leur ofïre un
banquet. Elîe-méme sen le vin et leur fait dire et chanter fables et chançons.
Tout à coup, regardant par une fenêtre, elle aperçoit Guillaume portant sur
son cheval un homme mort. Elle suppose que le mort est Vivien, Mais les
barons lui disent que c'est probablement un jongleur, en même temps bon
combattant, que Guillaume affectionnait* Ici un éîoge, assurément hors de
propos, de ce jongleur* Mats le passage est bien curieux et sera dorénavant
souvent cité :
« En tote Frijïce n**d ïj bon cîîânT(<lûr,
N(e) en bataille pins hardt fercûf ;
îjéù t de la gcïte 11 iâtdire leï chans^unsî
De Qodoveu le primer empereur
Qjie en duc« France crecic en Deu nostre Sd^nur,
Z de sun (li Flovetii le poîgtieûr
KL (Cui il ?) las$ad èc dtîke Frmcc Tontir,
126% t de tuî le» feis qui furtni de valur
Trcsqi": a Pcpîu h petit pDignear',
t dc' Charieniitigne t de Rolsni suii nevou.
De GIratrd de Vîane z d'OHver qni fu lant prouz.., 1
Guibourc cependant va au-devant de son époux et voit Guischard mort.
Elle réconforte GuilLiumc qui se lamente d'avoir quitté k champ de bataille
où tous $e^ hommes ont péri, et dît des paroles héroïques :
Mielz voîl que mottgeji en t'Archunp sur mer
ijaç Que ton lignage *€it par tei avilc
Ne «prè» ta mort a tes heîra reprovè.
ï. Et les autres, de quoi senn;nt-ils? la m^c idée revient au moins deux
fois, dans les mêmes termes : vv. 109^-1100, et 12^^-4.
2. Cf. G* Paris, Hist. poii, di Cèmruffmgnt ^ p. jaj.
La Chançun de Willanu 609
Mais Guillaume lui répond en pleurant qu'il est trop tard pour recom-
mencer la bataille. Avant qu'il ait pu rassembler une nouvelle armée, les
Sarrasins se seraient rembarques ». Il reprend courage lorsque sa femme lui
dit qu'elle a déjà réuni, dans le palais, trente mille hommes. Ht, s'adressant à
ceux-ci, elle leur promet des terres, çt même des femmes, s'ils veulent aller
en TArchamp. Guillaume, cependant, prend abondamment la nourriture dont
il a grand besoin. Puis il dit à Guibourc : « Qui tiendrait ma terre, si je
mourais? » — Alors se lève son neveu Gui, fils du marquis Beuve Cornebut
et de la fille du preu comte Aimeri ; c'était le jeune frère de Vivien, il n'avait
pas encore quinze ans. C'est lui qui, si Guillaume meurt, tiendra la terre et
servira Guibourc. Guillaume le repousse d'abord, mais enfin il s'attendrit et
lui dit :
1477 « \ la foi, nies, sagement as parlé :
Cors as d'enfant z si as raisun de ber];
Après ma mort te scit m un feedoné. ■
Le lendemain malin Guillaume se met en route avec ses trente mille
hommes. Mais Guiot se désole d'avoir été laissé en arrière : il veut à toute
force rejoindre son oncle. Guibourc refuse de le laisser partir : Guillaume ne
le permettrait pas. Elle finit par céder quand le jeune homme lui dit :
1555 « Jo sai mentir : si li voldrai cunter
Que )0 vus sui tut par force eschapé. •
On donne au jeune homme des armes proportionnées à sa taille ; il part
avec ses écuyers et le lendemain arrive en l'Archamp au moment où Guil-
laume haranguait ses hommes (à noter qu'il fliit deux discours distincts : l'un
aux « demeines », l'autre aux « vavasseurs »). Guiot dit à son oncle, étonné
de le voir, qu'il s'est échappé, malgré Guibourc *.
Au moment où les Français fondent sur les Sarrasins, ceux-ci, qui ne s'at-
tendaient guère à une nouvelle attaque, étaient en train de manger. Ils s'en-
fuient vers leurs navires, laissant leurs tables chargées de mets, et vont prendre
leurs armes ; c'est la même scène que plus haut. Tout allait bien pour Guil-
laume et les siens, quand Deramé, sortant d'un c aguait », se précipite sur
eux avec quinze rois, et inflige une défaite complète aux Français. Jusqu'ici
nous avons rencontré peu de noms propres. Mais en cet endroit, les quuize
1 . Il y a dans le discours de Guillaume une assertion bien surprenante :
TriU ceni an^ ad z cinquante passe^ \ Que jo sui prinus de tna mère ue^. |
VHl sui z jehhy ne puis armes porter. Ces vers doivent être l'addition d'un
copiste.
2. Dans le Covenauty Guischardet échappe réellement à la surveillance de
Guibourc, qui toutefois le fait suivre et ootient qu'il revienne sur ses pas, lui
promettant de lui donner des armes et de le faire adouber chevalier, ce qui a
lieu en effet (Jonckbloet, t. I, p. 195-6).
RtwwM, XXXIL }9
élO COMPTES REXDUS
rob Kmt nommés, comme aussi quelques-uns des guerriers firaoçais. Qmune
ces noms peuvent servir a établir les rapports des dîven poèmes relatifs à
Guillaume, je citeni le passage :
Li qooos Wîllajne l'cûst donc ben (^l,
ijo'f A grant bon or Teôst Dauipocdeo atrait ',
Qoaat Dcramé li sait d*ao agoai:,
Od loi .XV. rets qoe )o nomer vos sai :
Eocas de EgîpCc x li reî Ostramai,
Butifer li proz r H iiorz Cannais,
1710 Torlen de d*Asturges ' z sis niés AUais,
Nobles de Inde z Andcr li persans,
Aristctgoc, Caboel z Morans,
Clamador z Salvains z Varians
z M reis de Subie z li guerreres Tomas ;
171 ) Chascon d'els out mil bornes de sa pan ;
Si manguent b gent cum dragon r leppart.
En bataille ferent sanz nol regart :
Li uns les meine (menjue ?) qoant li altie les abat.
Hoimês irront Fraoceis a dolents ahan :
J 720 La fu pris le nevou Wilbme Bcrtram,
z Guielin 7 li vaillant qoons Guischard,
Galter de Termes r Réiner le combatant.
Estreit les ont liez Sarazins c Persant,
Vcant le conte les mènent as chalans,
172) Que unqoes de rien ne lor poet estre garant.
Tuz sont Franceis pris z mon al champ.
Fors soi Willame qui ferement se combat
c Goiot sis niés qui li vait adestrant.
C'est la répétition du désastre que Guillaume a éprouvé précédemment ; et,
ce qui augmente encore Tinvraiieniblance, c'est que les Français qui sont au
nombre de trente mille, sont anéantis par quinze mille Sarrasins seulement,
si le texte est correct (v. 171 5). Des cinq Français ici nommés, quatre sont
connus d'ailleurs J ; teul Reirur est un nouveau nom. Ce peut être le comte
Renier des Enfanus Vivien.
Guiot (ici appelé Gui) se prend à pleurer. Guillaume lui demande pourquoi.
Guiot répond qu'il meurt de faim, il n'a plus la force de manier ses armes ni
de gouverner son cheval. Guillaume lui conseille d'aller à l'endroit où, limdi
(on cuit au mercredi, v. 1779), ^^s ont trouvé les Sarrasins à uble. Li, il
pourra se réconforter. Pendant que Guiot mange, Guillaume se bat tout seul.
11 allait succomber sous le nombre quand Guiot vient à la rescousse. Tous
deux accomplissent d'étonnants exploits, et mettent les Sarrasins en flûte «.
Ce n'est pas sans cause que le poète nous dit :
1. Corr. trait.
2. Lire '/'. d'Asturges.
3. Jcanroy, /?o/fwin/tf, XXVI, 184.
4. Je ne sais si ce n'est pas à cet épisode qu'il convient de rapporter l'allur
sion d'Arnaut Daniel (Dout^ hrais) : Lai on estai midon^^ don ai granjam —
Cane non Foetal h nehoti sain Guiîlcm. G. Paris, dans une note pubuée pa-
La Chançun de Willame 6ii
1857 Ço fu graiit miracle que Nostre Sire fist :
Pur un sul home en fuirent vint mil.
Ils étaient deux, mais c'est tout de même un miracle. Les Sarrasins partis
et rembarques, Guillaume se rencontre avec Deramé, et d'un coup d'épée lui
coupe la cuisse. Ici un curieux épisode. Guiot, voyant Deramé remuer, lui
coupe la tête :
De ccle chose se corozat mult Willame :
« A ! glut lecchere, cum fus une tant osé
1965 Que home maigne > osas adeser?
En halte curt te serrad repruvé. »
Ço respunt Guiot : « Une mais n*oï tel ;
S'il n'aveit pez dunt il peiist aler
Il aveit oilz dunt il poeit veer ',
1970 Si aveit coilz pur enfanz engendrer;
En Sun païs se fercit uncore porter.
Si en istereit eir Deramé
Qu'en ceste terre 11 us querreit malté.
Tut a estrus se deit hom délivrer. »
« Tu parles sagement » reprend Guillaume : Cors as d'enfant z raison as
de ber.
C'est alors que Guillaume trouve Vivien. Il avait quinze blessures;
1995 De la menur fust morz uns amiranz '.
Guillaume, le croyant mort, le « regrette », selon l'expression du moyen
âge. Il rappelle le vœu imprudemment fait par son neveu :
«t N'ad uncore guère que tu fus adubé.
Que tu plevis z juras Dampnedeu
2020 Que ne fuercics de bataille champel.
Puis covenant ne vousis mentir Deu :
Pur ço ies orc mort, ocis z afolé.
Mais Vivien reprend ses sens pour un instant, et Guillaume lui donne du
pain bénit qu'il avait en son aumônière. C'est à peu près la scène d'Aliscans
(éd. Guessard, p. 24-6).
On croit la bataille finie : voici qu'elle recommence de plus belle. Guil-
laume place le corps de Vivien sur son cheval, pour le porter à Orange ♦,
Canello (p. 234 de l'édition d' A. Daniel) rapporte ces vers à un passage des
Enfances Vivien, et suppose par conséquent que le « neveu saint Guillaume »
du troubadour est Vivien, mais, tout bien examiné, j'incline plutôt à croire
que Daniel a visé le présent épisode de notre poème.
1. Corr. Que mehatgnéfxmie.
2. Rime introduite par le copiste anglais.
5. Ce vers, qui reparaît plus loin, est fréquent dans les chansons de Guil-
laume (Covenant 1409; AliscanSy éd. Guessard, 690, 727, etc.).
4. A Orange, non pas, comme on s'y attendrait, à Barcelone.
6 12 COMPTES KEXDCS
lorsque quÎQzt rois samsîns ' se jcnen: sur lui. TobUgem de déposer à tenc
k coq» de Vhîen, et se siwîssein de Gnkx qaTh cmméiiait pnsoomer.
Pub suniem v Aldcnife *. Guillaume k bksse griévanem, il im prend soo
cheval « Florescek « '. Id b comparaisoa avec Afiscans est îutéicssjnte.
Cmaîns vers som scmMaHes de pan et d'autre :
2x28 Jambes kréef diet H mnckis ^lUaflie
z Aldcmie trctockc: sor Fcrbe.
214) Tok la qœiK 11 dœvcnd dd bo,
I>e dnai Terbc est b pié duà.
Comparez Aîiicams (Guessard) :
1247 Gamba kvécs GoîllanK-s trebodia
El Aeroâes a terre irrcna.
1 5O) Toate la quiMc li dcsem don bo,
Eopaist k bien, cmrcn Ta abatc.
Mais les différences soot considérables et conduisent à une coodusion que
je formulerai en peu de mots : k rédt d'Aliicans csa très dévdoppé, on
pourrait dire délayé, mais, d'autre part, k récit que nous trouvons dans b
chanson de Guillaume sembk écourté : ks faits ne sont pas modvés. Ainsi
dans l'un et Tautre poème, un dialogue s'engage entre k sarraân et Guil-
laume, mais dans notre chanson on ne voit pas à propos de quoi Guillaume
dit à Alderufe :
2106 • Sarrazîn frcrc. quant tu te vols combatrc,
Ke roc dites orc de qod chose me blâmes :
Si t'ai (ait tort prcst su i que dreit t'en face,
Sil vols reccivre, jo t'en doins mun gage. •
Car enfin sarrasins et chrétiens, depuis k commencement, ne font que se
massacrer sans aucun scrupule. Dans AliKuns (y\\ 1185 et suiv.) cet échange
insolite de paroles s'explique beaucoup mieux : Aerofle est accompagné d'un
certain Danebur, Guillaume les voyant venir sur lui leur dit qulls auront
peu de mérite à se mettre deux contre un, et, en fait, les deux Sarrasins
combattent l'un après Tautre, et c'est seulement lorsque Danebur est tué
qu'.\erofle entre en lice. Le dialogue est donc introduit d'une façon plus
1 . Voici leurs noms : Nlathamar, Daver, Bassumet, (Baffumet ?) De£uné,
Soldan d'-Afrique, Eadùel, Aelran, Aelrcd, Sacealme, Alfame, Desturbéd,
Golias, Andaflc, Wanibléd. Quelques-uns de ces noms se retrouvent, avec de
légères différences dans Aliscam (Guessard, p. 31-2; Jonckbloet, p. 24}) :
Matamars, Gasteblé, Balfumc, .\erans, Aemé (au Aenrez).
2. Remarquons (jue les deux adversaires, avant de se banre, commencent
par discuter les mérites relatifs de Dieu et de Mahomet , conmie GuiUaumc et
«Corsoh dans le Couronnement,
La Chançun de Willame 613
naturelle. Les différences entre les deux récits sont d'ailleurs assez grandes.
Dans la chanson de Guillaume, le héros, ayant pris le cheval d*Alderufe, qui
vaut mieux que le sien, tue ce dernier (Balcan) et lui fait une sorte d*oraison
funèbre en ces termes :
216) « Ohi ! Balcan. a quel tort t'ai ocis I
Si Deu m'ait, une nel forfesis
En nule guise, ne par nuit ne par di.
Mais pur ço l'ai fait que n'i munte Sarazin. »
Dans Aliscans Guillaume lui enlève le frein, la selle, l'armure du poitrail,
pour que, malgré ses blessures, il puisse le suivre. Encore une remarque :
dans AHscans Aerofle, blessé gravement, demande à Guillaume de lui lais-
ser son cheval Folatisse (qui ne peut plus guère lui être utile), et offre en
échange de lui rendre ses neveux prisonniers. Guillaume croit que c'est une
ruse, et refuse. C'est alors qu'il coupe la tète au Sarrasin. Dans notre poème
Alderufe se contente d'offrir à Guillaume quatre fois le pesant d'or de son
cheval.
Guillaume se remet en route sur le cheval enlevé à Alderufe, et arrive à
Orange poursuivi par les Sarrasins. Cela est dit en quatre vers, tandis que
dans Aliscans le héros fait quelques mauvaises rencontres dont il n'est pas
question ici. Arrivé à Orange, il se nomme, mais le portier, le voyant revêtu
d'armes païennes, se méfie et, au lieu de lui ouvrir la porte, va avertir
Guibourc. Or il n'a pas été dit que Guillaume se fût revêtu des armes d' Al-
derufe, ce qui permet de supposer une lacune aux environs du vers 21 57. Ce
changement d'armure est au contraire dûment noté en son lieu dans Alis-
cans. La scène entre Guillaume et Guibourc est, en somme, la même dans
les deux poèmes, sauf qu'elle est bien délayée et exagérée dans Aliscans.
Les différences sont à l'avantage de notre poème. Guibourc, après avoir
envoyé son mari, qu'elle ne reconnaît pas encore, se battre contre des Sarra-
sins qui passaient en vue des murs d'Orange, et qui, le prenant pour Alderufe
dont il porte les armes, ne se défendent guère, Guibourc, dis-je, veut une
preuve nouvelle avant de se décider à ouvrir la porte :
2306 Li gentil conte revint a la cité :
« El Guiburc dame, me larrex vus entrer!
— Nenil >», dist elc, • parla fei quedei Deu,
Se ne me mustrcz la bosce sur le nés
2310 Que avcit Willame le marchiz od le curb nés.
De la bataille reis Tebald l'escler» ;
z plusors homes se resemblent assez
De vasselage c de nobtlitez,
c je sui suie, od mei n'ad home nez
231 s Fors cest porter que ci ester vecz. »
I. D'après le Oxtrroi de Wimes (mon Reçue il y p. 243) et le Couronnement de
Louis, Guillaume aurait eu la blessure, cause de sa difformité, dans sa lutte
avec Corsolt; dans Aliscans (p. 123) celui qui a ainsi blessé Guillaume est
« Isoré de Monibrant ». Cf. Langlois, Couronnement, p. Ixxxij.
6 14 COMFTES RENDUS
Guillaume tftiléve son heaume et se hit reconmîtrei, et, après cette épreuve
décisive, Guibourt: le fait entrer. Dati^ Almittts au cotitriiire (éd. Guessard,
p* îi), c'est quaod Guillaume a enlevé son heaume, quand par conséquent
il ne peut subsister aucun doute sur son identitcS cjue Gutbourc Tenvoie se
battre contre les Sarrasins. L'ordre des faits, tel qu*il se présente dans notre
poème, me parait beaucoup plus naturel.
La scène qui suit est fort belle : elle a plus de grandeur dans b chanson de
Guillaume que dansv^//ifa*w. « Sire, m dit Gutbourc, v qu as-tu faiï de Vivien ?
— n est mort. — Sire, qu*as-tu fait de Bertran» le tils de Bernard de Brus-
bati ? -^ Il s'est battu en quin/c « estours » ; au sei^^ième, son cheval fut tué,
et les Sarrasins l'ont faît prisontîïer, — Sire» qu'as-tu fait de Guioi? — Il a
porté le gonfîmon* Au seistièmc « estour » les Sarrasins l'ont pris* — Sire,
quWtu fait de Gautier, de Guieîin, du comte Reinicr ? — Les païens les
tiennent enchaînés dans leurs navires. » Dans .^^/itEi^ii.Guibourc groupe toutes
ses interrogations en une phrase : « Sirc^ où est resté Bertran^ et Guielin et
Guichard..* » L'effet est moindre.
Viennent ensuite, dans la chanson de Guillaume^ quelques vers qui sont
vraiment beaux, et qui n'ont point leur équivalent dans Jlismm, Guillaume
et Guibourc montent dans la salle. Ils n'y trouvent personne pour les servir,
C'est Guibourc qui apporte Teau et la « tuaille w* Ils s'assiéent ù la table la
plus basse 1 n'ayant pas le cœur de prendre leur place â la liauie table.
i}9l T1 vdi les bancs, les forme» z les ubles,
La 11 folcÎT iCcT suû'^ram barnage»
Il tie vit nul juer par ccle sait
Ne déporter oJ eschts tic oâ tabks,
Ptiî» les regrete eu m gentil home deîl faire,
Guillaume se désole ; il parle de se rcdrer a Saint-Michel en péril de mer
ou dans quelque hermitage au fond d'un bois» tandis que Guibourc se fera
nonne voilée. Celle-ci pféfèrc attendre ;
Ï419 • Sire tf âiii c\t, v (o ferum nus as^i
Qu^nt BUS avrum tiostrc siècle mené. ■
Elle lui conseille d'aller à Laon demanda secours à l'empereur. — « Mais,
répond Guillaume, les v Amoravinz et Pîncenars et Turs » m'auront bien-
tôt pris ce bon palais, Qjii le défendra? *^ Guibourc réplique (cf. Aiiscantt
p'eo):
244} ■ Sire •, dise t'ie. ■ Jhesii r ses vertut
7 set cens dames i^iie i«i çaeitit t plus :
As dos avroni le* bbncs liaîbcrc* TC^tui
t en luf cher» lle^l vcn hculmcs a^uz ;
Si esterniiit â:« hàCAillËS ia sut;
Ljincerunt bu ce s, peres t pçh agui;
En petit de hure serrA ^;ù trescoru,
34 10 Si Deus le ^oltt si Hrrad le lociir venu, >
La Chançun de. Willanu 615
Le voyage jusqu'à Laon est conté en une vingtaine de vers : nulle trace
des épisodes qu'on lit dans Aîiscans. Il est dit simplemeut que Guillaume
avait pour écuyer un enfant âgé de moins de quinze ans. La grosse lance et
Técu étaient bien lourds pour cet enfant. Aussi Guillaume portait-il lui-même
ses armes. Seulement, quand on rencontrait un « rumi », pèlerin ou un mar-
chand, quand on arrivait à une ville ou à un château, il les repassait àTenfant.
On arrive à Laon. Ici le récit est beaucoup plus simple, beaucoup moins enjo-
livé d'épisodes plus ou moins amusants que dans Aîiscans. Guillaume est
reconnu des « bachelers légers » à qui il avait coutume d*apporter de l'or
d'Espagne. Mais cette fo's il n'a rien à leur donner. Il leur conte le désastre
qu'il a subi en l'Archamp. Aussitôt les bacheliers le quittent et vont se mettre
à table ». — « Où est Guillaume? » dit Louis. — Sire, il est resté au perron.
Les vifis diables nous l'ont amené. — Allez vite le chercher et ne le plaisantez
pas. » Guillaume monte; le roi l'accolle, le fait asseoir à table. Guillaume,
ayant mangé, conte son histoire et demande du secours. Louis répond qu'en
ce moment il ne peut. Fureur de Guillaume, qui, jetant son gant aux pieds
du roi, reprend son hommage. Mais divers chevaliers (Rainaud de Poitiers,
Hemaud de Gironde, Aimeri (Neifnert) de Narbonne, Garin d'Anséune, Beuve
de Commerci, Hemaud le Fleuri, Guibelin, Baudouin de Flandres) pro-
mettent leur concours. Le roi dit alors : « J'irai aussi, avec trente mille
chevaliers. — Ne faites pas cela ! » dit la reine. « Dame Guibourc est née en
• paîenie ». Elle sait maint art, elle se connaît en herbes, et ne tarderait pas
à vous empoisonner : Guillaume serait roi et Guibourc reine *. »
Ici la scène de violence qu'on connaît par AIiscafts(p. 85). Elle est un peu
moins violente que dans le remaniement, et aussi il faut le dire, moins bien
écrite. Il y a cependant quelques vers bien frappés :
Ot le Willamc, a poi n'esraga de ire :
« Qufe] as tu dit? Dampn^deu te maldiel
2598 Pute reïne, vus fustes anuit ivre...
Pute reïne, pudneisc, surparlere.
Tedbald vus fut », le culvert lecchere
z Esturmi od la malveise cliere.
2605 Cil deùssent garder rArcham de la gent paenc :
Il s'en fiûrent. Vivien remist arcre.
Plus de cent presters vu sont ben coillifé]e(?).
Forment vus unt celé |en|clume chargée.
Une n'i volsistes apcler chamb|e|rere.
2610 Pute reïne, pudneise. surparlere,
Miex li vcnist qu'il t'oïist decolée.
Qpant tote France est par vus avilée.
1. Cet épisode se retrouve dans AHscans (p. 73), mais très surchargé et
mal introduit.
2. Dans Aîiscans aussi (p. 84) la reine élève des objections, mais en termes
peu précis. Il y a, dans les Enjauccs Guillaume {H ist. litt.^ XXII, 475-7) un
Dcl échantillon des « arts » que possédait Orable.
3. Je ne crois pas que//// soit ici le prêt, du verbe estre.
6l6 COMPTES RENDUS
Cluatiï tu [te] sci as chauJcs çhimmées,
e tu mangues tes puddus en pevrée^*
i6i 5 z beîs tuii vin as coïpes (i. copv%) covcrcléc^,
Q^aot es i:ûlçbè|e} ben ca ^euietée (/, acovctée).
Si i€ fais fuïrt! a b }amhe levttï
Ces kccheûrs fe donerit ^nnt cûlée»,
c nus en traiuni les maki matinées,
36:^0 Si» rcct'vom les bun t ks colées,
Euï en rArchanipks ianglaotei tesit[cls.
Si jo trai fors del feore ccsie cspit,
Jm vuji awfti cek teste colpée I •
Et II avait déjà a demi tiré Tépée hors du fourreau (le geste a été exagéré
dans VJitscdtis), quand Aimeri de Narbonne l^arrcte. Le roi s*cngage à four-
nir vingt mille hommes qui s'ajouteront aux contingents déjà promb par les
parents et amis de Guillaume. Au bout de huit jours h grande osi est assem*
blée^ el on pan. Tout cela est conté vivement et sans les scènes de remplis-
sage qui encombrent l'action dans AHstans.
Au moment où Tost se met en marche, survient un garçon de cuisine, nus
pîcds et portant sur son épaule un « t'mel »> st pesant qu'aucun homme ne te
pourrait soulever. C'est t Reneward o qui demande à Guillaume la faveur de
l'accompagner n à la bataille de TArchamp sur la mer o (36>4). ti Si vous
m'v mencïj dit-il^ je vous vaudrai plu^ que quinze de vos pairs ^ >ï GuU-
laume, après quelque hésitation, finit par Taccepter, et lui offre des armes.
Reneward refuse : il préfère son tineL Puis il va demander congé au maître
queux^ qui veut Tera pécher de panir. Reneward le tue. Puis il court au
pavillon de GuUbume et là se met à faire ta cuisine ^ mais on k fait trop
boire^ et pendant son sommeil on lui cache son lîneL A son révei!, il est
furieux et tue deux hommes. On lui rend alors son arme On pan, et René*
ward suit l'armée, quand il s aperçoit que, dans sa précipitation, il a oublié
le tinel. — « Je vais l'envoyer chercher n, dît Guillaume. Mais celui quHl
charge de cette mission n*anive pas mcmc â le soulever, et Reneward est
obligé d 'aller lui-même le chercher. Ces scènes ^ retrouvent, mais sînguUè*
rement allongées et poussées jusqu'à la caricature dans Alismns f, où sont
introduits d autres épisodes très peu vraisemblables, tels que celui du sapin
sous lequL'l le roi Louis avjit coutume de dîner, et que Renouart fait abattre
et ébrancher pour s*eii Éaire un v linel » plus fort et plus lourd que rancieii
{AHicani, p. loi).
On arrive â Orange, Gutbourc demande sa le roi ne vient pas. — « Non*
)n voit que ce personnage n*a pas été inventé par l'auteur d\4lisc^ni^
:on Ta supposé (HiU. lili. âelaFr., XXII, îi^i )■!)> « surtout Rom.^
, 20oV
1, Ainsi l'é^visode du tinet oublié et que seul Reneward peut porter^ se
èpéte deux fois dans Jîhcans, agrémenté diaque fois de circonstances plus
1. On
comme on Ja supposé
XXVI, 20O).
repe
ou moi ns comiques (pp, î 07 - n 4 et 141-141)/
La Oxifiçun de Willame 617
dame, répond Guillaume : il gît malade en sa chapele à Aix '. » Il
n'est pas question du siège que, stXon Aliscans (p. 120), les dames sauraient
soutenu. Rien non plus sur Tarrivéc successive des alliés de Guillaume qui,
dans AliscanSy occupe les pages 125 à 130. Il est intéressant de noter qu'Aî-
mer le Chétif n'est mentionné en aucun endroit du poème.
Dame Guibourc entre en conversation avec Reneward. Alors, pour la pre-
mière fois nous apprenons que ce garçon de cuisine est de haute naissance
(dans Aliscam nous l'apprenons plus tôt) :
« Ami », dist ele, c de quele terre es tu né
z de quel règne c de quel parenté?
— Dame, » dist il, « d'Espaigne le règne ;
Si sui [jo] fiz al fort roi Deramé,
2825 r Oriabcl est ma mère de ultre mer.
— Cum ave» nun ? — Reneward ni'apelez. »
Guiburcroï. si! rcconuit assez,
Del quor suspire, des oilz comence a plorer,
z dist la dame : « Ccst nun m'est mult privé.
28)0 Un frère oi jo qui se le Bst ' clamer.
Pur la sue amur te ferai jo adubber,
(Cheval et armes te ferai jo doner. »
Dist Reneward : « Ne place unques Deu
Que ja altre arme i porte que mun tinel !
2835 Ne sur cheval ne quer jo a munter. »
Il consent pourtant à accepter une épée que Guibourc lui met au côté. Il ne
sait pas qu'elle est sa sœur,
Ne nel saverad si ert l'ost devisée
2850 E la bataille vencue c depancc.
Cette scène est longuement, mais assez habilement, développée dans Alis-
cans (pp. 1 54 et suiv.)
Je n'analyserai pas en détail le récit de la bataille où,' grâce à Reneward
et à son tinel, les Sarrasins sont mis en pièces. Qu'il suffise de dire que tous
les épisodes de notre poème se retrouvent (naturellement très allongés) dans
Aliscans, Bertran, que Reneward vient de délivrer, dit ù son libérateur qu'il
prendrait volontiers part à la lutte s'il avait un cheval. — « Vous en aurez
assez », répond Reneward. Mais il frappe avec tant de violence qu'à chaque
coup il tue l'homme et le cheval. Je cite quelques vers :
3092 Dist Bertram : i Ccst cop est mal aie ;
De cest cheval n'cre mes adubé...
Se si vus vient, jo n'cre hui adubé;
3100 Issi en pocz quatre niil|e| tuer. »
Dist Reneward : « De folie parlez ;
Cest l'ust |mult] peisc, ncl puis mie governcr;
1. Ce qui étonne, car c'est A Ijon que Guillaume Va laissé.
2. Corr. qui si sefisl.
6l8 COMPTES RENDUS
Grosse est U brACn qui me tient al cosié
Puis que |û l'ai [enjcomreiTtuiii kvi%
510^ PéIt ny] sembhnt pel puiï adominer.
Ne peiît colp ne puis ]o pm **outr* <*
Çodht Bcrtrani ; ■ Ahre canseil tn preneiîf
B«l sire* bor fuisses vus ncx. p
Ço liist ïkrt«m : * Ja ne verrez vus tel,
îito Ke en botant ncl pocK tuef. «
DÎ5Ï Rcn«ward : ■ Vu* dites vérité ;
[La] moj[e] feU ne nVen crc pcnsi... •
Ce court passage est développé dans AHscanSt en plus de cent vers. En
voici quelques-uns (Guessard, p. 164) :
« Voir *. âht Eertrans, * lenii «lés feront,
H'ârans cheval nul jor en no vivait- ■
Dist Raînouars t • Trop vous aies baitani;
Je nVn puis mai*, par foi, sire Bertrant ^
Os tinès pûisc, s'en sont li cop plus gMnt...
Sirç Bcnran, ne te vas nierveillant ;
Grans es li fus ; si poise par devant.
Qnant j'ai mon cnp enCtf^ê en haucha^t.
De grant vertu vient a val descendant;
Jou ae le puis tenir ne tant ne quant. «
Dist Bertnin : « Sire, *î ferés en boutant;
En si iront vo cop âme n usant. *
Dist Rainouars : * Or vois jou AprendADi;
• Joo irai a rcscole. *
Il va sans dire qu'il y a dans AHîcans nombre d'épisodes ajoutés. Noire
poème, je Tai dit plus haut, est Incomplet de la fin. Il se termine par la scène
de la reconnaissance de Guibourc et de Reneward, qui sont frère et sœtir,
scène qui, dans Aîucans, n'esï pas placée à cet endroit.
Les remarques, que j'ai introduites diins cette analyse sur les rapports de la
chanson de Guillaume et d\4îhcanî sont lolti d'èpuîser la matière. J'aurais
pu, noumment, ejtaminer les conjectures, certainement prématurées» qui ont
été produites en ces derniers temps sur la composition d'Alhcam ou du C<îw-
tmnt, et motitrer que plusieurs d'entre elles doivent être maintenant abandon-
nées. Mais je n'aî pas voulu donner à cet article, déjà bien long, de trop grands
développements : j'ai visé surtout à faire connaître un poème qul^ dans les
conditions où il a été éditée n'est pas accessible à tous. Je crois toutefois
avoir suffisamment établi qu'il faut y voir la source principale de la fin du
Cmmmnt et du poème entier d'Aliscam. Qy'ïl ait existé un autre poème,
précédant ccluî-ci dans Tordre des réclis où était contée rhîstoire de Vivien^
depuis son adoubement, c'est possible et même probable* mais ce n'est pas
ici le lieu d'envisager les hypothèses qui peuvent être formées à ce sujet-
P. M.
I . Une variante relevée par Jonckbloet (II, 277) porte i Mmt me Vft anuîani
I Qui plus Hi vont mi eop adûmttmnL Ce dernier mm est peut-être un souvenir
de h l4!Con mimmer de la chanson de Guillaume (v. \ los).
L. JORDAN, Girartstïidien 619
OirartStudien, von Léo Jordan. In -80, 18 p. (extrait des Romanische
Forschungetty XIV, pp. 321-338).
Une grande partie de ce mémoire est occupée par des rapprochements
entre la chanson de Girari de Roitssillon et certains récits arabes. Il n'est pas
inutile d'en apprécier la portée, parce que, si les vues de M. Jordan sont
fondées, nous aurons ici un exemple unique de la pénétration de Tépopée
romane dans le monde musulman.
M. Jordan signale en première ligne *Omar al Nachmatty sorte de roman de
chevalerie très étendu, inséré dans une famille de manuscrits des Mille et une
NuiiSy manuscrits qui, d'après M. Zotenberg (Notices sur quelques manuscrits des
Mille et une Nuits, dans Notices et extraits des manuscrits, XXVIII, i, p. 210)
sont tous récents et d'origine égyptienne ; ce roman n'a pas été traduit par
Galland, mais il se trouve dans la traduction de Burton, A plain and littéral
translation (édition de 1885), t. II, p. 77 et suiv., et t. III presque entier;
M. J. s'est servi de celle de Henni ng dans la Bibliothèque Reclam y que je ne
connais pas.
Voici les détails q ue M. J. relève dans ce roman, pour les comparer à Girart,
Scharrkân (j'adopte ici et dans la suite les transcriptions telles que les donne
M. J.), fils du roi, est placé par son père à la tête d'une armée qui doit marcher
au secours du roi chrétien de Constantinople. Pendant sa marche, il ren-
contre une jenne fille, sorte d'amazone, excellente lutteuse, qui l'emporte
sur lui à la lutte et les armes à la main. Il se trouve qu'elle est la fille d'un
autre roi chrétien, celui de Rûm (Rome). Le héros devient amoureux de cette
héroïne, l'amène avec lui à Bagdad, et la présente à son père : celui-ci tombe
également amoureux de la jeune fille. Le père, pendant l'absence de son fils,
verse un soporifique à la princesse chrétienne, et abuse d'elle pendant son
sommeil. S'apercevant qu'elle est enceinte, elle s'enfuit et est tuée pendant
sa fuite par un serviteur qui l'accompagnait. Scharrkân, pendant ces événe-
ments, se trouvait à Damas, où son père l'avait envoyé en qualité de gouver-
neur. — Dans la suite du récit, il est question de la sœur et des frères de
Scharrkân, que le roi avait eus d'une autre femme ; pendant un pèlerinage à
la Mecque qu'ils entreprennent tout jeunes, en secret, le frère et la sœur sont
séparés; M. J. insiste sur les aventures du frère, Dau el-Makân, qui au cours
de ses pérégrinations tombe malade, dépourvu de tout, â Jérusalem, et est
recueilli par un homme du peuple, chaufieur des bains publics, qui le soigne
et le guérit.
Voici maintenant les rapprochements faits par M. Jordan. Scharrkân,
dépouillé de son amante par son père, correspond à Girart, dépouillé de sa
fiancée par Charles Martel; Dau, errant, puis soigné par le chauffeur des
bains, est l'équivalent du même Girart, exilé et recueilli par les charbonniers.
M. J. suppose que, primitivement, les deux aventures se rapportaient au
même personnage, et que, comme dans Girart, l'épisode de l'amant (ou la
fiancée) enlevée au héros, était suivi d'une guerre entre le père et le fils, au
cours de laquelle le héros était exilé, comme Girart.
é20 ^ COMPTES RENDUS
M» J. reniar<|ae que la date du romm n'ei^duc pas k possibilité d'utic imi-
tation par l'îiuteur arabe, et il cite k cet égard îcs remarques du iraducteiir,
M. Henning, et d'un autre orientaliste spécbiement consulté par lui,
M, F. Hommel, qui déclarent le ronian d' '0*Hfï»" postérieur aux croisades. Je
puis ajouter que c*est à peu de chose près la vis de Burton, qui suppose que
l'action se passe in th early cntsading dap (I» 77, note), Le fait que, d'aprèi
M* Zotenberg, les manuscrits qui contiennent \\^ roman sont tous rtcentSi
montre également qu*il n'appartient pas au fond ancien des Mille ti une Nuttu
Mais les rapprochements de M. ]., en dehors de cette question de date»
som-il justifiés? Uauieur attache de l'innportance au fait*f que Girart, comme
Seharrkân, obtient sa fiancée pendant une ejtpédîtîon entreprise en vue de
secourir rempcreur de Constant mople t».
Or. M, P, Meyer approuvé que la mention de Constantinople est, dans w la
tradition épique relative à Girart, relativement récente', et nous verrons que
M. J, a en vue, comme original du récit arabe, une version très archaïque du
CArart. Il y alà une première difficulté. En second lieu, le rapprochemem entre
le récit arabe et le début du Girart est bien forcé. Dans le poème, Charles
Martel et Girart épousent deux sœurs, filles de l'empereur de Consiantînople
(je cite Tanalyse de M. Meyer, Rom, VU, 171) : » Taînèe. Berce avait été
engagée pour Charles; la seconde. Elissent, avait été engagée pour Girart.
Mais le roi étant devenu subitement amoureux d'Elissent, Girart consent à
la lui abandonner et à prendre Byne non sans difficultés, non sans spécifier. .,
une sorte de compensation u. -^ Quelle ressemblance y a-t-il entre cet arran-
gement et la répugnante histoire de viol que raconte l'auteur arabe ? — Afin
de trouver d'autres points <le rapprochement, M, J. est obHgé de réunir deux
personnages en un seul, et de combiner Scharrkân avec son frère Dau ; maïs
même ainsi réunies, les deux figures sont loin de faire pendant à Girart,
Scharrkân, comme le remarque M. J. lui-même, ne guerroyant pas contre
son père, qui lui a enlevé son amante; Dau, le second pendant de Giran, ne
guerroyant pas non plus. Il est vrai qu'il y a dans le roman arabe beaucoup
d'incohérences, mais il n'est pas nécessaire, pour les expliquer, de recourir
à r hypothèse du remaniement arabe d'un texte roman, chose dont il n*y â à
notre connaissance, aucun autre exemple ^
Ce qui complique encore l'hypothèse de M J, c'est que, d'après lui, le
roman arabe ne serait pas imité du Girari tel que nous le connaissons, maïs
d'un autre Girart plus ancien, qui aurait eu beaucoup de détails communs
avec i^%Nibtîungtn. C'est à ce roman supposé que M. J, rapporte, par exemple.
I* M, Stimming, dont M, J, adopte souvent les vues, est d*accord, sur ce
point, avec M* Meyer, Vtber dtn prcfien^aiischen G irai i von Roisiîhn^ j6.
1» Ces incolîérenves ne se rencontrent pas seulement dans 'Omar ; on les
retrouve encore plus nombreuses dans les romans arabes que M. J. citeplus
loin dans son travail, d'après les analyses de M* Ahlwardt, Évidemmem les
auteurs de ces romans de longue hafeine ne se soucient guère d'unité, ou
même de logique.
H. inREKNtij Chronique riméi dis iroubles de Flandre 621
U princesse chrétienne du récit arabe, cette sorte d'amazone, quHÎ rapproche
de Brnahihie^ h ivalkùre de l'épopée gcrmaîiiquc. Il trouve d*4Utres carac-
tères et d'au tes épisodes des Ktk'hittçm dans âtu% romans arabes, dont l'ana-
lyse a été danuéc, dans le catalogue des manuscrits arabes de la Bibliothèque
royale de Bedin* par M, Ahlwardt, ei il les explique de ta même façon.
Nous sommes ici sur un terrain où seul un germaniste exercé, qui serait en
même temps orientaliste^ pourrait réellement suivre M, Jordan. Il suffit de
dtre ici que les rapprochements entre le Ginirl di' Rimssiîhn (auquel M. J.
joint le Gif art dt Vitine^ qui selon lui a conservé des traits très antiques), et
les Nibfîungfn^ nous semblent aussi risqués que ceux entre le Giritrt et le
roman d^'Owar. En outre, M* J. est obligé de faire entrer en ligne de compte
des traits qui ne se trouvent que dans les versions samditiinvs des Kibeîmtgen,
traits dont il n*est pas sûr qu*ils aient pu être conl:ïus en Gaule, si tant est
que les Ntheîuftgm aient jamais pénétré dans le monde roman- Enfin, les
rapprochements que fait M. J. entre la tradîtiou germano-scandinave et les
romans arabes, roulent en grande partie sur des lieux communs qui se
trouvent dans tes fictions des peuples les plus divers ; telles la cape ou cha-
peau qui rend invisible, la jeune filîe guerrière ou habile dans les exercices
du corps, aimée de celui qui Ta vaincue (comp. Atalante et ramazone Hip-
polyta dans la mythologie grecque). Tous ces thèmes sont du même domaine
international que le héros qui, après avoir tué un monstre, lui coupe la
langue et peut prouver ainsi que c*est bien lui qui est le véritable vainqueur,
— thème que M» J. signale dans un des romans qu'il analyse, et qui se
retrouve dans la mythologie grecque» dans un grand nombre de contes popu-
laires et dans le Trisiau (voir M. E, Muret, kom.^ XVII, 604), M, J.
soutiendrait -il que le roman perdu qu'il suppose pour expliquer tous ces
emprunts, renfermait» à côté des détails pris dans les Nikitingttty d'autres
détails pris dans Trîshm} Sa méthode Vy obligerait.
Eu résumé nous ne croyons pas qu aucune des vues, assurément nou-
velles, de M. Jordan, ait h moindre chance d'être acceptée. U n'y a pas
d'autre base à ses rapprochements que quelques traits pris au hasard, et
appuyés de conjectures plus ou moins invraisemblables. Ce n*est pas ainsi
qu'on doit traiter les questions si difficiles que soulève Thisioire comparative
des liiiéraiures,
Gédéon Hurr™
Chronique rlmée des t rouilles de Flandre en 1370-1038^
publiée avec une introduction et des notes par H* Pireske, Gand, SlfTcr
et Vuylsteke, 1901, lti-80, xx-62 pages (publication extraordinaire, n« i,
de U Société d'histoire et d'archéologie de Gand).
LVxamcn de cette plaquette est du rcsson de rhistorien autant et plus que
du philologue, et des juges compétents ont dit ailleurs ce qu'elle comporte
d Inédit et peut-être de précieu^t pour la connaissance scientifique du passé
flamand. Si je me pcnucts de l'annoncer ici et d'entrer dans certains dévelop*
622 COMPTES RENDUS
pcmcnts^ c't:st que je Vài lue avec intcrét et pro^là tout autres égards. L*au-
teur inconnu 4c ces douic cents vers n'est ni un poète, ni un philosophe ; mais
il coastiiue un agréable échantillon de ces bourgeois bilingues du xiv« siècle
qui avaient su résoudre k fameux problème de races et d*idiomes dont les
Belges de TEst et de TOucst se préoccupent si ardemment aujourd'hui ; il
pariait et écrivait h françj.is avec une facilité relative^ et pourtant il étâll né
natif de Flandre, et sa langue maternelle était le fUmand : Je veuit, dit-il,
exposer
I>es gtierre» de Flandres U verîtct
En roumins si m pi cm eut timct,
Sdonc ma lingut:, que est flami^îigue,
Que ae viut Je «ju^rt d'une âbertgue
Pour ju&temenE rimer en rûumana,
S*\\ a préféré user du français, c*est sans doute que ses sympathies rorîen-
taîent vers lu langue et la littérature du peuple avec lequel le comte, son
très vénéré maître, vivait en meilleure intelligence qu'avec ses propres sujets;
c'est peut-être aussi parce qu'il espérait plus de lecteurs et des lecteurs plus
choisis : « les sages m^eoteadroni » dit-U, i peu près dans le ion de Conon
de Béthune, avouîint de bonne grâce qu'il n'est pas né à Pontoise, quoiqu'il
rime en français.
Mais si Conon n'avait peut-être pas besoin d'excuses, notre chroniqueur
aurait été imprudent de ne pas débuter par une confession d'humilité* Sa
langue laisse étrangement à désirer; elle est d'une irrégularité, d'une pauvreté,
d'une impureté qui nous amuseni ; c'est du jargon où la syntaxe et même la
phonétique d'un Tfmii ont laissé des traces évidentes. A ce titre, eîîe méri-
terait une étude, qu'on ne pouvait demander à M. Pi renne, mais dont je
voudra b au moins souligner l'intérêt en quelques notes,
Lessonsdu français subsistent; toutefois certaines diphtongues n ont pu passer
par Icgosîerde notre anonyme : il articulera a pour ai et u pour ut {dira-jt toi 5 ;
vuîâu z nu(0^^i 6^6, ntdi i apparut 800, bti(r)l : atmii tioS); a pour 01 m'a
échappé \ et je devais d'autant plus m'y attendre que Tinveï^e est dans oya^
rfpoit et baitij bien que ce dernier mot ait une histoire particulière. Dans
La priif tk Neavilk^ ctii^ RV^u^e satire bilingue du xm^ siècle \ j'ai relevé
*wjr (croiît), dot (doit), iras (trois), fias (noix), pro{t) etc. — Les traits dialec-
uux du picard (Flandre française^ Anois, Haînaul occidental) se retrouvent
naturel! emcnt ici ; mais ils sont quelque peu altérés. Ainsi ïV > i , et rV^f > î#,
n'ont rien d'anormal (75^ 382, 562, 572, 654, etc. àkrime) ; mais ce qui est
étonnant, c'^tiïeliV rimant ensemble': par exemple j«/>^/t^ ipiti/ 15 ; hrtsié:
1. of est passim dans le texte; qu*on le prononçai déjà oi^ c'est ce <jue
semble attester la rime des vers 602- 1 contraire : crere,
2. M, Scheler a publié cette parodie dans ses Trauvèns belges (nouvelle
série) sans se prononcer sur la provenance* Sa présence dans le ms, ilôt 5 de
la Nationale est un faible indice ; mais la mention de la ^ purtc de Meulens •
(55) me porte â croire qu'elle nous vient d'Arras, dont Tun des faubourgs,
rendu célèbre par le Ctm^éàts Jtran Bodet s'appelait Miaulens*
• H. PIRÈNNE, Chronique rimée des troubles de Flandre, dt^
die 898 ; d'autre part lié (M. Pirenne imprime lie) : brisi/, comme il %'a^^i
d'une porte brisée, peut être brisie 920 ; — cMunc est ici ; comme chi'x M<m%
ket (chiunkante 11 262) et chez Gilon le Muisit(I, 97, 6, etc.) ; ^6 WhtH
ou entravé a abouti à un son unique; il est plus curieux que ô dan« ri/zr
soit traité de même et donne ou (m germanique), voyez eu (e) r : uiy^mmr
716, II 32, 1236 et comp. dehors : seignors 281. — La post-tonique finale c%l
éteinte, et le rimeur négligent ne recule pas devant des accouplements comme
quite : delicte 173 ; demeurée) : seigneur (prononcez -our) 626; mure (sic,
murum):rMr^(cura)752; cf. encore 980, 1067, iioi, 1200, 1278. De même,
la post-tonique intervocalique dans />/amw<r«/ 346, souveraine 23$, etc.
Cette dernière remarque concerne déjà la flexion ; car elle se rattache i la
confusion des genres. J*y arrive, après avoir signalé d'étonnantes transcrip-
tions de / et « mouillées : batailgt(s) 57, 1197; pingons 423 (c'est notre
penon)y et inversement daignier = dangier 683, cogniet = cotigiei 1060 el
1 103. Donc les genres sont confondus, comme dans Lf prise de Neuville, mais
sans trace d'ironie ; les villes furent compris 162, par mon foy 463, etc. Les
cas sont également confondus, ce qui étonne moins à cette date ; i{h)l est
cas-sujet ou cas-régime suivant les besoins de la cause ; notre anonyme écrit
bravement : « Li comtes à Bruges envoia; Uns capitains qui a nom a... »
etc., etc. L'ordre des conjugaisons n'est pas plus respecté; on trouve
garna $31, de garnir, consenta 688, etc, de consentir', il fallait une rimè-sccur
à envoierent ; l'inconnu écrit obeissierent ; je n'insiste pas sur arsèrent qui est
chez Froissart et ailleurs; mais les temps sont employés à contresens; les
subjonctifs en -assent ne déplaisent point à ce bon Thiois, qui écrit priassent
42 ^ pour prioieni et 1223 pour prient; les prétérits pour les imparfaits, et réci-
proquement, ne sont pas rares sous sa plume; cf. 195, 377, 438, 534, etc.
Et la syntaxe? Beau sujet d'étude pour un romaniste qui serait familia-
rise avec le moyen néerlandais ! Je signalerai en passant l'emploi de que pour
quel 576 et 1224 (si toutefois il n'y a pas là la perte de / devant une consonne
initiale), de qui pour cil qui ou un autre tour, 261, 279, 290, 421, 600, etc.,
les étranges inversions des vers 854-6, 1067-8 et 1071-2 ; la substitution de l'au-
xiliaire «/rc à l'auxiliaire avoir, etc., etc. Une comparaison avec l'anglo-nor-
mand, tant à ce point de vue qu'à celui de la phonétique et de la flexion,
serait j'en ai la conviction, aussi instructive que facile.
Je n'ai que trop détaillé les observations faites au courant de la plume ; il
faut revenir au texte lui-même et à son établissement. M. Pirenne s'est
borné à reproduire le manuscrit, et il a bien fait ; il s'est contenté de le ponc-
tuer et d'accentuer les mots, en quoi il n'a pas toujours été heureux, et c'est
bien compréhensible, car la besogne arrêterait plus d'un philologue. Pal cm
lui rendre service, et à ses confrères, en insérant ici quelques remarques faites
au cours de ma lecture.
13-14 supplie : pitié; voir ci -dessus. — 22 amovie. Évidemment à^amovoir^
mais il faudrait amuet, à moins qu'on admette une forme bâtarde amoive;
comp. commoverent 49, comtnover 189,820; maceretit 863. — 106 Wsczd^encoste
iol7-— «^7'
624 COMPTES REvmrs
m.étmàxm 106, 93$. :Kié-. M*P. sbicn ii
poim- — f 81 ^-em. fii*t7, — J Brmits^ c*st It [
pbilQlci@Dcs*rî^c9!»«v; voyez encore |0i. — 194 GhhL— ijç 1
24f sofipr. b itfgnk; ^ m en le sujet die tvitirrM, ^^ 2}^ A eamam^ sêm oi
psUÊ-étxtfomiêrrmidii rrpomràxaax aax va? 1056; 171, |9i*Scif»eic.
Aa V. 1 1 II on Ut saagUmS sam. — 2^4 Ucwf mênuît on ooomeiitiire^ i^m
a*eft <)u'cn padîe diKiiic â^xa b ûote de $12. Ucxpressioo x icaomvT SSl.
1121 — 292 defifsdn ; cette répètîtioQ n'est p^ pius choquante que cdie ém
VCTS 361-2 — jio supiir. k irirgule, /f//t>« ètint un sujet pteid — Î4|
fiaminL Non, piainmtm : coiop* A?iirraïiîl4[0 25>j6ij — îî4âsest<
on l*a «kus le Siège d€ Xmvilk^ tash ^vtc Tartide agglutiné, kht ] 3, c
379 manque dam U numérotât ion. — jSo suppr. la %'îrgule, — iSB m^'^x
(non V;^. — 390, ss. Le passage n t-st pas dair ; il faut guiDeinettcf le vcn
392 et y rapfMHter le verbe ^rytftl^ en Imm : é? cr. fûrt. — Pmr uirt/mm,
iwi êtwoft. — ■ Correoiofi en le pays •, Ccst là ce qo*ib crieut,
atîjourd^huî oa crie : Rtvistm f ou Démhsiml — 404 For iamûur ; le m*a
â gardé Texpressioa pUnmu. ^433 ^fl» prianL — 44 3 suppr^b vîrguk et s
attendez ■ avant que *. — 431 ei fmûm il faut i^mit et non pat kn«i, — 45]
Useï momlfinî^ et Élites îa mcme correaion >i>, 582, 628, 959, 1039. — "
45 > i! fa*Jt supprimer le point pour rendre le passage înielligiblc ; le rimeiir
dît que, lorsqu'il y avait un cas de justice dans Vost, on anjcmh le maifaiteur
et on le jugeait en commun. - 507 Ibc^ tûni. — 5401 paris^ et piis de ponc-^
tuation après fkitmîims, jtikms étant le sujet de otit assis. — 344 et 1071 ,
%tr ww«/l aiînay$ est tjne eupfessioo curieuse .— subir des outrtge. — 57^
n*e$t pas aisé a traduire ; ^«r, on Ta vu, est pour quel, et le sens me semble
être ccEui*cî : leur demandant ce qui leur manque (ce dont Ils ont à se
plaindre), pour aîtaq*jer ainsi leur seigneur, — jQï injunon m*est suspe^;
ne Ciui-a pas lire injurmhm, quï est dans Kic, Orcsmc? — s 9^ suppr.
virgule, -* 629 le dcbut du vers pjrait corrompu ; le copiste pourrait
avoir^ par distraction, recopié ïm premiers mots de 6a8, — 662-3 dek^rt i
c^mpi entre deux virgules ; un point après ditmurans, ^719 suppr. le point et^
k rcponer â la fin du vers suivant, ^ 809 pas de ponctuation, - - 81 3 eu /, f
— S ^8 par cry. — ^^6 commande rtnt n'est pas rendu exactement dansk^
résumé, p. xvi; il y avait démarche vobntairc, quoique iniércsséc (9Sa>
des chevaliers i je traduirais ; niobiliî^érent par ordre^ réquisitionnèrent ;
voyci 981 où ii s'agit d'amis des mutins^ qu*ils « commandèrent * aussi. —
969 commutiemtnt, — 1004-3 cupàain : plain. — 1014 pas de virgule à la fin.
— ti48[àj* — 1156 jùkiirintest un mot curieuï. U correspond au français
central jùcUer^ tnod. jtichiér, signifiant pencher, puis s'attarder, traîner en
longueur, et qui apparaît pour Li première fois, à mon su, dans Martial d'Au-
vergne, c'esi-i'dirc à la fin du xv^^. siècle; il en résulte que les doutes de
MM. Mackelei Kôriing sur Té tymolo}*ie proposée par M. Bai si (/ut gothique)
reposent sur une connaissance insufnsaniç de rhistoire de ce moL -* Il 84
qtm; \i%Qzque, ^ i2o3 je ne conipr^^nds pas tn Jaier* — 1223-4 virgules à Ia^
fio* — 1243 je soupçonne le scribe d'avoir écrit hum pour huum = Uu
(là où) um.
Ma WtLMOTTE.
PÉRIODIQUES
Zkitschrift fur romanische philologie, XXVII, I. — [P. I, J. F. 1).
Blôte, Main^ inder Sage vont Schwanritler. Réponse à Tart. publié dans la Rovui-
nid{WXy 404) par G. Paris, sur « Mayenceet Nimègue dans le Chevalier au
Cyi^ue ». Paris pensait avoir démontré que Mayence était la leçon originale»
que des romanciers ont, autant que faire se pouvait, remplacée par Nimaie.
M. Hlôte, persistant dans Topinion contraire qu'il avait soutenue antérieure-
ment, veut que Nimau' soit partout la leçon originaire. Il ne me paraît pas que
Paris eût été en peine de maintenir sa thèse. M. Bl. se débarrasse des textes
qui ie gênent par de simples conjectures. — P. 25, B. Jaberg, Péjorative
BetietUungsetitiuickltiug im Fran\dsi$chen, 2^ partie, Bedeutuugsverschiebutii^ .
Cette seconde partie ne justifie pas entièrement les espérances qu'avait fait
concevoir la première (cf. Rom.^ XXXI, 154). L'auteur fait de louables efforts
pour répartir sa matière en des catégories bien définies, mais il n'y réussit
pas toujours, et les mômes mots reviennent dans plusieurs de ces catégories.
Il y a peu pour l'ancienne langue et ce peu est tout simplement puisé dans
les dictionnaires. La tendance péjorative est surtout étudiée dans le français
le plus moderne. Le développement historique des nuances est rarement étudié
i\ fond. En somme, peu de nouveau. — P. 72, Abr. Danon, Proverh'S judèo-
cspti^^noh lie Timptie. 323 proverbes recueillis par M. D. et publiés avec tra-
duction française et notes explicatives; le classement ne rend pas les
rcclicrchcs Hicilcs dans ce petit recueil. Peu de ces proverbes se retrouvent en
Occident. A noter celui où il est dit qu'il faut se méfier des personnes rousses
(n" 256), qui est bien dans la tradition du moyen âge : voir Du Cange,
RU rus 2; Godefroy, ros, au Contpl.; cf. Daire k roux dans le Ronian Je
Thèbes. — P. M.]
MÉLANGES. — P. 97, Zur IVortgeschichte. H. Schuchardt, trouver (^u Roma.
nia, XXXI, 625-630). M. Sch. discute les objections faites par G. Paris à
Tétymologie turbare > trouver. Dans une seconde note il étudie la dériva-
tion 'tropare < tropus en insistant sur l'absence de *tropare de nos
textes latins et surtout sur l'hiatus sémantique entre tropus et trouver. —
P. 105, lat. ilex ; lat. cisterna : remarques sur deux passages du travail de
W. Meyer-Lùbke, Zur Kenntnis des altlogudoresisclxn. — P. no, fr. sage :
nouvelles remarques sur sapidus > sage et critique de Tétymologie
•sapius > s(^e.
Romania, XXXIJ 4O
éaé PÈRIODiaUES
Comptes RENDUS, — P. uj, Bdtràge fur rontunische undengUsçiie Phihtt^k,
F^stgiibf/ùr JV^ Foerstei (Ph. Aiig. Becker). — P* 122, G. Korting, Likinisch-
rofmmisches IForferbuch^ 2*^ éd. (Eug. Her^og : quelques critiques sur les
^iHymologîes propres à M. K., lesquelks sont généralement sans v.ilcur; com-
ptéments à de nombreux anicles). — F, 127. ObsiTvaûoii de W. Mcyer,
Lûbke stïr le compte rendu de son Enfàhntng, par F, G. MohI dans Zi,-
XXXI,6ï6. — P. ii'j. Le Moytn-Age^ XV, janvier-aviil (F. Eiî* Schucegans).
— 1\ 128. Ni'iu Bitcl)er ; C, Siilvioni, Li lih'itta Commfdiit, VOtkvdo juthso^
îa Gavmkmme îtbiTatu nellt vtrmm e nn ttaî'eiiimttiÈi dkkitaîi a stampti^
sajtfx'^o hiMiô^tafi{(t. — F. L, Mott, 71^ /n t^rw^a/ L)^m(G. Gj,
XX VU, 2, — F. 129, C. Nigra, Nomi rûnmuii dtl cQÏÏar^ dt^U animait du
piticoh (avec planche). Ces noms se répartissent en dctJx séries : i^ H*<^ ha-
ïic catuiuia,Ciimgohi^ fr. anc. et dial. cljanokj clmtoîe ctc. M* N. rejette pour
cette série rétyniologie cannabb (Salvioni), ces colliers n'étam jamais de
chanvre, et retionce a 'catenabulum quil avait proposé lui-même (cf
Rûttmttia, XXX, 6 1 2) ; H rattache ces formes romanes i un * ca n n a b u l y m-a,
dérivé de canna au sens de » g^^tge, trachée artère « ; a^ gris, chiavn,
suisse rom. karnUy slov* l ri oui. kamba^ etc., du thème kamb ff courber «,
le collier éîani souvent faît d'une lame ou d*une baguette de bois courbée.
Suivent des remarques sur la forme des colliers ou des clocliettcs et une liste
de noms romans de cellcs-cî» — P. 157. C. Nigra» Tosc. gu^în, ant. prov,
âgaua {(t. agace) f pho ». M. N. nejette, comme phonétiquement impossible,
rétymoîogie anc, ht. ail. agaîsira, et, comme inexistant, le type gennarique
*a gaza supposé par queiques-uns* Les formes romanes se répartissent en
de us S(iries également latines d'origine : 1° piém. gasm^ pr. mod. gassa, lim.
fasiQ, etc. lit, avec agglutination de la voyeîîe de l'article, pr. agmsa-ût poit.
ajas^f etc. remonient au lat. 'gacus (cf. le diminutif gaccula et Fakcr-
nance gracus — g ra eu lus — gracculus) par rintermédiaire du dérivç
*gAceu5*a; 2^ eî.p. gayû^ ÏV ital. £û/û, iurselv. s^^ia^ vcnlt. émiL gniû
(importé en Toscane et devenu ^a^ia) < lat,gaja(cf_ Papias gaj3= pica)
qui pourrait être identique au prénom Gaïus-Gaîa. — F. 142, A. Hortiing^
Zti J. Tliomai, MHiiH^ys dyivmobgtê Jtan^ise. [Recueil d'observations de
tout genre au sujet de quelques-uns des mots étudiés dans mon volume de
Mi^hn^fi ; les principales concernent haurgeon^ hrmkfj^^ cariiiyiT^ chainlrt^
chtftctni, chttfri'ii, charfti\ émikhn, h'ién\ roinîf^ rtissidar^ rn*erti^r et t^ii-
hHt. Voici quelqtiés observations sur ces observations. M. H. n'est pas cewi-
vaiEKU que hourgion vienne de *burrionem et il préfère voir dans par*
gton une forme sortie de potillm plutôt qu'un représentant héréditaire du
type iatÎEi 'porrionem ; je ne puis que m en tenir à ce que j'ai dit, L*îdêc
que le ô de hrtHkbf^ herndiiit est dii à a ne contamination de hm^ br^ttrux
me paraît excellente; je note en passant que la forme vernacîte^ que je sap-
posais avoir existé en ancien français, m'a été signalée récemmeni par
M. Jeanroy daas Jofroî de Waterford (Hisi. litt. XXI, 220)^ Les efforts
faits pour défendre Tétymotogie de ckiinire proposée antérîeunemeîit par
PÉRIODiaUES 627
M. H. ne me paraissent .pas heureux; je crois d'ailleurs, avec lui, que lé
poitevin chambige (et non ^am^if^), vient d'un type celtique •cambica :
ce n'est pas le *cambicâ indiqué par M. Thurneyscn, lequel a un 1 bref,
mais 'cam bi ca, dont j'ai eu occasion de parler ailleurs (voyçi'Duïl. delà Société
des parlers de France^ p. 108). L'explication de l'auvergnat tsavcelai^ bzs-
limousin /;o^/5«//a, doter, par le latin cancellare me paraît tout à fait inad-
missible. Le franc, dialectal chaboisseau remonte bien, il me semble, comme
le dit M. H., à un type •capusccllum. M. H. a tout à fait raison en ce
qui concerne le wallon ivière, mauvaise notation pour lï'iVr, qui signifie à la
fois if hiver » et « neige », et n'a rien i faire, au point de vue de l'étymolo-
gic, avec le latin nivem. Je ne puis m'associer à ses conclusions en ce qui
concerne l'origine picarde de revertier, et je signalerai à ce propos un témoi-
gnage qui m'avait échappé. Voici ce qu'on lit dans les Retnarqnei qui pré-
cèdent la première édition de Richelet (1680), p. 84 : « Le verker est une
sorte de jeu auquel on joué sur un trictrac avec des dames et des dc^. C'est
en un mot une manière de trictrac Alemand où l'on joué depuis quelques
années en France dans les Académies et dans les maisons particulières.
Joiur au verker. AprenJrele verker. Gagner une partie^ ou perdre une partie au
verker. Monsieur Arnell, Gentilhomme Suédois... m'a assuré que le mot de
wrker venoit de l'Allemand verkherett qui signifie changer, tourner. » Les
nombreux exemples rassemblés par M. H. de noms d'animaux employés
pour désigner de petits tas de foin, de blé, etc., au milieu des champs, sont
très curieux, mais j'avoue qu'ils ne me décident pas à penser que dans veiU
lotte il y a a veau » et que dans « muîon » il y a « mulet ». — [A. T.] —
P. 153. C. Michaélis de Vasconcellos, Randglossen lum altporttigiesischen
Lieder buch {su'itt). — P. 173,]. Ulrich, liineneue Version der « Vita di Mer-
lino ». M. U. donne de cette version, contenue dans le ms. Palat. 39 de la
bibliothèque de Parme et faite sur le même texte français que la version de
l'édition de 1480, les titres de chapitres. — P. 186, O. Nobiling, Zur
Interprétation des Dionysiscbfu Liederhuchs. — P. 193, Hlise Richter, Zu proi'.
« En » = Herr. ; Proi'.-Katal. « a-n-el ». L'examen des Leys d\4mors con-
firme l'hypothèse de M. Schuliz-Gora (cf. Homania, XXXIl, 461). En
provient d'un plus ancien ne qui ne pouvait se maintenir qu'après finale con-
sonantique et dont la transformation a été amenée par l'analogie de den,
quen, sin, an. D'autre part, il semble que an y dans an Bertran, ne soit plus
compris comme résultat d'une enclise a -|- (<*)«, mais connne simple signe
du datif. Ce pourrait être là l'origine des formes du prov. mod. et du cata-
lan an el- aquel, etc., pour a el etc. : an employé d'abord là où l'on employait
en < domine aux cas directs, aurait été employé ensuite devant les noms
de personne, même lorsque l'on n'usait pas du titre euy puis se serait
employé devant les pronoms; an ne serait donc pas dû à l'introduction d'un
n euphonique, qui n'était pas utile, puisque l'on avait ralternance a devant
consonne, ail{\) devant voyelle, et qui en tout cas, aurait dû se produire
devant tous les mots à initiales vocaliques et non pas seulement devant
628 PÈRIODIQ.UES
ks désignations personnelles (noms ou pronoms), comme il ressort des
exemples réunis (en ne tenant pas compte de an = m< lat. in).
Comptes rendus. — P. 198, W. Wundt, VôîkerpsychologUy I, Die Spracbe
(p. Dittrich). — P. 216, L. Sûtterlin, Dos fVesen der sprcuhlichen GebiUe (O.
Dittrich). — P. 218, Scritti vari di filologia a Ernesto Manaci (P. Savj-
Lopez). — P. 220, Aniceto de Pages, Gran diccionario de la Lengua casUllana
auiort\ado con ejemplos de biunos escritores antiguos y modernes (P. de Mugica :
quelques fascicules seulement ont paru; l'œuvre n*est pas rigoureusement
scientifique, mais a le mérite de donner un nombre considérable d'exemples»
malheureusement avec références incomplètes ; corrections et additions pour
les mots de^ a Ado). — P. 227, Lazâr Saineanu, Influe» là orieniald asupra
limbei si culturei romane (G. Weigand). — P. 229, Bonvesin da Riva, Il îibro
délie Tre Scritture e il Volgare délia Vanità editi a cura di V^. de Bartholo-
maeis(E. Keller). — P. 232, Karl Frey, Sammlung ausgtu.'âblUr Briefe an
Micbelagniolo Buonarroti. (F. Ed. Schneegans). — P. 233, P. Marchot. Petite
phonétique du français prélittêraire (A. Homing : remarques intéressantes sur-
tout sur le traitement de-icu, -icare). — P. 236, K. von Ettmayer, Lombar-
dischhLadinisches dus Sûdtirol (Th. Gartner : travail solide et instructif). —
P. 242, Constantin Jirecek, Die Romanen in den Stâdten Dalmatiens wàhrend
dos MittelaUers; erster Teil (J. Jung). — P. 249, Romania, n« 121-123
(A\'. Meyer-Lûbke et G. G.). — P. 256, Archiv fur lateiniscbe Lexico-
grapbU, Xni, I (E. Herzog). ^ Roques.
Revue de philologie française et de littérature, p. p. L. Qédat,
t. XV (1901), n*» I. — P. 1-25, L. Vignon, Les patois de la région lyonnaise: le
pronom neutre sujet. Un premier travail sur le pronom neutre employé comme
sujet dans qudques parties de la même région avait été publié jadb dans la
Romania (XII, 346). Le travail de M. Vignon, fondé sur l'enquête que nous
avons déjà signalée plus d'une fois (voir XX VIII, 460) est beaucoup plus com-
plet. Ce pronom neutre varie singulièrement selon les pays, et ces variations
ne sont pas purement phonétiques. 11 y a lieu assurément d'admettre des
types étymologiques divers. — P. 35, Blanchardon, Les patois de Saint-
Haon-le-Chdtel (Loire). Le nom^ Vartide^ Fadjectif et le pronom. — P. 58,
Qédat, Sur le traitement des voyelles atones et stmitoniques du latin. Critiques
de ceruins paragraphes du Traité de la formation de la langue française qui
forme l'introJuction au Dict. général de Darmesteter, Hatzfeld et Thomas.
— P. 64, Qédat, Changement atiormal de V initial en F. Il s'agit toujours de
fois et de fade Dans le premier. M. Cl. suppose que le v de vices a été
modifié par l'influence de Vs sourde qui terminait ordinairement le mot pré-
cédent {duos znces, très vices). Cette explication n'a pas le mérite de la nou-
veauté. Il y a bien des années qu'elle a été proposée et discutée. Quant au rde
vapidum, « il aurait subi l'influence du piniiiiï de la syllabe suivante ■ (?).
— P. 6), Comptes rendus. Celui de .Mireio, édition Koschwiu, par M. Vignon,
est très étudié et renferme de justes critiques.
PÈRlODIdUEb 62Q
T. XV, no 2. — P. 8i,aédat, La préposition ttV article partitif. Analyse et
explication de locutions ou la prép. de s*emploie soit avec Tart., soit sans
art. : « bien des gens », et a beaucoup de gens » ; « j*ai acheté du vin », et
« j*ai acheté ^« bon vin », etc. — P. 132, Clédat, Forme elliptique de la propo-
sition participe. Discute, contre M. Ad. Tobler, la valeur et Toriginede la pré-
position de dans une phrase telle que celle-ci : « D^ la manière dont nous
nous sommes faits» il est certain que notre félicité consiste dans le plaisir »
(l'abbé Prévost). Ces discussions comportent des distinctions très fines,
appuyées d'exemples qui ont eux-mêmes besoin d'être commentés : il n'est
guère possible de les résumer en peu de mots. -- P. 137, E. Rhode, Im
réjorme de Vortljographe et de la syntaxe françaises, à propos d'un mémoire de
Af ï« Ahlstrôm. C'est une discussion entre Suédois, sur certaines des questions
que soulève l'arrêté ministériel du 31 juillet 1900 relatif à la simplification de
l'enseignement de la syntaxe française — car il ne s'agissait pas du tout,
comme le donnerait à croire le titre de l'article de M. Rhode, de réformer ni
l'orthographe ni la syntaxe. — Il est curieux, pour le dire en passant, de con-
stater que cet arrêté ministériel a eu certainement plus de retentissement à
l'étranger qu'en France, où, je le crains bien, il est resté à peu près lettre
morte. Du reste, il n a plus qu'un intérêt rétrospectif, ayant été bientôt
remplacé par un nouvel arrêté (26 février 1901), qui modifie les conclusions
du précédent arrêté conformément aux objections de l'Académie française.
L'intervention de l'Académie (manifestée par un rapport assez bizarre de
M. Hanotaux) a jeté le trouble dans les propositions de la commission,
celle-ci ayant été à peu près contrainte de s'incliner devant les objections
académiques. Il en résulte que les décisions consacrées par le second arrêté,
celui de 1901, peuvent paraître insuffisantes, et même, sur certains points,
illogiques. Le môme sort est à prévoir pour les propositions d'une commis-
sion en vue de la simplification (on n'ose pas dire réforme) de l'orthographe
qui fonctionne en ce moment au Ministère de l'instruction publique. Ses
efforts seront annulés par l'intervention de l'Académie française. Les membres
de cette commission, et surtout son président ne se font à cet égard aucune
illusion. Tant que les imprimeurs prendront pour règle le diaionnaire de
l'Académie, toutes les tentatives de réforme seront vaines. L'édition de 1878,
qui est la septième, fera loi tant qu'elle n'aura pas été remplacée par une
nouvelle, et la huitième édition, qui ne paraîtra sûrement pas avant vingt ou
trente ans, ne différera guère de la précédente pour l'orthographe. Sans doute,
on pourrait (aire faire, par une commission compétente, un dictionnaire
orthographique. Mais les imprimeurs l'adopte raient-ils? Le grand obstacle
à toute réforme, c'est l'Académie française. — P. 149. Comptes rendus.
T. XV, no 3. — P. 161-228, L. Vignon, Les patois de la région lyonnaise :
les tournures interrogalives et les profioms sujets après le verbe. La variété de ces
tournures est bien intéressante à étudier; malheureusement l'étude histo-
rique n'en est guère possible, les documents faisant, en général, défaut pour
la période antérieure au xix« siècle. — P. 235, Clédat, Les formes françaises
6)0 PÈRIODiat'ES
i^ficatum. — P. 238, Carrez, Qiulquei expressions du français local du
Haut-Jura.
T. XV, no 4. — P. 2 M, CiéJat, Lt i>lici de Va Ijectif en français. Ce travail
s'applique a l'état actuel de ia Un^c. — P 177, Gucrlin de Guer, />« per-
turbatgun linf^uistiqtui. — P. 286, F. Pelcn, £fc £a prononciation des x en fran-
çais. MéJiocre : les faits sont nul rarigés, sans égard a Thistoirc des mots,
de plus il y a plusieurs erreurs quant a la prononciation. — P. 292, Yroo,
Sur remploi du nuyt « indéfini » en grammaire française. — P. 308, Oédai,
« Ceît son père tout craché ». Sur la réduction de \ initial -|- y i y. —
P. 313, G>mptes rendus,
T. XVI (1902), no* x-2. — P. I, Vignon, Les patois de la région lyonnaise :
les pronoms régimes de la /»"« et de la 2* personne du sing. et le pronom réflécbi,
— P. {$4, Clédat, La négation dite expUtive. Grtte négation ezplétive est une
des plaies de la langue francise. M. G. n*a peut-être pas indiqu^assez net-
tement que l'emploi s*en était beaucoup accru depuis le moyen âge Après
avant que, l'emploi de ne est certainement fautif dés l'origine ; toutefois il
s'explique historiquement par certaines locutions anciennes où figure ain^.
Mais ce n'est pas le lieu de reprendre la question. — P. 101-114, Bostien,
Omission de ne explétif. Suite du même sujet. — P. 129, Yvon et Qédat,
Sur remploi du mot m indéfini » en grammaire française. Les fronoms dits indé-
finis. — P. X47, Yvon, Sur la place de F adjectif en français.
T. XVI, no 3. — P. 167, Clédat, Essais de sémantique. I, La famille du
verbe « céder » ; II, les formules négatives. — P. 236, Comptes rendus.
T. XVI, no 4. — P. 266, Vignon, Les patois de la région lyonnaise : le pro-
nom r/j/im/ de la J' pers. — P. 302, Bourciez,/r et prov. BIAIS. Viendrait de
bf fasius qui serait pour bif a rius « double » ; ce n'est pas du tout le sens
de biais; il faudrait expliquer la transition. — P. 303, P. Regnaud, U. que-
nouille; rattache ce m-M, non à 'conocula pour colucula, comme on le
fait ordinairement (et avec toute raison), mais ii Tall. kunkel. — P. 311,
Comptes rendus. P. M.
Lfc MOYhN-AGE. 1902, XIII, p. 137-173. .\. Guesnon, Nouvelles recherches
biographiques sur les trouvères artésiens. Nous avons signalé à plusieurs reprises
les fécondes recherches de M. Ciuesnon sur les trouvères anésiens. La présente
étude continue, à proprement parler, celle que l'auteur a publiée dans le Bulle-
tin historique et philologique du Comité, en 1894 {c^. Rom. XXIV, 315) et où il
traitait de Pierre de Corbie, d'Adam de Givenchy, de Simon d'Authie, de
Gilles et de Guillaume le Vinier Cette fois il s'occupe de Jean Bodel, Wibert,
(appelé aussi Hubert) Kaukesel, BauJe Augrenon, Guillaume Veaus, Andrieu
Douche (ou Doiuhet), Sauvage d'Arras, Jean Mados, Nievelot Amion, Rikier
-Xmion, Gadifer d'Avions (et non Anions ni Anjous), Jacques le Vinier, Eude
de la (^orroierie, Hue le châtelain d'Arras, Vilain d'Arras, Moniot d'Arras,
Alan de C:ans (et non de Caus), Audcfroi le bâtard, Jean Erart, Andrieu
PÉRIODIQUES 63 I
Contredit, Robert de le Pierre, Jean de Grieviler, Jean Bretel, Adam de la
Halle. M. Guesnon, profondément versé dans la connaissance des sources de
rhistoire d'Arras, apporte sur tous ces trouvères des renseignements précis, ou,
à défaut, des conjectures plus ou moins probables (cf. ci-dessus, p. 384 et
suiv.). Il a fait, comme dans ses travaux précédents, grand usage du « Registre
de la sainte Chandelle d'Arras », dont il a le premier reconnu le véritable
caractère, comme G. Paris Ta dit ici-même (XXIX, 145).
ACHTER JaHRESBERICHT DES INSTITUTS FUR RUM^NISCHE SPRACHE ZU
Leipzig, hgg. von G. Weigand. Leipzig, Barth, 1902, in-8, viii-324 p. —
Ce volume ne contient que trois études. Nous avons déjà signalé Tune d'elles
(Romania, XXX, 472), Die rumànischen Diminulivsuffixe par S. Pu^ariu. —
Le recueil débute par le rapport annuel de M. Weigand pour 1900-1901. Puis
vient une étude de M. St. Stinghe sur DieSchkejer oder Trokaren in Kronstadt^
étude ethnographique, historique et linguistique. Le dialecte des habitants
du faubourg roumain de §chel, partie de Kronstadt (Braçov), se distingue net»
tement par quelques traits importants des variétés dialectales parlées dans les
régions voisines, transylvaines ou roumaines. Les coutumes, présentent aussi
de remarquables particularités, surtout celles qui se rattachent aux fêtes de
Pâques. M. Stinghe adopte et confirme l'opinion de M. MileticT, fondée sur
le témoignage d*un chroniqueur local du xviiic siècle : les aïeux des habitants
de Scheï étaient des Bulgares venus dans le pays en 1392. Quelques noms
de lieu, le nom même de ^cheï (Slavi) les noms saxons {Belgere%)t\ hongrois
(Bolgârs^ék) viennent à l'appui de cette opinion. Mais M. Mileticï croyait à la
conservation de l'élément slave jusqu'au xviiic siècle, M. Stinghe la limite au
xvi« siècle. Des textes et un glossaire complètent cette étude qui contient un
tableau des particularités dialectales de ^chel. — Le volume est terminé par
le compte rendu du voyage d'exploration linguistique fait par M. Weigand
en 1899 dans la Grande Valachie, le tableau des résultats de l'enquête et
soixante-quinze textes recueillis.
M. RoauEs.
CHRONiaUE
M. Oddotie Zenatti, Auteur de diverses études sur h littérature iia-
Ueane, spécialenxem Sîir celle du Trertîn et de Tlstrie (voir Rom. X, 458 ;
XVin, 198; cf. ibid.^ %i%% est mort à Rome le 34 juin de cette année. Il
était né à Tnestcen 1866. L*état de sa santé Tavait obligé de quitter Fensd-
gnement, et, en ces derniers tennps, il occupait un emploi à la bibliothèque
Casanaiense de Rome. Son dernier ouvrage, publié peu de semaines apréç
son décès, est un gros volume intiiuïé Dante e Finnit^ pnm anlîd^ cm fwte
iUmirative id appendici {¥\ot^r\c^^ Sansoni* dans Bihimitca scùlaslka di Clmikî
i^iiani dirdiu dû G. Carducci). Le titre ^ un peu vague, laisse déjà eiitrevoir
que Touvrage se compose de matières asse^ variées qui sont groupées plutôt
que combinées. Toutefois, si la composition laisse à désirer, rérudkion est
de bon aloi* L'objet de la plus grande partie du livre est de montrer que les
rensei^ements fournis par Boccace sur Dame méritent confiance, et il faui
reconnaître que M, Zcnatti y réussit dans une assez grande mesure. En tête,
une intéressante notice sur Tauteur par son frère, M. Albino Zenatti,
— M, W. BoRSDORF* de qui nous avons signalé jadis (XJX, }75) 1^ disser-
tation sur le ti Château ti dans Chrh d Lurîs et dans Euamw, est décédé en
juin dernier à l'âge de trenie-huit ans> Depuis 1895 {Rom.^ XXIV» 147) il
enseignait le français et l'ancien allemand à TUniversité de Galles, dont k
si^e est à Aberystwyth,
— M, Ulysse RoBERT, bien connu par ses travaux sur l'histoire et sur la
littérature du moyea âge, est décédé subitement le s octobre dernier à î*âg€
de cinquante-huit ans. A sa sortie de TÉcole des chartes, en 1 87^, il était
eotré au département des manuscrits de la Bibliothè^^ue nationale où il se
signala par son activité. Hn 18S4, il fut nommé inspecteur généra! des biblio-
ihèques et archives, et bientôt après, il fut, en cette qualité, chargé de la direc*
tion et du contrôle des travaux relatifs au Catalogue des manu écrits de^
tnbliothèques publiques. Il eut donc à revoir les épreuves du Caialûgue gé'mml
des mamisçrihdfs déparkments, dont le premier tome (Rouen) parut en 1886,
et qui compte aauellement quarante-trois volumes. On ne s'étonnera pas si,
dans une collection aussi étendue et dont les auteurs n'avaient pas tous une
préparation suffisante, il se trouve des parties assez défectueuses, Ulyss*î
Robert avait une grande puissance de travail, et il a pu» saiîs négliger ses devoirs
CHRONIQUE 633
professionnels qui étaient très absorbants, conduire à bonne (in des recherches
très variées. Franc-comtois de naissance, il a consacré des études importantes
à l'histoire de sa province : nous avons annoncé récemment (ci-dessus, p. 351)
son intéressant recueil des Testaments de Vofficialité de Besançon, Nous signale-
rons encore, laissant de côté les travaux purement historiques, sa publication
d*un curieux vocabulaire latin-français, suivi d*un recueil de proverbes, écrit
par un écolier d'Arbois (Jura) qui a été mentionnée ici même (II, 273) et
son Mémoire sur les origines du théâtre à Besançon {Mémoires des Antiq, de
France^ t. UX). Dans un tout autre ordre d'études, il convient de rappeler
sa publication de THeptateuque de Lyon (voir Rom., XXX, 47$), si inté-
ressante pour rhistoire des anciennes versions latines de la Bible et pour la
connaissance du latin des bas-temps. Enfin, on sait qu'Ulysse Robert s'était
occupé de la littérature française du moyen âge : il a publié, avec G. Paris,
pour la Société des anciens textes français, les Miracles de Nostre Dame (1876-
1883), et seul, VArt de chevalerie'dc Jean de Meun suivi de la mise en vers
de cet ouvrage par Priorat de Besançon (1897).
— Les amis et élèves de M. Mussafia préparent en son honneur une
publication collective, qui lui sera offerte à l'occasion du soixante-dixième
anniversaire de sa naissance.
— La Société des anciens textes français vient de publier (pour compléter
l'exercice de 1902) le t. I du Romande Tristan par Thomas, édité par M. J.
Bédier et le t. I du Recwii de sotties édité par M. E, Picot. Le tome I de
Tristan contient, à la suite d'un court avant-propos, tous les fragments ori-
ginaux qui nous sont parvenus de l'œuvre du trouvère Thomas. C'est en
tout 3144 vers, sur environ 18000 que devait contenir le poème. Les parties
en déficit sont remplacées par une analyse très soignée des œuvres étran-
gères (le Tristan de Gottfried de Strasbourg, Sir Tristrem, une Saga islan-
daise, etc.) qui sont dérivées (en forme d'imitation ou de résumé) du Tristan
français. Ce travail de restitution sera justifié dans l'introduction qui occupera
la majeure partie du tome second. Mais dès maintenant on en peut appré-
cier tout le mérite. — Le Recueil de sotties formera trois volumes. Le pre-
mier renferme neuf sotties, dont chacune est précédée d'une notice spéciale.
— La seconde partie de la Grammaire historique de la langue française de
M. Nyrop vient de paraître. Elle contient la morphologie. On y reccmnaît
les qualités d'érudition, de clarté dans l'exposé et de critique qui ont fait le
succès de la première. Le système de transcription phonétique n'est plus le
même dans le t. I ; M. Nyrop s'en explique dans l'avant-propos, mais ce
changement ne gênera pas les Français à qui naturellement ces transcriptions
sont inutiles et qui ne les regardent pas. Le second volume mérite tous les
éloges que la Rotmnia a ùiit du premier (XXVIII, 477) en annonçant un
compte rendu qui n'a jamais été fait. C'est une des nombreuses promesses
qu'elle n'a pas tenues. La grammaire de M. N\Top n'en a pas nooins fait
son chemin : le premier volume est épuise et paraîtra l'an prochain en
seconde édition.
634 CHRONIQUE
— LivTcs annoncés sommairement :
Guiot von Provins^ seine Gônner, die «t Suite de la Bible » und seine lyrischen
Dichtungen.... von Arthur Bakdler. Halle, Kaemmerer, 1902. In-8, 92 p.
dissert, de Halle). — La partie la plus intéressante de cette dissertation est
celle qui est consacrée à la liste bien connue que dresse Guiot de Pro\ins,
dans sa Bible, de ses nobles protecteurs défunts. M. Bandler montre que cette
liste a dû être écrite en 1205 (plutôt peut-être en 1204), et il accompagne
chacun des 86 noms qui la composent d'un petit commentaire historique,
sobre et précis, puisé aux meilleures sources ; c*est un travail utile, qu*on
aura souvent occasion de consulter. L'auteur étudie ensuite la a Suite de
la Bible », qu'il pense être bien l'œuvTe de Guiot de Provins (seulement
elle aurait formé d'abord un poème isolé), puis les cinq chansons qu'on
a de lui, et termine par un court exposé de la versification et de la langue
de l'auteur. Tout le travail est consciencieux et satisfaisant. — G. P.
Le Pèlerinage Jl)t5ucrist de Guillaume de Deguilleville, edited byJ-J.
Stùrzinger. Printed for the Roxburghe Club. London, Nichols, iSçy.
In-40, vii-372 pages. — Nous avons annoncé successivement les deux
premiers volumes de cette édition très méritoire, malheureusement tirée à
bien petit nombre, des œuvres de Guillaume de Deguilleville (XXIV,
485, XXVI, 344). C'est par suite d'un oubli, que nous réparons bien ur-
divement, que ce troisième volume n'a pas été signalé à nos lecteurs. Il a
été préparé avec le même soin que les précédents et est également orné de
belles reproductions, en couleur, de miniatures. Le sujet n'est pas très
intéressant : l'auteur, naturellement, suit les évangiles (il y aurait des
recherches à faire sur les commentaires latins qu'il a connus), et n'avait
guère occasion de faire preuve d'originalité. Stùrzinger, dont la mort a été
annoncée ci-dessus, p. 470, nous fait part à la fin de son avant-propos
(p. vj) de l'intention qu'il avait de publier la seconde rédaction du Pèleri-
nage de vie humaine pour V Early english text Society, avec la version anglaise
de Lydgate faite sur cène seconde rédaction. Il avait déjà annoncé la même
intention dans la préface de son premier volume {Pelerittage de vie humaine,
p. vj). Mais je suis informé par M. Fumivall que la copie de cette seconde
rédaction fut brûlée par erreur, après la mort de G. N. Currie qui prépa-
rait l'édition de Lydgate annoncée dans l'article suivant. — Stùrzinger se
proposait aussi d'écrire une introduction générale {Pèlerinage de vie humaine,
p. vj), qui ne paraît pas avoir été rédigée.
The pilgrinagt of the Life of Man, englisht by John Lyix;ate, A. D. 1426,
from the french of Guillaume de Deguilleville, A. D. 1335 {sic, lire 1555),
edited from 3 fifteenth Century mss. in the British Muséum... by
F. J. Fcrnivall; parti and II, London, 1899, '9^'- ^" ^°» xii-66s pages
(Early english text Society). — Les deux poèmes de G. de Deguille\'ille, le
Pèlerinage de vie humaine et le Pèlerinage de Tdme, ont été traduits en
CHRONiaUE 63 5
anglais, le premier en vers par Lydgate, le second en prose par un ano-
nyme. La version en prose sera publiée ultérieurement par YEarly engUsh
Uxt Society f et Ton se propose de placer en regard le remaniement en prose
française dû à Jean Gallopes. Présentement, nous avons à annoncer,
comme se rattachant par le sujet à la littérature française, la version
anglaise de Lydgate. L*édition en avait été commencée par un des colla-
borateurs de VEarly english text Society qui mourut sans avoir beaucoup
avancé son travail. M. Furnivall, le fondateur de la Société et l'un de ses plus
actifs collaborateurs, la recommença sur de nouvelles bases. Il nous en a
donné, à peu d'intervalle, les deux premiers volumes qui, nous Tespérons,
seront bientôt suivis du troisième et dernier. Lydgate a traduit non pas
la première édition du poème de Dcguilleville, faite de 1330 à i^yi
(publiée en 1895 par Stûrzinger, \o\vRom., XXIV, 485), mais la seconde,
qui est datée de I3S5- M. Furnivall a tait occasionnellement usage de cette
seconde rédaction française dont Stûrzinger se proposait de publier une
édition qui, par suite d'un fâcheux accident, ne semble pas devoir
paraître aussitôt qu'on l'espérait. Nous devons du moins nous féliciter
d'avoir la version anglaise dans une édition critique et d'un usage com-
mode.
Historical Reader of early frntch^ containing passages illustrative of ihe
growth of the french language from the earlicst times to the end of ihe
fîfteenth Century, by Herbert A. Stroxg and L. D. Barnett. Edinburgh
and London, W. Blackwood, 1901. In- 12, 200 pages. — Nous ne pouvons
que nous réjouir de voir parjîire en Angleterre un livre élémentaire
destiné à faciliter l'étude de lancien français, mais force nous est de recon-
naître que celui-ci ne peut être approuve ni pour le plan ni pour l'exécu-
tion. Les 30 premières pages, intitulées « Period of early and classical
latin », contiennent des extraits de Plaute, Cicéron, Pline, etc., avec tra-
duction anglaise et courtes notices bioi^raphiques des auteurs. On se
demande en quoi ces extraits peuvent servir à l'étude du vieux français.
Ensuite viennent, sous le titre de « dominance of vulgar latin », quelques
morceaux empruntés pour la plupart à la première partie de mon Recueil
d'anciens textes^ augmentés de textes assez mal choisis (par ex. le no 10,
p. 45, qui est une lettre de Charlemagne en latin fort peu vulgaire).
L'abrégé de grammaire qui occupe les pages 46 à 67 abonde en erreurs de
tout genre qu'il n'est pas utile de relever ici. Les textes en ancien français
commencent à la page 68. Ils sont accompagnés de traductions souvent
bien fautives. On s'étonne J'y voir la farce de Paihelin placée entre Join-
ville et Villehardouin. Tous ces morceaux sont découpés dans la Chresto-
mathie de M. Sudre ou dans les Spccimcus de M. Toynbee. L'annotation
est très faible.
Études sur le tIMre français du A7r« siècle. Le Jour du Jugement, mystère
français sur le Grand schisme^ publié pour la première fois, d'après le ms. 579
de la Bibliothèque de Besançon, et les mystères Sainte Geneviève, par
fjS CHRONIQUE
Emile Rov* Piris, Bouillon, 1902. In*8, vni-26â pages (Extrait des
Ménioîres de la Soc* d'émtiiaiion dti Doubs). — La Romania (XXXI, 647)
a rendu un compte favorable d'une publication de M. Roy sur Tancicn
théâtre français, appelant spécialement 1 attention sur ^érudition « très
étendue et très minutieuse » de l'auteur. Le même mérite peut être reconnu
â la présente publication. M. R, a étudié avec amour le mystère de
Besan(;oii et les autres oii le m^me sujet est traité. Il y a, dans son tra-
vail, où les digressions sont peut-être un peu trop fréquentes^ beaucoup
de remarques sagaces qui prouvent une connaissance approfondie de notre
vieille littérature dramatique. Je crains toutefois qa*il ait employé ses
efforts à soutenir une thèse erronée. I^ ms, S79 de Besançon, autant qu'on
en peut juger par le fac-simîlé joint à la publication, est du commence-
ment du xve siècle (le catalogue imprimé, par Castan, l'attribue à la
w période moyenne du xiv*^ siècle *, ce qui est inadmissible). C*est une
copie qui nt* fournit pas d indication sur la date de roeuvrc. Mais, selon
M. Roy, le mystère contiendrait de nombreuses et précises allusions auji
événements de la période du Grand schisme, et pourrait par suite être daté
exactement de Tannée iîçS, spécialement du 5 avril de cette année. M* R.
déploie assurément une érudîtiot> fort ingénieuse pour prouver cette thèse,
mais il n'y arriva; pas. Les passages dans lesquels il croit trouver des allu-
sions positives sont de vagues lieux communs. Je dirai plus : il n'y H pas,
dans tout le mystère, une seule allusion cenainc au Grand schisme.
Rien ne s*oppose d'ailleurs à ce que le mystère ait été composé à la fin du
xi%^ siècle, etj quoiqu'il n'ait, au point de vue historique, aucune valeur
particulière, il convient de remercier M. R. de nous en avoir donné une
édition très soignée,
M an ara Valgimigu, Appunti iw k poeiia saitrim laiina mtdiùn^aîe in ftdîk.
Messina, tip. Nicotra, 1902. In-S, xm-i44p. — L'auteur nous apprend dans
sa préface que le présent opuscule est une thèse présentée en 1898 à F Uni*
versité de Bologne et qu'il Ta imprimée telle quel le, n -ignorant pas qu'elle
a été rédigée un peu trop vite, et qu'elle renferme des erreurs w che si
potevano e dovevano evitare «. Il est difficile de se montrer sévère pour un
travail dont Tauteur parle aussi modestement. Bornons-nous à dire que
c'est surtout une compilation des travaux antérieurs {Straccali, Novati,
Ronca, etc.), et que, a défaut de faits nouveaux, entre beaucoup de
considérations superflues ou contestables, on y trouve çâ et la quelques '
idées dignes d'anentïon.
Le dratti£ religieux au mtïvfw agi^ par Mariuv Semt. Paris, Bloud,, 190$. lo-
13*, éj p. (publication de la Société Hblingraphiquc), — Résumé bien
fait des connaissances acquises sur la formation de notre ancien drame reli*
gieux, M. Scpet qui, par des travaux de première main, a contribué plus
que personne â éclairctr les origines du drame liturgique et en génèiaJ du
théâtre religieux, était parfaitement qualifié pour écrire ce précis. Le sujet
. fst Hcn présenté et rien d'essentiel n*est omis* La question des origines est
CHRONIQ.UE 637
étudiée avec un soin particulier. Les limites de l'ouvrage ne permettaient
pas à Tauteur d'entrer dans des discussions détaillées, mais on sent que
toutes les assertions sont appuyées sur des recherches personnelles. Sur
quelques points de détail on pourrait différer d'opinion. Ainsi M. S.
adopte l'opinion d'après laquelle le drame d'Adam (ms. de Tours) aurait
été composé et joué en Angleterre au xii« siècle. Je ne vois pas de raison
positive pour attribuer à l'Angleterre ce petit mystère qui ne me parait pas
antérieur au commencement du xiiie siècle.
A Catalogue of îetters and other historical documents exhihited in tJje lihrary at
Welhecky compiled by S. Arthur Strong, wiih portraits and numerous
facsimiles. London, John Murray, 1903. In-40, xvj-316 pages. — La plus
grande partie de ce somptueux volume est occupée par des lettres et docu-
ments divers (xviie-xviiie siècles) qui ne sont pas du ressort de la Romania,
Mais dans les premières pages est décrit un manuscrit français, écrit en
Angleterre au commencement du xiv^ siècle, et qui a, pour la littérature
française d'Outre-Manche, une importance considérable. 11 ne contient pas
moins de treize vies de saints, en vers, dont quelques-unes, par exemple la
vie de sainte Elisabeth de Hongrie (par Nicole Bozon?), la vie de Thomas
de Cantorbéry (de Garnier de Pont-Saint-Maxence), les vies de sainte
Catherine (par Clémence de Barking) et de sainte Modwene, étaient bien
connues, mais plusieurs ne se trouvent, à ma connaissance, que dans le ms.
de Welbeck. De ce nombre est une vie du roi Edouard le Confesseur toute
différente des deux poèmes sur le même roi que l'on connaissait déjà par la
publication de Luard (collection du Maître des rôles). Cette vie m'intéresse
d'autant plus que j'en connaissais depuis longtemps une mise en prose
conservée par un ms. du Musée britannique. Ayant eu connaissance l'an
dernier du ms. de Welbeck j'ai pu le mettre à contribution pour une
grande bibliographie des vies des saints en vers français qui occupe les pages
558 à 378 du tome XXXIII (sous presse) de V Histoire littéraire. Dans un
prochain mémoire je donnerai des extraits de la vie d'Edouard le Confes-
seur et de la rédaction en prose.
A history of french Versification ^ by L. E. Kastner. Oxford, Clarendon Press,
1903. In-i2, XX-512 pages. — Ce livre, comme tout ce qui sort de la
Clarendon Press^ est très bien imprimé. Mais on ne peut pas dire que le fond
soit aussi parfait que la forme. M. K. connaît assez bien la versification
française moderne pour l'étude de laquelle les livres abondent : il est
moins at Ijome lorsqu'il s'agit de notre ancienne poésie et de notre ancienne
langue. Ainsi il attribue aux poètes de la Pléiade l'omission de Ve dans
don'ray (p. 1 3). Il ne sait donc pas que le futur de doner, en ancien fran-
çais, est régulièrement donrai. Il place au ix« siècle la Passion et le
Saint-Léger de Clermont. Ce qu'il dit du couplet de deux vers n'est pas
au courant. La partie consacrée aux diverses espèces de strophes est incom-
plète, quoique proportionnellement trop longue, et souvent erronée. Beau-
coup de fautes qu'on pourrait relever eussent été facilement évitées si
éjS CHROHiaOE
Tautetir ivàit laii uwgc de la dibhertaion d*f M. N^tt^bus (D/<? Hickt-lym-
£kn Stropimiformin des AUjmnidmchin) qu'il ne paraît pas avoir connue,
car il Ej€ lii cite pas dans Ja Bibliographie des pages xill>J£K, qui pourtant
abonde en indications peu utiles.
The ChaUkine q/ Vtrgi^ a ip^ Cenluryfrmch Romanct^ done inio englîsh by
Alice Kemp-Welch, edited wiih an introduction by L. Brakdin, wiîh con-
temporary iliustraiions. London, D Nutt^ 19OÎ- In- 12, xxïiL-9j pages. —
Le texte, (oublié en appendice, est U reproduction, moins les variantçsj de
celui que M. Raynaud a imprinié dans U Romania^ XXI, j6î et suiv. Lsl
traduction pourrait être meilleure, r« Celé ne tint o tui plus plait» (v. ïûj),
est singuli*;ren3ent rendu par «t and no more had she phasun in hîm ». Elle
suffit cependant à dontier une idée de ce joli poème au public anglais.
L'introduction, sans rien apporter de nouveau, est satisfaisante. En tête de
ce petit Vûlurtiejqui est Ion (élégamment imprimé, est placée la reproduction
photographique d'un ivoire du Musée britannique où sont représentées
diverses scènes du roman.
Un* étlmôîi^ia fran&se. Nota del sodo Francesco d^Ovîûto. In-B^, } P^lï^s
(HïLCrait de l'Académie de Naples.) M. d'Ovidio pense que le français par
ctrur équivautà/«ïr cixrwr, et la preuve qu'il en donne est l'expression espa-
gnole correspondante Je coro, qui n'a rien affaire, bien entendu, avec wr,
tuer ou coraim. iï y ^ longtemps que j'ai pensé à cette équivalence i£(tur-
cr/Arwr) que M. d'Ovidio a le premier formulée. Est -ce que dans l'anglais
hy rote, le mot rûie ne serait pas T instrument de musique? To kûrn by fuie
répondrait ainsi assez eïactî.;ment à apundêt Je ciro. — A. M*-F.
Dmik mid tk animal Kinodom by Richard Thayf-H Holbbook.Ncw York, The
Columbia Univers! ty Press, 1902, In-S», xviii et ^76 pages, — Le sujet
avait été traité dans un article très court de K, Witte (voy. Dantf'Fmuhun-
gitt, t. Il, p. 185-193). M. Holbrook lui a consacré un volume qui se lit
agréablement mais qui ne rv^pond guère â la question ussentklle que les
lecteurs de h Com/twdiû iont conduits à se poser : ou Dante a-t-il puisé
ses connaissances d'histoire naturelle ? 11 eût fallu étudier de beaucotjp
plus près les bestiaires et certaines encyclapédies médiévatcs; mais otite
étude n'est pas très facile a faire aUK Etats-Unis, ce que Tauteur reconnaît
dans sa préface, — A, M, -F.
A, Pillet, Ufbtt âtn ^égin%t^rUgin S tu tui dtr FabUaux^Pûr&dmtig (Seuphikk^
gùcljts Ctutralblaii, t. VU, 1903, p. 98'îOî.)^ ^*^^ï ""^ discussion brève,
mais singuliéremimi lucide et pénétrante, des travaux pul*liés en ces dix
dernières années. Sur h question de Torigine des « fabk^ux >*j M. Pîllct
déclare s'en tenir à la théorie de Benfey^ qui cherche, comme on sait, leuL
patrie dans Tlnde : il semble bien pourtant que M. P. substitue volontiers
à rindc de Benfey un Oriem indéterminé* D'autre part, puisque, revendi-
quant cette théorie, il voulait surtout recenser les travaux qui la con-
cernent, et puisque Benfey faisait venir de Tlnde, outre les « fableaux »,
l«fô contes populaires de tout gçnre^ peut-être M. P. n*4tail4l pas en droit
CHRONIQUE 639
de passer sous silence les fables et les contes merveilleux, et d'écaner sys-
tématiquement tout ce que les folkloristes ont écrit depuis dix ans pour
ou contre le système de Benfey. Par exemple» il se trouve que M G. Huet
dans la revue De Gids (1902), M. L. Sainéan dans la Revue de synthèse his-
torique (1902) se sont proposé dans le même temps que M. P., précisément
comme lui, de dresser le bilan des discussions récentes : concluant d'ailleurs
contre Benfey, ils n*ont eu garde, ce qui eût été contraire à Tesprit de son sys-
tème, de se limiter arbitrairement aux seuls» fableaux». — Mais le mémoire
de M. P. tend surtout à montrer qu*en l'état actuel des questions, la tâche
urgente est de multiplier des monographies de « fableaux », où, a sans
intention préconçue d'en démontrer l'origine orientale », les critiques clas-
seraient toutes les versions connues de chaque thème pour en déterminer
la filiation logique et historique. Rien n'est plus désirable, en effet : ce
qu'on a pu écrire jadis sur la fragilité de telles enquêtes éuit,pour le moins,
outré ; et M. P. lui-même, en son étude excellente du « FabUau des Trois
bossus merustrels » (voy. Rom., XXXI, 1 36), s'est déjà chargé de prouver par
l'exemple le prix de telles monographies. — J. Bédier.
Errata. — P. 49, n. 4, lire Bourbon. — P. 81, n. 7, pisearitUs, 1. piscariotes. — P. 98,
1. 7 du bas, cuer, 1. curer} — P. 100. ▼. 11. le I> Bos propose avec raison de remplacer
curt par tort ; — v. 17, M. Bos pense que ère est l'airelle. — P. 153, 1. 2 du bas, 1.
itasumances. — P. 154, 1. 24, I. moi: -ai. — P. 155, I. 6, que, I. qui. -^Ibid., 1. 8 du
bas. I. Viennois. — P. 158, mettre les vers 1016-1020 entre crochets, et intervertir les
vers 123 et 124. — P. 159, 1. 2, 1. ses tre^. — Ibid., 1. 26, suppr. QPS après maU, —
P. 160, n. f, iraîtrse, 1. traîtres. — P. 171, 1. 17 et p. 172, I. 2, lire Chaytor. —
P. 33s, 1. 19, Bonne, lire Bonn. — P. 551, 1. 18 da bas. 1. Estense. — P. 395, 1. 4 du
bas. 1. wasthui. — P. 602, 1. 7 du bas, d'après une vérification faite à Londres il y
aurait dans le ms., aux trois endroits cités, la même leçon : dtscunorted.
TABLE DES MATIÈRES
Pages
F. Lot, La Chanson de Landri i
P. Meybr, Les manuscrits français de Cambridge (Trinity Collège).. . i8
A. Thomas» Le suffixe' -aricius en français et en provençal 177
P. Rajka, Le origini délia novella narrata dal « Frankeleyn » nei Can-
terbitry Taies del Chaucer , 204
P. Meyer, Recettes médicales en provençal d'après le ms. R. 14.30
de Trinity Collège, Cambridge 268, cf. p. 472
H. SuCHiKR, Recherches sur les chansons de Guillaume d*Orange (pre-
mier article) 355^ c^- P- 473
G. Langlois, Notes sur le Jeu de la Feuillèe, d*Adam le Bossu 364
J. A. Herbert, A new ms. of Adgar's Mar\--legends 394 -
F. Lot, Lt Mesnie HelUquin et le comte Emequin de Boulogne 422
G. Paris, Le cycle de la « Gageure » 481
P. Tou)o, Pt\ faNeau di Constant du Hamel $52
P. ToYNBEE, Dante*s useoftheword 7>j//â/ointhe Gmt'tttband Fita
ntioin 565
MÉLANGES
J. PoPovia, Les noms des Roumains de ITstrie 121
J. CoRKU, Disette = decepta — Tant mieux, tant fis, tant t>lus, tant
moins, — Poche « cuiller à pot ■ 124
A. Je.\xroy, Fr. sémillant 500
G. L. Kittreoge, The chanson du Comte Hemiquin 503
G. P., Or est lYfius ifui aunerj 442
A. Thomas, Sur un vers du PeîMna^e de Cbarlemapu 442
E.-S. Shelix>n\ D(ix\ Jeki:: 444
A. DelboullE, Beltrer. — Lcure^ loerre, — Origine du mot sabre-
mis ou sahrenauJ 445
A. Thomas, Fr. ^eline 447
P. M., Awir son cUt-ier ^xtirant. — Cnix/on, enÊint changé en nour-
rice. — Charme en vers français 450
F. Lot, Conjectures sur Girart de Roussillon 572
— Orson de Beau\*ais 577
P. M.. Wauchîer de Denais 583
UJst ju x-'i. .À-u;, p. p. G. R-WNA'.D 58^
E. Lakolois, Trii» mis a Tindex au xui« siècle 588
TABLE DBS MATIÈRES 64 1
E. Langlois, Integrum > etUre 591
J. T. Clark, Les explosives sourdes entre voyelles en iulien 593
COMPTES RENDUS
Andraud, La vie et Tœuvre de Raimon de Miraval (A. Jeanroy) 131
Byhan, Istrorumânisches Glossar (J. Popovici) 32$
Carnoy, Le latin d* Espagne d'après les inscriptions (M. Roques) 307
Chançun {La) de ÎVillame (P. M.) 597
Chronique riraée des troubles de Flandre, en 1378-80, p. p. Pirenne
(M. Wilmotte) 621
CoLLijN, Les suffixes toponymiques dans les langues française et pro-
vençale (G. P.) 312
GuiLLON, Jehan Clopinel dit de Meung (E. Langlois) 322
Jehan le Nevelon, Die Vengeance Alixandre, hgg. von Schultz-Gora
(E. >yalberg) lîS
Jordan, Girarsdtudien (G. Huet) 619
Muîomedicina Chironis, p. p. E. Oder (O. Densusianu) 454
Nassau-Noordewier, Bijdrage tôt de Beoordecling van den Willehalm
(Minckwitz) 317
Oder, voy. Muîomedicina Chironis.
Peires von Auvergne, Die Lieder kritisch hgg. von R. Zenker (A.
Jeanroy) ^ 313
Pirenne, voy. Chronique.
Pirson, La langue des inscriptions latines de la Gaule (M. Roques). . . 307
Robert de Ho, Enseignements , p. p. M-.V. Young (G. P.) 141
Sachrow, Ueber die Vengeance d* Alexandre von Jean le Venelais (E.
Walberg) i S©
Schultz-Gora, vpy. Jehan le Nevelon.
Tiersot, Chansons populaires recueillies dans les Alpes françaises
(P.M.) 457
Tobler, Etymologisches (G. P.) 127
YouNG^ voy. Robert de Ho.
Weeks, Aïmer le chetif (E. Langlois) 455
Zenker, voy. Peires von Auvergne.
UVRES ANNONCÉS SOMMAIREMENT
Appel, Provenzalischc Chrestomathie, 2t« auflage 176
Appel, voy. Pétrarciob.
Bandler, Guyot von Provins 634
Barnet, voy. Strong.
Beiirâge zur romanischcn u. englischen Philologie 347
Bertoni, La Biblioteca estense e la coltura ferrarese 351
64^ TABLE DES MATIIkES
BlADEÏÏE, VOy> BONVfiSm liA LA Ri VA,
BoKDURAî^D^ vûy. Leude.
BoNVEstN DA LA RiVA, // hbro iîiUe tre scntturt, a cura di BrAûENE . , 477
BoREtrus, Étude sur rempjoi de^ pronrms p*;rsonneb sujets en
ancicD fr^nçiàis .,.......,,....,,......., , , 347
BouRCiEi* L€S mots L-spagnoU comparés mt mots gascons. . . . , ^44
BrANDIN. VOy. CUATELAlSfE,
Candrèa-Hecht, Les dlciunts btins de \\ langue roumaine. ,,..... 475
Câitulaire du Chap. de Saint- LautI 4'A«gers, p. p. Planchekault. , . 480
Chaidûim oj Vergi (The)^ by Kemp-Welch atîd BRAKom ..*... 63 a
Chavtok, vôy, Troubadou rs.
CHRESTiEN DE TkoVHs, Kristtan von Troyes Yvain ligg. von Fômer. 342
Constantin et Desqrmaux, DiciioïinHaire iavoyar<i. . ..Vp*. ...,..*.. îSo
Couture, voy Md anges.
Crescihî, L'epîsodîo di Francesca. . _ , _ 174
DUHRïlUX. Dict. etymol Je ta bngue gasconne. ._.........__.. 17^
Desormaux^ voy, Constantin.
Fiordii di S. Fmnduo pubbl da Manzoni , 477
FtERSi-ER, voy, Chrestien de Troyes.
FounvifeRE (k p. Xavier de). Lou pichôi Trcsor , . , 173
Fdknivall, voy. Lydgate et Robert of B^unne.
Grandmaison (de), Étymologîe du mot hu^uencL ..,,.,,.....,..., 549
Greenough and Khtredge, Words and their ways in engtish speech. 347
Guillaume DK DEGUaLEviLtE, Ptkrinagf jlmucrist, ed, by Stùr-
:£INGER .♦_...._.. ...,.,.. 6|4
Hanssen, Hotas a la versificacion de JuJin Manuel , . . . . , 175
H E ucKENC a mp , voi f Quifi^t foyts .
HtLKA^ Die directe Rede in den Romanen des Chresïi^n M Troyes . , , 47e
HORNtNG, Die BehandSung d. lat. Proparoxytona in d. MunJarten d-
Vogesen u, îm Wallonîschen , 477
Kastner, a historj* ot frencli versification .,...,.... . . . . < 657
KawcxïKSXI, Hum de EônStaux, poecna^ starofrancuski. ............ 478
KEM^WELCll» voy. Châtelaine.
Kittredce, voy> Greexoug».
KosGHwrrz, Les plus anciens monuments dit U kngue française, 6* éd. 54^
JêANHûy, Cbûmons^ jeux partis ft refrains. ..,_...,,,..',..,...._,. 348
Leude (La) et les péages de Sahit-Gîïlcs au xw s., p- p Bonourand. 172
LydGate, Tf?e Fiignmage oj tbt Lijf of tmn, tû. by Fumîvall , . 6|4
Manzoni, voir Fioretii,
Mélanges Léonce Co UT U RE , ..- 34S
Metter, voy. Notice.
MEYER-LûBKEf Zur Kcfintnîss d. Altlogudoresîschen . .............. . J49
MuRFT^ Dante à Lausanne?. _ . . _ ....... . 478
Hotice d*un ms. de Trinity Collcge (Cambridge) p. P. Meter ...,.., 552
TABLE DES MATIÈRES 643
Nyrop, Manuel phonétique du français parlé, 2* éd., par Philipot 347
OviDio (d'), Reliquie probabili o possibili degli antichl dialetti italici
nei modemi dialeiti italiani 346
— Un' etimologia francese 638
Persico, Cino da Pistoia e il primo sonetio délia Vita titan'a 176
PÉTRARCiUE, Die Triumphe Franccsco Petrarcas hgg. von Appel 175
— I trionfi di Francesco Peirarca, per cura di Appel 175
Philipot, voy. Nyrop.
PiLLET, Ueber d. gegenwàrtigen Stand d. Fableaux Forsdiung 638
Planchenault, voy. Cartulaire.
PoRENA, Délie manifestazioni plastische del sentimento'nei personaggi
délia D.C 342
PuscARiu, Studiï §i notice filologice 476
Qhtnie (Les)joyfs de tmiriagey p. p. Heuckencamp 174
Restori, Il Cancionero Classense 263 344
Reure, Conjecture sur les origines de Fr. Villon 343
Robert, voy. Testaments.
Robert of Brunne's « Handlyng Syntie », reedited by Furnivall 479
Roy, Études sur le théâtre français du xive siècle 635
Salverda De Grave, De franse 1 in het Nederlands 343
Salvioni, Di un récente lavoro sui dialetti di Lugano e di Mendrisio. . 345
— Nomi locali Lombardi 345
— Dell' antico dialetto pavese 345
Sanvisenti, 1 primi influssi di Dante, del Petrarca e del Boccacio suUa
letteratura spagnuola 173
Savj-Lopez, Jaufre Rudel 478
ScHÔNBACH, Ueber Caesarius von Heisterbach, 1 174
Sepet, Le drame religieux au moyen âge 636
Strong and Barnet, Historical reader of french 635
Strong, Catalogue of documents in the library at Wclbeck 637
Stùrzinger, voy. Guillaume de Deguillevillk.
Teichmank, Aachcn in Ph. Mouskets Reimchronik 348
Testaments de rofticialité de Besançon, p. p. Robert 351
Thayer Holbrook, Dante and the animal Kindgdom 638
ToLDO, Études sur le théâtre comique du moyen âge 175
TozER, An english commentary on Dante's Diviua Commedia 351
Troubadours (The) of Dante, by Chaytor 171
Ul.mann, Die Stellung d. relativpronomen 343
Valgimigli, Appunti su la poesia satirica latina medioevale in Italia. . 636
VisiNG, Den ridderiga Kârleken i Medeltidens Litteratur 347
VossLER, Zu den Anfângen d. franzôsischen Novelle 349
644 TABLE DES MATIÈRES
PÉRIODIQUES
Année (L') linguistique, 1 467
Archiv fùr das Studiuni der neuertn Sprachen und Litteraturen Cil, CIII,
CIV, CV, CVI, CVII. 166
Archivio glottologico italiano, XV, 4 161
Bulletin de la Société des anciens textes français, 1902 468
Jahresbericht des Instituts fùr rumanische Sprache, VIII 651
Journal des Savants, 1903. n« 6 468
Moyen-Age (Le), XIII 630
Revue de philologie fran«,aise et de littérature, XV (1901), XVI (1902) 628
Studj di Filologia romanza, IX 465
Studi glottologici italiani, II 165
- — III • 464
Zeitschrift fùr ronianische Philologie. XXVI, 5 460
- XXVI, 6 462
— - XXVII, I . . 626
- XXVII, 2 .' 627
CHRONIQUE
Nécrologie : W. Bosdorf. 632; Bollati de Saint-Pierre, 470; Couraye du
Parc, 168; G. Doncieux, 341 ; A. Gasté, 168; Kirpitchnikof, 469 ; Ch.
Loizeau de Grandmaison, 470; Ul. Robert, 632; Stùrzinger, 470; O.
Zenatti, 632. — Obsèques de G. Paris, et discours prononcr's sur sa tombe,
334. — Nominations : MM. Guarnerio, 169; C. Salvioni, 169; Zingarelli,
169. — Prix La Grange à M. Guesnon, 471. — Hommage à M. Ad. Mussa-
fia, 633. — Congrès historique de Rome, 341. — Société des anciens textes
français, 169, 633. — Publication d'une notice de M. Auvray sur les manu-
scrits de Mgr Desnoyers, 474 ; des iJfrendei du moyeu d^e de G. Paris et
d'un mémoire de G. Paris sur Philippe de Novare, 475 ; du t. XXXVII des
Archives de la Gironde^ 474; du t. II delà Gratnni. hist. de hi Uutgue fnuiçaise
par M. Nyrop, 633 ; du t. IV de la Flore populaire de M. M. Rolland, 342;
d'un article de M. Salvioni sur le type formica for ni i car ^ 475; des Beitrâj^e
^ur romanisclyen n. etij^lischeii Philologie^ 169; d'un index des miracles en
latin de la Vierge, par le P. Poncelet, 170. — .\nnonce d'une revue amé-
ricaine intitulée Modem Philolog\\ 342 ; de la publication des Arts de
rhétorique par M. H. l-anglois, 170. — Explication de quelques-un des
mots « obscurs et rares » signalés par M. Delboulle, 471-2. - Remorques
sur quelques passages des « Recettes médicales en provençal », 472: sur
des chartes franc- comtoises p p. M. J. Gauthier, 169; sur un mémoire
de M. Mat/.ke sur la légende de saint Georges, 170 — Discussion de l'opi-
nion de M. Suchicr sur l'origine de w Monglane » et de « l'rete », 475.
U Propridaire-Gnuut. V^ H. BOUILLON
MACCN, l'RdlAl tRT.RLi, IMPKIMll-HS
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Table des noms propres de toute natore com[ins dans les
chansons de g^te î^^P^î^^^ P^r ^ ^^""J^: V» "
^ in-8. — Couronné pAr i AcAltmie df
ci hALi'hiift\ Prix Jtt Bîm^^ri. — Piix •.,,*. ^C
Roberti Gaguini epistûîc et orattones, ^[^^ f^^f!* i*^ ^''^ ^^'
Précédé d*\wc tîoiice biogr-iphiquc tî suivi de pi,
truiiiiîes» pnr L. Thua&ne, Deu^ Ibfts vol, in-8. — i .v *^ j
Le Frère de Pétrarque et le livre du repos des reHgteuic»
par H. Cociiij; Un voliiaje Ui-tS, — Prix, .......... 6 t>,
Les romans de la Table r^nde, P^ [^ ^'^ <^'«„ ^ ^^^ ^^^
La Bretagne dans les romans d'aventures, F^ [f "^^e. Uoc
. .^^ : — ^^-^ — — - — ^ urocnarc gr. la-^,
^ Prm., ...... - , a fr.
L*évolution du roman français aux environs de nSo,
pdfM. \\'n.\u/nïi, lii-S. — Pnt .. '. . . . . 2 fr^ 50
Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaioêS
et sm les lempcfLUii rter î certaines rè^lc;* de U prosodie trafi*
çabe, pptr r. ni- Uoi^ < ,;îO(:hurc ia-ïé. — Pdx . , 0 ff. SO
Histoire de la conquête romaine de la C^de "^^ '^^ ,^^^* ^*^"
Ji-^ ^ — méc qtti y on? pf\$
patE, par Mf"« V.V'aschidë, Cti voL ^r, in-S, acvom pagrjc d'une cane *—
Pm . , * *- ^ . . .' . - 7 If.
Les officiers royaux des Bailliages et Sénéchaussées ^^
uistkatum\ nion.iKhlqiao locales en France 4 U hn du rnovcu ii^e, pÂT
î\4îi,%dèmk dfs imcriptiofn «t iHlUuUmts, Prtx Gvhtrt* — Pii», . . , 30 ff.
LaVie de Saint- Alexis, fï?:'^:;^^' ' " * '' !*^
CE J'unu uiblc iL"> a>ï*uuAiJce^, par G. ...,.., <iiv.^i.v ^i. i +t^,**^u, 4c
Fraûce. Un vol. ia-i8 lésy^. — rm , t fr. BÙ
P. Corneille et le théâtre espagnol, Pf ^L **'^^«;„^" ^'^j ''"
î\4Lij<îf''tn{i' Jriif}\mit\ Prix Saintour^ — Prix- .-,..,,,..,.,, ^ 8 fr, oO
Le Musée de la conversation, V»^ ^^^cr Auxanou». 4» àâlûoiy
- — -' — - — ^^ — —-- comprenant Ifj *> ' et,
de nombreux iirtidc"s nou\/cjAn. Lu dcuH.iemc éctition .i i le
mt'îitiûti par l'Acjdeniic fraqçmsi* (Concours de Jouv, î^m>> l i iL*ri
Vol. in-8. — Pnx._. ,.,-........ V.. ,,\\.. Ifî Êr.
Dictionnaire savoyard, P^'-'^''^ ^o^* ^^"^ ' '^ ^ Siiciétt' tîtiri-
— ^ — - — ^— »nuiït4ue, p^ A rlN et î. De&uH'-
M^Ji. Un brt sal- i^r. in-*'î. Accompj!^ . i i . ;tee$
fdépanemcnts de la Savôîc et de Li H i Uîc
d^s textes patoù et des trdv,utx vauuf ik it> jj-iit.,^ >.i.j.a,t .
Pm, . , -.,... ,,_. -.., . 10
La vie et l'œuvre du troubadour Raimon de MiravaL ^
ktt^niiUTi: Cl U â^biéti^ mt^rîdiort^ile^ ^ U Tdlic de U gueire «le» Albii^^
pat P. A^«OKACl>, Un vol. gr. in-S. — Prix , 6
Études sur le théâtre français du XIV* et du XV^ siècle^
pûnr il ;■ ""^^
■I,.. fille t:t ! :>-iT
pcT^^noago, par F Hut. Uo fort vol, m-h, — ïhix *-...,. 10 fr*
Ètir- - -"^ ♦- -^^A-- français au XtV' siède. ^ i^^ 'i^ i^
liiMi^o. rubli»ï poïïr Ià prctimirc foif d*i»pré!t k
Je BrsAfiçQn 4*1 ki invsièrcj Sainte-
in^, — Friît.. * ,. \, -. ^ Bit
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